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Comprendre le soutien dont les éducateurs(trices) en centres de réadaptation ont besoin et ce qui est valorisé dans leur travail avec les jeunes

Authors:

Abstract

L’épuisement professionnel, les traumatismes et la détresse du personnel des centres de réadaptation (CR) sont rapportés dans de nombreuses études (Brend, 2020 ; Kim et Kao, 2014 ; McElvaney et Tatlow- Golden, 2016 ; Seti, 2008). De nombreuses recherches ont permis d’identifier des facteurs de risque et de protection liés à ces problèmes (Edmonds, 2019 ; Molnar et Fraser, 2020 ; Russ et al., 2019 ; Sage et al., 2018 ; Salloum et al., 2019). Toutefois, peu de recherches ont examiné le point de vue des éducateurs concernant ce qu’ils vivent au quotidien.
Vol. 24, no 1, décembre 2023
ÉLAN, EMPORTEMENT CAPRICIEUX ET PASSAGER
La foucade est réalisée par le Comité québécois pour les jeunes en difficulté de comportement
(CQJDC). Ce journal est publié deux fois par année. Les numéros déjà parus sont ouverts et dispo-
nibles pour tous sur le site Internet du CQJDC (www.cqjdc.org). Son contenu ne peut être reproduit
sans mention de la source. Les idées et les opinions émises dans les textes publiés n’engagent
que les auteurs. Le journal ne peut être tenu responsable de leurs déclarations. Le masculin est
utilisé dans le seul but d’alléger le texte.
Comité de rédaction
Jean-Yves Bégin, révision et rédaction
Nancy Gaudreau, révision et rédaction
Élizabeth Harvey, révision et rédaction
Jeanne Lagacé-Leblanc, révision et rédaction
Line Massé, éditrice
Ghitza Thermidor, responsable de la chronique La feuille de route du psychoéducateur
Évelyne Touchette, révision et rédaction
Graphisme : Mirally
À l’intention des auteurs
Toute personne intéressée à soumettre un texte faisant état d’expé riences professionnelles ou
de travaux de recherche portant sur la question des jeunes présentant des difficultés compor-
tementales est invitée à le faire. Le guide de rédaction de La foucade, disponible sur le site In-
ternet du CQJDC (www.cqjdc.org), fournit toutes les directives générales pour la soumission des
articles ainsi que les indications spécifiques selon les différentes chroniques. Si c’est possible,
le texte peut être accompagné d’une photo numérique en haute définition illustrant le propos. Le
texte doit être soumis par courriel à l’éditrice de La foucade, Line Massé, à l’adresse suivante :
line.masse@uqtr.ca. Des remarques seront ensuite communiquées à l’auteur et selon le cas, des
corrections devront être effectuées avant la publication finale. Il y a deux dates de tombées pour
les articles : le 1er juin et le 1er décembre de chaque année.
Le Conseil d’administration du CQJDC 2022-2023
Mélanie Paré, présidente
Denise Gosselin, vice-présidente
Jean-Sébastien Ferron, trésorier
Jacques Dumais, secrétaire
Camil Sanfaçon, administrateur
Mohamed Jelassi, administrateur
Chères lectrices,
chers lecteurs
Ce numéro porte sur le dernier congrès
biennal du CQJDC tenu en mai 2023. Nous
tenons à remercier tous ceux qui ont accep-
té de collaborer à cette édition spéciale. La
foucade s’ouvre sur un mot de la directrice
générale du CQJDC. Du côté de la recherche
comprend deux articles. Dans le premier,
Denise Michelle Brend et ses collègues pré-
sentent les résultats d’une recherche por-
tant sur le point de vue d’éducateurs concer-
nant ce qu’ils vivent au quotidien dans les
centres de réadaptation. Dans le deuxième,
Élodie Marion et Laurence-Édith Tchuindibi
synthétisent les résultats d’une étude vi-
sant à mieux comprendre l’expérience sco-
laire des jeunes en situation de placement.
Dans le Coup de cœur des régions, Catherine
Rioux et ses collègues présentent le projet
innovateur de l’école L’Envolée, spéciali-
sée pour les élèves présentant des troubles
du comportement. Andrée-Ann Garneau et
Jonathan Bluteau répondent à la Question
de l’heure : « Comment les jeux de bataille
peuvent-ils soutenir le développement des
compétences socioémotionnelles chez les
enfants du préscolaire ? ». Dans Le coin
des parents, Marie-Lyne Benoit discute des
particularités et des besoins des enfants
liés à l’intégration sensorielle. Dans Le coin
des jeunes, Sabrina Dufour propose son top
cinq des outils technologiques pour soute-
nir les fonctions exécutives des jeunes. Le
CQJDC a lu comprend deux articles. Le pre-
mier, rédigé par Arnaud Milord-Nadon et
Audrey Veilleux, présente la 2e édition du
Groupe de réflexion sur les drogues (GRD),
un programme de prévention ciblée de ré-
duction des méfaits. Dans le deuxième, après
avoir exposé la réalité des jeunes issus des
minorités sexuelles et de genre, Jasmin Roy
rapporte la création d’un programme d’ac-
compagnement bienveillant à leur intention.
Dans Le CQJDC a vu pour vous, Claire Beau-
mont expose un nanoprogramme « Enseigner
des compétences sociales et émotionnelles
au primaire » et ses principales retombées.
Dans La feuille de route du psychoéduca-
teur, Catherine Korah et Charles Lefebvre
traitent de l’accompagnement émotionnel à
l’école. Dans Un pas vers l’inclusion, Clau-
dia Verret et ses collaborateurs présentent
un programme prometteur « Boxe avec les
mots » s’adressant aux élèves du secondaire
des secteurs d’adaptation scolaire et de la
formation axée sur l’emploi et ses résultats
préliminaires. Quelques nouvelles brèves du
CQJDC complètent ce numéro.
Bonne lecture !
DIRECTION@CQJDC.ORG
418-686-4040, poste 6380
WWW.CQJDC.ORG
France Michon, administratrice
Gino Lesage, administrateur
Julie Beaulieu, administratrice
Christine Lavoie, administratrice
Direction générale : Joudie Dubois
Chargée de projets : Ariane Fiset
Liste des experts du CQJDC
Claire Baudry, professeure, Département de psychoéducation, Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR),
Campus Québec.
Julie Beaulieu, professeure, Département des sciences de l’éducation, Université du Québec à Rimouski,
Campus de Lévis.
Claire Beaumont, professeure, Faculté d’éducation, Université Laval.
Jean-Yves Bégin, professeur, Département de psychoéducation, UQTR, Campus Québec.
Vincent Bernier, professeur, Département de didactique, Université du Québec à Montréal (UQAM).
Jonathan Bluteau, professeur, Département d’éducation et formation spécialisées, UQAM, et professeur
associé, Faculté de psychologie de l’éducation, Cergy Paris Université.
Julie Boissonneault, doctorante en psychopédagogie, Université Laval.
Tania Carpentier, stagiaire postdoctorale en psychoéducation, Université de Sherbrooke.
Caroline Couture, professeure, Département de psychoéducation, UQTR, Campus Québec.
Marie-Pier Duchaine, doctorante, Faculté d’éducation, Université Laval
Nancy Gaudreau, professeure, Département d’études sur l’enseignement et l’apprentissage, Université Laval.
Élizabeth Harvey, professeure, Département des sciences de l’éducation, Université Sainte-Anne.
Jeanne Lagacé-Leblanc, psychoéducatrice et chargée de cours, Département de psychoéducation, UQTR.
Christine Lavoie, psychoéducatrice et chargée de cours, Département de psychoéducation, UQTR.
Line Massé, professeure, Département de psychoéducation, UQTR.
Mélanie Paré, professeure, Faculté des sciences de l’éducation, Université de Montréal.
Marie-Andrée Pelletier, professeure, Département d’éducation, Université TÉLUQ.
Égide Royer, psychologue et spécialiste en adaptation scolaire.
Camil Sanfaçon, spécialiste en éducation.
Evelyne Touchette, professeure, Département de psychoéducation, UQTR, Campus Québec.
ISSN 1929 9036 La foucade (En ligne)
3
Vol. 24, no 1, décembre 2023
LE MOT DE LA DIRECTRICE
Bien ensemble dans nos différences ..................................................................4
DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE
Regards des intervenants travaillant dans les centres de réadaptation pour comprendre leurs besoins en termes de soutien
et de valorisation ................................................................................5
Mieux comprendre l’influence d’un placement en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse sur l’expérience scolaire
d’adolescents .................................................................................11
LE COUP DE COEUR DES RÉGIONS
Faire autrement : l’Envolée, une école au service des élèves ...............................................15
QUESTION DE L’HEURE
Comment les jeux de bataille peuvent-ils soutenir le développement des compétences socio-émotionnelles chez les enfants
du préscolaire ? ................................................................................19
LE COIN DES PARENTS
L’intégration sensorielle : une paire de lunettes à considérer pour mieux comprendre les besoins et les particularités
des enfants ...................................................................................22
LE COIN DES JEUNES
Les outils technologiques pour soutenir les fonctions exécutives : notre top 5 ..................................25
LE CQJDC A LU POUR VOUS
Groupe de réflexion sur les drogues (GRD) 2e édition : un programme de prévention ciblée et de réduction des méfaits
auprès de jeunes en difficulté .....................................................................29
L’accompagnement bienveillant auprès des jeunes LGBTQI+ ................................................32
LE CQJDC A VU POUR VOUS
Une formation pour soutenir l’apprentissage socioémotionnel à l’école .......................................35
LA FEUILLE DE ROUTE DES PSYCHOÉDUCATEURS
L’accompagnement émotionnel à l’école : une solution indispensable pour aider nos élèves à s’exprimer et à s’épanouir ...37
UN PAS VERS L’INCLUSION
Boxe avec les mots : une collaboration interdisciplinaire prometteuse en adaptation scolaire au secondaire ............41
NOUVELLES BRÈVES DU CQJDC
Ressources informatives portant sur le sommeil chez les tout-petits de 0 à 5 ans ................................45
Activités de formation offertes pour soutenir les parents, les enseignants et les intervenants .......................45
À noter à votre agenda! ..........................................................................46
Lauréats 2023 du prix « Je suis capable, j’ai réussi ! » ....................................................47
Lauréate 2023 du prix « Une pratique remarquable ! » .....................................................48
Lauréats 2023 des bourses « Jeunes chercheurs » .......................................................48
Prix « Ma recherche en 180 secondes » ...............................................................49
Prix « Coup de cœur du public » pour l’affiche scientifique » ...............................................49
Table des matières
Commentaires recueillis auprès des participants
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1. Directrice du CQJDC.
Le Comité québécois pour les jeunes en difficulté de comportement (CQJDC) a tenu son 9e congrès biennal les 3,
4 et 5 mai 2023. Pour la première fois de son histoire, l’événement a offert aux participants un volet en présence,
à l’Hôtel Le Concorde de Québec, ainsi qu’un volet en ligne, et ce, afin de faire rayonner les bonnes pratiques
auprès d’un plus grand nombre de personnes.
Sous le thème « Bien ensemble dans nos différences », l’événement a abordé les difficultés sociales, affectives
et comportementales que peuvent vivre les jeunes, ainsi que les bonnes pratiques pour les soutenir au quotidien.
Plus d’une soixantaine de communications et de conférences de qualité ont été offertes aux participants. Cette
édition spéciale de La foucade en témoigne en offrant un aperçu de la richesse des thématiques qui ont été
couvertes lors du congrès.
L’éducation inclusive réclame les meilleures pratiques d’intervention et de soutien possibles. À travers ce
congrès, nous souhaitions proposer une réflexion sur le développement et la transmission des pratiques inclu-
sives, mais également des valeurs et des politiques qui y sont liées.
Ce sont 677 participants, dont 456 en présence et 221 en mode virtuel, qui ont pu enrichir leur bagage de
connaissances dans l’optique de favoriser le bien-être de tous les jeunes qu’ils côtoient. Nous espérons que ces
participants pourront, à leur tour, influencer leurs collègues, les parents et les jeunes pour que tous les enfants
et les adolescents se sentent accueillis, soutenus et valorisés même si leurs manières d’être et d’agir peuvent
être perçues comme différentes. Il est si important d’être bien ensemble, sans renier nos différences.
Le mot de la directrice
Bien ensemble dans nos différences
Joudie Dubois1
« Un incontournable pour améliorer
nos pratiques. »
« J’ai beaucoup apprécié la quali-
té des présentations et le fait qu’il
y avait un souci d’offrir des outils
essentiels au développement profes-
sionnel et personnel. »
« Coup de cœur pour les conférences
et les ateliers qui présentaient des
techniques d’intervention et des
façons de faire différentes ! »
« J’ai apprécié la variété des théma-
tiques abordées et la possibilité de
visionner le tout en différé. »
« Des formations pertinentes et
concrètes, inspirées du monde réel ! »
« J’ai adoré les kiosques d’expo-
sants ! J’ai découvert plusieurs belles
ressources ! »
« Un congrès axé sur la pratique
et sur des pistes de solution
concrètes ! »
« Quelle belle occasion pour enrichir
son bagage d’intervenant... et pour
réseauter ! »
« J’ai senti la passion contagieuse
des différents conférenciers. C’est
inspirant et ça me donne envie de
changer mes propres pratiques ! »
« J’ai hâte au prochain congrès ! »
« Encore une fois, un des congrès
les plus instructifs au Québec. »
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Du côté de la recherche
Regards des intervenants travaillant dans les centres de réadaptation pour
comprendre leurs besoins en termes de soutien et de valorisation
Denise Michelle Brend1, Delphine Collin-Vézina2 et Nathaniel Martin3
1. Ph. D., professeure adjointe, École de travail social et de criminologie, Université Laval.
2. Ph. D., professeure titulaire, School of Social Work, McGill University.
3. Étudiant de maîtrise, École de travail social et de criminologie, Université Laval.
a Information manquante pour un participant.
Méthode
Ce projet repose sur une méthode qua-
litative interprétative. Les données
proviennent d’un projet de recherche
longitudinal dirigé par la professeure Col-
lin-Vézina et subventionné par le Conseil
de recherche en sciences humaines du
Canada dans le cadre du programme de
développement de partenariat.
Participants
Les participants ont été recrutés dans 11
CISSS et CIUSSS du Québec. L’échantillon
se compose de 81 éducateurs travaillant
dans les agences partenaires. Le tableau
1 présente une description des principales
caractéristiques de l’échantillon.
L’épuisement professionnel, les
traumatismes et la détresse du per-
sonnel des centres de réadaptation
(CR) sont rapportés dans de nom-
breuses études (Brend, 2020 ; Kim
et Kao, 2014 ; McElvaney et Tat-
low-Golden, 2016 ; Seti, 2008). De
nombreuses recherches ont permis
d’identifier des facteurs de risque et
de protection liés à ces problèmes
(Edmonds, 2019 ; Molnar et Fraser,
2020 ; Russ et al., 2019 ; Sage et
al., 2018 ; Salloum et al., 2019).
Toutefois, peu de recherches ont
examiné le point de vue des éduca-
teurs concernant ce qu’ils vivent au
quotidien.
Instrument
Des entretiens individuels semi-dirigés de
45 à 65 minutes ont été réalisés auprès
de tous les participants selon le proto-
cole d’entretien « Base sécurisante » de
Schofield et Beek (2018). Ce protocole
porte sur cinq dimensions de la presta-
tion de soins dans le cadre d’une relation
de l’éducateur avec un enfant/jeune. Cet
article porte particulièrement sur quatre
questions du protocole d’entrevue :
1) Qu’est-ce qui a été ou demeure le plus
difficile dans votre travail auprès de ce
jeune ?
2) Quelle aide en particulier aimeriez-vous
recevoir par rapport aux thèmes dont
nous avons discuté aujourd’hui ?
3) Quelles sont les principales sources
d’aide et de soutien pour vous en
tant que fournisseur de soins pour ce
jeune ?
4) Quels aspects de votre intervention au-
près des jeunes vous donnent le plus
grand sentiment de fierté ou d’accom-
plissement ?
Analyses
L’analyse thématique réflexive (Braun et
al., 2019) a été utilisée, c’est-à-dire que
la compréhension du soutien des interve-
nants sur le lieu de travail a été construite
à partir des données plutôt qu’à partir de
conceptions prédéterminées. Nous nous
sommes intéressés à la façon dont les
expériences personnelles de ces interve-
nants s’inscrivaient dans le contexte so-
cioculturel plus large.
Présentation et discussion
des résultats
Les résultats sont présentés selon les
questions posées aux participants.
Ce qui est le plus difficile selon les
éducateurs dans leur travail
L’ensemble des données a été organisé
en quatre catégories : 1) les séquelles du
trauma complexe; 2) le soi et les capaci-
tés des éducateurs; 3) le système; 4) l’ab-
sence de difficulté.
Tableau 1
Description de l’échantillon
n%MÉT Étendue
Sexe
Femme 56 69,1
Homme 25 30,9
Âge 37,44 8,05 23-55
Plus haut diplôme obtenua
CÉGEP 50 62,5
Universitaire (premier cycle) 30 37,5
Positiona
Première ligne 76 95,0
Soutien clinique 45,0
Années de service 9,23 8,35 0-32
Années d’expérience DPJ/LSJPA 12,41 8,65 0-35
Unité de provenance
Préadolescent (6 à 13) 34 41,98
Adolescent 47 58,02
Mandat légal
LSJPA-garçons 16 19,8
DPJ-garçons 22 27,2
DPJ-filles 17 21,0
DPJ-garçons et filles 26 32,1
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Séquelles du trauma complexe
Les difficultés principales signalées
concernent des comportements sympto-
matiques d’un trauma complexe : insé-
curité affective, problèmes de comporte-
ment, problèmes cognitifs, de régulation
des émotions, d’image de soi ou dévelop-
pementaux. La citation suivante illustre
comment l’insécurité affective pourrait
coexister avec la dysrégulation émotion-
nelle.
« La relation « je t’aime, je t’aime
plus ». Ça, c’est difficile de tout le
temps jongler puis de moi, même si
justement il me dit « je te déteste ! »,
bien de faire comme : « C’est correct,
moi, je t’aime quand même puis moi,
je vais continuer à t’aider puis je
vais continuer à être là pour toi. »
Ça, c’est difficile. »
Plusieurs problèmes de comportement ont
été relevés, tels que les crises nécessitant
la contention ou l’isolement dans l’unité.
Un autre défi décrit était l’aspect répétitif
des comportements problématiques.
« C’est la journée de la marmotte
avec lui. Chaque jour, ce sont les
mêmes problématiques d’opposi-
tion. C’est là que tu vois que c’est
un trouble. C’est comme : « Ah,
qu’est-ce que tu comprends pas ?
Rentre dans ta chambre ! C’est une
consigne claire. Arrête de jouer à ça,
arrête de menacer, arrête d’intimi-
der. Arrête ! Fais juste ça. »
Perception de soi et compétences
professionnelles
Pour une majorité des participants, le
manque de compétences ou de stratégies
efficaces posait des difficultés.
« Faque c’est sûr que cette grosse
impulsivité-là je trouve ça un petit
peu plus difficile…T’essaye de faire
toute ce que tu peux pour essayer
de toute gérer pis de…contenir, si
j’peux dire, mais dès fois la moindre
petite affaire bin ça déclenche,
faque là tu… Je trouve qu’on se re-
met beaucoup en question avec [ce
jeune]. »
Système
Un nombre important de participants a
relevé des problèmes systémiques, par
exemple, n’avoir que deux adultes s’oc-
cupant d’une douzaine de jeunes avec des
besoins élevés, les impacts nocifs qu’un
jeune en crise peut avoir sur ses pairs,
les difficultés d’accès aux spécialistes
ou une planification des soins complexe
et inadéquate comme l’illustre la citation
suivante.
« Pis j’peux pas y dire que j’suis
contente non plus qu’y aille chez son
papi…On a dépassé les délais maxi-
maux, j’sais pas si vous êtes au cou-
rant là, de comment ça fonctionne,
mais après deux ans de placement
faut trouver un plan de vie alternatif,
lui ça fait trois ans presque quatre,
pis on n’a toujours pas trouvé le plan
de vie alternatif qui est le papi. »
Aucune difficulté
Un nombre limité de participants a signalé
une bonne alliance de travail avec leurs
jeunes.
« Mettons qu’il y a un peu de sable
dans l’engrenage, pour moi, c’est
pas difficile, c’est de trouver des
solutions, c’est de mettre le filet
de sécurité, c’est d’appliquer les
choses, les amener à… Puis ils sont
collaborateurs, ça fait que c’est faci-
litant. Ils me facilitent ma job. Ça fait
que dans le fond, ça va bien. Bien
oui, même s’il y a des engrenages,
même s’il y a des petites affaires,
pour moi, c’est pas un problème.
C’est normal. »
Besoins de soutien non comblés
Bien que la démarche était ancrée dans
une démarche qualitative, certaines
questions posées lors des entrevues ont
permis d’établir des tendances et des
profils particuliers. Ainsi, près d’un tiers
des personnes interrogées estimaient
qu’elles bénéficiaient d’un soutien suffi-
sant pour faire leur travail adéquatement.
Des exemples de stratégies concrètes qui
influençaient positivement ce sentiment
incluaient la présence d’un membre sup-
plémentaire du personnel en permanence
pour chaque quart de travail afin de ré-
pondre aux besoins créés par un jeune aux
comportements extrêmement désorgani-
sés, la présence d’un consultant clinique
très impliqué, le soutien fiable d’un pro-
fessionnel consultant au sein de l’équipe,
ainsi qu’une équipe d’intervenants cohé-
rente et fiable. Parmi la majorité de ceux
qui n’estimaient pas recevoir un soutien
suffisant, trois thèmes généraux repré-
sentaient leurs expériences, soit des la-
cunes sur le plan des ressources orga-
nisationnelles, du fonctionnement et du
développement professionnel, du soutien
social et des capacités des éducateurs
(voir Figure 1).
La lacune majeure en termes de soutien
se situait au niveau organisationnel. Une
intervenante exprime le souhait que la
vision du travail accompli par l’équipe
évolue : « …arrêtez de les comparer à des
enfants normaux, s’il vous plaît... ce sont
des enfants... qui sont en danger, et il y a
des traumatismes... nous devrons changer
nos méthodes de travail…. ». Le besoin
pour l’organisation de prévoir du temps
pour mieux coordonner les soins, élaborer
Figure 1. Besoins de soutien non comblés
0
20
40
60
80
1 00
1 20
Resources
organisationnelles,
fonctionnement et
approche
Soutien social Données manquantes Capacités de l'éduc
Ressources
organisationelles,
fonctionnement et
approche
Soutien social Données
manquantes Capacités
de l’éducateur
7
Vol. 24, no 1, décembre 2023
des plans d’intervention plus cohérents
et résoudre l’accès limité à tous les pro-
fessionnels de l’équipe faisait également
partie de leurs discours. Le temps de tra-
vail en équipe, les occasions de réflexion
clinique et de discussions de cas ont été
mentionnés, de même que le besoin de ré-
duire les tâches administratives et d’ob-
tenir plus d’informations pour guider les
interventions.
Le manque d’un programme de forma-
tion régulier, coordonné, stratégique, et
complet qui fournissait des stratégies
concrètes pour la pratique manque éga-
lement. Le manque de supervision cli-
nique est aussi soulevé dans le thème
du fonctionnement organisationnel. Dans
ces centres, la discussion sur les enfants
et les jeunes avait lieu lors des réunions
d’équipe dirigées par les chefs d’uni-
té. Plusieurs frustrations découlaient de
cette manière de travailler : seuls les
employés permanents pouvaient assister
à ces réunions, laissant le personnel de
remplacement exclu.
D’autre part, le temps disponible et le
mandat des réunions ne permettaient pas
d’engager une réflexion critique approfon-
die. Enfin, bien que dans de nombreuses
unités le gestionnaire soit respecté, il
était perçu comme un membre interne.
Les éducateurs ont rapporté le souhait
de la présence d’une personne extérieure
afin que cette dernière puisse apporter de
nouvelles idées, leur enseigner de nou-
velles compétences et les encourager à
explorer leur propre compétence.
Le deuxième sous-thème concerne le
manque de soutien social en milieu de tra-
vail. Les témoignages ont mis en évidence
le besoin que la direction, les autres pro-
fessionnels, les superviseurs cliniques
et l’organisation apportent une réponse
adéquate à la violence dans leur travail
quotidien. Les unités dans lesquelles ces
travailleurs en relation d’aide étaient en
poste avaient chacune un gestionnaire
d’unité, souvent ayant eux-mêmes de
l’expérience en tant qu’intervenants en
relation d’aide. Cependant, il y avait de
nombreux obstacles associés à leur dis-
ponibilité, notamment la charge de travail
et un manque de formation en supervision
clinique.
Meilleures sources de soutien dans
leur travail
Bien que la question posée était ouverte
pour inclure tout type de soutien (y com-
pris congés, pauses, rémunération, etc.),
100 % des types de soutien mentionnés
représentaient des sources sociales (voir
la Figure 1). Les perceptions des éduca-
teurs et éducatrices concernant l’effica-
cité de ces sources peuvent être influen-
cées par un chevauchement de rôles. Par
exemple, le fait d’avoir leur chef de ser-
vice comme soutien clinique est rapporté
comme pouvant empêcher l’expression de
plusieurs craintes liées à leur travail. Ces
données sont mieux comprises à travers
les figures 2 et 3, qui démontrent que le
soutien n’est pas principalement obtenu
par une approche hiérarchique.
Sources de fierté et d’accomplisse-
ment en travaillant avec les jeunes
Trois thématiques ressortent, soient les
facteurs relationnels, les facteurs liés au
jeune et les facteurs liés à l’éducateur.
Quatre participants n’étaient pas en me-
sure d’identifier un sentiment de fierté ou
d’accomplissement dans leur travail.
Parmi ceux qui ont pu en nommer, le fac-
teur le plus fréquemment mentionné se
rapporte aux facteurs relationnels, com-
prenant 46,5 % des données. Dans l’ex-
trait qui suit, une éducatrice explique
comment elle a co-construit une routine
apaisante et attentive au coucher avec
le jeune dont elle s’occupe et comment
cela a favorisé la relation. Cette routine
affectueuse illustre la nature répétitive et
prévisible de l’intervention qui a permis à
ce jeune de s’apaiser.
50%
40%
4%
4% 2%
Pairs
Chefs d'unité et professionnels
interdisciplinaires
Clients et familles
Personnels
Aucune
Figure 2. Sources de soutien perçues comme les plus efficaces
Figure 3. Professionnels nommés comme source de soutien efficace
010 20 30 40
Chef d'unité (30)
Psychologue (11)
Travailleu r social (9)
Conseillère en développement professionnel (6)
Spécialiste en intervention (5 )
Agent de sécurité (4 )
Consultant clinique (4)
Travailleu r communautaire (4 )
Psychiatre (3)
Spécialiste en activités cliniq ues (3)
Superviseur (1)
Spécialiste en réintégration (1)
Agent de planification, de programmation et de recherche (1)
Er go thé rap eut e (1 )
8
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : éducateur, épuisement professionnel, centres de réadaptation, soutien social, fierté, accomplissement.
Références
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https://doi.org/10.1007/978-981-10-5251-4_103
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childyouth.2020.105621
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Edmonds, K. (2019). Residential counselor turnover : The effects of burnout, vicarious trauma, environment, and self-care. [thèse de doctorat, Walden University, Minneapolis, États-Unis].
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Thorne, S. (2016). Interpretive description : Qualitative research for applied practice (2e ed.). Routledge.
« J’ai un lien particulier avec ce
jeune. Pendant les réunions, nous
essayons souvent de comprendre
pourquoi ces interventions fonc-
tionnent avec nous, mais pas avec
d’autres. Au moment du coucher,
j’ai une routine particulière avec lui.
Je lui fais un dessin dans le dos, je
l’enroule ensuite dans sa couverture
comme s’il était dans un cocon. Pour
terminer, je le prends dans mes bras
et je le berce. C’est vraiment spécial.
Cela s’est fait comme ça. [Une nuit]
il m’a dit « Borde-moi ». C’est exac-
tement comme ça qu’on me bordait
quand j’étais petite, alors j’ai fait la
même chose quand il m’a demandé,
« Peux-tu me bercer ? » C’est comme
ça que ça s’est fait et chaque nuit je
refais la même chose. »
Concernant les facteurs liés au jeune
(35,4 %), ils incluent leur croissance et
leurs réalisations, de les voir se sentir
bien ou de les trouver adorables. « Notre
travail est de les aider, de les aider à
réussir et à être heureux en famille. Donc,
quand vous avez l’impression d’avoir at-
teint cet objectif, ça fait plaisir. »
Finalement, le dernier thème lié aux fac-
teurs liés à l’éducateur était abordé par
18,1 % de l’échantillon. Les participants
mentionnent « Je n’ai pas lâché », « Je
m’améliore », « C’est quand j’arrive à...
pour arrêter son cycle-l’escalade de la
violence... Je suis capable de le désamor-
cer à l’avance, en [le distrayant], en le
sortant de sa bulle opaque ».
Conclusion
Le travail des éducateurs et des éduca-
trices en CR est très exigeant et carac-
térisé par les participants par un manque
sur le plan de la formation continue insuf-
fisante, un accès limité aux ressources de
base dont ils ont besoin (p. ex., temps, ac-
cès aux membres d’équipes interdiscipli-
naires, réponses adéquates à l’exposition
au traumatisme en milieu de travail) ainsi
qu’un soutien clinique limité. Il apparaît
que des changements sont nécessaires
dans les pratiques organisationnelles et
la formation professionnelle pour promou-
voir les compétences des intervenants en
relation d’aide dans la pratique clinique
et la supervision par les pairs, ainsi que
pour créer du temps pour des réunions
formelles et informelles afin d’accéder au
soutien entre pairs. Malgré des conditions
de travail parfois difficiles, ces éducateurs
et éducatrices travaillant en CR décrivent
comment la relation thérapeutique est à
la fois le mécanisme de guérison pour les
jeunes et un élément clé de leur propre
bien-être (Russ et al., 2020).
Ces résultats confirment la responsabilité
critique du système de créer les condi-
tions nécessaires au bien-être des éduca-
teurs et éducatrices travaillant en CR par
l’augmentation de la disponibilité et de la
fiabilité du soutien clinique par les pairs,
l’équipe interdisciplinaire et le supervi-
seur clinique indépendant, ainsi qu’un mi-
lieu de vie apaisant et adapté aux besoins
de chaque partie prenante. Les CR pour
enfants et adolescents doivent d’abord
être perçus comme leur foyer : l’endroit
où ils cherchent réconfort, soins, lien, re-
fuge, appartenance et joie. Les résultats
de ce projet soulignent que ce foyer ne
peut se construire sans porter une atten-
tion importante aux éducateurs et éduca-
trices qui œuvrent dans ces milieux.
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11
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Du côté de la recherche
Mieux comprendre l’influence d’un placement en vertu de la Loi sur
la protection de la jeunesse sur l’expérience scolaire d’adolescents
Élodie Marion1 et Laurence Tchuindibi1
1. Candidate au doctorat, Département de psychopédagogie et d’andragogie, Faculté des sciences de l’éducation, Université de Montréal.
Mise en contexte
Plusieurs motifs peuvent mener à une
prise en charge en vertu de la LPJ : aban-
don, négligence, mauvais traitements
psychologiques, abus sexuels ou phy-
siques ou encore trouble grave de com-
portement. Pour être pris en charge, il
faut que le jeune ait vécu une situation
compromettant sa sécurité ou son déve-
loppement. À l’adolescence, ce sont bien
souvent des difficultés comportementales
qui conduisent au placement. Le trouble
grave de comportement constitue alors
le motif principal de prise en charge et
d’intervention (Directeurs de la protection
de la jeunesse, Directeurs provinciaux,
2022). Il arrive alors que l’on se centre
sur les conduites et l’environnement so-
cial actuels du jeune délaissant ainsi son
parcours. Or, plusieurs études montrent
que de s’intéresser au vécu et aux par-
cours des jeunes permet de mieux com-
prendre et de mieux accompagner. Par
exemple, une étude a montré que la plu-
part des jeunes en situation de placement
ont vécu plusieurs événements trauma-
tiques qui exercent une influence sur leur
développement psychosocial se reflétant
souvent dans leurs comportements pro-
blématiques (Zinn, 2020).
Cet article synthétise les résultats
d’une étude dont l’objectif était
de mieux comprendre l’expérience
scolaire des jeunes en situation de
placement en vertu de Loi sur la
protection de la jeunesse (LPJ) en
centre de réadaptation pour adoles-
cents ayant des difficultés d’adap-
tation (CR) et en foyer de groupe
(foyer). Cette étude a été financée
le Fonds de recherche du Québec-
Société et culture. Elle porte sur la
manière dont ces jeunes décrivent
leur expérience scolaire depuis leur
entrée au secondaire et l’influence
du moment du placement sur leur
expérience scolaire. L’article pré-
sente les logiques d’action des
jeunes à la suite d’un placement qui
peuvent expliquer certains de leurs
comportements en plus de discuter
de pistes d’action envisageables.
Dès lors, en lien avec les parcours de ces
jeunes, nous nous intéressons plus pré-
cisément à leur expérience scolaire afin
de comprendre leur interprétation des si-
tuations et leurs logiques d’actions, soit
ce qui influence leurs choix, actions ou
résistances futures. Afin de mieux les ac-
compagner, nous cherchons à comprendre
l’expérience scolaire des jeunes en situa-
tion de placement pour éclairer les écarts
qui persistent entre leur réussite scolaire
et celles de jeunes issus de milieux dé-
favorisés ou de population générale (Gar-
cia-Molsosa et al., 2021).
À cet égard, des études sur les résul-
tats scolaires, les retards scolaires et la
qualification des jeunes montrent qu’ils
diffèrent selon le type de placement.
D’ailleurs, Maclean et ses collaborateurs
(2017) démontrent dans leur étude que
les jeunes en situation de placement en
CR ont sept fois plus de risques d’avoir
de faibles résultats en lecture compa-
rativement aux jeunes placés en famille
d’accueil ou chez un tiers. Par ailleurs,
une étude québécoise montre que plus
la durée passée en CR par un jeune est
longue, moins les jeunes ont tendance à
avoir terminé ou à être en voie de ter-
miner leur diplôme d’études secondaires
avant 18 ans (Goyette et Blanchet, 2019).
Certains éléments peuvent expliquer ces
écarts, comme l’influence des difficultés
émotionnelles et comportementales résul-
tant de traumas sur l’engagement scolaire
(Townsend et al., 2020).
À cela s’ajoutent des facteurs, associés
au risque de décrochage, comme les
changements et ruptures, le soutien et le
suivi scolaire limité (Denecheau et Blaya,
2013), les attentes à l’égard des jeunes
(Clemens et al., 2017) et l’instabilité rési-
dentielle (Zorc et O’reilly, 2013). Or, il est
difficile de saisir les processus par les-
quels ces éléments influencent les jeunes,
leur engagement scolaire et leur réussite,
c’est pourquoi nous trouvons important de
s’intéresser à l’expérience scolaire de ces
jeunes à partir de leur point de vue.
Méthodologie
Durant l’année 2021, nous avons rencon-
tré 35 jeunes âgés de 14 à 18 ans, pro-
venant de Montréal et des Laurentides. Au
moment des entretiens, ces jeunes étaient
pris en charge en vertu de la LPJ depuis
deux mois jusqu’à trois ans. Le tableau 1
présente certaines caractéristiques des
participants.
Tableau 1
Caractéristique des participants
Caractéristiques n%
Identification de genre
Femme 14 40,0
Homme 20 62,9
Non binaire 1 2,3
Prises en charge en vertu de la LPJ
Foyer de groupe 16 45,7
Centre de réadaptation 19 54,3
Placements
120 57,1
2 7 20,0
3 et plus 8 22,9
Milieu scolaire fréquenté
École ordinaire 16 45,7
École en centre de réadaptation 19 54,3
Niveau scolaire
Niveau correspondant à leur âge 15 42,8
1 an de retard 925,7
2 ans de retard et plus 11 31,4
12
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Lors d’entretiens biographiques, nous leur
avons demandé de nous décrire leur par-
cours scolaire et surtout leur expérience
scolaire, depuis leur entrée au secon-
daire. Nous nous sommes ainsi intéres-
sées à leurs logiques d’action par rapport
à leurs apprentissages, leur engagement
scolaire, leurs relations avec leurs pairs
et leurs aspirations sur le plan de la qua-
lification. En fin d’entretien, nous les
avons invités à créer une ligne du temps
qui retrace la chronologie des événements
significatifs qu’ils avaient vécus, en leur
demandant d’identifier ceux qui ont in-
fluencé positivement ou négativement
leur expérience scolaire.
Présentation et discussion des
résultats
Influence du processus de prise
en charge et du placement
sur l’expérience scolaire
L’annonce et la mise en vigueur de la
décision de placement surviennent sou-
vent de façon rapide et brusque pour les
jeunes. Celles-ci s’accompagnent d’un
bon nombre d’incertitudes et de ques-
tionnements quant aux modalités de leur
placement et le processus judiciaire qui
l’encadre. Plusieurs jeunes témoignent
ainsi être envahis par des pensées rela-
tives à leur situation de placement qui les
empêchent de réaliser certaines tâches
scolaires avec succès (les examens ou les
devoirs par exemple) comme c’est le cas
de ce jeune :
« Disons que je fais un examen puis
là toute la classe est calme, des
idées vont venir dans ma tête, vont
ruminer dans ma tête. Ce n’est pas
idéal pour les examens. C’est vrai-
ment stressant. C’est difficile de
faire la différence entre mettre mes
émotions de côté pour faire mon
examen, pour me concentrer vrai-
ment sur mon examen. » (Clarke, 15
ans, en foyer, a repris une année
scolaire, 2e situation de placement)
Les jeunes placés vivent de nombreux
changements et sont amenés à évoluer
dans un nouvel environnement à la fois
physique et relationnel. Ces changements
influencent de différentes façons leur ex-
périence scolaire, incluant la façon dont
ils se sentent dans leur nouvel environne-
ment. L’un des aspects mentionnés par les
jeunes est notamment l’impact de l’envi-
ronnement sur leur motivation scolaire tel
qu’illustré dans les propos de ce jeune :
« Je me sentais inconfortable d’être
ici [au foyer]. Puis là, j’arrivais à
l’école et je n’étais pas motivé. Je
ne me sentais pas confortable…
comme un étranger. J’étais comme
perdu…Je n’avais pas de motivation
pour travailler. Le fait que j’avais
changé d’endroit, je vivais un grand
changement dans ma vie [...] je
ne sais pas comment dire. [Je me
sentais] comme perdu et confus en
même temps. […] Les enseignants
ne le savaient pas nécessairement
que ça été difficile. Ils ne savaient
pas c’était quoi la raison, mais ils
voyaient que je travaillais pas. Ils re-
marquaient que mes notes baissaient
un petit peu. Ils pensaient que je ne
voulais pas travailler. Ils ne savaient
pas pourquoi je ne travaillais pas. »
(Guan, 16 ans, en foyer, a repris une
année scolaire, 1er placement).
À l’instar d’autres études, nos résultats
montrent que la rapidité du processus,
les incertitudes liées aux modalités de
placement et au processus judiciaire et
le nouvel environnement physique et rela-
tionnel du jeune entraînent des pensées,
du stress et une charge émotionnelle
qui rendent difficile leur concentration,
leur motivation scolaire, leur capacité à
réaliser le travail demandé et leurs ré-
sultats scolaires (Clemens et al., 2017 ;
Denecheau et Blaya, 2013). Face à ces
difficultés, nous observons que les jeunes
mettent en place différentes logiques
d’action. Certains ont recours à un repli
sur soi, tandis que d’autres mettent en
œuvre des stratégies pour ne pas discuter
de leur situation de placement avec les
enseignants, quitte à devoir assumer des
conséquences comme un échec, un retrait
de classe ou des interactions négatives
avec leurs enseignants. Il apparaît alors
pertinent de se demander pourquoi les
jeunes choisissent d’adopter ces logiques
d’action et de creuser sur les raisons qui
sous-tendent ces choix.
Logiques d’actions et influences
sur les relations élève-enseignant
et élève-pairs
Lorsque l’on s’intéresse à ce qui motive
les jeunes à adopter le repli sur soi et
à accepter les conséquences négatives
de leur comportement, nous avons noté
d’une part qu’il s’agissait fréquemment
de jeunes scolarisés en milieu scolaire
ordinaire. Trois principales logiques d’ac-
tions semblent également influencer les
relations élèves-enseignants : 1) l’évite-
ment de conversations sur leur statut et
vie personnelle ; 2) la crainte d’être jugés
et 3) le stress d’être incompris. La figure
1 illustre chacune de ces logiques par
des citations de jeunes. La crainte d’être
jugés, par exemple d’être considérés
Figure 1. Les logiques d’action qui entraînent un repli sur soi et une « acceptation » des
conséquences négatives
Les logiques
d'action
Éviter d'avoir à
élaborer sur son
statut ou sa vie
personnelle
«Ça ne me tente pas que tout le monde le sache, si je dois dire que je suis dans un
foyer, je préfère mentir. […] Je pense qu’il y a quelques profs qui doivent savoir,
mais s’ils me posent la question comment ça se passe, je ne vais pas répondre, je
vais juste dire que je ne veux pas en parler».
(Marc, 16 ans, en foyer, 1er placement)
«Tant que je ne mélange pas foyer et école, tout va bien […] Si par exemple, j’ai
une situation qui arrive au foyer, ben je ne vais pas le faire remarquer à l’école que
je ne vais pas bien…puis ne pas être capable d’expliquer la raison».
(Daniela, 16 ans, en foyer, 1er placement)
« Je ne vois pas pourquoi le dire parce qu’après ça les gens sont comme «Oh my
god, t’as fait 4 écoles secondaires, mais qu'est-ce t'as fait pour faire ça ?», «Tsé
t’es dont délinquante», mais dans le fond, des fois, c'était juste comme oui je me
faisais sortir, des fois, c'était ma faute, mais des fois, comme j’sais pas…C'est
juste que comme j'ai pas envie de le dire à n’importe qui parce que après ça ben
c'est tout de suite genre des jugements, puis là ils se font déjà une idée de j'suis
dans leur tête, puis c'est pas agréable».
(Marjorie, 17 ans, en centre de réadaptation, 2e placement)
«Il y a des profs qui ne veulent pas faire de la peine, mais s’adressent d’une façon
que tu n’aimes pas. […] À un moment donné j’ai dit à un prof que j’avais un
tribunal et il m’a dit: «tu es dans un gang de rue, c’est ça pourquoi tu vas aller au
tribunal?» Ça m’a choqué…C’est bizarre de parler à un prof qui ne sait pas ce
qu’est un centre jeunesse et ça c’est stressant pour moi».
(Émile, 14 ans, en foyer de groupe, pas de retard scolaire, plus de 3 placements)
«Je n'aime pas trop en parler pour le seul fait que je n’aime pas que les gens me
prennent en pitié parce que ça peut quand même bouleverser du monde. […] Donc,
je n’en parle pas à personne, même pas à ma blonde».
(Philippe, 18 ans, en foyer, 2e placement)
Craindre d’être
jugé ou traité
différemment
Avoir peur d'être
incompris
13
Vol. 24, no 1, décembre 2023
comme délinquants, d’être traités diffé-
remment ou d’être pris en pitié, ressort
également dans d’autres études (Clemens
et al., 2017 ; Mannay et al., 2017). À cet
égard, plusieurs jeunes mentionnent vou-
loir se sentir comme les autres et être
acceptés par leurs pairs (Johnson et
al.,2020). En ce qui concerne le stress
d’être incompris, un jeune mentionne par
exemple la méconnaissance du milieu de
la protection de la jeunesse par certains
enseignants a influencé sa relation avec
ces derniers et que les discussions avec
des enseignants ne connaissant pas le
contexte du placement s’avéraient anxio-
gènes.
En revanche, dans d’autres contextes,
dont les écoles spécialisées, il semble que
la connaissance du système, la sensibili-
té des enseignants et leur compréhension
du vécu des jeunes permettent de limi-
ter la crainte de stigmatisation ressentie
par les jeunes et de développer des re-
lations élèves-enseignants plus positives
et d’améliorer le sentiment de bien-être
à l’école des jeunes. Sans entrer dans le
détail des motifs de placement des jeunes,
il semble qu’un minimum de connaissance
sur le cadre et les conditions de place-
ment en général et leurs impacts est un
facteur important pour favoriser une meil-
leure compréhension des enseignants,
qui seront alors plus en mesure d’offrir
des mesures d’adaptation pour favoriser
l’apprentissage de ces jeunes, comme l’il-
lustrent les deux extraits suivants :
« Elle comprend [mon enseignante]
un peu notre vie, qu’est-ce qu’on a
vécu tout ça, elle comprend qu’on
n’a pas juste l’école à se préoccu-
per, elle nous donne du temps. Si
elle voit qu’on ne va pas bien, elle
va nous demander : « Est-ce que tu
veux te reposer ? » Parce que vrai-
ment quand on ne va pas bien, ben
on peut vraiment se concentrer
dans les travaux, fait que là elle
nous laisse du temps. […] Je sais,
ce n’est pas tout le monde qui peut
faire ça, surtout dans les écoles
plus régulières parce qu’ils ont plein
d’élèves, mais je trouve qu’ils de-
vraient être considérant, je ne sais
pas comment le dire, savoir que pas
tout le monde est « normal », qu’il y a
d’autres choses qui peuvent arriver
qui fait qu’on n’est pas toujours là
100%. » (Alix, 17 ans, CR, Plus de 3
placements).
« Ici [au centre] tous les profs sont
super nice, sont super compréhen-
sifs. Il y en a quelques-uns qui sont
attachants là. Je ne vais pas men-
tir. Tu sais comme ils comprennent
mieux notre environnement que si on
allait à l’école normale […] Tu sais,
ils prennent plus conscience de notre
environnement, puis de ce qu’on vit
à la maison tandis que, tu sais, chez
nous genre quand j’allais à l’école
normale, puis que je m’étais chicané
avec ma mère ou peu importe, ben
eux, ils ne le savaient pas, puis là ça
découlait un peu sur mes comporte-
ments à l’école. Mais eux, ils ne le
savaient pas parce que je ne leur en
parlais pas. » (Marco, 17 ans, CR, 1er
placement).
Conclusion
L’influence de la prise en charge sur l’ex-
périence scolaire : quoi retenir ?
Si plusieurs éléments peuvent expliquer
les retards scolaires des jeunes ainsi que
leurs difficultés à l’école, cet article in-
siste sur l’importance de comprendre les
logiques d’action et le sens donné par
les jeunes à leur expérience scolaire.
D’une part, pour mettre en place des
pratiques plus adaptées et permettre de
développer de meilleures relations ensei-
gnants-élèves et élèves-élèves et d’autre
part, pour contrer le sentiment d’impuis-
sance pouvant être vécu face aux diffi-
cultés perçues. Les résultats de notre
recherche mettent en exergue plusieurs
éléments pouvant favoriser une expé-
rience positive, dont la compréhension du
personnel enseignant vis-à-vis la situa-
tion et l’expérience vécue par ces jeunes.
La compréhension du personnel semble
permettre aux jeunes de se sentir com-
pris, mais aussi au personnel de proposer
des moyens, de soutenir et d’encourager
le jeune d’une façon plus adaptée, ce qui
contribue à améliorer la relation élève-en-
seignant en plus de favoriser un meil-
leur engagement scolaire de la part des
jeunes. Deux pistes sont ainsi dégagées
pour soutenir cette compréhension, soit
celle de la communication et de la forma-
tion. D’une part, la communication avec
les éducateurs accompagnant les jeunes
dans leur milieu de vie peut constituer
14
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : expérience scolaire, réussite scolaire, protection de la jeunesse, placement.
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accompagner ces jeunes. D’autre part, la
formation peut favoriser la sensibilisation
et améliorer la compréhension des ensei-
gnants à l’égard par exemple des compor-
tements, de l’engagement scolaire et la
mise en œuvre de pratiques soutenant la
réussite scolaire de ces jeunes (Townsend
et al. ,2020).
Disponibles en librairie et sur notre site Web : miditrente.ca
Disponibles en librairie et sur notre site Web : miditrente.ca
Nous vous
aidons à
les aider
NOUVEAUTÉ
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le coup de coeur des régions
Faire autrement : l’Envolée, une école au service des élèves
Catherine Rioux1, Louis Delcourt2 et Alicia Bernier3
1. Enseignante en adaptation scolaire, CSSDA.
2. Agent de réadaptation, CSSDA.
3. Étudiante à la maîtrise en psychoéducation, Université du Québec à Trois-Rivières.
Notre histoire
Tout a commencé en 1993, lorsque le be-
soin s’est fait ressentir dans les milieux
scolaires du Centre de services scolaire
des Affluents (CSSDA) de soulager les
écoles régulières de la charge que repré-
sente la scolarisation des élèves en dif-
ficulté de comportement. Les ressources
dont les milieux scolaires réguliers dis-
posent ne permettent pas toujours de
répondre aux besoins différents et com-
plexes de ces élèves dont le parcours
scolaire est trop souvent teinté d’exclu-
sion. Que fait-on avec ces élèves qui sont
en rupture de fonctionnement ? L’idée de
la mise sur pied d’une école spécialisée
pour les élèves ayant des troubles du
comportement a émergée des profession-
nels en place, une école qui s’adapterait
aux besoins particuliers de ces élèves et
qui favoriserait leur maintien à l’école. Un
modèle spécifique pour cette école a été
développé par ces mêmes professionnels,
ayant comme principal objectif de « faire
autrement ».
« Imaginez une école dans laquelle
les élèves se sentent accompa-
gnés, écoutés et compris. Une école
dans laquelle on a le droit d’être
nous-même avec nos forces, mais
aussi avec nos faiblesses. Imagi-
nez un endroit où les intervenants
s’adressent à vous sans jugement et
avec respect. Des passionnés bien-
veillants, toujours en quête du meil-
leur de nous-même. Une école qui
aide les élèves à atteindre leur plein
potentiel et plus encore. Imaginez
un monde aux possibilités et aux
stratégies multiples afin de viser
la réussite de nous tous. Imaginez
l’école l’Envolée. »
Laurie-Anne, 14 ans
Notre mission
L’école l’Envolée a pour mission, dans
le respect du principe de l’égalité des
chances, d’instruire, de socialiser et de
qualifier les élèves de tout le territoire de
la commission scolaire jugés en rupture
de fonctionnement comportemental, tout
en les rendant aptes à entreprendre et à
réussir un parcours scolaire. Dans le but
de réintégrer nos élèves dans un milieu
scolaire régulier, nous devons les outiller
à l’aide de moyens qui permettront de ré-
duire la fréquence et l’intensité de leurs
difficultés comportementales à l’école.
L’élève est invité à se réapproprier son
pouvoir personnel afin de se responsabi-
liser face à ses comportements et déve-
lopper son autonomie, et ce, tout au long
de son passage à l’Envolée. Nous misons
également sur le développement d’habile-
tés sociales qui permettront à nos élèves
d’adopter des comportements prosociaux
dans leur vie scolaire, sociale et profes-
sionnelle.
Nos valeurs
À l’Envolée, les valeurs de respect, de
collaboration et de disponibilité per-
mettent d’offrir un environnement où
les élèves se retrouvent dans leur zone
proximale de développement afin de pou-
voir exploiter leur plein potentiel. Notre
bienveillance et nos valeurs contribuent
à créer un environnement sécuritaire et
propice aux apprentissages.
Notre philosophie et les
approches d’intervention
privilégiées
À notre école, notre limite est celle impo-
sée par la disponibilité et la collaboration
de l’élève. Il est très important pour nous
que notre milieu soit organisé de manière
à ce qu’il y ait un équilibre entre les capa-
cités de nos élèves et nos attentes dans le
but de favoriser leur réussite et leur évo-
lution lors de leur passage parmi nous.
Comme école, nous avons décidé d’adop-
ter une vision humaniste. Plus préci-
sément, une approche centrée sur la
personne (Rogers, 1968), où l’élève est
l’expert de sa situation et le seul maître
de son cheminement scolaire. L’implica-
tion de nos élèves dans l’élaboration de
leur plan d’intervention permet de redon-
ner leur pouvoir d’agir. Ayant comme ob-
jectif de responsabiliser nos élèves face
à leurs comportements et sachant que la
responsabilité est indissociable du pou-
voir (Jonas et Vaillancourt, 2007), ceux-
ci sont amenés à prendre leurs propres
décisions, et ce, tout en connaissance
de cause. Le rôle de l’enseignant lors-
qu’un élève adopte des comportements
inadéquats est de lui rappeler les règles
et conséquences de ses actions, tout en
lui offrant des moyens d’autorégulation
appropriés. L’enseignant garde égale-
ment une posture neutre, sans jugement.
Il est bien important pour nous d’avoir
une attitude de considération positive in-
conditionnelle (Rogers, 1968) envers nos
élèves, puisque nous sommes conscients
de leur passé relationnel difficile avec les
adultes du milieu scolaire.
L’approche cognitivo-comportementale
(Chaloult et al., 2008) est également au
cœur de notre pratique. Toujours dans
l’optique de responsabiliser nos élèves,
nous travaillons auprès d’eux leurs habi-
letés d’autorégulation. Que ce soit par le
biais d’activités du Programme Hors-piste
(Centre RBC d’expertise universitaire en
santé mentale, 2023) ou l’accompagne-
ment des techniciens en éducation spé-
cialisée (TES) lorsque les élèves vivent
des difficultés, ces derniers sont amenés
à développer leurs capacités d’auto-ob-
servation de leurs pensées, émotions et
comportements. La finalité de ses appren-
tissages étant d’adopter des stratégies
adéquates de régulation émotionnelle et
comportementale, afin d’être apte à fonc-
tionner en classe ordinaire.
Notre approche comme école s’inscrit
également dans une perspective écosys-
témique (Bronfenbrenner, 1979), puisque
nous croyons que chaque système contri-
bue à la réussite éducative de nos élèves.
Pour ce faire, nous travaillons de pair avec
les parents, les milieux scolaires réguliers
et les services externes, afin d’offrir le
meilleur soutien à nos élèves. La colla-
boration est essentielle à la pérennité de
notre école.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Nos élèves
Les élèves de l’école l’Envolée pro-
viennent de l’ensemble du territoire du
CSSDA, qui comprend 14 écoles secon-
daires et environ 14 000 élèves. L’école
accueille en moyenne 70 élèves de 12
à 16 ans ayant des problèmes de com-
portement et qui ont été jugés non fonc-
tionnels en milieu scolaire régulier. Avant
qu’un élève soit transféré à notre école,
plusieurs interventions ont été mises en
place afin de favoriser son adaptation.
Après de nombreuses tentatives pour
améliorer la situation et plusieurs expul-
sions, une analyse du fonctionnement de
l’élève est réalisée afin d’établir s’il est
fonctionnel dans un milieu régulier. Lors-
qu’un élève est identifié comme étant en
rupture de fonctionnement, une analyse
de dossier est effectuée au service des
ressources éducatives du CSSDA afin de
trouver la meilleure offre de scolarisation
pour l’élève.
Ainsi, on ne devient pas un élève de
l’école l’Envolée par choix, mais bien par
obligation après un long processus d’in-
terventions infructueuses et d’évaluations
rigoureuses. Aussi, nos élèves peuvent
présenter d’autres problématiques telles
qu’un trouble déficitaire de l’attention/hy-
peractivité, un trouble spécifique des ap-
prentissages, un trouble d’adaptation, un
trouble de l’humeur, un trouble anxieux,
de la toxicomanie ou une judiciarisation.
Nous sommes conscients que nos élèves
ont pour la plupart eu des parcours de vie
tumultueux jusqu’à présent, d’où l’impor-
tance de miser sur leurs forces et de leur
offrir un milieu de vie stable et cohérent.
Notre équipe-école
Afin de soutenir les élèves dans leur che-
minement, une équipe multidisciplinaire
et spécialisée en troubles du comporte-
ment est en place. Elle comprend : deux
membres de la direction, une psychoé-
ducatrice, un agent de réadaptation, une
psychologue, 12 TES, 10 enseignants en
adaptation scolaire (titulaires), trois en-
seignants spécialistes (éducation phy-
sique, arts plastiques et anglais), un
technicien en travaux pratiques ainsi que
des services d’orthopédagogie et d’orien-
tation scolaire. Peu importe leur rôle, tous
les membres de l’équipe sont formés en
intervention et jouent un rôle d’accompa-
gnement auprès des élèves. Un atout im-
portant pour travailler dans notre milieu
est la polyvalence professionnelle, car
tous les intervenants de l’école peuvent
être amenés à devoir accomplir plusieurs
autres tâches connexes aux leurs. Par
exemple, un TES peut remplacer un ensei-
gnant si l’on juge qu’un suppléant serait
un facteur de risque à la désorganisation
du groupe.
Nos offres de services scolaires
et professionnels
Plusieurs programmes sont offerts à
l’école l’Envolée. Tout d’abord, des
groupes de 1re, 2e et 3e secondaires
couvrent le volet des apprentissages et
quelques programmes axés sur l’emploi
sont offerts comme les classes prépar-
cours et les groupes de formation des
métiers semi-spécialisés. S’ajoute à ces
offres de services le département « Es-
cale » qui est constitué d’une classe. Ce
service temporaire est dédié aux élèves
ayant des difficultés complexes les empê-
chant d’être scolarisés à temps plein. La
mission de ce département, en collabora-
tion avec les professionnels de la santé,
est de stabiliser et d’apaiser l’état géné-
ral de l’élève. Dans ce groupe, les élèves
y sont scolarisés à temps partiel. Bien que
ce département fasse partie de l’école, il
fonctionne en parallèle de la structure de
l’Envolée. C’est-à-dire que les élèves ne
se mêlent pas aux autres. Ils ont tous un
horaire spécialisé, ce qui évite les situa-
tions anxiogènes.
Ce qui nous distingue :
« Faire autrement »
Un plan d’intervention pour tous
Étant une école spécialisée en difficultés
de comportement, notre fonctionnement
diffère de celui des milieux réguliers. Tous
nos élèves ont un plan d’intervention indi-
vidualisé où, en collaboration avec ceux-
ci, leurs besoins spécifiques sont iden-
tifiés, des objectifs sont formulés ainsi
que des moyens pour les atteindre. Il est
important d’adopter une grande flexibilité
par rapport aux stratégies employées et
aux moyens mis en place dans l’intérêt de
l’élève. Ce plan est révisé périodiquement
et le suivra tout au long de sa scolarisa-
tion à l’Envolée.
Un enseignant titulaire
De plus, afin de faciliter la création du lien
de confiance et pour réduire les transi-
tions, les élèves ont un enseignant titu-
laire qui enseigne toutes les matières à
l’exception de l’éducation physique, les
arts et l’anglais. Chacun des groupes est
formé en fonction des profils des élèves
et, au besoin, il est possible de faire des
changements dans les groupes au courant
de l’année.
Des aménagements conçus
pour favoriser le bien-être
Afin de mieux répondre aux besoins de
nos élèves, nous leur offrons un milieu
avec des aménagements spécialement
conçus pour favoriser leur bien-être à
l’école. Dans les classes, on peut retrou-
ver des pédaliers et des elliptiques pour
les élèves qui ont besoin de bouger et dont
le mouvement favorise la concentration.
Des chaises berçantes sont également à
leur disposition. Chacune des classes est
aménagée d’un coin détente où l’élève
peut aller s’isoler s’il en ressent le besoin.
Dans l’école, nous disposons également
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
de locaux d’apaisement où on retrouve
des poufs, des chaises suspendues, des
lumières tamisées, des lampes à lave, des
jouets de stimulation, et d’autres outils
permettant à nos élèves de retrouver le
calme. Ces locaux sont isolés et peuvent
accueillir chacun un élève à la fois.
Un enseignement flexible
En ce qui concerne le côté pédagogique,
que ce soit en ajustant le déroulement de
la journée en fonction de la disponibilité
des élèves ou en diversifiant les méthodes
pour évaluer leurs productions, la flexibi-
lité représente une composante indispen-
sable au bon fonctionnement en classe.
Nous croyons qu’il est de notre responsa-
bilité d’adapter l’environnement afin d’of-
frir des conditions qui sont propices aux
apprentissages. Chaque enseignant étant
formé en troubles du comportement, agis
également au même titre qu’un interve-
nant pour accompagner les élèves lorsque
leurs besoins sortent du cadre pédago-
gique. En plus de cela, il y a un TES par
classe afin d’offrir du soutien additionnel
aux élèves. L’accent étant mis sur la res-
ponsabilisation de nos élèves, ceux-ci ne
se retrouvent pas en local de retrait lors-
qu’ils se retirent de la classe.
Les étapes d’intervention
Nous avons élaboré un système avec des
moyens d’intervention séparés en dif-
férentes zones de couleur (vert, jaune,
orange et rouge). Tout d’abord, les pre-
miers moyens d’intervention offerts sont
le « coin calme » en classe ainsi que
le « banc » à l’extérieur de la classe.
Ces moyens de zone verte permettent à
l’élève de se déposer et de marquer un
temps d’arrêt avec le TES. Ensuite, en
zone jaune, on retrouve l’Accalmie et le
Phare qui servent également à déposer
un élève qui est toujours en état de fonc-
Les différents lieux d’apaisements
L’Accalmie
Le Havre
L’Embarquement
Le Quai
La Boussole
Le Refuge
Le Phare
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : Troubles du comportement, école secondaire, jeunes en difficulté, adaptation scolaire, responsabilisation, interventions intensives.
Références
Bronfenbrenner, U. (1979). The ecology of human development : Experiments by nature and design. Harvard University Press.
Centre RBC d’expertise universitaire en santé mentale. (2023). Programme Hors-piste secondaire. https://sante-mentale-jeunesse.usherbrooke.ca/hors-piste/programme-secondaire/
Chaloult, L., Ngo, T. L., Borgeat, F., Cousineau, P. et Goulet, J. (2008). La thérapie cognitivo-comportementale : théorie et pratique. Gaëtan Morin.
Desbiens, N., Couture, C. et Ross, J. (2020). Les interventions spécialisées et intensives en classes adaptées. Dans L. Massé, N. Desbiens et C. Lanaris (dir.), Les troubles du comportement à l’école (3e éd.,
p. 341-362). Chenelière Éducation.
Jonas, H. et Vaillancourt, Y. (2007). Le principe responsibilité. CEC.
Kauffman, J. M. et Landrum, T. J. (2009). Politics, civil rights, and disproportional identification of students with emotional and behavioral disorders. Exceptionality, 17(4), 177-188. https://doi.
org/10.1080/09362830903231903
Rogers, C. R. (1968). Le développement de la personne. Dunod-Interéditions.
tionnement, mais en prévention de poten-
tielles manifestations comportementales.
Ces salles offrent plusieurs alternatives
de retour au calme comme : une biblio-
thèque, des instruments de musique, des
mandalas géants…). Dans cette zone,
les TES doivent susciter la réflexion chez
l’élève en s’inspirant de la chaîne de pen-
sée. Aussi, si le besoin est, la zone rouge
s’en suivra comme moyen d’intervention
avec la Vigie, Babord et Tribord pour les
élèves en bris de fonctionnement. À ce
stade, les professionnels sont avisés et se
rendent disponibles pour soutenir les TES.
Sans oublier le Quai qui est une salle de
décharge permettant aux élèves de désa-
morcer le sentiment de colère en passant
par l’activité physique. Finalement, si la
situation ne s’est toujours pas résorbée,
l’élève rencontrera la direction qui va lui
rappeler les règles et l’inviter à prendre
une décision. Tout au long de ce proces-
sus, c’est l’élève qui détient le pouvoir de
sa situation et les adultes sont là pour le
soutenir dans son processus de décision.
La formation continue
Dans le but de toujours mieux accompa-
gner nos élèves et d’avoir des pratiques
issues de données probantes, nous of-
frons de la formation continue à notre
personnel. Les choix des formations sont
faits en fonction des caractéristiques et
besoins de notre milieu. Par exemple, l’an
dernier, nous avons ciblé comme sujets
les fonctions des comportements et les
traumas complexes.
Les enjeux et défis
Une école spécialisée comme l’Envo-
lée apporte son lot de défis et d’enjeux
auxquels il faut faire face. La création
d’un lien de confiance entre l’élève et le
personnel scolaire, qui est essentielle à
établir, représente le premier grand défi
rencontré lorsque l’élève intègre notre
école. Comme précisé précédemment,
nos élèves ont un passé relationnel hou-
leux avec les adultes du milieu scolaire.
Donc, en plus de devoir travailler à dé-
velopper un lien avec les élèves, nous
devons travailler avec la méfiance qu’ils
ont développée par leurs expériences an-
térieures. Pour créer ce lien, nous misons
énormément sur la cohérence, la considé-
ration positive inconditionnelle ainsi que
le respect du rythme de nos élèves vis-à-
vis l’établissement d’une relation. Il faut
également faire attention à ne pas créer
de relation fusionnelle, puisque certains
de nos élèves présentent des difficultés
importantes d’attachement. Nous devons
donc trouver un équilibre entre créer un
lien de confiance sans créer une relation
de dépendance. Il est reconnu que nos
élèves correspondent au type d’élève le
plus ardu à intégrer à l’intérieur d’une
classe ordinaire (Kauffman et Landon,
2009). Bien que plusieurs élèves réus-
sissent à réintégrer les milieux du sec-
teur régulier, un écart considérable entre
l’Envolée et l’école régulière est tout de
même présent. Par exemple, les périodes
de cours écourtées, les horaires et les
plans de travail adaptés, sans oublier
l’accompagnement individualisé pour
tous. La transition représente donc un
défi important à relever pour nos élèves
et malheureusement ce ne sont pas tous
qui y parviennent. Étant constamment en
recherches d’idées et de stratégies pour
éviter l’impasse de l’arrêt de scolarisation
que peut occasionner cette transition, on
se doit de respecter les limites de notre
rôle scolaire, ce qui peut être difficile à
accepter.
Nos perspectives pour l’avenir
L’observation est unanime au sein de
notre équipe, nous sommes témoins d’une
réduction des comportements agressifs
chez plusieurs de nos élèves lorsqu’on
consulte le suivi de leurs comportements.
Donc, nous sommes d’avis que notre
école peut faire la différence chez nos
élèves. Nos pratiques étant en constante
évolution, selon les défis des élèves qui
se présentent à nous. De plus, quelques
projets d’avenir sont espérés dans les
prochaines années. Tout d’abord, nous
avons le désir de nous affilier à un dépar-
tement de psychoéducation d’une univer-
sité québécoise. Nous souhaitons, grâce à
cette affiliation, devenir un milieu d’expé-
rimentation et d’innovation basé sur des
pratiques dont l’efficacité est étudiée par
des équipes de recherches en psychoédu-
cation. Ensuite, la toxicomanie étant une
problématique fréquemment rencontrée
à l’école, nous espérons nous spécialiser
davantage dans ce domaine afin de dé-
velopper de meilleures compétences en
intervention. Finalement, nous croyons
qu’affilier notre école à des milieux sco-
laires réguliers favoriserait la réintégra-
tion des élèves, sans oublier que cela fa-
ciliterait le transfert d’informations entre
établissements.
Pour avoir une idée concrète de
l'école, visionnez la capsule sui-
vante: https://www.youtube.com/
watch?v=YOJvIzZ11Dw&t=6s
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
1. Psychoéducatrice et doctorante, doctorat interdisciplinaire en santé et société, Université du Québec à Montréal.
2. Ph. D., psychoéducateur et professeur agrégé, Département d’éducation et formation spécialisées, Université du Québec à Montréal.
La promotion des compétences so-
cioémotionnelles préoccupe les
acteurs de l’éducation. Dans les
écoles québécoises, les ensei-
gnants et les intervenants agissent
quotidiennement pour soutenir
ces compétences. De plus, les
chercheurs tentent de proposer
des moyens pour les promouvoir.
D’après Denham et al. (2012), les
compétences socio-émotionnelles
figurent parmi les compétences
les plus importantes pour favoriser
la réussite scolaire. En ce sens, le
Programme-cycle de l’éducation
préscolaire du Québec (Ministère de
l’Éducation du Québec [MEQ], 2021)
vise la promotion des compétences
socio-émotionnelles dans ses axes
de développement. Dans cette pers-
pective, le MEQ convient que les
élèves de cinq à six ans doivent,
entre autres, apprendre à collaborer
et à créer des liens avec les autres,
ainsi qu’à résoudre leurs conflits. Il
reconnaît également que les élèves
doivent apprendre à exprimer et à
réguler leurs émotions, et à réagir
avec assurance.
Question de l’heure
Comment les jeux de bataille peuvent-ils soutenir le développement des
compétences socio-émotionnelles chez les enfants du préscolaire ?
Andrée-Ann Garneau1 et Jonathan Bluteau2
?
Pour développer les compétences
socio-émotionnelles des enfants,
les jeux de bataille représentent une
avenue prometteuse.
À travers ces jeux, les enfants apprennent
à exprimer et à réguler leurs émotions, à
décoder les émotions d’autrui et à res-
pecter le tour de rôle (Boulton et Smith,
1989 ; LaFreniere, 2011). Donc, comment
les jeux de bataille peuvent-ils soute-
nir le développement des compétences
socio-émotionnelles chez les enfants du
préscolaire ? Pour répondre à cette ques-
tion, les compétences et les jeux de ba-
taille seront approfondis ci-après.
Les compétences
socio-émotionnelles
Plusieurs définitions existent pour décrire
les compétences socio-émotionnelles
(Lillvist et al., 2009). Celle de Gresham
(2016) distingue trois concepts liés au
comportement social : les habiletés so-
ciales, les tâches sociales et la compé-
tence sociale. Les habiletés sociales
revoient aux comportements permettant
d’accomplir avec succès une tâche so-
ciale. Cette dernière correspond au ré-
sultat produit par des habiletés sociales
comme se faire un ami. Finalement, la
compétence sociale se rapporte au juge-
ment des individus selon lequel un enfant
a accompli avec succès une tâche sociale.
Succinctement, il convient de développer
les habiletés sociales des enfants afin
qu’ils réalisent avec succès les tâches
sociales qu’ils désirent accomplir (p. ex.
nouer une relation d’amitié avec un pair).
Ensuite, le cadre développé par le Colla-
borative for Academic, Social, and Emo-
tional Learning (CASEL, 2012) permet, no-
tamment, de définir ce à quoi réfèrent les
compétences socio-émotionnelles. Ces
dernières correspondent à la conscience
de soi (p. ex. reconnaître ses émotions), à
la conscience sociale (p. ex. développer
son empathie), à l’autorégulation (p. ex.
gérer ses comportements), aux habiletés
relationnelles (p. ex. collaborer avec les
autres) ainsi qu’à la prise de décision
responsable (p. ex. en considérant les
conséquences sur soi et sur autrui).
Au préscolaire, plus spécifiquement, les
compétences socio-émotionnelles atten-
dues comprennent la façon dont les en-
fants se sentent et se perçoivent, la façon
dont ils perçoivent les autres, l’expression
et la régulation de leurs émotions ainsi
que le développement de relations inter-
personnelles significatives et sécurisantes
avec autrui (National Scientific Council on
the Developing Child, 2004). Plus particu-
lièrement, les études soutiennent qu’il y a
des avantages associés au développement
des compétences socio-émotionnelles.
Dans une étude de Denham et al. (2014)
menée auprès de 101 enfants d’âge prés-
colaire, on observe que ces compétences
sont associées à l’adaptation et à la réus-
site scolaire. De même, une étude longi-
tudinale réalisée auprès de 70 enfants du
préscolaire jusqu’à la deuxième année du
primaire indique que les comportements
prosociaux (p. ex. collaborer avec les
autres) sont corrélés à l’établissement
de relations positives avec les pairs : les
élèves qui adoptent ces comportements
seraient plus acceptés et moins rejetés
par ces derniers (Caputi et al., 2012).
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Les jeux de bataille
Les jeux de bataille sont des jeux sociaux
nécessitant la participation d’au moins
deux individus. La taxonomie de Boulton
et Smith (1989) est retenue pour sa perti-
nence en regard du contexte de cet article.
Cette taxonomie présente un ensemble de
jeux incluant, dans certains cas, un aspect
verbal. Spécifiquement, elle inclut les jeux
de chasse et de poursuite ainsi que les
défis ludiques (voir Tableau 1). Ceux-ci
se différencient des sports de combat
comme la boxe, la lutte ou le judo.
Les jeux de bataille se distinguent des
agressions grâce à l’emploi de signaux
comportementaux, comme les affects po-
sitifs, l’inversion des rôles et l’interac-
tion sociale maintenue (Boulton et Smith,
1989 ; St-George et Fletcher, 2020). Une
bonne interprétation de ces signaux
s’avère essentielle puisqu’elle permet de
gérer le jeu et d’éviter que celui-ci ne dé-
génère vers de réelles agressions. Préci-
sément, les affects positifs correspondent
aux rires et aux sourires observés en fai-
sant l’expérience du jeu, contrairement
aux sourcils froncés et au regard fixe qui
se manifestent lors d’un assaut. Durant le
jeu, en outre, les rôles peuvent s’inver-
ser : le chasseur devenant le chassé, par
exemple. Un joueur peut aussi s’autohan-
dicaper volontairement pour permettre à
son partenaire de le dominer, à l’inverse
des agressions. Enfin, après un jeu de
bataille, les participants vont demeurer
ensemble et maintenir une interaction so-
ciale positive, alors qu’à la fin d’un com-
bat agressif, ils vont se séparer.
« Titania, Rosalind et Francisca
s’alignent près du mur, tandis que
Corin, Paris et Oberon se tiennent
à environ six pieds devant elles.
Les filles se dispersent ensuite et
s’enfuient, esquivant les garçons
pendant qu’ils courent. Les garçons
doivent essayer de les rattraper au
passage » (Jarvis, 2007, p. 183, tra-
duction libre).
Les jeux de bataille apparaissent à la
période préscolaire et atteignent le som-
met entre l’âge de 7 et 11 ans. Après, ils
perdent de l’intérêt jusqu’au début de
l’adolescence. Par conséquent, la préva-
lence de ces jeux prend la forme d’un « U »
inversé : au préscolaire, ils occupent 5 %
du temps des enfants, entre 7 et 11 ans,
ils prennent 10% de leur temps et, à par-
tir de 13 ans, les jeunes y consacrent 5
% de leur temps. Ce sont principalement
les garçons qui s’engagent dans les jeux
de bataille, ceux-ci préférant les jeux de
combat et les filles, les jeux de poursuite
(St-George et Fletcher, 2020).
Tableau 1
Taxonomie des jeux de bataille
selon Boulton et Smith (1989)
Jeux de bataille
Coups/contacts (p. ex. bousculade)
Chasser
Courir et dépasser une personne
Essayer d’attraper une personne
sans succès
Retenir une personne
Entrer en collision avec une personne
« Hit-and-run »
Défis ludiques
Les écrits sur les jeux de bataille, chez les
mammifères et les humains, montre que
ces jeux influencent positivement le déve-
loppement des compétences socio-émo-
tionnelles, précisément les habiletés so-
ciales et l’autorégulation émotionnelle
(Pellis et Pellis, 2012). À travers la prise
de risque et l’imprévisibilité reliées à ces
jeux, les enfants doivent communiquer et
moduler leurs comportements afin d’évi-
ter l’escalade vers de réelles agressions.
En ce qui a trait à la communication, les
expressions faciales, les postures corpo-
relles et les mouvements réalisés durant
le jeu fournissent des informations sur
les émotions et les cognitions (p. ex. les
intentions). En effet, les enfants doivent
surveiller les signes de leur partenaire
(p. ex. ses expressions faciales et ses
comportements) et agir en conséquence,
ce qui exige l’acquisition de différentes
habiletés comme la gestion des émo-
tions et la résolution de problèmes (c.-
à-d. trouver des solutions appropriées au
contexte) (Palagi, 2018 ; Pellis et Pellis,
2017). De plus, l’expérience du partage
des émotions amène une réciprocité dans
la relation, les enfants étant en mesure de
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : Jeux de bataille, prise de risque, compétences sociales, compétences émotionnelles, compétences socio-émotionnelles, enfants, préscolaire.
Références
Boulton, M. J. et Smith, P. K. (1989). Rough and tumble play in children : Research and theory. Infancia y Aprendizaje, 12(48), 79-91. https://doi.org/10.1080/02103702.1989.10822250
Caputi, M., Lecce, S., Pagnin, A. et Banerjee, R. (2012). Longitudinal effects of theory of mind on later peer relations : The role of prosocial behaviour. Developmental Psychology, 48(1), 257-
270. https://doi.org/10.1037/a0025402
Collaborative for the Advancement of Social and Emotional Learning (CASEL). (2012). Effective social and emotional learning programs : Preschool and elementary school edition. CASEL.
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Learning and Individual Differences, 22(2), 178-189. https://doi.org/10.1016/j.lindif.2011.05.001
Denham, S. A., Bassett, H. H., Zinsser, K. et Wyatt, T. M. (2014). How preschoolers’ social-emotional learning predicts their early school success : Developing theory-promoting, competen-
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Development, 27(2), 171-188. https://doi.org/10.1080/09575140701425324
LaFreniere, P. (2011). Evolutionary functions of social play : Life histories, sex differences, and emotion regulation. American Journal of Play, 3(4), 464-488.
Lillvist, A., Sandberg, A., Björck-Åkesson, E. et Granlund, M. (2009). The construct of social competence : How preschool teachers define social competence in young children. International
Journal of Early Childhood, 41(1), 51-68. https://doi.org/10.1007/BF03168485
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tion/jeunes/pfeq/Programme-cycle-prescolaire.pdf
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at Harvard University. https://harvardcenter.wpenginepowered.com/wp-content/uploads/2004/04/Childrens-Emotional-Development-Is-Built-into-the-Architecture-of-Their-Brains.pdf
Palagi, E. (2018). Not just for fun ! Social play as a springboard for adult social competence in human and non-human primates. Behavioral Ecology and Sociobiology, 72(6), 90. https://doi.
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jeunes enfants. https://www.enfant-encyclopedie.com/pdf/expert/agressivite-agression/selon-experts/les-bagarres-ludiques-au-cours-de-la-petite-enfance-et-leur-role
Pellis, S. M. et Pellis, V. C. (2017). What is play fighting and what is it good for ? Learning and Behavior, 45, 355-366. https://doi.org/10.3758/s13420-017-0264-3
St-George, J. M. et Fletcher, R. (2020). Rough-and-tumble play. Dans S. Hupp et J. D. Jewell (dir.), The encyclopedia of child and adolescent development (p. 1 à 14). JohnWiley and Sons,
Inc. https://doi.10.1002/9781119171492.wecad276
prévoir les intentions de leur partenaire et
d’adapter leurs comportements en fonc-
tion de celles-ci. Ainsi, les jeux de bataille
entre pairs constitueraient un moyen d’in-
tégrer le monde social (Palagi, 2018).
Conclusion
Les jeux de bataille peuvent constituer
une activité pédagogique. Par leur enga-
gement dans ces jeux, dans des situations
réelles comportant une prise de risque et
favorisant une collaboration entre pairs,
les enfants pratiquent leurs compétences
socio-émotionnelles. Ils utilisent aussi les
rétroactions de leurs pairs pour ajuster
leurs comportements. La pratique de ces
jeux, dans les milieux destinés aux en-
fants d’âge préscolaire, est donc encou-
ragée.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le coin des parents
L’intégration sensorielle : une paire de lunettes à considérer pour mieux
comprendre les besoins et les particularités des enfants
Marie-Lyne Benoit1
1. Ergothérapeute, Enoya - Clinique privée pour les enfants, adolescents et leur famille.
L’intégration sensorielle
Cette approche, développée par Dre Jean
Ayres (Shelly et al., 2019), ergothéra-
peute américaine, réfère au processus
neurologique qui permet à une personne
d’interpréter les différentes informations
provenant de ses sens afin de réagir
adéquatement aux demandes de son en-
vironnement. Ainsi, les informations sont
captées par les différents sens, puis vé-
hiculées dans le système nerveux qui va
déterminer l’importance qu’il donne à ces
informations et orienter les réactions en
conséquence.
Les sens impliqués dans l’intégration
sensorielle sont la vision, l’audition, l’ol-
faction, le goût, le toucher, le système
vestibulaire (gère les informations liées
à la position de la tête et du corps dans
l’espace), la proprioception (permet de
sentir la position des différentes parties
du corps dans l’espace sans les regarder)
et l’intéroception (perception des sensa-
tions à l’intérieur du corps : envie (urine,
selles), faim, soif, température, douleur).
Afin de mieux illustrer le processus d’in-
tégration sensorielle, vous pouvez imagi-
ner que chaque sens est un thermostat.
Chaque thermostat peut être programmé
pour répondre adéquatement aux stimuli
de l’environnement ou encore, être pro-
grammé très/trop réactif (hyper réactivité)
ou pas assez réactif (hypo réactivité) aux
divers stimuli. Cela explique, par exemple,
qu’un jeune puisse être hyper réactif aux
sons (audition), mais être en recherche
de mouvements (proprioception, vestibu-
laire). Cela met également en lumière que
votre jeune n’a pas de contrôle sur la pro-
grammation de ses thermostats et subit
les conséquences du traitement neurolo-
gique des informations sensorielles qu’il
reçoit.
Dans cet article, nous explorerons
ce qu’est l’intégration sensorielle
en plus de proposer quelques pistes
d’accompagnement sensoriel pour
mieux vous aider à intervenir auprès
de votre enfant.
Les déficits d’intégration
sensorielle
Des troubles ou déficits du processus
d’intégration sensorielle peuvent se ma-
nifester par des signes d’hypo ou d’hyper
réactivité sensorielle.
Reconnaître des signes
d’hypo réactivité
Les enfants présentant une hypo réactivi-
peuvent :
Sembler léthargiques ;
Être sédentaires ;
Être sans motivation ;
Ne pas réagir aux changements de
température ou à la douleur ;
Ne pas détecter la majorité des stimuli
environnants ;
Paraître « dans la lune ».
Sur le plan sensoriel, c’est comme si ces
enfants tombaient en « veille » et demeu-
raient dans cet état, comme un écran
d’ordinateur qui se met en mode veille.
D’autres peuvent :
Être en constante recherche de stimu-
lations sensorielles ;
Porter beaucoup les objets à la bouche ;
Faire du bruit ;
Toucher à tout ce qui est à leur portée ;
Être impulsifs.
Sur le plan sensoriel, c’est comme si ces
enfants avaient un écran d’ordinateur en
veille et qu’ils bougeaient intensément la
souris de leur ordinateur pour « réactiver »
leur écran, mais que celui-ci se remet-
tait ensuite rapidement en veille et qu’ils
devaient le réactiver continuellement en
bougeant la souris (manifestations de re-
cherche sensorielle).
Reconnaître des signes
d’hyper réactivité
Pour les enfants qui ont ce profil senso-
riel, c’est comme si des « pop-up » appa-
raissaient constamment à leur écran d’or-
dinateur les dérangeant et détournant leur
disponibilité et leur attention-concentra-
tion de ce qui est attendu d’eux.
Les enfants souffrant d’hyper réactivité
peuvent :
Avoir des réactions aversives démesu-
rées aux stimuli ;
Être dérangés par des situations inat-
tendues ;
Présenter des difficultés à rester
calmes et attentifs.
À noter
Selon une étude réalisée au milieu des années 2000 (Miller, 2006), 60 % des en-
fants Américains ayant un trouble du déficit de l’attention (TDA/TDAH) présentent
aussi des difficultés sensorielles et 22 % des enfants de la population présentent
uniquement un trouble du traitement de l’information sensorielle. Dans ce contexte,
offrir des stratégies sensorielles aux enfants peut donc permettre d’optimiser leur
fonctionnement au quotidien (Côté, 2016).
23
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Pistes d’accompagnement
Identifier le profil sensoriel de votre en-
fant ou la tendance qui se dessine pour
chacun de ses « thermostats sensoriels »
est la première étape pour pouvoir mieux
l’accompagner. Si vous pouvez adap-
ter l’environnement afin de diminuer les
sources d’inconfort sensoriel en présence
d’hyper réactivité (p. ex., réduire la lu-
mière provenant de néons, les sons am-
biants), augmenter certains types de sti-
muli pour accroître l’éveil en cas d’hypo
réactivité (p. ex., température fraîche de
la pièce, luminosité plus grande, odeur
ambiante vivifiante) et offrir plus de sti-
mulations proprioceptives à votre enfant
en recherche sensorielle, cela devrait
contribuer à ramener son niveau d’éveil
dans une zone optimale ou à l’y maintenir.
Les ergothérapeutes utilisent différentes
stratégies pour aider les enfants à mieux
intégrer les informations sensorielles afin
de demeurer dans un niveau d’éveil opti-
mal. Les interventions peuvent être uni-
verselles, ciblées ou spécifiques à chaque
profil sensoriel. Cette section présente
des interventions universelles bénéfiques
pour tous les enfants.
À quel moment ?
L’utilisation d’activités sensori-motrices
prévues à l’horaire peut aider tous les
enfants à mieux répondre à leurs be-
soins sensoriels. Le tableau 1 en présente
quelques exemples.
Des activités pour tous
La proprioception a un effet calmant et or-
ganisant. Les stimulations proprioceptives
peuvent donc aider tous les enfants, peu
importe leur profil sensoriel. De ce fait,
elles contribueront à diminuer les incon-
forts sensoriels pour les hyper réactifs, à
augmenter le niveau d’éveil pour les hypo
réactif et à maintenir le niveau d’éveil
des enfants en recherche sensorielle à un
niveau optimal, ce qui a comme effet de
diminuer les comportements de recherche
sensorielle. Les activités proprioceptives
peuvent être actives (le jeune effectue des
contractions musculaires) ou passives (il
reçoit des stimulations via une modali-
té sensorielle). Le tableau 2 en présente
quelques exemples.
Tableau 1
Exemples d’activités sensori-motrices
Tableau 2
Exemples d’activités proprioceptives
Dirigé Transition Avant une
activité Au besoin
À un moment prévu
dans l’horaire et fixé
d’avance par le par-
ent (p. ex. avant de
déjeuner le matin)
Entre deux activi-
tés dans la routine
(p. ex., au retour
de l’école, avant le
souper).
Avant d’amorcer
une activité assise
à la table (p. ex.,
étude-devoirs,
repas).
Lors d’une baisse
de disponibilité de
l’enfant, avant une
activité ou un mo-
ment de défi (p. ex.
avant l’habillage).
Actives Passives
Marche de l’araignée.
Pompe (pushup) /popcorn sur la chaise.
Prendre et maintenir la position du
sphinx couché sur le ventre au sol, en
appui sur les avant-bras.
Étirer un élastique avec ses bras ou ses
jambes.
Toutou lourd.
Utilisation d’un « disco sit » sur la
chaise.
Catalogne ou veste lestée.
Recevoir un massage avec pression
profonde.
24
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : intégration sensorielle, proprioception, hyporéactivité, hyper réactivité, recherche sensorielle, ergothérapie.
Références
Côté, S. (2016). Favoriser l’attention par des stratégies sensorielles. Chenelière Éducation.
Lane, S. J., Mailloux, Z., Schoen, S., Bundy, A., May-Benson, T. A., Parham, L. D., Smith Roley S. et Schaaf, R. C. (2019). Neural foundations of Ayres Sensory Integration. Brain Sciences, 9(7),
153. https://doi.org/10.3390/brainsci9070153
Miller, L. J. (2014). Sensational Kids. Perigee-Penguin Group.
Ces pistes sont des idées d’activités pour
vous aider à supporter votre enfant qui
présente des particularités sensorielles.
En cas de difficultés importantes ou de
défis qui persistent dans le temps, consul-
ter un ergothérapeute pour enfants pour-
rait permettre de normaliser le processus
d’intégration sensorielle de votre jeune
(reprogrammer ses thermostats senso-
riels afin qu’ils traitent adéquatement les
différentes informations sensorielles).
Conclusion
L’intégration sensorielle est « une paire de
lunettes » à considérer pour mieux com-
prendre les besoins et les particularités
des enfants. Les ergothérapeutes, en tant
que professionnels spécialisés dans ce
domaine, jouent un rôle essentiel dans la
prise en charge et l’accompagnement des
enfants rencontrant des difficultés senso-
rielles. Grâce à des interventions adap-
tées, ils contribuent à soutenir le dévelop-
pement global de l’enfant et à favoriser
son bien-être dans son environnement
quotidien.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le coin des jeunes
Les outils technologiques pour soutenir les fonctions exécutives : notre top 5
Sabrina Dufour1
1. Sabrina Dufour, orthopédagogue en pédopsychiatrie, CIUSSSE-CHUS.
Les programmes de formation offerts au niveau secondaire ou postsecondaire sont variés et souvent très différents selon les intérêts
des élèves qui y sont scolarisés. Plusieurs d’entre vous doivent probablement étudier de nombreuses heures et planifier des remises
de travaux alors que d’autres seront davantage sollicités durant les heures de classe et moins en soirée. Par contre, une chose
semble commune à tous les élèves et étudiants qui évoluent dans le monde scolaire dès l’entrée au secondaire : une augmentation
importante des demandes reliées à vos fonctions exécutives. Nous connaissons tous une personne qui adore l’organisation et qui
multiplie les stratégies de codes de couleurs, d’agenda structuré, de documents bien classés et de rappels efficaces. Cependant,
si cette habileté est moins naturelle pour toi et que les techniques apprises quand tu étais jeune ne semblent pas efficaces, tu as
besoin de nouveaux leviers pour optimiser ton fonctionnement au quotidien. C’est précisément dans ce contexte où les outils tech-
nologiques arriveront à ton secours et seront d’une aide précieuse jusqu’à l’âge adulte.
Fonctions quoi ?
Les fonctions exécutives sont de plus en
plus présentes dans les techniques d’en-
seignement ou encore dans les méthodes
de rééducation proposées en scolaire,
celles-ci peuvent sembler complexes à
première vue. Cependant, aucune inquié-
tude à avoir ici, la Figure 1 te présente
un résumé très simple de ce que tu dois
retenir sur ces fonctions essentielles à tes
apprentissages.
Quand les méthodes
traditionnelles ne suffisent pas
Tu sais maintenant que le développement
des fonctions exécutives est influencé par
tes expériences ou encore par les gens
qui t’aident, comme tes parents qui ont
Fonctions
exécutives
Fonctions qui peuvent...
Se développer jusqu’à l’âge adulte
Être aidées et influencées
par tes expériences
Utiles dans plusieurs actions complexes de
ton quotidien
Utiles dans tes relations sociales
Utiles dans tes apprentissages
Ça devrait m’intéresser, parce que...
Ensemble de processus qui permettent...
Réguler les pensées
Réguler les émotions
Réguler les actions
Mémoire de travail
Flexibilité cognitive
Inhibition
Autres, comme la planification...
Processus comme...
Figure 1. Résumé des principaux éléments à retenir sur les fonctions exécutives
pris le temps de t’expliquer à nombreuses
reprises l’importance d’utiliser ton agen-
da ou d’étudier longtemps d’avance pour
bien performer à un examen. Cependant,
parfois, ça ne semble pas suffire.
Heureusement, grâce aux nombreuses
avancées technologiques des dernières
années et à l’ouverture du monde scolaire
aux technologies, de nouvelles méthodes
peuvent être proposées dès la 1re secon-
daire pour soutenir le développement de
ces fonctions. L’objectif est donc de t’ai-
der à te trouver de nouvelles habitudes de
travail en lien avec les fonctions exécu-
tives.
Depuis plus de sept ans, un programme,
spécialement conçu pour les adolescents
ayant des difficultés avec ces habiletés,
propose une approche novatrice intitulée
Programme Réflexe. Dans ce programme,
les participants sont invités à prendre part
à une rééducation spécialisée en petit
groupe afin d’explorer avec eux des ap-
plications, des logiciels ou des outils de
rappels par le biais des outils technolo-
giques.
Comme tu es particulièrement futé d’avoir
accepté de consulter la revue La foucade,
je te propose un top 5 des outils qui te fe-
ront dire : « Mais pourquoi je n’ai pas uti-
lisé ça avant ? » Et le plus beau dans tout
ça, c’est que mes propositions sont toutes
gratuites et faciles d’utilisation.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Top 5 des outils
Avantages
Permet d’intégrer une alarme au mo-
ment désiré. Tu peux même mettre des
rappels récurrents, pour tes tâches à la
maison par exemple.
Offre des listes partageables. Tu peux
donc envoyer certaines tâches à tes
parents (p. ex., acheter du lait, ren-
dez-vous à venir) et ils peuvent faire de
même dans ta liste (p. ex. sortir le bac
de recyclage). Une fois la tâche com-
plétée, on peut constater que l’autre
personne a exécuté sa tâche.
Permet de libérer ta mémoire et ainsi
devenir plus disponible pour recevoir
de nouvelles tâches ou informations
importantes.
# 2 Outil de planification du temps
Maintenant que tu possèdes un premier
outil de rappel de tâches à venir, il te faut
également de l’aide pour planifier ton tra-
vail. Savoir que tu as une période d’étude
de sciences ce soir est un premier pas
dans la bonne direction. Cependant, il est
peut-être difficile pour toi de débuter une
tâche ou d’élaborer un plan afin de prépa-
rer ta séance d’étude. Si tu te reconnais
dans cette situation, notre outil numéro 2
te sera très utile. Il s’agit d’un outil de
planification de séquences de travail ou
encore un outil d’organisation du temps.
Nous utilisons Oplan, qui est à la fois très
visuel dans son utilisation et intuitif dans
son fonctionnement.
# 1 Outil de rappels des tâches
Un devoir de sciences à remettre pour jeu-
di, un rendez-vous chez le coiffeur ce soir,
de nouvelles chaussures de sport à ache-
ter, un livre à rapporter à la bibliothèque ou
encore un compte de cellulaire à payer au
plus tard demain sont quelques exemples
de tâches qui peuvent remplir ton agenda
scolaire. Le problème, c’est que l’agen-
da ne sort pas de ton sac seul et ne te
permet peut-être pas de voir ta note au
bon moment. Voici donc à quoi sert notre
première suggestion d’outil : une liste de
rappels de tâches directement dans ton
téléphone ou sur ta tablette. Nous utili-
sons l’outil To do, de Microsoft, pour son
côté simple d’utilisation, mais il en existe
d’autres, similaires.
Avantages
Permet de diviser ton temps d’étude (p.
ex. 45 minutes) en étapes visuelles et
organisées dans le temps.
Tout au long de ta séance, permet de
prendre conscience du temps qui file,
en consultant la barre de temps en haut
de l’écran.
Permet d’utiliser une banque de
plans déjà prêts à l’utilisation,
que ce soit pour de l’étude ou des
tâches quotidiennes.
Permet d’intégrer des pauses afin
de maximiser ton temps d’attention
et de préserver ton réservoir atten-
tionnel.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
# 3 Outil de priorisation
Tu as reçu une alarme te disant que tu
devais étudier ce soir pour ta journée
d’examens de demain. Tu as pris quelques
minutes pour te créer un plan d’étude et
te voilà prêt à attaquer. Mais, une deu-
xième alarme arrive indiquant une autre
séance d’étude pour demain également
ainsi qu’un travail d’équipe à débuter ce
soir. Tu n’as que deux heures en soirée
pour tout accomplir, mais on dirait que le
temps va te manquer. Que faire ? Priori-
ser !
Un peu comme à l’hôpital, une forme de tri
doit être faite afin de régler les urgences
en premier et de garder ce qui peut at-
tendre pour plus tard. Cependant, ce tri
n’est pas toujours simple à faire. Voilà que
notre outil numéro 3 fait son entrée : Prio-
rity Matrix.
Sous forme d’un tableau de bord à quatre
quadrants, toutes les tâches qui sont dans
notre application To do sont par la suite
placées dans cet outil. Trois concepts sont
utilisés dans notre programme Réflexe
pour les classer : critique, urgent et vide
cerveau. Les tâches dites critiques sont
celles qui auront une conséquence (p.
ex., monétaire, perte de points, difficul-
tés dans les relations sociales) si la tâche
n’est pas accomplie. Les tâches urgentes
sont celles qui doivent être réalisées dans
les prochaines 24 heures, qu’elles soient
critiques ou non. Finalement, la section
vide cerveau est réservée aux tâches
qui sont à faire, mais qui ne sont ni ur-
gentes ni critiques. Ces tâches sont éga-
lement importantes à placer dans l’outil,
puisqu’elles prennent de l’espace dans
notre mémoire et qu’elles peuvent devenir
difficiles à garder en tête toute la journée.
Avantages
Permet de voir d’un seul coup d’œil ce
qui s’en vient pour toi dans les pro-
chains jours/ semaines.
Les tâches peuvent être déplacées d’un
quadrant à l’autre facilement et on peut
mettre à jour régulièrement le conte-
nu. Je recommande d’utiliser l’outil
matin et soir afin d’éliminer les tâches
complétées et d’ajouter celles reçues
durant la journée. Attention de ne pas
surcharger le visuel, maximum sept
éléments dans un quadrant.
Offre aussi des rappels efficaces lors-
qu’une tâche est près d’arriver ou en-
core en retard.
# 4 Outil d’organisation des idées
Vous avez aimé la carte conceptuelle qui
résume les fonctions exécutives en intro-
duction de cet article ? Ce n’est pas un
hasard ! Notre cerveau aime les infor-
mations simples, claires et organisées
visuellement. Voici ce qu’offre notre 4e
outil : Xmind.
Que ce soit pour résumer un roman, pré-
parer un exposé oral, étudier plusieurs
chapitres sur un même sujet ou encore
pour préparer un écrit sur un sujet donné,
l’outil vous permet d’organiser vos idées
à l’aide de cartes mentales, de lignes
chronologiques ou de tableaux compara-
tifs.
Avantages
Permet de personnaliser tes cartes
selon tes goûts, mais également, se-
lon les tâches à accomplir. Tu choisi-
ras plus une ligne chronologique pour
l’étude de dates importantes en his-
toire, mais tu opteras peut-être pour
une carte mentale en étudiant pour ton
examen de roman.
Les cartes sont sauvegardées, donc tu
peux les utiliser et les modifier pour les
examens à venir.
En plus d’être très utile dans tes études,
Xmind peut être utilisé dans différents
contextes du quotidien (p. ex., effectuer
un tableau des tâches, établir un budget).
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : outils technologiques, fonctions exécutives, organisation, mémoire, adolescents.
Références
Moret, A. et Mazeau, M. (2019). Le syndrome dys-executif chez l’enfant et l’adolescent-Répercussions scolaires et comportementales (2e éd.). Elsevier Masson.
Pour plus d’informations
sur les applications suggérées
Microsoft To do : todo.microsoft.com
Oplan : www.oplan.ca
Priority Matrix : appfluence.com
Toutematête-App : healthymindsapp.ca
Xmind-Logiciel de Mind Mapping : xmind.app
# 5 Outil d’autorégulation
Dans cet article, tu as découvert différents
outils qui te proposent de l’aide dans l’orga-
nisation de ton temps et de tes idées, dans ta
planification ou encore dans la priorisation des
tâches, mais toutes ces habiletés ne peuvent
être mobilisables si tu n’es pas attentif ou peu
disponible au travail. Notre dernier outil te sou-
tient dans ton quotidien afin de demeurer bien
dans ta tête, donc prêt et disponible au travail.
Toute ma tête est une application gratuite qui te
permet non seulement de prendre un moment de
pleine conscience de ton état, mais également
de te proposer des conseils ou des exercices sur
la santé de ton corps et de ton esprit.
Conclusion
Voilà, tu connais maintenant mon top 5 des outils technologiques qui peuvent sup-
porter ton organisation et autres fonctions exécutives au quotidien. Je t’encourage
à tenter un outil à la fois afin de bien te familiariser avec ce premier avant d’en
intégrer un deuxième. Dresse le profil de tes forces et difficultés et choisis l’outil
qui te correspond le mieux. Le plus difficile reste de créer de nouvelles habitudes.
Lorsque tu utilises un nouvel outil, il n’est peut-être pas évident d’y penser tous
les jours. Garde en tête qu’il te faudra plusieurs semaines d’utilisation avant de
voir si cet outil te convient ou non. Plus tu feras d’essais, plus tu verras les pos-
sibilités de tous les outils. La bonne nouvelle, c’est que tu peux donner un coup
de pouce à tes fonctions exécutives et cela peut devenir beaucoup plus facile pour toi d’organiser, de planifier ou de prioriser tes tâches.
Alors, j’ai réussi à te donner envie d’essayer quelque chose de nouveau ? Bonnes découvertes !
Avantages
• Permet d’établir une chronologie de
tes émotions selon les journées. Ainsi,
tu pourras peut-être découvrir que les
dimanches, tu es plus stressé et que
tu dois faire plus de sport durant cette
journée pour t’aider à mieux gérer tes
émotions.
Les exercices qui te sont proposés sont
toujours de courte durée et optionnels.
Tu peux ainsi prendre le temps de les
effectuer ou y revenir plus tard.
Très simple d’utilisation, l’application
Toute ma tête peut être utilisée à n’im-
porte quel moment de la journée en
quelques minutes.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le CQJDC a lu pour vous
Groupe de réflexion sur les drogues (GRD) 2e édition : un programme de pré-
vention ciblée et de réduction des méfaits auprès de jeunes en difficulté
Arnaud Milord-Nadon1 et Audrey Veilleux2
1. Pyschoéducateur, agent de développement, Boscoville
2. Psychoéducatrice, agente de déploiement, Boscoville
Les données de la plus récente enquête
de l’Institut de la statistique du Québec
(Traoré et al., 2021) indiquent qu’un élève
du secondaire sur 10 consomme de l’al-
cool de manière excessive et répétitive et
que 4,5 % consomment du cannabis de
façon régulière. Pour ces jeunes dont la
consommation est plus à risque ou régu-
lière, des mesures de prévention plus ci-
blées peuvent s’avérer efficaces (Bourdil-
lon et al., 2011 ; Laventure et al., 2010).
Le programme Groupe de réflexion sur les
drogues (GRD, Durocher et al., 2019) pro-
pose une intervention pour répondre aux
besoins spécifiques de ces jeunes.
Historique du développement
du programme
Au tournant des années 2000, le Centre
jeunesse de Montréal-Institut universi-
taire (CJM-IU) ainsi que différents parte-
naires ont développé la première version
du GRD afin de combler les lacunes ob-
servées dans leurs services destinés aux
jeunes consommateurs à risque (Durocher
et al., 2005). En 2013, le CJM-IU devenu
le Centre intégré universitaire de santé et
de services sociaux du Centre-Sud-de-
L’Île-de-Montréal (CCSMTL), Boscoville
et l’Université de Montréal ont amorcé un
La proportion d’adolescents de 12 à
17 ans qui consomme de l’alcool et
de la drogue a diminué au Québec
depuis le début des années 2000
(Traoré et al., 2021). Cette diminu-
tion pourrait être due à certaines
interventions préventives univer-
selles mises en place au cours des
dernières années. Ces interventions
universelles se situent souvent en
amont de la consommation où l’on
vise à empêcher, éliminer, réduire
ou retarder l’usage (United Nations
Office on Drugs and Crime, 2015).
Malgré que ce type d’interventions
soit efficace auprès des jeunes en
général, elles sont susceptibles de
délaisser les jeunes qui ont déjà dé-
veloppé une consommation à risque
et qui sont peu motivés à en réduire
leur usage.
partenariat afin d’évaluer, de bonifier et
de mettre à jour le programme. Les tra-
vaux de ce partenariat ont conduit à une
deuxième version du GRD pour pallier les
lacunes observées dans la version pré-
cédente (Fallu et al., 2017 ; Fallu et al.,
2021 ; Jean, 2012 ; Langelier-Cullen,
2018). D’abord, ce programme a d’abord
été offert en centre de réadaptation pour
les jeunes en difficulté d’adaptation. De-
vant l’intérêt croissant de la part des mi-
lieux scolaires pour cette nouvelle version
du programme, il a été décidé en 2020
d’en vérifier l’efficacité dans ce nouveau
contexte. Le programme a ainsi été expé-
rimenté et évalué en milieu scolaire en
partenariat avec le Centre intégré de san-
té et de services sociaux des Laurentides
et l’Université de Sherbrooke.
Programme en bref
Le GRD 2e édition (Durocher et al., 2019)
est un programme de prévention ciblée
conçu pour les jeunes de 14 à 17 ans pré-
sentant une consommation problématique
ou à risque de le devenir. Le programme
propose une intervention de groupe où six
à huit jeunes se rencontrent une heure
pendant neuf semaines consécutives.
Animé par des intervenants (un ou deux),
chacun des neuf ateliers propose des ac-
tivités et des modalités d’apprentissages
variées et interactives : discussions, jeux
de rôles, jeux-questionnaires, vidéo, etc.
La sélection des participants est réali-
sée à l’aide de la grille de dépistage de
consommation problématique d’alcool et
de drogues chez les adolescents et les
adolescentes, la DEP-ADO (Germain et al.,
2016). Le GRD s’adresse spécifiquement
aux « feux jaunes » (problème en émer-
gence), mais peut aussi être utilisé auprès
de « feux rouges » (consommation problé-
matique) qui ne sont pas motivés à aller
chercher des services d’aides spécialisés.
Le programme s’inspire des approches
de réduction des méfaits, motivationnelle
et cognitivo-comportementale. Il mise
sur la réflexion et l’acquisition de diffé-
rentes stratégies de réduction des méfaits
associées à la consommation des subs-
tances psychoactives. Plus spécifique-
ment, il vise d’abord à susciter une ré-
flexion chez les personnes participantes
sur leurs habitudes de consommation afin
qu’elles puissent en réduire les risques et
les conséquences. Ensuite, le programme
vise à les amener à se responsabiliser en
acquérant des habiletés prosociales et en-
fin, à favoriser la motivation à aller cher-
cher de l’aide auprès des services spécia-
lisés en toxicomanie pour celles et ceux
qui en ont besoin (Durocher et al., 2019).
En parallèle aux activités de groupe, le
programme prévoit l’animation d’activités
individuelles entre chaque séance afin de
clarifier certains concepts, d’approfondir
les réflexions, de répondre aux questions
ou encore de remédier aux absences des
participantes et participants.
Démarche proposée par le GRD
Les ateliers du GRD ont été développés
pour accompagner un groupe d’ado-
lescents à travers une démarche vers
le changement, tout en respectant leur
rythme. Le processus vise à favoriser
l’adhésion des jeunes à la démarche, à
les faire réfléchir sur la consommation
en général pour finalement aborder leurs
propres habitudes (voir Figure 1).
Figure 1. Processus du programme
30
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le but des premiers ateliers consiste à
permettre aux jeunes de prendre du recul
par rapport à ce qu’elles et qu’ils font et
pensent savoir, tout en leur permettant
d’acquérir de nouvelles connaissances.
La consommation personnelle des jeunes
n’est pas abordée directement avant le
5e atelier. Les jeunes sont néanmoins
incités à travers les discussions à faire
certains parallèles avec leur situation.
Lors du premier atelier, la démarche et
ses approches sont présentées aux jeunes
afin de favoriser leur adhésion et leur
pleine participation. Il est signalé que les
activités ont été conçues pour stimuler
les échanges et réfléchir ensemble sur la
base d’une information juste et fiable.
Les ateliers deux à quatre abordent le
phénomène de la consommation de fa-
çon globale. Chacun des facteurs de la
loi de l’effet, soit la substance, l’individu
et le contexte, est abordé en termes de
facteurs de risque et de protection. Dans
l’atelier cinq, il est question du dévelop-
pement de la dépendance et les jeunes
sont invités à réfléchir aux avantages et
inconvénients de leurs propres habitudes
de consommation.
La 6e rencontre marque un tournant
puisque les ateliers subséquents se
centrent davantage sur le vécu person-
nel de chacun des jeunes. Ces derniers
sont invités à évaluer leurs propres ha-
bitudes de consommation, les motifs qui
sont sous-jacents ainsi que les avan-
tages et inconvénients y étant associés.
Il est considéré qu’à ce moment de la
démarche, les jeunes ont les acquis né-
cessaires pour préparer un changement
de leurs habitudes.
Les ateliers sept et huit abordent les al-
ternatives à la consommation et la sa-
tisfaction qu’ont les jeunes à l’égard de
diverses sphères de leur vie (famille,
amie ou ami, travail). Ces deux ateliers
leur permettent d’identifier des cibles de
changement potentielles, motivantes et
accessibles qui pourraient contribuer à
l’amélioration de leur bien-être.
La démarche culmine à l’atelier neuf
avec une célébration et une activité où
les jeunes sont invités à commenter
leur démarche personnelle vécue à tra-
vers le programme. Afin de soutenir les
démarches de changement actuelles ou
futures, une présentation des ressources
d’aide spécialisées de leur région leur est
offerte, dans le but de démystifier le re-
cours à ce type de service.
Effets généraux
et recommandations
Le programme GRD a fait l’objet d’une
évaluation des effets en milieu scolaire en
2020. La méthode consistait en un devis
mixte avec groupe contrôle. Les résul-
tats ont démontré des effets intéressants,
malgré certaines limitations inhérentes
aux caractéristiques de l’étude comme
sa durée et le nombre de participants
(Laventure, 2022). Un simple aperçu des
résultats sera fourni ici puisque l’analyse
complète de cette évaluation a été sou-
mise dans une autre publication (Laven-
ture, Lemieux et Milord-Nadon, soumis).
Effets sur la consommation
et les facteurs associés
La modification de la consommation est
un effet qui s’observe normalement à
moyen et long terme. Le GRD vise plutôt
à diminuer la prise de risques qui y est
associée, ce qui pourrait expliquer qu’une
diminution immédiate de la consommation
n’ait pas été observée (Laventure et al.,
soumis). Des effets positifs sur d’autres
variables clés chez les personnes parti-
cipantes ont tout de même été rapportés
notamment l’augmentation de l’adoption
de stratégies productives et de la moti-
vation au changement. En effet, 40 % des
participantes et participants ont décidé de
poursuivre des démarches auprès de ser-
vices spécialisés en dépendance à la suite
de leur participation au GRD (Laventure et
al., soumis).
Effets sur l’alliance thérapeutique
L’évaluation du GRD en milieu scolaire a
permis d’observer qu’une meilleure al-
liance thérapeutique entre les jeunes et
l’animateur contribuait à une augmenta-
tion de l’adoption de stratégies d’adapta-
tion productives. Par ailleurs, les jeunes
qui ont abandonné en cours de pro-
gramme rapportaient une plus faible al-
liance thérapeutique avec les animateurs
(Laventure et al., soumis). Il est primor-
dial pour les animateurs d’accorder une
attention particulière à la création d’une
relation de confiance auprès de chacune
et chacun des participants du programme
et d’offrir écoute et soutien, surtout au-
près des moins motivés. Pour ce faire, il
est pertinent de maintenir les deux types
de rencontres du GRD, soit les rencontres
de groupe et individuelles, car ces der-
nières permettent aux animateurs de faire
le point avec les jeunes qui en ont le plus
besoin.
Importance de l’exposition
Il est également important d’exposer les
participants à un maximum d’ateliers,
puisque cette variable semble contribuer à
l’augmentation de la motivation au chan-
gement (Laventure et al., soumis). Comme
les absences des jeunes ne peuvent pas
être prévues, il est recommandé de ne
pas débuter l’animation du programme
lors des périodes de transitions scolaires,
soit en début d’année ou lors des périodes
d’examens, mais aussi de planifier le mo-
ment (jour et heure) qui maximisera la
participation des jeunes. Les animateurs,
qui travaillent en milieu scolaire ou non,
devraient, autant que possible, impliquer
l’ensemble de l’équipe-école afin de faci-
liter la mise en place du programme dans
l’école et encourager la participation des
élèves à celui-ci. Le but étant que les ob-
jectifs du programme et ses approches
soient connus et compris de toutes et tous
pour qu’il y ait une cohérence dans les
interventions auprès des élèves.
Utilisation en milieu scolaire
Enfin, cette évaluation a également per-
mis de faire certains constats quant à
l’utilisation du GRD en milieu scolaire.
D’abord, bien que le programme puisse
convenir à différents profils de jeunes,
il importe de constituer des groupes ho-
mogènes en termes d’âge et de niveau de
consommation. Il est suggéré d’éviter de
s’adresser à des jeunes dont la consom-
mation est chronique ou trop sévère (feu
rouge) pour qui les programmes de réa-
daptation conviendraient mieux (Laven-
ture et al., soumis). Ces recommandations
visent à éviter de possibles effets de
contamination entre les jeunes (Laventure
et al., 2010).
Dans le cas du GRD, il est important de
rappeler l’importance des activités de dé-
pistage dans le processus de création des
groupes. Les animateurs vigilants gagne-
ront probablement à débuter différents
groupes en fonction des résultats du dé-
pistage et à regrouper les jeunes au profil
similaire (en termes d’âge et de niveau de
consommation) entre elles et eux.
Conclusion
Les différentes expérimentations du
programme au cours des dernières an-
nées permettent de croire que ce pro-
gramme est prometteur auprès des jeunes
consommateurs à risque (Fallu et al.,
2021 ; Laventure, 2022). Le GRD semble
31
Vol. 24, no 1, décembre 2023
être un programme pertinent en milieu
scolaire pour répondre aux besoins d’in-
tervention des jeunes avec une consom-
mation problématique ou à risque de le
devenir. Bien que des recherches sup-
plémentaires soient nécessaires afin de
mieux comprendre ses effets à plus long
Mots-clés : adolescence, alcool, consommation, centres de réadaptation, drogues, groupe de réflexion, intervention ciblée, prévention, réduction des méfaits, scolaire.
Références
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Durocher, L., Fallu, J.-S., Lemieux, M., Milord-Nadon, A. et Desormeaux, R. (2019). Guide d’animation du Groupe de réflexion sur les drogues (2e éd.). Boscoville et Centre intégré universi-
taire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île de Montréal.
Durocher, L., Pelletier, S. et Trudeau-LeBlanc, P. (2005). Groupe de réflexion sur les drogues : guide d’animation. Centre jeunesse de Montréal – Institut universitaire.
Fallu, J.-S., Durocher, L., Brière, F.-N., Langelier-Cullen, E., Pelletier, S., Lortie, V., Maguire-L., J., Normandin, G., Prémont, J. et Couture, S. (2017). Le Groupe de réflexion sur les drogues, 2e
génération : un programme de prévention ciblée sélective et indiquée de la consommation problématique chez les adolescents en difficulté. Dans M. Laventure, N. Brunelle, K. Bertrand et
M. Garneau (dir.), Adolescents dépendants ou à risque de le devenir. Pratiques d’intervention prometteuses (p. 159-180). Presses de l’Université Laval.
Fallu, J.-S., Ferguson, Y., D’Arcy Dubois, L., Benhadj, L. et Brière, F.N. (2021). Recension des écrits sur les pratiques de prévention ciblée de la consommation problématique de substances
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gnement universitaire et de la recherche et Institut universitaire sur les dépendances.
Germain, M., Guyon, L., Landry, M., Tremblay, J., Brunelle, N. et Bergeron, J. (2016). DEP-ADO Grille de dépistage de consommation problématique d’alcool et de drogues chez les adoles-
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Jean, A. (2012). La prévention de la toxicomanie auprès des jeunes hébergés en centre jeunesse. Revue de psychoéducation, 41(2), 137-143. https://doi.org/10.7202/1061795ar
Langelier-Cullen, E. (2018). Évaluation de l’implantation et des effets perçus du pilote du Groupe de réflexion sur les drogues (2e génération). [Mémoire, Faculté des arts et des sciences,
Université de Montréal] https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/20708
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Laventure, M., Lemieux, M. et Milord-Nadon, A. (soumis). Le Groupe de réflexion sur les drogues : Évolution des participants au programme en milieu scolaire. Drogues, santé et société.
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Traoré, I., Simard, M., Camirand, H., Conus, F. et Contreras, G. (2021). Enquête québécoise sur le tabac, l’alcool, la drogue et le jeu chez les élèves du secondaire 2019. Principaux résultats
de l’enquête et évolution des phénomènes. Institut de la statistique du Québec. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/enquete-quebecoise-tabac-alcool-drogue-jeu-eleves-secon-
daire-2019.pdf
terme, les données actuelles offrent des
raisons d’être optimiste quant à son ef-
ficacité. Ce genre de programme semble
également positif puisqu’il peut permettre
de faire le pont vers des services spécia-
lisés. Le GRD aurait donc tout intérêt à
trouver sa place à l’intérieur de l’offre de
service en prévention des dépendances
au Québec, une place qui permettrait une
action concertée des milieux scolaires,
communautaires, de première ligne et de
réadaptation.
32
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le CQJDC a lu pour vous
L’accompagnement bienveillant auprès des jeunes LGBTQI+
Par Jasmin Roy Président de la Fondation Jasmin Roy Sophie Desmarais
Il existe une grande diversité au sein des
communautés LGBTQI+ (Lesbienne, Gay,
Bisexuel(le), Trans, en Questionnement
ou Queer, Personne intersexuée). Bien
que regroupés sous le même acronyme,
les jeunes LGBTQI+ ne forment pas un
groupe homogène et chaque groupe a des
besoins et des revendications spécifiques.
Il existe une grande diversité au sein des
communautés LGBTQI+. Le processus
identitaire peut varier d’une personne à
une autre ; nous devons donc accompa-
gner chacun dans sa vitesse de croisière
vers une affirmation saine de son orienta-
tion sexuelle ou de son identité de genre.
Les jeunes issus des minorités sexuelles
et de genre, en plus d’avoir à faire face
aux mêmes défis que les autres enfants
et adolescents, sont exposés en plus à
des situations spécifiques, car ils appar-
tiennent à des minorités.
Lorsque l’on comprend les nombreuses
difficultés que ces jeunes auront à sur-
monter, nous comprenons à quel point il
est capital de les accompagner avec la
plus grande bienveillance. Si ces per-
sonnes ne reçoivent pas un soutien adé-
quat, leur bien-être peut s’en trouver
affecté pendant plusieurs années, voire
toute leur vie.
Il faut donc assurer la sécurité et la
protection des jeunes, peu importe leur
orientation sexuelle, leur identité ou ex-
pression de genre, avec une neutralité
relative qui implique d’être conscients de
Pour les personnes issues des com-
munautés LGBTQI+, l’obligation de
composer avec des normes pou-
vant être oppressantes ou stigmati-
santes, parfois même avec des vio-
lences, occasionne des frustrations,
de l’anxiété et, dans bien des cas,
des épisodes dépressifs. Il est donc
recommandé de les aider à bien
identifier leurs émotions et, parti-
culièrement, leurs besoins, pour en-
suite les accompagner vers une ré-
gulation émotionnelle orientée vers
la résilience et vers une affirmation
positive de soi.
nos préjugés et de pouvoir en faire abs-
traction, tout en faisant fi de nos opinions
personnelles ou de nos convictions reli-
gieuses. Il est essentiel de permettre à
tous les jeunes d’exprimer leurs émotions
et leurs besoins dans un environnement
sécuritaire.
Puisque les jeunes issus des communau-
tés LGBTQI+ ne forment pas un groupe
homogène, chaque communauté ayant
des besoins spécifiques, il est essentiel
de ne présumer de rien quant aux diffi-
cultés émotionnelles, relationnelles ou
communautaires rencontrées. La proli-
fération créative, ces dernières années,
de nouveaux termes pour parler du genre
oblige à être plus que jamais à l’écoute
et à apprendre des jeunes générations.
Par exemple, pour certains, la non-binari-
té sera une alternance entre l’expression
masculine et féminine, pour d’autres, tout
simplement une absence de binarité dans
leurs façons d’être, plus ou moins andro-
gynes. Ou encore : certaines personnes
vous diront qu’elles ont des relations
sexuelles avec des personnes de même
sexe, mais qu’elles s’identifient comme
hétérosexuelles, d’autres, qu’elles sont
bisexuelles, d’autres, pansexuelles. Les
jeunes générations sont très créatives,
à bon droit, pour exprimer leurs identi-
tés de sexe, de genre ou de préférences
sexuelles, et le lexique est appelé à être
en constante mutation. Comme adulte,
vous devez renoncer à vos jugements afin
de comprendre et d’établir une confiance
maintenue en laissant la liberté au jeune
d’être ce qu’il est. Ainsi, vous serez plus
à même de considérer leur point de vue,
leur perspective et de faire preuve d’em-
pathie. Vous comprendrez également les
normes sociales et éthiques qui régissent
le comportement de chacun (les jeunes
LGBTQI+ comme leur entourage) et à quel
point la vision du monde « hétérosexiste »
et « cissexiste » souvent répandue autour
de nous peut avoir un impact négatif sur
l’estime de soi, la santé physique et men-
tale des jeunes appartenant aux commu-
nautés LGBTQI+.
Pour en savoir plus :
https://fondationjasminroy.com/
initiative/aider-les-jeunes-lgb-
tqi-avec-bienveillance/
La réalité virtuelle
au service des apprentissages
sociaux et émotionneLs
chez Les adoLescents
Aider les jeunes
LGBTQI+
Avec bienveillAnce
En partenariat avec le Barreau du Québec, la Fondation Jasmin
Roy Sophie Desmarais a conçu un projet éducatif, innovant et
stimulant destiné aux élèves du secondaire qui contribuera à
la mise en œuvre d’une culture de médiation entre les pairs,
utile dans les travaux d’équipe. Bénéficiez de la présence
bénévole d’un avocat-médiateur de votre région en classe!
Ce guide est destiné à bonifier et à renforcer le soutien que
peuvent apporter les personnes intervenantes aux jeunes
de la communauté LGBTQI+, cela grâce à une approche
bienveillante favorisant leur pleine reconnaissance et leur
autonomisation.
L’activité Les Ateliers 360 consiste en une animation de
75 minutes destinée à des groupes d’élèves du secondaire
comptant au plus 30 personnes.
Un projet de réalité virtuelle rassembleur et éducatif
permettant aux gens d’être les témoins de premier plan
des micro-agressions vécues par des membres de la
communauté LGBT.
« un travail d’équipe »
LA MÉDIATION, UNE AUTRE FAÇON DE
RÉGLER LES CONFLITS
Dans
la peau
d’une
personne LGBT
fondationjasminroy.com
34
Vol. 24, no 1, décembre 2023
35
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Le CQJDC a vu pour vous
Une formation pour soutenir l’apprentissage socioémotionnel à l’école
Claire Beaumont1
1. Ph. D., professeure titulaire en adaptation scolaire, Faculté des sciences de l’éducation, Université Laval, membre du CRIRES, de PÉRISCOPE et de l’UMR Synergia.
On sait depuis longtemps que nos
émotions influencent notre manière
de réfléchir, d’apprendre, de gérer
nos relations interpersonnelles et
de prendre des décisions (Sander
et Scherer, 2014). Plusieurs pro-
grammes d’intervention fondés sur
l’apprentissage socioémotionnel
(ASÉ) ont ainsi été reconnus effi-
caces pour améliorer la performance
scolaire des élèves, leurs comporte-
ments prosociaux et leur santé men-
tale en général (Durlak, 2011), tout
comme l’autorégulation des émo-
tions, du stress et la satisfaction au
travail des enseignants (Jennings
et al., 2017). Toutefois, demander
au personnel scolaire d’intégrer un
programme d’ASÉ dans leur emploi
du temps déjà chargé peut s’avérer
physiquement et émotionnellement
éprouvant (Ransford et al., 2009). La
bonne nouvelle est que l’ASÉ peut
bien s’intégrer à la routine de la
classe même sans l’assistance d’un
spécialiste (Durlak et al., 2011).
Cet article présente sommairement
un nanoprogramme « Enseigner des
compétences sociales et émotion-
nelles au primaire » offert depuis
2021 à l’Université Laval ainsi que
ses principales retombées.
Principaux contenus de la formation
Cette formation entièrement à distance se décline en trois principaux blocs (voir Figure 1).
Figure 1. Les trois blocs de la formation « Enseigner des compétences sociales et émotionnelles au primaire »
Bloc 1
Le premier bloc propose un cadre de référence simple, soit le Modèle écosystémique
de l’apprentissage socioémotionnel pour le bien-être personnel et collectif à l’école
présenté à la figure 2. Les conditions favorables à l’ASÉ de même que ses retombées
sur le bien-être des élèves, des adultes et sur le climat scolaire y sont aussi abor-
dées.
Bloc 2
Le deuxième bloc vise à développer des stratégies pour enseigner et soutenir l’ASÉ,
selon trois principales clés d’action :
Bloc 3
Le troisième bloc vise pour sa part l’intégration des apprentissages en contexte réel,
puisque les participants sont accompagnés afin d’élaborer un projet visant le déve-
loppement des CSÉ dans leur milieu professionnel.
#1 : Bonifier ses propres compétences socioémotionnelles (CSÉ) comme
adulte pour les modéliser ;
#2 : Enseigner explicitement des CSÉ et les intégrer aux autres matières
scolaires ;
#3 : Faire pratiquer consciemment les CSÉ dans des situations concrètes
de la vie quotidienne (à l’école, à la maison, etc.).
36
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : apprentissage socioémotionnel, formation en ligne, primaire, enseignants, intervenants scolaires.
Références
Beaumont, C., Langri, S., Marquis, D. et Garcia, N. (2023). Le modèle écosystémique de l’apprentissage socioémotionnel pour le bien-être individuel et collectif à l’école. Dans C. Beaumont
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Collection de la Chaire. Faculté des sciences de l’éducation, Université Laval. https://www.violence-ecole.ulaval.ca/fichiers/site_chaire_cbeaumont_v2/documents/Guide_de_planification.
pdf
Durlak, J. A., Weissberg, R. P., Dymnicki, A. B., Taylor, R. D. et Schellinger, K. B. (2011). The impact of enhancing students’ social and emotional development promotes success in school : A
meta- analysis of school-based universal interventions. Child Development, 82(2), 474–501. https://doi.org/10.1111/j.1467-8624.2010.01564.x
Jennings, P. A., Brown, J. L., Frank, J. L., Doyle, S., Oh, Y., Davis, R., Rasheed, D., DeWeese, A., DeMauro, A. A., Cham, H. et Greenberg, M., T. (2017). Impacts of the CARE for Teachers Pro-
gram on teachers’ social and emotional competence and classroom interactions. Journal of Educational Psychology, 109(7), 1010-1028. https://doi.org/10.1037/edu0000187
Ransford, C. R., Greenberg, M. T., Domitrovich, C. et Jacobson, L. (2009). The role of teachers’ psychological experiences and perceptions of curriculum supports on the implementation of a
social and emotional curriculum. School Psychology Review, 38(4), 510-532.
Sander, D. et Scherer, K. (2014). Traité de psychologie des émotions. Dunod.
Pour s’inscrire :
https://www.ulaval.ca/etudes/nanoprogrammes/enseigner-des-competences-so-
ciales-et-emotionnelles-au-primaire
Évaluation de la formation
La formation a été expérimentée auprès
de 32 intervenants (enseignants, éduca-
teurs, etc.). Elle s’est échelonnée sur 26
semaines et se déclinait en trois princi-
paux blocs. Le tableau 1 illustre la per-
ception très positive des retombées de
cette formation sur les participants eux-
mêmes, sur leurs élèves et leur milieu.
Voici quelques commentaires recueillis
auprès des participants :
« Une formation très riche, et très
bien structurée qui permet d’ancrer
solidement les apprentissages ».
« Je n’ai jamais senti que j’étais seul
malgré que ce soit une formation à
distance... ».
« J’ai maintenant un cadre théo-
rique qui me permet d’asseoir mes
connaissances et de changer mes
pratiques... ».
« J’ai changé mon approche auprès
des élèves en difficulté : j’ai compris
qu’ils doivent se sentir écoutés pour
s’apaiser et ensuite travailler en-
semble... »
« Cette formation est axée sur l’en-
seignement au primaire, mais je vois
facilement ces apprentissages pou-
vant être appliqués au secondaire ou
même en entreprise privée ».
Conclusion
Bref, cette formation semble avoir aidé
les participants à bonifier leurs propres
compétences socioémotionnelles, à les
enseigner explicitement de même qu’à les
faire pratiquer au quotidien à leurs élèves.
Cette formation est toujours offerte à
l’Université Laval, aux adultes de diffé-
rents milieux qui souhaitent accompagner
les enfants dans cette voie.
Figure 2. Le modèle écosystémique de l’apprentissage socioémotionnel pour le bien-être individuel
et collectif à l’école (Beaumont et al., 2023)
Tableau 1
Évaluation de l’efficacité perçue de la formation selon les participants
Énoncés / 4 pts
J’ai atteint les objectifs que je m’étais fixés au départ. 3,8
J’ai réalisé des apprentissages significatifs concernant mes propres CSÉ. 4,0
J’ai réalisé des apprentissages significatifs qui m’aideront à enseigner des CSÉ
aux élèves. 3,9
J’ai réalisé des apprentissages significatifs pour m’aider à faire pratiquer les CSÉ
au quotidien. 3,9
Cette formation a eu un impact considérable sur ma pratique professionnelle. 4,0
Je la recommande à tout type de personnel scolaire au primaire. 4,0
Je la recommande à tout autre type d’intervenants hors du milieu scolaire. 3,9
MOYENNE 3,9
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
La feuille de route des psychoéducateurs
L’accompagnement émotionnel à l’école : une solution indispensable
pour aider nos élèves à s’exprimer et à s’épanouir
Catherine Korah1 et Charles Lefebvre2
1. M. Ed., conseillère psychothérapeute, coordonnatrice du Centre d’excellence en gestion du comportement, Services de soutien et d’expertise pour les commissions scolaires anglophones
du Québec.
2. M. Sc., psychoéducateur et personne-ressource, service de soutien et d’expertise en difficulté comportementale, Centre de services scolaire du Pays-des-Bleuets et du Lac St-Jean.
Les résultats d’une méta-analyse (Waller
et al., 2013) indiquent que l’emploi d’in-
terventions punitives et sévères a pour
effet de rendre les enfants et les ado-
lescents insensibles et rigides, de dimi-
nuer chez ces derniers leur empathie et
de les propulser vers une trajectoire de
conduites antisociales (p. ex. vol, hausse
de l’agressivité et de la toxicomanie). Cet
article propose de « comprendre » ce qui
se passe chez l’enfant et l’adolescent afin
de mieux les accompagner dans leur uni-
vers émotionnel, et ce, selon une perspec-
tive neurodéveloppementale.
N’avez-vous pas déjà entendu un
adulte demander à un enfant de
mettre un frein à son émotion en
lui suggérant « de ne pas pleurer »
lors d’une altercation avec un ami
dans la cour d’école ou de ne pas
avoir peur » lors d’un exposé oral ?
Nous avons peut-être déjà tous
suggéré à un enfant ou à un ado-
lescent de « gérer ses émotions » en
lui donnant des outils pratiques ou
donner une conséquence réflective,
et ce, en nous attendant à ce qu’il
« comprenne » son comportement
perturbant et qu’il trouve une alter-
native au moyen d’un comportement
plus adapté. Notre compréhension
des émotions était-elle voilée par
une éducation passée où l’objectif
était le développement des habile-
tés de gestion des émotions et la
répréhension des comportements
perturbateurs ? Et si ce comporte-
ment n’était pas le problème, mais
bien un moyen de véhiculer que
« quelque chose ne fonctionne pas »
pour l’enfant ou d’adolescent ou
qu’une vulnérabilité importante est
présentement en jeu, et qu’elle a
de la difficulté à être traitée par le
cerveau ?
« Nos enfants se trouvent en pleine crise émotionnelle. Il semble que les enfants se
montrent plus anxieux, agressifs et renfermés que jamais. La cause principale de
la crise émotionnelle et des problèmes de comportement qui en découlent, et dont
nous sommes témoins quotidiennement dans nos foyers, nos écoles et nos commu-
nautés, provient du fait que les enfants sont en train de perdre leurs sentiments. »
(Beach et Strijack, 2020)
Cinq étapes qui mènent à la santé et à la maturité émotionnelles selon
Neufeld
Selon Neufeld (2017), la santé et la maturité émotionnelles d’un jeune impliquent un dé-
veloppement progressif qui se produit en cinq étapes distinctes. Au fil du temps, le jeune
développe une relation avec ses émotions grâce aux adultes qui l’introduisent et le guident
à travers ses propres sentiments. La séquence de ces cinq étapes ne peut être contournée
et elle se déploie en une série de phases dont la sophistication s’intensifie d’une à l’autre :
exprimer, nommer, ressentir, mélanger et réfléchir.
exprimer
nommer
ressentir
mélanger
réfléchir
1. Relation de l’adulte
envers les sentiments
de l’enfant
2. Relation de l’enfant
envers ses propres
sentiments
3. Relation de l’enfant envers autrui
Gordon Neufeld, Ph.D.
PARTAGE RESPONSABLE
Figure 1. Cinq étapes qui mènent à la santé et à la maturité émotionnelle selon Neufeld (2017)
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
1) Exprimer
L’enfant naît immature avec très peu de
moyens de contrôle interne. Par consé-
quent, l’expression de ses émotions est
archaïque, brute et parfois dérangeante
pour les adultes. Au cours de cette pé-
riode, le rôle de l’adulte est de l’accom-
pagner à exprimer ses émotions et à co-
réguler sous forme de modèle l’éventail
émotionnel que cet adulte possède. Il est
essentiel que l’expression émotionnelle
de l’enfant ne brime pas la relation qu’il
entretient avec l’adulte. Cela ne veut pas
dire qu’il ne faut pas intervenir sur les
comportements perturbateurs. Toutefois,
l’utilisation des conséquences visant la
séparation de l’attachement entre l’adulte
et l’enfant n’est pas recommandée. Il ar-
rive souvent que les adultes pensent à tort
que s’ils permettent à l’enfant de s’expri-
mer, cette expression sera incontrôlable
et qu’elle augmentera en fréquence et en
intensité. Ainsi, le recours aux menaces
ou aux conséquences graduées voit son
apparition afin de « contrôler » l’enfant.
McNamara (2017) mentionne à cet effet :
« L’énergie émotionnelle ne cesse
que lorsqu’elle a été relâchée. Quand
le système émotionnel est boule-
versé, il continue à faire pression
jusqu’à ce qu’il trouve un exutoire
pour passer, n’importe quoi pour ré-
duire la pression de l’intérieur. »
Ainsi, une manière de favoriser l’expres-
sion émotionnelle se retrouve dans le jeu
véritable où l’enfant peut exprimer, par
ses histoires, un nombre considérable
d’émotions.
Quels sont les facteurs qui
empêchent d’exprimer les émotions ?
Selon ce que nous avons vécu dans notre
vie, la manière dont nous avons été éle-
vés et notre relation avec nos émotions,
l’adulte semble avoir des paramètres de
ce qu’il peut et de ce qu’il ne peut pas
tolérer quant à sa relation avec l’enfant.
Ainsi, lorsque les comportements de l’en-
fant viennent atteindre cette fameuse
limite relationnelle, l’adulte se protège
en excluant l’enfant de son monde rela-
tionnel. Nous pouvons observer ce phé-
nomène lorsque l’élève se fait retirer de
la classe ou suspendre du milieu scolaire.
Il est important de spécifier que nous ne
sommes pas contre l’usage de ces in-
terventions lorsqu’elles sont réalisées
avec un objectif clinique préétabli et que
l’adulte qui applique cette intervention le
fait de manière bienveillante où la rela-
tion adulte/enfant est préservée. En tant
qu’adultes, nous avons la responsabilité
de comprendre ce que l’enfant exprime
par ses comportements. Conséquemment,
il faut rester attentif au contre-transfert
que le comportement de l’enfant éveille
en nous. Un adulte qui est envahi par
l’émotion d’un enfant ou d’un adolescent
perd sa capacité à être la réponse pour
celui-ci. Finalement, notre société d’au-
jourd’hui propose des paramètres émo-
tionnels erronés où la peur et la tristesse,
entre autres, sont perçues comme étant
des faiblesses dans un monde où l’on doit
être fort, performant et presque insen-
sible aux émotions plus vulnérables. Mais
comment un enfant ou un adulte peut-il
s’adapter sans la tristesse ? Comment
peut-il être courageux et avoir le désir de
surmonter sa peur si ce dernier n’a jamais
été accompagné à ressentir cette peur ?
Quels sont les éléments clés
à retenir ?
Il est primordial de permettre aux enfants
et aux adolescents de jouer. En milieu
scolaire, au primaire, la salle des émo-
tions est un espace à l’abri des regards où
l’enfant peut exprimer ses émotions avec
un adulte (pour plus de détails, voir Centre
of Excellence for Behaviour Management
[CEBM], a ou Lefebvre et Gosztonyi, 2021).
Le jeu chez l’enfant et l’adolescent doit
être à l’abri du but ultime de la victoire
et de la réussite. Il se veut exploratoire,
expressif et irréel. On peut jouer par le
biais de la musique (car il est différent
de jouer et d’apprendre la musique), de la
danse, du dessin, des marionnettes, de la
psychomotricité, etc. (pour des exemples
d’activités, voir Beach et Strijack, 2020).
Quant aux adolescents, l’emploi de l’im-
provisation, du théâtre, de la danse, de
l’écriture, de la confection d’une murale,
de la photographie et de l’entraînement
musculaire (le but ne doit pas être orien-
té vers la performance ou l’idéal du corps
parfait) sont des suggestions parmi tant
d’autres à mettre de l’avant pour susciter
l’expression émotionnelle.
2) Nommer
Lors de l’acquisition du langage, les mots
remplacent l’expression archaïque des
émotions. Ainsi, plusieurs programmes
d’habiletés sociales proposent des activi-
tés de reconnaissance des émotions par
les mots, ce qui n’est pas mauvais en soi.
Cependant, pour qu’une émotion soit res-
sentie (prochaine étape), il est nécessaire
que l’enfant puisse tout d’abord prendre
conscience que l’émotion est véhiculée
dans son corps (concept d’intéroception).
Les sensations corporelles sont ainsi liées
à un mot afin que l’émotion devienne
consciente. Ainsi, au lieu d’enseigner des
mots dans un atelier destiné aux émotions
par exemple, il serait judicieux d’aider les
enfants à prendre conscience de ce qui
se déroule dans leur corps et de le lier
ceci avec un mot, au moment où ils vivent
une émotion. Il est important de modéliser
et de refléter les émotions que l’enfant
ressent pendant son expérience, sur le
moment, et non dans une activité d’ap-
prentissage émotionnel. Il ne faut pas ca-
tégoriser les émotions en positives ou né-
gatives, car nous imposons implicitement
des paramètres à ces dernières. Comment
pouvez-vous demander à un enfant d’être
heureux si ce dernier ne peut jamais être
triste ?
Quels sont les facteurs qui
empêchent de nommer les émotions ?
Le jeune ne dispose pas des mots pour
exprimer ces émotions :
On peut observer que la variance et
l’intensité de l’expression émotionnelle
sont liées à l’absence de mot.
Parfois, la manière dont le jeune nomme
ses émotions peut éveiller les para-
mètres des adultes qui sont témoins
de cette dernière. Il faut se rappeler
que même un adulte mature peut avoir
de la difficulté à nommer son émotion
lorsque cette dernière est particulière-
ment vulnérable. Les enfants sont im-
matures sur le plan neurologique par
défaut et notre travail est de les ac-
compagner à nommer ce qu’ils vivent
et non de juger la manière parfois bru-
tale que cette émotion utilise pour se
faire entendre.
Certains adultes ont un éventail res-
treint de mots pour exprimer leurs
émotions. Donc, les enfants sous leurs
soins vont utiliser les mêmes mots pour
exprimer ce qu’ils vivent, par simili-
tude. Notre travail consiste à élargir
cet éventail, et ceci ne peut se faire
que dans le cadre d’une relation d’at-
tachement sécurisante, bienveillante et
sécuritaire.
Quels sont les éléments clés
à retenir ?
Au primaire, les adultes peuvent utili-
ser une panoplie de médiums pour aider
les élèves à nommer leurs émotions. Par
exemple, nous pouvons utiliser le dessin,
les films, les histoires, l’écriture (3e cycle),
les jeux de société (le bingo émotionnel/
jeu de mémoire, voir CEBM, b), le reflet
quotidien de l’adulte par son langage (lan-
gage émotionnel plutôt que réflectif). Au
secondaire, des activités comme l’écriture
de poésie, le théâtre, une activité de com-
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
position musicale (écriture d’une chan-
son, p. ex. rap), des ateliers de groupe de
lecture, un atelier de lecture de poésie,
les livres, les films, la reconnaissance
de texte au niveau pédagogique (état
émotionnel du personnage), le conseil
de classe, ou le journal intime, sont des
moyens à utiliser pour nommer les émo-
tions de nos élèves.
3) Ressentir
Nous pouvons enseigner le langage des
émotions, mais nous ne pouvons pas ap-
prendre à un individu comment éprouver
des sentiments. À vrai dire, une personne
doit se permettre d’être vulnérable et
d’accueillir ses émotions pour être ca-
pable de les ressentir. Ainsi, les senti-
ments pourront émerger si le jeune se
trouve dans des conditions propices et en
présence d’un adulte qui est sécurisant.
Quels sont les facteurs qui em-
pêchent de ressentir les émotions ?
Le jeune s’éloigne de son expérience émo-
tionnelle authentique lorsque l’adulte :
Pose trop de questions qui le poussent
à réfléchir prématurément ;
Mise uniquement sur ce qui est positif,
à affronter l’irrationnel, à rechercher
incessamment le bonheur, ou à mettre
l’emphase sur la poursuite et l’atteinte
d’un état de calme ;
Se précipite vers des pistes de solu-
tions ou la gestion de ses émotions ;
• Tente d’éteindre son émotion parce
qu’elle est dérangeante ou inconfor-
table ; ce qui pourrait susciter un re-
foulement émotionnel et de l’endurcis-
sement.
Quels sont les éléments clés
à retenir ?
Il importe de spécifier que l’adulte a be-
soin d’accueillir ses propres émotions et
se montrer tempéré face à celles-ci afin
d’être apte à accompagner le jeune quant
à son ressenti. D’ailleurs, le jeune béné-
ficierait de se trouver dans un espace,
comme la salle des émotions, où il pourrait
se défouler sans être sujet à des réper-
cussions, et où l’adulte demeure présent
tout en le laissant vivre ce qu’il a besoin
d’extérioriser. Dans cet ordre d’idées,
le fait d’explorer une émotion quand
nous sommes en mode de jeu permet de
contourner la vulnérabilité. En effet, il est
parfois plus sécurisant d’être plongé dans
son imaginaire que d’affronter la réalité et
de dévoiler sa propre histoire.
4) Mélanger
La faculté à « mélanger » ses émotions
n’est pas une compétence qui peut être
enseignée de manière didactique, mais
elle est plutôt un fruit des conditions fa-
vorables qui ont été établies. En outre, le
cerveau requiert que le processus intégra-
tif du cortex préfrontal soit suffisamment
développé pour permettre aux émotions
de se mélanger, d’être en mesure de vivre
plusieurs émotions simultanément et de
les unir sans qu’elles soient fusionnées.
Toutefois, avant que cela ne se produise,
les adultes représenteront le principal
agent stabilisateur des enfants qui leur
permettront de maîtriser leurs émotions
et leurs comportements.
Qu’est-ce qui empêche les émotions
de se mélanger ?
Les obstacles au déroulement de cette
étape incluent : l’immaturité du jeune,
l’intensité des émotions vécues, le ni-
veau de fatigue ressenti, et l’engour-
dissement émotionnel. Il faut compter
de 5 à 7 ans (ou de 8 à 9 ans pour les
enfants sensibles) pour l’intégration effi-
cace des émotions intenses et l’obtention
du contrôle des impulsions (Eliot, 2000 ;
Moriguchi et Hiraki, 2013). Or, les enfants
neurodivergents et les jeunes qui ont ex-
périmenté des traumas éprouvent davan-
tage de difficultés à mélanger en raison de
leurs circuits neuronaux qui sont hypervi-
gilants et réactifs (Boyce et Ellis, 2005 ;
Ellis et Boyce, 2005). Néanmoins, si les
sentiments du jeune s’engourdissent, il
ne disposera pas de la matière requise
avec laquelle travailler pour se tempérer.
De plus, il sera difficile de mélanger ses
émotions si l’adulte n’est pas régulé lui-
même, ou s’il met l’accent sur contrôler le
comportement du jeune plutôt que sur son
expérience émotionnelle.
Quels sont les éléments clés
à retenir ?
Si nous voulons aider un jeune à tempérer
ses émotions, nous pouvons lui procurer
l’accès à un coin refuge (p. ex. cocoo-
ning), ou lui proposer une activité qui lui
permettra de se recentrer. Afin d’encoura-
ger le processus de tempérance du jeune,
l’adulte peut :
Inviter le concept « une partie de moi…
et de l’autre côté… » ;
• Refléter les moments de dissonance
vécus par le jeune, soit : « Je vois que
tu es vraiment en colère contre ton
ami, toutefois je remarque également à
quel point tu tiens à lui. » ;
Solliciter ses bonnes intentions : « Je
sais que tu t’entends bien avec lui ha-
bituellement et que tu ne lui veux pas
lui nuire. » ;
• Représenter la dissonance au moyen
d’histoires, d’héros ou de marionnettes
lorsque le jeune est résistant à sa
propre vulnérabilité.
Il serait approprié de choisir le moment
opportun et de ne pas insister sur la tem-
pérance prématurément à la suite d’un
incident. L’adulte doit donc attendre que
l’intensité émotionnelle du jeune soit
moindre, et que sa connexion avec lui soit
adéquate pour qu’il soit réceptif à se faire
guider. En l’absence de progrès intégratif,
il convient de revenir à la source en rédui-
sant le stress, en compensant le blocage
émotif, et en trouvant des moyens perti-
nents qui sauront attendrir son cœur.
5) Réfléchir
La capacité de l’humain à réfléchir est le
résultat des sentiments mitigés plutôt que
la notion inverse. Conséquemment, il est
nécessaire d’effectuer les quatre étapes
préalables, soit exprimer, nommer, res-
sentir et mélanger, avant de tenir compte
de la réflexion émotionnelle. Il importe
d’énoncer qu’il sera laborieux, voire ir-
réalisable, qu’un individu puisse réfléchir
adéquatement sans être régulé d’abord.
Quels sont les éléments clés
à retenir ?
La réflexion ne doit pas porter uniquement
sur le comportement du jeune, mais pré-
férablement sur l’émotion qui l’a poussé
à agir de cette manière. Or, il nécessite
que l’adulte :
Dépersonnalise les émotions en évitant
de penser que le jeune a agi délibéré-
ment ;
Supporte la notion que nous sommes
des êtres à part entière qui vivent des
émotions, au lieu de croire que nos
émotions nous définissent (notamment
de séparer ce que nous ressentons de
qui nous sommes) ;
Accompagne l’idée que nous ne pou-
vons pas être toujours en accord avec
nos émotions et qu’elles ont une raison
d’être même si elles nous semblent ir-
rationnelles ;
Honore l’existence des émotions en dé-
pit de l’inconfort qui peut être ressenti.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : régulation émotionnelle, accompagnement, Neufeld.
Références
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McNamara, D. (2017). Jouer, grandir, s’épanouir : le rôle de l’attachement dans le développement
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Clinical Psychology Review, 33(4), 593-608. https://doi.org/10.1016/j.cpr.2013.03.001
Il est primordial de fournir des occasions
et des ressources qui permettent de sou-
tenir la réflexion, telles que des cartes
d’émotions, des outils de réflexion émo-
tionnelle, dont « Parle-moi de toi ! » et
« Faut qu’ça sorte ! », qui ont été concep-
tualisés par le CEBM (c, d), ou une activité
réflexive après la lecture d’une histoire
ou à la rédaction d’un journal de bord.
Conclusion
Bref, l’adulte se doit de faire confiance que
la « nature » accomplira foncièrement son
travail, soit le développement de la santé
et de la maturité émotionnelles du jeune.
Comme le souligne MacNamara (2017),
« Les émotions sont essentielles au déve-
loppement global d’un enfant ; elles sont
le moteur qui propulse la croissance de
l’enfant vers l’identité individuelle. Les
enfants n’ont pas besoin qu’on leur en-
seigne à se comporter de façon mature,
mais qu’on les aide plutôt à ressentir les
bonnes émotions pour atteindre la matu-
rité. »
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er de vous présenter la 3e édition de la trousse
L’Intimidation à notre école,
on n’en veut pas, qu’on se le dise!
41
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Un pas vers l’inclusion
Boxe avec les mots : une collaboration interdisciplinaire prometteuse en
adaptation scolaire au secondaire
Cassandre Ouellet1, Claudia Verret2, Marie Cataford3, Steve-William Globensk4 , Hélène Stojanovski5, Élyse Minville5,
Camille Roy6, Line Massé7 et Cédric Roure8
1. Doctorante, Département des sciences de l’activité physique, Université du Québec à Montréal (UQAM).
2. Ph. D., professeure titulaire, Département des sciences de l’activité physique, UQAM.
3. Éducatrice spécialisée, Centre de services scolaire des Mille-Îles (CSSMI).
4. Enseignant en éducation physique et à la santé, CSSMI.
5. Étudiantes à la maitrise, Département des sciences de l’activité physique, UQAM.
6. Étudiante au baccalauréat en éducation physique et à la santé, UQAM.
7. Ph. D., professeure titulaire, Département de psychoéducation, Université du Québec à Trois-Rivières.
8. Ph. D., professeur, Haute école pédagogique de Vaud.
Dans cette perspective, l’éducation phy-
sique et à la santé (EPS) peut devenir un
levier au développement des habiletés so-
cioémotionnelles des élèves et contribuer
à soutenir certaines compétences indivi-
duelles attendues dans les milieux profes-
sionnels. L’EPS peut notamment aider les
élèves à adopter de saines habitudes de
vie et des principes du savoir-vivre collec-
tif (MELS, 2013), de même que de soutenir
la motivation au cœur de la construction
de l’identité professionnelle, du pouvoir
d’action et de la vision du monde des
élèves (MELS, 2013 ; Opstoel et al., 2020).
Spécifiquement, certaines activités phy-
siques et sportives, comme les activités
de combat, apparaissent au développe-
ment des habiletés socioémotionnelles.
Par exemple, des chercheurs ont trouvé
que la boxe et les arts martiaux condui-
Les différentes politiques (Ministère
de l’Éducation du Québec [MEQ],
1999), plans d’action (Conseil su-
périeur de l’éducation [CSE], 2017 ;
MEQ 2021) et cadres de référence
(Ministère de l’Éducation et de l’En-
seignement Supérieur, 2015 ; MEQ,
2021) qui orientent les actions des
milieux éducatifs québécois té-
moignent tous de l’importance de
répondre aux besoins hétérogènes
des élèves. Ils appellent à mobiliser
l’ensemble des acteurs scolaires
afin de soutenir le développement
des apprentissages, notamment
ceux socioémotionnels, de tous les
élèves (CSE, 2017 ; 2020). Ces vi-
sées occupent une place centrale au
sein de programmes de formation
en adaptation scolaire et en forma-
tion axée sur l’emploi, notamment
pour amener les élèves à se respon-
sabiliser et à entreprendre ou mener
à terme des projets orientés (Minis-
tère de l’Éducation, du Loisir et du
Sport [MELS], 2013).
saient à des bénéfices sur les plans psy-
chologiques et sociaux des adolescents
rencontrant des difficultés diverses (diffi-
cultés de comportements, difficultés d’ap-
prentissages, etc.), bien que ces activités
puissent également augmenter l’agres-
sivité et les comportements antisociaux
dans certains cadres d’intervention (Ver-
tonghen et Theeboom, 2010). Groenen et
Ottogalli-Mazzacavallo (2011) soutiennent
que pour bénéficier des activités de com-
bat, il faut mettre l’accent sur les valeurs
morales et sociales qui y sont associées
comme la discipline, la persévérance ainsi
que le respect des lieux et des personnes.
Dans cette perspective, l’EPS amène plu-
tôt les élèves à développer l’expression
motrice combattante qui s’inscrit dans le
programme de formation de l’école québé-
coise au sein des principes d’action visés
en activité de combat (MEQ, 2004). Ainsi,
l’enseignant ne considère pas le rapport
de domination propre à aux activités de
combat et celles-ci ne sont pas mobili-
sées pour apprendre aux élèves comment
gagner un combat. Le caractère éducatif
des activités de combat repose alors sur
un cadre de valeurs et de normes enseigné
à travers ces activités (Guicherd-Callin
et Desbiens, 2019). La boxe en contexte
éducatif permet aux élèves de dévelop-
per des savoir-faire moteurs comme la
déséquilibration ou l’immobilisation, en
plus de participer à l’amélioration de sa
condition physique et de son endurance
cardiovasculaire (MEQ, n.d.). Elle permet
également de développer des savoirs d’in-
teraction dans un contexte où il y peut y
avoir une utilisation de la force physique,
de violence ou d’intimidation, en sensi-
bilisant les élèves sur ce qui est bien et
mal (Guicherd-Callin et Desbiens, 2019).
Malgré le potentiel de développement so-
ciomémotionnel des activités de combat,
la finalité au sein du programme d’EPS
québécois est surtout orientée sur l’ac-
quisition de principes d’action motrices
propres à cette famille d’activités. De
même, les enseignant.es de cette disci-
pline sont peu outillés pour accompagner
efficacement les élèves dans le dévelop-
pement des habiletés socioémotionnelles.
La collaboration avec des intervenant.es
en éducation spécialisée peut alors ap-
paraitre comme une avenue originale et
prometteuse pour répondre à ces visées.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Une collaboration interdiscipli-
naire pour répondre au défi des
élèves
Un enseignant en EPS et une technicienne
en éducation spécialisée (TES) d’une école
secondaire de la grande région montréa-
laise ont mis à profit leur expertise res-
pective pour développer un programme
d’intervention multimodale intitulé « Boxe
avec les mots ». Leur programme a pour
ambition de soutenir la motivation sco-
laire et de favoriser les apprentissages
socioémotionnels en combinant des ate-
liers de développement socioémotionnel
et des entraînements de boxe en groupe
pour les élèves du secondaire des sec-
teurs d’adaptation scolaire et de la for-
mation axée sur l’emploi.
Au cours des deux dernières années, tous
les élèves de ces secteurs ont partici-
pé au programme « Boxe avec les mots »
dans le cadre de leur activité régulière (n
~300). Le programme s’est déroulé pen-
dant environ huit semaines. Les séances
duraient environ deux heures 30 minutes.
Sur la base des besoins identifiés par des
questionnaires remplis par les élèves, les
thèmes explorés lors des ateliers socioé-
motionels ont été l’anxiété, les relations
interpersonnelles, la connaissance et
l’acceptation de soi et des autres et la
gestion des émotions (pour un exemple
d’activité, voir l’encadré 1). Les activités
de boxe ont été conçues dans la perspec-
tive de réinvestir les apprentissages et de
mettre en application les stratégies so-
cioémotionnelles abordées dans les ate-
liers dans les entraînements en boxe. Ain-
si, en plus des intentions d’apprentissage
liées à l’amélioration de la condition phy-
sique, à l’apprentissage et à l’exécution
des enchaînements des mouvements en
boxe, les activités cherchaient à amélio-
rer la persévérance des élèves, la gestion
de leurs efforts et de leur stress dans des
activités physiques intenses, de même
qu’à travailler l’acceptation de l’autre et
de soi, le respect de l’espace, la coopé-
ration, l’écoute, le support et l’entraide
entre les pairs.
Sur l’ensemble des élèves ayant partici-
pé au programme d’intervention multi-
modale, 69 élèves (22 filles, 47 garçons),
âgés d’environ 14 ans ont participé à la
recherche associée à ce projet. Ils ont ré-
alisé des entretiens en petits groupes afin
de témoigner des apprentissages qu’ils
ont faits lors des activités. Six interve-
nants (programme de boxe et titulaires)
ont aussi participé à des entretiens indi-
viduels pour recueillir leurs points de vue
sur le programme.
Résultats
Le tableau 1 résume les propos des in-
tervenant.es de même que ceux des
élèves. Selon ce tableau, on constate
que les intervenant.es perçoivent surtout
les apprentissages sociaux tandis que
les élèves témoignent d’apprentissages
dans divers domaines (moteur, affectif
et social). Également, le tableau permet
de constater que les élèves et les inter-
venants perçoivent unanimement des
retombées positives sur le sentiment de
compétence physique, sur les habiletés de
régulation émotionnelles et sur les habile-
tés relationnelles et sociales.
Les leviers et les obstacles
perçus
Les élèves et les intervenants ont témoi-
gné des leviers et des obstacles qu’ils ont
perçus tout au long du programme. Selon
les élèves, une grande partie du succès
repose sur la disponibilité et la motivation
de l’enseignant d’EPS et de la TES. Les
élèves se sentaient en confiance, écoutés
et encouragés dans le climat positif et sé-
curisant qu’ils ont instauré tout au long
du programme. Les élèves ont aussi forte-
ment apprécié le soutien visuel de tout le
matériel développé (affiches, PowerPoint,
capsules vidéo, etc.) pendant les entraî-
nements en boxe, les explications claires
et cohérentes qui en découlaient et sur-
tout l’implication active des deux interve-
nants.
Encadré 1
Exemple d’une activité “Boxe avec les mots”
En début d’activité, quelques images d’illusion d’optique sont présentées. Les élèves
doivent dire, selon eux, de quel côté se trouve le personnage, soit de côté ou de face.
Les réponses étant évidemment différentes, la réflexion est amenée sur les raisons
pour lesquelles ils perçoivent l’image de face ou de profil.
Les discussions qui suivent alimentent le débat. Certaines personnes tentent d’in-
fluencer le choix du groupe, d’autres perçoivent les deux choix et ne prennent pas
position. Certains débattent de façon posée, d’autres avec un ton plus agressif.
Les élèves sont ensuite amenés à réaliser que les perceptions diffèrent pour tous
et qu’elles sont le reflet de leur propre réalité. Le but étant de leur faire prendre
conscience de leurs perceptions et de la possibilité de voir les personnes, événe-
ments ou activités sous un angle différent.
Ils sont ensuite guidés vers la découverte des bénéfices d’une plus grande ouverture
d’esprit.
Cela se fait par des questionnements, des histoires vécues et par des activités de
boxes qui feront travailler les élèves sur leurs perceptions (efforts, persévérance,
tolérance à la fatigue, douleur, etc.).
Au contact de l’autre, l’élève réalise qu’il est possible de voir les choses autrement
et que les perceptions peuvent être influencées, modifiées et même déconstruites
lorsque l’on prend le temps d’écouter et d’échanger.
43
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Tableau 1
Points de vue des intervenant.es et des élèves sur les apprentissages réalisés
Sources Entraînements de boxe Activités socioémotionnelles
Intervenants Créer de nouveaux liens avec des pairs.
Mieux se connaître.
Mieux connaître ses pairs par le travail d’équipe.
Exprimer ses émotions de façon appropriée.
Garder son calme en contexte de stress
et de colère.
Être ouvert à la diversité.
• S’entraider.
Communiquer plus facilement avec ses pairs.
Se faire confiance.
Mieux se connaître.
Points de vue partagés
entre les élèves et les
intervenants
Apprendre les techniques de base (positions,
mouvements).
Avoir une meilleure confiance en soi et se sentir
compétent par l’atteinte de ses objectifs physiques.
Diminuer sa colère avec l’activité physique
(p. ex. se défouler).
Développer le travail d’équipe (p. ex. aider un pair
à exécuter des mouvements).
Respecter ses pairs.
Écouter ses pairs.
Être empathique.
Élèves Connaître les règles de sécurité.
Connaître ses limites.
Apprendre à sortir de sa zone de confort.
S’entraider (p. ex. donner des rétroactions
à ses pairs).
Connaître les valeurs de respect en boxe.
Être plus persévérant (p. ex. lors de tâches
exigeantes).
Diminuer son stress avec l’activité physique.
Avoir une attention plus grande après l’effort
physique.
Devenir plus à l’aise à discuter devant ses pairs.
Apprendre à connaître ses pairs.
Être conscients des forces et des défauts
de ses pairs.
Faire confiance aux autres.
Moins porter attention au jugement d’autrui.
Être attentif à la communication non verbale.
Prendre une part de responsabilité sans blâmer
autrui.
Diminuer son stress avec les méthodes apprises
(p. ex. lors d’un examen).
Diminuer sa colère avec les méthodes apprises
(p. ex. se retirer ou prendre des pauses au bon
moment).
Être en mesure de mettre des mots sur ses
émotions pour mieux les gérer.
Connaître les manifestations du stress.
En contrepartie, les élèves et les interve-
nants ont mentionné que le programme
n’était pas assez long et que certains as-
pects logistiques (avoir accès à un local
plus grand, avoir assez de matériel, etc.)
ont constitué des obstacles au succès du
programme. De plus, il y a eu certains
obstacles perçus pour les ateliers socioé-
motionnels. Pour cette partie, les interve-
nant.es ont eu plus de difficultés à rallier
quelques élèves plus vieux ou éprouvant
de grandes difficultés, à motiver certains
élèves pour tous les ateliers et à com-
poser avec des groupes dont les élèves
avaient un très grand écart de capacités.
Par ailleurs, le transfert des apprentis-
sages dans le quotidien des élèves a varié
selon la participation des enseignant.es
titulaires et le réinvestissement des ac-
tivités vues lors des ateliers pendant les
autres périodes de la semaine (p. ex., des
trousses de matériel lié au thème exploi-
té avaient été remises à chaque groupe,
mais ont été utilisées de façon variable
par les autres enseignants).
Du côté des élèves, ils ont trouvé certains
entraînements de boxe plus difficiles et
ont nommé que les discussions lors des
ateliers étaient parfois longues. Aussi,
ils ont critiqué le fait que le programme
n’était pas offert lors des moments impor-
tants (p. ex. la semaine des examens).
Discussion
Sur la base de ces témoignages des élèves
et des intervenant.es, le programme a visé
juste et a répondu aux objectifs initiaux.
Bien que les points de vue respectifs per-
mettent de nuancer les effets, tant les
élèves que les intervenant.es rapportent
des retombées positives sur différentes
sphères de développement. Ainsi, le pro-
gramme a contribué à développer des as-
pects moteurs et à améliorer la condition
physique des élèves. Il a aussi permis
d’augmenter le répertoire d’habiletés so-
ciales liées à la connaissance, à la com-
préhension et aux interactions positives
avec les pairs. De plus, il leur a permis
de mieux se connaître soi-même, d’aug-
menter leur confiance et d’améliorer leurs
habiletés d’autorégulation émotionnelle.
Les leviers du succès du programme re-
posent en grande partie sur l’enseignant
en EPS et la TES. Tant leurs qualités per-
sonnelles et leurs engagements actifs
dans les activités que les outils et les
activités de qualité qu’ils ont proposés
aux élèves, l’ensemble de ces proposi-
tions a constitué un objet de motivation
et de réussite pour ces derniers. Malgré
tout, il a y eu des obstacles qui ont freiné
la réussite. Notamment, les soucis logis-
tiques et les difficultés de s’arrimer avec
les autres acteurs scolaires dans le quo-
tidien des élèves ont émergé. De plus, les
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Mots-clés : apprentissages socioémotionnels, activité physique de combat, adolescents, adaptation scolaire, formation axée sur l’emploi.
Références
Conseil supérieur de l’éducation. (2017). Pour une école riche de tous ses élèves : S’adapter à la diversité des élèves, de la maternelle à la 5e année du secondaire. Gouvernement du Qué-
bec. https://www.cse.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/2017/10/50-0500-AV-ecole-riche-eleves.pdf
Conseil supérieur de l’éducation. (2020). Le bien-être de l’enfant à l’école : faisons nos devoirs. Gouvernement du Québec. https://www.cse.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/2020/06/50-
0524-AV-bien-etre-enfant-4.pdf
Groenen, H. et Ottogalli-Mazzacavallo, C. (2011). Les activités de combat au sein de l’éducation physique en France depuis le XIX e siècle : entre pertinences éducatives et résistances
scolaires. STAPS, (94), 103-119. https://doi.org/10.3917/sta.094.0103
Guicherd-Callin, L.-B. et Desbiens, J.-F. (2019). Les activités de combat comme moyens d’action pour l’éducation physique au Québec. Revue des sciences de l’éducation, 45(2), 27-49.
https://doi.org/10.7202/1067532ar
Opstoel, K., Chapelle, L., Prins, F. J., De Meester, A., Haerens, L., van Tartwijk, J. et De Martelaer, K. (2020). Personal and social development in physical education and sports : A review
study. European Physical Education Review, 26(4), 797-813. https://doi.org/10.1177/1356336X19882054
Ministère de l’Éducation du Québec (MEQ). (1999). Une école adaptée à tous ses élèves. Politique de l’adaptation scolaire. Gouvernement du Québec. http://www.education.gouv.qc.ca/filead-
min/site_web/documents/dpse/adaptation_serv_compl/politi00F_2.pdf
Ministère de l’Éducation du Québec (MEQ). (2004). Programme d’éducation physique et à la santé au secondaire : premier et deuxième cycle. Gouvernement du Québec. http://www.educa-
tion.gouv.qc.ca/enseignants/pfeq/secondaire/domaine-du-developpement-de-la-personne/education-physique-et-a-la-sante/
Ministère de l’Éducation du Québec (MEQ). (2021). Pour une meilleure prise en compte de la diversité sexuelle et de genre. Gouvernement du Québec. http://www.education.gouv.qc.ca/
fileadmin/site_web/documents/education/jeunes/Guide-diversite.pdf
Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. (2013) Formation préparatoire au travail : Éducation physique et à la santé. Gouvernement du Québec. http://www.education.gouv.qc.ca/filead-
min/site_web/documents/dpse/formation_jeunes/PFEQ_Chap_09.1.pdf
Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES). (2015). Cadre de référence et guide à l’intention du milieu scolaire : L’intervention auprès des élèves ayant des difficultés
de comportement. Gouvernement du Québec. http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/education/adaptation-scolaire-services-comp/14_00479_cadre_interven-
tion_eleves_difficultes_comportement.pdf
Vertonghen, J., et Theeboom, M. (2010). The social-psychological outcomes of martial arts practise among youth : A review. Journal of Sports Science & Medicine, 9(4), 528-537.
Certains outils du programme se-
ront diffusés dans les prochaines
semaines sur le site https://in-
clusion-eps.uqam.ca/. Pour plus
d’information, vous êtes invi-
tés à communiquer par courriel
avec Steve-William Globens-
ky (steve-william.globensky@
cssmi.qc.ca) ou Marie Cataford
(marie.Cataford@cssmi.qc.ca,
responsables du progamme au
CSSMI.
élèves n’ont pas répondu de façon égale
au programme et certains ont éprouvé des
difficultés à s’engager efficacement.
Conclusion
En conclusion, les résultats soulignent
que le programme « boxe avec les mots »
mène à des retombées positives sur les
apprentissages des élèves du secteur de
l’adaptation scolaire et de la formation
axée sur l’emploi. Les résultats donnent
lieu à se questionner sur le type d’élèves
à inviter dans ce genre de programme, sur
l’importance de l’engagement des inter-
venants et sur les difficultés de générali-
sation dans le quotidien scolaire.
Cette recherche s’inscrit dans un plus
vaste projet duquel découleront plusieurs
autres résultats. Ceux-ci pourront guider
les actions des divers acteurs scolaires
intéressés à ce programme novateur et
inclusif visant à répondre aux besoins des
élèves des secteurs de l’adaptation sco-
laire et de la formation professionnelle en
emploi.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Nouvelles brèves du CQJDC
Activités de formation offertes pour soutenir les parents, les enseignants
et les intervenants
Ces activités de formation répondront assurément à vos besoins!
Ressources informatives portant sur le sommeil chez les tout-petits de 0 à 5 ans
Les parents d’enfants 0-5 ans se retrouvent souvent perdus dans un tourbillon d’informations de qualité scientifique très variable pour
répondre à leurs questions. Ce projet, présentant une conférence et des ressources informatives, offre des informations fiables et validées
par des scientifiques et spécialistes du sommeil, de la santé et du développement de l’enfant. À consulter dès maintenant!
https://cqjdc.org/le-sommeil-chez-les-tout-petits-de-0-a-5-ans
Rendez-vous sur notre site Internet pour toutes les informations et pour vous inscrire!
Saviez-vous que des écoles et des centres de services scolaires offrent les activités de formation du CQJDC à leur équipe au cours de l’an-
née? N’hésitez pas à en parler autour de vous! Qui sait, peut-être pourriez-vous en profiter également? Des prix de groupes sont offerts.
Pour de plus amples renseignements, écrivez-nous à l’adresse suivante : info@cqjdc.org
Webinaires 2023-2024
Mieux comprendre les crises des enfants de 0 à 5 ans
pour mieux les aider à réguler leurs émotions
En rediffusion
Joël Monzée, Dr. Sc.
Comprendre les enjeux d’attachement chez les enfants
et les adolescents
En rediffusion
Christine Lavoie, ps. éd.
Douance et trouble du spectre de l’autisme :
un mélange parfois explosif, mais plein de potentiel!
En rediffusion
Line Massé, Ph. D.
Optimiser l’estime personnelle de nos jeunes
afin de stimuler leur motivation scolaire
En rediffusion
Stéphanie Deslauriers, ps. éd.
L’anxiété de performance chez les jeunes :
comprendre pour mieux accompagner
17 janvier 2024 à 19h et en rediffusion
Nathalie Parent, D. Psy.
Les crises d’agressivité : comprendre
les mécanismes en jeu pour mieux les prévenir
31 janvier 2024 à 19h et en rediffusion
Julie C. Boissonneault, M. A.
Le modèle A.R.C. : un modèle d’intervention
pour les jeunes ayant vécu des traumas
21 février 2024 à 19h et en rediffusion
Marie-Ève Grisé Bolduc, M. Sc.
Favoriser le pouvoir d’agir des adolescents
et jeunes adultes ayant un TDAH
20 mars 2024 à 19h et en rediffusion
Jeanne Lagacé-Leblanc, Ph. D., ps. éd.
Conférences gratuites
« Apprendre à dormir comme à marcher » chez les tout-petits de 0 à 5 ans, par Évelyne Touchette.
Des outils pour soutenir le bien-être et la réussite des élèves doublement exceptionnels (élèves doués et ayant un trouble
ou des difficultés d’adaptation), par Line Massé.
Soutenir l’apprentissage socioémotionnel à la maison et à l’école : outils et interventions pour les parents et intervenants scolaires,
par Julie Boissoneault.
« Pourquoi et comment participer à la démarche du plan d’intervention de mon enfant à l’école? », par Nancy Gaudreau et Line Massé.
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Modules de formation gratuits
À consulter dès maintenant !
https://cqjdc.org/ressources-informatives/modules-de-formation
À noter à votre agenda!
Une journée de formation aura lieu en ligne le 17 mai 2024. Il s’agit
d’une occasion en or d’enrichir vos connaissances! Inscrivez-vous
dès maintenant sur notre site Internet :
https://cqjdc.org/journee-de-formation
Le 10e congrès biennal du CQJDC abordant les difficultés sociales,
affectives et comportementales que peuvent vivre les jeunes
et les bonnes pratiques pour les soutenir au quotidien se tiendra
les 7, 8 et 9 mai 2025 à Lévis et en ligne. C’est un événement
à ne pas manquer!
https://cqjdc.org/congres
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Lauréats 2023 du prix « Je suis capable, j’ai réussi ! »
Le concours « Je suis capable, j’ai réussi ! » a reçu 12 candidatures d’élèves (dont 10 garçons et 2 filles) fréquentant une école primaire
(6) ou secondaire (6) de la province, plus précisément des régions de Montréal, de la Mauricie, du Bas-Saint-Laurent, de la Capitale-Na-
tionale et de Chaudière-Appalaches.
Chacun des lauréats a reçu un certificat authentifiant la reconnaissance de ses efforts et a remporté un prix d’une valeur de 100 $, et ce,
en fonction de ses intérêts. Les candidats n’ayant pas été sélectionnés ont reçu un certificat attestant leur nomination au concours en
guise d’encouragement.
Il est à noter que ce prix est rendu possible grâce à la générosité de l’organisme Éducaide, ainsi que des autrices des livres Les troubles du
comportement à l’école (mesdames Line Massé, Nadia Desbiens et Catherine Lanaris) et Mieux gérer sa colère et sa frustration (mesdames
Line Massé, Claudia Verret, Fabienne Boudreault et Martine Verreault), publiés par les Éditions Chenelière Éducation. Chaque année, elles
offrent une partie de leurs redevances au CQJDC afin que l’organisme soit en mesure d’offrir les prix aux gagnants du concours « Je suis
capable, j’ai réussi! ».
Mathias Boisvert,
École Jouvence
Magalie Lacombe,
École primaire des Constellations
Matis Sioui,
École St-François
Mathias Deblois,
École primaire l’Arbrisseau
Olivier Létourneau,
École primaire de la Pierre-Douce
Vladic Sylvestre,
École secondaire des Pionniers
Sacha Frigon-Boutin,
École St-François
Charles-Antoine Morneau-Dubé,
École secondaire
Louis-Jacques-Casault
Emy Villeneuve,
École secondaire
Samuel-De-Champlain
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Vol. 24, no 1, décembre 2023
Lauréats 2023 des bourses « Jeunes chercheurs »
L’objectif de ces bourses est de soutenir la formation des nouveaux chercheurs de pointe qui s’intéressent aux jeunes présentant des
difficultés comportementales. Deux bourses sont offertes annuellement, dont les montants sont de 1 000 $ (deuxième cycle universitaire)
et de 2 000 $ (troisième cycle universitaire). La remise des bourses « Jeunes chercheurs » est rendue possible grâce à la contribution de
la ministre de l’Enseignement supérieur du Québec, madame Pascale Déry.
Lauréate 2023 du prix « Une pratique remarquable ! »
Sara Gosselin, lauréate de la bourse « Jeunes chercheurs » de 2e cycle
Sara Gosselin, étudiante à la maîtrise en travail social, Université du Québec à Rimouski,
est lauréate de la bourse du 2e cycle. Détentrice d’une technique en travail social au Cé-
gep de Sherbrooke (2017) et d’un baccalauréat en travail social de l’Université du Québec
à Rimouski (2019), son parcours à la maîtrise en travail social s’est amorcé à l’automne
2020, toujours à l’Université du Québec à Rimouski. Parallèlement à ses études, Sara est
travailleuse sociale, depuis 2020, au Centre de pédiatrie sociale, Le petit repère, à Ri-
mouski, un lieu fort stimulant et riche en apprentissages. Avant cela, elle a également eu
plusieurs expériences professionnelles qui ont marqué son parcours. Elle a été auxiliaire
de recherche, intervenante en santé sexuelle au Nicaragua dans la cadre d’un Programme
de Stages Internationaux pour les Jeunes (PSIJ), ainsi qu’intervenante dans une ressource
intermédiaire pour jeunes de 12 à 17 ans.
Son mémoire est intitulé « L’art de s’allier avec un enfant : une démarche créative, visuelle
et collaborative axée sur la perspective des enfants ». Réalisé AVEC les enfants, cette re-
cherche qualitative, exploratoire et d’inspiration collaborative, aborde deux grands thèmes;
l’alliance thérapeutique et la perspective des enfants. Au total, sept enfants, âgés de 7 à 11
ans, ont pu collaborer à cette étude, en participant à six groupes de discussion. Ensemble,
ils ont tenté de répondre à cette grande question : comment favoriser, selon la perspec-
tive des enfants, le développement de l’alliance thérapeutique enfant-intervenant, dans le
cadre d’une démarche d’intervention? Pour y arriver, plusieurs approches ont été mises de
l’avant, pour avoir accès pleinement à leur parole et à leur expertise, telles que l’approche créative (utilisation du dessin) et visuelle
(utilisation de la photographie).
Le prix « Une pratique remarquable » est remis chaque année à un inter-
venant afin de reconnaitre et récompenser sa pratique professionnelle et
son implication remarquable auprès d’élèves présentant des difficultés de
comportement. La personne lauréate se voit remettre un prix d’une valeur
de 1 000 $, un accès gratuit au congrès biennal du CQJDC, un rabais de
50 % pour l’inscription de ses répondants au congrès ainsi qu’un trophée
et un certificat.
Cette année, nous avons reçu 22 candidatures (18 femmes et 4 hommes)
en provenance des régions de la Capitale-Nationale, de la Montérégie, du
Bas-Saint-Laurent, de Montréal, de l’Outaouais, de la Côte-Nord, du Sague-
nay-Lac-Saint-Jean, des Laurentides et de Chaudière-Appalaches. Il s’agit
d’enseignants du primaire et du secondaire, de techniciens en éducation
spécialisée, de direction d’établissement scolaire, de psychoéducateurs et
d’intervenants psychosociaux. Les dossiers de candidature ont été évalués
par les membres du comité des prix en attribuant des notes à chacun des
critères de la grille d’évaluation prévue à cet effet. Tous les dossiers ont été évalués par trois membres du comité. La personne
ayant obtenu le meilleur résultat a été identifiée comme lauréate. Il s’agit de madame Josée Desaulniers qui œuvre depuis plus de
27 ans à titre de technicienne en éducation spécialisée à l’école des Mille-Fleurs située à Saint-Hubert. Madame Desaulniers, que
ses collègues nomment « la légende », est un pilier pour les classes spécialisées de son milieu. Il y a 15 ans, elle devint l’une des
deux techniciennes en éducation spécialisée en classe Phénix à l’école des Mille-Fleurs à Saint-Hubert où sont implantées deux
nouvelles classes spécialisées d’adaptation scolaire pour élèves du primaire ayant un diagnostic de santé mentale. Elle forme la re-
lève en accueillant des stagiaires; de futures éducatrices spécialisées, et en accompagnant plusieurs enseignants et enseignantes.
Malgré les découragements, les imprévus et les épreuves, elle trouve toujours une solution et une façon d’adapter notre système
scolaire conventionnel afin de mieux soutenir les élèves. Elle fait changer les mentalités pour permettre à ces enfants de mieux
progresser. Elle encourage le milieu scolaire à s’adapter aux besoins grandissants de ces élèves.
Notons que l’OPPQ contribue en remettant la somme de 1000 $ au CQJDC pour ce prix.
49
Vol. 24, no 1, décembre 2023
Anne-Marie Ducharme, lauréate de la bourse « Jeunes chercheurs » de 3e cycle
Anne-Marie Ducharme, doctorante en psychoéducation à l’Université de Sherbrooke, a remporté
la bourse du 3e cycle. Titulaire d’un baccalauréat et d’une maitrise en criminologie, Anne-Marie
Ducharme termine actuellement son doctorat en psychoéducation. C’est dès le début de ses
études universitaires qu’elle a constaté que la recherche serait pour elle le meilleur moyen de
contribuer au développement et à l’amélioration des pratiques auprès des personnes vulnérables.
Elle s’est impliquée dans différents projets de recherche, en tant qu’auxiliaire ou coordonnatrice
de recherche, dans lesquels elle s’est développé un réel intérêt à mieux comprendre la jeunesse
en difficulté. Anne-Marie souhaite poursuivre ses travaux de recherche auprès des adolescentes
et adolescents présentant des difficultés d’adaptation complexes, afin d’ultimement, soutenir ces
jeunes dans les défis qui les accompagnent.
Sa thèse est intitulée « Les conséquences de l’association à un gang de rue chez les adolescentes
sur le développement de symptômes du trauma complexe au début de l’âge adulte ». L’implication
dans un gang de rue (GR) est associée à une augmentation des comportements violents, mais aus-
si, à une intensification de l’exposition à la violence subie chez les filles (p. ex., exploitation sexuelle, violence physique, émotion-
nelle). Dans le cadre de la thèse et à l’aide d’un devis longitudinal, les relations entre l’association à un GR chez les adolescentes,
l’exploitation sexuelle subie, la violence agie et un ensemble de symptômes associés au trauma complexe au début de l’âge adulte
sont examinées. Les résultats attendus mettront en évidence des difficultés vécues par ces adolescentes impliquées dans un GR,
qui sont généralement moins visibles que les troubles de comportement qui les caractérisent : les traumatismes et leurs impacts
sur le développement psychosocial et le bien-être.
Isabelle Martineau-Crète, lauréate du prix « Coup de cœur du public » pour l’affiche scientifique
Mme Martineau-Crète a remporté le prix « Coup de cœur du public » pour l’affiche scientifique qui
lui a été décerné par le public. Intitulée « Facteurs scolaires qui influencent l’anxiété de perfor-
mance des élèves au secondaire », l’affiche présente le concept d’anxiété de performance ainsi
qu’une carte conceptuelle qui découle d’une recension systématique d’écrits sur cette thématique.
Cette carte conceptuelle expose les différents facteurs de risque et de protection scolaires qui
influencent l’anxiété de performance des élèves au secondaire. Les congressistes ayant consulté
l’affiche ont pu apprécier les différents leviers d’action pour prévenir et intervenir sur cette clien-
tèle présentant cette problématique.
Prix « Ma recherche en 180 secondes »
Prix « Coup de cœur du public » pour l’affiche scientifique
Jeanne Chouinard, lauréate du prix « Ma recherche en 180 secondes »
Madame Chouinard a remporté le prix du concours oratoire ayant pour titre « Ma
recherche en 180 secondes » dans le cadre du congrès biennal du CQJDC. Lors
de son exposé, Mme Chouinard a rappelé à l’auditoire que les plans d’interven-
tion (PI) sont des outils de planification et de concertation mis en place dans
les milieux scolaires québécois pour mieux répondre aux besoins des élèves
qui rencontrent des difficultés persistantes d’apprentissage ou d’adaptation à
l’école. Elle a aussi insisté sur le fait que le personnel scolaire doit permettre
aux parents de s’exprimer sur les besoins de leur enfant en collaboration.
Enfin, elle a présenté les résultats de son mémoire de maitrise ayant permis
d’identifier certains facteurs qui entravent ou qui facilitent la participation des
parents à la démarche du PI de leur enfant. Le climat des rencontres, la for-
mation des intervenants, le respect de l’utilisation du PI sont des exemples de
facteurs qui facilitent la participation des parents au PI de leur enfant.
Jeanne Chouinard, lauréate du prix « Ma recherche en 180
secondes », et Vincent Bernier, membre du jury
Vincent Bernier, membre du jury, et Isabelle Martineau-Crète,
lauréate du prix « Coup de cœur du public » pour l’affiche scientifique.
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Full-text available
This review provides an overview of the existing literature on school-aged children’s and youth’s (i.e. 6- to 18-year-olds) personal and social development within the context of physical education and sports. A total of 4359 non-duplicate articles were retrieved from six databases. After the title, abstract and full text screening, 88 articles met the inclusion criteria and were included for further analysis. Articles had to be published in a peer-reviewed journal between 1 January 2008 and 6 December 2017. The 88 studies used several study designs, methods and instruments to investigate a variety of concepts related to personal and social development. Concepts were grouped into the following 11 themes: work ethic; control and management; goal-setting; decision-making; problem-solving; responsibility; leadership; cooperation; meeting people and making friends; communication; and prosocial behaviour. The main findings for each of the 11 themes are reported, and limitations and implications are provided to guide researchers and practitioners in their future work.
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Play is one of the most difficult behaviors to quantify and for this reason, its study has had a very rocky history. Social play is ephemeral, difficult to distinguish from the other so-called serious behaviors, not so frequent (especially in sexually mature subjects), fast, and complex to describe. Due to its multifaceted nature, it has often been considered as a wastebasket category that has included all kinds of the behaviors not showing any immediate, obvious goal. Yet, play is widespread across the whole primate order and can have a strong impact on the development of cognitive, psychological, and social skills of many species, including humans. Unlike functional behaviors that are specifically and economically performed to reduce uncertainty and to increase the opportunity to gain resources, play seems to introduce and increase uncertainty, creating new challenges for the animals. For this reason, social play has been hypothesized to be the engine of behavioral innovation in ontogeny. From the first mild and gentle interactions with the mother to the most sophisticated play fighting sessions and acrobatic action sequences with peers, play represents for juveniles (and not only for them!) a window onto the social and physical environment. In this review, I focus on social play and its relation to adult social competence. By playing, juveniles acquire competence to manage interactions with conspecifics, enlarge their social networks, and test their physical power and motor skills (i.e., long-term benefits). At the same time, I propose the view that play—due to its plastic and versatile nature—can be used in an opportunistic way, as a joker behavior, throughout life to strategically obtain short-term or immediate benefits. I put forward the hypothesis that, during ontogeny, the joker function of play can be modulated according to the differing inter-individual relationships present in the diverse societies, characterizing the primate order.
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Understanding teachers’ stress is of critical importance to address the challenges in today’s educational climate. Growing numbers of teachers are reporting high levels of occupational stress, and high levels of teacher turnover are having a negative impact on education quality. Cultivating Awareness and Resilience in Education (CARE for Teachers) is a mindfulness-based professional development program designed to promote teachers’ social and emotional competence and improve the quality of classroom interactions. The efficacy of the program was assessed using a cluster randomized trial design involving 36 urban elementary schools and 224 teachers. The CARE for Teachers program involved 30 hr of in-person training in addition to intersession phone coaching. At both pre- and postintervention, teachers completed self-report measures and assessments of their participating students. Teachers’ classrooms were observed and coded using the Classroom Assessment Scoring System (CLASS). Analyses showed that CARE for Teachers had statistically significant direct positive effects on adaptive emotion regulation, mindfulness, psychological distress, and time urgency. CARE for Teachers also had a statistically significant positive effect on the emotional support domain of the CLASS. The present findings indicate that CARE for Teachers is an effective professional development both for promoting teachers’ social and emotional competence and increasing the quality of their classroom interactions.
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The present study examined how teachers' psychological experiences of burnout and efficacy as well as perceptions of curriculum supports (e.g., coaching) were associated with their implementation dosage and quality of Promoting Alternative Thinking Strategies, a social-emotional curriculum. Results revealed that teachers' psychological experiences and perceptions of curriculum supports were associated with implementation. Teacher burnout was negatively associated and efficacy was positively associated with implementation dosage. Teachers who perceived their school administration as more supportive reported higher implementation quality, and positive perceptions of training and coaching were associated with higher levels of implementation dosage and quality. Teachers who reported the highest levels of burnout and the most negative perceptions of curriculum supports reported the lowest levels of implementation dosage and quality. The findings suggest that both individual and organizational factors are related to self-reported implementation and may be important to address in order to maximize the effectiveness of school-based curricula.
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Many research findings on animal play also hold true for children, revealing structural and functional similarities with mammals in general and primates in particular. After an introduction to life history theory, and before turning to humans, I review research in the two non-human mammalian species in which play has been studied the most extensively: laboratory rats and monkeys. I review the development of play, deprivation studies, gender segregation and the functions of gender-differentiated forms of play. Gender segregation and sex differences in play parenting and rough-and-tumble play that are observed in many primates are also evident in children. Vigorous social play benefits all children physically by developing strong bones and muscles, cardiovascular fitness and by encouraging exercise habits that may help prevent obesity. Unsupervised play also helps hone communication, perspective-taking and emotion regulation skills. For boys especially, rough-and-tumble play in early childhood provides a scaffold for learning emotion regulation skills related to managing anger and aggression.
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Executive function (EF) refers to the higher-order cognitive control process for the attainment of a specific goal. There are several subcomponents of EF, such as inhibition, cognitive shifting, and working memory. Extensive neuroimaging research in adults has revealed that the lateral prefrontal cortex plays an important role in EF. Developmental studies have reported behavioral evidence showing that EF changes significantly during preschool years. However, the neural mechanism of EF in young children is still unclear. This article reviews recent near-infrared spectroscopy (NIRS) research that examined the relationship between the development of EF and the lateral prefrontal cortex. Specifically, this review focuses on inhibitory control, cognitive shifting, and working memory in young children. Research has consistently shown significant prefrontal activation during tasks in typically developed children, but this activation may be abnormal in children with developmental disorders. Finally, methodological issues and future directions are discussed.
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Play fighting is a common form of play reported among species of mammals, birds, and some other taxa. The competition present in play fighting revolves around gaining some advantage, such as biting a partner without being bitten. The behavior simulated during play fighting need not be restricted to that present in adult serious fighting, but can involve competitive interactions derived from amicable behavior, such as sex and social grooming, or from nonsocial competition, such as predation. What unifies play fighting, irrespective of the functional behavior being simulated, is that it involves some degree of reciprocity, or turn taking, that requires that the competition be attenuated by cooperation. However, there are several different ways in which cooperation can be inserted into playful interactions, and these vary in use across different species. The moderation of competition with cooperation forces animals to monitor their own actions and those of their partners, and this common feature appears to be one vehicle through which the experience of play fighting in the juvenile period can train animals for greater psychological resilience. The monitoring and contextual adjustment of actions influences the development of executive functions of the brain, which, in turn, leads to the development of more adaptable adults.
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Children and youth with deficits in social competence present substantial challenges for schools, teachers, parents and peers. These challenges cut across disciplinary, instructional and interpersonal domains and they frequently create chaotic home, school and classroom environments. Schools are charged with teaching an increasingly diverse student population in terms of prevailing attitudes, beliefs, behavioural styles, and racial/ethnic and language backgrounds. This article reviews the evidence-based literature on social skills assessment and intervention strategies for children and youth. The article begins with a discussion of the conceptualisation of social competence in which is described how social skills can function as academic enablers and how problem behaviours can function as academic disablers. It then describes various methodological and conceptual issues in social skills interventions and details specific social skills assessment strategies. This discussion is followed by a description of social skills intervention strategies and a discussion of multi-tiered social skills intervention programmes is provided. The article concludes with a discussion of the literature’s implications for teaching social skills in the schools.
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Combat activities in french physical education since the nineteenth century : between educational relevance and school resistance The permanence of combat activities in French school Physical Educational system (PE) since the end of the nineteenth century confirms the educational virtues attributed to the mastery of interpersonal physical confrontations. Collectively analyzed across official texts, theoreticians’ ideas and teachers’ practices, the role and status of combat in Physical Education show the selections and the transformations wrought by the school system among social practices. These choices and school educational transformations since the end of the nineteenth century depend on joining four factors: the educational stakes pursued by PE, characteristics and evolution of social practices, ways of organizing teaching of combat activities outside of school, and the role of school actors. Originally integrated in various forms of gymnastics, these activities have gradually acquired a full place in PE associative school sport and lessons as combative sports, first for boys and then for girls. However some resistance persists and still hinder their diffusion in schools. This is due not only to conditions of teacher training, but also to teaching proposals gaps inside and outside of school, so as to popularise these activities to all pupils.
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The studies refered to have all been done at just one or trro schools, and there may be considerable variations between cht1 dren of different cultural and social class backgrounds. Further research is needed in these areas. So far as we can tell at the moment, r…t is primarily a friendly and playful aclivty, uhich does not usually inoolve any intent to hurt, at least up to early adolescense. Its fuiJdion remains unclear, but it appears to be part of normal development, and children uiJo rough-and-tumble a lot are generally sociable but not especially aggressive. To this extent, there seems no reason to discourage r…t except in contexts uhere the noisy and vigorous adivities might distrad/rom other (e. g. educational) objectives. It does seem that the motivation behind r…t becomes more complex by adolescence, and the task of giving pradical advice on the matter comsponding/y more difficult. Finally some adults and some children may have difficulty in distinguishing r…t and agression. Some dissemination of, or training in, the cues uHch distinguish the trro may be helpful.