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FERTILISATION
NON CONVENTIONELLE
DE L’OLIVIER
FERTIGATION
_____________________________________________
Dr. Chiraz MASMOUDI CHARFI* et Pr. Naïma KOLSI BENZINA**
*Maître de Conférences, Institut de l'Olivier, Tunisie
** Professeur de l’Enseignement Supérieur, Institut National Agronomique de Tunisie.
2020
4
Résumé
___________________________________________________________________________
La fertilisation est une composante essentielle dans la conduite d’une oliveraie.
Elle est destinée à restituer les éléments nutritifs prélevés par la culture au cours
de son cycle de développement pour assurer le renouvellement des pousses et la
production d’olives et d’huile. Chez l’olivier, les éléments N, P, K et B sont les plus
utilisés. Leur restitution se fait principalement par un apport au sol ou par
pulvérisation foliaire. Mais d’autres méthodes plus ciblées, sont de plus en plus
utilisées dans les plantations intensives d’oliviers comme la fertigation et
l’injection au tronc de certains éléments nécessaires au bon déroulement de la
culture, auxquelles l’agriculteur associe un épandage de broyat de bois de taille.
L’apport de certains additifs tels que les acides aminés et les hormones s’est
avéré efficace dans des situations diverses donnant une augmentation
substantielle de rendement. L’établissement d’un programme de fertilisation est
basé principalement sur l'objectif de production, c.-à-d. ciblant un rendement
bien déterminé. Mais le diagnostic foliaire reste de première importance afin de
corriger ce programme.
En Tunisie, si la technique de fertilisation classique semble de plus en plus être
supplantée par la fertigation et l’application foliaire d’engrais dans les
plantations intensives, ces dernières techniques ne sont pas encore maîtrisées
du fait de l’absence de normes propres à la Tunisie en adéquation avec le
potentiel de production des variétés utilisées et des conditions
environnementales. Les recherches actuelles ont permis de mettre en place pour
certains modes culturaux des guides et des normes pour les principales variétés
d’olivier. En intensif, la diversité des conduites, des variétés, des conditions de
culture rendent difficiles l’élaboration de calendriers de références.
Cet ouvrage est destiné à l’oléiculteur averti et au cadre technique concerné
par la culture intensive irriguée de l’olivier. Les outils nécessaires pour assurer
une gestion optimale de l’oliveraie y sont présentés. On y trouve, une revue
bibliographique, des résultats de recherches obtenus en Tunisie et autour du
bassin Méditerranéen relatifs aux méthodes conventionnelles et non
conventionnelles de fertilisation de l’oliveraie, des applications et des procédures
de calcul des paramètres de la fertigation qui font l’originalité de ce document et
à partir desquelles l’utilisateur peut s’inspirer pour l’établissement d’un
programme de fertigation propre à sa plantation.
Mots cles : olea europea, éléments nutritifs, exportations, programme de fertilisation,
fertigation.
5
Abstract
___________________________________________________________________________
Fertilization is an essential component in the management of an olive grove. It
is intended to restore the nutrients taken up by the crop during its development
cycle to ensure the renewal of shoots and the production of olives and oil. In the
olive tree, the elements N, P, K and B are the most used. Their restitution is
mainly carried out by applying them to the soil or by foliar spraying. Other more
targeted methods are increasingly being used in intensive olive tree plantations,
such as fertigation and the injection into the trunk of certain elements necessary
for the good progress of the crop, to which the farmer associates a spreading of
ground material of pruned wood. Additive elements such as amino acids and
hormones have proven to be effective in various situations giving a substantial
increase in yields. The establishment of a fertilization program is based primarily
on the production objective, i.e. targeting a specific yield. However, foliar
diagnosis remains of primary importance in order to correct this program.
In Tunisia, fertigation and foliar application of fertilizers in intensive
plantations are not yet under control due to the absence of specific Tunisian
standards in line with the production potential of the varieties used and
environmental conditions. Current research has made it possible to set up guides
and standards for certain farming methods for the main olive varieties. In
intensive olive plantations, the diversity of behavior, varieties and growing
conditions makes it more difficult to draw up reference calendars.
This work is intended for the experienced olive grower and the technical staff
concerned with the intensive irrigated olive tree cultivation. The tools needed to
ensure optimal management of the olive grove are presented. It includes a
bibliographical review, research results obtained in Tunisia and around the
Mediterranean basin relative to conventional and non-conventional methods of
fertilization, applications and procedures for calculating fertigation parameters
that make this document original and from which the user can draw inspiration
for the establishment of a fertigation program specific to his plantation.
Key words: olea europea, nutrients, removals, fertilization, fertigation program.
6
Sommaire
Page
Résumé
4
Abstract
5
Liste des tableaux
7
Liste des photos
8
Liste des figures
9
Introduction
10
Chapitre 1. Généralités
12
1. Principes de base de la fertilisation / fertigation
12
2. Rôles des éléments nutritifs
12
3. Besoins de l’olivier en éléments nutritifs, absorption et mode de transfert,
symptômes de déficience et d’excès
15
4. Facteurs de variation des éléments minéraux chez l’olivier
22
5. Normes
24
6. Exportations des éléments minéraux
26
Chapitre 2. La fertigation
31
1. Définition
31
2. Avantages et limites de la fertigation
31
3. Schéma général d’un système d’irrigation fertilisante
32
4. Les engrais utilisés en fertigation
38
5. Efficience d’utilisation des engrais
42
6. Elaboration d’un programme de fertigation
43
7. Préparation de la solution nutritive (solution mère, solution fertilisante)
43
8. Pilotage de la fertigation
45
9. Unités et conversions
46
10. Précautions à prendre
46
11. Entretien du réseau
47
Chapitre 3. La fertilisation foliaire
48
1. Introduction
48
2. Engrais azotés utilisés en application foliaire
48
3. Facteurs affectant l’absorption foliaire des engrais
49
Chapitre 4. Valorisation des margines comme fertilisant naturel au sol
50
Chapitre 5. Injection des fertilisants au tronc
54
1. Principe
54
2. Méthodes d’injection
54
3. Avantages et limites
55
4. Objectifs
56
5. Mode opératoire
56
Chapitre 6. Programmes intégrés de fertilisation /fertigation
57
1. Facteurs d’ajustement du plan de fumure
57
2. Base d’un programme de fertilisation intégrée
58
3. Les différentes pratiques de la fertilisation / fertigation
59
4. Exemples de programmes de fertigation appliqués à des oliveraies intensives
Exemple 1: Fertilisation de fond en pré-plantation d’une oliveraie à conduire sous
irrigation fertilisante
Exemple 2 : Programmes de fertigation pour de jeunes oliviers
Exemple 3: Pour des oliviers en production, irrigués et alternants
65-68
7
Exemple 4: Fertigation d’une oliveraie à huile intensive
Exemple 5 : Fertigation d’une oliveraie sans fumure de fond préalable
Exemple 6. Fertigation d’une oliveraie adulte à haut rendement en fonction des stades
phénologiques.
Exemple 7 : Programme de ferti-irrigation d’une parcelle d’olivier selon l’âge et la
période de l’année
5. Exemples en ligne de programme de fertigation
69
6. Nutrition au sol par des engrais à libération contrôlée
72
Chapitre 7. Travaux de recherches menés en Tunisie et autour de la Méditerranée
73
Chapitre 8. Recommandations
80
Chapitre 9. Etapes à suivre pour la fertilisation intégrée de l’oliveraie
82
Chapitre 10 : Applications
83
Conclusion
88
Références Bibliographiques
89
Liste des tableaux
Page
Tableau 1. Rôles des éléments minéraux majeurs, mineurs et oligo-éléments.
12
Tableau 2. Besoin de l’olivier en éléments nutritifs, absorption et transfert, symptômes de
déficience et d’excès pour N, P, K et Ca.
16
Tableau 3. Variation des teneurs en N, P, K, Mg, B et Fe au niveau des feuilles chez les
variétés ‘Chondrolia Chalkidikis’ et ‘Amphissis’ en fonction du stade phénologique, 30–60-
90-120 jours après la pleine floraison.
22
Tableau 4. Concentrations en N, P et K (%) chez l’olivier en pleine production en fonction
de la nature du matériel végétal. Les ratios N:P:K sont rapportés pour chaque organe.
24
Tableau 5. Guide des teneurs du sol en Phosphore (P2O5).
25
Tableau 6. Guide des teneurs optimales du sol (ppm) en potassium (K), magnésium (Mg)
et calcium (Ca) en fonction de sa texture.
25
Tableau 7. Teneurs critiques du sol en micro-éléments extractibles (ppm).
25
Tableau 8. Degrés de limitation du sodium, chlore et bore
25
Tableau 9. Teneurs minimales, optimales et toxiques des éléments nutritifs au niveau des
feuilles d’olivier (%MS ou ppm) analysées au mois de Juillet.
26
Tableau 10. Exportations de N, P2O5 et K2O (g/année/arbre) chez l’olivier dans les
principaux pays producteurs (g /arbre/année).
27
Tableau 11. Quantités de N, P, K et Ca (kg) nécessaires chaque année par une oliveraie
pour la production de 100 kg de fruits, 50 kg de feuilles et 50 kg de bois.
27
Tableau 12. Nutriments (kg/ha) prélevés par la culture de l’olivier (pour une production de
5 tonnes d’olives /ha) et disponibles à partir des antécédents culturaux.
27
Tableau 13. Exportations de N, P et K (masse de l’élément en masse de fruit, %) au cours
des stades de nouaison, durcissement du noyau et de maturation des olives.
29
Tableau 14. Exportation des macroéléments (kg/ha) selon le niveau de production.
Cas des oliveraies en Tunisie.
29
Tableau 15. Exportations de N, P, K et Mg (t/ha) en fonction du niveau de production.
29
Tableau 16. Variation des niveaux d’exportation des éléments majeurs (kg/ha) en fonction
de la densité de plantation.
29
Tableau 17. Principaux engrais utilisés en fertigation, leurs formules chimiques, leur
composition en éléments minéraux (en % du poids) et leur effet sur le PH du sol.
40
Tableau 18. pH préférentiels pour l’assimilation des éléments nutritifs chez l’olivier.
42
Tableau 19. Correspondance des unités.
46
Tableau 20. Table de conversion des éléments minéraux, de la forme élémentaire à la
forme oxydée (gauche) et inversement (droite).
46
8
Tableau 21. Engrais azotés utilisés en application foliaire.
48
Tableau 22. Ajustement du plan de fumure en fonction du problème posé.
57
Tableau 23. Composition et solubilité de quelques engrais utilisés en irrigation fertilisante
(en % du poids).
60
Tableau 24. Quels modes de fertilisation peut-on adopter pour la correction des états de
déficience et de toxicité chez l’olivier ?
62
Tableau 25. Quantité de potasse nécessaire (kg K2O/ha) pour la correction du sol en
relation avec sa texture et le niveau de sa richesse.
64
Tableau 26. Quantités d’engrais recommandées pour des oliviers adultes plantés à 500
pieds/ha et conduits sous fertigation.
65
Tableau 27. Quantités et taux d’azote recommandés pour de jeunes oliviers.
65
Tableau 28. Besoins en N et K et quantités d’engrais appliquées pour des oliviers jeunes
(kg/ha).
66
Tableau 29. Programme de fertigation sous des conditions Méditerranéennes de culture
pour une oliveraie à huile de 500 arbres/ha ayant un rendement de 30T/ha. Apports
exprimés en kg/ha.
66
Tableau 30. Quantités d’engrais recommandées par saison pour des oliviers jeunes.
67
Tableau 31. Programme de fertigation de l’olivier intensif hautement productif selon la
saison.
67
Tableau 32. Programme mensuel de fertigation sous des conditions de culture
Méditerranéennes d’une oliveraie intensive conduite en fertigation. Apports exprimés en
kg/ha.
67
Tableau 33. Programme de ferti-irrigation d’une parcelle d’olivier selon l’âge et la période
de l’année. Apports exprimés en g/arbre.
68
Tableau 34. Paramètres de production obtenus chez l’olivier Arbéquina amendé en
potasse (0 K Témoin sans apport de ‘solupotasse’, 100 Ksol apport de 100% des besoins en
application au sol, 100 Kfoliaire : apport de 100% des besoins en pulvérisation foliaire).
74
Tableau 35. Effet de la fertilisation azotée sur le rendement et la taille des fruits en année
de forte charge en olives, cv. Mission, (Palermo, Italie).
74
Tableau 36. Effet des différents traitements potassiques sur les caractéristiques
pomologiques.
79
Liste des photos
Page
Photo 1. Déficience en azote (COI, 2007).
17
Photo 2. Déficience en potassium (Fergusson et al., 1999).
17
Photo 3. Déficience en phosphore (chlorose étendue) (Haifa, 2016).
17
Photo 4. Déficience en calcium (nervure blanchâtre) (Haifa, 2016).
17
Photo 5. Déficience en bore sur fruits ‘Monkey face’ et feuilles.
19
Photo 6. Déficience en zinc (Haifa, 2016).
19
Photo 7. Déficience en fer (COI, 2007).
21
Photo 8. L’urée.
30
Photo 9. Matériel d’injection des engrais (Phocaides, 2008).
34
Photo 10. Pulvérisation d’engrais foliaires sur olivier.
49
Photo 11. Epandage de margines fraîches au moyen du tracteur muni d’une citerne vide
fosse actionnée par la prise de force de celui-ci (Ben Rouina et al., 2015).
51
Photo 12. Déversement contrôlé des margines dans des espaces de stockage réservés où
elles se dessèchent naturellement. A gauche, bassin en terre filtrante pour la collecte des
margines dans la région de Sfax qui produit en moyenne 350.000 tonnes de margines/an.
A droite : bassins couverts d’une membrane géotherme isolante, de faibles capacités (400
m3) qui servent de station de relai pour l’approvisionnement des tracteurs d’épandage
52
9
(Ben Rouina et al., 2015).
Photo 13. Photo illustrant l’amélioration de la biodiversité naturelle dans les oliveraies en
milieu aride tunisien à faibles précipitations (< 250 mm de pluie par an) (Ben Rouina et al.,
2015).
52
Photo 14. Epandage de margines fraîches (Ben Rouina et al., 2015)
53
Photo 15. Injection des fertilisants (fer) dans les troncs de palmiers (Saleh, 2016).
56
Photo 16. Deux modalités d’apport du potassium chez l’olivier de table : Pulvérisation
foliaire et application au sol sous goutteur.
64
Liste des figures
Page
Figure 1. Symptômes de carence en éléments nutritifs (COI, 1997).
21
Figure 2. Variation saisonnière de la teneur des feuilles d’olivier cvs. ‘Amphissis’ et
‘Chondrolia Chalkidikis’ en bore durant deux campagnes successives (Chatzissavvidis et al.,
2004 ; Haifa, 2016).
23
Figure 3. Evolution de la teneur des feuilles d’olivier en azote (%MS) selon leur âge au
cours d’un cycle de croissance. Par ordre d’apparition dans la figure : Quiescence, pousse
en croissance, floraison, sclérification de l’endocarpe, feuille d’un an, feuille de 2 ans,
feuille de trois ans et stade de maturation (Braham, 1999).
23
Figure 4. Evolution saisonnière des besoins en N, P, K (Kg/arbre) chez l’olivier au cours
d’un cycle de croissance (Haifa, 2016).
28
Figure 5. Evolution saisonnière des besoins en éléments nutritifs dans les différents
organes de l’olivier (Haifa, 2016).
28
Figure 6. Besoins de l’olivier en éléments nutritifs : N, P2O5, K2O et Mg en fonction de
l’écartement entre les arbres et de la nature de la fertilisation (minérale ou organique).
30
Figure 7. Représentation schématique d’un réseau d’irrigation localisée (Phocaides, 2008)
33
Figure 8. Représentation schématique d’un réseau d’irrigation localisée montrant
l’installation du système d’injection des engrais (Phocaides, 2008).
34
Figure 9. Détermination de l’uniformité de distribution de l’eau fertilisée (Zayani, 1996 ;
CEMAGREF, 1990).
36
Figure 10. Choix de l’engrais en fonction du stade phénologique.
39
Figure 11. Schéma des besoins en nutriments des feuilles d’olivier (courbe grise), des
fleurs (courbe blanche) et des fruits (courbe noire) (Haifa, 2016).
58
10
Introduction
-----------------------------------------------------
L’expansion rapide de la culture irriguée de l’olivier a montré le besoin d’intégrer les études
relatives aux aspects physiologiques, agronomiques…à celles qui concernent les outils de production,
notamment la fertilisation et l’irrigation. Celles-ci constituent la base du modèle réussi de toute
plantation oléicole. Pour l’olivier, l’azote, le phosphore, le potassium et le bore sont les éléments
nutritifs les plus importants pour sa nutrition minérale.
La fertilisation est destinée à restituer les nutriments prélevés par la culture pour assurer le
renouvellement des pousses et la production d’olives et d’huile. Ces prélèvements dépendent de
nombreux paramètres qui sont liés à la plante et au sol (Fernández-Escobar et al., 1999 ; Xiloyannis
et al., 2002 ; Chatzissavvidis et Therios, 2003 ; Gargouri et Mhiri, 2003 ; Chatzissavvidis et al., 2004 ;
Barranco et al., 2010 ; Gargouri et al., 2012). Les éléments N, P, K et B sont impliqués dans différents
processus métaboliques et physiologiques. Une fois absorbés, ils doivent se mettre en équilibre les
uns avec les autres (Xiloyannis et al., 2002).
Les diagnostics effectués durant ces dernières années dans les plantations intensives en Tunisie et
dans le monde ont révélé une utilisation abusive des engrais qui a conduit à une augmentation des
coûts de production et à la pollution des terres (Fernández-Escobar et al., 2006 ; Cameira et al.,
2014 ; Albornoz ; 2016). Une étude récente a montré que seulement 20% des engrais apportés sont
effectivement utilisés ; le reste est perdu par lessivage. Par ailleurs, il a été remarqué que la
fertilisation est pratiquement limitée à l’apport de l’azote et que bien souvent, les oléiculteurs ne
tiennent pas compte de la fertilité du sol (Gargouri et Mhiri, 2003 ; López-Granados et al., 2004 ;
Rapport de la Commission Nationale pour l’Amélioration de la productivité de l’olivier, 2011) ni des
apports effectués par l’eau d’irrigation, ce qui augmente le gaspillage des engrais et leur mauvaise
utilisation.
Pour augmenter l'efficience de l'utilisation des engrais chimiques (Barranco et al., 2010 ; Boulal
et al., 2013 ; Cameira et al., 2014 ; Niederholzer, 2013 ; Fernández-Escobar et al., 2014 ; Fernández-
Escobar et al., 2015), la fertigation est proposée comme alternative aux pratiques classiques,
associant l’apport d’engrais solubles à l’eau d’irrigation. Durant ces dernières années, la fertigation a
connu un progrès remarquable en oléiculture hyper intensive. Elle est d'autant plus intéressante qu'il
s'agit de culture exigeante pour laquelle on réalise déjà en fertilisation au sol des apports très
fractionnés. L’utilisation de solutions nutritives spécifiques permet d'atteindre un équilibre ionique
optimal au niveau de la rhizosphère et d’aboutir au développement d’un système radiculaire et d’une
frondaison équilibrés, une mise à fruits précoce et une production économiquement rentable. Une
telle pratique permet de maintenir la fertilité du sol et de couvrir de manière régulière les
exportations des éléments nutritifs qui sont prélevés de manière régulière et continue au cours du
cycle de croissance. Son efficacité dépend de nombreux facteurs, notamment le type d’engrais
utilisé, le mode d’apport, les conditions culturales et les pratiques horticoles associées. D’autres
méthodes, non moins intéressantes, sont utilisées comme la pulvérisation des engrais azotés ou
boriques qui permettent de redresser rapidement un bilan déficient. L’injection des engrais au tronc
est une autre méthode de fertilisation pratiquée sur olivier (Fernández-Escobar et al., 1993), palmier
(Saleh et al., 2016) et autres espèces comme le hêtre (Veldeman, 1980), pour corriger les carences
ferriques. Le choix de l’une ou de l’autre des méthodes dépend de la culture, de la conviction de
l’agriculteur à les utiliser, du coût de l’opération et des conditions environnementales (texture du sol,
salinité de l’eau d’irrigation…).
En Tunisie, la fertigation des plantations intensives n’est pas encore maîtrisée (Commission
Nationale pour l’Amélioration de la productivité de l’olivier, 2011) et encore moins généralisée.
L’absence de normes propres à la Tunisie en adéquation avec le potentiel de production des variétés
utilisées et des conditions environnementales a conduit à une mauvaise utilisation de cette pratique
11
et à l’apparition de troubles nutritionnels et physiologiques, engendrant une baisse des productions
et une perte des engrais, lesquels sont souvent utilisés à tort et bien massivement.
Sur le plan pratique, l’établissement d’un programme de fertigation passe obligatoirement par
l’analyse foliaire des éléments majeurs (azote, potassium et phosphore) ainsi que de certains
éléments mineurs et oligo-éléments. Les teneurs issues de ces analyses devront être comparées aux
normes appliquées en oléiculture en vue de procéder aux corrections nécessaires au fur et à mesure
de l’avancement de la campagne (IOBC, 2002 ; Fernández-Escobar et al., 2004 ; Morales-Sillero et
al., 2006 ; Connel et Vossen, 2007 ; Niederholzer, 2013 ; AFIDOL, 2018). Ils devront tenir compte
aussi et essentiellement du niveau de production escompté. En effet, le plan de fertigation doit être
basé sur l'objectif de production, qui ne peut être atteint que lorsque l'irrigation et la fertilisation
sont toutes les deux correctement réalisées. Dans le cas contraire, des anomalies apparaissent:
élévation du taux de salinité, sur-fertilisation ou sous alimentation hydrique et minérale, pertes des
éléments nutritifs par lessivage...etc. Ces anomalies sont à l'origine de la détérioration de la qualité
des olives et de la production. Les analyses au niveau du sol sont indispensables pour définir les
limites de la fertigation pour un cas de culture donné.
Cet ouvrage est destiné à l’oléiculteur averti et au cadre technique concerné par la culture
intensive irriguée de l’olivier. Nous y présentons les outils nécessaires pour assurer une gestion
optimale de l’oliveraie. On y trouve, une revue bibliographique, des résultats de recherches obtenus
en Tunisie et autour du bassin Méditerranéen, des applications et les procédures de calcul des
paramètres de la fertigation, permettant à l’oléiculteur l’établissement d’un programme de
fertigation propre à sa plantation.
One said:
“Olive trees are not big feeders”.
« La fertilisation, c’est l'art de compenser les manques en anticipant les
besoins des cultures, dans les limites du raisonnable » JM Parmentier.
“Fertigation is an environmental friendly method of fertilization”
12
Chapitre 1
-----------------------------------------------------
GENERALITES
1. Principes de base de la fertilisation / fertigation
La fertilisation est l’action d’enrichir un sol en l’un ou plusieurs éléments chimiques pour ramener sa
teneur à la concentration critique relative à une culture donnée afin d’augmenter la production
végétale. L’élément chimique rajouté ne reste plus facteur limitant de la production.
Si ces éléments fertilisants sont dissous dans l’eau d’irrigation pour être apportés aux racines, on
parle de fertigation.
Les 3 outils d’une gestion optimale de la fertilisation / fertigation sont:
L’analyse foliaire : Les premiers résultats d’analyses foliaires effectués en Tunisie en oliveraies
irriguées datent de 1959 (Buchman et al., 1959).
Au champ, la première analyse se fait à l’âge de 2 ans sur des feuilles prélevées en Juillet dans la
partie médiane des rameaux et qui se sont développées au cours de la saison écoulée, puis
régulièrement tous les 1 an / 2 ans. Les feuilles qui présentent des anomalies ou des affections
doivent faire l’objet d’un diagnostic à part. L’analyse foliaire est indispensable pour ajuster le
programme de fertilisation de l’oliveraie.
L’analyse du sol : permet de diagnostiquer les déséquilibres nutritionnels et d’évaluer les besoins en
amendements ; elle est nécessaire pour ajuster le pH et le rapport Ca/Mg. Les teneurs obtenues sont
comparées aux normes pour les sols et aux valeurs fournies par l’analyse des feuilles (Exemple). Les
arbres plantés sous des conditions différentes de sol, de microclimat ou de système d’irrigation sont
analysés à part.
L’observation critique des arbres et des conditions environnementales : Les symptômes visuels sont
complémentaires aux analyses du sol et des feuilles. Les anomalies de la croissance et les variations
significatives des rendements sont révélateurs de déficiences (N, K et B).
Pour certains éléments comme le bore, l’analyse des fruits matures donne de meilleurs résultats que
celle des feuilles (Sanz et Montanes, 1995 ; Bouranis et al., 1999 ; Ben Khélil et al., 2010a et 2010b).
A ce stade la correction profitera aux organes qui se développeront durant la saison qui suivra.
2. Rôles des éléments nutritifs
Comme tous les végétaux, l’olivier puise le carbone, l’hydrogène et l’oxygène (95% de la masse
végétale) dans l’air et dans l’eau. Les autres éléments sont prélevés du sol. Les éléments nutritifs sont
classés selon leur importance en :
➢ Eléments majeurs: azote (N), phosphore (P) et potassium (K).
➢ Éléments secondaires: calcium (Ca), magnésium (Mg) et soufre (S).
➢ Oligo-éléments: zinc (Zn), fer (Fe), manganèse (Mn), cuivre (Cu), bore (B), molybdène (Mo) et
chlore (Cl).
Les rôles des éléments nutritifs sont résumés au Tableau 1.
Tableau 1. Rôles des éléments minéraux majeurs, mineurs et oligo-éléments.
13
Source : Yermiyahu et al., (2009) et Huber et Schaub (2011) – Amélioré par Masmoudi-Charfi.
N
P
K
Mg
Ca
B
Zn
Fe
Mo
Cu
Mn
Métabolisme
général
Métabolisme azoté
Croissance
Respiration
Photosynthèse
Synthèse de sucres
Synthèse de la
Chlorophylle
Synthèse des
auxines et activation
des enzymes
Transport et
accumulation des
sucres
Autres synthèses
(ADN-lipides-
enzymes)
Résistance aux
maladies
Floraison- Nouaison
Induction florale
Floraison
Fécondation
Nouaison
Production
Grossissement
Maturité (Précocité)
Qualité
Fermeté du produit
Qualité gustative
Conservation
Résistance au stress
et régulation
stomatique
Stress et régulation
14
L’azote est l’élément le plus consommé par l’olivier (Tableau 2). Il stimule sa croissance
végétative, augmente le pourcentage de fleurs parfaites (Fernández-Escobar, 1999 ; Tsambardoukas,
2006; Chatzissavvidis et al., 2007 ; Erel et al., 2008; Fernández-Escobar et al., 2008 ; Therios, 2009)
et améliore la qualité de l’huile (composition acidique et teneurs en antioxydants) lorsqu’il est
convenablement apporté (Fernández-Escobar et al., 2006 ; Tekaya et al., 2013a et 2013b, 2016 ; Erel
et al., 2013 ; Albornoz, 2016). Il augmente la proportion de pulpe lorsqu’il est associé au potassium
(Morales-Sillero et al., 2008a ; Caporali, 2015). La forme de N appliquée affecte la photosynthèse et
la disponibilité des autres éléments (Tsambardoukas, 2006). L’apport de l’azote doit se faire avant la
période de croissance des pousses de printemps et couvrir toute la période de floraison, de nouaison
et de développement des olives (surtout au début de l’été) (Belguerri et al., 2016). Mais l’apport
excessif d’azote avant la nouaison conduit à une charge élevée en olives et favorise la formation de
petits fruits et l’alternance de la production (Fernández-Escobar et al., 2011).
Le potassium a un rôle fondamental dans la régulation stomatique, dans la résistance de l’olivier
au gel et à la sécheresse (il diminue le potentiel osmotique des cellules) (Mengel et Ameke, 1982 ;
Arquero et al., 2006 ; Restrepo-Diaz et al., 2008). Il est indispensable pour la division cellulaire et
pour la synthèse des sucres et des protéines (Erel et al., 2008 ; Hegazi et al., 2011). L’excès de
potassium réduit le prélèvement de N.
Le phosphore est essentiel pour la synthèse des phospholipides (Olsen and Sommers, 1982), la
croissance des racines, le processus de fructification (floraison, nouaison, précocité de la production
et le grossissement des olives) (Erel et al., 2008) et la photosynthèse. Son application précoce
renforce le système radiculaire.
Le calcium intervient dans la construction de l’ossature des structures aériennes, dans le
développement des racines et leur fonctionnement. Il est nécessaire pour la division cellulaire.
Le magnésium influence l'absorption et la translocation des phosphates. C’est un constituant
essentiel de la chlorophylle ; il est impliqué dans le métabolisme des carbohydrates et leur transport
vers les parties supérieures de l’arbre.
Le soufre est responsable des saveurs de l’huile d’olive (Kailis et Harris, 2007).
Le bore est nécessaire pour la pollinisation des fleurs, la germination et l’élongation du tube
pollinique, le développement des fruits et la translocation des sucres. Il a un rôle majeur dans la
formation du pollen et sa fertilité (Delgado et al., 1994 ; Perica et al., 2001 ; Larbi et al., 2008 et
2011 ; Stellacci et al., 2010 ; Spinardi et Bassi, 2012).
Le zinc stimule la croissance précoce des pousses et des fruits. Il est indispensable pour la
biosynthèse des auxines.
Le fer et le manganèse sont impliqués dans la photosynthèse, dans la fixation de N et dans la
réduction des nitrates (Larbi, 2002 ; Chatzissavvidis et al., 2006 ; Chatzistathis et al., 2006). Le
Manganèse est nécessaire pour le développement des fleurs.
Le cuivre est impliqué dans les mécanismes cellulaires de défense, dans la respiration et la
photosynthèse.
Le chlore contrôle le fonctionnement des stomates et la photosynthèse. Il réduit les effets des
infections fongiques mais aussi l'activité de photosynthèse.
15
Le maintien d’une nutrition minérale équilibrée est essentiel pour optimiser le développement
de l’olivier et sa production. Une attention particulière doit être attribuée aux éléments N, B et K
pour réduire l’alternance de la production et garantir une bonne qualité des olives et des huiles.
3. Besoins de l’olivier en éléments nutritifs, absorption et mode de transfert, symptômes de
déficience et d’excès
De grandes quantités d’éléments nutritifs sont prélevées chaque année par l’olivier pour assurer
diverses fonctions (croissance, développement, production, métabolisme…).
Les tailles de formation ou d’entretien, les productions et les chutes de feuilles et de fruits (dues à
divers stress), éliminent de l’arbre une part des éléments absorbés. Ces éléments doivent être
quantifiés et restitués annuellement à la plantation à travers un programme de fertilisation adéquat
qui tient compte des facteurs suivants:
➢ Rendement estimé (évaluer les exportations par les fruits).
➢ Exportations des éléments nutritifs faites par le bois de taille (analyse foliaire et du bois).
➢ Fraction fixée par le sol (analyse de sol).
Le Tableau 2 résume les besoins de l’olivier en éléments nutritifs, les modes d’absorption et de
transfert et les symptômes de carence et d’excès.
16
Azote (N)
Potassium (K)
Phosphore (P)
Calcium (Ca)
Besoin
3-4 g N / kg olives
Fortement consommé au
cours des vagues de
croissance.
4,5 g K / kg olives
Fortement consommé au cours du
développement des olives et en
année de forte charge en fruits.
0,7 g P / kg olives
Nécessaire en sols pauvres, en sols
riches en CaCO3 et en sols acides et
dans les jeunes plantations (<10 ans)
ou celles qui ont été longuement
fertilisées en azote.
Nécessaire au cours des premiers
stades de développement de la
culture.
Forme absorbée
Etat
Transfert
-Sous forme de nitrates NO3-
et d’ammonium NH4+
-Sous forme de K+
-Très mobile dans la plante, prélevé
par le bois, les feuilles et les fruits.
-Peu mobile dans le sol et
s’accumule en surface.
-Sous forme d’ions H2PO4– (sols
acides) ou HPO42– (sols alcalins)
-Présent dans le sol sous forme
inorganique en combinaison avec Fe,
Al, Ca ou organique dans l’humus.
-Précipite dans les sols alcalins sous
forme de phosphate de calcium.
Sous forme de Ca2+.
-Sa présence dans les solutions
nutritives minimise l’effet toxique
de NH4-N et augmente son
absorption.
Symptômes de
déficience
-Végétation chétive, plante
rabougrie, croissance
retardée. feuilles colorées en
vert pâle, réduites en taille et
en nombre, mourant
prématurément. Réduction
des niveaux de floraison, de
nouaison et de la production
et augmentation du nombre
de fleurs imparfaites.
-Raccourcissement des entre-nœuds,
jaunissement de la bordure des
feuilles, nécrose. Enroulement du
bord des feuilles et coloration bleue
grisâtre. Augmentation de la
transpiration des oliviers (Lechin de
Granada), réduction de l’EUE
(Chemlali de Sfax) et du % de fruits
destinés à la conservation.
-Déficience de K : liée à la baisse de
l’humidité du sol, au taux élevé de
calcium et à sa fixation au niveau des
particules argileuses. Elle peut être
vraie (manque de K) ou induite
(antagonisme avec Mg ou Ca, excès
de N).
-Croissance lente, plante rabougrie,
faible formation de fruits, retard de
la floraison et de la maturation,
feuilles ou tiges violacées; extrémité
des feuilles nécrosée.
-La carence peut être vraie ou
induite (pH élevé en sol calcaire, pH
bas avec présence de Al, excès d'ions
nitrate ou sulfate, excès de Zn ou
d'autres métaux lourds, température
du sol trop basse).
Chlorose des feuilles, veines
blanchâtres, croissance réduite des
points végétatifs (tiges et racines),
feuilles anormalement foncées, ne
parvenant pas à se déployer; chute
prématurée des fleurs et des
bourgeons, renouvellement des
pousses freiné (différence avec la
déficience en bore).
-Ca atteint le seuil de déficience
dans les sols acides.
Tableau 2a. Besoin de l’olivier en éléments nutritifs, absorption et transfert, symptômes de déficience et d’excès pour N, P, K et Ca
17
Excès
-Un temps couvert et froid
entraîne l'accumulation des
nitrates dans la plante ce qui
déprécie la qualité de l’huile,
favorise le développement de
pathogènes et accentue
l’alternance de la production.
Consommation de luxe.
L’excès de K limite l’absorption de
N
P interagit avec K : lorsque la teneur
en P dépasse la valeur critique, celle
de K diminue.
- Freine l’absorption de K.
Photos :
Symptômes de
carence
Photo 1 : Déficience en azote
(COI, 2007).
Photo 2 : Déficience en
potassium (Fergusson et al.,
1999).
Photo 3 : Déficience en phosphore
(chlorose étendue) (Haifa, 2016).
Photo 4 : Déficience en Calcium
(nervure blanchâtre) (Haifa, 2016).
Observations
Recommandations
L’efficience d’utilisation de
l’azote (EUN) est le rapport de la
quantité de N absorbée par la
plante/quantité totale appliquée.
EUN est comprise entre 25 et
50%. Comme l’azote n’est pas
totalement absorbé par l’arbre, il
est recommandé de fractionner
ses apports et de l’appliquer en
partie au sol (fertigation) et en
partie sur la frondaison
(pulvérisation foliaire).
-Le potassium pose des
problèmes de déficience dans les
plantations à haut rendement.
-Interagit avec N (même modalité
de fixation) : après une
production élevée, il faut
apporter du potassium. Les
quantités à appliquer doivent
être déterminées en combinaison
avec celles de N et fonction des
teneurs du sol en Ca et Mg.
-L’efficience d’application de K
diffère selon la modalité de son
apport.
-P interagit avec K
-Les fortes teneurs du sol en HCO3
augmentent la solubilité de P et son
absorption.
-P est sujet à la formation de
précipités insolubles avec le calcium
et au complexe argilo humique grâce
au pont calcique
-La proportion de P2O5 apportée ne
doit pas dépasser 20-30% de celle de
N.
-N’appliquer P que lorsque la plante
en a besoin (analyse foliaire) sinon
risque de précipité ou
d’antagonisme, ou de perte dans le
sol
-La concentration de Ca dans les
feuilles est affectée par la forme de
N appliqué.
-L’excès de Ca freine l’absorption
de K.
18
Tableau 2b. Besoin de l’olivier en éléments nutritifs, absorption et transfert, symptômes de déficience et d’excès pour Mg, S, B et Zn
Magnésium (Mg)
Soufre (S)
Bore (B)
Zinc (Zn)
Besoin
12 à 85 kg MgO / ha selon
le rendement.
-80 à 200 g B / ha
Mobilisé au cours de la floraison et
du développement des fruits
-50 à 500 g Zn / ha.
Forme absorbée
Etat et Transfert
-Sous forme de Mg2+
-Stimule le prélèvement de
P et son transport.
-Déficient dans les sols acides
-Sous forme d’acide borique H3BO3.
-Peu mobile des feuilles adultes vers
les feuilles jeunes (comme Ca).
Symptômes de carence
-Chlorose des feuilles qui
commence en haut de la
frondaison et se propage à
toute la surface ;
végétation chétive ;
décoloration des feuilles
âgées en sols sableux ou
acides qui commence entre
les nervures, aboutissant à
la nécrose.
-Carence en Mg est vraie
ou induite par excès de K
en condition de jour court
ou sombre, par asphyxie
racinaire ou par manque
d'eau.
-Jaunissement des feuilles jeunes,
plantes petites et faibles,
croissance lente; maturation
retardée, tiges rigides et
cassantes.
-Apparaissent sur les jeunes feuilles
en premier. Feuilles colorées en gris,
distordues, fragiles et finissent par
chuter, décoloration en marron de
l’intérieur des tiges (nécrose du
cambium), chlorose et
dessèchement des apex, retard du
développement végétatif, formation
de rosettes, épaississement et
craquement des rameaux,
raccourcissement des entre-nœuds
et développement de rejets à la base
de l’arbre avec épaississement et
enroulement des racines,
branchements excessifs, stérilité des
fleurs et coulure, mauvaise nouaison
et croissance réduite des fruits.
-S’installent à partir de 0,3 ppm dans
le sol pendant la saison sèche.
Les carences sont induites par le pH
alcalin, un chaulage excessif, des
rapports Ca/B et K/B élevés dans le
sol, une faible luminosité et par la
-Faible allongement des pousses;
formation réduite de bourgeons à
fleurs, chlorose des feuilles
(auréoles jaunes), plantes naines,
port en rosette, mauvaise nouaison
due à la perturbation du
métabolisme du phosphore.
-La carence s’observe dans les sols
acides. La carence induite est due à
un pH>7, ou sur-chaulage, à l'excès
de P et par temps froid et humide.
19
sécheresse. La majeure partie de B
disponible est retenue par la fraction
organique.
Excès
Réduit l’absorption de K.
-Toxicité de l’arbre, même si l’olivier
est tolérant au Bore (accepte une
eau de 1-2mg/litre)
Chlorose à nécrose des feuilles
adultes, chute prématurée.
Lié à un travail superficiel de sol
concentrant les fumures en surface
ou/et un excès de fumure, pH trop
acide.
Photos
Photo 5 : Déficience en bore sur
fruits ‘Monkey face’ et feuilles.
Photo 6 : Déficience en zinc (Haifa,
2016)
Observations (confusion
des symptômes
concurrence)
Recommandations
Mg stimule le prélèvement
de P et son transport.
Les symptômes de carence en B
peuvent se confondre avec ceux de
la carence en Ca
Antagonisme Zn/P
Tableau 2c. Besoin de l’olivier en éléments nutritifs, absorption et transfert, symptômes de déficience et d’excès pour Fe, Mn, Cu, Cl et Na
Fer (Fe)
Manganèse (Mn)
Cuivre (Cu)
Chlore (Cl)
Sodium (Na)
Besoin
300 à 2000 g de Fer / ha.
160 à 500 g Mn / ha selon les
variétés,
Les teneurs dans les feuilles
se situent entre 16 et 150
ppm.
25 à 100 g Cu / ha.
Requis en très petites
quantités, semblable au
fer, la concentration
normale est de 100 ppm.
Forme absorbée
Etat
Transfert
-Fe++
-Présent dans le sol à
des teneurs qui vont de
200 ppm à plus de 10%.
- Mn2+ par les racines
-Les sols hydromorphes
contiennent des
concentrations élevées de Mn
et Fe solubles.
Cu++
-Amené par l'eau
d'irrigation ou les engrais
(chlorure de potassium et
de calcium),
-S'accumule dans les
-Na+, très mobile et
chasse K+.
L'augmentation de la
salinité du sol entraîne
l'accumulation de Na et
20
-Mn est lessivable.
marges des feuilles,
produisant des nécroses -
L’utilisation d'eau chlorée
(Ca/Cl <2) limite
l’utilisation des engrais
riches en chlorures
Cl dans les feuilles, les
pousses et les racines des
oliviers. diminuant la
concentration de K et de
Ca, mais la teneur en Mg
n'est pas affectée par le
stress salin
Symptômes de carence
-Les nervures des
feuilles restent vertes,
croissance réduite des
pousses.
- La déficience en Fe est
observée dans les sols à
pH élevé, en cas de
déséquilibre entre
Fe/Cu et Mn, ou sous
une concentration
élevée en P, une
humidité de sol
excessive, des
températures trop
basses, un niveau élevé
du sol en HCO3.
-Chlorose inter veineuse des
feuilles matures,
développement incomplet
des bourgeons à fleurs et
avortement, jaunissement
des feuilles jeunes, apparition
de spots nécrotiques.
-Déficiences répandues dans
les sols à pH élevé. Risque de
carence si Mn<20 ppm. Elle
peut être induite suite à un
sur-chaulage du sol, une
sécheresse excessive ou un
pH trop bas du sol.
-Croissance rabougrie,
feuilles déformées en
rosettes, colorées en
jaune- pâle.
-La déficience Cu est
observée dans le sol
sableux et d’autant plus
qu’il reçoit des
applications excessives
d'engrais phosphoreux. La
carence induite est
provoquée par l’alcalinité,
l'excès de chaulage,
l'excès de Mo, P et Zn.
Rare
Excès
A lieu : pH<6, fumigation du
sol, apports de compost, sol
asphyxiant, mal drainant et
riche en matière organique
mal décomposée.
-Toxicité des arbres et des
microorganismes, arrêt de
croissance; jaunissement
des feuilles; décoloration;
flétrissement et nécrose
de l’extrémité des feuilles.
-Nécrose des feuilles
et de la pointe de la
tige. Brûlure de la
bordure des feuilles et
leur chute (>50 mM
NaCl)
-Entrave l’absorption des
autres éléments, toxique si
CE> 4dS/m, rabougrissement
de l’arbre et réduction de la
taille des fruits;
flétrissement, nécrose.
21
Photos
Photo 7. Déficience en
Fer. (COI, 2007)
Observations
Recommandations.
Fe entre en compétition
avec P, Mg, Zn et K, ce
qui peut induire une
chlorose ferrique.
Les symptômes de
carence en Cu se
confondent avec la
carence azotée.
Cl concurrence l’absorption du nitrate au profit de
l’ammonium,
Na chasse le potassium
Na+ donne des déséquilibres avec K,
Sources : Benlloch et al., (1991), Fernández-Escobar et al., (1993); Delgado et al., (1994); Tsadilas et Chartzoulakis (1999) ; (Source sel : Al-Absi, Qrunfleh et Abu-Sharar, 2002) ; Benitez et al., (2002);
Chatzissavvidis, (2002); Chatzissavvidis et Therios (2003); Parra et al., (2003) ; Chartzoulakis et Therios (2003) ; Chatzissavvidis et al., (2005) ; Van der Gulik et Tam, (2006) ; Fernández-Escobar et al., (2006) ;
COI, (2007); Boussadia et al., (2008), Boussadia et al., (2008); Vossen (2009) ; Saidane et al., (2014).
Sources électroniques: http://www.summerlandolives.com.au; http://www.oliveoilsource.com;http://www.summerlandolives.com.au/ http://www.oliveoilsource.com,
Figure 1. Symptômes de carence en éléments nutritifs (COI, 1997).
Remarques
-Les symptômes de déficience peuvent induire des confusions (surtout entre
N/P – Ca/B – B/Mn/Fe). Un bon diagnostic ne peut se faire qu’avec
l’analyse des feuilles.
-Les déficiences en K, Fe et B sont souvent observées en sols calcaires.
-Les éléments majeurs atteignent rarement le seuil de toxicité.
-Les oligoéléments qui peuvent présenter des toxicités sont : le bore, le chlore,
le cuivre, le manganèse et le zinc. Des métaux lourds peuvent être indirectement
apportés dans le compost (plomb, mercure et chrome).
-Les déficiences en éléments traces sont souvent associées aux sols alcalins, ou
calcaires où ces éléments sont retenus sous forme oxydée. L’abaissement du pH
en ajoutant un élément sulfuré, qui est converti en forme acide par les
microorganismes, peut résoudre ce problème (ce ne sont pas des produits
acidifiants).
-Le fait que les argiles retiennent B plus efficacement que les sols sablonneux
n’implique pas nécessairement une bonne absorption. Au contraire, les plantes
prélèvent B beaucoup plus à partir des sols sableux. Concrètement ceci revient
à utiliser des taux d'engrais B hydrosolubles plus bas en sol sableux que sur des
sols à texture fine pour le même degré de prévision.
22
4. Facteurs de variation des éléments minéraux chez l’olivier
Les teneurs en éléments minéraux varient en fonction de la variété, du stade
phénologique (Tableau 3), de l’âge des feuilles (Figures 2 et 3), du matériel végétal considéré
(Tableaux 3 et 4), et de la saison (Perica et al., 1994 et 2001). Les travaux de Chatzistathis et
al., (2004, 2005 et 2006) ont montré que la variété Picual accumule moins de Mn que les
variétés Manaki’, ‘Kalamon’ et ‘Koroneiki’.
Tableau 3. Variation des teneurs de N, P, K, Mg, B et Fe des feuilles chez les variétés
‘Chondrolia Chalkidikis’ et ‘Amphissis’ en fonction du stade phénologique, 30, 60, 90 et 120
jours après la pleine floraison.
Jours après la pleine floraison
Chondrolia Chalkidikis
Amphissis
N (%MS)
30
1,22
0,93
60
0,73
0,78
90
0,83
0,76
120
0,90
0,65
P (%MS)
30
0,15
0,11
60
0,11
0,08
90
0,10
0,11
120
0,11
0,06
K (%MS)
30
0,94
0,65
60
0,89
0,73
90
1,71
1,18
120
1,63
1,32
Mg (%MS)
30
0,09
0,06
60
0,06
0,06
90
0,07
0,05
120
0,06
0,05
B (ppm)
30
47
52
60
47
61
90
96
84
120
122
44
B (ppm)
30
56
58
60
84
97
90
18
27
120
17
29
Source : Chatzissavvidis et al., (2004).
Les expérimentations menées dans la région de Sidi Bouzid (Institut de l’Olivier, 2014) ont
montré que les teneurs en N et en P sont élevées avant le démarrage de la phase de croissance
rapide des pousses. Des teneurs élevées en N sont aussi observées lorsque la fin de l’hiver est
pluvieuse mais clémente. Ces conditions favorisent l’absorption des nitrates et leur
accumulation dans les feuilles avant la vague de croissance du printemps. Lorsque l’hiver est
sec, le phosphore s’accumule au niveau de la frondaison avant le démarrage des pousses. Un
bois de taille riche en pousses donne des niveaux élevés en N mais pauvres en P.
Les teneurs de K au niveau des feuilles sont plus élevées en période de croissance active
des pousses et surtout en année pluvieuse. Les valeurs sont plus faibles en année ’on’. Une
charge élevée en olives implique une mobilisation importante de K dès le stade de
différenciation florale (fin de l’hiver, en période de taille).
23
A l’échelle de l’année, les teneurs en bore diminuent dans les jeunes feuilles et dans les
pousses au printemps et en été et augmentent en automne (Figure 2) aussi bien en année de
forte charge en olives dite année ‘on’ qu’en année de faible charge en fruits appelée année
‘off’ (Thérios, 2009). Leurs baisses sont significatives après le stade de floraison; le minimum
est observé au moment du durcissement du noyau. La période hivernale est caractérisée par
des concentrations stables de N, P, K, Ca et Mg.
Figure 2. Variation saisonnière de la teneur des feuilles d’olivier cvs., ‘Amphissis’ et ‘Chondrolia
Chalkidikis’ en bore durant deux campagnes successives (Chatzissavvidis et al., 2004 ; Haifa,
2016).
Organe : Les teneurs maximales de N sont observées dans les feuilles et particulièrement dans
les plus jeunes parmi-elles (Figure 3, Tableau 5). Les concentrations en N varient également en
fonction de la charge en olives. Elles sont plus ou moins constantes durant les années ‘off’ et
diminuent au cours des années ‘on’ suite aux exportations massives faites par les fruits.
Figure 3. Evolution de la teneur des feuilles d’olivier en azote (%MS) selon leur âge au cours
d’un cycle de croissance. Par ordre d’apparition dans la figure : Quiescence, pousse en
croissance, floraison, sclérification de l’endocarpe, feuille d’un an, feuille de 2 ans, feuille de
trois ans et stade de maturation (Braham, 1999).
Amphissis
---feuilles de l’année
__ feuilles de l’année passée
24
Tableau 4. Concentrations en N, P et K (%) chez l’olivier en pleine production en fonction de la
nature du matériel végétal. Les ratios N:P:K sont rapportés pour chaque organe.
Eau %
N (%)
P (%)
K (%)
Ratio (N:P:K)
Racines secondaires
37,7
0,33
0,113
0,402
2,9 : 1 : 3,5
Racines primaires
45,5
0,37
0,123
0,477
3,0 : 1 : 3,8
Tronc
32,3
0,26
0,070
0,219
3,7 : 1 : 3,1
Branches principales
31,9
0,29
0,090
0,354
3,2 : 1 : 3,9
Branches secondaires
27,4
0,23
0,099
0,191
1,2 : 1 : 1,9
Pousses
40,3
0,64
0,179
1,000
3,5 : 1 : 5,5
Feuilles d’1 an
42,7
1,63
0,271
0,994
6,0 : 1 : 3,6
Feuilles de 2 ans
40,5
1,24
0,201
0,678
6,1 : 1 : 3,4
Fruits non mûrs
60,6
0,90
0,333
2,760
2,7 : 1 : 8,3
Fruits mûrs
46,1
0,97
0,397
3,220
2,4 : 1 : 8,1
Source : Therios (2009).
5. Normes
L’olivier puise dans le sol les éléments nutritifs (majeurs N, P et K, secondaires Ca, Mg et S
et oligo-éléments Fe, Zn, Mn, Cu, B...) nécessaires pour subvenir à ses besoins. De fait de sa
longévité, ses exportations présentent une masse considérable d’éléments minéraux, qu’il faut
restituer à temps et en quantités adéquates. Pour ce faire, et dans le but de compléter
l’analyse chimique au sol, l’oléiculteur fait recours au diagnostic foliaire (analyse minérale des
feuilles), qui a été mise au point vers les années 50 (Buchman et al., 1959 ; Cottenie et al.,
1983 ; Freeman et al., 2005).
L’analyse du sol permet d’évaluer la richesse du sol en éléments nutritifs (fertilité) mais
elle ne fait qu’approcher leur disponibilité à la plante. L’interprétation du diagnostic foliaire est
basée sur la comparaison des valeurs obtenues avec des normes qui sont établies après
plusieurs années d’observations et qui intègrent les variations nutritionnelles dues aux
facteurs influençant l’alimentation minérale.
5.1. Teneurs dans le sol et normes
5.1.1. Principe d’échantillonnage du sol pour analyse minérale
Les échantillons de sol sont prélevés dans différents emplacements et profondeurs en
raison de la variabilité possible de sa composition. Les compartiments de sol à analyser doivent
être différenciés selon la texture, la variété cultivée, la pente….
Principe : Subdiviser chaque compartiment en 5 unités parcellaires et y prélever à l’aide
d’une tarière 1 à 3 échantillons de 0,5 kg de terre de chaque horizon (0-30 cm ; 30-60cm ; 60-
90 cm). Sécher les échantillons à l’air libre et procéder aux analyses minérales au Laboratoire
(COI, 2007). Il est généralement admis qu'une analyse de sol est suffisante pour 2 hectares de
verger. Toutefois, en cas de forte hétérogénéité du sol sur une même parcelle, plusieurs
analyses sont recommandées.
5.1.2. Méthodes d’analyse au laboratoire et interprétation des teneurs du sol en éléments
minéraux
La méthode Kjeldahl est couramment utilisée pour le dosage de l’azote. La méthode d’Olsen
est la plus utilisée pour le dosage du phosphore et convient pour la gamme de sols calcaires.
Une teneur en P2O5 de 9 ppm est considérée comme faible pour l’olivier (Tableau 5).
25
La disponibilité du potassium, du calcium et du magnésium est liée à la capacité du sol à
échanger ces cations (CEC), elle-même dépendante de la texture du sol. On doit tenir compte
du rapport K/Mg car l’excès de potassium induit une déficience en magnésium. Ces éléments
sont dosés par spectrophotométrie. Les teneurs moyennes sont portées au Tableau 6.
Les niveaux critiques de fer, de manganèse, de cuivre et de zinc sont portés au Tableau 7.
Les ions sodium, chlore et bore causent la phytotoxicité de l’olivier même à des niveaux faibles
de CE. Le Tableau 8 rapporte les degrés de limitation de ces éléments en termes de salinité, de
sodicité et d’excès pour le bore et le chlore.
Tableau 5. Guide des teneurs du sol en Phosphore (P2O5).
Echelle d’évaluation
Teneur en phosphore (Méthode d’Olsen, ppm)
Très élevé
> 25
Elevé
18-25
Moyen
10-17
Faible
5-9
Très faible
< 5
Source : FAO (1984).
Tableau 6. Guide des teneurs optimales du sol (ppm) en potassium (K), magnésium (Mg) et
calcium (Ca) en fonction de sa texture.
Texture
CEC (mmolc/kg)
K (ppm)
Mg (ppm)
Ca (ppm)
Grossière
< 5
30-60
10-25
200-500
Moyenne
5-15
100-175
40-80
1000-1600
Fine
> 15
150-300
60-120
2000-3000
Source : FAO (1984).
Tableau 7. Teneurs critiques du sol en micro-éléments extractibles (ppm).
Micro nutriment
Niveau critique (ppm)
Niveau suffisant
Fer (Fe)
3,0
50-150
Manganèse (Mn)
1,4
50-150
Cuivre (Cu)
0,2
5-20
Zinc (Zn)
0,8
10-30
Source : Para et al., (2003). Therios (2009).
Tableau 8. Degrés de limitation du sodium, du chlore et du bore.
Degré de limitation
Type de limitation
Faible
Modérée
Sévère
Salinité du sol CE (dS/m)
4
5
8
Pourcentage de sodium échangeable (%)
-
20-40
-
Toxicité du bore (ppm)
2
-
-
Toxicité du chlore (méq/l)
10-15
-
-
Source : Para et al., (2003).
26
5.2. Eléments minéraux dans la plante
5.2.1. Principe de l’analyse foliaire
Les concentrations en éléments nutritifs sont relativement stables en été. Les échantillons
de feuilles sont donc prélevés en juillet, 5-8 semaines après la pleine floraison. Un échantillon
de 2-4 feuilles/arbre (totalisant 100 feuilles/compartiment homogène) est considéré comme
représentatif du compartiment. Les analyses portent sur des feuilles saines et matures,
récoltées sur l’ensemble de la frondaison, au niveau de la partie apicale des jeunes pousses de
3-5 mois qui ont accompli leur expansion (sans fruits). Les rameaux vigoureux, chétifs et se
trouvant à l’intérieur de la canopée ne sont pas pris en compte. Chaque type de feuilles (saine,
malade, mature….) est analysé à part (COI, 2007).
5.2.2. Interprétation des teneurs de la plante en éléments minéraux
La comparaison de l’analyse foliaire avec les normes pour l’olivier permet de
diagnostiquer les déficiences, la suffisance ou l’excès (Tableau 9). Les teneurs optimales
d’éléments nutritifs dans les feuilles, définies pour la Méditerranée se situent aux alentours
de 2%MS pour N ; 0,3% pour P ; 1% pour K et 1,4% pour Ca. Pour l’azote, Fernández-Escobar
(2004) recommandent une teneur de 1,5%, au-delà de laquelle le niveau de polyphenols dans
les huiles et la qualité des olives de table diminuent (Morales-Sillero et al., 2006).
Le seuil critique indique la teneur de la feuille en un élément donné, en deçà de laquelle la
plante est en situation de carence en cet élément. Pour le sodium et le Chlore les valeurs
toxiques se situent au-delà de 0,20% et 0,50% respectivement.
Tableau 9. Teneurs minimales, optimales et toxiques des éléments nutritifs au niveau des
feuilles d’olivier (%MS ou ppm) analysées au mois de Juillet.
Elément nutritif
Déficient
Optimum
Toxique
Azote
< 1,4%
1,5 – 2,0%
> 2,55%
Phosphore
< 0,05%
0,1 – 0,3%
> 0,34%
Potassium
< 0,4%
0,8 – 1,0%
> 1,65%
Calcium
< 0,6%
1,0 – 1,43%
> 3,15%
Magnésium
< 0,08%
0,1 – 0,16%
> 0,69%
Soufre
< 0,02%
0,08 – 0,16%
> 0,32%
Fer (ppm)
< 40
90 – 124
> 460
Zinc (ppm)
< 8
10 - 24
> 84
Bore (ppm)
< 14
19 – 150
>185
Manganèse (ppm)
< 5
20 – 36
> 164
Cuivre (ppm)
< 1,5
4 - 9
> 78
Source : Connel et Vossen (2007).
6. Exportations des éléments minéraux
6.1. Définition
L'exportation d'un élément minéral est définie par la quantité de cet élément prélevé par
les racines, de la solution du sol au cours d’une année (Favreau, 1982).
27
6.2. Facteurs de variation
A partir des teneurs moyennes de N, P, K et Ca et des productions de bois de taille et
d’olives, les exportations en éléments minéraux sont évaluées. Leur niveau varie en fonction
de la zone de culture comme le montre le Tableau 10. En Tunisie, les exportations en
phosphore et en potassium sont plus élevées dans la région du Centre (Braham, 1984).
Tableau 10. Exportations de N, P2O5 et K2O (g/arbre/année) chez l’olivier dans les principaux
pays producteurs (g/arbre/année).
Pays
Source
N
P2O5
K2O
Tunisie
Braham (1999)
578
67
502
France
Bouat (1968)
300
60
200
Espagne (Jaen)
Llamas (1983)
310
75
560
Italie
Pantanelli
276
142
488
Les exportations d’éléments majeurs d’une jeune oliveraie intensive (Mornag-Tunisie) ont
varié durant les cinq premières années de culture de 9,2 kg/ha à 185,9 kg/ha pour l’azote, de
8,6 à 163,1 kg/ha pour le potassium et de 1,3 à 30,7 kg/ha pour le phosphore (Masmoudi-
Charfi et Ben Mechlia, 2009). Pour une superficie de 1000 m2 cultivée en oliviers en
production, Therios (2009) rapporte des quantités annuelles d’azote, de phosphore, de
potassium et de calcium, respectivement, de 1,5-3,5 kg, 0,8 kg, 1-5 kg et 2-5 kg. Par type
d’organe, les quantités sont pour l’azote de 0,5 kg /100 kg de fruits, 1,0 kg/100kg de feuilles et
0,76 kg/100kg de bois. Pour le potassium, les valeurs sont respectivement pour les fruits,
feuilles et bois de 0,95, 0,56 et 0,39 kg/100 kg. Les quantités prélevées pour 100 kg de fruits,
50 kg de feuilles et 50 kg de bois sont portées au Tableau 11. Le Tableau 12 présente les
quantités de nutriments (kg/ha) fournies par les antécédents culturaux, celles prélevées par
l’arbre et celles exportées par la production de 5 tonnes d’olives / ha au niveau d’une oliveraie
en production.
Tableau 11. Quantités de N, P, K et Ca (kg) nécessaires chaque année par une oliveraie pour la
production de 100 kg de fruits, 50 kg de feuilles et 50 kg de bois.
Fruits
Feuilles
Bois
Total
N
0,500
0,500
0,380
1,380
P
0,120
0,120
0,150
0,390
K
0,950
0,280
0,795
1,425
Ca
0,960
0,500
0,300
1,760
Source: Therios (2009)
Tableau 12. Nutriments (kg/ha) prélevés par la culture de l’olivier (pour une production de 5
tonnes d’olives /ha) et disponibles à partir des antécédents culturaux.
N
P2O5
K2O
CaO
MgO
Disponible à partir des antécédents culturaux
8
2
14
3
3
Prélevé par la plante
78
19
98
53
25
Exporté par la production
40
7
60
15
4
Source: Haifa Chemicals website (2018).
Les figures 4 et 5 montrent l’évolution saisonnière des exportations en éléments majeurs
dans différents organes chez l’olivier en production. Les niveaux maxima sont atteints entre
28
Juin et Juillet. Le Tableau 13 montre que le potassium est l’élément le plus exporté, suivi de
l’azote. Les exportations de K sont maintenues à des niveaux plus ou moins stables (31,4-
35,1%) entre les stades de nouaison et de maturation alors que celles de N et de P ont varié
respectivement de 28,5% (phase de durcissement du noyau) à 39,5% (Nouaison) et de 24,6
(phase de nouaison) à 38,9% (phase de durcissement du noyau), enregistrant une hausse plus
importante durant les premiers stades de développement des olives.
Figure 4. Evolution saisonnière des besoins en N, P, K (Kg/arbre) chez l’olivier
au cours d’un cycle de croissance (Haifa, 2016).
Figure 5. Evolution saisonnière des besoins en éléments nutritifs dans les différents
organes de l’olivier (Haifa, 2016).
Retenons :
1Kg de fruits exporte 10 g d’azote alors qu’un 1Kg de feuilles exporte 15 g d’azote.
Une tonne de fruits exporte 9,8 kg de N, 11,3kg de P, 10,3 kg de K, (25,9 kg de P2O5 et 12,4 kg
K2O) (Source: Haifa 2016).
29
Tableau 13. Exportations de N, P et K (masse de l’élément en masse de fruit, %) au cours des
stades de nouaison, durcissement du noyau et de maturation des olives.
Nouaison
Durcissement du noyau
Maturation
N
39,5
28,5
32,0
P
24,6
38,9
36,5
K
33,5
31,4
35,1
Source: Therios (2009)
Le niveau des exportations varie en fonction de celui de la production, passant de 7 à 120
kg d’azote pour un rendement évoluant entre 0,7 et 10 T/ha (Tableau 14; Boulal et al., 2013).
Braham (1999) obtient pour des rendements de 2300 kg ha-1 d’olives à Enfidha et 700 kg ha-1 à
Kondar (localités du centre tunisien), des niveaux d’exportations de 7,0 kg d’azote, 1,7 kg de
phosphore et 11,5 kg de potassium à Kondar et 15,6 kg d’azote, 4,2 kg de phosphore et de 30,0
kg de potassium à Enfidha (oliveraie irriguées). Therios (2009) obtient des valeurs respectives
de 70-50-50 en pluvial et 84-60-60 kg/ha/année en irrigué pour N-P2O5-K2O. Le Tableau 15
présente les quantités d’éléments majeurs exportées en fonction du niveau de production
d’olives. Le Tableau 16 montre la variation des niveaux d’exportation en fonction de la densité
de plantation.
Tableau 14. Exportations des macroéléments (kg/ha) selon le niveau de production
Cas des oliveraies en Tunisie.
Rendement tonne/ha
N
P2O5
K2O
Références
0,7
7
1,7
11,5
Braham (1999)
2,3
1115,6
114.2
30
Braham (1999)
10
120
40
160
(Khélil et Sanaa, 2009)
Source : Boulal et al., (2013).
Tableau 15. Exportations de N, P, K et Mg (t/ha) en fonction du niveau de production.
Niveau de productivité des vergers
(tonnes d’olives / ha)
Azote
(N)
Phosphore
(P2O5)
Potassium
(K2O)
Magnésium
(MgO)
Verger assez productif (2-3t /ha)
30 à 50
15 à 25
50 à 60
15
Vergers productifs (3-5 t/ha)
50 à 60
20 à 30
60 à 70
20
Vergers très productifs (5-7t/ha)
60 à 70
25 à 40
70 à 80
25
Source: Therios, (2009).
Tableau 16. Variation des niveaux d’exportation des éléments majeurs (kg/ha) en fonction de
la densité de plantation (Haifa, 2016).
Densité
Rendement
Exportation (kg/ha)
Pieds/ha
kg/tree
T/ha
N
P2O5
K2O
417
10
4,2
150
50
145
556
9
5,0
160
55
155
1250
6
7,5
170
60
165
1905
5
9,5
180
65
175
30
.
Figure 6. Besoins de l’olivier en éléments nutritifs N, P2O5, K2O et Mg en fonction de
l’écartement entre les arbres et de la nature de la fertilisation (minérale ou organique).
Sources : Le Verge S., et Zazzaron C., (2017). Centre Technique Olivier, AFIDOL.
NB : Valeurs présentées à titre d’exemple pour montrer la variabilité des teneurs en fonctions de
plusieurs facteurs.
Photo 8. Urée.
31
Chapitre 2
-------------------------------------------------
LA FERTIGATION
1. Définition
Mhiri (1996) définit la fertigation comme étant une technique agricole d’intensification
des cultures qui a pour objectifs :
✓ Augmenter les productions et assurer une haute qualité des produits récoltés,
✓ Optimiser les coûts économiques et écologiques,
✓ Satisfaire tous les besoins hydriques et nutritionnels des cultures en apportant
simultanément l’eau et les éléments nutritifs selon leurs exigences spécifiques.
✓ Contrôler les pertes des engrais minéraux et mieux maitriser la salinité du sol induite
par les apports excessifs d’engrais.
La fertigation est une technique de fertilisation économe, qui permet de corriger les
carences en éléments nutritifs en temps réel. Elle consiste dans l'application d'engrais
hydrosolubles à travers le système d'irrigation. Les apports sont adéquatement calculés et
fractionnés dans le temps en rapport avec le besoin spécifique de chaque stade phénologique
et la production escomptée. Les éléments minéraux apportés doivent être mis en équilibre les
uns avec les autres interactions sont souvent observées entre N et P, P et Zn et K et Mg
(Bustan et al., 2013). Ceci permet d'atteindre un équilibre ionique optimal au niveau de la
rhizosphère et la réduction des coûts.
La fertigation se base sur le principe fondamental d’affranchir le plus possible la plante des
contraintes édaphiques qu’elle rencontre en culture classique au niveau de son alimentation
hydrique et sa nutrition minérale.
2. Avantages et limites de la fertigation
2.1. Principaux avantages de la fertigation
✓ Automatisable,
✓ Bonne efficience de l'utilisation de l'eau et des engrais
✓ Diminution du lessivage et amélioration de la fertilité du sol
✓ Contrôle de l'état ionique de la rhizosphère.
✓ Economie de main d'œuvre (application des engrais).
✓ Correction possible du pH du sol
✓ Eviter la toxicité.
✓ Elimination du colmatage au niveau des goutteurs (en utilisant l’acide phosphorique ou
l’acide nitrique 0,5% HNO3, qui apportent en plus le phosphore et l’azote).
La fertigation s’oppose à l’apport excessif d’engrais qui peut provoquer une dégradation
de l'environnement et affecter la productivité et la qualité de l'huile d'olive. La fertigation
32
assure une nutrition équilibrée des plantes tout au long de la saison de croissance,
garantissant la disponibilité des engrais en temps voulu.
2.2. Principales limites de la fertigation
✓ Nécessite une conception adéquate du système et une uniformité élevée de la
distribution de l’eau (le coefficient d’uniformité d’un système goutte-à-goutte doit être de 90
% ou plus).
✓ Ne convient pas à tous les engrais, notamment ceux de faible solubilité. Certains
engrais sont corrosifs et peuvent altérer le système d’irrigation.
✓ Nécessite l’emploi de dispositifs de sécurité (éviter le retour des engrais).
✓ Augmentation de la salinité du sol.
✓ Connaissance parfaite du mode de réglage de l’injecteur, des vannes d’isolement et
des dispositifs anti-retour (compétence de l’opérateur).
✓ Un déséquilibre se crée entre les zones irriguées (bulbe humide) et celles qui se
trouvent en dehors des frondaisons.
✓ Le coût des engrais solubles est nettement supérieur à celui des engrais
conventionnels.
NB: La fertigation n'est pas recommandée en aspersion à cause des risques élevés de brulure
des feuilles et l’apparition de maladies fongiques.
3. Schéma général d’un système d’irrigation fertilisante
Le système d’irrigation localisé est constitué par trois dispositifs pour le fonctionnement,
la distribution de l’eau et le contrôle, permettant l’écoulement de l’eau de la station de tête
vers la parcelle (Phocaides, 2008). La fertigation nécessite en plus du système d’irrigation, un
dispositif composé d'un réservoir fertiliseur, un injecteur d’engrais ou d'une pompe doseuse,
une valve de non-retour et un système de filtration branché sur le réseau d'eau, soit en
dérivation, soit directement. L'installation peut être très simple, cas du tank fertiliseur, ou plus
complexe avec gestion automatisée et centralisation de l'injection de l'engrais.
La figure 7 présente le schéma général du système d’irrigation au niveau de la parcelle. Il
est constitué de conduites enterrées (conduites principales) et de bornes de prise qui
émergent à la surface du réseau. Ces bornes sont connectées aux ‘adducteurs’ qui, à leur tour,
alimentent des conduites latérales posées le long des rangs de la culture et munies de
distributeurs posés à des intervalles réguliers distribuant uniformément l’eau avec une
pression donnée (Masmoudi – Charfi et al., 2012).
3.1. Ouvrage de tête
C’est l’unité de contrôle et de commande. Elle est constituée par une ligne d’alimentation
de l’eau en PVC rigide ou en acier galvanisé fileté, installée horizontalement à une hauteur
minimale de 60 cm au-dessus du sol. Elle est équipée d’un purgeur d’air, d'une valve de
contrôle, d'une vanne de sectionnement, d'un injecteur d’engrais et d'une unité de filtration.
On y trouve :
- Le tableau de contrôle : muni de compteurs horaire et métrique et d’un programmateur de
fonctionnement automatique.
- Le système de filtres : à sable, à tamis ou à disques. Le filtre à sable est constitué par un
empilement de matériaux plus ou moins fins (0,6-18 mm). Dans le cas d’une eau chargée, il est
recommandé d’utiliser du gravier fin. Le filtre à tamis est généralement monté après le filtre à
33
sable et est utilisé pour filtrer une eau moins chargée. Le filtre à disques est utilisé pour des
eaux d’une charge moyenne. Il est généralement associé à un filtre à tamis.
Les faibles sections de passage de l’eau dans les distributeurs imposent l’utilisation d’une eau
propre. De ce fait, le niveau de filtration de l’eau va dépendre de son origine. Pour les eaux de
surface (rivière, lac) il est recommandé d’utiliser des filtres à sable et à tamis. Pour les eaux
provenant de nappes (puits ou forages), les filtres à tamis sont à privilégier.
Remarque : La station de filtration est un poste couteux qui s’amortit sur 3 à 4 ha au moins.
Figure 7. Représentation schématique d’un réseau d’irrigation localisée (Phocaides, 2008).
- Mélangeur d’engrais : C’est une cuve étanche (50 à 300 litres) dans laquelle sont solubilisés
les engrais (solide mais soluble). Elle est montée en dérivation sur la conduite principale
d’irrigation, à l’amont du filtre à tamis. La solution fertilisante ressort par le haut de la cuve et
est injectée dans la conduite d’irrigation. Outre son usage pour la fertigation, ce système est
utilisé pour nettoyer les conduites d’irrigation à travers l’injection de produits acides.
Le bac de préparation de la solution nutritive est surélevé. Il est muni d'un robinet monté à
une dizaine de centimètres du fond du réservoir pour empêcher les précipités de passer au bac
suivant. Un autre bac, récoltant le surnageant, doit être positionné au-dessous du premier ; on
prendra soin pour faire passer le surnageant de la SN à travers un filtre à tamis très fin.
La pompe doseuse est un appareil qui aspire et refoule alternativement une quantité
constante et connue de solution fertilisante dans la conduite d’irrigation. Le fonctionnement
du dispositif nécessite une pression minimale de 2 bars (Figure 8).
Ouvrage de tête
Conduite principale
Conduite secondaire
Bornes
Distributeurs
Adducteurs
Conduites
latérales
34
Figure 8. Représentation schématique d’un réseau d’irrigation localisée montrant l’installation
du système d’injection des engrais (Phocaides, 2008).
Photo 9. Matériel d’injection des engrais (Phocaides, 2008).
3.2. Conduites de distribution de l’eau vers le champ
Ce système est constitué par des canalisations primaires, secondaires, des rampes
d’irrigation (Figure 7) et des bornes de distribution de l’eau. Les conduites primaires véhiculent
l’eau de la station de pompage vers les conduites secondaires, qui à leur tour conduisent l’eau
vers les rampes d’irrigation, encore appelées portes-distributeurs d’eau. On y trouve les :
35
- Les conduites principales : Elles sont généralement enterrées, de diamètre compris entre 63
et 160 mm selon la dimension de l’exploitation.
- Les conduites secondaires : sont branchées sur la conduite principale et sont de même type.
- Les bornes de prise : Elles sont branchées sur les conduites principales ou secondaires en
amont de la parcelle et permettent la sectorisation de l’irrigation (équipées d’une vanne de
sectionnement). Elles fournissent une partie ou la totalité de l’écoulement aux adducteurs.
Les conduites sont fabriquées en polyéthylène basse et haute pression ou en polypropylène.
Ce dernier est utilisé pour les conduites de faible diamètre.
- Les adducteurs (conduites d’alimentation): ce sont des conduites de diamètre compris entre
50 mm et 75 mm qui sont connectées aux bornes et posées généralement en surface le long
des limites de la parcelle pour alimenter les conduites latérales. Tous les types de matériaux à
conduites disponibles peuvent convenir.
- Les conduites latérales ou rampes d’irrigation: ce sont des tuyaux d’irrigation en
polyéthylène noir flexible, placés à des endroits fixes, le long des lignes de culture et
perpendiculairement aux adducteurs. Longueur maximale souhaitée de 100m.
- Les distributeurs de l’eau : sont insérés dans les rampes à intervalles réguliers. L’eau y entre
avec une pression de 1 bar et en ressort sous pression.
*faible débit (1 à 8 l/h): ce sont des goutteurs simples, extensibles ou auto-régulants.
*débit élevé (20 à 60 l/h), l’eau y passe sous forme de jet (mini-diffuseurs ou ajutages calibrés).
Le coefficient d’uniformité de distribution de l’eau est un indicateur de performance fiable à
travers lequel on cherche autant que possible l’équité d’application de l’eau (Zayani, 1996). Il
est défini pour l’eau ‘pure’ par CU (%) = Qmin/Qmoy où Qmin est la lame d’eau moyenne infiltrée
sur le quart de l’unité d’arrosage le moins desservi en eau et Qmoy est la lame d’eau moyenne
infiltrée sur toute la surface irriguée.
Cependant, comme en fertigation, l’uniformité de distribution des engrais est liée à celle de
l’eau, on étendra cette notion à l’eau enrichie en fertilisants quoique la masse volumique et la
viscosité de l’eau changent en fonction de la concentration de la solution nutritive, et ce en
absence de résultats expérimentaux.
Pour mesurer le coefficient d’uniformité, on installe un récipient sous le goutteur qui sera
contrôlé pendant un temps donné mesuré par un chronomètre. Le goutteur débite une
quantité d’eau mesurée par éprouvette. Ainsi connaissant le volume d’eau délivré dans un
temps donné on détermine le débit d’un goutteur (l/h).
Les goutteurs qui seront contrôlés sont pris au moins sur 4 rampes : la première, la dernière,
celles situées au 1/3 et au 2/3 de la longueur du porte rampe.
Test d’uniformité des goutteurs
Rampe 1
Rampe 2
Rampe 3
Rampe 4
Je prends le débit de 4 goutteurs / rampe (16 goutteurs)
1ier goutteur
1/3
2/3
Dernier
36
CU = Qmin / Qmoy des 16 goutteurs
Q est la moyenne des 4 valeurs les plus faibles (au niveau de chaque rang de goutteur : premier-
au 1/3 – au 2/3 – le dernier).
CU > 90 : Bonne uniformité
CU < : 70 chercher les causes
CU compris entre 70 et 90 : nettoyer le réseau.
-Colmatage physique : purger in situ sinon démonter et nettoyer le réseau.
-Colmatage chimique : nettoyer à l’acide nitrique ou phosphorique à 2-5 pour mille
-Colmatage organique : nettoyer à l’eau de javel : 1-5 mg/l eau
Figure 9. Détermination de l’uniformité de distribution de l’eau fertilisée (Zayani, 1996 ;
CEMAGREF, 1990).
3.3. Matériel utilisé pour l’injection des éléments minéraux
L’injection se fait par un matériel d’injection qui peut être un dilueur, une pompe doseuse ou
un injecteur Venturi (Papadopoulos, 1996).
-Le dilueur (fermé)
C’est un réservoir étanche et résistant à la pression du système. Il est monté en dérivation sur
la conduite d’alimentation de l’ouvrage de tête, à l’amont du filtre à tamis. Il est réglé par la
pression différentielle créée par une vanne partiellement fermée, placée sur la conduite entre
l’entrée et la sortie du réservoir. Une partie du débit est dirigée vers la conduite d’entrée du
réservoir, où il se mélange avec la solution de fertilisants, puis la dilution est injectée dans le
système. Les taux de dilution et d’injection ne sont pas constants. La solution fertilisante sort
37
du haut du réservoir, qui doit être rincé après chaque opération. Ce dispositif a un faible coût,
et sa fabrication est aisée.
-L’injecteur Venturi
Cet injecteur fonctionne grâce à une différence de pression entre l’entrée et la sortie de
l’injecteur. Il est installé sur une dérivation placée sur une cuve ouverte contenant la solution
de fertilisant. Le taux d’injection varie avec les variations de pression. Les pertes de charge
dues à la friction sont d’environ 1 bar. Les injecteurs sont en plastique avec des taux d’injection
qui varient de 40 à 2000 litres/heure. Le dispositif n’est pas couteux et facile à installer.
Cependant, la variation du taux d’injection peut compromettre l’uniformité de distribution des
engrais surtout si la solution fertilisante va desservir plusieurs secteurs. Dans ce cas, il est
nécessaire de déterminer la durée d’un poste pour atteindre l’uniformité de distribution
escomptée à partir de l’équation suivante : l’équation de dilution de Bresler est :
C(t)= Co (Q2/Q1) exp(-(Q2/V)t)
ce qui donne t = (V/Q2) Ln ((Co/C). (Q2/Q1))
avec:
C(t) : concentration dans le réservoir à l’instant t (h) en kg/m3
V : volume du réservoir (m3)
Q1 et Q2 (m3/h) : Débits entrée et sortie du réservoir.
Co et Ct : les concentrations initiale et à l’instant t dans la cuve.
-La pompe doseuse
La pompe est activée par la pression de l’eau dans le système et peut être directement
installée en ligne. L’écoulement de l’eau dans le système active des pistons qui permettent à la
pompe d’injecter la solution d’engrais stockée dans une cuve (ouverte) dans l’eau d’irrigation,
tout en maintenant un taux d’injection constant. Ces injecteurs sont plus chers que les
injecteurs Venturi et fabriqués de matière plastique résistante et durable. Les pompes peuvent
être électriques ou hydrauliques ou électromagnétiques à commande électronique.
38
4. Les engrais utilisés en fertigation
4.1. Définitions
La solution mère est la solution fertilisante ou solution nutritive qui sera injectée. La
solution fille est l’eau d’irrigation fertilisée. La solution mère doit avoir un pH acide variant
entre 5 et 6. L’acidité produite par diverses formes d'azote varie selon le type d’engrais, l’eau
d’irrigation et le type de sol. Une vérification du pH du sol doit se faire au début et à la fin de la
saison d’irrigation.
La concentration de la solution mère est définie par la masse d’engrais dissoute (g) par unité
de volume de la solution mère (litre).
Le taux d’injection (litre/m3) est défini par le rapport de débit de la pompe doseuse (l/h) par le
débit de la conduite d’irrigation (m3/h).
La salinité de l’eau d’irrigation fertilisée est le produit de la concentration de la solution mère
et du taux d’injection (l/m3 ou pour mille). Il est recommandé de veiller à ce que la salinité
reste inférieure à 4g/litre. L’irrigation fertilisante est déconseillée lorsque la conductivité
électrique de l’eau dépasse 3 dS/m.
4.2. Formulation des engrais
Les engrais sont formulés en fonction de leur richesse en Azote (% N), en phosphore (%
P2O5), en potasse (% K2O) et en magnésie (%MgO). A titre d’exemple un engrais dosé 8-4-12
apporte 8% d’azote, 4% de P2O5 et 12% de K2O; 100 Kg de cet engrais procure 8 kg d’azote, 4
kg de P2O5 et 12 Kg de K2O.
4.3. Types et formes d’engrais
Les engrais utilisés en fertigation et leurs caractéristiques sont portés au Tableau 17. Le
choix des engrais à utiliser dépend de la dynamique des éléments minéraux qui le constituent,
de la forme sous laquelle il est présenté (NO3- et NH4+ pour N, H2PO4- ou HPO42- pour P), de sa
solubilité, du prix et de sa compatibilité avec d’autres engrais, sachant que l’excès d'un
élément risque de bloquer un autre élément, qui devient alors peu disponible à la plante
malgré sa présence dans le sol (cas de l'antagonisme K/Mg et K/Ca). Ce blocage peut être
direct ou induit, par exemple par une augmentation du pH. Il est impératif de choisir des
engrais hydrosolubles (solides ou liquides), compatibles et qui n’inter-réagissent pas.
Exemple
La fertigation ammoniacale fait augmenter la concentration en ions hydroxydes dans l’eau. Il
s’en suit une augmentation du pH, avec une précipitation possible du calcium et du
magnésium qui risque de colmater les distributeurs et les canalisations (Zayani, 1996).
Remarques
- Le nitrate de potassium (13-0-46) a une faible solubilité avec un ratio 1:8 (1 kg d’engrais sec
dans 8 litres d’eau).
- La solubilité du chlorure de potassium (0-0-62) est de 1:3, tandis que celle du nitrate
d’ammonium (34-0-0) et du nitrate de calcium (15,5-0-0) est d’environ 1:1.
-Les engrais secs phosphoreux ont une plus faible solubilité que les nitrates, soit environ 1:2,5.
4.3.1. Les engrais azotés
Les engrais azotés et potassiques ne posent généralement pas de problèmes d’injection.
L’urée, le nitrate d’ammonium et le nitrate de potasse sont les engrais les plus utilisés
(Sánchez-Zamora et Fernández-Escobar R., 2002 ; Morales-Sillero et al., 2007). Sont aussi
39
utilisés le Mono-phosphate d'ammonium et le Di-ammonium phosphate. L’ammonium se fixe
sur les particules du sol, mais il présente l’avantage de se convertir facilement en nitrate, qui
est très mobile et facilement absorbé par les racines. Les apports azotés sont d’autant plus
bénéfiques qu’ils sont fractionnés.
Pour avoir une bonne efficacité de l’engrais azoté, il est nécessaire d’adapter la forme
d’azote utilisée à la période d’épandage. Les engrais riches en nitrate sont à employer en avril
lorsque l’olivier est en pleine végétation. On évitera aussi les lessivages par la pluie. L’azote
ammoniacal et l’urée sont à privilégier à la sortie de l’hiver ; ils seront assimilés après
transformation par la faune microbienne du sol. En fertigation, il est conseillé d’appliquer 25%
de la quantité annuelle d’azote après la nouaison pour favoriser la production de l’année
suivante (Haifa, 2016).
Figure 10. Choix de l’engrais en fonction du stade phénologique (Le verge, 2017).
NB : L’ammoniaque c’est NH4+OH- n’est pas utilisée. La forme ici dans ce tableau en bleu c’est
l’ammonium NH4+
Remarque :
La figure 10 est élaborée pour les pays nord-méditerranée. Il faut donc prévoir un décalage des
stades de 2-3 semaines vers le début de l’année pour l’Afrique du Nord.
4.3.2. Les engrais phosphatés
En fertigation on utilise le mono-phosphate d'ammonium MAP (12% N et 61% P2O5), le di-
ammonium phosphate DAP (21-53-0) et le mono-potassium phosphate (0-34-52). Le ratio P:N
doit être égal à 1:3. Si le phosphore est apporté sous forme de MAP, une grande partie de N
doit être fournie sous forme nitrique (le MAP apporte de l’NH4+N). Lorsque l’eau est dure
(calcaire), le phosphore peut précipiter, dans ce cas on peut utiliser l’acide sulfurique pour le
solubiliser ou du MAP (engrais phosphaté acidifiant).
40
Tableau 17. Principaux engrais utilisés en fertigation, leurs formules chimiques, leur composition
en éléments minéraux (en % du poids) et leur effet sur le pH du sol.
Engrais
Formule
chimique
N (%)
%P2O5
%K2O
%CaO
%S
Effet sur
pH
Solubilité
(g/l 25°)
Engrais azotés
Urée
CO(NH2)2
46
-
119
Nitrate
d’ammonium
NH4NO3
33,5
-
1190
Nitrate de
calcium
Ca(NO3)2
16
34
++
2190
Nitrate de
potassium
KNO3
13
46
0,5
0,2
++
335
Nitrate de
magnésium
11
2600
Sulfate
d’ammonium
(NH4)2SO4
21
24
---
760
Acide nitrique
HNO3
12,6
Liquide
Engrais potassiques
Chlorure de
potasse*
KCl
60
=
350
Sulfate de
potassium
K2SO4
48-50
=
125
Engrais phosphatés
Acide phosphorique
52
Liquide
Mono-
ammonium
phosphate
(MAP)
NH4H2PO4
12
61
2
1à3
---
280
Di-ammonium
phosphate
(DAP)
24
60
400
Super
phosphate
simple (SPS)
-
18
18-21
12
=
Acides composés
4-8-12
4
8
12
Liquide
12-4-6
12
4
6
Liquide
6-8-8
6
8
8
Liquide
Papadopoulos (1996)
Remarque : Le MAP, le nitrate de potassium et le nitrate de calcium sont des engrais composés.
* Précaution : peut causer la toxicité par accumulation du chlore.
NB : 1 unité d’azote correspond à un 1 kg d’azote à l’hectare. 1U = 1kg/ha
41
4.3.3. Les engrais potassiques
Le nitrate de potasse, le sulfate de potasse et le mono-potassium phosphate (0-34-52)
sont les engrais potassiques les plus utilisées en fertigation (Ben Mimoun et al., 2004). Le
Nitrate de Potasse (13-0-46) est très soluble. Il apporte l’azote sous forme de nitrate, qui a un
pouvoir nutritif élevé à tous les stades de développement de l’olivier. Cependant sa présence
fait augmenter le pH du sol. Le Sulfate de Potasse (0-0-50) a par contre une faible solubilité. Le
Phosphate mono-potassique (0-32-54) est très soluble, apportant une grande quantité de
phosphate et a un pouvoir nutritif élevé à tous les stades. Le Chlorure de potassium (0-0-60)
peut conduire à une toxicité en chlorure par son accumulation dans la zone des racines si les
chlorures n’ont pas pu être lixiviés faute de quantité suffisante d’eau.
Dans les plantations qui n’ont pas été amendées en potassium, il est nécessaire
d’appliquer deux fois plus de K que de N. Si l'eau d’irrigation est riche en Ca et Mg, une
majoration des apports potassiques est nécessaire. Des quantités adéquates de K
augmenteraient la tolérance de l’olivier à la sécheresse (Restrepo et al., 2002).
4.3.4. Les engrais calciques
Le nitrate de calcium (15.5-0-0-26.5) est un fertilisant très soluble qui peut être utilisé en
fertigation. Une application de 5–10 kg CaO/arbre, permet d’éviter les déficiences, à condition
que le pH soit convenable pour éviter sa précipitation.
4.3.5. Les engrais soufrés
Le soufre peut être fourni sous forme de sulfate d’ammonium ou de sulfate de potassium.
Les engrais soufrés réduisent le pH du sol.
4.3.6. Les engrais magnésiques
Si l'eau d'irrigation est riche en sulfate, il est préférable d'apporter Mg sous forme de
nitrate de magnésie.
La minéralisation des engrais dépend de l’activité microbienne du sol. C’est pourquoi il est
recommandé ‘d’incorporer’ les engrais de manière superficielle et de stimuler l’activité
microbienne du sol par des apports réguliers de matière végétale (compost pas trop mûr,
broyat de bois de taille, engrais vert, fumier pailleux).
L’apport d’engrais doit être suffisamment anticipé pour que les éléments nutritifs soient
libérés aux périodes requises. L’olivier assimilera un engrais minéral s’il est solubilisé.
L’efficacité des engrais organiques dépend de l’état hydrique du sol. Les apports précoces, à la
sortie d’hiver, permettent de libérer les éléments nutritifs au printemps. Les engrais
organiques à libération rapide peuvent être épandus après la seconde quinzaine de mars. La
régularité des apports optimise le rendement et la qualité des olives et de l’huile.
Les éléments nutritifs sont assimilés à des pH préférentiels (Tableau 18). Le pH optimal est
compris entre 6,3 et 7,2. La rectification du pH évite les précipités de phosphate de calcium, de
sulfate de calcium, de carbonate de calcium et de magnésium, qui obstruent les orifices des
goutteurs. En sols à pH acides (pH < 7), l’emploi des engrais acidifiants (azote ammoniacal,
urée) doit être limité au risque d’accroître la décalcification du sol. Dans ces sols, et pour la
fumure phosphatée, les engrais riches en calcium sont préférables comme le phosphate
naturel. Le recours à un amendement calcique est indispensable si le pH < 6. En sols à pH
basique (pH > 7), les engrais organiques ou les engrais minéraux solubles sont à privilégier. En
sol à pH très alcalin (pH > 8), les engrais organiques à action acidifiante sont à préférer ainsi
que les engrais minéraux acidifiants comme le superphosphate, le phosphate d’ammoniaque,
l’azote ammoniacal, l’urée... Le pH peut être baissé en apportant l’azote sous forme de
(NH4)2SO4.
42
Tableau 18. PH préférentiels pour l’assimilation des éléments nutritifs chez l’olivier.
Elément nutritif
pH préférentiel d’assimilation
Azote
6-8
Acide phosphorique
6,25-7
Potasse et soufre
6-8,5
Calcium et Magnésium
7-8,5
Fer et Manganèse
4,5-6
Bore, Cuivre et Zinc
5-7
Molybdène
7-8,5
Source : file:///C:/Users/hp/Desktop/FERTIGATION/Les engrais en oléiculture.html.
La quantité d’engrais à appliquer est répartie tout au long du cycle de croissance en
fonction des besoins spécifiques de chaque stade phénologique. Il est primordial de
comptabiliser à chaque étape les quantités de nutriments et de sels naturellement présents
dans l’eau d’irrigation et celles du sol.
5. Efficience d’utilisation des engrais
L’efficience d’utilisation des engrais (EUEn) est tributaire du régime hydrique adopté étant
donné que la mobilité des engrais est largement conditionnée par l’état hydrique du sol et de
la plante (Zayani, 1996). Une eau qui percole emporte avec elle des nutriments : c’est le
lessivage. L’urée et les nitrates suivent la migration de l’eau dans le sol, ce qui les rend
hautement vulnérables aux pertes par percolation. Par ailleurs, l’ammonium est souvent fixé
dès qu’il est en contact avec des particules argileuses qui ont une forte capacité d’échange
cationique, rendant difficile son absorption par les racines. Ceci engendre ‘la perte’ de ces
nutriments et la baisse de l’EUEn. De plus, certains éléments comme l’ammonium sont sujets à
des pertes par volatilisation lorsqu’ils sont présents au voisinage de la surface du sol (en zones
arides et semi-arides) et d’autant plus que la température s’élève. Ces pertes sont importantes
en irrigation par aspersion et atténuées en fertigation localisée. Des essais de traçage
isotopique ont montré que seulement 50-70% de l’azote appliqué est utilisé, le reste étant
volatilisé, lessivé ou dénitrifié (Zayani, 1996).
Un réseau d’irrigation bien dimensionné et une conduite d’arrosage bien raisonnée, réduisent
ces pertes et engendrent une uniformité de distribution adéquate de l’eau et des fertilisants.
Recommandations :
- Fractionner les apports autant que possible pour réduire les lessivages,
-Apporter aux stades phénologiques où les besoins sont les plus élevés (prélèvement rapide
des engrais),
-Adopter le pH adéquat (correction) pour solubiliser les engrais et éviter les précipitations
-Ne pas associer les engrais qui précipitent et nettoyer les conduites à la fin de chaque saison.
-Utiliser l’irrigation localisée pulsée qui consiste à appliquer l’eau par intermittence ce qui
permet une meilleure aération du sol (arrêt de l’application de l’eau fertilisée) et d’atteindre
un bulbe d’humidification plus large (au moins de 33%) que ceux observés en irrigation
continue (bien choisir l’écart entre goutteurs et celui séparant les rampes afin d’avoir une
couverture maximale).
-Tester l’uniformité au moins une fois par saison et contrôler les fuites.
43
6. Elaboration d’un programme de fertigation
La fertigation azotée et potassique est facile à conduire dans la majorité des cas en raison
de la mobilité des éléments N et K et de la solubilité des engrais azotés et potassiques.
Cependant, si le potassium est adsorbé au sol, ce qui rend son lessivage plus difficile, l’azote
est facilement lixivié. C’est pourquoi, les besoins en P et en K s’expriment après que les
besoins en azote soient satisfaits. La fertigation phosphatée est plus difficile à mener vus les
risques de précipitation en sols ayant des teneurs élevées en calcium et en magnésium ou
irrigués avec des eaux riches en Ca et Mg, pouvant aboutir à un colmatage des conduites et
des goutteurs.
L’établissement d’un programme de fertigation doit tenir compte de ces faits. Elle se fait sur la
base des quantités de minéraux exportés annuellement (Xiloyannis, 2002 ; Gargouri et Mhiri,
2003 ; Masmoudi-Charfi et Ben Mechlia, 2009), en utilisant soit la méthode des équilibres soit
celle des normes (http://www.omafra.gov.on.ca/french/crops/hort/soil_fruit.htm#
AssessingNutrientNeeds, 5 Juin, 2020).
6.1. Méthode des équilibres
Cette méthode est basée sur l’établissement des équilibres entre les éléments fertilisants
(azote, phosphore, potassium, calcium et magnésium) selon les exigences de la culture, sa
physiologie et son stade de développement. Les équilibres sont obtenus sur la base de la
fertilisation azotée. L’azote est désigné par le chiffre 1, le phosphore est exprimé en termes
de P2O5 et le potassium en termes de K2O. Le calcium et le magnésium sont exprimés
respectivement sous forme de CaO et MgO.
6.2. Méthode des normes
Elle consiste à donner à la plante des solutions nutritives qui ont été établies sur la base
des besoins en fonction des stades végétatifs. Ces solutions ont un niveau de fertilité croissant
en azote ammoniacal et nitrique (10, 12, 14,4 et 18 milliéquivalent par litre). Les quantités
d’éléments présents dans le sol et dans l’eau d’irrigation doivent être soustraites des doses
préconisées.
7. Préparation de la solution nutritive (solution mère, solution fertilisante)
7.1. Terminologie et formules
La solution mère est la solution nutritive ou fertilisante qui sera injectée dans le réseau de
distribution. Elle est caractérisée par sa concentration :
C (g/L) = m/V
Avec :
m : la masse d’engrais dissoute dans le volume d’eau V de la solution mère.
La solution fille est constituée par l’eau d’irrigation enrichie par injection de la solution mère.
Sa salinité doit être inférieure à 4g/L. Elle est calculée par :
Ce (g/m3) = C (g/L) x Tx (L/m3)
Avec :
Tx : le taux d’injection défini par : Tx (L/m3) = q/Q
44
Avec,
q : débit de la pompe doseuse (L/h) et Q le débit de la conduite principale (m3/h).
La quantité d’engrais à dissoudre dans le dilueur de volume Vc (L) est donnée par :
mengrais (kg) = Ce Q V / q
Source: Zayani (1996).
Ce : concentration en g engrais/l de la solution fille.
V : volume du réservoir en litre.
Q et q : les débits d’irrigation et d’injection en l/h.
7.2. Mode opératoire
Les solutions nutritives utilisées en fertigation se basent sur l'estimation des besoins de
l’arbre en éléments nutritifs en fonction de son stade physiologique, de la fertilité du sol, des
conditions climatiques et de la charge en fruits. Les éléments sont exprimés en N, P2O5, K2O,
CaO et MgO et les quantités à fournir en kg/ha. La solution mère (concentrée nécessitant une
dilution) est préparée 1 à plusieurs fois par jour; parfois, 1 fois /10 jours (définir la cadence de
préparation de la solution nutritive selon la taille du réservoir et la superficie à fertiguer).
L’apport de NPK nécessite en général un seul bac. Si l'apport concerne aussi Ca et Mg, il est
préférable d’utiliser un 2ème bac. Le calcium est ajouté séparément des sulfates et des
phosphates. Les engrais sont versés dans l’eau du bac par ordre d’alcalinité et de solubilités
croissantes (Zayani, 1996).
Bac 1 :
-remplir le bac d’eau au 1/3. L’utilisation d’une eau tiède (20-25 °C) facilite la solubilisation des
engrais.
-y ajouter l'acide nitrique (en cas de nécessité de réduire le pH),
- pré solubiliser les engrais
- ajouter les engrais à utiliser un par un, dans l'ordre suivant, en mélangeant :
✓ phosphates (puis ajouter de l'eau au bac, 10- 20 litres),
✓ nitrate de potasse, puis ajouter de l'eau au bac, 10- 20 litres),
✓ nitrate de magnésie puis ajouter de l'eau au bac, 10- 20 litres),
✓ sulfate de magnésie (+ eau),
✓ sulfate d'ammoniaque (+ eau),
✓ sulfate de potasse (+ eau),
✓ oligoéléments si nécessaire.
-Compléter le bac avec de l'eau.
Bac 2 :
-Remplir le bac d’eau au 1/3 de son volume.
-Ajouter l'acide nitrique.
- Pré solubiliser le nitrate de magnésie et l'ajouter. Ajouter de l'eau (10- 20 litres).
- Ajouter le nitrate de calcium pré solubilisé. Ajouter de l'eau au bac (20- 30 litres),
-Ajouter le nitrate de potasse
- Ajouter les oligoéléments
- Compléter le bac avec de l'eau.
- Ne jamais ajouter de sulfate ni de phosphates dans ce bac.
Remarques
-La première phase d'une culture (phase végétative) nécessite plus de N et de P que de K. Les
phases reproductives nécessitent plus de K que de N ou de P.
45
-Le sulfate de potasse est l'engrais qui pose le plus de problème à cause de sa faible solubilité
et les fortes doses à apporter. Il est préférable de l’apporter à part. Toutefois son mélange
avec les autres engrais s’impose pendant les périodes de grossissement des fruits ; la potasse
n'est pas injectée seule, mais en mélange avec les autres engrais. Il est nécessaire alors de
respecter les équilibres entre N, P et K par exemple (1 N- 0,2 P2O5- 2 à 2,5 K2O). Le chélate de
fer doit être apporté en dernier lieu.
-Il existe des solutions ‘fille’ prêtes à l'emploi’ préparées pour de petites superficies.
-A titre indicatif : Un bac de 1 m3 peut couvrir de 200 à 300 m².
Les recommandations doivent être considérées comme un guide général uniquement.
Le programme exact de fertigation doit être déterminé en fonction des besoins spécifiques
de la culture.
Il n'y a pas de solution nutritive ‘passe par tout’. Il faut raisonner la composition des
solutions nutritives en fonction des données du milieu et des contraintes.
8. Pilotage de la fertigation
Une fois la méthode d’apport des engrais est fixée, la solution d’engrais est injectée. Le
débit de l’injecteur doit être réglé de manière à maintenir un taux constant durant toute
l’irrigation. Il est nécessaire de commencer l’irrigation par de l’eau claire afin de chasser l’air
du réseau et d’imbiber le bulbe. Ensuite, l’irrigation est poursuivie par l’injection d’engrais en
veillant à ce que la concentration des engrais dans l’eau d’irrigation ne dépasse pas 2‰. Une
fois l’injection des engrais terminée, l’irrigation continue par de l’eau claire en quantité
suffisante pour garantir le passage complet du fertilisant vers la zone radiculaire et de
l’évacuer des rampes d’irrigation. Certains recommandent de commencer l’irrigation par une
eau claire, puis de ferti-irriguer, l'apport des engrais est laissé à la fin de l'irrigation afin d'éviter
leur lessivage.
La fertigation peut est pilotée / contrôlée (chaque semaine) par la conductivité électrique
(CE) du sol et de la solution nutritive (SN) qui est ajustée en fonction des besoins du stade de
développement. Les faibles valeurs de CE (mesurée au conductimètre) sont réservées à la
croissance végétative (1,5 à 1,8 mS/cm en cours de végétation) et les plus élevées au
grossissement des fruits (2 à 2,5 mS/cm).
Des contrôles périodiques du pH et de la CE de la solution sortante des goutteurs doivent
être effectués à l’aide d’un pH-mètre et d’un conductimètre. Le contrôle concerne aussi la
vérification de l'état du matériel d'injection ou de distribution, celui des filtres (par mesure de
la pression au moyen de manomètres). Le nettoyage des filtres est important à la fin de
chaque campagne ou en cas de présence de précipités dans le réservoir. L’injecteur doit être
placé en amont du filtre de sorte que, s’il se forme des précipités, ceux-ci seront interceptés
avant que l’eau ne soit acheminée dans les canalisations d’arrosage.
46
9. Unités et conversions
La correspondance des unités et les conversions sont portées aux Tableaux 19 et 20.
Tableau 19. Correspondance des unités.
1 méq (milliéquivalent)
mg
1 mmol
mg
Poids de l’ion
NH4+
14 mg N
NH4+
14 mg N
18 mg NH4+
NO3-
14 mg N
NO3-
14 mg N
62mg NO3-
H2PO4-
31 mg P
H2PO4-
31 mg P
99 mg H2PO4-
HPO4--
15.5mg P
HPO4- -
31 mg P
98 mg HPO4--
Ca++
20 mg Ca
Ca++
40 mg Ca
40 mg Ca++
K+
39 mg K
K+
39 mg K
39 mg K+
Mg++
12 mg Mg
Mg++
24 mg Mg
24 mg Mg++
SO4--
16 mg S
SO4 - -
32 mg S
96 mg SO4--
Na+
23 mg Na
Na+
23 mg Na
23mg Na+
Cl-
35,5 mg Cl
NB : 1 méq donne une milli mole d’un ion monovalent ou une demi-milli mole d’ion bivalent.
Tableau 20. Table de conversion des éléments minéraux, de la forme élémentaire à la forme
oxydée (gauche) et inversement (droite).
De
à
multiplier par
De
à
multiplier par
P
P2O5
2,29
P2O5
P
0,44
P
PO4
3,06
PO4
P
0,32
H3PO4
H2PO4
0,98
H2PO4
H3PO4
1,38
K
K2O
1,20
K2O
K
0,83
Ca
CaO
1,40
CaO
Ca
0,71
Mg
MgO
1,60
MgO
Mg
0,60
S
SO3
2,50
SO3
S
0,40
S
SO4
3,00
SO4
S
0,33
N
NH4
1,28
NH4
N
0,82
N
NO3
4,43
NO3
N
0,22
Source : Papadopoulos (1996).
10. Précautions à prendre
- Les équipements d’irrigation doivent être fabriqués en matériaux résistants à la corrosion.
- Le stockage des engrais à proximité des produits inflammables, des métaux, de la paille…
peut présenter des risques d’explosion ou d’inflammation.
- Le stock de solution d’engrais doit être toujours dissout dans un contenant séparé, puis versé
dans le réservoir d'amorçage.
- Les engrais solides doivent être très solubles et ne doivent pas former d’écume ni de
sédiments susceptibles de causer des problèmes de colmatage des distributeurs lorsqu'ils sont
dissouts dans l'eau.
- La solution doit toujours être agitée et bien brassée.
- Il faut retirer régulièrement les boues déposées au fond du réservoir.
- Le tuyau d’aspiration de l’injecteur ne doit pas reposer sur le fond du réservoir.
- L’eau chaude peut aider à dissoudre l’engrais desséché.
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- Il ne faut pas utiliser les phosphates et les acides avec les sels de calcium ou de magnésium
ou avec les eaux riches en ces éléments. Les eaux riches en calcium (> 70 mg/l) sont
incompatibles avec les sulfates.
11. Entretien du réseau
La purge du réseau est effectuée lors de la 1ière mise à l’eau.
Nettoyer les rampes en cours de campagne si nécessaire. Les pompes doseuses peuvent être
utilisées pour l’injection de l’acide nitrique ou chlorhydrique dont la concentration en acide
pur est de 2 à 5 pour mille pour prévenir le colmatage chimique des distributeurs (Zayani,
1996).
Nettoyage des filtres:
➢ Filtre à sable. Si la différence de pression (Pentrée – Psortie) au niveau du manomètre > 0,5
bar faire un contre lavage dans le sens inverse de l’eau. Changer le filtre à sable une fois / an
➢ Filtre à tamis (métallique) : brosser avec une brosse métallique. Si les mailles sont
altérées, changer le filtre.
La fertigation peut être complétée par des pulvérisations d'engrais foliaires à base
d'oligoéléments lors des stades (floraison-nouaison) et par un apport hivernal de fumier.
48
Chapitre 3
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LA FERTILISATION FOLIAIRE
1. Introduction
L’application d'engrais foliaires permet de compléter les besoins en nutriments en période
de pointe, rapidement et efficacement en augmentant l’efficience d’utilisation de l’azote
(EUN), en particulier et de réduire le coût de la fertilisation en raison de la réduction des
quantités d’engrais utilisées et de la possibilité d’associer les traitements phytosanitaires aux
engrais à pulvériser. L'azote et le potassium sont les éléments nutritifs les mieux absorbés par
le feuillage. La pulvérisation des engrais foliaires sur olivier au printemps et à la fin de l'été
permet d’accélérer la croissance végétative, d'augmenter le rendement en olives et
d'améliorer la qualité nutritionnelle de l'huile. De bons résultats sont obtenus au delà d’une
concentration de 3-4% (urée). Il est recommandé de procéder à ce genre de fertilisation en
dehors des périodes de pluie.
2. Engrais azotés utilisés en application foliaire
Les engrais azotés utilisés en application foliaire sont portés au Tableau 21. L’urée
contient un pourcentage élevé d’azote (46%). Son absorption est rapide (60–70% de l’urée
appliquée peut être absorbée par les feuilles), se produisant au cours des quelques heures qui
suivent son application.
Tableau 21. Engrais azotés utilisés en application foliaire.
Engrais azoté
Composition %
Urée
46%N
Nitrate d’ammonium
33,5%N
Sulfate d’ammonium
20,5%N
Nitrate de potassium
13% N et 46% K2O
Nitrate de magnésium
11%N
Nitrate de calcium
15,5% N et 26,5% CaO
Masmoudi- Charfi et al., (2012).
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3. Facteurs affectant l’absorption foliaire des engrais
Les pulvérisations foliaires présentent l’avantage de donner une réponse rapide et efficace
pour traiter les carences en nutriments (Therios, 2009 ; Policarpo et al., 2008). Le meilleur
moment pour pulvériser l’engrais est tôt le matin ou le soir, lorsque les températures sont plus
faibles et que l'humidité relative de l’air est relativement élevée.
Les pulvérisations foliaires faites sous température élevée et faible humidité causent des
brulures sur le feuillage. L’absorption des engrais pulvérisés est réduite si les oliviers pulvérisés
sont soumis à un stress hydrique (stomates partiellement ouverts).
Les produits humidificateurs ou surfactants améliorent l’absorption des engrais en
augmentant l’humidité autour du feuillage.
L’application des engrais foliaires au printemps après l’apparition des nouvelles feuilles
améliore leur absorption. Lorsque l’application foliaire est faite en automne, la teneur des
feuilles en azote augmente de manière consistante (+50%).
L’absorption de l’urée n’est pas influencée par le statut des feuilles en azote. Sa
translocation des feuilles matures vers les autres tissus végétatifs dans les plantes déficientes
est plus faible que dans les plantes ayant des teneurs suffisantes. Les feuilles âgées absorbent
plus difficilement les engrais. L’urée est véhiculée de manière acropète et basipète, cependant,
la translocation de N-urée aux racines des plantes déficientes est moins efficace que dans les
pousses.
Le type d’engrais et le degré de sa solubilité est déterminant du niveau d’absorption des
engrais.
Photo 10. Pulvérisation d’engrais foliaires sur olivier.
(Source: https://www.google.tn/images-pulvrisation+foliaire+azote+olivier, Juin 2018)
50
Chapitre 4
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VALORISATION DES MARGINES
COMME FERTILISANT NATUREL AU SOL
Les margines sont des effluents générés par l’activité agroindustrielle de transformation
des olives en huile (novembre-janvier). En moyenne 1 m3 de margine est produit par le
pressage de 1 à 1,5 tonnes d'olives. La Tunisie en produit annuellement 800.000 tonnes (0,8
tonne par tonne d’olives triturée) et plus de 10 millions de tonnes sont produites autour du
bassin Méditerranéen (Ben Rouina, 2019).
Cependant, l’écoulement illicite et anarchique des margines dans la nature a généré de
grands problèmes environnementaux (eutrophisation, anoxie, pollution..). Pour résoudre ces
problèmes de pollution et en vue d’améliorer la fertilité des terres agricoles dégradées, des
études de valorisation de ces effluents ont été réalisées. Ainsi, dans de nombreux pays
producteurs d'olives (par exemple, l'Italie, la France), ces déchets sont appliqués en tant
qu'amendements aux sols agricoles selon des exigences spécifiques (Cadillon et Lacassin,
1992 ; Ben Rouina et al., 2015 ; Regni et al., 2017). Une telle application a suscité un intérêt
non seulement en raison de son coût relativement faible (le coût d’une fertilisation classique
est égal au cout d’épandage + stockage des margines), mais aussi pour son potentiel à
améliorer la fertilité du sol.
Exemple :
Par rapport à une fertilisation classique sur oliviers, un apport de 100 m3/ha de margines
correspond à une fertilisation normale en magnésie, élevée en phosphore, très élevée en
potasse, variable en azote mais généralement très élevée. Ces enrichissements justifient
l'intérêt de la valorisation agricole des margines qui peuvent être utilisées comme fumure
d'entretien par épandage sur le sol. Cependant les doses à appliquer doivent être
judicieusement étudiées sur la base des teneurs en potasse.
Remarque :
L'apport d'eau par les margines est négligeable.
Les travaux menés par Cadillon et Lacassin (1992) ont montré que les margines sont des
effluents acides (pH de 4,8) à forte charge saline (conductivité de 10 mS/cm due à la présence
d’ions potassium 8 g/l, chlorures 800 mg/l, calcium 570 mg/l et magnésium 200 mg/l) et à
forte teneur en matière organique (100-150 g/l). Elles contiennent de fortes teneurs en azote
organique et en phosphore (285 mg/l). La fourniture d'azote nitrique par les margines se fait
progressivement par minéralisation lente. Ces composants, minéraux et organiques,
apparaissent sous forme soluble et concentrée ce qui les rend peu épurables, mais, cependant,
valorisables. L’épandage des margines en hiver s’avère peu profitable étant donné que l’azote
peut être lessivé. Ces auteurs suggèrent le stockage des margines (bassin de stockage muni de
pompe) et leur application au mois de février. Après avoir élaboré une étude préalable sur le
sol et défini les précautions à prendre pour éviter sa contamination, celle de la plante
(mouillage des feuilles, application sur une culture en végétation) et celle de la nappe, Cadillon
51
et Lacassin (1992) recommandent son utilisation sur sols à texture grossière. Les sols acides
devront être neutralisés avec de la chaux avant l’épandage des margines du fait de leur acidité.
L’épandage des margines doit être suivi rapidement par un labour d’enfouissement afin de
faciliter l’adhésion des composants des margines aux particules du sol et éviter leur
percolation.
Les travaux menés en Tunisie (Ben Rouina et al., 2015) ont abouti à la mise au point d’une
législation officielle permettant l’épandage de 50 m3 de margines par hectare (Décret 1306 du
26 février 2013) en remplacement des engrais chimiques de synthèse. L’étude a été réalisée
sur 12 ans entre 1995 et 2012 par une équipe multidisciplinaire de chercheurs de l’Institut de
l’Olivier touchant à la plupart des aspects allant de l’agronomie, aux sciences du sol, jusqu’à la
microbiologie et la technologie. Les expérimentations ont été réalisées en plein champs sur
des parcelles d’olivier d’une surface de quatre hectares dans cinq sites géographiques
éloignés. 3 doses de margines ont été testées (50, 100 et 200 m3/ha/an) (photo 11).
Photo 11. Epandage de margines fraîches au moyen du tracteur muni d’une citerne vide fosse
actionnée par la prise de force de celui-ci (Ben Rouina et al., 2015).
Les résultats ont montré que l’utilisation des margines comme fertilisant des terres
agricoles a permis une amélioration du statut organique et minéral du sol. Après dix années
d’utilisation, le taux de matière organique est passé de 0,15 % à 0,74 %. Celui de l’azote total a
évolué de 176 ppm à 425 ppm. De même la vie micro organique du sol a été améliorée en
passant de 2105 à 8106 UFC. La production de l’olivier a augmenté de +27% durant 12
campagnes agricoles.
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Photo 12. Déversement contrôlé des margines dans des espaces de stockage réservés où elles
se dessèchent naturellement. A gauche, bassin en terre filtrante pour la collecte des margines
dans la région de Sfax qui produit en moyenne 350.000 tonnes de margines/an. A droite :
bassins couverts d’une membrane géotherme isolante, de faibles capacités (400 m3) qui
servent de station de relai pour l’approvisionnement des tracteurs d’épandage (Ben Rouina et
al., 2015).
En effet, riches en matières organiques (6 à 14 %) et minérales (1,5 à 4%), les margines
apportent au sol, par mètre cube, entre 75 et 107 kg de matière organique et de 12 à 23 kg de
matière minérale, contenant du potassium (4,32 à 9,8 kg), du calcium (0,34 à 0,62 kg), des
chlorures (1,5 à 1,8 kg) et du sodium (0,75 à 1,6 kg). Malgré son contenu en polyphénols (4,6 à
6,5 kg), son pH acide (4,5 à 5,5) et sa conductivité électrique élevée (12,5 à 18,6 dS m-1), aucun
effet négatif n’a été enregistré aussi bien sur le sol que sur le végétal. De ces résultats, des
gains économiques et environnementaux sont réalisés.
Suite aux résultats obtenus durant ces longues années de recherches et consolidés par le
Projet CFC / IOOC / 04 (Utilisation des margines et des grignons d’olives sur des terres
agricoles), une multitude de journées d’information ont été réalisées au profit des utilisateurs
potentiels (propriétaires des huileries, agriculteurs, …).
Photo 13. Photo illustrant l’amélioration de la biodiversité naturelle dans les oliveraies en
milieu aride tunisien à faibles précipitations (< 250 mm de pluie par an).
(Ben Rouina et al., 2015)
Outre l’amélioration du statut microbiologique des sols induisant une durabilité des
écosystèmes fragiles des zones arides et semi arides, l’épandage direct des margines dans les
oliveraies a amélioré le statut minéral du sol et a induit de ce fait, une meilleure croissance et
production de l’olivier. De plus, l’utilisation rationnelle des margines comme fertilisant naturel
des terres agricoles par épandage a permis la réduction de la pollution générée par l’usage
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massif des engrais chimiques (engrais azotés principalement). Pour réussir cette opération
d’épandage homogène et uniforme sur le terrain, l’industrie métallurgique de fabrication des
citernes, nécessaires pour l’opération, est développée. De plus, l’amélioration des productions
d’olives et de l’huile d’olives a induit une augmentation des revenus des agriculteurs et a
majoré les besoins en main d’œuvre et en outils d’aide, nécessaires pour la récolte des olives.
Les travaux de synthèse de Regni et al., (2017), présentent les avantages et les risques de
l'utilisation des déchets des huileries comme amendement du sol et les recommandations sur
leur application correcte. En effet, les teneurs élevées en phosphore, en potassium et en
matière organique des déchets ont une incidence positive sur les caractéristiques physico-
chimiques du sol, améliorant la productivité des cultures. Cependant, l'application de ces
déchets aux sols devrait être mise en œuvre avec rationalité, étant donné que la forte
concentration de phénols a un effet bactériostatique bien connu sur les microorganismes et un
certain effet phytotoxique sur les cultures. De plus, une gestion prudente de cette application
est requise en raison de la nature acide des déchets et de sa forte concentration en sels.
Photo 14. Epandage de margines fraîches (Ben Rouina et al., 2015).
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54
Chapitre 5
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INJECTION DES FERTILISANTS AU TRONC
1. Principe
La technique consiste à injecter des engrais dans le système vasculaire. Elle est utilisée
lorsque les autres méthodes d’application des engrais n’apportent pas de satisfaction, en
particulier dans le cas de la chlorose ferrique. L