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Profil aromatique de Tuber Melanosporum :
procédés alternatifs de conservation et vieillissement
Angélique VILLIÈRE1, Claire CAPPELLE1, Catherine FILLONNEAU1, Clara LEGUET1,2
Cyril TOUBLANC2, Alain LE BAIL1, Laurent LETHUAUT1
Affiliation 1 : ONIRIS - Université de Nantes, CNRS GEPEA UMR 6144, équipe MA(PS)2, Plateforme
Flavor, Nantes, France.
Affiliation 2 : ONIRIS - Université de Nantes, CNRS GEPEA UMR 6144, équipe OSE, Nantes, France.
Introduction.
La truffe noire T. Melanosporum est recherchée pour son arôme unique constitué d'un mélange
complexe de composés organiques volatils (COVs) résultant du catabolisme des acides aminés, des
acides gras et de l'activité du microbiome colonisant les fructifications de la truffe. Pourtant, parmi ces
COVs, seul un nombre restreint contribue de façon significative à son arôme. Optimale juste après la
récolte, la qualité de cet arôme évolue rapidement au cours du stockage. La durée de conservation de
la truffe est donc courte et sa période de récolte limitée. Développer des procédés de conservation
pouvant allonger sa durée de vie et sa disponibilité tout en préservant son profil aromatique est donc
un défi pour les professionnels de la truffe. Plusieurs études se sont penchées sur des procédés de
congélation, réfrigération, appertisation, lyophilisation et déshydratation, mais toutes démontrent
que l’application de ces procédés conventionnels font apparaître des différences notables entre
l’arôme des truffes processées et celui de la truffe fraîche (Campo et al., 2017, Culleré et al. 2013).
L'objectif de ce travail était ainsi de caractériser l'évolution du profil odorant de la truffe après sa
récolte et d'évaluer l'impact de procédés de conservation alternatifs sur sa préservation.
Matériel et méthodes.
Les ascocarpes de truffes T. Melanosporum, emballés individuellement et hermétiquement le jour
suivant la récolte, ont été stockés dans une chambre froide à 4°C (contrôle) puis analysés à 4 temps de
vieillissement post-récolte (J 1-2, 6-7, 10-11, 13-14). En outre, 5 processus de conservation alternatifs
ont été appliqués et analysés soit à J1-2 [congélation rapide à -20°C (CR-20) et congélation à -40°C (C-
40]; soit à J1-2 et J13-14 [conservation à 0°C dans glace fondante (C0), atmosphère enrichie en oxygène
(AEO) ou procédé Smartfresh® (1-MCP), (SF)].
Pour chaque condition, 2 g de truffes ont été placés à l'équilibre à 35°C pendant 30 min dans un flacon
scellé de 20 mL. Les COVs ont été extraits par HS-SPME (Car/PDMS) pendant 10 min et analysés par
chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse et à la détection par
ionisation de flamme (GC-MS-FID 7890/5975 Agilent Technologies) et à l’olfactométrie (O, ODP2,
Gerstel GMBH &CO KG). L’olfactométrie utilise le nez humain comme détecteur et permet de détecter
les principaux contributeurs odorants à l’arôme de truffe. Pour chaque condition, un panel de 8 juges
experts a procédé à l’analyse. L'acquisition et le traitement de ces données ont été effectués à l'aide
du logiciel breveté WheelOscent afin d'obtenir les profils odorants des truffes (aromagrammes).
Résultats.
Le profil odorant de la truffe fraîche présente 44 zones odorantes (Fig. 1). L'identification des composés
associés à ces zones montre que ce profil est dominé par des composés carbonylés et des alcools (notes
fermentées, maltées, végétales, champignon), des composés contenant un cycle aromatique (notes
chimiques, florales, phénolées, cuir), des esters (notes fruitées) et des composés soufrés. Parmi ceux-
ci, le diméthylsulfide apporte une note typique de truffe.
Figure 1 : Aromagramme d’une truffe fraîche (J1-2), obtenu par GC-MS-FID-O avec un panel de 8 juges
L'odeur de la truffe fraîche est caractérisée par la présence de méthanethiol, 3-méthylphénol et 3-
éthylanisole, qui diminuent au cours du vieillissement (Fig.2). À l’inverse, le vieillissement de la truffe induit
une augmentation de 2-méthylbutanoate d'éthyle susceptible de renforcer une note fruitée. L’application
de chacun des procédés alternatifs de conservation modifie le profil aromatique de la truffe : la
conservation à 0°C dans la glace fondante (C0), l’atmosphère modifiée (AEO) bloquant la respiration de la
truffe ou le Smartfresh® (SF, 1-MCP) agissant sur la maturation, tous induisent une accélération du
vieillissement aromatique des truffes. Les procédés utilisant la congélation (C-40 et CR-20), eux, modifient
profondément le profil aromatique de la truffe en augmentant la présence d’aldéhydes.
Figure 2 : Cartographie des observations (A) et cercle des corrélations (B) issus de l’analyse en composantes
principales obtenue des aires de pics FID des composés odorants pour chaque condition de conservation.
Conclusion
Aucun des procédés testés ne semble permettre de préserver de manière intacte l'odeur de la truffe
fraîchement récoltée. Après 2 semaines de conservation, le procédé Smartfresh® (1-MCP) semble être
celui qui dégrade le moins le profil odorant de la truffe, cependant, il n'empêche pas son évolution, et
les produits obtenus devront être soumis à l’évaluation sensorielle des consommateurs.
Références bibliographiques
Campo, E.; Marco, P.; Oria, R.; Blanco, D.; Venturini, M.E. What Is the Best Method for Preserving the Genuine
Black Truffle (Tuber Melanosporum) Aroma? An Olfactometric and Sensory Approach. LWT 2017, 80, 84–91.
Culleré, L.; Ferreira, V.; Venturini, M.E.; Marco, P.; Blanco, D. Chemical and Sensory Effects of the Freezing
Process on the Aroma Profile of Black Truffles (Tuber Melanosporum). Food Chemistry 2013, 136, 518–525.
Les auteurs remercient O. Bigaud (Trésors de la te rre, Bordeaux, France) p our l’approvisionnement en t ruffes ainsi que les juges pour leur
implication dans les analyses olfact ométriques.