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LA VILLE, JEU DE(S) PROXIMITES

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Abstract

Cet article vise à présenter la manière dont l’École française de la proximité s’est intéressée à l’espace urbain. Tout d’abord, nous expliquons comment la combinaison d’une proximité géographique temporaire, permanente, virtuelle et organisée permet à la ville d’être le lieu par excellence des interactions internes et externes, que ce soit en face-à-face ou via les technologies de l'information et de la communication (TIC). Ensuite, nous présentons l’état de la recherche sur les effets négatifs en ville des différents types de proximité et/ou une combinaison de plusieurs types de proximité. Ainsi, nous mettons en évidence une perte d’altruisme induite en partie par la surcharge environnementale, la déconnexion du temps et de l’espace et la surcharge virtuelle. Nous soulignons également la production d’entre-soi avec la surcharge sociale.
Traduction de lauteur du chapitre intitulé « The city, game of proximity(ies) », écrit par Lise
Bourdeau-Lepage et publié en 2022 dans louvrage intitulé Handbook on Proximity relations
de Torre André et Gallaud Delphine aux éditions Edward Elgard, New-York, pages 430-442.
LA VILLE, JEU DE(S) PROXIMITES
Lise BOURDEAU-LEPAGE
Professeur de géographie
Université Jean Moulin Lyon 3
UMR CNRS 5600 EVS
lblepage@gmail.com
1. Introduction
Il y a vingt ans paraissait un livre collectif intitulé La ville ou la proximité organisée (Huriot,
1998), qui regroupait des visions variées de la ville, appuyées sur des approches théoriques
différentes, voire parfois divergentes. Chaque auteur avait ses propres concepts, sa propre
grille de lecture de la proximité et de l’organisation spatiale. Tous étaient cependant d’accord
sur la nature de la question à résoudre. André Torre soulevait la question « longtemps enfouie
dans les arcanes des théories économiques » : « quel est le lien entre le phénomène
d’agglomération et les relations de proximité ? ». Alain Rallet y posait une question plus
pointue : « quel est le rôle de la proximité géographique dans la coordination des agents
économiques ? » Jean-Marie Huriot y affirmait : « La ville est l’expression par excellence
d’une proximité organisée dans le but de maximiser les interactions ». Les deux premiers
auteurs sont deux des fondateurs de l’école de la proximité. Le troisième, fut souvent
abusivement étiqueté « économie géographique », ou « économie spatiale mainstream ». A
l’intersection explicite ou implicite des phrases citées, on trouve principalement les
concepts suivants : agglomération, proximité(s), et interactions. L’idée première et triviale est
que l’agglomération est recherchée parce que la proximité entre les agents économiques
facilite les interactions. Cependant, à ce moment, la convergence entre ses deux courants de
pensée n’a pas eu lieu.
Il faudra attendre encore dix ans, pour qu’un pont entre l’école de la proximité et l’économie
de l’agglomération voie le jour. Ce sera à Bourdeau-Lepage et Huriot, (2009) de le créer en
présentant un nouveau schéma de pensée des proximités. En 2020, Bourdeau-Lepage et Torre
reprenaient cette idée, faisant encore un pas dans la convergence des idées en signant
ensemble un papier intitulé Proximity and agglomeration, two understanding keys of
city (Section 2). La ville était devenue objet de recherche et de convergence d’idées chez les
proximistes. Aujourd’hui, la pensée urbaine au sein de l’école de la proximité étudie les effets
négatifs de la proximi (Section 3). Les avancées sont encore modestes.
2. Quand l’économie de l’agglomération rencontre l’école de la proximité
Il n’y a rien d’étonnant à ce que l’école de la proximité ait ignoré le phénomène urbain
jusqu’à très récemment. Cet état de fait s’explique en grande partie par la spécialisation des
chercheurs qui ont fondé ce que l’on nomme lécole française de la proximité
1
. Il s’agissait
principalement de chercheurs venus de l’économie industrielle. Ils se sont donc avant tout
focalisés sur le processus de diffusion de l’innovation ou sur l’explication des processus
d’innovation, analysant les clusters. Au croisement de l’économie spatiale et
industrielle (Gilly et Lung, 1998), ils souhaitaient ouvrir la « boîte noire territoire » (Filippi et
al., 2018, p. 941) et revisiter les processus de développement à l’aune des deux dimensions de
la proximité : spatiale et non spatiale.
Dans le même temps, les analyses urbaines se déployaient au sein du courant de pensée de la
nouvelle économie géographique ou de l’économie de l’agglomération, sans pour autant faire
de la proximité le concept cœur de l’analyse. Ainsi, s’est développée, depuis plusieurs
décennies, une économie de lagglomération qui relie très explicitement et formellement, par
des modèles mathématiques, la proximité que procure lagglomération des individus et les
possibilités d’interaction (Combes et Gobillon, 2015 ; Duranton et al., 2015 ; Glaeser, 2010 ;
Fujita et Thisse, 2013 & 2002 ; Rosenthal et Strange, 2001 ; Huriot et Thisse, 2009 ;
Krugman, 1991a et b ; Duranton et Puga, 2004). Ces analyses s’appuient sur les travaux
d’Alfred Marshall, ceux de ses ouvrages Principles of Economics de 1890 et Industry and
Trade de 1919. Alfred Marshall est l’auteur qui a conduit une analyse complète du processus
d’agglomération et a fourni les fondements conceptuels et analytiques de la théorie de
l’agglomération. Il relie la localisation aux conditions physiques : le climat, le sol, la présence
de ressources naturelles (mines, carrières) et l’accessibilité naturelle par terre ou par eau. Mais
avant tout, il analyse la nature et les causes des forces d’agglomération. Il le fait
essentiellement sous leurs deux formes : les rendements croissants, interne à la firme et les
économies d’agglomération, externes à la firme (nommées aussi rendements croissants
externes). Son apport à l’économie urbaine ne s’arrête pas là. Il apporte une analyse nouvelle
de la rente urbaine et de la dynamique des utilisations du sol urbain. Ainsi, Marshall reprend
l’analyse smithienne de la division du travail, et la met en relation avec le développement du
machinisme. Il insiste sur les avantages de la production à grande échelle : « économie de
main-d’œuvre, économie de machines, et économie de matières premières. » (Marshall, 1890,
book IV, chap. XI, p. 232). Il énonce la loi des rendements croissants : « dans les industries
qui ne s’appliquent pas à la production de produits bruts, une augmentation de capital et de
travail donne d’ordinaire une augmentation de rendement plus que
proportionnelle » (Marshall, 1890, book IV, chap. XIII, p. 265). La taille de la firme est une
source d’économies internes à la firme. Mais les avantages de la production en grand peuvent
aussi prendre la forme d’économies externes à la firme, d’économies d’agglomération.
« L’accroissement du montant total de la production augmente les économies qui ne tiennent
pas directement à la situation individuelle des différentes entreprises. Les plus importantes
d’entre elles résultent du développement de branches d’industrie corrélatives qui s’aident
mutuellement les unes les autres, soit qu’elles se trouvent peut-être groupées dans la même
localité, soit en tout cas qu’elles se servent de facilités modernes de communication qu’offrent
la vapeur, le télégraphe et l’imprimerie. » (Marshall, 1890, book IV, p. 264). Marshall fait le
plus souvent allusion aux économies réalisées par la localisation en un même lieu de
nombreuses petites firmes de la même branche de production. Mais il évoque aussi clairement
les avantages de la diversité locale. Il présente plusieurs sources d’économies
1
Appelé aussi « Dynamiques de proximité » en français.
d’agglomération, très fortement liées les unes aux autres : les externalités d’information, les
biens intermédiaires spécialisés, le réservoir de main-d’œuvre, les commerces de biens
coûteux, la diversité des activités de production.
Ces différentes sources se retrouvent toutes dans la littérature postérieure. Isard (1956) ou
Jacobs (1969), à l’instar de Hoover (1937), les classe en économies de localisation et
économies d’urbanisation. Les premières découlent de la spécialisation dans une branche. Les
secondes proviennent de la diversité des activités agglomérées. Elles sont externes aux firmes
ainsi qu’aux secteurs auxquels elles appartiennent, et elles sont internes à la ville. Ce sont des
économies de diversité. Krugman (1991a) retient trois sources qu’il rebaptise : les économies
externes d’information (knowledge spillovers), les liens entre les producteurs de biens
intermédiaires différenciés et les producteurs d’un bien final (variety of nontraded inputs), et
le réservoir de main-d’œuvre (labor pooling). Plus tard, Duranton et Puga (2004) distinguent
trois fondements microéconomiques aux économies d’agglomération : sharing, matching,
learning
2
(production, diffusion et accumulation de connaissance). Ainsi, on comprend que
dans ce courant de pensée, la clef du processus d’agglomération est l’intérêt que les individus
ont à vivre et à produire à proximité les uns des autres, c’est-à-dire les avantages qu’apporte à
chacun la facilité d’interagir avec les autres. La ville en tant qu’agglomération est l’élément
emblématique de la recherche de proximité mais toute agglomération n’est pas une ville.
En 2009, Bourdeau-Lepage et Huriot proposent une grille de lecture des proximités qui mêle
les apports de l’école de la proximité à ceux de l’économie d’agglomération. Ils montrent
ainsi que la ville est le lieu de maximisation de tous les types de proximités : proximité
géographique permanente, proximité géographique temporaire et proximité virtuelle. Ils
soulignent qu’aucune de ces proximités n’est suffisante pour engendrer des interactions et que
rien ne se produit sans proximité organisée.
2.1. Une nouvelle vision de la proximité
Selon eux, l’économie de la proximité et l’économie de l’agglomération ont toutes deux des
visions limitées mais complémentaires de la proximité (Tableau 1). Pour chacune d’entre
elles, la proximité se présente sous plusieurs formes. Les deux ensembles de formes se
croisent, mais ils ne sont pas identiques et leurs fondements théoriques diffèrent.
2
le partage, l’appariement et l’apprentissage.
Tableau 1 : Les trois visions des proximités
Note: *Pour léconomie de la proximité, lentrée ne se fait pas principalement par les moyens dinteraction.
Sources : adapté par lauteur daprès Bourdeau-Lepage et Huriot (2009).
Les interactions humaines sont nécessairement effectuées soit par des contacts en face-à-
face, soit par des contacts à distance par une forme quelconque de technologiques de
linformation et de la communication (TIC). Ces moyens d’interaction sont nécessairement
liés à des réseaux physiques et correspondent à des coûts de transport et de communication.
Cela est vrai pour toutes les formes d’interactions, y compris les échanges de biens, de
services et d’informations. Les interactions ne se produisent vraiment que si les conditions de
la capacité et de la volonté d’interagir sont remplies.
En économie de l’agglomération, les modèles se concentrent sur les moyens d’interaction
essentiellement à travers des variables représentant la distance géographique et les coûts de
transport, et accessoirement en intégrant les coûts des TIC pour les interactions sans contact
direct (Fujita et Thisse, 2009). Mais les conditions relatives à la capacité et à la volonté
d’interagir sont absentes (Tableau 1). L’économie de la proximité définit une proximité
géographique, déclinées sur deux types : l’une relative à la facilité respectivement des
contacts fréquents et l’autre relative aux contacts temporaires en face-à-face (Torre et Rallet,
2005). Elle attribue un rôle majeur à la capacité et à la volonté d’interagir, en définissant la
proximité organisée (Tableau 1). Mais aucun concept spécifique ne correspond à la facilité
des contacts grâce aux TIC dans l’approche de lécole française de la proximi
3
.
À partir des deux approches précédentes, Bourdeau-Lepage et Huriot ont construit un
système conceptuel complet qui reprend les idées des différents courants de pensée et les
adapte afin d’atteindre une cohérence théorique et une unité (Tableau 1).
Ils ont cherché à dépasser les limites des approches excessivement déconnectées et ont
proposé quelque chose de nouveau qui n’est ni de l’économie d’agglomération pure, ni
3
La possibilité d’une coordination à distance (par le biais des TIC) résulte de l’existence d’une proximity
organisée pour les interactionnistes.
Economie de
lagglomération
Economie de la
proximité
Moyens dinteraction*
Contacts face-à-face
fréquents
Distance
géographique
&
Coûts de
déplacement
Proximité
géographique
permanente
Proximités géographique
Proximité géographique
permanente
&
Coûts de transport courte
distance
Contacts face-à-face
occasionnels
Proximité
géographique
permanente ou
temporaire
Proximité géographique
permanente ou temporaire
&
Coûts de transport courte et
longue distances
Contacts par les TIC
Coûts des TIC
Proximité géographique
virtuelle &
Coûts des TIC
Conditions dinteractions
Capacité et volonté
dinteragir
Proximité
organisée, incluant
le cas des
interactions par les
TIC
exactement de l’économie de proximité, bien qu’elle puisse être compatible avec les deux
approches. Considérant que l’économie de proximité fournit actuellement l’analyse la plus
précise et la plus complète des proximités, ils ont intégré ses concepts, c’est-à-dire les deux
proximités géographiques et la proximité dite organisée, mais ils les ont redéfinis en termes de
coûts d’interaction, qui sont les fondements de l’économie de l’agglomération et qui
matérialisent la facilité des interactions. Dans ce contexte, ils ont élargi les concepts de
proximité en ajoutant la notion de « proximité géographique virtuelle », reflétant la facilité
des interactions grâce aux TIC, et qui est implicitement présente dans le modèle Ota-Fujita de
l’économie de l’agglomération (Ota et Fujita, 1993). Considérant que le concept de proximité
organisée proposé par l’économie de proximité est crucial bien qu’il soit étonnamment absent
de l’économie d’agglomération, ils le reprennent et le redéfinissent en termes de coûts de
coordination et de transaction. Ils ont donc construit une vision basée sur les coûts des
proximités à partir du raisonnement suivant.
La raison d’être est la suivante. Nous vivons dans un monde à différents degrés de frictions
spatiales, sociales et économiques. Nous pouvons admettre l’axiome selon lequel toute
interaction entre deux individus nécessite une action afin d’établir un contact et que cette
action nécessite toujours un certain effort et implique donc un certain coût, quelle que soit la
distance géographique, sociale ou économique entre les individus. Étant donné que
l’interaction est souhaitée ou nécessaire et qu’elle implique un coût, plus ce coût est bas, plus
l’interaction est facile à réaliser. La proximité facilite les interactions en réduisant leurs coûts.
Ainsi la proximité et les interactions sont étroitement liées. Mais pourquoi la proximité n’est-
elle pas toujours suffisante pour produire des interactions ? Parce qu’il existe de multiples
formes de proximités et de multiples formes d’interaction, et parce que chaque forme de
proximité favorise une forme particulière d’interaction en réduisant son coût.
4
Par conséquent, la proximité géographique permanente correspond aux coûts d’interaction
entre des lieux géographiquement proches, par exemple à l’intérieur d’une ville, ou d’un
quartier, comme un quartier d’affaires. Il s’agit de coûts de transport intra-urbains, y compris
principalement les coûts de temps et éventuellement d’inconfort, de stress, etc. Ils varient en
fonction de l’état des technologies de transport intra-urbain, de la capacité et de la saturation
des réseaux correspondants. Même dans une ville dense, les distances géographiques sont
courtes, les interactions seront entravées si les réseaux de transport sont congestionnés.
De même, la proximité géographique temporaire est interprétée en termes de coûts
d’interaction entre des sites éloignés et dépend des coûts de transport longue distance (par
exemple interurbains) et des caractéristiques des réseaux correspondants, plus ou moins
rapides et confortables, et plus ou moins encombrés.
La proximité virtuelle reflète la facilité (multidimensionnelle : monétaire, temporelle et
cognitive) de communiquer à distance par le biais des TIC. Elle peut sembler a priori
indépendant de la géographie, mais en fait ce n’est pas le cas, car certains coûts dépendent
clairement de la distance entre les localisations, comme c’est le cas des coûts des câbles de
fibres optiques. Quoi qu’il en soit, la proximité géographique virtuelle dépend des réseaux
physiques entre des endroits éloignés. Il est donc légitimement possible de parler de proximité
géographique virtuelle. Les trois proximités géographiques permanentes, temporaires et
virtuelles sont donc étroitement liées aux réseaux de transport et de communication.
Comme les autres proximités géographiques, la proximité virtuelle n’est ni nécessaire ni
suffisante pour donner naissance à des interactions. Elle est nécessaire pour que les individus
4
Qui sera fonction de la nature des informations que l’on veut diffuser ou obtenir : information codée ou
information tacite. La forme d’interaction dépend de la nature informationnelle que nous voulons diffuser ou
recevoir : information codifiée ou information tacite.
interagir sans se déplacer. Elle ne suffit ni pour les interactions en général ni pour les
interactions sans contacts en face-à-face. Sans proximité organisée, il ne peut y avoir
d’interaction, ou seulement des interactions limitées. En effet, il est plus facile d’interagir
grâce aux TIC lorsque nous partageons des pratiques et des représentations communes :
l’information peut être plus facilement normalisée et codifiée par l’expéditeur et comprise par
le destinataire. Dans un échange virtuel d’informations, l’information peut perdre une partie
de son sens. Ce risque est plus faible si les individus partagent une culture commune
favorisant une interprétation commune de l’information. Un réseau virtuel, qu’il soit social,
économique ou scientifique, ne peut fonctionner que s’il est combiné à une proximité
organisée entre ses participants potentiels.
Dans ce système conceptuel, la proximité géographique virtuelle n’est pas une autre
expression de la proximité organisée (Tableau 1). Il dépend des réseaux matériels,
technologiques, ainsi que des autres proximités géographiques, et génère des interactions
potentielles qui ne peuvent être réalisées qu’en présence d’une proximité organisée
significative. La combinaison d’une forme particulière de proximigéographique avec une
proximité organisée est suffisante pour l’existence de la forme d’interaction correspondante.
Pour une proximité géographique donnée qui n’offre qu’une possibilité d’interaction, la
proximité organisée détient la clef d’interactions efficaces.
La proximité organisée est donc liée à des frictions non géographiques, qui entravent les
interactions en les rendant les plus coûteuses. Ces coûts découlent des différences sociales,
culturelles et religieuses entre les individus, ou des différences dans leur environnement
institutionnel (au sens de North, 1990). De légères différences améliorent la compréhension et
la confiance mutuelles, facilitent la négociation des contrats et l’application des accords,
permettent une meilleure anticipation des comportements et des réactions à l’information et
facilitent toute forme d’échange d’informations, c’est-à-dire qu’elles réduisent les coûts
d’interaction. Ces coûts pourraient être considérés comme des coûts non géographiques de
coordination et inclure une certaine forme de coût de transaction. Dans la conception de
North, les coûts de transaction sont « les coûts de la protection des droits, du maintien de
l’ordre et de l’application des ententes » (North, 1990). Outre les coûts de transaction, qui
résultent par définition de la gestion des transactions économiques, la proximité organisée
réduit les coûts de coopération, les coûts de gestion de toutes sortes de conflits et les coûts
d’organisation et d’exécution de toutes les formes d’interactions non marchandes telles que
les contacts sociaux. Bien que ces coûts de coordination ne soient pas géographiques, ils
jouent un rôle majeur dans l’organisation spatiale et dans le processus d’agglomération, par
leurs effets sur les interactions. Par exemple, les villes globales sont organisées de manière à
réduire les coûts de coordination de l’économie globalisée (Bourdeau-Lepage et Huriot,
2005).
A partir de ce schéma des proximités, la ville peut être envisagée comme un jeu de
proximités.
2.2. Pour analyser la ville
En effet, en considérant que la proximité géographique permanente est celle qu’offre
l’agglomération urbaine puisque la ville permet
5
des interactions face-à-face fréquentes, il est
possible d’analyser la ville de la manière suivante.
La ville, comme réalisation d’une proximité géographique permanente, est de fait le lieu
d’interactions complexes. Elle offre la proximité géographique permanente, celle du voisinage
plus ou moins direct, qui facilite les contacts fréquents, les interactions complexes, et répétées
en face-à-face entre une grande variété d’agents. Elle rend possible les interactions face-à-face
régulières. La ville est aussi un nœud dans les réseaux de transport réels, routiers, ferrés,
maritimes ou aériens. Elle est une porte d’entrée obligée dans la plupart de ces réseaux, parce
qu’elle abrite leurs terminaux (gares, aéroports, …) qui sont soumis à d’importantes
économies d’échelle. Elle engendre une proximité géographique temporaire permettant la
réalisation d’interactions face-à-face lointaines, temporaires et peu fréquentes. Enfin, la ville
est le lieu d’entrée le plus recherché pour l’utilisation intensive des réseaux virtuels des TIC,
téléphone et internet, à cause des économies d’échelle réalisée dans l’installation des
terminaux de ces réseaux (par exemple les téléports). La ville est donc le lieu privilégié de la
proximité virtuelle, et de la réalisation des interactions lointaines par les réseaux des TIC.
La ville, comme réalisation d’une proximité géographique permanente n’est pas une
condition suffisante à l’existence d’interactions de quelque nature que ce soit. L’argument
donné plus haut est incontestable. Sans volonté ni capacité d’interagir, nulle interaction,
quelle que soit la proximité géographique ou virtuelle réalisée. Ce dernier argument est à
nuancer compte tenu du fait que la proximité organisée n’est pas indépendante des autres
formes de proximité. Par conséquent, la proximité organisée a tendance à être forte lorsque la
proximité géographique permanente est elle-même élevée, donc qu’on se trouve dans une
agglomération et en particulier une ville. C’est la conséquence de l’« inscription territoriale »
de la proximité organisée (Torre, 2008).
Dans leur article de 2009, Bourdeau-Lepage et Huriot concluaient en affirmant que la
combinaison des proximités géographiques temporaire, permanente, virtuelle et organisée
permet à la ville d’être le lieu par excellence des interactions internes et externes, de face-à-
face ou par les TIC. Ils dessinaient, de cette manière, un cadre d’explication de l’attractivité
des villes en termes de proximités. Cependant, ils ne s’intéressaient pas aux conséquences
négatives induites par les proximités. Il est toutefois, possible de relever certains de leurs
effets. C’est l’objet, aujourd’hui, d’une partie des études urbaines conduites par les membres
de lécole de la proximité.
5
permet seulement car cela dépend des possibilités des transport intra-urbains (Figure 1).
3. Les effets négatifs des différentes proximités
Si la combinaison des proximités géographiques et organisée rend possible les interactions
entre les individus, les différentes proximités peuvent aussi produire des effets négatifs
(Tableau 2). C’est le cas, quand la proximité devient source de mal-être et de stress ou de
promiscuité. L'individu va chercher à échapper à la foule trop dense et impersonnelle de gens
avec qui, il na aucun intérêt à interagir. Il peut aussi se rapprocher de ses semblables pour
privilégier l’entre-soi, ou bien rechercher un contact direct avec l’environnement naturel et/ou
fuir la ville.
Tableau 2 : Un essai de schématisation des effets négatifs des différentes proximités
Source : Composé par lauteur.
3.1. Proximité géographique permanente ou temporaire et environnement urbain : la perte
de l’altruisme
La vie en milieu urbain provoque des comportements dont certains sont directement liés aux
effets négatifs induits par la proximité géographique permanente ou temporaire. En effet, dans
un environnement dense, les individus sont soumis à de nombreux stimuli externes et internes
de différentes natures (Milgram, 1970). Ils se trouvent en situation de ce que l’on nomme
surcharge environnementale, c’est-à-dire en présence d’un trop plein de stimuli, rendant le
traitement de l’information et les interactions très difficiles (Moser, 2009).
Types de proximité
L’expression de trop de
proximité
Les effets sociaux et spatiaux (exemples)
Proximité géographique
permanente/temporaire
La surcharge environnementale
Tyrannie d’autrui
Tyrannie de l’agglomération
Le manque
d’altruisme
L’individualisme
Congestion,
pollution sonore,
lumineuse,
olfactive,
promiscuité, ...
L
La
a
p
pr
ro
ox
xi
im
mi
it
té
é
s
su
ub
bi
ie
e
Proximité virtuelle
La surcharge virtuelle
Tyrannie de l’instantanéité
La déconnexion avec
le temps et l’espace, le
stress, la solitude, la
représentation, l’autre
devient objet…
Le désir de
reconnexion avec la
nature et les autres en
face à face
Le ralentissement
Jardins partagés,
espaces publics,
nouvelles pratiques,
oasis de
décélération, …
Proximité organisée
The Not In My Backyard
syndrome*
Conflits
Proximité organisée
&
Proximité géographique
permanente
La surcharge de diversité
Tyrannie d’autrui de
différenciation sociale
La surcharge sociale :
Tyrannie d’autrui, du regard de
son semblable ou Tyrannie du
groupe
Le désir d’entre-soi
La peur de la
différence,
La peur de ses pairs
Le manque
d’innovation
Gated communities,
Ségrégation,
Clôtures,
L
La
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p
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no
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es
st
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Déclin
Face à ces stimuli, ils cherchent à se protéger et le font en se repliant sur eux-mêmes et en
ignorant les demandes de leurs semblables. C’est ce qui conduit certains chercheurs à dire que
la grande ville produit la réserve, l’indifférence à autrui, le repli sur soi et la méfiance vis-à-
vis d’autrui (Simmel, 1903). Ainsi, plus une ville serait grande, plus la vie sociale serait
réduite en raison du trop grand nombre de stimuli présents en son sein et de l’incapacité des
citadins à traiter toute l’information (Milgram, 1970). La proximité géographique permanente
et temporaire peut donc avoir comme conséquence une surcharge environnementale (Moser,
1988). Un des exemples les plus emblématique est celui du bruit.
Le bruit induit par un niveau de proximité géographique permanente (ou temporaire) très
élevé, conduit à un refus de l’individu de s’engager dans une démarche d’assistance (Moser,
1988). Les études de Mathews et Canon (1975) ont montrée qu’un niveau sonore désagréable
et/ou élevé diminue l’aide à autrui et les interactions sociales. L’ambiance sonore, thermique,
visuelle que dégage un lieu affecte le niveau de bien-être des individus et leurs relations
sociales. Le stress du milieu urbain et la surcharge environnementale réduit la capacité d’aide
des individus et par conséquent leurs interactions (Moser, 1988). L’espace dans lequel
prennent place les différents types d’échanges matériels et immatériels entre les individus
n’est donc pas un simple décor. Il agit sur ces derniers comme les individus interagissent avec
leur environnement et le modifient. Certains lieux sont propices au bien-être, permettant
notamment l’accomplissement de soi et des relations sociales positives (Fleuret and Atkinson,
2007) alors que d’autres génèrent du stress et l’indifférence envers autrui. Une situation
paradoxale peut parfois s’observer. Alors que l’urbanité renvoie au respect d’un certain
nombre de règles tacites de relations à autrui qui définissent l’ordre social (Goffman, 1959),
un niveau d’urbanité élevé et une surcharge environnementale porteraient en leur sein la
négation de l’urbanité. Ce mécanisme serait induit en partie par le stress que ce milieu produit
sur les individus, affectant leurs relations interpersonnelles et entrainant des comportements
d’indifférence vis-à-vis d’autrui. Par conséquent, alors que l’urbain peut se définir comme un
individu ayant la capacité de mettre son pas dans celui de l’autre, « la capacité à rencontrer
l’autre, à s’adapter aux temps de l’autre » (Paquot, 2009) ou encore comme un individu aux
bonnes mœurs, poli, courtois, avec ses semblables, dans un environnement urbain surchargé
environnementalement au sens de Moser (2009), l’individu serait incapable de se comporter
de cette manière avec les autres. Cest pourquoi, dans certains cas, la proximité géographique
permanente ou temporaire peut avoir comme conséquences la perte de ce qui fait l’urbain.
Mais les effets négatifs de la proximité géographique permanente ne s’arrêtent pas là.
Promiscuité ou tyrannie d’autrui, congestion et pollution en sont les plus classiques
conséquences. Comme nous l’avons souligné, la qualité du milieu dans lequel évolue
l’individu a des effets sur sa manière d’interagir avec ses semblables. Dans un environnement
la proximité géographique permanente est importante, le voisinage de l’autre peut être
insupportable pour certains et se transformer en promiscuité. L’autre devient l’enfer (the other
become the hell). C’est ce que l’on peut nommer la tyrannie d’autrui en référence à la tyrannie
de la distance de Duranton (2004). On l’observe par exemple dans le métro parisien aux
heures de pointe. Par sa simple présence, l’autre génère un malaise et du stress entrainant dans
certains cas, des situations de détresse et de mal-être.
La congestion se mesure également en temps perdu dans les embouteillages. Ce sont dans
les grandes agglomérations comme Moscou, Istanbul, Bogota, Mexico City, São Paulo,
London, Rio de Janeiro que les habitants perdent le plus de temps (Inrix, 2019).
La concentration humaine a aussi des effets environnementaux. Elle peut entraîner de la
pollution. Aussi, les grandes villes du monde enregistrent-elles des taux de pollution
atmosphérique
6
très importants, comme New-Delhi, Dhakar, Beijing, Abu Dabi, Jakarta, en
2018 (IQAir AirVisual, 2019).
3.2. Proximité virtuelle et monde virtuel : l’espace et le temps déconnectés
La proximité virtuelle peut être source d’effets négatifs par des mécanismes relativement
simples. En utilisation des TIC dans tous les domaines de leur vie, les individus modifient
leurs relations sociales ou plus exactement leur manière de vivre ensemble. S’il est vrai que la
proximité virtuelle permet des interactions à très longue distance étendant ainsi les réseaux
sociaux, elle offre également la possibilité de répondre et de recevoir un message n’importe
quand, n’importe et dans n’importe quelle circonstance. Elle permet à l’individu à travers
les réseaux virtuels d’être en relation continue avec dautres. Or, cette compagnie oblige
l’individu à être en représentation et à répondre aux demandes faites de manière
continue (Aubert, 2003). L’individu subit donc un stress permanent perdant la notion du
temps, le contact direct avec les autres ou avec les éléments naturels. Dans certains cas, cela
produit du mal-être. L’instantanéité qui caractérise les TIC a entraîné une culture de
l’immédiateté. Dans les années 90-95, les TIC ont conduit à l’émergence de l’instantanéité du
temps (Aubert, 2018), duisant l’écart entre le moment de l’émission d’une demande et la
réception de la réponse. L’immédiateté est devenue la règle. Les rythmes se sont ainsi
accélérés. Cette accélération a été plus forte dans les grandes villes (Aubert, 2018) en raison
d’un plus grand déploiement de la proximité virtuelle en leur sein, induit par des mécanismes
économiques simples
7
. Et ainsi, une nouvelle ère est née, celle de l’éphémère, de l’urgence, de
la globalité et du virtuel.
Les relations humaines et leurs formes se transforment (Rosa, 2010 et 2012). L’homme
devient hypermoderne (Aubert 2006). Dans ce mouvement, la sociabilité et lintimité des
personnes se reconfigurent. Un risque existe : celui de considérer l’autre comme un objet
lorsque les interactions sont virtuelles (Turkle, 2015). Le rapport au monde, au temps et à
l’autre (et à soi-même) évolue. Cette vitesse, cette présence constante de la sphère virtuelle
dans toutes les sphères de la vie, cette nécessité de s’adapter en continu, de répondre à
l’urgence déconnecte l’individu de l’espace et du temps risquant de réduire son niveau de
bien-être. Une enquête auprès de 4 000 européens âgés de 16 à 64 ans révèle que « la plupart
d’entre eux ont le sentiment de vivre au quotidien sous la pression du temps et de
l’urgence » (Ipsos, 2011).
Le besoin de ralentir, de décélérer se fait sentir (Sansot, 2000 ; Honoré, 2018). Le slow
movement créé en Italie et ses déclinaisons slow food, slow money, slow travel, … sont là pour
en témoigner. La décélération se fait plus facilement dans les petites villes comme le montre
la création de l’association cittaslown qui défend la lenteur pour mieux vivre, à laquelle ne
peuvent adhérer que des villes de moins de 60 000 habitants.
Le ralentissement passe en particulier par une reconnexion à l’environnement naturel, à la
reconquête de soi et à la recherche de contacts en face à face. Ainsi, se développent en ville,
les activités physiques de plein air comme la marche ou encore le jardinage. Le jardinage a
une vertu certaine. Il permet de reconnecter celui qui le pratique à l’espace et au temps,
l’exposant aux rythmes naturels des saisons et au cycle biologique des plantes (Ligny, 2011).
Il requiert un contact avec la terre et les plantes et une maîtrise du temps qui passe. Il est
6
Trié par concentration moyenne annuelle de PM2.5 (μg / m³).
7
Les TIC qui produisent la proximité virtuelle, nécessitent des équipements lourds aux coûts fixes très élevés.
Aussi, ces équipements sont-ils installés là où le marché potentiel est le plus important.
également un vecteur important de socialisation en particulier quand cette pratique se fait dans
des espaces collectifs.
Le besoin de modifier son rythme de vie et la recherche d’une plus grande proximité avec la
nature, peut conduire les citadins à quitter les grandes villes pour aller habiter dans un lieu
qu’ils considèrent comme étant la campagne.
Dans d’autres cas, conscients de ne pouvoir diminuer de manière permanente leur rythme de
vie, ils se réservent des moments de pause. Ils se déplacent pour le week-end ou quelques
jours dans des lieux propices à la décélération. Ils mobilisent alors la proximité géographique
temporaire. Il s’agit pour eux de ralentir pour mieux accélérer ensuite (Smati, 2011) en
prenant le temps de l’observation pour saisir les opportunités.
3.3. Lentre-soi, un produit de la proximité géographique permanente et de la proximité
organisée
Dans un lieu où le niveau de proximité est élevé, les individus et en particulier les plus
riches recherchent bien souvent l’entre-soi. Ils ne veulent pas se mélanger aux autres ou subir
la tyrannie d’autrui « de différenciation sociale ». Ils cherchent alors à habiter avec leurs
semblables dans des quartiers spécifiques, forts de leur proximité organisée. Leur quête et
leurs moyens financiers les conduisent à privilégier des lieux aux aménités élevées, en
particulier naturelles. Ainsi, naissent les quartiers bourgeois, les gated communities et d’une
certaine manière la ségrégation socio-spatiale.
A côté de cette proximité géographique permanente choisie existe une proximité
géographique permanente subie. En effet, les individus moins aisés ne peuvent pas accéder
aux quartiers bien dotés en aménités positives. Une partie d’entre eux se voient réduits à vivre
au quotidien dans un environnement peu amène, subissant des nuisances de nature différente :
pollution lumineuse, olfactive, sonore… (Torre, 2014 ; Magsi et Torre, 2015).
Mais les effets négatifs de la proximité organisée et de la proximité géographique
permanente ne s’arrêtent pas . L’entre-soi, notamment spatial peut être perçu par l’individu
comme une tyrannie, la « tyrannie du regard de son semblable » ou « tyrannie du groupe ». En
effet, l’individu peut se sentir épié, jugé, en danger si sa conduite et ses actes ne sont pas en
accord avec les règles et les codes de son milieu social, de sa communauté et de son lieu de
vie. La proximité qui a pu être choisie au départ se transforme en proximité subie. Elle peut
dans certains cas, entrainer le déclin d’un groupe ou être un frein au développement par les
règles strictes qu’elle impose. C’est une tyrannie réglementaire que l’on peut appréhender
comme une surcharge sociale. L’exemple des corporations d’artisans dans l’histoire, montre
que les règles du groupe peuvent restreindre l’innovation.
Conclusion
Au cours de la dernière décennie, la ville a émergé comme objet de recherche au sein de
l école française de la proximité. Pour cela, les chercheurs se sont appuyés sur leur schéma de
pensée construit pour analyser la diffusion de l’innovation, les clusters ou le développement
territorial. Il leur a fallu le dépasser et aller puiser dans les travaux de l’économie de
l’agglomération pour saisir les éléments qui manquaient à leur analyse. Ils ont ainsi élaboré
une grille d’analyse leur permettant de comprendre le développement urbain
actuel (Bourdeau-Lepage et Torre, 2020).
Cet effort, ils l’avaient déjà amorcé en 2008 avec l’ouvrage collectif intitulé « les nouvelles
proximités urbaines » dans lequel Rallet and Torre (2008) en introduction soulignaient qu’il
existe « deux enjeux à la mise en œuvre d’une analyse de la ville en termes de proximités :
Tout d’abord rendre compte d’une diversité contradictoire de la ville. […] Ensuite, progresser
dans l’appréhension du phénomène croissant de métropolisation. »
Aujourd’hui, ces deux objectifs ne sont que partiellement atteints. L’analyse en termes de
proximité, ne permet pas d’expliquer pleinement la diversité qui caractérise la ville. Ceci en
particulier car la mise en évidence des effets négatifs de la proximité n’en est qu’à ses débuts.
L’expression des effets négatifs des différentes proximités et/ou d’une combinaison de
plusieurs d’entre elles, est incertaine. Ainsi, on retient la surcharge environnementale, la
surcharge de diversité, la surcharge sociale ou l’on parle de tyrannie d’autrui, tyrannie
d’autrui du regard de son semblable ou tyrannie d’autrui de différenciation sociale mais rien
n’est dit sur l’enchevêtrement de ses différentes tyrannies ou surcharges. La tyrannie d’autrui
du regard de son semblable ne serait pas elle une déclinaison de la tyrannie d’autrui quand un
certain type de proximiorganisée existe (peut-être dans le cas d’une proximité organisée
basée sur la ressemblance) ? Ne faudrait-il pas relier le schéma classique des proximités à
celui des effets négatifs des proximités ? Comment introduire dans une lecture des effets
négatifs de la proximité, la proximité subie ou choisie ? Autant de questions qui sont
aujourd’hui sans réponse et pourraient constituer les éléments d’un programme de recherche
sur la ville pour l’école de la proximité.
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Article
Full-text available
This paper revisits the relation between proximity and interactions, in the light of new thoughts on the concepts of proximity. We start from the idea that proximity, in the most general sense, reflects the easiness to interact. It results that: (1) proximity can be expressed in terms of costs; (2) different forms of proximity correspond to different modes of interaction and to the associated costs. On the basis of these premises and of the various forms of the concept in the economics of proximity and in the economics of agglomeration, we suggest to deal with four forms of proximity, three of them closely linked to the economics of proximity, and one entirely new: virtual geographical proximity.
Book
L’objectif de cet article est de revenir sur l’évolution du groupe « Dynamiques de Proximité », analysé ici comme une communauté de connaissance. Si la notion de proximité s’est affirmée comme outil original d’analyse de la dimension spatiale des phénomènes économiques et sociaux, elle a été développée et popularisée par un groupe de chercheurs, pour connaître un engouement international. À partir de la constitution d’une base de données recensant les productions de ce groupe entre 1990 et 2014, nous mobilisons des outils d’analyse réseaux afin d’en caractériser la dynamique. Trois étapes marquant l’évolution de cette Communauté de Connaissance sont identifiées. Le papier montre que le travail de conceptualisation et d’opérationnalisation mené par le groupe a permis d’en faire un concept largement utilisé par les chercheurs mais aussi les praticiens. Paradoxalement, ce succès aboutit à un certain dessaisissement par la communauté de connaissance initiale dont les frontières tendent à se fondre dans d’autres collectifs scientifiques.
Article
Economic activities are not concentrated on the head of a pin, nor are they spread evenly over a featureless plane. On the contrary, they are distributed very unequally across locations, regions, and countries. Even though economic activities are, to some extent, spatially concentrated because of natural features, economic mechanisms that rely on the trade-off between various forms of increasing returns and different types of mobility costs are more fundamental. This book is a study of the economic reasons for the existence of a large variety of agglomerations arising from the global to the local. This second edition combines a comprehensive analysis of the fundamentals of spatial economics and an in-depth discussion of the most recent theoretical developments in new economic geography and urban economics. It aims to highlight several of the major economic trends observed in modern societies.
Article
We propose an integrated framework to discuss the empirical literature on the local determinants of agglomeration effects. We start by presenting the theoretical mechanisms that ground individual and aggregate empirical specifications. We gradually introduce static effects, dynamic effects, and workers' endogenous location choices. We emphasise the impact of local density on productivity but we also consider many other local determinants supported by theory. Empirical issues are then addressed. Most important concerns are about endogeneity at the local and individual levels, the choice of a productivity measure between wage and TFP, and the roles of spatial scale, firms' characteristics, and functional forms. Estimated impacts of local determinants of productivity, employment, and firms' locations choices are surveyed for both developed and developing economies. We finally provide a discussion of attempts to identify and quantify specific agglomeration mechanisms.
Article
The effects of environmental overload and noise on helping behavior is assessed through a 2 × 3 experimental design including two levels of environmental overload and three conditions on each site: without roadworks, roadworks without noise, and noisy roadworks.Results are analysed in terms of the cognitive appraisal of the situation and the narrowing of attention. The subject's behavior when confronted with explicit and implicit helping requests shows that noise appears to be the most important component of overload, affecting both the subjects' attentiveness in implicit helping demands, as well as the refusal to engage in verbal interaction.