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Formes verbales dans le français
et
l'arabe irakien : étude contrastive
Lecturer Dr. Noor Hamid Abdullah AL-SHAMS
PhD in Linguistics
University of Baghdad / college of languages / Department of French language
noor-alshams@colang.uobaghdad.edu.iq
noor-alshams@colang.uobaghdad.edu.iq
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Résumé
La présente recherche porte sur la formation des verbes dans le parler
français et celui de l'arabe d'Irak. Il concerne la formation des verbes employés par
les locuteurs français et irakiens et les phénomènes linguistiques les plus importants
qui la distinguent aujourd'hui. Celui-ci est divisé en deux sections. Premièrement,
nous présenterons une description de la construction des formes verbales dans le
parler français. Deuxièmement, nous décrirons la construction des formes verbales
dans le parler arabe d'Irak. L'intérêt de cette étude se trouve dans le fait que, d'un
côté, la plupart des études n'abordent que les phénomènes linguistiques dans les
langues standards et ignorent ceux des dialecte comme la formation des verbes, en
question, qui est considérée comme l'une des manifestations linguistiques
particulières qui mérite d'être étudiée et sondée attentivement. Dans la présente
recherche nous trouvons que le français et l'arabe irakien ont leurs origines dans
leurs langues standards dont ils suivent les règles syntaxiques. Cependant, dans
certains cas l'arabe irakien ne suit pas ces règles syntaxiques, les verbes sont
construits soit par modifier les structures grammaticales de la langue standard; soit
par improviser, voire créer des schèmes nouveaux, soit par mélanger deux verbes
ou plus pour former son nouveau verbe ayant un nouveau sens.
Mots-clés: formes verbales, verbes simples, verbes composés, le
français, l'arabe irakien.
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Introduction
La formation des verbes dans les langues vivantes recourt à la façon dont
ces verbes sont créés et/ou construits. Linguistiquement, ce mécanisme nécessite
souvent d'utiliser des préfixes, des suffixes ou des modifications internes pour créer
ou conjuguer de nouveaux verbes selon différents temps, modes, aspects ou
personnes. Toutes les langues vivantes disposent d'une très grande variété de
formes verbales, dont certaines sont aptes à affecter le sens en contexte. Ainsi,
pour comprendre une langue, il est nécessaire de savoir comment ses verbes sont
construits. L'étude de la formation des verbes, en question, offre de grandes
possibilités à l'apprentissage d'une langue.
Notre étude aborde la formation des verbes en français et en arabe irakien.
Nous essayons, d'une part, de décrire la formation des verbes employés par les
locuteurs français, et qui peut comporter l'ajout des suffixes : -er, -ir ou -re, ainsi que
des changements internes pour les conjuguer régulièrement et/ou irrégulièrement.
Et d'autre part, de montrer comment les locuteurs irakiens forment-ils les
verbes employés dans leur parole d'une manière assez délicate et sophistiquée
parce que ces verbes se forment essentiellement à travers des modèles de
conjugaison qui sont basés en général sur des racines trilitères et rarement sur des
racines quadrilatères. La formation des verbes implique l'ajout des préfixes, de
suffixes, des changements internes aux lettres de la racine ou de mélanger deux
verbes ou plus pour former un autre verbe portant un sens différent.
Il est ainsi pertinent de s’intéresser à ces questions : quels sont les formes
verbales employées par le locuteur français et irakien, leurs origines, et les
situations dans lesquelles ils les usite. Nous allons évoquer également comment,
pour construire leur parole, les locuteurs modifient les paradigmes de leurs langues
standards, pour construire leur propre dialecte.
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Dans cette étude nous adoptons l'approche contrastive pour mettre l'accent
sur les similitudes et les différences, qui portent sur le mécanisme de la formation
des verbes dans deux langues différentes celle du français et de l'arabe irakien, en
identifiant les caractéristiques spécifiques de la formation des verbes dans chaque
langue, exposant les modèles de conjugaison (les préfixes, les suffixes et les
changements internes) qui peuvent se produire lors de la conjugaison des verbes
dans chaque langue, et expliquant comment ces changements affectent la
signification des verbes.
L'objectif de cette étude, du côté de l'apprenant de langues, réside dans le
fait d'identifier les points communs et les différences entre la langue cible celui du
français et la langue maternelle celui de l'arabe irakien, d'améliorer une
compréhension plus approfondie des structures linguistiques des langues. Ainsi,
l'apprenant peut perfectionner sa capacité à s'exprimer de manière appropriée et
efficace dans des contextes variés. Néanmoins, du côté de l'enseignant de langues,
cette étude se constitue l'un des outils qui peut être primordial en préparant des
cours adéquats aux besoins spécifiques des apprenants.
Parmi les études linguistiques précédentes dans ce domaine, qui peuvent
aborder différents aspects de la formation des verbes : les modèles de conjugaison,
les suffixes et préfixes, les changements de radical, et l'évolution historique des
formes verbales, on cite l'ouvrage de Fernand Bentolila (2019), intitulé Le verbe et
sa conjugaison en français parlé. L'auteur traite la formation des verbes utilisées en
français parlé et propose un classement fondé sur les radicaux du présent de
l'indicatif des verbes qui sont rangés en quatre groupes en définissant des sous-
types caractérisés par leurs cinq "temps primitifs". Le livre de Tine Greidanus
(2014), intitulé Les constructions verbales en français parlé. L'auteur étudie la
formation des 250 verbes les plus fréquents dans le français parlé. La thèse de
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Mahmoud Al-Abassi (1978), intitulée : Le parler arabe d'al- A‘ẓamiya (Bagdad) :
esquisse d'une description linguistique. Son étude concerne l'analyse linguistique
du dialecte arabe de l'un des quartiers de Bagdad. L'auteur dévoile certains
phénomènes linguistiques qui sont demeurés inconnus et liés à l'arabe dialecte
des Bagdadiens. Le livre de Majid Mohammed Ali Al-Qaissi (2013), intitulé :
Mawsoua't al-loughah albaghdadyah : ouṣoulahâ wa abnyatahâ wa moucdjam
alfaṫahâ. Dans son livre Al-Qaissi décrit l'arabe dialectal de Bagdad, son origine, la
construction de ses formes lexicales et ses différents accents.
Notre étude est repartie en deux sections. Nous verrons tout d'abord les
formes des verbes en français et en arabe irakien. Nous exposerons, en premier
lieu, la construction des formes verbales en français qui sont classées selon le
niveau de la conjugaison, de la construction et de la tournure. En deuxième lieu,
nous aborderons la construction des formes verbales en arabe irakien : les verbes
simple (trilitères et quadrilatères) et les verbes composées où nous décrirons l'un
des phénomènes caractérisant l'arabe irakien le télescopage (la façon avec laquelle
le locuteur irakien produit des expressions nouvelles pour répondre favorablement
à ses besoins quotidiens).
1. Les formes verbales en français et en arabe irakien
Le français, qui a été évolué du latin avec un véritable changement
d’expression, du temps et du mode (Perret, 2020, p.201), trois grandes classes de
verbes se trouvent, chacune a ses critères utilisés dans son classement.
Morphologiquement, ces verbes se conjuguent c'est à dire ils suivent la personne,
le mode, le temps et ils possèdent un plus grand nombre d’affixes flexionnels.
Pour l'arabe de l'Irak, qui est comme les autres dialectes arabes, a son
origine dans l'arabe classique (Imbert et Pinon, 2022, p.16) mais avec des
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influences qui proviennent de plusieurs sources locales d' une part et régionale
d'autre part. Il est influencé au départ normalement par la langue sémitique ainsi
que par le sumérien, l'akkadiens (le babylonien et l'assyrien) et l'araméen. En outre,
l'influence de certaines langues comme le persan, le grec, le mongol, le turc, l'hindi,
le français et l'anglais, ne peut être ignorée (Al-Shibibi, 2007, p.13). Elle a laissé
son empreinte non seulement sur la langue arabe et sur le dialecte arabe d'Irak en
question, mais sur plusieurs dialectes locaux. Cette influence était limitée à certains
termes que la société irakienne garde du fait qu'ils sont proches de la langue arabe
et faciles à prononcer.
Dans cette partie, nous examinons la formation des formes verbales déjà
usitées par les locuteurs français et irakiens, les modifications qu'ils apportent à la
forme et à la prononciation d'une part, et au sens d'une autre part.
1. 1. Construction des formes verbales en français
Selon Monneret et Poli (2020, p.134) le verbe avec le nom l'adjectif,
l'adverbe, le déterminant, le pronom, la préposition et la conjonction constituent
l’ensemble des natures de mots qui composent la grammaire de la langue française.
Ce verbe est considéré comme le centre du nœud verbal et donc le cœur de la
phrase " Il est pour ainsi dire le régissant de toute la phrase" (Wandji, 2014, p. 38).
Les verbes en français peuvent être classés selon trois niveaux : la
conjugaison, la construction et la tournure.
1. 1. 1. Conjugaison verbale
À partir de l'écriture, les verbes sont traditionnellement classés en trois
groupes par la variation morphologique. Cette classification s'appuie sur des
critères historiques des conjugaisons des verbes latines (Haddad, 2017, p. 567) :
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- verbes du premier groupe dont l'infinitif est en –er
- comme : parler/regarder/arriver … sauf aller «verbe irrégulier»
- verbes du deuxième groupe dont l'infinitif est en –ir
- comme : finir/choisir/grandir …
- verbes du troisième groupe dont l'infinitif est en –ir/–re/–oir comme :
partir/comprendre/savoir
Grâce à l'évolution de la linguistique, de nouveaux classements des verbes
français apparaissent en se basant sur la phonie. Selon Dubois, les verbes français
sont classés en sept radicaux. Plus tard, Bentolila les classe en trois catégories,
en s’appuyant sur la forme orale des conjugaisons au présent de l'indicatif
(Bentolila, 2019, p.22) :
- verbes à un seul radical :
chanter [šãt]
Ce type des verbes, qui forment tous leurs formes sur leur radical unique, ne
se limite pas aux verbes du premier groupe mentionné ci-dessus. Il comprend
certains verbes à infinitif en -re, ou en –ir et certains verbes en -vrir ou en –frir.
- verbes à deux radicaux :
nettoyer [netwa, netwaj]
mourir (alternance [mœr / mur]) [mœr, mur]
Ce type des verbes forment leurs formes sur deux radicaux : le radical aux je,
tu, il/elle et ils/elles s’oppose au radical aux nous et vous. Il comprend les verbes à
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dernière syllabe de l’infinitif, les verbes à infinitif en –er /–oir/–oir (alternance [-wa/-
waj]) qui comportent un [-waj] à l’avant-dernière syllabe de l’infinitif, le verbe à
infinitif en –ir (alternance [mœr / mur]) qui comporte un [-mur] à l’avant-dernière
un [-aker] à l’avant-dernière syllabe de l’infinitif.
- verbes à deux radicaux
finir [fini, finis]
Ce type des verbes forment leurs formes sur deux radicaux : le radical aux je,
tu, il/elle s’oppose au radical aux nous, vous, ils/elles. Il comprend les verbes à
radical court à finale vocalique et les verbes à radical court en [-r].
- verbes à trois radicaux
Ce type des verbes forment leurs formes sur trois radicaux différents : la
forme du radical est variable, les je, tu, il/elle ont une forme qui se diffère de celle
des nous et vous, et de celle du ils/elles, c’est-à-dire chacun a un radical diffèrent
1. 1. 2. Construction verbale
Pour classer les verbes français selon la construction, trois types
fondamentaux de constructions verbales sont retenus :
- verbes intransitifs
Dans la construction verbale intransitive, le verbe se construit sans complément
(directe ou indirecte) et sans attribut. Ces verbes expriment une action ou un état sans
que le sens soit présidé par un nom ou groupe nominal, par exemple : Il neige.
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- verbes transitifs.
Dans la construction verbale intransitive, le verbe nécessite un complément
(directe ou indirecte) ou plus.
D'après le nombre de compléments et la manière dont ceux-ci s’accolent au
verbe, trois sous-types de construction transitive sont distingués :
• verbes transitif directe quand le complément s'accole directement au verbe
: Il adore ce film.
• verbes transitif indirecte quand le complément accompagnant le verbe est
introduit par une préposition : Il pense à sa famille.
• verbes ditransitif quand le verbe appelle deux compléments : Il m'envoie
un texto
- verbes attributifs.
La construction attributive se distingue des autres constructions par le
complément qui est connu comme attribut et le verbe attributif : Il trouve le discours
du président admissible.
1. 1. 3. Tournure verbale
Pour classer les verbes français selon la tournure, deux types principaux de
constructions verbales se trouvent :
- Tournure pronominale
Traditionnellement, les verbes pronominaux se reconnaissent, selon
l'emploie, à trois groupes : verbes pronominaux par nature, verbes pronominaux par
construction (réfléchi-passif-réciproque). Ces verbes se distinguent par certains
traits caractéristiques : ils se construisent avec un pronom réfléchi, pour exprimer le
passé ils se construisent avec l'auxiliaire être et ils ne se mettent pas à la voix
passive.
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- Tournure impersonnelle
Les verbes impersonnels sont classés en deux groupes : verbes
impersonnels par nature, verbes impersonnels par construction qui expriment
(phénomène ou événement-existence et/ou manque- nécessité ou possibilité-
tournure passif ou pronominal). Ce types des verbes ne se conjuguent qu'avec le
pronom personnel il qui n'exprime aucun agent.
1. 2. Construction des formes verbales en arabe irakien
La langue arabe, comme dans toute les autres langues, a un système verbal
qui constitue son épine dorsale où les verbes sont utilisés couramment "Le verbe
étant dans la syntaxe , aussi bien que dans l'étymologie grammaticale, la partie du
discours la plus importante , occupe le plus ordinairement la première place" (Glaire,
1861, p.160). Ces verbes ont, comme nous avons déjà mentionné, deux schèmes :
trilitères et quadrilatères. Les schèmes trilitères sont les plus utilisés en langue
arabe "dû à l'abondance de la langue de ce type de mots" (Ballaoui, Lahmar et
Labani, 2016, p.3). Et les schèmes quadrilatères qui sont en faible proportion même
dans le Coran qui «ne fournit que très peu de verbes quadrilatères» (Chouémi,
1966: 229), et en comptant ces verbes nous trouvons que «le nombre total des
verbes quadrilatères dans le coran est sept
Dans la société irakienne les verbes sont exceptionnellement courants, ils
constituent une partie importante de la structure du parler des Irakiens. La
grammaire et la source de l'arabe parlé d'Irak ont leur origine dans la langue arabe
classique, mais avec des influences qui proviennent de plusieurs sources locales
d'une part et régionales d'autre part.
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1. 2. 1. Formes verbales simples:
Dans la langue arabe, les grammairiens arabes divisent les parties élémentaires
du discours en neuf : le verbe, le nom, l'adjectif, l'article, le pronom, la préposition,
l'adverbe, la conjonction et l'interjection. Ils s'intéressent au verbe attendu qu'il constitue
le noyau d'une phrase " le verbe est véritablement ce qui donne la vie au discours et en
réunit en un seul corps les parties éparses" (De Sacy, 1810, p.99). Les verbes, dans
l'arabe dialectal d'Irak, sont utilisés dans toutes les conversations quotidiennes ainsi ils
jouent un rôle distinctif dans le parler arabe des Irakiens.
Ces verbes peuvent être classés, d'une part, selon le nombre de consonnes
de leurs racines (verbes trilitères et verbes quadrilatères). D'autre part, selon le
modèle (verbes primitifs(1) ou nus et verbes dérivés(2) ou augmentés).
1. 2. 1. 1. Verbes trilitères
L'arabe dialectal de Bagdad a, en effet, deux schèmes : celui qui est de
l'arabe classique et l'autre qui ne l'est pas. Nous commençons la description du
système morphologique du parler arabe de Bagdad avec le schème qui est de
l'arabe classiques. Les verbes trilitères se trouvent sous la forme des verbes
primitifs et les verbes dérivés.
Les verbes trilitères primitifs ou nus ne sont formés que de trois lettres à la 3e
personne masculine singulière du prétérit, ces verbes suivent les schèmes :
- fucal
foŧas
(a expiré)
- facal
faham (a compris)
- fical
ḥisab
(a calculé/compté)
1- Les verbes primitifs composés des seules lettres constituant la racine. Ces lettres qui les
composent sont nommées radicales.
2- Ces verbes sont des verbes primitifs augmentés de certaines lettres qui indiquent une certaine
modification de l'idée du verbe primitif.
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Les verbes trilitères dérivés ou augmentés se forment du verbe primitif par
l'addition d'une ou de plusieurs lettres, ils suivent les schèmes :
- fac-cal(1)
ḥal-laf
(a fait prêter serment à quelqu'un)
- fâcal
kâfaḥ
(a lutté contre)
- tfac-cal
:
tdjam-mac (s'est groupé)
tsab-bac
(s'est forcé à apparaître courageux)
tkham-mar (est levé)
tdjar-rac (a avalé à petits doses)
tmoul-laḥ (2)
(s'est réuni pour manger
amicalement)
- tfâcal
:
• un sens réciproque(3)tkâtal
(s'est entretué)
•
tlâbas
(s'est mélangé)
• un sens de faire semblant(4) (a fait semblant d'être idiot)
- 'iftical
'intibah (a fait attention)
- 'ifc-cal
'igṣ-ṣar
(est devenu court)
- 'istafcal
:
'istacŧa
(a demandé l'aumône)
'istafḥal
(s'est aggravé)
'istardjal
(s'est comporté
comme un homme)
1- L'intensité se marque par l'utilisation de cette forme. Elle est utilisée pour renforcer l'action.
2 (un sel).
3- Quand la forme tfâcal est dérivée d'un verbe qui exprime une action, elle a le sens de réciprocité.
4- Quand la forme tfâcal est dérivée d'un verbe d'état, elle a le sens de faire semblant à ce verbe.
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'istawṫaf
(a
trouvé un emploi)
'istaḥmal
(a supporté)
istacdjal
(s'est dépêché)
Les autres schèmes qui ne sont pas de l'arabe classique, les Bagdadiens les
improvisent des langues sémitiques comme l'akkadien, l'araméen, le syriaque,
l'hébreu et l'amharique (Al-Qaissi, 2013, p.34), ces formes sont :
- focal
ṣofar
(est devenu tres jaune ou pâle)
- tfocal
tkhorad (a dilapidé)
- tfaycal
tchayŧan
(a agit comme un diable)
- 'infical
'inqisam
(a été divisé)
- 'infocal
'inghuban (a été dupé)(1)
Il est à noter qu'il existe des schèmes pour les formes dérivés du nom arabes:
- tfac-cal
tḥadjar (s'est fossilisé)
- tfaycal
tḥaywan (a agit comme un animal)
- tmafcal
tmachkal
(a créé des problemes)
Concernant les verbes qui sont dérivés des noms non-arabes, les Bagdadiens
ont acquis de nouvelles formes verbales en les empruntant de toutes les autres
langues avec lesquelles il est en contact, comme l'anglais. Ces verbes sont les plus
courants dans le parler arabe de Bagdad, parce que l'ère actuelle a constamment
besoin de nouveaux mots, ainsi pour répondre à un tel besoin, le locuteur
bagdadien les usite en deux façons :
1- Les formes 'infical et 'infocal est employées par les Bagdadiens pour exprimer la forme passive au
présent à la place de la forme invariable yufcal. Cette forme d'ajouter le préfixe –n au verbe pour
former le passif, est déjà usitée dans la langue syriaque, l'akkadien (nibriso
a été séparé) (Al-
Qaissi, 2013: 34), et l'hébreu (nchi'al a été interrogé) (Joüon et Muraoka, 2006: 139,140).
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- le schème fac-cal
, par exemple : say-yav
(a enregistré) qui est
dérivée du verbe "to save", chay-yar
(a partagé) qui est dérivée du verbe "to
share", ras-sat
(a redémarré) qui est dérivée du verbe "to restart", kans-sal
(a ignoré) qui est dérivée du verbe "to cancel", kary-yat
(a créé) qui est
dérivée du verbe "to create", farm-mat
(a formaté) qui est dérivée du verbe
"to format" et zaw-wam (a zoomé) qui est dérivée du verbe "to zoom in".
- la construction (saw-wah + nom en anglais) dont la traduction littérale (a fait +
nom en anglais), par exemple : saw-wah serʃ
(a cherché) qui est dérivée du
verbe "to search", et saw-wah klik
(a cliqué) qui est dérivée du verbe "to click".
1. 2. 1. 2. Verbes quadrilatères
Les verbes quadrilatères primitifs sont les verbes qui sont formés de quatre
lettres à la 3e personne masculine du singulier du prétérit. Pour former ces verbes,
le Bagdadien utilise le schème faclal
qui est le même employé dans l'arabe
classique faclala . Le Bagdadien le modifie par supprimer la voyelle brève /a/
qui suit la dernière consonne.
- faclal
kahrab
(a électrifié)
Les verbes quadrilatères dérivés ou augmentés se forment du verbe primitif
par l'addition d'une lettre et suivent le schème tfaclal
:
- tfaclal
tkarbas
(a déboulé)
- faclal
adcbal
(a roulé par terre)
1. 2. 2. Construction des formes verbales composées :
Parmi les phénomènes linguistiques distincts dans l'arabe dialectale de
Bagdad, nous pouvons nous intéresser au fait du télescopage qui consiste à
assembler et/ou combiner deux verbes autonomes ou plus pour en composer un, à
partir de leurs lettres, et à unir les sens respectifs de ces verbes.
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Cette étymologie, qui est déjà existé dans l'arabe classique ainsi que dans
les autres langues, "est ancienne et correspond à ce que l’on appelle en arabe «
an-naḥt» (le taillage)… Elle résulte de la formation d’un syntagme sémantique
correspondant au regroupement de certains morphèmes de mots composant une
certaine phrase. La formation de ce syntagme n’obéit à aucune règle paradigmatique,
mais elle suit la stylistique de la langue arabe" (Baudouin, 2006, p.146).
L'émergence de ces termes mélangés se manifeste lorsque deux termes
sont simultanément présents à l'esprit du locuteur qu'il, peut-être, n'arrive pas à les
séparer et par conséquent ces termes peuvent s'interpénétrer l'un dans l'autre.
Cependant, le résultat de tels manquements impose un terme mélangé ou une
«contamination», connu comme «mot-valise» ou «portemanteau», et considéré
comme un terme nouveau (Ullmann, 1961, p.59).
Le phénomène du télescopage en arabe comprend deux catégories en
fonction du type des mots sources à partir desquels ils sont formés. La première
catégorie comprend les termes formés à partir de deux mots sources : les termes
formés à partir de deux verbes(1) et les termes formés à partir d'une construction
génitive(2). La deuxième catégorie regroupe les termes dont les mots sources
proviennent d'une phrase ou d'une expression verbale (Mohsin, 2020, p.43)
Les dialectes de l’aire arabophone sont pareillement affectés par le
phénomène d'an-naḥt (Diab-Duranton, 2015, p.63). Le Bagdadien l'usite dans son
parole, et continue d'inventer de nouveaux mélanges en adoptant une technique
qui se diffère de la technique adoptée dans l'arabe classique. Il combine les verbes
par l'omission d'une partie de deux ou de plusieurs verbes, puis il ajoute certaines
lettres constituant les verbes sources.
1- un seul verbe créé à partir d'une phrase entière.
2- un nouvel adjectif créé à partir de deux mots, un nouveau nom dérivé de deux mots et un mot
référentiel à une personne qui suit une doctrine liée à deux écoles de pensée différentes, ou à
un résident d'une province ou plus.
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Contrairement à l'Arabe classique, l'absence des règles standards pour mélanger
les verbes, dans le dialecte arabe de Bagdad, peut conduire à créer de nouveaux verbes
pour avoir de nouveaux sens qui partagent ou combinent les sens des verbes sources.
Ces nouveaux mélanges ont quatre fonctions : faciliter la prononciation, économiser
l'effort, s'exprimer plus brièvement et présenter de nouvelles nuances de sens. Le verbe
tkacw-war
(s'est recroquevillé sur lui-même) est combiné des verbes
takaw-wara
(s'est pelotonné) et icwadj-dja
(s'est penché) pour avoir un
nouveau sens que le locuteur bagdadien ne trouve, ni dans takaw-wara (exprime une
intention tendre), ni dans icwadj-dja (exprime une intention dure).
Tableau (1.1) Verbes composés dans l'arabe irakien
Arabe dialectal Arabe classique
chiŧaḥ (a porté les choses
au-delà de la juste raison)
chaŧ-ŧa (exagérer) et ḥarafa
(détourner)
diḥas
(a inséré fortement) das-sa
(insérer dans) et ḥachara (faire
entrer sans ménagement quelque part)
burach
(a râpé) barâ
(tailler) et haracha
(gratter)
gaḥwar
(a creusé intérieurement)
qaw-war
(découper en creux), hafara
(creuser vertivalement) et ḥak-ka (frictionner)
kharmach
(a griffé) khamacha
(érafler la peau), kharaŧa
(racler) et kharacha
(gratter avec les ongles)
c
arwadj
(a modifié l'orientation de)
car-radja
(zigzaguer) et caw-wadja
(recourber)
malghaŧ (a mis qqch sur
une autre pour dissimuler)
malaŧa (enduire avec du ciment), ghaŧ-ŧâ (cacher)
tgarḍam
(s'est rongé les
sangs)
taqaraḍama
(déchirer en dedans) et kaḍama
(contenir le rage)
marghal
(s'est roulé dans la
boue et/ou la poussière)
mar-ragha
(se vautrer dans la terre) et law-
watha
(contaminer)
nakhbar
(a creusé/fouillé
dans)
nakhara
(ronger), baqara
(fendre) et nabacha
(déterrer)
tmaŧrag
(s'est effondré) maŧala (s'est étendu), khar-ra
(a perdu
l'équilibre et tomber ) et saqaŧa (a tombé)
tna
c
waṣ
(s'abstenir en geignant)
nacaṣa
(a dandiné) et cawâ
(a glapi)
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L'ensemble de ces moyens d'expression constitue ce qui est communément
connu comme le système verbal qui, d'une part, occupe une place particulière dans
la communication et la participation dans la communauté bagdadienne. Et d'autre
part, il fournit le noyau primordial des énonciations que les locuteurs français et
bagdadiens emploient pour s'exprimer.
Conclusion
Le français et l'arabe irakien, qui se caractérisent par l'existence d'un système
grammatical développé, n'ont pas acquis un statut culturel et social qui leur laisse
l'occasion d'être reconnus au même titre que les autres dialectes. Ce type d'étude
nous s'avère nécessaire de dévoiler certains phénomènes linguistiques qui restent
relativement inexplorés et méritent d'être étudiés.
Bien que la formation des verbes, en français et en arabe irakien, partage
certaines caractéristiques générales, mais chacun a ses propres spécificités
morphologiques et syntaxiques qui reflètent les particularités linguistiques et
culturelles de chaque communauté. Dû aux différences linguistiques et culturelles
entre eux, la formation de leurs verbes varie énormément. Le français et l'arabe
irakien comportent tous deux une grande variété de verbes dont la complexité
morphologique se diffère.
En français, la formation des verbes implique d'employer des préfixes, des
suffixes et de changements de radical. Tandis que, en arabe irakien la formation
des verbes nécessite une modification de certaines structures grammaticales de
l'arabe classique, l'emprunte et l'improvise des schèmes pour former des verbes
pour lesquels il n'y a pas d'équivalents et le télescopage.
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