Herve Le Bras’s scientific contributions

La prévision démographique? Une scène de théâtre où l'on joue au futur les peurs irrationnelles d'aujourd'hui. De Vauban aux experts de Princeton en 1944, de Malthus aux chiffres sophistiqués des Nations Unies, l'histoire de cette perspective à long terme est une sourde mélopée de l'erreur. Qu'il faut pourtant prendre au sérieux, comme tous les miroirs. /// In this brief history of long-term demographic forecasts from the 17th century to the present, prediction seems both useless, for it is inaccurate, and essential, as it reveals the concerns of the time. Petty's economic arithmetic, Pearl's logistic laws, Glass's mathematical sophistication witness the refining of the methods. Yet the "Future Population of Europe and the Soviet Union" that a proud Princeton team published in 1944 describes the 1970 European horizon with margins of error exceeding 35%, in spite of the new reliability of statistics. The post-war increase of the birth rate and the magnitude of population movements had not been suspected, because of the American researchers' obsession with the USSR's demographic imperialism: an admission of failure pregnant with lessons.

Une promotion d'élèves d'une grande école française (l'Ecole Polytechnique) a été interrogée sur ses origines familiales et sociales. L'examen des 272 réponses montre plusieurs anomalies. Les comportements démographiques des groupes sociaux d'origine sont inversés. Ainsi, ce sont les parents ouvriers ou employés qui ont les plus petites familles et les âges les plus élevés à la naissance des enfants. La prise en compte de la situation sociale simultanée des deux grands-parents et du père conduit à distinguer des parcours sociaux très typés, de même la différence d'éducation entre le père et la mère, ou l'existence d'un proche parent issu de la même école se révèlent être des variables très sensibles. /// A year's intake of students to the Ecole Polytechnique were questioned about their families and social origin. From the 272 replies received some anomalies emerged. It was found that in this group the social pattern of differential fertility was reversed: workers and white-collar employees had the smallest families and were older when their children were born than parents in other social groups. If the social status of the grand-parents, as well as of the parents, is taken into account, some typical patterns of social mobility emerged. Factors which affected entry to the Polytechnique were differences in the educational level achieved by the father and the mother, and the possession of a relative who had himself been a student of the school. /// Los integrantes de una promoción de alumnos de una gran escuela francesa (La Escuela Politécnica) fueron entrevistados para conocer sus antecedentes familiares y sociales. El análisis de las 272 respuestas muestra varias anomalías. Los comportamientos demográficos de los grupos sociales de orígen aparecen trastrocados. De tal manera que son los padres obreros o empleados, los que tienen familias más pequeñas y edades más altas al nacimiento de sus hijos. Si se toma en cuenta de una manera simultánea la situación social de los dos abuelos y la del padre, se pueden distinguir rasgos sociales típicos. Igualmente la diferencia de nivel educacional entre el padre y la madre o la existencia de un familiar cercano egresado de la misma escuela, resultan ser variables sensibles.

Les fluctuations que l'on observe ou que l'on prédit dans un certain nombre de circonstances démographiques sont, en général, le résultat d'une contrainte imposée à la population. On montre ici que ces situations peuvent presque toujours être exprimées sous forme d'une population stable dont les taux de maternité dépendent de la contrainte. Ainsi, les fluctuations des pyramides d'âge des villes nouvelles, des travailleurs dans des corps fermés, des populations paysannes autorégulées trouvent une explication simple. Les populations dont on fixe la croissance sont une autre variante, et les populations stables elles-mêmes suivent ce modèle car on met en évidence une contrainte à laquelle elles se plient. Ainsi, contraintes et fluctuations sont deux manières parallèles de décrire une même dynamique des populations. /// Fluctuations in populations which are observed or forecast in some circumstances are generally caused by a constraint on the population. It is shown that such situations can almost always be described in terms of a stable population whose fertility rates are subject to the constraint. These fluctuations in the age distribution of populations of new towns, or workers in closed farming populations and which are self-regulating can be described simply. Populations with a fixed rate of growth are another variant, and stable populations themselves are an example of this model, because the constraints to which they are subject are made explicit. Constraints and fluctuations are, therefore, two parallel ways of describing the same dynamic situation. /// Las fluctuaciones que se observan y que se preven en un cierto número de circunstancias demográficas, son en general el resultado de una constricción impuesta a la población. En este artículo se muestra que estas situaciones pueden expresarse casi siempre bajo la forma de una población estable cuyas tasas de maternidad dependen de la condición impuesta. De esta manera las fluctuaciones de las pirámides de edad de las ciudades nuevas, de los trabajadores en entidades cerradas y de las poblaciones campesinas que se autoregulan, encuentran una explicación simple. Otra variante está constituída por las poblaciones a las cuales se les fija el crecimiento. Las poblaciones estables siguen también este modelo ya que se pone en evidencia una condición a la cual se someten. De tal manera que compulsiones y fluctuaciones son dos formas paralelas de describir una misma dinámica de población.

Les auteurs observent deux séries de taux de première nuptialité, par année d'âge (France et Suède, 1972-1980). Ils tentent de trouver, par simulation la loi qui aurait commandé, d'une année sur l'autre ces évolutions. Ils montrent qu'un changement du seul calendrier, comme de la seule intensité, ne peut rendre compte de la dérive des taux. La combinaison de ces deux variables, à son tour, n'aboutit pas à des reconstructions satisfaisantes. Finalement, le modèle qui reproduit au plus près les données observées consiste à décomposer les variables en deux sous-populations: l'une, de moins en moins nombreuse, continuerait à suivre les taux de nuptialité antérieurs à l'inversion de la tendance (1972 pour la France); l'autre, de plus en plus nombreuse adopterait une attitude d'ajournement du mariage, attitude comportant un risque de célibat définitif qui augmenterait avec la durée de l'ajournement. La bonne correspondance obtenue entre les taux reconstruits et les données réelles, comme la simplicité des hypothèses prises en compte, permettent de considérer ce modèle comme un instrument d'analyse fiable. On devrait ainsi considérer comme acquis que les nouvelles générations ont déjà pour une large part, abandonné le type de nuptialité où 95% des jeunes se mariaient. Il est désormais très probable que l'intensité finale des générations féminines 1955-1959 se situera au maximum vers 80%, et vraisemblable qu'elles descendent encore au-dessous de cette valeur. /// Two series of age-specific rates of first marriage are studied (those for France and Sweden between 1972 and 1980). Simulation methods are used in an attempt to find a law which would describe movements in these rates. It is shown that neither changes in the timing of marriage, nor changes in the level of nuptiality, are by themselves sufficient to account for the decline in nuptiality rates, nor does a combination of these two factors provide an adequate explanation. The model which fits the observed rates most closely is obtained when the population is divided into two groups. In the first group, which is steadily decreasing in numbers, marriage patterns remain the same as during the period before the trend began to change (1972 in France). Members of the second group which is increasing in numbers, delay their marriage. The probability that members of this second group will never marry is increasing, and the risk becomes greater the longer the marriage is delayed. The close fit between the model and the observed rates, as well as the simple nature of the hypothesis suggest that the model can be used as a reliable instrument to project nuptiality into the future. It may be concluded that members of the younger generations are unlikely to return to a marriage pattern in which some 95 per cent marry at least once. Indeed, it seems likely that among women born between 1955 and 1959, no more than 80 per cent will ever marry, and this proportion is likely to continue to decrease still further. /// Los autores observan dos series de tasas de nupcialidad en primeras nupcias por año de edad (Francia y Suecia, 1972-1980). Tratan de encontrar, mediante modelos de simulación, la ley que habría presidio su evolución año tras año. Muestran que ni los cambios en la distribución por edad (calendario), ni los cambios en la proporción de mujeres solteras de una generación que logran contraer un primer matrimonio (intensidad), considerados aisladamente no pueden explicar las variaciones aleatorias de las tasass. La combinación de estas dos variables, no logra tampoco permitir reconstrucciones satisfactorias. Finalmente el modelo que mejor reproduce los datos observados, se obtiene descomponiendo las variables en dos sub-poblaciones: la primera, cada vez menos numerosa, sigue practicando las mismas tasas de nupcialidad anteriores al año de inversión de la tendencia (1972 en Francia); la segunda, cada vez más numerosa, adopta una actitud de postergación del matrimonio, actitud que implica el riesgo de no contraer matrimonio en forma definitiva mientras más largo sea el período de postergación. Este modelo se considera satisfactorio por la buena correspondencia entre tasas simuladas y observadas y por la simplicidad de las hipótesis formuladas. Se puede entonces considerar como un hecho que las nuevas generaciones han ya abandonado en su mayor parte el tipo de nupcialidad en que el 95% de los jóvenes contraían primeras nupcias. Es muy probable que desde hoy en adelante la intensidad final de la nupcialidad femenina, de las generaciones nacidas entre 1955 y 1959, se situe en un 80% como máximo y que incluso tienda a descender a una proporción aún más baja.

L'interférence des phénomènes démographiques peut être traitée de deux manières différentes. Soit en postulant l'indifférence des deux phénomènes, soit en adoptant la méthode markovienne de multiple extinction. En examinant les mérites relatifs de ces deux méthodes, on s'aperçoit qu'elles donnent des résultats très voisins, mais on remarque aussi qu'elles reposent sur des hypothèses très contraignantes: l'indépendance et une quasi-indifférence. En examinant alors comment les résultats se modifient, lorsqu'on s'écarte de ces hypothèses, on met en évidence leur grande sensibilité; les notions d'indifférence et d'indépendance gardent toutefois leur intérêt en facilitant un quadrillage de l'ensemble des cas possibles. /// Interference in demographic phenomena can be dealt with in two different ways, either by assuming the indifference of the two phenomena or by adopting the Markovian method of multiple decrement. An examination of the relative merits of these two methods shows that they give very similar results but they are founded on very restrictive hypotheses: independence and virtual indifference. When the assumptions are dropped, it is clear that the results are very sensitive to them, but the notions of indifference and independence remain relevant by making it possible to study all possible cases. /// La interferencia de los fenómenos demográficos puede ser tratada de dos maneras diferentes. Ya sea postulando la indiferencia de los dos fenómenos o adoptando el método de Markov de extinción múltiple. Al examinar las ventajas relativas de los dos métodos, puede notarse que proporcionan resultados muy parecidos, pero hay que notar también que las hipótesis en las cuales están basados son muy restrictivas: la independencia y una quasi-indiferencia. Si se examina enseguida la forma en que los resultados se modifican al apartarse de esas hipótesis se pone en evidencia su gran sensibilidad, las nociones de indiferencia y de independencia conservan sin embargo su interés ya que permiten un control del conjunto de casos posibles.

La première table de mortalité correcte a été établie en France par Deparcieux qui utilisa à cet effet le registre des Bénédictins de Saint-Maur (ou matricule) en 1746. On reprend ici le travail de Deparcieux pour la matricule complète et l'on calcule les tables de mortalité et les espérances de vie des Bénédictins au XVIIe et au XVIIIe siècles. Cette mortalité est très particulière lorsqu'on la compare aux tables de l'époque: elle se caractérise par une sous-mortalité des adultes et une surmortalité des vieillards. On montre qu'il ne peut s'agir là d'un biais des tables de l'époque mais qu'il faut y voir un trait spécifique de la mortalité des Bénédictins et de tous les religieux de l'époque: à partir de 50 ou 60 ans ils ne se défendaient plus contre la mort, tandis que plus jeunes ils jouissaient de meilleures conditions de vie. /// The first correct life table in France was constructed by Deparcieux who used the register (or roll) of the Benedictine monks of Saint-Maur in 1746. We have checked Deparcieux's work against the complete register and have calculated tables of mortality and life expectancies for the Benedictine monks during the 17th and 18th centuries. This mortality differs from that shown in other contemporary tables: it is characterized by lower mortality of adults and excess mortality of old men. It is demonstrated in the paper that this difference cannot have been caused by bias in the contemporary tables, but that it must have been due to specific factors in the mortality of the Benedictines and all monks of that period: from the age of 50 or 60 onwards they could no longer defend themselves against death whereas they enjoyed better living conditions when they were younger. /// La primera tabla de mortalidad correcta fue calculada en Francia por Deparcieux, quien utilizó para este objeto el registro (o matricula) de los Benedictinos en 1746. Se retoma aquí el trabajo de Deparcieux, pero en este caso se utiliza el registro completo y se calculan tablas de mortalidad y esperanzas de vida de los Benedictinos en los siglos XVII y XVIII. Esta mortalidad es muy particular cuando se la compara con las tablas de la época y se caracteriza por una mortalidad más baja en la edad adulta y por una sobre mortalidad en la vejez. Se muestra que no se puede tratar de un error de las tablas de la época, sino que es preciso ver en ellas un rasgo específico de la mortalidad de los Benedictinos y de todos los religiosos de la época: desde los 50 o 60 años ya no resistían los efectos de la edad, mientras que cuando jóvenes gozaban de mejores condiciones de vida.

Interference in demographic phenomennaa can be dealt with in two different ways, either by assuming the indifference of the two phenomena or by adopting the Markovian method of multiple decrement. An examination of the relative merits of these two methods shows that they give very similar results but they are founded on very restrictive hypotheses: independence and virtual indifference, and the results are very sensitive to them. - from Authors