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Cette étude a été réalisée grâce à un partenariat entre l'Université de Sherbrooke, la
Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada et l'Association du
Barreau canadien ainsi qu'avec la mobilisation des barreaux du Canada et de la
Chambre des notaires du Québec. La Fédération des ordres professionnels de
juristes du Canada ainsi que l'Association du Barreau canadien ont financé la
première phase de ce projet.
Tous droits réservés
ISBN – 978-2-9818271-7-3
L'information contenue dans ce sommaire exécutif est entièrement tirée du rapport de recherche intitulé « Pour une
pratique du droit saine et durable au Canada. Étude nationale sur les déterminants de la santé et du mieux-être des
professionnels du droit au Canada, Phase I (2020-2022). »
Toutes informations tirées de ce document peuvent être utilisées sans versement de droits d’auteurs mais doivent
être citées de la manière suivante :
Cadieux, N., Gingues, M., Cadieux, J., Gouin, M.-M., Caya, O., Fournier, P.-L., Morin, E., Pomerleau, M.-L., Camille,
A. B., Gahunzire, J. (2022). Sommaire exécutif : Vers une pratique saine et durable du droit au Canada. Étude
nationale des déterminants de la santé et du mieux-être des professionnels du droit au Canada, Phase I (2020-2022).
Université de Sherbrooke, École de gestion. 22 pages.
1
Prof. Nathalie Cadieux, Ph.D., CRHA
Professeure Agrégée et Chercheuse Principale
École de gestion, Université de Sherbrooke
INTRODUCTION
Ces dernières décennies, nombre d’études réalisées à travers le monde ont mis en
évidence des problématiques de santé et de mieux-être importants au sein de la
communauté juridique canadienne. Pour comprendre, il faut soupeser l’ampleur des défis
qui teintent la pratique du droit : demandes émotionnelles soutenues, surcharge de travail,
longues heures travaillées, cibles d’heures facturables à atteindre, insécurité d’emploi, etc.
La liste des contraintes est longue, si longue que les ressources semblent n’avoir qu’un
impact limité. Pour tous les milieux, le premier pas vers une amélioration est la mesure.
Sans une mesure rigoureuse des enjeux de santé, ainsi que des facteurs de stress à l'origine
de ces problèmes, il n’est pas possible de prendre des mesures durables afin de soutenir
la santé des professionnels du droit.
Mon équipe de recherche a travaillé en partenariat avec la Fédération des ordres
professionnels du juristes du Canada et l’Association du Barreau canadien sur un projet
visant à évaluer la santé mentale des professionnels juridiques. Trois objectifs étaient
visés: 1) brosser un portrait des enjeux de santé et de mieux-être dans la communauté
juridique canadienne; 2) cerner les principaux facteurs de risque et de protection qui
contribuent aux enjeux de santé psychologique des professionnels du droit; 3)
développer des recommandations spécifiques à la pratique du droit au Canada afin
d’améliorer la santé des professionnels en alignement avec la mission des barreaux qui est
de protéger le public.
Ainsi, ce sommaire exécutif présente les principaux constats et les dix recommandations
clé ayant émergé de la première phase du projet qui s’est déroulée entre les années 2021
et 2022. Les résultats présentés reposent sur les réponses d’un échantillon global de plus
de 7 300 professionnels du droit œuvrant dans toutes les provinces et tous les territoires
canadiens. Cet échantillon a également été pondéré afin de prendre en considération la
représentation selon le sexe et le barreau d’appartenance afin de brosser un portrait le
plus fidèle et représentatif de la pratique du droit au Canada. L’ensemble des résultats a
fait l’objet d’analyses statistiques sérieuses, encadrées par un protocole méthodologique
et éthique des plus rigoureux.
Le sommaire exécutif est divisé en quatre parties. La première traite des constats
concernant les principaux indicateurs de santé mentale dans la profession juridique. La
deuxième partie révèle les facteurs explicatifs à l’origine de ces enjeux de santé mentale.
Basé sur une perspective multidimensionnelle de la santé et du bien-être au
travail, ces facteurs émergent du contexte social, du contexte de pratique et du
contexte individuel dans lesquels les professionnels évoluent. Finalement, la
quatrième partie montre dix recommandations majeures pour assurer une pratique saine
et durable du droit.
Nous espérons que vous apprécierez et bénéficierez de ce travail. Nous souhaitons qu'il
contribue à améliorer la vie des professionnels canadiens, car le travail, c'est la santé!
2
PARTIE I
CONSTATS GÉNÉRAUX SUR
PLUSIEURS INDICATEURS DE SANTÉ
ET DE MIEUX-ÊTRE CHEZ LES
PROFESSIONNELS DU DROIT AU
CANADA
3
Détresse psychologique
3
Proportion des niveaux de détresse psychologique des
professionnels du droit (n = 6 900)
Groupes avec les proportions de
détresse psychologique les plus
élevées
•Femmes professionnelles du droit
(63,7%)
•Professionnels juridiques pratiquant
dans les secteurs public ou OBNL
(58,0 %) et issus de la pratique privée
(58,4 %)
•Professionnels juridiques âgés entre
26et 35 ans (71,1 %)
•Professionnels juridiques ayant moins de
10 ans d’expérience (70,8 %)
•Stagiaires (72,0 %; non pondéré),
parajuristes de l’Ontario (65,9 %) et
notaires du Québec (65,9 %)
•Professionnels juridiques vivant avec un
handicap (74,3 %)
•Professionnels juridiques s’identifiant
comme membres de la communauté
LGBTQ2S+ (69,3 %)
•Professionnels juridiques pratiquant au
Nunavut (76,4%)
Proportion de détresse psychologique par province et
territoire
Proportion de détresse psychologique
observée chez les professionnels du droit
(n = 6 626)
≥ 40 % ≥ 50 % ≥ 60 % ≥ 70 %
Pas de détresse
psychologique
40,6 % Détresse
psychologique
59,4 %
Détresse psychologique : n.f. réfère à un état subjectif désagréable regroupant un ensemble
de symptômes physiques, psychologiques et comportementaux, lesquels ne réfèrent pas
à une pathologie spécifique (donc pas à la maladie), mais qui regroupent des symptômes
s’apparentant tantôt à la dépression, tantôt à l’épuisement tels la fatigue, l’irritabilité, des
problèmes de concentration, l’anxiété, l’insomnie.
Symptômes dépressifs et anxieux chez les professionnels juridiques canadiens
4
Définitions : la dépression et l’anxiété sont des troubles de santé mentale (communs ou
transitoires) inclus dans le DSM-V et susceptibles de faire l’objet d’un diagnostic. La sévérité
des symptômes qui y sont associés varie (de léger à sévère).
• Anxiété : n.f. réfère à un trouble caractérisé par un sentiment excessif et incontrôlable d’inquiétude
et de peur à propos de certains sujets (Anxiety & Depression Association of America, 2021).
• Dépression : n.f. réfère à un désordre de l’humeur caractérisé par un sentiment de tristesse, de
perte d’intérêt ou de plaisir, des sentiments de culpabilité ou de dévalorisation de soi, un sommeil
ou un appétit perturbé, de la fatigue et des problèmes de concentration. Dans sa forme la plus
sévère, la dépression peut mener au suicide (Beck & Alford, 2009).
1) Groupes avec les proportions de
symptômes dépressifs ET anxieux les
plus élevées (symptômes dépressifs;
symptômes anxieux) :
• Professionnels juridiques vivant avec un handicap
(50,1 %; 49,6 %)
• Stagiaires (43,6 %; 49,8 % - non pondéré)
• Parajuriste de l’Ontario (43,3 %; 42,1 %)
• Professionnels juridiques s’identifiant comme
étant membres de la communauté LGBTQ2S+
(37,0 %; 45,4 %)
2) Groupes avec les proportions de
symptômes dépressifs les plus élevées :
• Professionnels juridiques ayant moins de 10 ans
d’expérience (36,4 %)
• Professionnels juridiques âgés de moins de 40 ans
(34,4 %)
• Professionnels juridiques autochtones (33,3 %)
• Professionnels juridiques œuvrant dans le secteur
de l’éducation (31,4 %)
3) Groupes avec les proportions de
symptômes anxieux les plus élevées :
• Professionnels juridiques âgés de 35 ans et moins
(52,1 %)
• Professionnels juridiques ayant moins de 15 ans
d’expérience (45,2 %)
• Femmes professionnelles juridiques (42,6 %)
• Professionnels juridiques issus de la pratique
privée (36,8 %)
Niveau des symptômes dépressifs chez les
professionnels juridiques (n=6 785)
Proportion de professionnels juridiques ayant des
symptômes dépressifs modérés à sévères (n=6 785)
Proportion d’anxiété chez les professionnels
juridiques participants (n = 6 719)
Idées suicidaires
5
MISE EN GARDE : la section qui suit contient des informations sur le suicide qui
peuvent être difficiles à lire et avoir un effet déclencheur chez certaines personnes.
Si vous en ressentez le besoin, veuillez contacter le Services de crises du Canada.
https://parlonssuicide.ca/ | 1-833-456-4566 | Texte 45645
Pensées suicidaires : n.f. « réfèrent aux pensées (cognitions) ou à l’intention de
s’enlever la vie. Les recherches indiquent que ce sont les idéations « sérieuses » qui
sont davantage associées au risque de tentative de suicide et de suicide » (Laforest et
al., 2018, p. 318).
Proportion des juristes participants ayant eu des
idées suicidaires depuis le début de leur pratique
professionnelle (n = 5 836)
Facteurs non exhaustifs qui peuvent augmenter le risque de
suicide
Source : https://www.quebec.ca/sante/conseils-et-prevention/sante-mentale/
prevenir-le-suicide
Groupes avec les proportions les plus élevées quant au fait d’avoir eu des
idées suicidaires :
• Professionnels du droit pratiquant dans les territoires
(29,7 %)
• Avocats (24,4 %)
• Professionnels du droit pratiquant dans le secteur public ou OBNL (27,2%)
• Professionnels du droit s’identifiant comme non-binaires (61,9 %)
Épuisement professionnel
6
Proportion d'épuisement professionnel
chez les juristes canadiens (n = 5 975)
Proportion d'épuisement professionnel selon la
profession (n = 5 939)
Proportion de l’intensité des symptômes d'épuisement
professionnel observée chez les juristes canadiens
(n = 5 570)
Groupes avec les proportions
d’épuisement professionnel
les plus élevées
• Professionnels du droit âgés de 31 à
35 ans (67,0 %)
• Femmes professionnelles de moins de
40 ans (67,4 %)
• Professionnels du droit pratiquant au
Nunavut (81,2 %)
• Professionnels du droit vivant avec un
handicap (69,8 %)
• Professionnels du droit s’identifiant
comme membres de la communauté
LGBTQ2S+ (62,7 %)
Épuisement professionnel : n.m. réfère au « degré de fatigue et d’épuisement ressenti
en lien avec son travail » [Traduction libre] (Kristensen, 2005, p. 197).
Barrières associées à l'utilisation des programmes d'aide
7
Proportion aux réponses de la question : « Avez-vous déjà ressenti le besoin de demander une aide
professionnelle en raison de problèmes de santé psychologique, mais vous ne l’avez pas fait? »
(n = 6 710)
7
•44,9 % des professionnels ont rapporté être allés chercher de l’aide afin de faire face au stress ressenti dans leur
pratique professionnelle.
•66,8 % des professionnels ayant eu des pensées suicidaires depuis le début de leur pratique ont rapporté ne pas
être allés chercher de l’aide alors qu’ils en ressentaient le besoin.
•26,4 % juristes ont rapporté avoir déjà eu recours à un programme d’aide pour faire face au stress dans le cadre de
leur pratique.
•40,5 % des juristes ont rapporté ne pas avoir confiance de recourir au programme d’aide offert par leur organisation
s’ils en éprouvaient le besoin.
•36,5 % des professionnels ont rapporté ne pas avoir confiance de recourir aux programmes d’aide de leur barreau.
Proportion des raisons évoquées par les juristes
participants pour ne pas être allés chercher de l’aide en
matière de santé psychologique (n = 3 139)
Proportion des raisons pour ne pas avoir recours au
programme d’aide associé à son ordre professionnel chez les
juristes qui ont mentionné ne pas être confiants d’avoir
recours à ce programme (n = 2 289)
61
8
PARTIES II & III
LE MIEUX-ÊTRE EN DROIT :
FACTEURS EXPLICATIFS
9
La santé mentale d’un professionnel ne peut être considérée en vase clos; elle est
influencée par une multitude de facteurs interconnectés desquels elle est indissociable. À
première vue, il peut sembler facile de pointer du doigt des facteurs spécifiques de
l'environnement de travail qui provoquent un déséquilibre entre les contraintes et les
ressources. Toutefois, le développement de problèmes de santé mentale est le plus
souvent attribuable à une combinaison de facteurs. Ces facteurs émergent des différentes
sphères de la vie d'une personne (Beauregard et al., 2011 ; Cadieux et al., 2019 ; Cadieux
& Marchand, 2014 ; Marchand, 2004). Les résultats révèlent que la plupart des problèmes
vécus par les professionnels du droit, et les symptômes de ces problèmes, proviennent de
trois principales causes primaires : les contextes sociaux, les contextes de pratique et les
contextes individuels.
STRESSEURS ISSUS DES CONTEXTES SOCIAUX
Les contextes sociaux existent en dépit du secteur de pratique ou du champ de pratique du
professionnel. Dans le cadre de cette étude, les stresseurs issus des contextes sociaux sont:
•Violence et incivilité au sein de la pratique professionnelle;
•Niveaux d’engagement envers la profession et d’intention de quitter la profession;
•Stigmatisation liée aux enjeux de santé mentale;
•Encadrement réglementaire lié à l’exercice d’une profession réglementée.
Violence et incivilité
•58,7 % des participants ont rapporté avoir été exposés parfois, souvent ou très
souvent à de l’incivilité au cours des cinq dernières années.
•30,1 % des juristes vivant avec un handicap ont rapporté avoir vécu de l’intimidation
au travail au cours des 12 mois précédant le moment où ils ont répondu au sondage.
•9,8 % des parajuristes de l’Ontario ont rapporté avoir été confrontés à des menaces
de violence allant de quelques fois à tous les jours dans les 12 mois précédant le
moment où ils ont répondu au sondage.
•Dans 72,2 % des cas, les actes incivils et/ou violents provenaient directement de la
communauté juridique, soit des collègues, des supérieurs ou des juges.
•Le fait de vivre de l’incivilité serait associé de manière significative à une
augmentation de la détresse psychologique, des symptômes dépressifs, de l’anxiété
et du stress perçu.
10
Niveaux d’engagement et intention de quitter la profession
•54,2 % des répondants ont rapporté considérer qu’ils pourraient cesser l’exercice
du droit pour accepter un autre emploi au même niveau de rémunération.
•Seulement 42,4 % des participants ont rapporté se réjouir de commencer une
journée de travail.
•28,6 % des juristes ont rapporté rêver fréquemment d’exercer une autre profession.
•29,9 % des juristes de moins de 10 ans d’expérience ont rapporté regretter d’avoir
choisi leur profession.
•27,0 % des juristes de moins de 10 ans d’expérience ont rapporté ne pas aimer être
notaire/avocat/parajuriste.
Stigmatisation associée aux enjeux de santé mentale
•19,0 % des répondants seraient plutôt à fortement d’accord avec l’affirmation selon
laquelle les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ne sont pas
aussi aptes à travailler dans le domaine juridique que celles qui n’en souffrent pas.
•43,3 % des juristes ayant un problème de santé mentale éprouveraient un sentiment
d’aliénation par rapport à leurs enjeux de santé mentale.
•52,8 % des professionnels du droit étant ou ayant déjà été aux prises avec des
enjeux de santé mentale se sentiraient inférieurs à leurs collègues qui n’en ont pas.
•17,3 % des juristes étant ou ayant déjà été aux prises avec un enjeu de santé
mentale ont rapporté percevoir des actions discriminatoires à leur encontre par
leurs collègues, supérieurs et/ou d’autres membres de la communauté juridique en
raison de leur problème de santé mentale.
Encadrement réglementaire lié à la pratique du droit
•60,9 % des professionnels juridiques ont rapporté vivre du stress par rapport à la
possibilité de commettre une erreur professionnelle pouvant conduire à préjudice
pour le client. Cette proportion serait plus élevée chez les juristes en début de
carrière, soit 76,5 % chez les 0-3 ans ou 74,9 % chez les 0-6 ans.
•75 % des notaires du Québec ont rapporté être stressés par rapport à l’imputabilité
associée à leur titre.
11
•65,3 % des professionnels du droit ont rapporté trouver difficile de maintenir leurs
connaissances à jour en raison du volume important de travail quotidien qu’ils ont à
accomplir.
•En moyenne, 56,2 % des participants ont rapporté être stressés par le fait de devoir
exposer ouvertement leur pratique professionnelle devant un inspecteur(trice)
mandaté(e).
•Au Québec, 88,6 % des avocats et 82,4 % des notaires du Québec ont rapporté avoir
peur que leur inspection professionnelle conduise à une plainte contre eux.
•60,6 % des notaires québécois qui ont vécu une inspection professionnelle ont
rapporté s’être sentis en confiance lors de cette l’inspection. Cette proportion
s’élevait à 75,7 % chez les avocats québécois.
STRESSEURS ISSUS DES CONTEXTES DE PRATIQUE
Les contextes de pratique façonnent la vie quotidienne des praticiens du droit. Dans le
cadre de cette étude, les stresseurs issus des contextes de pratique sont :
•Facteurs de risque organisationnels spécifiques à la pratique du droit;
•Modèle d’affaires des heures facturables;
•Adaptation au télétravail;
•Technostress.
Facteurs de risque organisationnels
•Tous les facteurs de risque (p. ex., demandes émotionnelles, surcharge quantitative
et qualitative, insécurité d’emploi) avaient un poids prépondérant sur les indicateurs
de santé mentale par rapport aux ressources (p. ex., autonomie, soutien des
collègues, soutien du supérieur).
•Les facteurs de risque organisationnels (demandes émotionnelles, insécurité
d’emploi, heures travaillées, surcharge quantitative, surcharge qualitative, manque
de ressources) expliquaient 30,3 % du stress perçu, 29,7 % de la détresse
psychologique, 26,0 % des symptômes dépressifs et 47,3 % de l’épuisement
professionnel des juristes participants.
•En considérant simultanément l’effet de plusieurs facteurs, les demandes
émotionnelles, l’insécurité d’emploi et le nombre d’heures travaillées étaient les
facteurs ayant le plus d’impact délétère sur la santé des participants. Ces contraintes
s’associaient à des niveaux significativement plus élevés du stress ressenti, de la
détresse psychologique, des symptômes dépressifs et de l’épuisement
professionnel.
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•La fatigue de compassion s’associait à une augmentation du stress perçu, de la
détresse psychologique, de l’anxiété, des symptômes dépressifs et de l’épuisement
professionnel.
•56,2 % des participants ont rapporté vivre de l’épuisement de compassion, ce
pourcentage atteignait 66,5 % chez les 0-5 ans d’expérience et 61,8 % chez les
femmes.
•26,8 % des juristes ont rapporté éprouver du stress traumatique secondaire et 25,5
% d’entre eux ont rapporté être touchés par des symptômes modérés.
•Plus de 70 % des participants exerçant en droit criminel, en droit des enfants, en
droit de la famille ou en droit des aînés ont rapporté être exposés à des demandes
émotionnelles élevées.
•L’agilité interne et externe étaient respectivement associées à une diminution du
niveau de stress perçu par les individus et à des niveaux plus faibles du sentiment
de surcharge de travail et de l’intention de quitter la profession.
•Un professionnel juridique qui travaille dans un milieu où la gestion est plus agile
vivait en moyenne des symptômes d’épuisement professionnel plus faibles.
•Le manque de ressources et le manque de soutien du supérieur s’associaient
significativement à des niveaux plus faibles d’agilité interne et externe des
organisations.
Modèle d’affaires des heures facturables
•Les heures facturables ne représentaient en moyenne que 67,9 % des heures
réellement travaillées chez les juristes canadiens qui utilisent un tel système.
•Les professionnels qui ont des objectifs d’heures facturables à atteindre travaillaient
en moyenne 54 heures par semaine alors que les professionnels qui n’œuvrent pas
dans ce type de modèle d’affaires travaillaient, en moyenne, moins d’heures, soit
entre 47 et 48 heures hebdomadairement.
•78,4 % des professionnels ayant des cibles d’heures facturables de moins de 1 200
heures à atteindre ressentaient une pression en lien avec cette cible. Cette
proportion s’élevait à 85,8 % chez les juristes devant atteindre plus de 1 800 heures
facturables.
•70,7 % des répondants devant atteindre entre 1 200 et 1 800 heures facturables par
année ont rapporté craindre de fonder une famille et cette proportion atteignait
81,5 % chez les professionnels devant atteindre plus de 1 800 heures facturables.
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Suivant les analyses réalisées, voici une liste des principales conséquences chez les
professionnels qui avaient des objectifs d’heures facturables à atteindre :
•L’écart entre les heures facturables et les heures réellement travaillées conduisait
les juristes à prolonger leurs heures travaillées afin d’atteindre leurs objectifs,
mettant ainsi une pression accrue sur la conciliation travail-vie personnelle.
•La pression exercée par les objectifs à atteindre affectait la santé des professionnels
de manière directe en s’associant à une détresse psychologique, des symptômes
dépressifs et un épuisement plus élevés.
•L’effet de la pression ressentie face aux heures facturables, loin de s’atténuer avec
l’expérience, drainait graduellement les ressources des professionnels tout en
s’associant à une détresse psychologique, des symptômes dépressifs et un
sentiment d’épuisement plus importants.
•L’impact de la pression ressentie face aux heures facturables sur les symptômes
dépressifs était fortement accentué chez les professionnels exposés à des
demandes émotionnelles élevées.
•Plus les objectifs d’heures facturables augmentaient, plus l’incivilité vécue par les
professionnels du droit augmentait.
•Plus les objectifs d’heures facturables augmentaient, moins les professionnels
étaient engagés affectivement envers leur profession et plus ils avaient l’intention
de quitter celle-ci.
Adaptation au télétravail
•85,6 % des professionnels étaient en télétravail durant la pandémie de COVID-19 et
les notaires québécois sont ceux qui ont le moins fait de télétravail.
•Le niveau d’adaptation au télétravail des avocats était inférieur à celui des notaires
du Québec et des parajuristes de l’Ontario.
•Les femmes présentaient un niveau d’adaptation au télétravail significativement plus
élevé que les hommes. Au surplus, le télétravail s’associait à une réduction
significative de l’épuisement chez les femmes professionnelles.
•Les avocats du Barreau du Québec, de même que les notaires du Québec,
présentaient un niveau d’adaptation au télétravail supérieur à celui des juristes
appartenant à plusieurs autres barreaux canadiens (incluant les barreaux de la
Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario,
du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve-et-Labrador).
•Le soutien du supérieur immédiat, la reconnaissance au travail et le soutien fourni
par l’organisation pendant la pandémie de la COVID-19 étaient associés à une
meilleure capacité d’ajustement au télétravail.
•L’adaptation au télétravail était associée à :
14
1) une baisse du niveau de technostress ressenti par les professionnels;
2) une perception de surcharge et de pression au travail induite par les
technologies plus faible;
3) une diminution du sentiment que les technologies ajoutent un fardeau
communicationnel;
4) un conflit travail-vie personnelle plus faible.
Technostress
•Les technostresseurs les plus importants étaient :
ole sentiment de pression induit par les technologies de l’information et de la
communication (TIC);
ole sentiment de surcharge de communication;
ole sentiment de conflit travail-famille induit par les TIC.
•Parmi les technologies les plus fortement associées aux technostresseurs, les plus
récurrentes étaient les suivantes : les messages et SMS, les plateformes
collaboratives et les technologies mobiles.
•Le technostress touchait tous les professionnels, toutefois les professionnels âgés
de 36 à 45 ans semblaient particulièrement touchés par le stress qui découle de la
technologie (57,8%).
•Les indicateurs de santé les plus corrélés au technostress étaient l’anxiété (35,0 %),
la dépression (38,4 %) et l’épuisement professionnel (49,3 %).
STRESSEURS ISSUS DES CONTEXTES INDIVIDUELS
Les contextes individuels concernent les traits de caractère d'un individu et ce qui influence
son expérience professionnelle et sa pratique du droit. Dans le cadre de cette étude, les
stresseurs issus des contextes individuels sont :
•Discrimination et diversité;
•Compétences clés qui protègent le mieux-être;
•Habitudes de consommation;
•Conflit travail-vie personnelle;
•Absence prolongée pour cause de maladie et obstacles associés au retour au travail.
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Discrimination et diversité
Constats chez les juristes en début de carrière
•73,8 % des juristes ayant 3 ans ou moins d’expérience ont rapporté vivre de la
détresse psychologique.
•La proportion de participants rapportant des symptômes associés à la détresse
psychologique diminuait avec les années d’expérience.
•49,8 % des stagiaires ont rapporté avoir déjà eu un diagnostic de santé mentale
depuis le début de leur pratique
•11,4 % des stagiaires ont rapporté avoir reçu des avances sexuelles non sollicitées.
Constats au sein de la communauté autochtones
•70,3 % des juristes autochtones ayant participé ont rapporté vivre de la détresse
psychologique.
•41,2 % ont rapporté vivre des symptômes dépressifs modérés à sévères
•66,2 % des juristes autochtones ont rapporté vivre un sentiment d’épuisement
professionnel.
Constats chez les femmes
•63,9 % des femmes ont rapporté vivre de la détresse psychologique, 42,6 % ont
rapporté prouver des symptômes anxieux préoccupants, 31,5 % des symptômes
dépressifs modérés à sévères et 63,3 % ont rapporté vivre un sentiment
d’épuisement professionnel
•71,2 % des femmes ayant moins de 15 ans d’expérience ont rapporté vivre une
détresse importante à très importante.
Constats chez les professionnels ethnicisés
•66,6 % des juristes ethnicisés ont rapporté vivre de la détresse psychologique
comparativement à 55,5 % chez les juristes non ethnicisés.
•29,3 % des juristes ethnicisés ont rapporté vivre un niveau de détresse très
important.
•66,6 % des juristes ethnicisés ont rapporté vivre un niveau de détresse important.
•62,3 % des juristes ethnicisés ont rapporté vivre un sentiment d’épuisement
professionnel.
•37,7 % des personnes ethnicisées ont rapporté vivre symptômes dépressifs
modérés à sévères.
Constats au sein de la communauté LBGTQ2S+
•75,5 % des juristes appartenant à la communauté LGBTQ2S+ ont rapporté vivre de
la détresse psychologique.
•44,7 % ont rapporté avoir des symptômes dépressifs modérés à sévères.
16
•68,6 % des juristes appartenant à la communauté LGBTQ2S+ ont rapporté vivre de
l’épuisement professionnel.
•37,5 % ont rapporté avoir eu des idées suicidaires depuis le début de leur pratique
professionnelle.
•40,2 % des juristes LGBTQ2S+ ont mentionné que leurs collègues ne savaient pas
qu’ils s’identifiaient comme un membre de la communauté LBGTQ2S+.
Compétences clé qui protègent le mieux-être
•32,1 % des professionnels ont rapporté estimer avoir la capacité de mettre leurs
limites.
•Seulement 14,5 % des professionnels ont rapporté arriver à se détacher
psychologiquement du travail en dehors des heures de bureau.
•Les compétences qui protègent la santé mentale seraient sollicitées par une plus
grande proportion de professionnels ayant 10 ans et plus d’expérience et par les
hommes.
•La capacité à mettre ses limites et le détachement psychologique des professionnels
s’associaient significativement à une baisse de la détresse psychologique, des
symptômes dépressifs, de l’épuisement professionnel et du sentiment de conflit
travail-vie personnelle.
•La capacité à mettre ses limites s’associait à une hausse significative de
l’engagement affectif envers la profession et à une diminution significative de
l’intention de quitter la profession.
•En contexte de demandes émotionnelles élevées, les individus disposant d’une
meilleure capacité à mettre leurs limites présentaient moins de symptômes
dépressifs comparativement à ceux qui avaient du mal à mettre leurs limites.
•Le détachement psychologique s’associait à une meilleure adaptation au télétravail.
•Le détachement psychologique et la capacité à mettre ses limites s’associaient à une
diminution de consommation d’alcool.
Habitudes de consommation
Consommation d’alcool
•L’incapacité à arrêter de boire après avoir commencé apparaissait comme le
symptôme de dépendance le plus présent alors que près de 1 % ont rapporté vivre
cela chaque jour ou presque et 3,2 % ont rapporté avoir du mal à s’arrêter de boire
une fois par semaine.
•Au cours de l’année précédant l’enquête, 5,7 % des professionnels affirmaient qu’un
ami, un médecin ou un autre professionnel leur ont conseillé de diminuer leur
consommation d’alcool
17
•42,2 % des femmes et 36,5 % des hommes juristes canadiens ont rapporté avoir une
possible dépendance à l’alcool alors que cette proportion était de 39,5 % chez les
femmes et 33,7 % chez les hommes dans une étude américaine comparable.
•24,5 % des hommes ont rapporté avoir une consommation à risque élevé comparé
à 18,5 % chez les femmes.
•Entre cinq et dix ans d’expérience, la proportion d’hommes ayant une
consommation à risque passait de 27,4 % à 34,1 %.
•23,3 % des femmes et 30,0 % des hommes qui étaient en situation de stress perçu
élevé affichaient une consommation dangereuse ou nocive, voire un trouble de
dépendance.
Consommation de drogue
•22,7 % des participants ont rapporté avoir consommé des drogues pour un usage
autre que médical au cours des 12 derniers mois
•Le cannabis était la drogue la plus fréquemment utilisée par les professionnels qui
consomment des drogues pour des raisons non médicales et 19,6 % d’entre eux en
faisaient usage chaque semaine.
•85,4 % des professionnels canadiens avaient un risque faible quant à la
consommation de drogues comparé à 76 % chez les avocats américains.
•12,8 % des professionnels canadiens avaient un risque modéré comparé à 20,9 %
chez les avocats américains.
•40,97 % des professionnels ayant consommé des drogues à des fins non médicales
au cours des 12 derniers mois précédant la complétion du sondage présentaient
également une consommation à risque en matière d’alcool.
Conflit travail-vie personnelle
•49 % des professionnels ont rapporté vivre un conflit travail-vie personnelle. Par
genre, la répartition était la suivante à :
o53,9 % chez les femmes
o45,4 % chez les hommes
•44,3 % des femmes ont rapporté avoir des appréhensions face aux conséquences
de fonder une famille (p. ex., conflit travail-vie personnelle) et 33 % d’entre elles ont
rapporté avoir des appréhensions face aux conséquences sur leur carrière.
•La proportion de professionnels vivant un sentiment de conflit travail-vie personnelle
était similaire chez les professionnels ayant des enfants (48,3 %) par rapport à ceux
n’en ayant pas (49,5 %).
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•Le conflit travail-vie personnelle et la crainte de fonder une famille s’associaient à un
niveau d’engagement significativement plus faible envers la profession et à un
niveau significativement plus élevé de l’intention de quitter.
•Le conflit travail-vie personnelle s’associait à une augmentation de la détresse
psychologique, des symptômes dépressifs et de l’épuisement professionnel.
Absence prolongée pour cause de maladie et obstacles associés
au retour au travail
Absence prolongée pour cause de maladie :
•9,5 % des répondants ont rapporté avoir pris un congé maladie de plus de trois mois au
cours des cinq dernières années en raison d'une situation d'incapacité au travail.
oPour 27,6 % d’entre eux, la première absence de plus de trois mois a été suivie d’au
moins une autre absence.
oPour 66,7 % des répondants ayant pris plus de trois mois de congé de maladie dans les
cinq dernières années, le diagnostic à l’origine du congé était un problème de santé
mentale.
•Les participants ayant été en absence prolongée ont rapporté percevoir davantage une
stigmatisation de la part du milieu juridique que leurs collègues n’ayant pas été en
incapacité prolongée.
•Les professionnels s’étant absentés pour plus de trois mois ont eu significativement
plus recours à un programme d'aide aux employés (PAE) pour faire face à une
problématique de stress ou de mieux-être dans leur pratique que ceux n’ayant pas vécu
une telle absence.
•Respectivement 44,4 % et 39,4 % des répondants s’étant absentés au-delà de trois mois
ont mentionné qu’ils ne seraient pas à l’aise d’aller chercher de l’aide en cas de besoin
auprès du PAE organisationnel et du programme d’aide aux membres de son barreau.
Obstacles associés au retour au travail :
•Entre 77,6 % et 94,1 % des répondants ont rapporté que les difficultés cognitives
étaient les obstacles les plus prépondérants au retour au travail.
•84,3 % des répondants ont rapporté qu'ils percevaient que le fait de reprendre leur
travail « drainerait » de l’énergie, donc affecterait leur vie personnelle. La conciliation
travail-vie personnelle était d'ailleurs la deuxième catégorie d’obstacles la plus
importante au retour au travail. De manière complémentaire, 67,5 % des répondants
ont rapporté que les exigences du travail de manière simultanée avec celles émanant
de la famille étaient difficiles.
•80,0 % des répondants ont rapporté que leurs responsabilités professionnelles
habituelles pourraient causer une rechute.
•77,4 % des répondants ont rapporté percevoir qu’ils pourraient vivre une surcharge
dans les premiers jours de leur retour au travail.
•Les répondants craignent un changement d’attitude à leur égard (65,1 %), la réaction
de leurs collègues (65,1 %) ou les contacts avec ces derniers (63,9 %).
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PARTIE IV
RECOMMANDATIONS CIBLÉES :
VERS UNE PRATIQUE SAINE ET
DURABLE DU DROIT
TÉLÉCHARGER LE
RAPPORT COMPLET ICI
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À partir des principaux constats, l'équipe de recherche a identifié une cinquantaine de
recommandations regroupées en 10 recommandations clés pour traiter les conséquences qui
découlent des principales causes. Ces 10 recommandations clés sont les suivantes :
Améliorer la préparation des futurs professionnels et leur fournir un
soutien pour faire face aux enjeux de santé psychologique
Améliorer le soutien et l'encadrement disponibles à l'entrée dans la
profession
Améliorer la formation professionnelle continue (FPC)
Le cas échéant, évaluer la mise en œuvre de modèles alternatifs
d'organisation du travail qui limitent l'impact de certains facteurs de
risque sur la santé
Mettre en place des actions visant à déstigmatiser les enjeux de santé
mentale dans la profession
Améliorer l'accès aux ressources en matière de santé et de mieux-être et
éliminer les obstacles qui limitent l'accès à ces ressources
Promouvoir la diversité dans la profession et réviser les pratiques, les
politiques et les procédures qui peuvent comporter ou créer des biais
discriminatoires
Considérer la santé des professionnels comme une partie intégrante de
la pratique du droit et du système de justice
Développer une culture de la mesure
Favoriser un meilleur équilibre travail-vie personnelle dans la profession
juridique