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LES DETERMINANTS DE L’OFFRE
VOLONTAIRE D’INFORMATION SUR LE
CAPITAL IMMATERIEL : UNE ANALYSE DE
CONTENU DES RAPPORTS ANNUELS DES
GRANDES FIRMES FRANÇAISES
Inès KATEB
Doctorante en comptabilité
ISCAE & Université de Paris Est
E-mail: ines_kateb@yahoo.fr
Hamadi MATOUSSI
Professeur à l’ISCAE
E-mail: hamadi.matoussi@iscae.rnu.tn
Ahmed BOUNFOUR
Professeur à Université de Paris Sud
E-mail: ahmed.bounfour@u-psud.fr
Résumé :
Le présent papier analyse les caractéristiques et les
facteurs explicatifs de la divulgation volontaire
d’informations sur le capital immatériel, sur un
échantillon d’entreprises françaises appartenant à
l’indice SBF120 et observées en 2006/2005.
En utilisant la méthode d’analyse de contenu, l’étude a
montré que les firmes privilégient la forme narrative et
descriptive et publient plus d’informations sur le
capital structurel et capital relationnel. Les résultats
ont montré que la proportion du capital détenue par les
dirigeants, l’âge de la firme, le statut de cotation et la
pression des employés sont les déterminants de la
divulgation volontaire d’informations sur le capital
immatériel. Ainsi, la divulgation volontaire sur les
incorporels est motivée par les arguments de l’utilité
financière (réduction des coûts d’agence) et la
légitimité.
Mots clefs :
Divulgation, immatériel, utilité financière,
légitimation
Abstract:
This article analyzes the characteristics and
determinants of voluntary intellectual capital
disclosure, on a sample of French companies
belonging to the SBF120 index and observed in
2006/2005.
Using content analysis, the study found that French
firms prefer narrative and descriptive information
form and publish more on structural and relational
capital than human capital.
The paper confirmed that financial usefulness and
legitimacy are the reasons for voluntary intellectual
capital disclosure. In fact, results showed that
managers publish more information to reduce agency
costs. Moreover, the study showed that firm’s age,
listing status and employees’ pressure are
determinants of intellectual capital disclosures.
Keys words:
Disclosure, intellectual, financial usefulness,
legitimacy.
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halshs-00459359, version 1 - 23 Feb 2010
Manuscrit auteur, publié dans "La place de la dimension européenne dans la Comptabilité Contrôle Audit, Strasbourg : France
(2009)"
INTRODUCTION
Nous sommes aujourd’hui dans une société post- industrielle qui se détache de ses anciennes
attaches tayloriennes. La vraie valeur d’une entreprise ne vient plus de son intensité
capitalistique, mais résulte de sa capacité à combiner et optimiser des actifs immatériels
(formation, compétences, clients, marques,…) et à s’adapter à un environnement de plus en
plus complexe (politique, social, économique,…). L’activité économique est de plus en plus
immatérielle : les activités de service contribuent à plus de 70 % des PIB des économies
complexes (Bounfour, 2000). 75% à 95 % de la masse salariale des entreprises est désormais
consacrée à l’investissement en intelligence (recherche, informatique, ingénierie, formation).
Les entreprises prennent progressivement conscience que la compétence des hommes et
l'organisation du travail sont des facteurs déterminants de la croissance et la création de
valeur.
La communication financière constitue un aspect crucial et déterminant dans la vie d’une
firme ; elle donne le reflet des activités, des stratégies et de l’évolution de celle-ci. De ce fait,
le contenu du rapport annuel -l’outil privilégié de la stratégie de communication financière en
raison de la multiplicité de ces utilisateurs- intègre des thèmes spécifiques tels que
l’innovation, le savoir faire, les compétences, les clients, les processus, les logiciels, les
procédures,… Canibano et Sanchez (2003) remarquent que ces dernières années les firmes
dépassent la publication des seules informations comptables obligatoires en choisissant de
mettre en avant certains thèmes plutôt que d’autres : elles ont augmenté le volume de
l’information sur leur capital immatériel.
Certaines études ont confirmé un lien positif entre l’offre volontaire d’information sur le
capital immatériel et la valeur marchande des firmes. Dans une étude consacrée à l’industrie
pharmaceutique, Lev (2002) a montré que l’autorisation de mise sur le marché d’un produit
par la Food and Drug Administration des États-Unis fait accroitre, en moyenne, la valeur
boursière de 0,5%. Par ailleurs, cette augmentation passe à 1,1 % et à 2% lorsque l’annonce
est accompagnée respectivement d’informations qualitatives et quantitatives. Cependant, le
champ de la valeur s’élargie au-delà de la valeur financière. Certes, on s’intéresse à créer de la
valeur pour l’entreprise, mais quel est le coût pour la communauté (environnement), quel est
le coût pour ceux qui produisent directement cette valeur (social) ? Le concept de valeur
actionnariale apparaît trop restreint. L’intérêt de l’actionnaire n’exprime pas à lui seul l’intérêt
de la société. Le gouvernement des entreprises ne consiste pas à gérer avec pour seul horizon
le profit des actionnaires mais à optimiser en permanence les intérêts des différentes parties
prenantes qui fournissent à ces firmes les ressources nécessaires à leur survie et à leur
développement (compétences, savoir, formation,…). Ainsi la diffusion volontaire
d’informations sur le capital immatériel peut être un engagement de l’entreprise dans un
comportement de responsabilité sociétale.
De ce fait, l’objectif de cette étude est d’analyser la nature, l’ampleur et les caractéristiques de
l’information divulguée sur le capital immatériel, d’une part et d’identifier les facteurs
explicatifs de l’offre volontaire de ce type d’informations en procédant à une analyse de
contenu des rapports annuels relatifs à l’année 2006 des firmes françaises appartenant à
l’indice SBF120.
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Pour ce faire, ce papier est organisé comme suit : une première section est vouée aux
fondements théoriques de la problématique. Une deuxième section développe les hypothèses
et la méthodologie de recherche, notamment la méthode de l’analyse de contenu. La dernière
section est consacrée à la présentation et l’interprétation des résultats obtenus.
1. REVUE DE LA LITTERATURE
1.1. Le capital immatériel et la comptabilité
L’investissement immatériel constitue une part grandissante de l’investissement total de
l’entreprise. Son émergence est un indicateur important du changement des systèmes
productifs traditionnels vers l’incorporation de plus de connaissances, de savoir et
d’informations dans les processus de production de valeur. Toutefois, il n’existe pas une
définition précise et communément admise de l’investissement immatériel en raison de
l’hétérogénéité des domaines touchés et de l’absence d’un cadre conceptuel (références
normatives ou techniques) clairement défini concernant cette notion.
En tant que processus d’élaboration et de traitement de l’information, la comptabilité
financière offre à ses utilisateurs un cadre cohérent, pour apprécier les performances et la
situation d’une entreprise ou d’un groupe de sociétés, et pour aider à la prise de décision
(Casta, 1997a (cité par Depoers, 1999). La comptabilité se situe ainsi au sommet des
instruments de gestion touchés par l’immatériel. Néanmoins, la conception actuelle des
immatériels s’éloigne des éléments réellement identifiables d’un point de vue comptable pour
englober des avantages concurrentiels développés et utilisés par l’entreprise. Leymarie
(2001) affirme qu'il y a un retard dans les pratiques de comptabilisation des investissements
immatériels bien que les entreprises consacrent une part de plus en plus croissante de leurs
investissements dans des activités immatérielles, ce qui entraîne plusieurs effets pervers : les
bilans financiers sont faussés par les lacunes de comptabilisation des actifs incorporels, tels
que la compétence et l'expérience (Triolaire, 1994). L'information sur le capital immatériel
n'est donc pas exclusivement une information comptable. Collins et al. (1997) confirment que
la comptabilité n'a pas, elle, eu le temps d'évoluer. Elle se contente à l'heure actuelle, de faire
passer en charges des sommes de plus en plus importantes d’investissements immatériels,
dont les effets apparaissent durables, mais auxquelles ne correspondent ni droits de propriété,
ni garanties juridiques et dont l'existence n'est pas avérée par un caractère tangible
(Boisselier, 1999). L’OCDE1 (2006) confirme qu’une part substantielle des actifs des
entreprises n’est déclarée que partiellement dans les états financiers. Du fait de l’absence
relative de reconnaissance comptable des actifs immatériels et de leur importance croissante
dans le processus de création de valeur, les états financiers ont perdu une partie de leur valeur
aux yeux des actionnaires. Si d’autres informations ne viennent combler ce vide, on pourrait
assister à une mauvaise affectation des ressources sur les marchés financiers.
Les dirigeants d’entreprises européennes, enquêtés par le cabinet Mazars Guérard, sont
également convaincus de l’importance stratégique de la problématique de l’immatériel : 80%
à 90% des dirigeants interrogés estiment qu’une communication externe d’informations sur le
capital immatériel est un facteur permettant d’accroitre la valeur de l’entreprise.
1 L’Organisation de Coopération et de Développement Économiques
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L’OCDE (2006) stipule qu’il est important de « …fournir au marché des informations
suffisantes et pertinentes sur le capital immatériel », afin d’améliorer les décisions des
investisseurs et d’exercer «un effet de discipline sur les dirigeants de l’entreprise et son
conseil d’administration». Ainsi, des efforts importants sont donc nécessaires pour améliorer
le reporting et la compréhension de l’impact des immatériels sur la performance, tant au
niveau des firmes qu’au niveau international."
1.2. La divulgation volontaire d’informations sur le capital immatériel
Les investisseurs ont besoin d’une information complète et pertinente sur les facteurs de
création de valeur afin de mieux évaluer la capacité de la firme à enregistrer de bonnes
performances. Ils peuvent accéder à ces informations auprès du marché ou directement dans
les rapports publiés par l’entreprise. Pour aider les investisseurs à bien juger les stratégies
adoptées et leur potentiel de réussite, plusieurs lignes directrices en vue de faciliter une
divulgation d’informations significatives, qualitatives et prospectives sur les facteurs de
création de valeur de l’entreprise, les tendances, les risques et les incertitudes ont été
formulées. Plusieurs modèles ont été proposés ces dernières années pour inciter les entreprises
à faire état d’évolutions intervenues dans le domaine des actifs intellectuels. La première
vague de modèles de communication tournait autour du scorecard qui permet aux entreprises
de communiquer une plus grande variété d’informations liées aux différentes composantes de
leur capital intellectuel. Parmi eux, les plus connus sont Skandia Navigator (Edvinsson et
Malone, 1994), Balanced Scorecard (Kaplan et Norton, 1992, 1996) et Intangible Assets
Monitor (Sveiby, 1997). La deuxième vague a été caractérisée par la tentative de relier le
capital intellectuel de manière plus explicite à l’innovation et au processus de création de
valeur par le biais de modèles comme le Value Chain Scoreboard (Lev, 2001) qui suppose
de trouver les gains attribuables aux actifs du « capital connaissance » et d’appliquer un
coefficient (a discount rate) pour déterminer la valeur de ces actifs. L’intérêt de ce modèle est
qu’il puisse être reconnu par le marché puisque quantifié, normalisable et normalisé. La
troisième vague de modèles présente le capital immatériel : sa constitution, son
évolution…En effet, les travaux de l’Agence Danoise pour le Commerce et l’Industrie
(DATI, 2003) ou de Meritum (2002) sont plus descriptifs. La DATI (2003) suppose que les
états du capital intellectuel sont constitués de quatre éléments : un descriptif de la
connaissance, des problématiques de gestion de la connaissance, des initiatives entreprises et
des indicateurs sélectionnés. L’objectif recherché par le Meritum (2002) est d’améliorer la
gestion du capital intellectuel et de favoriser la publication d’informations sur le sujet. Le
capital intellectuel est identifié grâce à une présentation de l’entreprise, un résumé des
activités et ressources incorporelles et un système d’indicateurs.
1.2.1. La divulgation volontaire s’information sur le capital immatériel et la
maximisation de la valeur financière de la firme
Selon une approche actionnariale, les fondements théoriques des facteurs influençant le
niveau de divulgation d’informations sur le capital immatériel trouvent leur origine dans les
théories d’agence et des signaux, qui se basent toutes les deux sur l’hypothèse de l’asymétrie
informationnelle entre le marché financier et les dirigeants des entreprises. La littérature
économique et financière postule que l’asymétrie informationnelle entraîne des phénomènes
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(« risque moral » et« anti-sélection ») susceptibles de gêner le fonctionnement des marchés
financiers et augmenter le coût de financement des firmes souffrant de cette inégalité
informationnelle. Bien que les deux théories aient la même hypothèse de base, elles attribuent
à l’information comptable deux aspects différents un aspect contractuel, selon lequel,
l’information sert à contrôler les contrats externe et interne à l’entreprise et un aspect
prédictif, stipulant que l’information permet aux investisseurs d’améliorer leurs prévisions sur
l’avenir de la firme (Dumontier, 1989).
- L’aspect contractuel de l’information sur le capital immatériel
La théorie d'agence stipule que l'entreprise est un "nœud" de contrats formels et informels,
conclus entre les différentes parties prenantes cherchant, chacune de son coté, à maximiser
son bien être d'une façon égoïste. Ces contrats vont générer, dans un contexte d’asymétrie
d’information, des stratégies d’opportunisme et des transferts de richesse. De ce fait, les
dirigeants seront incités à utiliser des mécanismes de dédouanement qui leur permettent de
réduire l’asymétrie d’information et de montrer aux actionnaires qu’ils respectent les
engagements contractuels. L’offre volontaire d’information, non exigée par la réglementation,
est considérée comme l’un de ces mécanismes de dédouanement.
Dans la relation contractuelle qui oppose les créanciers aux actionnaires, Depoers (1999)
postule que les créanciers et les investisseurs externes considèrent que l’information, contenue
dans des états financiers bien détaillés, peut être un moyen de surveiller le dirigeant.
L’auteure ajoute que le marché financier joue un rôle ex post important dans la mesure où il
incite le dirigeant à montrer sa révérence en donnant aux créanciers les moyens d’évaluer les
conditions des contrats d’endettement. Meek et al (1995) envisagent que les firmes fortement
endettées optent pour une politique de communication extensive afin de réduire les coûts
d’agence associés à la dette. Holmström (1979) postule que toute information supplémentaire
sur le comportement de l’agent ou sur l’état de la nature permet d’améliorer la richesse des
contractants. Cette information additionnelle peut également conditionner la réalisation de
futurs contrats (Lev, 1992). Dans ce sens, Saada (1994) affirme que la publication volontaire
d'information constitue un moyen efficace susceptible de minimiser les coûts générés par les
conflits d'agence et supportés définitivement par les dirigeants et les actionnaires. Depoers
(2000) a confirmé que l'effet positif qu'entraîne la réduction envisagée des coûts d'agence sur
les performances de l'entreprise constituerait un incitatif pour les dirigeants à publier de
l'information. Par conséquent, la divulgation volontaire d’information sur le capital
immatériel permet, comme toute information supplémentaire, au dirigeant de montrer son
autodiscipline vis-à-vis ses créanciers et de maximiser la valeur de la firme en réduisant les
coûts d’agence et l’asymétrie informationnelle.
- L’aspect prédictif de l’information sur le capital immatériel
La théorie des signaux postule que si les dirigeants des firmes les plus performantes ne
divulguent pas toutes les informations privées qu’ils disposent, les investisseurs jugent la
qualité des produits financiers (actions, obligations,…) offerts par ces firmes en fonction de la
qualité moyenne : effet d'anti-sélection, selon lequel la mauvaise qualité chasse la bonne.
Le phénomène d’anti-sélection stimule les dirigeants à signaler la qualité de leur firme aux
investisseurs qui cherchent à juger convenablement la valeur des produits proposés. Toute
décision financière ne doit pas être prise en fonction des seuls critères financiers. En effet, les
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dirigeants doivent se préoccuper également de convaincre les marchés que c’est une bonne
décision. D’où la nécessité d’une politique de communication pouvant aider à une meilleure
valorisation des titres dans la mesure où elle permet de diminuer l'incertitude liée aux cash-
flows futurs, améliorer la décision des investisseurs et d’accaparer les capitaux disponibles
sur le marché.
Alcouffe et Louzzani (2003) ont confirmé que les analystes financiers et les banquiers
estiment que la communication sur le capital immatériel permet d'accroître la valeur des
entreprises. Les analystes, quand à eux, considèrent que la mise en place et la publication
d'indicateurs stables et fiables sur les actifs incorporels permettraient au marché de valoriser
la face cachée des entreprises. Dans une étude de Garcia Meca et al. (2002) réalisée sur un
échantillon d’entreprises espagnoles, les auteurs ont trouvé que les firmes les plus
performantes, c'est-à-dire ayant une rentabilité des capitaux propres plus élevée offrent
volontairement plus d’informations sur leur capital immatériel. En revanche, dans une étude
longitudinale réalisée par Williams (2001) sur un échantillon d’entreprises britanniques
observées sur 5 ans (1996-2000), l’auteur a trouvé que la performance des firmes appréhendée
par la rentabilité des actifs n’est pas un facteur déterminant de l’offre volontaire d’information
sur le capital immatériel. Le coefficient associé à cette variable est positif pour la 2ème, 3ème
et 5ème année et négatif pour les autres années. Williams et Firer (2003) ont trouvé que la
performance des firmes (mesurée par la rentabilité des capitaux propres) est un facteur
explicatif de l’offre d’information sur le capital immatériel au sein des firmes
Singapouriennes (avec un signe contraire à la théorie).
1.2.2. la divulgation volontaire d’information sur le capital immatériel et la
maximisation de la valeur sociale de la firme
Selon une approche partenariale, les entreprises performantes ont comme « première
caractéristique » d’investir durablement dans leur clients, leurs hommes, leurs produits, leurs
métiers… La performance, ne peut donc plus se juger selon la seule perspective financière. La
divulgation volontaire de l’information sur le capital immatériel peut être considérée comme
un moyen permettant à l’entreprise de légitimer et négocier auprès de la société la poursuite
de ses activités lorsqu’elle perçoit un décalage entre ses actions et les normes de
comportement définies par le système social et ce afin d’assurer sa survie à long terme. Cet
argument, peut être éclairé par le développement de la notion de responsabilité sociétale.
- La notion de responsabilité sociétale
Etre responsable, c'est simplement assumer les conséquences de ses actes et accepter d'en
rendre compte et d'en répondre. Carroll (1999), souligne que la signification du concept a
sensiblement évolué dans le temps. La responsabilité sociétale n’est pas nouvelle. Depuis
longtemps déjà, les chercheurs ont considéré le rôle des entreprises, parmi d’autres, comme
contribuant au développement des communautés dans lesquelles elles opèrent.
Mc Guire (1963) confirme que l’idée de responsabilité sociétale suppose que l’entreprise n’a
pas seulement des obligations légales ou économiques, mais qu’elle a aussi des
responsabilités envers la société qui vont au-delà de ces obligations. Mercier (1999) avance
que le concept de responsabilité oscille entre deux extrêmes : l'un réduit la responsabilité de
l'entreprise à l'obtention du profit pour les seuls actionnaires et l'autre l’étend à la satisfaction
des attentes de toutes ses parties prenantes. Cela signifie que la responsabilité de l’entreprise
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ne se limite pas à ses actionnaires et à ses administrateurs, mais qu’elle s’étend à d’autres
parties directement ou indirectement associées à l’entreprise, tels que les travailleurs, les
fournisseurs, les clients, les consommateurs, la communauté locale d’entrepreneurs, les
associations environnementales…
Les entreprises font partie intégrante de la société. Elles ne constituent pas des entités isolées
mais influencent de nombreux groupes et individus et en subissent à leur tour l’influence. Une
entreprise ne pourra pas être performante sur les plans économique, social et environnemental
si elle ne connaît pas les besoins et les attentes de la société qui l’entoure. Elle est tenue
d’élargir son champ d’action et d’instaurer ou de renforcer ses relations de confiance avec ses
parties prenantes. De ce fait, la concertation et le dialogue avec les parties prenantes
constituent, dès lors, un élément essentiel de la définition de la responsabilité sociétale.
- La théorie de la légitimité et la théorie des parties prenantes : les
références incontournables de la responsabilité sociétale
La théorie de la légitimité stipule qu’il existe un « contrat social » qui contraint les
entreprises à opérer en accord avec les valeurs et les règles acceptées par la société dans
laquelle elle s’inscrit et donc à «justifier» son action par des « discours » adressés aux
composantes pertinentes de cette société (Hogner, 1982 ; Lindblom, 1994). Ainsi, les
dirigeants doivent mettre en œuvre des stratégies d’images et de conformité symbolique ou
effective avec ces valeurs afin d’assurer la légitimité de l’entreprise. Dans ce cadre, la
diffusion d’informations sur le capital immatériel peut être un moyen de dialogue et un
processus de légitimation permettant à la firme de légitimer ses actions et se conformer à la
« norme ».
La théorie des parties prenantes (stakeholders) énonce que l’entreprise est inscrite au cœur
d’un ensemble de relations avec des partenaires qui ne sont plus uniquement les actionnaires
(shareholders), mais des acteurs de nature très diverses, susceptibles d’être influencés par son
activité ou de l’influencer. Pour assurer sa survie et son développement, l’organisation doit
tenir compte de l’existence de ces acteurs, les identifier et ajuster ses actions à leurs
demandes. Elle doit leur montrer qu’elle intègre leurs attentes dans l’élaboration de sa
politique générale et ce en leur communiquant sur ses objectifs, ses actions entreprises et ses
résultats.
La revue de la littérature permet de classifier les études antérieures traitant l’offre volontaire
d’information sociale et environnementale en deux perspectives théoriques différentes:
- Des études fondées sur les théories néo-institutionnaliste qui définissent la divulgation
comme étant une réponse stratégique aux processus institutionnels (législation, normes
sectorielles, pressions de certains groupes ou analystes d’information, etc.) pour des fins de
légitimation. Les recherches de Cowen (1987), Patten (1990, 1991 et 1992) et Deegan (1996
et 2002) sont très typiques de cette catégorie. Elles ont surtout analysé comment les
entreprises imitent les leaders de leur industrie respective dans leur stratégie de divulgation
afin de conserver ou protéger leur légitimité.
- Des travaux fondés sur les théories des parties prenantes qui font de la divulgation une
reddition de compte aux parties prenantes et à la société. C’est surtout l’auteur Gray (1988,
1995) qui a promu ces concepts de reddition et de contrat social. Cette vision peut être
facilement associée à la représentation de l’organisation comme un réseau d’accords ou de
partenariats caractérisé par un ensemble de processus relationnels (versus transaction
économique seulement) (Brummer, 1991). Suivant cette conception, la responsabilité sociale
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consiste, selon Brummer, non seulement en la responsabilité fiduciaire (loyauté) envers le
principal, mais aussi en la protection des intérêts de toutes les parties prenantes avec
lesquelles la corporation a conclu des accords volontaires.
En résumé, un comportement socialement responsable permet à l’entreprise une amélioration
de la loyauté et la fidélisation de sa clientèle, une plus grande mobilisation du personnel, une
implication plus forte des salariés, un renforcement de l’ancrage territorial, une bonne
réputation,… Une meilleure RSE crée de la valeur immatérielle pour l’entreprise.
2. HYPOTHESES ET METHODOLOGIE DE L’ETUDE
2.1. Formulation des hypothèses
Les développements théoriques précédents postulent que la divulgation d’information sur le
capital immatériel est motivée par deux arguments. Le premier argument est celui de l’utilité
financière selon lequel les dirigeants préfèrent divulguer des informations non obligatoires sur
les incorporels afin de minimiser certains coûts d’agence, signaler au marché la qualité de leur
firme et par conséquent, maximiser leur richesse et celle des propriétaires. Le second
argument fait de la divulgation d’information sur le capital immatériel un processus de
légitimation à travers lequel les managers cherchent à légitimer leurs actions et à répondre aux
attentes des différentes parties prenantes. De ce fait, un ensemble d’hypothèses mérite d’être
vérifié :
Hypothèse 1 : Les entreprises dont la proportion du capital détenue par les dirigeants est
faible offrent volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les autres.
Hypothèse 2 : Les grandes entreprises offrent volontairement plus d’information sur le
capital immatériel que les autres.
Hypothèse 3 : Les entreprises les plus endettées offrent volontairement plus d’information sur
le capital immatériel que les autres.
Hypothèse 4 : Les entreprises les plus performantes offrent volontairement plus
d’information sur le capital immatériel que les autres dans le but de signaler au marché leur
qualité.
Hypothèse 5 : Les entreprises les plus jeunes offrent volontairement plus d’information sur le
capital immatériel que les autres.
Hypothèse 6 : Les entreprises cotées simultanément sur les marchés français et américain
offrent volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les autres.
Hypothèse 7 : Les entreprises dont la pression des parties prenantes est élevée offrent
volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les autres.
Hypothèse 8 : Les entreprises qui appartiennent à un secteur de haute technologie offrent
volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les autres.
2.2. Echantillon et période de l’étude
L’étude a été réalisée sur un échantillon de grandes firmes françaises composant l’indice SBF
120. Le choix des entreprises ayant une capitalisation boursière trés élevée est motivé
principalement par l’importance des éléments immatériels qui ne figurent pas dans les états
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financiers mais qui sont valorisés par le marché financier et incorporés dans leur valeur
boursière. De plus, pour être incluse dans l’échantillon, il faut que la firme évoque le capital
immatériel et ses composantes dans son rapport annuel.
Une grande sélection de secteurs d’activités a été opérée afin d’éviter des effets de corrélation
spécifique à un secteur particulier. Les secteurs qui ont été retenus ont une part importante de
leur activité qui dépend des éléments incorporels. Par exemple, les secteurs de haute
technologie (l’industrie pharmaceutique, aéronautique, chimique, informatique,…) engagent
d’importantes dépenses de R&D. Les marques ont une place importante dans l’industrie de la
parfumerie. Les logiciels, achetés ou développés en interne ont une place importante dans les
sociétés de services en Ingénierie Informatique.
Tableau 1 : la répartition des firmes de l’échantillon entre les différents secteurs
Secteur d’activité Nombre de sociétés % dans l’échantillon
Aérospatial et défense 2 6.66%
Automobile et équipementiers 2 6.66%
Biens de consommation 1 3.33%
Chimie, pharmacie et santé 5 16.66%
Construction et matériaux de construction 1 3.33%
Distribution 2 6.66%
Équipements électriques et électroniques 6 20%
Loisirs et hôtellerie 3 10%
Médias et divertissements 1 3.33%
Energie, pétrole et gaz 2 6.66%
Services 2 6.66%
Informatique et télécommunications 3 10%
Total 30 100%
La période de l’étude se réfère au dernier exercice comptable disponible. Les rapports annuels
les plus récents concernent pour la plupart l’année 2006. L’examen du niveau de divulgation
volontaire sur le capital immatériel s’est basé sur l’analyse d’une seule année (Ding et
Stolowy, 2002 ; Gandia, 2003). Ce choix est justifié par la stabilité de la politique de
communication des sociétés dans le temps, mise en évidence dans plusieurs recherches
(Gibbins et al, 1990 ; Healy et al. 1995 ; Botosan, 1997).
2.3. Variables et instruments de mesure
2.3.1. La variable dépendante : le niveau de la divulgation d’information sur le CI
La mesure de l’étendu de l’offre volontaire d’information sur le capital immatériel repose sur
une analyse de contenu, l’une des méthodes de recherche les plus communément utilisées
dans l’examen de la divulgation volontaire d’information sur le capital immatériel (Guthrie
et al. 2004 ; Guthrie et Petty, 2000 ; April et al, 2003).
Guthrie et al (2004) ont confirmé que c’est une méthode empiriquement validée et implique
le codage d’informations qualitatives et quantitatives dans des catégories prédéfinies (la
catégorisation) et le choix de l’unité de mesure appropriée.
* La catégorisation : les catégories ayant servies à la classification des informations
contenues dans les rapports annuels sont celles développées par Guthrie et Petty (2000) qui
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se sont inspirés des travaux de Svieby (1997) qui classait le capital immatériel en capital
structurel2, relationnel3 et humain4. Les auteurs ont élaboré une liste composée de 24 items.
Cependant, une première lecture des rapports annuels des firmes sélectionnées a conduit à
l’introduction de six items afin d’adapter la liste à la nature de l’information divulguée et de
satisfaire à une condition fondamentale des catégories qui est leur exhaustivité5. Pour ceci, les
items suivants ont été intégrés : « innovation » et « R&D » au niveau du capital structurel,
« responsabilité sociétale » au niveau du capital relationnel et « satisfaction du personnel »,
« politique de recrutement » et « système de rémunération » au niveau du capital humain.
Tableau 2 : La liste des items de l’étude
Capital interne (structurel) Capital externe (relationnel) Capital humain
Propriété intellectuelle 11- Marques 22- Savoir-faire
1- Brevets d'invention 12- Clients 23- Formation/éducation
2- Droits d’auteurs 13- Fidélité des clients 24-Qualifications professionnelles
3- Marques de fabrique 14- Canaux de distribution 25- Connaissances professionnelles
4- Innovation 15- Noms de compagnies 26- Compétences professionnelles
5- R&D 16- Partenariats 27- Esprit d'entreprise
6- Philosophie managériale 17- Contrats de licences 28- Satisfaction du personnel
7- Culture d'entreprise 18- Contrats favorables 29- Politique de recrutement
8- Processus de management 19- Contrats de franchise 30- Système de rémunération
9- Systèmes d'information 20- Relations financières
10- Systèmes en réseaux 21- Responsabilité sociétale
* L’unité d’analyse : Milne et Adler (1999) remarquent qu’il y a une grande confusion dans
la littérature en ce qui concerne l’unité d’analyse. La confusion se rapporte à ce qui devrait
constituer la base de codage (basis for coding) avec ce qui devrait constituer la base de
mesure ou de comptage (basis for measuring or counting) du niveau de divulgation.
Holsti (1969) décrit l’unité de mesure comme étant « le segment spécifique de contenu qui est
caractérisé par son affectation à une catégorie donnée »6. L’auteur ajoute qu’il est
impossible de classer l’unité de mesure dans une catégorie, sans se référer au contexte dans
lequel elle apparaît. Par conséquent, il affirme la nécessité de choisir une unité de
classification ou de codage (context unit) et la décrit comme étant « un corps de texte
permettant de caractériser une unité de mesure »7.
2Le «capital structurel» désigne tout ce qui reste dans l’entreprise «une fois que le personnel quitte les locaux le
soir» (OCDE, 2006) et exprime la capacité de l’entreprise à créer de la valeur et à la pérenniser au travers de son
capital processus et de son capital renouvellement et développement du business. Il comprend les usages,
procédures, systèmes, cultures et bases de données de l'entreprise, les brevets, les droits légaux, la propriété
intellectuelle et les secrets commerciaux etc.
3 Le terme «capital relationnel» représente les actifs/ressources extérieurs aux quatre murs de l’entreprise. Il
regroupe tout ce qui relie l’organisation à son environnement. Il s’agit de toutes les relations externes à
l’entreprise telles que les relations clients, les relations fournisseurs, les investisseurs, les communautés, les
réseaux, les régulateurs etc.
4 Le capital humain désigne le savoir, les compétences et le savoir-faire que les employés « emmènent avec eux
lorsqu'ils quittent les locaux le soir ». Parmi les exemples figurent la créativité, le savoir-faire, l'expérience
professionnelle, la capacité à travailler en équipe, la flexibilité des employés, la tolérance à l'ambiguïté, la
motivation, la satisfaction, la capacité d'apprentissage, la fidélité, la formation institutionnelle et les études
(OCDE, 2006).
5Les catégories doivent remplir plusieurs conditions techniques (Grawitz, 1993) : elles doivent être exhaustives,
c’est-à-dire l'ensemble du contenu que l'on a décidé de classer doit l'être en entier.
6 “The specific segment of content that is characterized by placing it into a given category” (Holsti, 1969).
7 “The largest body of context that may be searched to characterize a recording unit” (Holsti, 1969).
10
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Dans cette étude, la phase a été retenue comme une unité de codage puisqu’elle constitue une
proposition indépendante contenant une idée cohérente. La phase permet de découper le texte
en un ensemble d’idées vu qu’elle est plus fiable que le mot, qui ne peut à lui seul donner un
sens, et le paragraphe, qui regroupe plusieurs idées rendant sa classification contestable.
Cependant, une phrase peut contenir plusieurs mots ou groupes de mots qui font référence à
plusieurs catégories du capital immatériel en même temps, ce qui rend la procédure du
comptage et la détermination de la catégorie appropriée difficile et trop subjective.
Par exemple, dans son rapport annuel de 2006 (p.19), VALEO a publié la phrase : « Les
innovations de Valeo ne visent pas seulement à rendre les véhicules plus sûrs et plus
confortables, mais aussi plus économiques et respectueux de l’environnement ».
Il s’agit d’une seule phrase mais qui évoque simultanément deux composantes du capital
immatériel qui sont le capital structurel (« innovations »), et le capital relationnel
(« l’environnement »). Par conséquent, le mot placé dans une phrase (idée) permet de mieux
recenser l’apparition de chaque item dans le rapport annuel. De ce fait, l’ampleur de l’offre
volontaire d’information sur le capital immatériel est mesurée par le nombre de mots. Elle se
définit alors comme une variable de comptage qui ne peut prendre que des valeurs entières et
positives variant entre 0 et N (N étant un entier naturel).
2.3.2. Les variables indépendantes
Tableau 3 : Variables, codage et instruments de mesure
Variables Codage Indicateurs de mesure
L’offre d’information sur le CI Le niveau de divulgation sur le CI INF_CI Nombre de mots divulgués sur le CI
La structure de propriété P_DIR La part du capital détenue par les
dirigeants
Contrôle de la firme
Taille de la firme LOG_TA Le log en base 10 de l'actif
comptable
L’endettement L’endettement ENDT Dettes à LT / Capitaux propres
La rentabilité des actifs ROA Résultat/ AT
La performance économique La rentabilité des CP ROE Résultat/ Capitaux propres
Age de l’entreprise Age de la firme AGE Age de la firme
Statut de cotation Cotation sur un marché américain COT_AM Dummy égale 1 si la firme est cotée
sur un marché américain et 0 sinon.
La pression des PPC La pression des parties prenantes
contractuelles
PPC Le nombre de PPC8 évoquées dans
le discours du PDG
La pression des PPDD La pression des parties prenantes
diffuses
PPD Le nombre de PPD9 évoquées dans
le discours du PDG
La pression des salariés La pression des salariés PRS Nombre de salariés /chiffre
d’affaires
Secteur d’activité Secteur d’activité HT Dummy prenant 1 si la firme opère
dans un secteur de HT et 0 sinon
8Figurent parmi les parties prenantes contractuelles : les clients, personnel, fournisseurs,
actionnaires…(Pesqueux, 2002)
9Figurent parmi les parties prenantes diffuses : autorité publique, collectivité locale, associations et ONG,
opinion publique… (Pesqueux, 2002)
11
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2.4. Modèle et outils statistiques retenus
Dans cette étude, une méthodologie composée de trois types d'analyse (descriptive, bivariée et
multivariée) a été adoptée. Une première analyse descriptive a permis de saisir les
caractéristiques de l'échantillon. Une deuxième analyse bivariée basée essentiellement sur des
comparaisons de rangs et des études de corrélation a permis de vérifier si les variables
explicatives de l'étude, prises séparément, peuvent expliquer les différences entre les niveaux
de divulgation volontaire d’information sur le capital immatériel. Une dernière analyse
multivariée a permis de juger de l’influence des variables explicatives prises dans leur
ensemble sur la décision des dirigeants de communiquer volontairement des informations sur
les immatériels.
L’ampleur de l’offre volontaire d’information sur le capital immatériel est mesurée par le
nombre de mots. De ce fait, des modèles classiques de régression supposant la continuité et la
normalité de la variable à expliquer et pouvant amener à prédire des valeurs négatives ou
décimales s’avèrent inappropriés et peuvent conduire à des estimations inefficientes,
inconsistantes et biaisées (Long et Freese, 2003). Par conséquent, il est opportun de recourir
aux modèles spécifiquement conçus pour le traitement des données de comptage. Le modèle
de poisson et le modèle binomial négatif constituent les modèles de comptage les plus
communément utilisés dans la littérature.
3. PRESENTATION ET INTERPRETATION DES RESULTATS
3.1. Les statistiques descriptives
Les statistiques descriptives de la variable dépendante se focalisent sur le volume, la forme et
la structue de l’information diffusée.
3.1.1. Le volume des informations divulguées sur le capital immatériel
Tableau 4 : L’ampleur de l’offre volontaire d’informations sur le capital immatériel
Thèmes Min Max Moyenne Ecart type Variance
Capital structurel 27 515 218,1 123,09 15152,645
Capital relationnel 32 492 213,66 117,59 13829,264
Capital humain 2 136 48,06 34,46 1188,06
Capital immatériel 76 1059 478,98 245,58 60314,10
Il ressort du tableau 4 que le niveau de divulgation volontaire d’informations sur le capital
immatériel varie d’un score minimum de 76 mots à un score maximun de 1059 mots. Les
trentes firmes de l’échantillon publient en moyenne 479 mots relatifs au capital immatériel
dans leurs rapports annuels.
Concernant la divulgation d’informations sur le capital structurel, 2 items (« innovation » et
« philosophie managériale ») sur 10 ont été divulgués dans tous les rapports annuels, alors que
le plus haut niveau de divulgation a été affiché par l’item « marque déposée » avec 228 mots
recencés chez SANOFI-AVENTIS qui est une firme opérante dans le secteur pharmaceutique.
Ensuite, à propos de la divulgation d’informations sur le capital relationnel, 2 items
(« clients » et « partenariats ») sur 13 ont été divulgués par toutes les firmes de l’échantillon,
12
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cependant l’item « résponsabilité sociétale » a enregistré le plus haut niveau de divulgation
avec 204 mots repérés chez AREVA qui est une firme appartenant au secteur de l’énergie
nucléaire. Enfin, pour le capital humain, les statistiques descriptives révèlent un niveau de
divulgation volontaire plus faible que les autres composantes du capital immatériel.
3.1.2. La forme des informations divulguées sur le capital immatériel
Une première lecture des rapports annuels dévoile l’utilisation d’une diversité de formes
« informationnelle ». En effet, l’information sur le capital immatériel peut être véhiculée par
une narration (ou texte), une photo, un tableau ou un graphique.
Lorsqu’elle est fournie sous forme de narration (ou texte), l’information sur le capital
immatériel peut être qualitative (descriptive) ou quantitative (chiffrée). Est considérée comme
information quantitative, toute narration contenant une valeur monétaire, un pourcentage, un
rang ou un nombre :
- Une valeur monétaire : «Entre janvier et octobre 2006, la démarche de tri des déchets a
d’ores et déjà permis de valoriser 1380 tonnes de déchets et d’économiser 36 000 euros.. »
(GROUPE PIERRE ET VACANCES, 2006, p. 32).
- Un pourcentage : « 81% des collaborateurs de Accor déclarent que le Groupe se préoccupe
de leur santé et de leur sécurité (enquête d’opinion réalisée auprès de plus de 50000
collaborateurs en 2005-2006) » (ACCOR, 2006, p.24).
- Un nombre : « Avec 1800 collaborateurs dans 20 pays et plus de 4600 brevets actifs dans le
monde, Legrand confirme le choix de l’innovation comme moteur de sa croissance. »
(LEGRAND, 2006, p.20).
- Un rang : « N°1 mondial de l’appareillage électrique et du cheminement de câbles, Legrand
dispose d’une position clé sur au moins une famille de produits dans plus de 20 pays. »
(LEGRAND, 2006, p.16).
Par ailleurs, lorsqu’elle est divulguée sous forme de tableau ou de graphique, l’information
sur le capital immatériel revêt un caractère quantitatif. Ainsi, la forme quantitative de
l’information sur le capital immatériel est souvent issue de la narration (texte) chiffrée, des
tableaux ou des graphiques.
Une autre forme d’information qui n’a pas été largement étudiée dans les études traitant la
problématique de l’offre volontaire sur le capital immatériel : la photo.
Photo 1 : Savoir faire (capital humain)
source : L’OREAL, 2006, p.44
Photo 2 : Savoir R&D (capital interne)
source : ARKEMA, 2006, p.35
13
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Photo 3 : Responsabilité environnementale (capital relationnel)
source : ADP, 2006, p.50
Rares sont les travaux qui ont examiné l’information sur les intangibles sous cette forme.
Dans son étude réalisée en Nouvelle Zélande, Steenkamp (2005) a trouvé que les
informations véhiculées à travers des photos représentent 35% du total des informations
communiquées sur le capital immatériel, contre 3% sous forme de graphique et 62% sous
forme de texte.
Le schéma suivant présente la répartition des informations divulguées par les firmes
françaises selon les différentes formes précédamment définies.
Schéma 1 : Les formes des informations divulguées sur le capital immatériel
L’analyse de l’information sur le capital immatériel diffusée par les entreprises françaises, fait
revêtir un caractère essentiellemet qualitatif et descriptif de l’information (66% du volume
total de la divulgation immatérielle). Par ailleurs, les entreprises emploient peu d’informations
quantitatives qui ne représentent que 24% du total de l’information divulguée sur le capital
immatériel, répartie en 22% sous forme de narration (texte) quantitative, 2% sous forme de
graphique et une proportion négligeable sous forme de tableau. Le niveau de diffusion
d’information sur le capital immatériel sous forme de photo ne représente que 10%.
14
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En résumé, les firmes françaises semblent prévilégier la forme qualitative et descriptive par
rapport à la forme quantitative et photographique. Cette conclusion est conforme à celle des
études antérieures qui ont souligné la prédominance de la forme qualitative de l’information
sur le capital immatériel (Brennan, 2001 ; Guthrie et al. 2000). Guthrie et Petty (2000) ont
trouvé que le capital immatériel est exprimé plutôt sous une forme qualitative que
quantitative10.
Dans un contexte de divulgation d’information sociétale, Toms (2002) avance qu’il est
difficile pour les concurrents d’imiter des informations quantitatives. Il ajoute que les
informations quantifiées sont plus exactes et reflètent mieux les activités actuelles de la firme.
Dans ce sens, Botosan (1997) stipule que les informations quantitatives sont un proxy de la
qualité de la divulgation. En effet, les nombres sont une preuve de la fiabilité et une garantie
des faits alors que les informations qualitatives sont des informations "douces" qui peuvent
être interprétées avec beaucoup moins de rigueur. Pour cette raison, Bozzolan et al. (2003)
ont introduit une pondération dans le calcul de leur indice de divulgation sur le capital
immatériel. Les auteurs ont attribué la valeur 1 pour toute information qualitative et la valeur
2 pour toute information quantitative. Cette méthode a été déployée dans les travaux de
Buzby, 1974 ; Wiseman, 1982 et Bukh et al. 2001.
Toutefois, Guthrie et Petty (2000) avancent que le lien entre la qualité de la diffusion et
l’aspect quantitatif de l’information n’est pas approprié dans le contexte du capital
immatériel, en raison de la difficulté d’attribuer une mesure aux éléments incorporels qui sont
pour la plupart des items qualitatifs. Les auteurs suggèrent que plusieurs entreprises
s’intéressent à comprendre le processus de la création de la vraie valeur de la firme plutôt que
de disposer d’informations monétaires. Ceci suppose qu’en absence d’information
quantitative, l’information qualitative aurait le même degré d’importance quand il s’agit
d’information sur le capital immétriel.
3.1.3. La structure des informations divulguées sur le capital immatériel
Le schéma suivant illustre la structure de l’information divulguée sur le capital immatériel en
fonction de ses différentes composantes.
Schéma 2 : La structure des informations publiées sur le capital immatériel
10Guthrie and Petty found that ‘nearly every instance of reporting involved the intellectual capital attribute being
expressed in discursive rather than numerical terms’ (2000, p. 247)
15
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L’analyse de la structure des informations divulguées sur le capital immatériel montre que le
capital structurel et le capital relationnel représentent les deux composantes sur lesquelles les
firmes divulguent le plus. En effet, chaque composante représente 45% du volume total
d’informations11. Cependant le volume d’informations divulguées sur le capital humain ne
représente que 10% du volume total.
Cette observation nous amène à poser la question suivante : pourquoi la commuication sur le
capital humain est relativement pauvre ?!
La réponse à cette question peut être inspirée de la définition du capital humain avancée par
Edvinsson (1997) qui met l’accent sur le caractère volatil de cette composante. En effet,
l’auteur trouve que le capital humain quitte l'entreprise, le soir, en même temps que les
hommes, contrairement au capital structurel et organisationnel, qui lui restent.
De même, l’OCDE (2006) retient la même idée de volatilité lorsqu’il définit le capital
humain. Selon cet organisme, ce capital désigne le savoir, les compétences et le savoir-faire
que les employés «emmènent avec eux lorsqu'ils quittent les locaux le soir».
Schématiquement, le capital humain peut être assimilé aux savoirs et aux routines détenues
par les salariés de l’entreprise ou tout ce « qui est dans la tête des gens ».
De ce fait, ce capital n’appartient pas à l’entreprise dans la mesure où il est difficilement
contrôlé et géré par les dirigeants. La reconnaissance du capital humain, nécessite la
démonstration de son contrôle via un droit de « propriété » intellectuel par exemple, à défaut
d’avoir un droit de propriété sur le personnel. Souvent, des employés compétents,
expérimentés et ayant subis une formation au sein de la firme la quittent pour aller travailler
chez un concurrent ou monter leur propre projet et jouer un rôle dominant dans le même
secteur.
Bhidle (2000) trouve que plus que 70% des jeunes firmes entrepreneuriales (faisant partie de
la liste Inc. 500) ont été fondées par des gens portant des idées, déjà développées avec
d’autres personnes dans leurs emplois antérieurs. En résumé, les entreprises divulguent moins
sur les compétences, les connaissances et les qualifications professionnelles et par conséquent
engagent moins de coûts de diffusion parce que ces éléments, malgré leur contribution à la
création de valeur, ne sont pas sa « propriété ».
3.2. L’analyse bivariée
Le test de Shapiro-Wilk, montrent que la variable dépendante (INF_CI) ne suit pas la loi
normale.
Tableau 5 : Test de normalité de la variable dépendante (test Shapiro-Wilk)
Variables Statistique W Valeur de z signification
INF_CI 0,87453 2,743 0,00305
Par conséquent, le test non paramétrique de corrélation de Spearman, détectant l’existence
d’une relation entre deux variables quantitative, a été retenu.
11 Contrairement à la réparation de l’information divulguée sur le capital immatériel selon la forme (narrative
quantitative, narrative qualitative, photo, graphique et tableau) dans laquelle on s’est référé à la phrase pour
déterminer les proportions, dans la répartition de l’information divulguée sur le capital immatériel selon les items
on s’est référer au nombre de mots pour déterminer les proportions.
16
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Tableau 6 : Test non paramétrique de corrélation de Spearman
Variables Rho de Spearman Signification
P_DIR -0,404 0,001**
LOG_TA 0,488 0,004**
ENDT -0,249 0,092
ROA -0,343 0,034*
ROE 0,195 0,151
AGE -0,423 0,008**
PPC 0,181 0,169
PPD 0,597 0,000**
INF_CI
PRS 0,472 0,000**
Les résultats du tableau 6 permettent de conclure qu’il existe une corrélation négative et
significative entre le niveau de divulgation volontaire d’information sur le capital immatériel
et la proportion du capital détenue par les dirigeants, la rentabilité des actifs et l’âge de la
firme.
Les mêmes résultats mettent en évidence une relation positive et significative entre le niveau
de divulgation volontaire d’information sur le capital immatériel et la taille de la firme, la
pression des parties prenantes diffuses et celle des salariés. En revanche, aucune corrélation
significative n’a été détectée entre l’ampleur de l’offre volontaire d’informations
immatérielles et l’endettement de la firme, la rentabilité des capitaux propres et la pression
des parties prenantes contractuelles.
3.3. L’analyse multivariée
Avant de procéder à l’analyse multivariée, il est opportun d’examiner les corrélations des
variables explicatives afin de détecter une multicolinéarité12 pouvant biaiser les conclusions
de cette analyse.
Tableau 7 : La matrice de corrélation des variables explicatives
Variables P_DIR LOG_TA ENDT ROA ROE AGE COT_AM PPC PPD PRS HT
P_DIR 1
LOG_TA -0.173 1
ENDT 0.058 0.317 1
ROA -0.033 -0.359 -0.543 1
ROE 0.216 -0.011 0.581 -0.37 1
AGE -0.281 -0.105 -0.308 0.096 -0.28 1
COT_AM -0.137 0.332 -0.040 -0.10 -0.04 0.215 1
PPC -0.091 0.162 0.302 0.168 -0.10 0.083 -0.231 1
PPD -0.233 0.397 0.096 -0.22 -0.13 -0.07 0.168 0.208 1
PRS 0.115 -0.050 0.175 -0.11 -0.11 0.143 -0.152 0.059 -0.09 1
HT -0.208 -0.033 -0.272 0.213 -0.30 0.061 -0.021 0.081 0.357 -0.31 1
L’examen de la matrice de corrélation montre qu’il n’y a aucun niveau fortement élevé de
corrélation qui oblige de prendre des mesures correctives. Les coefficients de corrélation
12 En effet, deux variables significativement corrélées ne doivent pas paraître dans un même modèle dans la
mesure où elles donnent la même information.
17
halshs-00459359, version 1 - 23 Feb 2010
varient d’un minimum égal à -0.011 à un maximum égal à 0.3978, à l’exception de la relation
entre END, ROE et ROA dont les coefficients de corrélation sont respectivement de 0.5819 et
-0.5434. D’après Kennedy (1992), ces deux valeurs ne révèlent pas la présence d’un sérieux
problème de multicolinéarité puisqu’il confirme que ce problème existe lorsque le coefficient
de corrélation dépasse le seuil de 0,8.
Pour l’analyse des données de comptage, le modèle de poisson est le cadre probabiliste le plus
utilisé, mais ce modèle n’est approprié que si la moyenne de la variable de comptage soit
égale à sa variance (E (yi/ X1, X2…, Xm) = Var (yi/ X1, X2…, Xm)= λi). Dans le cas où cette
hypothèse n’est pas vérifiée, les paramètres estimés par la méthode de maximum de
vraisemblance seront biaisés. Dans ce cas, le recours à un modèle alternatif de comptage qui
tient compte de la superdispersion (le modèle binomial négatif) s’avère indispensable.
Le Modèle à estimer : Ln [E (INF_CI)] = β0 + β1 P_DIR + β2 LOG_TA + β3 ENDT + β4
ROA + β5 ROE + β6 AGE + β7 COT_AM + β8 PPC + β9 PPD +β10 PRS + β11 HT + ε
3.3.1. L’estimation du modèle par la régression de poisson
Tableau 8 : Estimation du modèle par la régression de poisson et le test de déviance
β Z Signification
Constante 5.2018 55.53 0.000
P_DIR -3.821477 -17.39 0.000
LOG_TA .1004912 5.23 0.000
ENDT -0.2467019 -7.93 0.000
ROA -0.9700665 -6.55 0.000
ROE 0.4585827 3.50 0.000
AGE -0.005253 -14.27 0.000
COT_AM 0.2498054 10.23 0.000
PPC 0.1090305 8.40 0.000
PPD 0.0539254 6.34 0.000
PRS 0.0663107 30.85 0.000
HT 0.2141677 7.69 0.000
Déviance
Signification
437.8763
0,000**
Les résultats de la régression de poisson montrent que la statistique retenue pour tester la
surdispersion (le test de déviance) est très significative, ce qui permet de rejeter l’hypothèse
nulle d’égalité de la moyenne et de la variance de la variable INF_CI. Ainsi, le recours au
modèle binomial négatif est nécessaire.
3.3.2. L’estimation du modèle par la régression binomiale négative
Tableau 9 : Estimation du modèle par la régression binomiale négative
β Z Signification
Constante 5.206397 10.50 0.000
P_DIR -3.822755 4.17 0.000**
LOG_TA 0.1080959 1.07 0.283
18
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ENDT -0.2438624 -1.60 0.109
ROA -0.9279258 -1.31 0.189
ROE 0.4185433 0.65 0.514
AGE -0.0059445 -2.90 0.004**
COT_AM 0.2649439 2.01 0.045*
PPC 0.1014545 1.42 0.156
PPD 0.0540325 1.31 0.189
PRS 0.067027 4.70 0.000**
HT 0.2228617 1.44 0.149
Test de KHI2
Signification
31.14
0.001**
Pseudo R2 de
Cragg et Uhler
0.742
Il ressort du tableau 9 que les coefficients significatifs sont ceux associés aux quatre variables
suivantes : P_DIR, AGE, COT_AM et PRS.
Dans les modèles de comptage, l’interprétation des coefficients estimés ne se fait pas
directement comme dans le cas des modèles de régressions linéaires mais elle nécessite une
analyse supplémentaire, effectuée uniquement pour les coefficients jugés significatifs. Pour
cette étude la méthode d’interprétation retenue est celle des effets marginaux, où seuls les
signes et les valeurs relatives des coefficients sont pris en compte.
Les effets marginaux mesurent les effets d’une augmentation d’une unité d’une variable
indépendante donnée sur le niveau d’information sur le capital immatériel. La taille des effets
marginaux dépend de la définition des variables indépendantes. L’importance de l’effet
marginal pour une variable ne peut donc pas être évaluée en comparant cet effet à celui d’une
autre variable.
Tableau 10 : Les effets marginaux de la variable dépendante du modèle
INF_CI β Z Signification dy/dx X
P_DIR -3.822755 4.17 0.000** -1772.855 0.03913
AGE -0.0059445 -2.90 0.004** -2.756841 45.0435
COT_AM 0.2649439 2.01 0.045* 122.8714 0.26087
PRS 0.067027 4.70 0.000** 31.0847 5.62
- L’interprétation des signes des coefficients estimés
Le signe positif des coefficients estimés par la méthode du maximum de vraisemblance
associés aux variables LOG_TA, ROE, COT_AM, PPC, PPD, PRS et HT ainsi que le signe
négatif des coefficients associés aux variables P_DIR et AGE correspondent aux prévisions
des hypothèses alors que le signe négatif des coefficients associés aux variables ENDT et
ROA les contredisent.
- L’interprétation de la significativité des coefficients estimés
► La proportion du capital détenue par les dirigeants (P_DIR) : les résultats de la
régression binomiale négative montrent que le coefficient associé (β1 = -3.822) à cette
variable est négatif, ce qui implique que la proportion du capital détenue par les dirigeants
19
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affecte négativement le niveau de divulgation d’information sur le capital immatériel. De
plus, le coefficient associé à cette variable est statistiquement significatif à un seuil de risque
égal à 0,01. Ainsi, la structure de propriété est un facteur explicatif de la politique de
communication sur le capital immatériel. Ces résultats permettent d’accepter la première
hypothèse selon laquelle les entreprises dont la proportion du capital détenue par les
dirigeants est faible offrent volontairement plus d’information sur le capital immatériel que
les autres.
► La taille (LOG_TA) : les résultats de la régression binomiale négative montrent que le
coefficient associé à cette variable (β2 =0.108) est positif, ce qui implique que la taille a un
effet positif sur le niveau de divulgation d’information sur le capital immatériel. Cependant ce
coefficient n’est pas significatif. Par conséquent, la taille n'est pas un facteur explicatif de
l’offre volontaire d’information sur le capital immatériel. Cette conclusion permet de rejeter la
deuxième hypothèse stipulant que les grandes entreprises offrent volontairement plus
d’information sur le capital immatériel que les autres.
► L’endettement (ENDT) : le coefficient relatif à cette variable (β3 =-0.243) est négatif,
ceci supporte que l’endettement réduit le niveau de divulgation sur le capital immatériel, ce
qui est contraire à la théorie. De plus, ce coefficient n’est pas significatif ce qui amène à
confirmer que l’endettement n'est pas un déterminant de la stratégie de communication sur le
capital immatériel. Ce résultat permet de rejeter la troisième hypothèse supposat que les
entreprises les plus endettées offrent volontairement plus d’information sur le capital
immatériel que les autres.
► La performance de l’entreprise (ROA et ROE) :
• Pour la variable représentant la rentabilité des actifs (ROA), les résultats de la
régression binomiale négative montrent que le coefficient associé à cette variable est
négatif (β4 = -0.927), ceci signifie que la rentabilité des actifs a un impact négatif sur
le niveau de divulgation d’information sur le capital immatériel, ce qui est contraire à
la théorie. De même, les résultats montrent que ce coefficient est non significatif
• Pour la variable représentant la rentabilité des capitaux propres (ROA), les résultats
montrent que le coefficient associé à cette variable (β5 = 0.418) est positif, ce qui
implique que la rentabilité des capitaux propres a un impact positif sur le niveau de
divulgation d’information sur le capital immatériel. Toutefois, ce coefficient est non
significatif.
Malgré les signes opposés des coefficients associés aux variables appréhendant la
performance de l’entreprise, ces coefficients s’avèrent non significatifs, ce qui amène à rejeter
la quatrième hypothèse qui stipule que les entreprises les plus performantes offrent
volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les autres dans le but de
signaler au marché leur qualité.
► L’âge de l’entreprise (AGE) : les résultats de la régression binomiale négative montrent
que le coefficient associé à cette variable (β6 = -0.005) est négatif, ce qui implique que l’âge
de firme a un impact négatif sur le niveau de divulgation d’information sur le capital
immatériel. Aussi, le coefficient associé à cette variable est statistiquement significatif à un
seuil de risque égal à 0,01. Ainsi, l’âge de la firme s’avère un facteur explicatif de la politique
de communication sur le capital immatériel. Ce résultat permet d’accepter la cinquième
hypothèse qui propose que les entreprises les plus jeunes offrent volontairement plus
d’information sur le capital immatériel que les autres.
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► Le statut de cotation (COT_AM) : les résultats montrent que le coefficient associé à cette
variable (β7=0.264) est positif. Ceci signifie que la cotation sur un deuxième marché
américain a un impact positif sur la stratégie de communication des firmes françaises. De
plus, ce coefficient est statistiquement significatif à un seuil de risque égal à 0,01. Ces
résultats nous permettent de conclure que la cotation sur un marché anglo-saxon est un facteur
explicatif d’une offre additionnelle d’information sur le capital immatériel et d’accepter la
sixième hypothèse postulant que les entreprises cotées simultanément sur les marchés français
et américain offrent volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les
autres.
► La pression des parties prenantes (PPC, PPD et PRS) :
• les coefficients associés aux variables relatives à la pression des parties prenantes
contractuelles (PPC) et diffuses (PPD), (β8=0.101 et β9 =0.054) sont positifs, ce qui
implique que la pression des parties prenantes stimule l’offre volontaire d’information
sur le capital immatériel. Cependant, ces coefficients ne sont pas significatifs.
• le coefficient associé à la variable pression des salariés (PRS) (β10=0.067) est positif
ceci implique que la pression des salariés incite les dirigeants à communiquer
davantage sur le capital immatériel d’autant plus que ce coefficient est significatif à un
seuil de risque égal à 0,01. Cette conclusion permet d’accepter partiellement la
septième hypothèse qui stipule que les entreprises dont la pression des parties
prenantes est élevée offrent volontairement plus d’information sur le capital
immatériel que les autres.
► Le secteur d’activité (HT) : les résultats de la régression binomiale négative montrent que
le coefficient associé à cette variable (β11=0.222) est positif, ce qui implique que
l’appartenance à un secteur de haute technologie a un impact positif sur le niveau de
divulgation d’information sur le capital immatériel. Cependant, ce coefficient n’est pas
significatif. Cette conclusion permet de rejeter la huitième hypothèse selon laquelle les
entreprises qui appartiennent à un secteur de haute technologie offrent volontairement plus
d’information sur le capital immatériel que les autres.
CONCLUSION
L’étude a montré que l’offre volontaire d’information sur le capital immatériel est motivée par
l’argument de l’utilité financière. En effet, les entreprises dont la proportion du capital
détenue par les dirigeants est faible offrent volontairement plus d’information sur le capital
immatériel que les autres et ce afin de réduire les coûts d’agence qui naissent suite à la
séparation de la propriété et du contrôle et maximiser par conséquent la valeur financière de la
firme. L’étude a montré aussi que l’offre volontaire sur des éléments intangibles est motivée
par l’argument de la légitimité puisque les entreprises les plus jeunes, cotées simultanément
sur les marchés français et américain et dont la pression des salariés est élevée offrent
volontairement plus d’information sur le capital immatériel que les autres.
L’évolution des ressources immatérielles et leur contribution à la croissance économique,
l’incapacité de la comptabilité financière à refléter la vraie richesse immatérielle des firmes et
l’émergence de la notion de responsabilité sociétale ont développé chez non seulement les
investisseurs mais aussi chez une diversité de parties prenantes un besoin croissant
d’information sur le capital immatériel de l’entreprise. Toutefois, jusqu’à l’heure actuelle, il
n’y a aucun modèle consensuel ou institutionnel permettant d’orienter les évolutions.
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