ChapterPDF Available

Le Bilan Hydrique National

Authors:

Abstract and Figures

Le présent chapitre se propose d'établir le bilan hydrique national résultant d'une confrontation de l'offre et de la demande en eau, ces deux termes étant compris dans leur acception la plus large : offre naturelle totale des précipitations d'eau sur l'ensemble du pays, demande intégrale qui inclut les besoins de la société, de l'économie et de l'environnement. Une première partie introduit au contexte hydrologique général de la Tunisie : contexte physique, régime des précipitations, systèmes hydrographique et hydrogéologique. Dans une seconde partie, et dans une perspective historique de connaissance du bilan en eau de la Tunisie, est présenté l'état général des ressources en eau : d'abord la ressource générique ou ressource pluviale, l'état des ressources en eau de surface et souterraines, avec un focus sur les ressources faiblement renouvelables, et une première mise au point sur les ressources exploitables avec prise en compte du critère de salinité. La réserve offerte par le sol agricole forme le dernier grand gisement naturel du volet des ressources en eau, qui se termine par un bref examen des impacts, sur la ressource, des changements climatiques en perspective. La troisième partie s'intéresse à la mobilisation des ressources en eau et présente les informations actualisées sur le développement par les grands barrages, les lacs et barrages collinaires, les nappes phréatiques et profondes, mais également par l'évapotranspiration sous forme d'eau verte, et évoque la mobilisation des eaux de surface par les ouvrages de conservation des eaux et des sols. La quatrième partie fait le point sur les différents usages de l'eau : eau potable, industrie, agriculture, environnement, et dresse l'évolution des bilans ressources-usages, bilans qui mettent à jour les déséquilibres régionaux à l'origine des grands transferts interbassins, présentés dans la cinquième partie. Une sixième partie établit le constat de la surexploitation des nappes souterraines, qui forme la menace la plus terrible qui pèse sur le devenir des ressources en eau dans le pays, menace susceptible de transformer considérablement et durablement le bilan hydrique national. La septième partie est consacrée au cycle anthropique de l'eau, où l'on tente de dresser un bilan précis de l'ensemble des usages de l'eau : de la mobilisation de l'eau à la source, en passant par les différentes étapes de l'allocation et de l'utilisation effective, jusqu'à la consommation nette et aux retours au milieu récepteur. La huitième et dernière partie tente d'établir le bilan d'eau intégral de la Tunisie, où l'on propose une première version du devenir de la totalité des ressources pluviales du pays.
Content may be subject to copyright.
Couverture : Remous de surface, en
sortie d’un forage artésien à Nouail,
sud tunisien ( Juillet 2007, ©M.Besbes)
ISBN : 978-2-343-03966-4
37 €
Sécurité Hydrique de la Tunisie
Mustapha Besbes
Jamel Chahed
Abdelkader Hamdane
Sécurité Hydrique de la Tunisie
Le projet hydraulique tunisien a transformé le paysage physique et social
du pays et scellé de nouvelles solidarités inter-régionales. Mais la mobilisation
quasi totale des ressources hydrauliques, l’eau bleue, marque la n d’une
époque : ce livre montre comment le changement du paradigme de l’eau
est devenu une nécessité urgente et apporte des éléments pour de nouvelles
politiques adaptées aux possibilités hydriques réelles.
Ces politiques, qui élargissent les bilans hydriques à toutes les formes de
ressources, y compris l’eau mobilisée par les cultures pluviales, leau verte,
et l’équivalent-eau des échanges agroalimentaires, l’eau virtuelle, s’avèrent
pertinentes quand, comme pour la Tunisie, on les applique aux pays arides.
Les dispositions, méthodes et outils développés dans cet ouvrage visent
à atteindre des objectifs de sécurité hydrique durables, et à susciter des
changements dans les comportements de tous à l’égard de leau.
Cet ouvrage fourmille de données et d’informations rééchies,
scientiques et pertinentes, qui éclairent d’un jour nouveau le problème de
l’eau. L’exemple tunisien n’est qu’un support pour donner au lecteur une
information à caractère universel.
Mustapha BESBES est hydrogéologue, expert en gestion des ressources en eau et spécialiste de l’hydrologie
des zones arides. Il est Docteur ès sciences, professeur émérite à l’Ecole Nationale d’Ingénieurs de Tunis,
associé étranger de l’Académie des sciences de l’Institut de France, correspondant de l’Académie tunisienne
des sciences. Il a animé d’importants groupes de travail, dont celui du bassin transfrontière du Sahara,
et intervient comme expert sur les problèmes de l’eau dans de nombreux pays.
Jamel CHAHED est ingénieur hydraulicien et Docteur ès sciences, professeur à l’Ecole Nationale
d’Ingénieurs de Tunis, Université de Tunis El Manar. Il a été professeur invité à l’Institut National
Polytechnique et à l’Institut National des Sciences Appliquées de Toulouse. Ses travaux portent
sur l ’hydrodynamique et les systèmes environnementaux. Il participe à des groupes de travail en
Tunisie et en Europe sur les questions de sécurité hydrique et de sécurité alimentaire.
Abdelkader HAMDANE est agronome, ingénieur civil du Génie Rural, diplômé de l ’Institut
National Agronomique de Paris et de l’Ecole Nationale du Génie Rural, des Eaux et Forêts.
Directeur Général honoraire du Génie Rural du ministère tunisien de l’Agriculture et spécialiste
de la gestion de l’eau agricole, il a représenté son pays à de nombreuses conférences internationales
et a été expert auprès de la FAO. Il est conseiller scientique à l’Institut National Agronomique
de Tunisie.
9 782343 039664
Sécurité Hydrique
de la Tunisie
Gérer l’eau
en conditions de pénurie
Préface de Ghislain de Marsily
Mustapha Besbes
Jamel Chahed
Abdelkader Hamdane
Histoire et Perspectives MéditerranéennesHistoire et Perspectives Méditerranéennes
HISTOIRE_PERSP_MED_GF_BESBES_19_SECURITE-HYDRIQUE-TUNIS.indd 1 19/09/14 12:48:17
Mustapha Besbes
Jamel Chahed
Abdelkader Hamdane
Sécurité Hydrique
de la Tunisie
Gérer l’eau en conditions de pénuries
Préface de Ghislain de Marsily
129
Chapitre 3.
Le bilan hydrique national
Le présent chapitre se propose d'établir le bilan hydrique national
résultant d'une confrontation de l'offre et de la demande en eau, ces deux
termes étant compris dans leur acception la plus large : offre naturelle totale
des précipitations d'eau sur l'ensemble du pays, demande intégrale qui inclut
les besoins de la société, de l'économie et de l'environnement.
Une première partie introduit au contexte hydrologique général de la
Tunisie : contexte physique, régime des précipitations, systèmes
hydrographique et hydrogéologique. Dans une seconde partie, et dans une
perspective historique de connaissance du bilan en eau de la Tunisie, est
présenté l'état général des ressources en eau : d'abord la ressource générique
ou ressource pluviale, l'état des ressources en eau de surface et souterraines,
avec un focus sur les ressources faiblement renouvelables, et une première
mise au point sur les ressources exploitables avec prise en compte du critère
de salinité. La réserve offerte par le sol agricole forme le dernier grand
gisement naturel du volet des ressources en eau, qui se termine par un bref
examen des impacts, sur la ressource, des changements climatiques en
perspective.
La troisième partie s'intéresse à la mobilisation des ressources en eau et
présente les informations actualisées sur le développement par les grands
barrages, les lacs et barrages collinaires, les nappes phréatiques et profondes,
mais également par l'évapotranspiration sous forme d'eau verte, et évoque la
mobilisation des eaux de surface par les ouvrages de conservation des eaux
et des sols.
La quatrième partie fait le point sur les différents usages de l'eau : eau
potable, industrie, agriculture, environnement, et dresse l'évolution des
bilans ressources-usages, bilans qui mettent à jour les déséquilibres
régionaux à l'origine des grands transferts interbassins, présentés dans la
cinquième partie.
130
Une sixième partie établit le constat de la surexploitation des nappes
souterraines, qui forme la menace la plus terrible qui pèse sur le devenir des
ressources en eau dans le pays, menace susceptible de transformer
considérablement et durablement le bilan hydrique national. La septième
partie est consacrée au cycle anthropique de l'eau, où l'on tente de dresser un
bilan précis de l'ensemble des usages de l'eau : de la mobilisation de l'eau à
la source, en passant par les différentes étapes de l'allocation et de
l'utilisation effective, jusqu'à la consommation nette et aux retours au milieu
récepteur. La huitième et dernière partie tente d'établir le bilan d'eau intégral
de la Tunisie, où l'on propose une première version du devenir de la totalité
des ressources pluviales du pays.
3.1- Le contexte hydrologique
Sur une superficie de 164 420 km2 et avec une population de 10,7
millions d’habitants en 2011, la Tunisie est dotée de ressources pluviales
estimées à 36 km3 /an. Les ressources hydrauliques totales (eau bleue) sont
évaluées à 4,85 km3/an, dont 2,7 km3/an constituent les ruissellements
moyens ou ressources en eaux de surface. En 2010, les prélèvements d’eau
souterraine étaient estimés à 2 km3, ce qui représente un taux d’exploitation
moyen de 93 % des ressources exploitables estimées à 2 ,15 km3/an, mais
cette moyenne cache de fortes disparités régionales et de nombreux systèmes
aquifères sont soumis à une forte surexploitation.
La ressource en eau du sol agricole, part de l’eau pluviale infiltrée dans le
sol et disponible à l’évaporation et à la consommation par les plantes,
rapportée aux terres cultivables (5 millions d’hectares), est estimée en année
moyenne à 13 km3/an, qui constitue le potentiel total d’eau verte utilisable à
des fins agricoles. Ce potentiel passe à près de 19 km3/an si l’on y intègre
l’évapotranspiration des terres de parcours (5 M ha).
Le total des prélèvements d’eau bleue atteint 2,8 km3 en 2010, dont 0,54
km3 ont été alloués à l’eau potable (55 % d’eau de surface et 45 % d’eau
souterraine) et 2,2 km3 à l’irrigation. La demande de l’irrigation provient
pour 77 % des eaux souterraines, 22 % des eaux de surface, et près de 1 %
de la réutilisation des eaux usées traitées. Compte tenu des ressources en eau
affectées au secteur de l’agriculture et des niveaux possibles d’intensification
agricole, le potentiel d’irrigation permanente et de complément est estimé à
560 000 ha. La majeure partie de la demande en eau émane des zones
côtières à grande densité de population, et certains des principaux périmètres
irrigués (Basse vallée de la Medjerda, Grombalia, Sahel) sont situés loin des
131
grands gisements de ressources du pays. Les zones côtières utilisent plus
d’eau qu’elles n’en disposent, ce qui les amène à importer de l’eau d’autres
régions mieux pourvues : le pays entier est marqué par de grands transferts
d’eau d’Ouest en Est.
Cette situation exige des efforts considérables de surveillance des
ressources : le réseau d’observation de la pluviométrie se compose de plus
de 900 stations de mesures régulières ; le réseau de mesures du ruissellement
compte 60 stations permanentes et 60 points de mesures régulières ; et le
réseau d’observations régulières des eaux souterraines comprend 3 800
points de mesures piézométriques et 1200 points de surveillance des
paramètres de qualité. Ces informations, continuellement mises à jour,
permettent d’actualiser régulièrement l’évaluation de la ressource,
concentrée notamment sur les eaux souterraines, l’exploitation de ces
dernières ayant augmenté de 330 % au cours des 40 dernières années.
La réalisation de grands programmes a notamment réduit les apports aux
systèmes hydrologiques, aux écosystèmes continentaux et littoraux, et
entrainé une certaine dégradation de sols irrigués par salinisation. Les
allocations de quantités d’eau pour le lessivage des sols irrigués ont été
consenties très tôt alors que la définition des autres besoins de
l’environnement nécessitant une allocation directe des ressources mobilisées
a été plus tardive à concevoir. La demande environnementale directe (zones
humides et recharge artificielle) demeure certes encore faible comparée à
celles des agglomérations et de l’agriculture, mais représente un défi
émergent pour la planification des programmes hydrauliques futurs.
3.1.1- Le contexte physique et le relief
Située à la pointe Nord de l’Afrique et allongée sur sept degrés de
latitude, la Tunisie offre une succession de faciès hydro-climatiques : (a)
subhumide à semi-aride au Nord, (b) aride en Tunisie Centrale, (c) hyper
aride et désertique pour l’ensemble du Sud. Ces faciès climatiques
s’articulent avec les quatre grandes provinces géographiques du pays :
(i) - Au Nord Ouest, les reliefs du Tell et de la Dorsale, orientés SW-NE
entre 500 et 1500 m d’altitude, encadrent les plaines les plus fertiles du pays.
Orthogonale à la direction des vents humides dominants du NW,
l’orientation des reliefs favorise des précipitations notables, qui font de ce
territoire la région la plus arrosée du pays : le principal cours d’eau, l’Oued
Medjerda, aujourd’hui entièrement contrôlé par une série de grands barrages
réservoirs, traverse la région d’Ouest en Est pour déboucher au Nord du
golfe de Tunis.
(ii) - Au Centre Ouest, c’est le pays des steppes qui s’étendent depuis la
Dorsale jusqu’aux massifs de Gafsa : massifs montagneux et hauts plateaux
132
arides, alternant avec de grandes plaines alluviales richement pourvues en
eaux souterraines, étroitement liées au régime des oueds Merguellil, Zeroud
et Bayech.
(iii) - La Tunisie Orientale, région des plaines côtières comprenant le
Sahel septentrional et le Sahel de Sfax pauvrement dotés en ressources en
eau, et la plaine de Gabès Médenine gisement du système aquifère de la
Djeffara.
(iv) - Le Sud correspond à la Plateforme Saharienne ; marqué par
l’immensité du bassin du Chott Djérid et des dunes du Grand Erg Oriental, il
se raccorde à la Djeffara vers l’Est par le plateau désertique du Dahar. C’est
le domaine des grands systèmes aquifères sahariens du Continental
Intercalaire et du Complexe Terminal.
3.1.2- Variabilité du régime des précipitations
La répartition des pluies est liée au climat, à la disposition des reliefs et à
la direction des vents NW dominants d’hiver. Si la pluviométrie moyenne
atteint 1500 mm/an dans l’extrême Nord, elle est de l’ordre de 500 mm/an
dans le Nord, 250 mm/an dans le Centre et ne dépasse guère 50 mm/an dans
l’extrême Sud situé au cœur du Sahara : la carte des pluies moyennes
interannuelles indique un fort gradient Nord Sud (Fig.3.6), témoignant du
passage de l’aire méditerranéenne à l’influence saharienne. Ces facteurs de
position sont accentués par la fréquence du relief de plaines dominé par la
chaîne de la Dorsale tunisienne formant écran vis à vis des perturbations du
NW originaires de l’Atlantique. L’influence de la Dorsale est très nette sur la
répartition des pluies à l’intérieur de l’année : entre Tunis et Kairouan, on
passe clairement du climat méditerranéen typique avec un hiver nettement
marqué, à un régime saharien où l’hiver a disparu laissant place à un climat à
deux saisons : l’été et le reste de l’année.
Par ailleurs, les pluies moyennes annuelles cachent d’importantes
fluctuations inter annuelles. Selon Frigui et Touzi (2009), une année
hydrologique est considérée sèche ou humide lorsque sa pluviométrie
correspond respectivement à un déficit ou à un excédent compris entre 30 %
et 50 % de la valeur moyenne annuelle . Par ailleurs, une année hydrologique
est considérée comme étant à très forte sécheresse ou à très forte humidité si
respectivement le déficit ou l’excédent correspondant dépasse 50 % de la
valeur moyenne annuelle. Si l’on distingue entre les trois grandes régions
naturelles caractérisées par des conditions relativement homogènes, le Nord,
le Centre et le Sud, et considérant une longue série historique d’observations
de l’ordre de 100 ans, on constate que :
133
(i) - dans le Nord, 15 % des années ont été sèches et une année
extrêmement sèche ;
(ii) - dans le Centre, 21 % des années ont été sèches, et 6 % extrêmement
sèches ;
(iii) - dans le Sud, 13 % des années ont été sèches, et 12 % extrêmement
sèches.
3.1.3- Le système hydrographique
Au Nord de la Dorsale tunisienne, le réseau hydrographique est assez
bien hiérarchisé et s’organise en trois bassins hydrologiques
structurés (Fig.3.1) : (i) le bassin de l’extrême Nord – Ichkeul, (ii) celui de la
Medjerda dont le tiers amont se trouve en Algérie, (iii) le bassin du Miliane
et des oueds du Cap-Bon. En raison de son climat, de son relief et de sa
pluviométrie, la Tunisie du Nord est la seule région en mesure d’entretenir
des cours d’eau aux écoulements exoréiques pérennes, et fournit 82 % (2,2
km3/an) des apports totaux en eau de surface du pays.
Au sud de la Dorsale, le climat aride, la végétation dégradée et
l’évaporation intense ne permettent pas la constitution d’un réseau
hydrographique aussi bien organisé, et le concept de bassin hydrographique
perd souvent de sa pertinence ; la structure du réseau d’écoulement est
généralement dégradée excepté dans les hauts bassins des cours d’eau : en
dehors des bassins proprement côtiers, les oueds n’arrivent plus à se frayer
un chemin jusqu’à la mer et leurs eaux s’infiltrent à la traversée des plaines
alluviales perméables ou sont drainées et s’évaporent dans les grandes
dépressions intérieures : Chotts et Sebkhas. C’est le domaine privilégié des
grands systèmes endoréiques (Frigui, 2005) : (i) le bassin de la Sebkha
Kelbia, aujourd'hui entièrement artificialisé et que composent les oueds
Nebhana, Merguellil et Zeroud, (ii) le bassin du Chott El Gharsa-Sebkhet
Noual, (iii) le bassin du Chott Djerid qui draine la plateforme saharienne,
(iv) les bassins côtiers du Sahel de Sousse et de Sfax, (v) le bassin versant de
la plaine côtière de la Djeffara.
L’Oued Medjerda forme l’artère centrale du système hydrographique
tunisien et le cours d'eau le plus aménagé du pays. Avec un bassin versant de
23700 km2 dont 16100 en Tunisie, la Medjerda comporte dix affluents, dont
5 en rive droite (Mellègue, Tessa, Siliana, Khalled, Chafrou) et 5 en rive
gauche (Rarai, Bou Heurtma, Kasseb, Béjà, Zerga). La Medjerda représente
dans sa partie aval, tunisienne, un apport moyen de 1 km3/an, mais avec des
débits très variables au cours de l’année : en moyenne de 3 m3/s en étiage à
90 m3/s en hiver, et jusqu’à 1000 m3/s en crue, un débit extrême de 3500
m3/s ayant été enregistré lors de la crue de Mars 1973.
134
Les Bassins de l'extrême Nord (Oueds Barbara, Mellila, Kebir, Zouara) et
de l'Ichkeul (Joumine, Rhezala, Sejenane, Douimis) s'étendent sur une
superficie totale de 5000 km2 et présentent un apport moyen remarquable de
0,96 km3/an, en raison d'une pluviosité bien fournie.
Fig.3.1 : Carte générale de situation et des bassins versants.
(D'après World Water Assessment Programme, 2009).
135
3.1.4- Aquifères et nappes souterraines de Tunisie
L’histoire géologique a doté la Tunisie de riches gisements aquifères,
avec au Sud l’immense bassin saharien renfermant des réserves
considérables, une multitude de nappes souterraines de dimensions réduites
jalonnant le Nord du pays, et des bassins aquifères de dimensions
relativement importantes au Centre.
Sur le plan structural, la Tunisie est nettement divisée en une partie
septentrionale, soumise à la tectonique alpine, où les couches géologiques
sont fortement plissées et propices à l’accumulation d’aquifères de moyenne
envergure, et une partie méridionale caractérisée par une tectonique de
plateforme, prédomine le grand bassin sédimentaire du Sahara
septentrional.
La Tunisie est relativement pauvre en eaux de surface, et les aquifères y
constituent, depuis toujours, la principale ressource en eau. L’apparent
paradoxe de la Tunisie est la spécificité régionale des ressources : eaux de
surface quasi exclusivement au Nord, eaux souterraines au Centre et au Sud,
distribution qui conjugue fidèlement la géologie à la pluviométrie.
L’extrême Nord est pauvre en aquifères, malgré une pluviométrie supérieure
à 1000 mm/an mais en raison d’un sous sol où prédomine le flysch numidien
peu perméable. Dans le Nord de la Tunisie, où les couches géologiques sont
tectonisées et plissées, on trouve de nombreuses nappes de faible envergure,
qui peuvent se développer dans des plaines où les réserves d’eau souterraine
sont exclusivement liées aux remplissages alluvionnaires tels ceux de
Ghardimaou ou Mornag.
La structure géologique de la Tunisie centrale est quant à elle dominée
par l’Atlas Saharien, qui traverse le pays en une diagonale SW-NE, la
Dorsale tunisienne. Cette structure atlasique est affectée de nombreuses
fosses d’effondrement, siège d’importants gisements aquifères atteignant des
centaines de mètres d’épaisseur : Gafsa, Kasserine, Sidi Bou Zid, Kairouan,
Grombalia (Archambault, 1947 ; Castany, 1948). Le Sud de la Tunisie, en
grande partie désertique, est dominé par la plateforme saharienne où les
grands systèmes aquifères s’étendent sur des centaines de milliers de km2,
c’est le cas des nappes du Continental Intercalaire et du Complexe Terminal,
dont les réserves, gigantesques, ne sont exploitables qu’en partie et se
renouvellent peu, et que la Tunisie partage avec l’Algérie et la Libye.
Les hydrogéologues tunisiens distinguent conventionnellement des
nappes phréatiques, à faible profondeur et exploitables par puits de surface à
grand diamètre, généralement construits en maçonnerie, et des nappes
profondes exploitables par forages de plusieurs centaines de mètres.
136
La fig.2 illustre la répartition spatiale des aquifères tunisiens. La
Direction Générale des Ressources en Eau (DGRE, Annuaires d'exploitation
des nappes profondes, Etats d'exploitation des nappes phréatiques) en
dénombre plusieurs centaines : 210 nappes phréatiques et 195 nappes
profondes12. L'extension de tous ces aquifères dont de grandes parties se
superposent, projetée au niveau du sol, représente une superficie de 120 000
km2 : 73 % du territoire national est aquifère.
aaa
a
(a) (b) (c)
Fig.3.2 : (a) Extension des nappes phréatiques ; (b) extension des nappes profondes ;
(c) superposition des nappes phréatiques et profondes
(D'après les bases de données DGRE).
12 En réalité, cette profusion d'unités aquifères ne correspond pas toujours à un découpage
géologique et cède parfois à des limites administratives, entre gouvernorats. En tout état de
cause, l'on s'en tient ici à la nomenclature de la DGRE, où une réflexion est en cours sur la
délimitation des nappes souterraines. Un nouveau découpage devrait se fonder sur les
structures géologiques, et faire autant que possible correspondre limites de bassins
superficiels et souterrains.
137
3.2- L’état des ressources en eau
3.2.1- Connaissance et évolution du bilan hydrique
national
La première estimation du bilan hydrique global de la Tunisie est due à
Tixeront et Berkaloff (1954). Elle attribue « au ruissellement les débits de
crue observés dans les principaux bassins hydrographiques, et le débit
d’étiage au drainage des nappes souterraines ». Le volume annuel moyen des
précipitations est évalué d'après la carte pluviométrique au 1/500000ème
établie par H.Gaussen et A.Vernet (1952), carte basée sur les observations
enregistrées de 1900 à 1940 par l'ensemble des postes du réseau
météorologique tunisien. De l’étude des bassins hydrographiques, les auteurs
déduisent que : (i) dans les régions au ruissellement actif, avec une hauteur
moyenne de précipitations supérieure à 300 mm/an, le drainage souterrain
après percolation représente en moyenne un tiers du ruissellement superficiel
(soit ¼ de l’écoulement total de surface, exemple : Medjerda à Medjez-el-
Bab) mais localement la percolation peut atteindre des valeurs élevées, le
ruissellement étant nul (cas de certains massifs calcaires) ; (ii) dans les
régions où les précipitations sont inférieures à 300 mm/an, en majorité des
bassins endoréiques, le ruissellement est localisé et rare et la percolation très
faible et difficile à évaluer.
Le Tableau 3.1 résume le détail des observations de Tixeront et Berkaloff
sur les principaux bassins en termes de précipitations, de ruissellement et de
percolation-drainage. Ce qui est important à noter ici est la part occupée par
le drainage souterrain dans l’écoulement superficiel total, part souvent
comptabilisée « eau de surface » dans les estimations des ressources.
138
Tableau 3.1 : Bilan d'eau de différents bassins, d'après Tixeront et Berkaloff (1954)
Tixeront et Berkaloff ont étendu cet échantillon d’observations à
l’ensemble du territoire tunisien, pour déterminer et présenter ainsi les
termes du bilan global de la Tunisie :
- Entées : (i) Précipitations : 32,5 km3/an, (ii) Apports en surface
d’Algérie (Medjerda et Mellègue) : 0,37 km3/an, (iii) Apports souterrains
d’Algérie (nappes sahariennes) : 0,18 km3/an ; total : 33 km3/an ;
- Sorties : (i) Ecoulements totaux par les cours d’eau (en mer, dans les
chotts et sebkhas) : 2 km3/an, (ii) Fuites souterraines en mer (golfe de Gabès
et littoral Nord) : 0,2 km3/an, (iii) reprise atmosphérique : 30,8 km3/an ;
total : 33 km3/an ;
Ces résultats appellent deux commentaires : (i) sur les 2 km3/an
d’écoulements totaux, le quart environ représente ce que les auteurs
appellent « percolation-drainage », soit 500 Mm3/an pour la recharge des
eaux souterraines et cela ne concerne que les régions les plus arrosées ; cette
estimation était donc vouée à être révisée à la hausse ; (ii) les auteurs
précisent que le volume de 32,5 km3 correspond à une lame d’eau moyenne
de 250 mm ; la superficie correspondante est donc bien de 130 000 km2,
excluant les territoires sahariens
En 1957, les précipitations sur la Tunisie (Tixeront, 1957) sont portées à
33 km3/an, et le ruissellement moyen confirmé à 2 km3/an répartis ainsi :
Medjerda 1 km3/an ; Ichkeul 0,25 km3/an ; Extrême Nord 0,25 km3/an ; reste
de la Tunisie 0,5 km3/an.
Dans une note intitulée « le problème de l’eau en Tunisie », M.Chaumont
(1963) propose un nouveau bilan global de la Tunisie où « le Ruissellement
total » est porté à 2,5 km3/an, et où les « ressources annuelles moyennes
exploitables » de toutes les nappes souterraines sont estimées à 700 Mm3/an,
dont 250 Mm3 pour les « nappes profondes », et 450 Mm3 pour les « nappes
phréatiques ». Cette estimation du ruissellement global sera confirmée par
Kasseb
B11
Rhezala
B20
Medjerda
Ghardimaou
Medjerda
Medjez Bab
Kebir
Si Aouidat
Nebana
Si Messaoud
Mellègue
K13
Zeroud
Sidi Saad
Total
Précipitations mm/an 1260 990 940 670 510 540 470 425 330
Ruissellement mm/an 456 388 276 102 34 37 33 18 6
Percolat./drainage mm/an 51 132 67 42 11 8 7 2 1
Ruissellement % 36.2% 39.2% 29.4% 15.2% 6.7% 6.9% 7.0% 4.2% 1.8%
Percolat./drainage % 4.0% 13.3% 7.1% 6.3% 2.2% 1.5% 1.5% 0.5% 0.3%
Superficie Bassin km2 108 100 140 1560 20930 225 958 8800 8940 40201
Précipitations Mm3/an 136 99 132 1045 10674 122 450 3740 2950 18303
Ruissellement Mm3/an 49 39 39 159 712 832 158 54 1090
Percolat./drainage Mm3/an 6 13 966 230 2 7 18 9293
139
les hydrologues tunisiens, puis légèrement réévaluée grâce à l’évolution des
observations, jusqu’à se stabiliser à 2700 Mm3/an dès 1990.
H.Zebidi (1966) puis le BIRH (1967) publient deux notes établissant
l’état des ressources des nappes respectivement phréatiques et profondes,
état résumé par le Tableau 3.2.
Tableau 3.2 : Ressources en eau des nappes souterraines de Tunisie,
d'après Zebidi (1966) et BIRH (1967)
En 1974, les ressources en eaux souterraines (DRE, 1974) seront portées
à 1135 Mm3/an, dont 615 Mm3/an sont exploités, laissant une disponibilité
de 520 Mm3/an. En 1980, la DRE publie un nouveau bilan (Zebidi, 1980)
des ressources en eau où :
(i) - Les ressources en eaux de surface sont portées à 2580 Mm3/an dont
860 pour l’Extrême Nord et l’Ichkeul, 1000 pour la Medjerda, 225 pour le
Cap Bon et Miliane, 325 pour le Centre, 170 pour le Sud.
(ii) - Les ressources en eaux souterraines sont réévaluées à 1517 Mm3/an
qui se répartissent en : a) nappes phréatiques (ressources 486 Mm3/an,
exploitation 395 Mm3/an), b) nappes profondes (ressources 1031 Mm3/an,
exploitation 530 Mm3/an).
M. Hamza (1991) et R. Kallel (1995) feront encore le point des nouvelles
estimations de ressources. Le tableau 3.3 enfin tente de récapituler
l’ensemble des évaluations successives des ressources en eaux de surface et
souterraines, de l’origine à 2010, les plus récentes (1995 à 2010) se référant
aux valeurs publiées respectivement dans : (i) les Annuaires d’exploitation
des nappes profondes et les Situations d’exploitation des nappes phréatiques
de la DGRE ; (ii) l’exploitation des barrages enregistrée dans les bases de
données de la Direction Générale des Barrages et Grands Travaux
Hydrauliques, DGBGTH ; (iii) les archives du BIRH relatives au
recouvrement des redevances de prélèvement par les prises d’eau en oueds.
Nappes phréatiques Nappes profondes Total
Nombre de nappes 50 35 85
Ressources dynamiques Mm3/an 180 700 880
Exploitation estimée Mm3/an 150 350 500
Exploitation supplémentaire possible Mm3/an 100 350 450
140
Année 1954 1963 1967 1974 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Ressources en Eaux de surface estimées 2000 2500 2500 2500 2580 2580 2700 2700 2700 2700 2700
Ressources des Nappes phréatiques estimées 450 180 300 486 586 669 718 737 746 746
Ressources des Nappes profondes estimées 250 700 834 1031 1139 1171 1211 1330 1410 1421
Ressources en Eaux souterraines, total 500* 700 880 1134 1517 1725 1840 1929 2067 2156 2167
Mobilisation Eaux de surface 344 1390 1450 1580 1750 1900 1940
Prélèvements eaux de surface ** 450 550 710 850
Prélèvements Nappes phréatiques 150 200 395 563 699 745 778 807 810
Prélèvements Nappes profondes 350 415 530 669 851 928 1078 1150 1188
Prélèvements Eaux souterraines, total 500 615 925 1232 1550 1673 1856 1957 1998
Ressources Totales 2000 3200 3380 3634 4097 4305 4540 4629 4767 4856 4867
Prélèvements Totaux 2123 2406 2667 2848
*Percolation-drainage, incluse dans le ruissellement total; **Barrages, prises d'eau, épandages, lacs collinaires
Tableau 3.3 : Estimations successives, de 1954 à 2010, des ressources
en eau de la Tunisie et des prélèvements d’eau, en Mm3/an
Dans le détail, les apports en eau de surface se manifestent
essentiellement en Tunisie du Nord, qui concentre 82 % du total des
ruissellements du pays. Le tableau 3.4 présente les dernières évaluations des
apports par bassin publiées par la DGRE en 2005.
Région naturelle Ensemble hydrographique Bassin hydrographique Apport Mm3/an Total ensemble Total Région
Cotiers Extrème Nord 590
Ichkeul Bizerte 370
Haute Medjerda Jendouba 215
Mellègue 190
Tessa 100
Bou Heurtma 135
Kasseb 59
Khalled 35
Siliana 80
Bassin intermédiaire 186
Miliane & cotiers 50
Cap Bon 160
Sahel Nord 40
Nebhana 25
Merguellil 35
Zeroud 105
Sisseb & S.Kelbia 25
Sahel Sousse, Si El Hani 42
Sahel de Sfax 18
Oued Leben 25
Sebhet Nouail 25
Chott Gharsa 70
Cotiers Gabès 23
Djeffara 40
Chotts Djerid & Fejej 32
Extrème Sud 25
2210
2700
85
95
120
215
275
960
1000
250
190
Total Tunisie Mm3/an
Sahel
Nouail Gharsa
Djeffara Extrème Sud
Nord
Centre
Sud
Medjerda
Extrème Nord & Ichkeul
Cap Bon, Miliane, Sahel Nord
Sebkhet Kelbia
Tableau 3.4 : Apport moyen interannuel en eau de surface par bassin
hydrographique (DGRE, 2005)
Ainsi, et au terme de plusieurs décennies d’études et de recherches, et
d’évolution continue des termes du bilan, la connaissance de base des
ressources en eaux, notamment souterraines, corollaire du niveau
d’exploitation et d’analyse des réseaux de suivi hydrologique et
hydrogéologique, parait encore manifestement insuffisante. C’est ce que
souligne la figure 3.3 qui présente, sur l’exemple de la Tunisie, les
évolutions qu’ont connu respectivement les estimations des ressources en
141
eaux de surface, des ressources en eaux souterraines exploitables, et le
niveau des prélèvements, entre 1954 et 2010.
Si pour les eaux superficielles, dont les flux sont visibles et mesurables,
on a pu très tôt accéder à des ordres de grandeur plausibles, et où l’on
observe très rapidement une certaine stabilisation des valeurs estimées, il
n’en est pas de même pour les eaux souterraines, dont la valeur actuelle des
ressources représente plus du quadruple des estimations initiales. Il s’agit
bien entendu ici de ressources évaluées, dont la croissance traduit bien les
progrès de la connaissance des prélèvements. Une telle évolution montre à
quel point la réduction des incertitudes d’estimation est stratégique en
Tunisie, où le bilan besoins-ressources est si serré. Cela traduit clairement la
nécessité d’investir encore et bien plus dans la connaissance des éléments
qui déterminent la ressource en eau souterraine.
Fig.3.3 : Evolution, de 1954 à 2010, des ressources en eau de surface,
des ressources et des prélèvements d'eau souterraine.
Par ailleurs, les grands changements hydrologiques observés ou
pressentis (artificialisation quasi-totale du cycle hydrologique national,
changement climatique), nécessitent également de réviser en permanence
nos connaissances sur les précipitations et sur les écoulements de surface, et
de redéfinir le régime des cours d’eau superficiels.
500
1000
1500
2000
2500
3000
1954 1963 1967 1974 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
Ressources eau souterraine
Prélèvements eau souterraine
Ressources eau de surface
Mm3/an
142
3.2.2- Les ressources en eaux pluviales
Les ressources en eaux pluviales sont définies comme le volume des
précipitations mesurées en année hydrologique moyenne sur l'ensemble du
territoire tunisien. Calculée sur une série de près de 90 ans couvrant
l’ensemble des régions13 allant de 1916 à 2004, la pluviométrie moyenne de
Tunisie, pondérée par les superficies des régions, s’établit à 220 mm/an,
présentant un maximum de 387 mm et un minimum de 127 mm. Cette série
historique n’indique aucune tendance d’évolution à long terme (Fig.3.4).
Cela correspond, pour une superficie de 164 420 km2 incluant le territoire
national continental et insulaire, à un volume moyen précipité égal à 36
km3/an, avec un maximum de 63,6 km3/an (1969-70) et un minimum de 21
km3/an (1946-47).
3.2.3- Les ressources en eau de surface
Les ressources en eau de surface représentent la partie du ruissellement
qui, ayant échappé à l’évaporation et à l’infiltration, se trouve concentrée par
le bassin versant dans les cours d’eau, sous forme de débit de crue et débit de
base.
Fig.3.4 : Lame d'eau précipitée moyenne sur la Tunisie et tendance à long terme
(1916-2004)
13 Séries observées synchrones représentatives des 24 gouvernorats ; pluies moyennes
pondérées d'après les séries de valeurs annuelles communiquées par Mustapha
Saadaoui (DGRE), Communication personnelle aux auteurs.
Pluviométrie Moyenne Tunisie; mm/an
100
150
200
250
300
350
400
1916
1920
1924
1928
1932
1936
1940
1944
1948
1952
1956
1960
1964
1968
1972
1976
1980
1984
1988
1992
1996
2000
2004
143
Fig.3.5 : Ressources pluviales de la Tunisie de 1916 à 2004.
Pour les trois grandes régions naturelles du pays, les apports en eaux de
surface se présentent comme suit : (i) Le Nord, qui couvre 28 % de la
superficie du pays, fournit des apports en eaux de surface réguliers et
importants évalués à 2,2 km3/an, soit 82 % du potentiel total du pays ; (ii) Le
Centre couvre 28 % en superficie et apporte des ressources irrégulières
estimées à 0,28 km3/an soit 10 % du total ; (iii) Le Sud hyperaride, qui
couvre 44 % en superficie ne fournit que 0,22 km3/an soit 8 % du total. Le
potentiel national des ressources en eau de surface est estimé à 2,7 km3/an en
année moyenne, mobilisable par grands barrages, barrages et lacs collinaires,
diguettes d’épandage de crues, ouvrages de recharge de nappe, banquettes
antiérosives, citernes.
La ressource superficielle présente une très forte variabilité interannuelle,
avec un minimum de 0,78 km3/an observé14 en 1993-94 et un maximum de
11 km3/an en 1969-70. Le rapport max/min des apports annuels varie entre 9
au Nord et 180 dans le Sud. Les apports de base moyens des cours d'eau sont
évalués à 0,415 km3/an, et en cas de sécheresse généralisée, l’apport d’étiage
absolu minimum sur l’ensemble du pays est réduit à près de 0,150 km3/an
(Frigui, 2005). Par ailleurs, la qualité des eaux de surface varie beaucoup
selon les régions : alors qu’au Nord, 82 % des eaux de surface ont une
salinité inférieure à 1,5 g/L, cette proportion n’est plus que de 48 % au
Centre et de seulement 3 % au Sud (Kallel, 1994).
14 le minimum pluviométrique a été observé en 1946-47, mais à cette époque le réseau
hydrométrique n'était pas suffisant pour permettre une évaluation exhaustive des écoulements
de surface.
20
25
30
35
40
45
50
55
60
65
1916
1920
1924
1928
1932
1936
1940
1944
1948
1952
1956
1960
1964
1968
1972
1976
1980
1984
1988
1992
1996
2000
2004
Ressources Pluviales ; Km3/an
144
Fig.3.6 : Isohyètes moyens (mm/an) (source : Benzarti et Habaieb, 2001)
Les Eaux de surface transfrontières
Les principales entités hydrologiques transfrontières s'inscrivent dans les
trois ensembles hydrographiques suivants :
(i) - L'extrême Nord comprenant notamment les Oueds Barbara et
Mellila, se développe en Tunisie sur un bassin de 240 km2, traverse la
frontière et rejoint l'Oued Kebir de Annaba, véhiculant un apport moyen de
180 Mm3/an ;
(ii) - La Medjerda Nord et le Mellègue, prend sa source et se développe
en Algérie sur 7500 km2, puis traverse la frontière avec un apport moyen de
250 Mm3/an;
(iii) - Le Centre-Sud, comprend les Oueds Safsaf et Kebir, affluent du
Bayech de Gafsa, et apporte 25 Mm3/an en provenance de l'Algérie.
Depuis 25 ans, les deux pays ont respectivement, unilatéralement et sans
convention préalable, opté pour une mobilisation quasi totale des eaux de
surface s’écoulant sur leur propre territoire : l'Algérie avec la construction
d'une série de barrages sur la Medjerda et le Mellègue, la Tunisie par des
barrages sur les bassins de l'extrême Nord.
145
3.2.4- Les ressources en eau souterraine exploitables
Les Ressources en eaux souterraines exploitables de la Tunisie sont
évaluées par la DGRE à 2,17 km3/an, qui se décomposent comme suit :
(i) - 0,745 km3/an représentent les ressources renouvelables de l'ensemble
des nappes phréatiques, selon l'Annuaire 2005 de l'exploitation des nappes
phréatiques (DGRE, 2005).
(ii) - 1,42 km3/an représentent les ressources exploitables de l'ensemble
des nappes profondes, selon l'Annuaire 2007 de l'exploitation des nappes
profondes (DGRE, 2007).
Les volumes prélevés, selon les mêmes sources, sont estimés à 2 km3/an
: 0.81 sur les nappes phréatiques, 1,19 sur les nappes profondes, ce qui
représente un index d’exploitation [Rapport Prélèvements / Ressources] de
92 %. La figure 3.7 montre comment cet index a évolué au cours des 40
dernières années, avec un accroissement régulier de 1980 à 2000, puis une
légère amorce de stabilisation entre 2005 et 2010, mais sur une période trop
courte pour être significative.
Fig. 3.7 : Index d’exploitation des eaux souterraines de 1968 à 2010.
La valeur de cet indicateur au plan national cache des disparités à deux
niveaux. D’abord entre nappes phréatiques et nappes profondes : alors que
l’index d’exploitation des nappes profondes par forages est de 83 %, il
dépasse 108 % pour ce qui concerne les nappes phréatiques exploitées par
puits peu profonds. Ensuite, au niveau régional : sur 24 gouvernorats, cinq
[Nabeul, Kairouan, Tozeur, bili et Gabès] concentrent à eux seuls près de
50 % des ressources nationales et 50 % des prélèvements. Les plus forts taux
0.2
0.3
0.4
0.5
0.6
0.7
0.8
0.9
1
1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010
146
de surexploitation des nappes (index d’exploitation > 100 %) se situent à
Nabeul, Kairouan et Kébili.
Les observations qui précèdent sont fondées sur l’évaluation des
prélèvements et des ressources exploitables, mais chacun de ces termes du
bilan est lui même sujet à de fortes incertitudes. Il faut donc confirmer ces
estimations et ces tendances par l’enregistrement de paramètres mesurables,
le plus accessible et le plus significatif de la ressource quantitative étant le
niveau piézométrique de la nappe. A cet égard, l’observation régulière du
niveau des eaux souterraines a débuté en Tunisie il y a plus de soixante ans.
Depuis, le réseau d’observation n’a cessé d’évoluer. Composé aujourd’hui
de 3800 points de surveillance (puits, forages et piézomètres), le réseau
piézométrique national (Horriche, 2006) permet l’observation de 150
systèmes aquifères (composés de 160 nappes phréatiques et 120 nappes
profondes) et comporte des séries de mesures parfois longues de cinquante
ans.
3.2.5- Ressources renouvelables et faiblement
renouvelables ; retour sur les ressources en eaux
souterraines exploitables
Sur le plan quantitatif et selon leurs modalités de recharge, les nappes
souterraines de Tunisie peuvent, en toute première analyse mais sur un mode
assez réducteur, être classées en deux grandes catégories : (i) les nappes
souterraines renouvelables, (ii) les nappes souterraines faiblement
renouvelables.
Les ressources en eaux souterraines renouvelables résultent de la partie
infiltrée des précipitations, et du ruissellement de crues d’oueds, qui rejoint
en profondeur les nappes souterraines, définies en année hydrologique
moyenne. L’estimation des ressources renouvelables, ou recharge des nappes
souterraines, nécessite des protocoles longs et rigoureux, utilisés lors de
travaux de recherche scientifique sur des aquifères particuliers. Il n’existe
encore aucun programme de recherche d’envergure nationale dédié à la
question, et à fortiori pas de synthèse au niveau national.
Quant aux ressources en eaux souterraines faiblement renouvelables, la
gestion de leur exploitation fait simultanément appel aux concepts de flux et
de stock. Les quantités extraites proviennent à la fois : (i) du flux de
renouvellement de la nappe, (ii) du stock de réserves accumulées sur des
périodes d’échelle géologique. Cette situation caractérise certes toutes les
nappes souterraines (où toute exploitation prélève obligatoirement mais en
proportion inégale dans les réserves géologiques) mais plus particulièrement
les aquifères des grands bassins sédimentaires, dans lesquels la part
empruntée aux réserves peut devenir prépondérante et déterminante.
147
Dans les grands bassins aquifères, au delà du taux de recharge moyen,
l'utilisation de la part jugée exploitable, prélevée sur les réserves, devrait
produire un impact environnemental (baisse des niveaux et évolution des
salinités) considéré admissible pour la communauté nationale et pour les
générations futures. En Tunisie, ces considérations concernent
exclusivement le Sud tunisien : c'est notamment le cas du Système Aquifère
du Sahara Septentrional, le SASS, comprenant les nappes profondes du
Continental Intercalaire (CI) et du Complexe Terminal (CT), et dans une
certaine mesure celui de la plaine de la Djeffara, la plaine côtière de Gabès-
Médenine.
Les aquifères du Sud tunisien ont fait l'objet d’études hydrogéologiques
récentes approfondies, et de simulations sur des modèles numériques validés
sur des séries historiques consistantes : le modèle de la Djeffara (OSS, 2006)
et le modèle du SASS (OSS, 2003). Le bilan de la partie tunisienne du
SASS, calculé sur un siècle de 1950 à 2050 (Tab.3.5), indique que les flux
d’entrée du système se répartissent actuellement en trois parts équivalentes :
(i) la recharge locale des aquifères, (ii) les flux entrant aux frontières, (iii) les
prélèvements sur les réserves géologiques, et que ces proportions pourraient
garder des ordres de grandeur comparables à l’avenir.
Tab.3.5 : Bilan de la partie tunisienne du Système Aquifère du Sahara
Septentrional (nappes du Complexe Terminal (CT) et du Continental Intercalaire
(CI)), respectivement en 1950, 2000 et 2050.
Sur le Modèle SASS, le scénario dont les impacts ont été jugés
admissibles à l'horizon 2050, aussi bien en Tunisie, qu'en Algérie et en
Libye, est le scénario dénommé CI8-CT5, défini en commun et en
concertation par les trois pays (OSS, 2003), scénario selon lequel les
prélèvements tunisiens sont portés de 540 Mm3/an qui est leur niveau actuel,
à 710 Mm3/an, soit 155 et 560 pour le CI et le CT respectivement. Dans ce
scénario : (i) au CI, les prélèvements additionnels sont pour l'essentiel
délocalisés dans l'extrême sud, pour le reste dispersés et qui garantissent le
maintien de l'artésianisme dans le Djérid et la Nefzaoua ; (ii) au CT, les
1950 2000 2050
Entrées Mm 3/an
Recharge locale 210 210 210
Flux aux frontières (Algérie; Libye) 180 205 182
Contribution des Réserves 215 321
Sorties Mm 3/an
Drainage Chotts 185 40 0
Exutoire Tunisien (Chott Fejej) 105 49 3
Sources 60 1 0
Pompages 40 540 710
148
prélèvements additionnels sont minimes autour du Chott Djérid, zone à haut
risque, mais garantissent la poursuite du projet de Rjim Maatoug ; le reste est
redéployé dans des secteurs éloignés au sud de la Nefzaoua (Tembain, El
Ouaar), et pourrait constituer à moyen terme une solution alternative par
pompage et transfert pour contribuer à une éventuelle sauvegarde future des
oasis de Nefzaoua.
Sur le Modèle Djeffara, qui intègre nappes profondes et nappes
phréatiques, la recharge du système est estimée à 110 Mm3/an, et le scénario
acceptable selon les résultats du modèle porte l'exploitation du système de
151 Mm3/an qui est son niveau actuel, à 210 Mm3/an à long terme. Avec ce
scénario, le risque d'invasion marine est inexistant à l'horizon 2050, et les
rabattements sont faibles et localisés aux champs de pompage.
Si l'on tient compte des ressources des nappes phréatiques locales du
Djérid et Nefzaoua, estimées à 38 Mm3/an, les deux modèles auront ainsi
permis de définir à 958 Mm3/an l'ensemble des ressources en eau
exploitables dans le Sud tunisien, parmi lesquelles 358 Mm3/an, soit près de
38 % constituent la part strictement renouvelable "in situ". Le reste, soit 600
Mm3/an, provient sur le long terme à raison de 66 % par prélèvement sur les
réserves géologiques, qui se manifeste par des rabattements de niveaux, et
pour 33 % à partir des pays voisins, cette dernière partie étant elle même
pour une part prélevée sur les réserves et pour le reste renouvelée et
alimentée à l'extérieur du territoire national.
Sur le reste de la Tunisie, qui recouvre les régions du Nord et du Centre,
ce dernier qui inclut la région de Gafsa, les eaux souterraines sont
entièrement renouvelables et les ressources exploitables sont conformes à
celles recensées dans les derniers Annuaires, qui permettent de définir : (i)
les ressources renouvelables du Nord à 676 Mm3/an (ii) les ressources
renouvelables du Centre à 699 Mm3/an.
Ainsi et pour conclure sur cette question, l'ensemble des ressources en
eaux souterraines renouvelables en Tunisie peut être estimé à :
676 + 699 + 358 = 1733 Mm3/an,
Et l'ensemble des ressources en eaux souterraines exploitables à long
terme, sans considération de critères de qualité, est quant à lui évalué à :
1733 + 600 = 2333 Mm3/an,
dont environ 200 Mm3/an proviennent en permanence de l'extérieur des
frontières du pays.
149
3.2.6- Ressources exploitables avec prise en compte du
critère de salinité
Sur le plan qualitatif, le gisement géologique tunisien, où prédominent les
formations tertiaires parfois riches en éléments argilo-gypseux, a doté les
eaux souterraines de Tunisie de concentrations en sels, d’origine tellurique,
parfois non négligeables. Si l'on mesure le niveau d'acceptabilité d'usage des
ressources en eau par rapport au seuil de 1,5 g/l qui constitue l'objectif de
qualité d'approvisionnement des deux secteurs vitaux que sont l'eau potable
et l'irrigation, et par rapport au seuil de 4 g/l qui constitue une limite
d’utilisation en irrigation sous certaines conditions, on peut considérer que :
(i) seuls 18 % des eaux souterraines ont une salinité inférieure à 1,5 g/l,
(ii) 63 % ont une salinité située entre 1,5 et 4 g/l,
(iii) 19 % [29 % des nappes phréatiques, 13 % des nappes profondes]
présentent une salinité supérieure à 4 g/l, qui les classe dans la catégorie des
eaux saumâtres.
(iv) en définitive, 81 % sont réellement exploitables dans les divers
secteurs d’usages en toute sécurité et d’une façon durable en irrigation, et
seulement 18 % le sont pour l’eau potable.
Cette distribution dépend par ailleurs de la configuration des systèmes
aquifères : le tableau 3.6 et la figure 3.8 indiquent bien comment cette
distribution est plus favorable dans les nappes profondes, alors que les
nappes phréatiques présentent des eaux d'une qualité globalement plus
médiocre.
Appliqués aux ressources exploitables, que nous avons précédemment
estimées à 2 333 Mm3/an sans prise en compte du critère de qualité, les
ratios du tableau 3.6 suggèrent d'éliminer 19,6 % de ressources souterraines
classées comme saumâtres, soit 457 Mm3/an, dont l'utilisation sur le long
terme comporte un certain nombre de risques, notamment pour l'irrigation.
Cela ramènerait l'estimation des ressources en eau souterraines
exploitables, avec une qualité acceptable, à la valeur de 1 875 Mm3/an.
Tab.3.6 : Classes de salinité des prélèvements d'eaux souterraines, reconstituées
d'après les Annuaires DGRE 2005 et 2007, et les Bases de données DGRE.
RS < 1.5 g/L 1.5 < RS < 3 g/L 3 < RS < 4 g/L 4 < RS < 5 g/L 5 g/L < RS Total
Prélèvements nappes phréatiques Mm3/an 52 302 215 60 179 808
Prélèvements nappes phréatiques % 6% 37% 27% 7% 22%
Prélèvements nappes profondes Mm3/an 302 653 83 102 51 1191
Prélèvements nappes profondes % 25% 55% 7% 9% 4%
Prélèvements totaux Mm3/an 354 955 298 162 230 1999
Prélèvements totaux % 17.7% 47.8% 14.9% 8.1% 11.5%
150
Fig.3.8: Salinités des eaux des nappes profondes et phréatiques ;
source : Base de données DGRE.
Concentrées dans les régions bien arrosées du Nord, les eaux de surface
présentent des qualités considérablement plus favorables puisque 72 % des
ressources y ont des salinités inférieures à 1,5 g/l. Si bien que, en moyenne
nationale, l'ensemble des ressources en eau se répartissent quasiment à
égalité par rapport au seuil de 1,5 g/l : 49 % avec des concentrations
inférieures, 51 % avec des concentrations supérieures (Tab.3.7).
Tab.3.7 : Répartition de la qualité des ressources par rapport au seuil de 1.5 g/l.
Au niveau des diverses catégories d'usages par classe de salinités,
l'Annuaire 2007 de la DGRE présente les estimations de l'année pour les
nappes profondes. Si l'on admet que les eaux de toutes les nappes
phréatiques servent essentiellement pour l'irrigation, que 72 % des eaux
d'irrigation prélevées sur les eaux de surface ont une salinité inférieure à 1,5
Salinité
Ressources
totales
Eaux de
surface
Eaux
souterraines
inférieure à 1.5 g/L
49 %
72 %
16 %
supérieure à 1.5 g/L
51 %
28 %
84 %
151
g/l, que le reste des eaux d'irrigation de surface a une salinité comprise15
entre 1,5 et 3 g/l, que 100 % des eaux de surface captées pour l'eau potable
ont une salinité inférieure à 1,5 g/l, et que les prélèvements sur les eaux de
surface totalisent 780 Mm3/an en 2010 (Cf. tab.3.11 plus loin), le tableau 3.8
présente l'estimation des volumes exploités par catégorie d'usages et classe
de salinités.
Nous reviendrons, au cours du chapitre 5, sur les contraintes qu'exerce la
salinité au niveau de chacune des catégories d'usages, mais ces premiers
résultats suggèrent d'ores et déjà une remarque essentielle, assez paradoxale :
alors que les ressources en eau de la Tunisie sont globalement à près de 50 %
d'une bonne qualité physico-chimique (salinité < 1,5 g/l), le mode de gestion
actuel, qui privilégie l'exploitation des eaux souterraines et minimise
l'exploitation des eaux de surface, ne permet d'utiliser que 35 % d'eaux de
bonne qualité.
Tab. 3.8 : Volumes exploités par catégorie d'usages et classe de salinités
3.2.7- La ressource en eau du sol
La ressource en eau du sol est définie comme la part infiltrée des
précipitations, momentanément stockée dans le sol, qui se trouve disponible
: soit pour l’évaporation directe dans le cas d’un sol nu, soit pour
l’évaporation du sol et l’évapotranspiration des végétaux si le sol est couvert.
Elle correspond au concept de Réserve Utile (RU) des agronomes, notion
utilisée dans les modèles hydrologiques conceptuels. En théorie, la totalité
du stock d’eau du sol dans les limites de la RU peut être utilisée par les
15 Avec quelques exceptions telle la retenue de Sidi Saad où la salinité de l'eau prélevée pour
l'irrigation peut dépasser 4 g/l en été, et qui nécessite l'application de doses de lessivage. Sur
le bilan national, l'impact de l'usage d'eaux de surface présentant de telles salinités est
minime.
Salinité
Prélèvements
Mm3/an
%
Eau
Potable
Mm3/an
%
Irrigation
Mm3/an
%
Industries
non-
raccordées
Mm3/an
%
inférieure à 1.5 g/L
962
35%
425
80%
527
25%
10
16%
1.5 < salinité < 3g/L
861
32%
58
11%
791
37%
12
19%
3 < salinité < 5 g/L
631
23%
30
6%
586
28%
15
24%
supérieure à 5 g/L
260
10%
15
3%
220
10%
25
40%
2714
528
2124
62
152
plantes dans le cas d’une couverture très fournie comme une forêt dense ou
un gazon.
La ressource en eau du sol de Tunisie va concerner les terres cultivables
(5 millions ha), les terres de parcours (5 millions ha) et les forêts (près de un
million d’ ha), sur la superficie desquelles s’intègre la ressource pluviale.
L’évaluation de cette ressource à l’échelle de la Tunisie constitue une
entreprise complexe. Un certain nombre d’estimations hydrologiques
limitées à la ressource en eau du sol des terres cultivables ont pu être
proposées, qui la situent aux environs de 12 à 15 km3/an en année
hydrologique moyenne. Une estimation indirecte, par le calcul de
l’équivalent eau de la production agricole nationale (Besbes et al, 2002), en
fournit une évaluation par défaut (car ne concernant que les quantités
effectivement utilisées par les cultures pluviales et irriguées), sur la période
1990-1997, établie à près de 7 km3/an. Lors de l’étude de
l’évapotranspiration réelle, nous verrons qu’une évaluation plus extensive
(concernant la totalité des terres cultivables potentielles) en fournit une
estimation bien plus élevée, de l’ordre de 13 km3/an pour les seules terres
cultivables, auxquels devraient s’ajouter les contributions des terres de
parcours et des forêts.
3.2.8- L'impact des changements climatiques
Au niveau de la planète, le tableau 3.9 indique les changements de
précipitations calculés pour un scénario probable du Groupement
Intergouvernemental pour l’Etude du Climat (GIEC, ou IPCC en anglais).
Les résultats fournis par les derniers rapports du GIEC (IPCC, 2008 et 2009 ;
GIEC, 2013 ; Collins et al, 2013), fondés sur une moyenne de différents
modèles, sont cohérents avec ces prédictions.
Tableau 3.9 : Variation des précipitations moyennes de la deuxième moitié du XXIe
siècle par rapport à celles de la deuxième moitié du XXe siècle,
(D’après de Marsily, 2006)
Zone géographique Déc. À Mars Juin à Septembre
Afrique équatoriale + 25% + 10%
Afrique Sahélienne incertain + 30%
Afrique du Nord - 15% - 10%
Sud de l'Europe incertain - 20%
France + 15% incertain
Scandinavie + 25% + 15%
153
Ces prédictions sont, il est vrai, entachées d’incertitudes. Parmi les
conséquences majeures prévues concernant la distribution des ressources en
eau dans la région méditerranéenne, on prévoit :
(i) - une forte baisse, en moyenne, du taux d’humidité dans le sol
(évapotranspiration plus forte due à l’augmentation de la température et
diminution de la pluviométrie, en particulier en été) avec comme
conséquence une baisse de la production de l’agriculture pluviale ;
(ii) - un risque accru de sécheresses agricoles, qui se produisent au
printemps et en été ;
(iii) - un risque plus fort de sécheresses hydrologiques, survenant en
automne et en hiver, influençant le débit des cours d’eau et l’alimentation
des aquifères.
Il faut souligner que, si les incertitudes des modèles utilisés pour les
simulations sont inégalement réparties à la surface du globe, la plupart des
projections climatiques convergent sur un plus grand assèchement du
pourtour méditerranéen.
Scénarios pour la Tunisie :
En ce qui concerne plus particulièrement la Tunisie (MARH, GTZ et al,
2007), l’analyse de l’évolution des températures et des pluviométries
moyennes sur la Tunisie au cours du siècle passé (Fig. 3.9) indique (King et
al, 2007) :
(i) - Pour la température, la principale observation est une hausse
significative de +1,2 °C au cours du siècle. Cette hausse s’avère supérieure à
la hausse moyenne globale de +0,7 °C indiquée par le rapport 2001 de
l’IPCC.
(ii) - Pour les précipitations, aucune tendance significative n’est décelée.
On notera toutefois que la période de référence 1961-1990 est caractérisée
par la variabilité la plus forte (écart type le plus élevé) en comparaison avec
les périodes précédentes 1931-1960 et 1901-1930.
154
Fig.3.9. Evolution des températures et des précipitations moyennes au cours du
20ème siècle en Tunisie ; (Source : MARH, GTZ et al, 2007)
Dans le contexte des changements climatiques, l’évolution à venir de la
pluviométrie et de la température ont pu être modélisées à l’échelle globale
mais avec des incertitudes relativement importantes. L’ampleur et la nature
exacte des changements futurs restent à préciser, c’est pourquoi des
précautions doivent être prises pour transposer des informations globales à
des échelles régionales ou locales. Le scénario moyen retenu confirme ces
difficultés : si l’augmentation générale des températures est admise par tous,
l’évolution de la pluie est tantôt positive tantôt négative, variable selon les
régions et les saisons, et à l’échelle globale, la diminution est très faible, ce
qui n’affectera pas sensiblement les écoulements et les apports aux retenues
des barrages (Lahache Gafrej, 2007).
Mais la diminution des précipitations estivales et l’augmentation des
températures et de l’ETP vont accroître le déficit hydrique du sol. Ceci va
engendrer des difficultés supplémentaires pour l’agriculture pluviale, et une
exploitation encore plus importante des eaux souterraines. Par ailleurs,
l’élévation du niveau de la mer peut aggraver la salinisation de certaines
nappes littorales et contribuer à la diminution du potentiel des eaux
souterraines à long terme. Les changements climatiques se traduisent pour la
Tunisie par une variabilité accrue du climat. En particulier, les phénomènes
extrêmes (sécheresses, inondations) devraient augmenter en fréquence et en
intensité, les années très sèches devant se succéder plus souvent à l’avenir.
155
3.3- La mobilisation des ressources
en eau
3.3.1- Grands barrages, lacs et barrages collinaires
En 2010, la Tunisie comptait 30 grands barrages, dont la capacité utile
est estimée à 2,75 km3, permettant de régulariser un apport total de 1,7
km3/an (l’apport moyen observé au cours des 20 dernières années s’établit à
1,65 km3/an). A cela s’ajoutent 225 barrages de petite dimension et 750 lacs
collinaires, mobilisant respectivement 0,15 et 0,05 km3/an. L’ensemble de
cette infrastructure hydraulique permet de mobiliser 1,9 km3/an, soit 70,4 %
de l’ensemble des ressources en eau de surface.
Les ressources en eau de surface (écoulements annuels moyens) ont été
évaluées à 2,7 km3/an, valeur consolidée et validée par l’analyse des apports
sur des séries de 45 valeurs annuelles (1960-2005) observées sur l’ensemble
du pays (Frigui et Touzi, 2009). Cette analyse confirme la grande variabilité
des apports en eau de surface : une année sur deux, le volume des apports
disponibles ne dépasse pas 2,3 km3/an, et 1,4 km3/an une année sur cinq.
Pour disposer de la valeur moyenne une année sur deux, la capacité de
stockage doit donc prévoir, par rapport aux allocations, une réserve
additionnelle de 400 Mm3, et plus encore lorsqu’on s’assigne une plus
grande sécurité, tenant compte notamment de l'évaporation dans les retenues.
3.3.2- Nappes phréatiques et nappes profondes
Les ressources des nappes phréatiques représentent 50 % des ressources
en eaux souterraines renouvelables de la Tunisie. Avec l’évolution des
connaissances, l’estimation du volume global de la ressource disponible
renouvelable est passée de 486 Mm3/an en 1980 à 746 Millions de m3/an en
2005, et le volume total exploité est passé de 395 Mm3/an en 1980 (avec
23000 puits équipés de pompes) à 810 Mm3/an en 2010 (avec plus de
100000 puits équipés de pompes).
156
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
Allo
Soutiré
Accumulé
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
3500
4000
Fig.3.10 : Bilan des Grands Barrages, en Millions de m3
(Base de données des Grands Barrages16, DGBGTH)
L’estimation des ressources exploitables des nappes profondes est quant à
elle passée de 1000 Mm3/an en 1980 à 1420 Mm3/an en 2010 ; avec une
exploitation qui progresse de 530 Mm3/an à 1190 Mm3/an durant la même
période.
Le nombre de forages réalisés en Tunisie de 1991 à 2010 s’élève à 9300
forages, soit près de 470 forages/an en moyenne. Ces forages se répartissent
en 2900 forages publics (forages de reconnaissance, forages SONEDE,
autres forages publics) et 6400 forages privés autorisés.
Dans l’espace et dans le temps, on peut observer des tendances tout à fait
significatives :
(i) - Le nombre de forages privés, dérisoire au cours des années 80,
dépasse celui des forages publics en 1996, puis définitivement depuis 2000
(Fig.3.11). Cette tendance va s’accentuant, jusqu’à atteindre 92 % du total
des forages en 2010. Ce constat ne concerne que les forages privés
régulièrement autorisés.
16 Eléments fournis par M.H. Louati, Directeur à DGBGTH, communication personnelle à
l’auteur.
157
(ii) - Par gouvernorat, la distribution des forages est très inégale : les 3
gouvernorats de Nabeul, Ben Arous et Kasserine comptent à eux seuls pour
plus de 50 % du nombre de forages réalisés.
Fig.3.11 : Evolution du nombre de forages publics et privés, réalisés de 1991 à 2007
(Base de Données Forages ; DGRE).
3.3.3- L’Evapotranspiration et l’eau verte
L’Evapotranspiration (ET), somme des quantités d’eau dégagées dans
l’atmosphère par évaporation à la surface du sol et par transpiration des
plantes, constitue un élément essentiel du cycle de l’eau. Dans une région
donnée et à l’échelle de la saison ou de l’année, les quantités d’eau
mobilisables par l’homme et par les écosystèmes représentent généralement
la différence entre les précipitations cumulées et l’ET. Or la détermination
précise de ces deux quantités est confrontée aux mêmes difficultés, en raison
des très fortes hétérogénéités spatiales et temporelles dues aux variations des
faciès géographiques et climatiques. Les données de télédétection peuvent
alors fournir des observations continues du champ des précipitations et de
l’ET. A cet effet, le MODerate Resolution Imaging Spectroradiometer
(MODIS), embarqué sur les satellites TERRA et AQUA, fournit des
informations précises sur la végétation et le bilan d’énergie à la surface du
sol, autorisant une modélisation fiable de l’ET (Qiaozhen Mu et al, 2007).
Cette modélisation est validée par un réseau mondial de stations de mesures
au sol, et fournit les cartes mondiales de l'Evapotranspiration, des
Précipitations, et de P-ET qui représente l’écoulement total, le tout intégré
sur les superficies de terres agricoles.
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
0
100
200
300
400
500
600
700
800
forages publics
forages privés
158
En Tunisie, la connaissance du bilan annuel de l’ET permet de préciser,
sur les quantités d’eau appliquées, provenant des précipitations et de
l’irrigation, quels sont les volumes effectivement consommés et dégagés
dans l’atmosphère. La mission WaterWatch utilise les signaux TRMM
(Tropical Rainfall Measuring Mission, une mission commune NASA-
Agence aérospatiale japonaise JAXA), calés sur le réseau de l'Institut
National de la Météorologie (INM), pour la génération des pluies
mensuelles sur l’ensemble des terres agricoles cultivées. Sur les deux années
de référence choisies, 2000-2001 et 2006-2007, la modélisation de l’ET
réelle sur ces deux années fournit les cartes de l’évapotranspiration réelle sur
les terres cultivées, qui est comparée à la carte des précipitations
(WaterWatch, 2008). Le tableau 3.10 présente l’ensemble des résultats
obtenus.
Le résultat final de l’étude peut se résumer au bilan hydrique des terres
agricoles présenté sur les dernières lignes du tableau 3.10. Sur l’année 2006-
2007, année humide, le bilan est positif : l’évapotranspiration réelle est
inférieure à la somme des apports (pluie et irrigation) ; l’excédent va
alimenter les ressources hydrauliques : ruissellement et infiltration en
profondeur. Quant à l’année 2000-2001, qui est une année sèche, elle
indique un bilan négatif : l’évapotranspiration réelle est supérieure à la
somme des apports, le déficit est prélevé sur la réserve en eau du sol
constituée l’année précédente. On notera que le bilan des zones irriguées est
quasiment nul en année sèche : la dose d’irrigation suffit tout juste à
compenser l’ET.
L’étude WaterWatch constitue une étude expérimentale à caractère
démonstratif, appelée à connaître des développements, notamment par une
extension temporelle et spatiale (bilan hydrique des terres de parcours et des
forêts), et par des campagnes consistantes de calage sur le terrain.
Cultures
Irriguées
Cultures
Pluviales
Total Terres
cultivables
Superficie
km23950 41000 44950
2000-2001 1.02 8.90 9.92
2006-2007 1.60 14.86 16.46
2000-2001 0.71 0.71
2006-2007 0.56 0.56
2000-2001 1.73 8.90 10.63
2006-2007 2.15 14.86 17.02
2000-2001 1.69 1.69
2006-2007 1.85 1.85
2000-2001 9.56 9.56
2006-2007 12.38 12.38
2000-2001 1.69 9.56 11.26
2006-2007 1.85 12.38 14.22
2000-2001 0.03 -0.66 -0.63
2006-2007 0.31 2.49 2.80
Apport Pluviométrique, km3
Apport à la parcelle, eau superficielle et eau souterraine, km3
Apport d'eau total, km3
Bilan Hydrique , km3
Evapotranspiration des zones irriguées , km3
Evapotranspiration des zones pluviales, km3
Evapotranspiration totale des zones cultivées, km3
Tab.3.10 : Résultats de la Mission WaterWatch pour les deux années de
référence : 2000-2001 et 2006-2007 (valeurs en km3/an).
159
3.3.4- Mobilisation des eaux de surface et ouvrages de CES
Il est classiquement admis que sur les 2,7 km3/an d’eaux de surface, une
partie, qui est de l’ordre de 0,6 km3/an de ruissellement faiblement
concentré, est considérée comme ne pouvant être mobilisée que par des
techniques classiques de CES dont les plus répandues sont les ouvrages de
collecte des eaux de ruissellement ou les terrasses de niveau traditionnelles,
mécanisées depuis plusieurs décennies sous forme de banquettes DRS
(Défense et Restauration des Sols) ou CES (Conservation des Eaux et du
Sol). Au cours des 40 dernières années, ces banquettes antiérosives
mécanisées ont recouvert en Tunisie près d’un million ha de terres
labourables et de parcours. Lorsque ces aménagements sont complétés par la
mise en défens, ils ont provoqué une régénération spectaculaire des terres de
parcours. Mais quel a été l’impact de ces ouvrages sur le bilan hydrique ? Si
ces ouvrages, réalisés dans les règles de l’art, sont incontestablement
efficaces pour limiter l'érosion, ils ne le sont pas toujours pour les ressources
hydrauliques car ils diminuent sûrement le ruissellement et n'augmentent
l'infiltration efficace que s'ils sont situés sur des aires de recharge de nappe,
ce qui arrive exceptionnellement. Ces ouvrages sont en tout cas reconnus
pour augmenter un peu plus l'évapotranspiration, en favorisant
l’accumulation des ressources en eau du sol et la production d’eau verte.
3.4- L’état des usages de l’eau
3.4.1- Les usages industriels
Les données sur l’usage industriel de l’eau sont gérées par 3 organismes :
(i) la SONEDE contrôle les volumes distribués aux industries connectées au
réseau et qui se sont élevés à 35 Mm3/an en 2005, (ii) la DGRE, par ses
enquêtes sur l’exploitation des nappes profondes, contrôle les prélèvements
des industries non raccordées, lesquelles ont utilisé 60 Mm3/an en 2005,
(iii) l’ONAS de son côté, dans le cadre de sa mission de contrôle des
pollutions d'origine industrielle, a mis en place une base de données
exhaustive sur les rejets hydriques industriels : le « Cadastre des Rejets
Hydriques Industriels », régulièrement mise à jour et qui, moyennant la prise
en compte de la part des « consommations nettes » de certaines industries17,
17 La part de consommation nette varie avec le type d’industrie: inférieure à 10% pour le
textile ou la mécanique, supérieure à 80% pour une briqueterie (Ben Messaoud, 1998)
160
corrobore les volumes enregistrés respectivement par la SONEDE et la
DGRE. Etant donné que les quantités utilisées par l’industrie sont
globalement modérées, et que la redevance de prélèvement sur les eaux
souterraines est encore relativement dérisoire, les industriels ne sont pas
fortement incités à introduire des procédés économes en eau. Il n’existe pas
encore de normes tunisiennes pour les usages industriels et le recyclage n’est
pratiqué que par quelques rares unités.
3.4.2- L’usage d’eau potable
Les volumes distribués par les réseaux de la SONEDE s’élevaient à 495
Mm3 en 2011. La consommation domestique représente 72 % de ces
quantités, la part des établissements collectifs 13 %, celle des industriels
branchés 9 % et la consommation touristique 6 %. Par ailleurs, une part des
besoins est assurée par des prélèvements directs sur les nappes souterraines :
66 % de la consommation du secteur industriel et 15 % de la consommation
touristique.
3.4.3- L’usage touristique
La consommation individuelle du touriste (550 l/j/lit occupé en moyenne
en 2006 ; 900 l/j pour les hôtels 5 étoiles (Guefrej, 2007b)) est très élevée :
en moyenne cinq fois, en consommation journalière, celle d’un résident.
Cependant, la somme des consommations de l’ensemble du secteur
touristique atteint 30 Mm3/an ce qui ne représente que 1 % de l’ensemble des
ressources exploitées, y compris pour le secteur agricole, et 6 % des
ressources allouées à l’eau potable.
3.4.4- Usage agricole
Les prélèvements d’eau totaux ont atteint 2,8 km3/an en 2010, dont 2,185
km3/an alloués à l’irrigation, soit 78 % (17 % étant prélevés pour les
collectivités et 5 % pour l’industrie et le tourisme). La demande de
l’irrigation provient pour 77 % des eaux souterraines, pour 22 % des eaux de
surface, et pour 1 % de la réutilisation des eaux usées traitées.
3.4.5- Demande en eau environnementale et bilan des
usages
La réalisation des différents programmes d’aménagement hydraulique a
conduit à une forte artificialisation du cycle de l’eau. Cela se traduit par une
réduction de l’alimentation des hydro-systèmes, qui n’est pas sans
conséquences sur les milieux et sur les écosystèmes aquatiques continentaux
et littoraux. Dans ces conditions, la protection des milieux passe par une
prise en compte systématique de la demande en eau qu’il s’agit d’évaluer
pour l’inclure dans les programmes d’allocation de la ressource : lâchers
161
d’eau pour l’alimentation des milieux lacustres, des zones humides et pour la
recharge des nappes.
Les caractéristiques de l’environnement tunisien, dont le climat est la
manifestation la plus évidente, nécessitent par ailleurs de préserver un
certain volume stocké dans les barrages pour une utilisation différée, qui
peut représenter près du tiers des eaux de surface mobilisées. En effet,
lorsqu’on mobilise en la régularisant une grande partie ou même l’ensemble
de la ressource en eau de surface, le volume annuel réellement utilisable doit
toujours rester inférieur au volume régularisé, pour que les réservoirs
assurent leur fonction de stockage non seulement saisonnière mais aussi
interannuelle.
Le tableau 3.11 récapitule l’ensemble des allocations d’eau répertoriées
entre 1990 et 2010, classées par origine de la ressource.
Une première lecture de ce tableau semble indiquer que les eaux
souterraines sont aujourd’hui exploitées à un taux de 93 %, alors que les
eaux de surface ne seraient exploitées qu’à seulement 29 %. Mais si l’on ne
se limite pas aux usages traditionnellement comptabilisés, et directement
valorisables, de l’eau (AEP, industrie, irrigation), et que l’on étende
l’exercice à d’autres types d’usages, notamment aux usages
environnementaux qui regroupent pour le cas particulier de la Tunisie :
(i) - l’alimentation artificielle des zones humides, de l’ordre de 100
Mm3/an (actuellement limitée au système Ichkeul) ;
(ii) - l’alimentation artificielle des nappes souterraines surexploitées,
estimée à 50 Mm3/an en moyenne;
(iii) - l’évaporation dans les retenues, évaluée à 150 Mm3/an ;
Dans ce cas, l’exploitation des eaux de surface comptabilisée en 2010
passerait de 780 Mm3/an (Tab.3.11) à un total de 1080 Mm3/an, ce qui
représente un taux d’exploitation effectif de 40 %. Une telle description doit
toutefois tenir compte du fait que les grands projets hydrauliques (eau
potable et irrigation) exploitent progressivement les allocations qui leur sont
réservées et cette sous exploitation momentanée des eaux de surface est
généralement vouée à être oblitérée sur le moyen terme.
162
Tab.3.11 : Les différents usages des ressources en eau de 1990 à 2010,
exprimés en Mm3/an.
3.5- Bilans ressources usages :
déséquilibres régionaux et grands
transferts
Par grande région et par gouvernorat, la répartition géographique des
ressources hydrauliques est présentée dans le tableau 3.12. Ce tableau
indique également la répartition des quantités allouées aux divers usages de
l’eau : (i) irrigation, avec indication des diverses sources d’eau, (ii) eau
potable, (iii) industries raccordées et non raccordées (incluant le tourisme).
Cette esquisse de bilan régional résulte du croisement et du traitement de
multiples sources de données, qui ne sont pas toujours synchrones ni
homogènes : Annuaire des nappes profondes DGRE 2007, Annuaire des
nappes phréatiques 2005, Rapport SONEDE 2010, plusieurs notes inédites
de la DGGR. Cette diversité des sources incite à considérer avec beaucoup
de prudence le détail des résultats obtenus au terme de cet exercice. On peut
toutefois, sur un plan global, admettre ces bilans régionaux comme
plausibles et acceptables.
Ces données ont permis de construire le graphique de la fig.3.12 qui
indique, par gouvernorat, les excédents et les déficits des prélèvements d’eau
(valeurs 2010) par rapport aux ressources locales reconnues. Ce graphique
Ressources
Mobilisable
Prélev
Agric.
Prélev
AEP
Prélev
Ind.
Tour
isme
Total
exploité
%
Exploité
Ressources
Mobilisable
Agric.
Barrag
Agric.
Divers **
AEP
barrag
Total
exploité
%
Exploité
Ressources
Mobilisable
Agricult
ure
Eau
Potable
Ind non
connec
Total
exploité
%
Exploité
1990 1840 1330 148 56 1534 83% 2700 200 45 143 388 14% 4540 1575 291 56 1922 42%
1991 1846 1333 142 59 1534 83% 2700 250 71 151 472 17% 4546 1654 293 59 2006 44%
1992 1851 1364 152 60 1576 85% 2700 250 106 152 508 19% 4551 1720 304 60 2084 46%
1993 1856 1381 153 78 1612 87% 2700 250 175 162 587 22% 4556 1806 315 78 2199 48%
1994 1871 1431 163 63 1657 89% 2700 250 179 170 599 22% 4571 1860 333 63 2256 49%
1995 1929 1440 168 65 1673 87% 2700 250 282 155 687 25% 4629 1972 323 65 2360 51%
1996 1940 1524 154 70 1748 90% 2700 250 341 163 754 28% 4640 2115 317 70 2502 54%
1997 1942 1541 152 67 1760 91% 2700 294 309 175 778 29% 4642 2144 327 67 2538 55%
1998 1955 1544 158 66 61774 91% 2700 300 327 175 802 30% 4655 2171 333 72 2576 55%
1999 2111 1562 166 67 61801 85% 2700 402 151 194 747 28% 4811 2115 360 73 2548 53%
2000 2135 1608 175 69 51857 87% 2700 400 116 193 709 26% 4835 2124 368 74 2566 53%
2001 2140 1640 184 69 51898 89% 2700 400 88 193 681 25% 4840 2128 377 74 2579 53%
2002 2118 1662 195 58 51920 91% 2700 361 107 213 681 25% 4818 2130 408 63 2601 54%
2003 2136 1644 195 55 51899 89% 2700 403 85 214 702 26% 4836 2132 409 60 2601 54%
2004 2155 1653 213 58 31927 89% 2700 405 77 232 714 26% 4855 2135 445 61 2641 54%
2005 2155 1660 213 58 31934 90% 2700 409 69 237 715 26% 4855 2138 450 61 2649 55%
2006 2155 1680 218 58 31959 91% 2700 382 98 240 720 27% 4855 2160 458 61 2679 55%
2007 2155 1700 228 58 41990 92% 2700 382 98 263 743 28% 4855 2180 491 62 2733 56%
2008 2165 1705 232 58 41999 92% 2700 382 98 277 757 28% 4865 2185 509 62 2756 57%
2009 2165 1705 240 58 42007 93% 2700 382 98 287 767 28% 4865 2185 527 62 2774 57%
2010 2165 1705 250 58 42017 93% 2700 382 98 301 781 29% 4865 2185 551 62 2798 58%
**Divers: prises d'eau, oueds, sources, épandages, lacs collinaires,erreurs de comptage,etc...
Références: "la politique de l'eau dans le domaine agricole"; DGGREE, Juin 2001 , + Notes inéd. DGGREE; + Situation ann. Barrages DGBGTH ; + Annuaires DGRE nappes profondes et
phréatiques; + Rapports Statistiques SONEDE
Nappes souterraines
Eaux de Surface
Total
163
montre clairement et quantifie les vocations de chaque gouvernorat : ceux du
Nord et, dans une moindre mesure, du Centre Ouest, voués à l’exportation,
et ceux du Grand Tunis et de la côte Est voués à l’importation, tandis que les
gouvernorats du Sud (excepté Kébili siège d’une très forte surexploitation de
nappe, cause du déficit constaté) sont généralement équilibrés.
Tab.3.12 : Esquisse de Bilan régionalisé 2010, par source d'eau et par usage,
en Mm3/an
Pour faire face à la rareté des ressources en eau et pallier toutes ces
disparités régionales en termes de ressources et de demandes, la mise en
œuvre de plans de mobilisation et de répartition de l’eau s’est traduite par la
construction de grands ouvrages de transfert inter régionaux. En termes de
quantités véhiculées, le schéma de la fig. 3.13 résume l’ensemble des
systèmes de transfert inter régionaux, qui totalisent en 2010 un volume de
400 Mm3/an, au sein duquel la SONEDE prélève l’essentiel avec 325
Mm3/an, les transferts d’irrigation étant limités au Cap Bon, avec 60 Mm3/an
provenant du Canal, et aux périmètres du Sahel qui prélèvent 15 Mm3/an sur
le Nebhana.
Région Gouvernorat Ressource
Irrigation
Nappe. Prof
Irrigation
N. Phreat
Irrigation
Barrages
Irrig. divers
surface**
total
irrigation
Eau potable
sonede
Industries
raccordées
Industries
non raccord.
Allocations
tous usages
Bilan Ressource
Allocation
Bizerte 590 452 46 15 117 25 2.5 0.6 145 445
Béja 530 3 8 41 10 62 12 1.0 0.0 75 455
Jendouba 719 611 67 10 94 12 0.5 0.5 107 612
Le Kef 201 422 110 37 90.1 0.5 47 155
Siliana 212 610 16 12 44 70.0 51 161
S/total 2253 24 104 171 57 355 64 4.1 1.6 425 1827
Tunis 18 0 3 0368 5.3 76 -58
Ariana 16 0 4 20 24 32 0.5 57 -41
Ben Arous 55 24 15 16 358 22 5.5 0.4 86 -31
Manouba 53 311 49 63 40 1.5 0.9 106 -54
Zaghouan 130 712 217 37 70.5 45 85
Nabeul 364 29 245 59 12 345 32 8.2 1.7 387 -24
S/total 634 64 289 146 32 531 202 21.4 2.9 757 -123
Sousse 48 314 623 33 6.6 0.5 64 -16
Monastir 23 3 8 617 23 6.6 46 -23
Mahdia 40 219 021 19 2.0 0.0 42 -2
Sfax 98 751 059 53 3.9 13.7 130 -32
S/total 209 16 92 12 0120 129 19.1 14.2 282 -73
Kairouan 266 50 92 21 6169 15 0.2 2.1 187 79
Kasserine 198 55 43 010 108 90.2 4.8 122 75
Sidi Bou Zid 192 33 80 05118 10 0.1 0.2 128 64
Gafsa 150 39 34 073 14 0.2 14.0 102 48
S/total 805 177 249 21 21 468 49 0.7 21.1 539 266
Tozeur 227 140 32 0172 50.5 10.1 188 39
Kebili 277 370 00370 80.1 0.3 379 -102
Gabès 217 97 28 0125 410.1 3.5 142 75
Médenine 113 514 019 20 7.0 2.2 48 66
Tataouine 132 7 7 014 70.1 6.2 27 105
S/total 966 619 82 0 0 701 43 17.8 22.4 784 182
Total 4868 899 816 350 110 2175 490 63 62 2791
Sud
** Divers: prises d'eau, oueds, sources, épandages, lacs collinaires,etc…
Nord
Tunis - Cap Bon
Sahel
Centre
Ouest
164
Fig. 3.12 : Bilans régionaux Ressources - Allocations par gouvernorat,
année de référence 2010.
Fig.3.13 : Schéma des grands transferts d’eau à travers la Tunisie,
valeurs 2010 en Mm3/an ; (MCB : Medjerda Cap Bon).
Grand Tunis
Cap Bon
Sahel
Sfax
MCB Ext.Nord
Kasseb Ben Mtir
Kairouanais
Kasserine S.B.Zid
40
120
90
60
25
25
40
-100
0
100
200
300
400
500
600
Bilan Ressources - Allocations Mm3/an
Jendouba
Béja
Bizerte
Siliana
Le Kef
Tataouine
Zaghouan
Kairouan
Kasserine
Gabès
Médenine
Sidi Bou Zid
Gafsa
Tozeur
Mahdia
Sousse
Monastir
Nabeul
Sfax
Ben Arous
Ariana
Manouba
Tunis
Kebili
165
3.6- La surexploitation des nappes
souterraines
3.6.1- Un état de surexploitation avancé
Au cours des trois dernières décennies, l’effort d’investissement dans le
secteur hydro agricole a été accompagné par une politique d’encouragement
à l’intensification des pompages en nappes : électrification des forages et
des puits, mise en place de subventions pour la construction des puits et les
équipements de pompage (loi 82-67). Ces mesures ont eu pour effet une
rapide et importante augmentation des prélèvements avec : (i) la création de
forages et de puits nouveaux, (ii) le passage du mode traditionnel de puisage
au pompage mécanique et électrique, (iii) l’acquisition d’équipements de
pompage de plus en plus puissants. Ainsi, et depuis que le Ministère de
l’Agriculture a pu mettre en place un système fiable d’évaluation et de
comptage des prélèvements en nappes, on peut estimer que ces derniers ont
plus que doublé : passant de 0,9 à 1,95 km3/an entre 1980 et 2005. Ces
quantités sont proches ou dépassent les limites d’exploitabilité des eaux
souterraines du pays.
Malgré l’impact économique et social important à l’extension d’une
activité d’irrigation très riche, cela a entrainé d’importants rabattements de
nappes (Fig.3.14), et une forte proportion de ces nappes sont aujourd’hui
labellisées surexploitées par la DGRE (2007) : près de 55 nappes phréatiques
et 30 nappes profondes, d’inégale importance il est vrai. Ces nappes
présentent un prélèvement excédentaire (de surexploitation) estimé à 400
Mm3/an pour l’ensemble de la Tunisie. Les gouvernorats de bili, Nabeul,
Kairouan et Sidi Bou Zid prélèvent à eux seuls plus de 75 % de ces
quantités. Par ailleurs, une estimation séparée des prélèvements sur les
réserves géologiques des aquifères faiblement renouvelables du Sud
(Complexe Terminal et Continental Intercalaire) les situent à près de 200
Mm3/an, soit 50 % de l’ensemble des débits de surexploitation des eaux
souterraines de Tunisie.
De nombreuses nappes phréatiques sont déclarées « périmètre de
sauvegarde» par décret. Mais ces mesures n’ont pu stopper la prolifération
des puits. Certes, aucune subvention n'est plus accordée pour la construction
de puits nouveaux dans ces zones, ce qui contribue au ralentissement de leur
progression. Les agriculteurs ne demandent pas d'autorisation pour la
création de nouveaux puits et nombreux sont ceux qui construisent leur
puits sans subvention aucune. Par ailleurs, et en raison de l'abaissement
régulier de la nappe, les agriculteurs procèdent à l’approfondissement de
166
leurs puits par des sondes manuelles qui les amènent au delà de la limite des
50 mètres de profondeur réglementaires, limite au delà de laquelle une
autorisation préalable est nécessaire quelle que soit l’état d’exploitation de la
nappe.
Fig.3.14 : Rabattements de nappe en mètres, observés au Bled Sisseb,
au Nord de Kairouan, de 1970 à 2010 (Bases de données DGRE).
La surexploitation diminue les réserves géologiques des aquifères ; les
abaissements continuels du niveau des nappes surexploitées sont alors
susceptibles, à terme, de provoquer le tarissement total des nappes les plus
vulnérables. La figure 3.15 présente respectivement : (i) la délimitation des
nappes phréatiques, (ii) les nappes phréatiques actuellement surexploitées,
(iii) les nappes phréatiques qui seront totalement épuisées avant la fin du
XXIe siècle au rythme actuel des prélèvements.
5
15
25
35
45
55
65
197 0 197 5 198 0 1985 199 0 199 5 2000 2005 2 010
Sisseb B'
Sisseb 6
167
Fig.3.15 : (a) Nappes phréatiques, (b) nappes phréatiques surexploitées, et
(c) celles qui seront totalement épuisées avant la fin du XXIe siècle.
L’eau souterraine constitue une ressource distribuée, naturellement
partagée : la nappe souterraine se présente comme un réseau, exploité
collectivement et inter activement par des centaines, voire des milliers
d’utilisateurs. Pour éviter les abus, on doit favoriser les processus de
négociation entre usagers. Au plan des ressources transfrontières, un
mécanisme de concertation se met en place pour rationaliser l’exploitation,
avec l'Algérie et la Libye, des grandes nappes sahariennes du Sud. Au plan
local, la gestion participative d’une nappe souterraine surexploitée a été
tentée : pour préserver la nappe côtière fortement sollicitée au Nord de
Gabès, près de 300 agriculteurs ont créé le Groupement de développement,
d’exploitation et de surveillance des eaux souterraines de Bsissi. Cette
association a obtenu que les forages illégaux soient rebouchés et que le
creusement de nouveaux forages soit arrêté. Le Groupement est chargé de
contrôler les débits de pompage alloués et de suivre le niveau de la nappe.
Cette expérience positive demeure toutefois fragile et unique en Tunisie.
Dans la perspective d’une reproduction de cette expérience de gestion
communautaire, le MARH tente de faire évoluer le cadre règlementaire et
législatif des associations d’usagers pour le rendre compatible avec la
gestion d’une nappe souterraine : ressource invisible, répartie et
difficilement maîtrisable, alors que le cadre actuel concerne les usagers
d’une ressource visible et ponctuelle (forage, oued, barrage). Toutefois, ce
type de mesure intervient à postériori, lorsque le phénomène de
surexploitation est déjà consommé. Il serait plus efficace d'imaginer un cadre
de planification et d'allocation à priori, comme c'est le cas des eaux de
surface et des eaux souterraines profondes. C'est ce que tente de mettre en
place le projet de nouveau Code des Eaux (BIRH, 2013), qui généralise le
168
système de l'autorisation y compris pour les puits dont la profondeur est
inférieure à 50 m. Mais pour être effective, cette mesure doit être admise et
appliquée par tous, avec une gestion plus rigoureuse de la police des nappes,
et des protocoles de gestion participative négociés en bonne concertation ; le
problème, c'est qu'il n'existe aujourd'hui aucun cadre de concertation
adéquat.
3.6.2- Menace sur les grands systèmes aquifères
Parmi les nappes souterraines surexploitées, un certain nombre occupe,
en termes de risques, une position particulière du fait de l’importance de
leurs ressources intrinsèques et de leur niveau de surexploitation.
Regroupées en grandes régions hydrogéologiques, ces nappes sont
présentées dans le tableau 3.13.
De la lecture de ce tableau, il ressort que ces cinq grands systèmes
aquifères de Kébili, Nabeul, Kairouan, Kasserine Sidi Bouzid et Gabès
représentent :
(i) 25 % des ressources en eau souterraine officiellement reconnues de
Tunisie (507 Mm3/an sur 2 160)
(ii) 45 % de l’exploitation des eaux souterraines du pays (865 Mm3/an
sur 1 950)
(iii) 90 % en volume, de la surexploitation des nappes de toute la Tunisie
(357 Mm3/an sur 400).
Ce dernier indicateur suffit à qualifier l’urgence qu’il y a à mettre en
place des dispositions exceptionnelles pour assurer la préservation et la
sauvegarde de ces ressources en eau, capitales pour l’avenir de notre pays.
Tableau 3.13 : Etat de surexploitation des grandes régions hydrogéologiques en
2005 (source : Annuaire des nappes profondes et situation des nappes phréatiques,
DGRE)
Région
hydrogéologique
Ressources
Mm3/an
Exploitation
Mm3/an
Taux de
Surexploitation
Kebili 173 341 97%
Nabeul 147 226 54%
Kairouan 73 120 64%
Kasserine-Sidi BouZid 65 113 74%
Gabès 50 65 31%
169
Fig.3.16 : Réalisation d'un forage illicite, de 120 m de profondeur par une sondeuse
artisanale ; Bled Sisseb au Nord de Kairouan, 21 Janv. 2013. On estime, à cette date,
à plus de cinq cents le nombre des forages non autorisés réalisés dans le secteur, et
le niveau de la nappe a baissé de 40 mètres en 30 ans.
Fig.3.17 : Nouvelle palmeraie dans les environs de Kébili ; extension illicite sur
forage non autorisé ; photo prise le 26/6/2007. Le nombre des forages illicites à
Kébili, inventoriés en 2008, est supérieur à 3000.
© M.Besbes
© M.Besbes
170
3.7- Le cycle anthropique et le bilan
total de la Tunisie
3.7.1- Mobilisation, utilisation, consommation : Le cycle
anthropique de l’eau
Le résultat de la compilation d’un grand nombre de données relatives à la
mobilisation des ressources hydrauliques est présenté par le graphe suivant,
Fig.3.18 : « le cycle anthropique de l’eau », où l’on tente de distinguer
entre les ressources mobilisées, les ressources exploitables, les allocations et
exploitations, les ressources effectivement utilisées, les consommations
nettes, et les retours au milieu récepteur.
Les Ressources Mobilisées sont les quantités effectivement développées
au moyen des ouvrages hydrauliques existants. Ces quantités représentent un
potentiel annuel moyen égal à 3960 Mm3/an (année hydrologique moyenne,
base : 2010)
Les Ressources Exploitables diffèrent des ressources mobilisées par les
quantités effectivement mobilisées [disponibles dans les barrages-réservoirs]
mais dont on ne procède pas à l’utilisation immédiate pour tenir compte des
allocations prévisionnelles des nouveaux projets déjà décidés lors de la
création des ouvrages. Cette réserve transitoire peut être estimée à 600
Mm3/an
Les Exploitations sont déterminées ainsi par type de ressource :
Dans les barrages réservoirs, le volume exploitable utile [930 Mm3/an] se
décompose en :
- 150 Mm3/an qui forment l’évaporation des retenues d’eau18,
- 100 Mm3/an qui sont réservés à la régulation des zones humides (lac
Ichkeul),
- 300 Mm3/an prélevés par la SONEDE,
- 600 Mm3/an réservés à l’irrigation des PPI,
18 On admet généralement que cette évaporation représente 7% des volumes retenus. En
Tunisie, (Abbassi, 2000) l’évaporation des grands barrages a été estimée à 100 M m3/an, à
une période où l'équipement hydraulique du pays était encore incomplet.
171
- 50 Mm3/an (en moyenne) affectés à la recharge des nappes
souterraines,
- 140 Mm3/an ne sont pas explicitement affectés et représentent la
fermeture du bilan des retenues des barrages, qui intègre les incertitudes sur
les termes du bilan, aussi bien sur les entrées (apports superficiels) que les
sorties (débits de fuites, prélèvements non comptabilisés).
Dans les nappes phréatiques, 820 Mm3/an sont prélevés pour l’irrigation
des fermes privées (supérieurs aux ressources renouvelables, en raison de la
surexploitation)
Dans les nappes profondes, les volumes exploités [1 200 Mm3/an] sont
répartis ainsi :
- 240 Mm3/an prélevés par la SONEDE,
- 60 Mm3/an prélevés par les Industries non raccordées aux réseaux
publics,
900 Mm3/an prélevés pour l’irrigation des PPI et des PIP (Périmètres
Irrigués Privés).
Les Ressources effectivement utilisées :
Sur un volume alloué de 3020 Mm3/an19 seuls 2095 sont effectivement
utilisés, soit près de 70 % ; le reste, soit près de 925 Mm3/an, se répartit
comme suit :
- 145 Mm3/an représentent les diverses formes de pertes des réseaux
publics (d'eau potable),
- 660 Mm3/an constituent les pertes totales du système d’irrigation20,
- 120 Mm3/an représentent l’estimation du volume, dans les barrages
réservoirs, réservé aux PPI et non utilisé par les agriculteurs.
Les pertes que représentent toutes ces quantités par rapport aux volumes
alloués sont momentanées ou définitives, parfois incompressibles comme
certaines pertes sur les réseaux, certaines enfin sont volontaires et
souhaitables, comme les sur irrigations à la parcelle nécessaires au lessivage
des sels. Les besoins du lessivage ne constituent certes pas des pertes
lorsqu'elles sont, c'est le cas le plus souvent, intégrés dans les allocations.
19 Si l’on y inclut les prélèvements directs des industries non raccordées
20 Dont une bonne partie est récupérée par ré infiltration et drainage dans le milieu naturel
172
En définitive, les 2095 Mm3/an effectivement utilisés se répartissent
selon les usages en :
- 350 Mm3/an pour l’eau potable,
- 100 Mm3/an pour les écosystèmes humides,
- 105 Mm3/an pour l’industrie,
- 1540 Mm3/an pour l’irrigation.
Les consommations nettes constituent la partie « irrécupérable » de la
ressource utilisée, celle qui est effectivement consommée et qui de ce fait a
définitivement quitté soit la partie continentale du cycle de l’eau soit
l’intégralité du cycle de l’eau ; c’est :
- En agriculture, la quantité évapotranspirée par les plantes (majoritaire)
et celle entrant dans la constitution de la biomasse des plantes et des produits
alimentaires. La part de la consommation nette en agriculture est
généralement estimée à 66 %.
- Pour l’eau potable, la consommation nette est estimée à 20 %
- Dans l’industrie, l’examen des données enregistrées dans le « Cadastre
des Rejets Industriels » élaboré par l’ONAS21 permet d’évaluer la part
effectivement consommée à 20 % en moyenne (Ben Messaoud, 1998).
C’est enfin la partie -évaporée des pertes sur les réseaux, dont
l’essentiel revient aux pertes des réseaux d’irrigation.
La somme générale des consommations nettes (prélevées sur les
ressources hydrauliques) s’établit à 1580 Mm3/an.
Les retours au milieu récepteur :
Les pertes de l’irrigation, aussi bien sur les réseaux qu’au niveau de la
parcelle, et les pertes des réseaux publics, reviennent en partie au milieu
naturel continental et se trouvent donc susceptibles de réintégrer le cycle
naturel de l’eau. Cette quantité, en toute première approximation, n’est pas
du tout négligeable puisqu’elle se situe dans les mêmes ordres de grandeur
(1480 Mm3/an) que les consommations nettes effectives. Une partie de ces
retours au milieu récepteur est recyclée par mélange dans l’Oued Medjerda,
mais d’autres parties, parfois importantes, ne peuvent plus être réutilisées du
fait de la dégradation de la qualité de l'eau après usage, et notamment
21 La consommation nette varie avec le type d’industrie considéré : inférieure à 10% pour le
textile ou la mécanique, supérieure à 90% pour une briqueterie
173
lorsque, en irrigation, les eaux utilisées possèdent déjà à l’origine des
salinités non négligeables.
La reconstitution du Cycle Anthropique de l’Eau a nécessité un certain
nombre de recoupements, de simplifications et d’hypothèses, qui sont
présentées sur la légende ci-après. Ce bilan est relatif aux données moyennes
rapportées à l’année 2010 prise comme année de référence.
Encadré 3.1
Le Cycle anthropique : Légende.
1. Marge inter annuelle de régularisation des apports aux barrages, ou épargne
sècheresse
2. Disponible en année moyenne dans les barrages réservoirs
3. Nappes phréatiques
4. Nappes profondes
5. Evaporation dans les barrages (7 % du stock #150 Mm3/an) et allocation aux zones
humides
6. Prélèvements SONEDE sur les barragers
7. Eaux de barrages allouées à l’irrigation des PPI
8. Non explicitement alloués: erreur de fermeture ou alloués et non utilisés
9. Recharge des nappes
10. Prélèvements SONEDE sur les nappes profondes
11. Ressources souterraines allouées à l’irrigation
12. Industries et Tourisme non raccordées
13. Industries et tourisme sur réseau SONEDE
14. Facturé aux collectivités
15. Fuites des réseaux, y compris pertes de service
16. Les PPI utilisent 80 % des eaux de surface allouées
17. Un tiers des pertes du système d’irrigation, réseaux et parcelles, est ré-évaporé
18. Les 2/3 des pertes du système d’irrigation retournent au milieu récepteur
19. Quantités effectivement délivrées aux cultures, compte tenu des efficiences
20. Consommation effective des collectivités
21. Effluents des réseaux urbains
22. Consommation effective des industries
23. Rejets hydriques industriels
24. Evapotranspiration réelle et intégration à la biomasse
25. Part rejoignant le milieu récepteur
Fig.3.18 :
Le cycle
anthropique de
l’eau en Tunisie,
année 2010.
175
3.7.2 - Bilan total de la Tunisie : le devenir des ressources
pluviales
On est légitimement en droit de se poser la question du devenir des
précipitations tombées sur le territoire national, les fameux 36 km3/an. A vrai
dire, cette question a intéressé jusqu’ici peu d'experts et il n’existe pas de
référence documentaire à laquelle on puisse se fier. Les estimations qui
suivent, présentées sur le graphique de la figure 3.19, constituent donc une
pure spéculation intellectuelle aux fondements scientifiques incertains, et
sont à considérer comme une première hypothèse de travail, plausible malgré
tout, destinée à fixer des ordres de grandeur. Les hypothèses utilisées, sur
lesquelles se basent ces premières estimations, sont présentées plus loin.
Figure 3.19 : Le cycle des eaux pluviales de Tunisie, en km3/an.
Hypothèses utilisées :
- Terres cultivables (5 Millions ha) : ETR moyen selon WaterWatch
(année 2001 : 11,2 km3, année sèche ; année 2007 : 14 km3, année
légèrement humide).
- Forêts (800 000 ha) : 6000 km2 dans le Nord (Pluie moyenne=600
mm/an) ; 200 km2 au Centre (P moyenne=350 mm/an).
176
- Parcours (5 Millions ha) : Pluie moyenne des gouvernorats pondérée
par superficie des parcours par gouvernorat (Annuaire des Statistiques
Agricoles 2005) ; avec application du coefficient empirique de 0,64.
- Terres désertiques stériles (4 Millions ha) : Pluie moyenne = 100
mm/an entièrement ré évaporée. [ces quantités ne sont pas perdues ; elles
entretiennent la vie des écosystèmes désertiques].
- Zones humides (800 000 ha) : Pluie moyenne = 400 mm entièrement
évaporée (soit 3,2 km3/an), auxquels s’ajoutent : les apports en
ruissellement du bassin versant inférieur (1,6 km3), ainsi que les exutoires
d’une majorité de nappes souterraines phréatiques et profondes (1,2 km3).
- Ruissellement en mer : eaux de surface non mobilisées, bassins
côtiers, rejets, apports exceptionnels.
- Flux souterrain en mer : estimation des exutoires marins des nappes
phréatiques et profondes.
Références
bibliographiques
Ben Messaoud, A. (1998) : Usage de l’eau par l’industrie tunisienne ;
Pfe.,ENIT, Tunis.
Benzarti.Z, Habaieb.H (2001) : Etude de la persistance de la sécheresse en
Tunisie par utilisation des chaînes de Markov (1909-1996) ; Science et
changements planétaires ; Sécheresse. Volume 12, Numéro 4, 215-20
BIRH (2013) : http://www.semide.tn/CDE_2.pdf ; consulté ce 18 Aout 2013
BIRH (Mars 1967) : Etat des nappes profondes de Tunisie ; BIRH, Tunis ;
index DGRE TG282
Collins, M., Knutti R., Arblaster J., Dufresne J.-L., Fichefet T.,
Friedlingstein P., Gao X., Gutowski W.J., Johns T., Krinner G., Shongwe
M., Tebaldi C., Weaver A.J., Wehner M., (2013): Long-term Climate
Change: Projections, Commitments and Irreversibility. In: Climate Change
2013 : The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the
Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change
[Stocker, T.F., Qin D., Plattner G.K., Tignor M., Allen S.K., Boschung J.,
Nauels A., Xia Y., Bex V., Midgley P.M. (eds.)]. Cambridge University
Press, Cambridge, United Kingdom and New York, NY, USA.
DGRE (2005) : Ressources en eau de surface de Tunisie, Note DGRE, Mars
2005
DGRE (2005): Etat de l'exploitation des nappes phréatiques de Tunisie.
DGRE (2007) : La surexploitation des nappes ; note inédite présentée pour la
préparation du Projet d’Investissement dans le Secteur de l’Eau ; MARH,
2007.
DGRE (2007) : Annuaire de l'exploitation des nappes profondes.
DGRE (1990) : Stratégie pour le développement des ressources en eau de la
Tunisie au cours de la décennie 1991-2000 ; Septembre 1990.
DRE (1974) : Les ressources hydrauliques de Tunisie, Note Direction des
Ressources en Eau ; Tunis ; Déc.1974
Frigui H.L. (2005) : Rapport National sur la mise en valeur des ressources en
eau en Tunisie ; Nations Unies ; Commission Economique pour l’Afrique ;
CEA-AN/PUB/EAU/TN.
Frigui L., Touzi S. (2009) : Caractérisation des événements extrêmes en
Tunisie et possibilités de la maîtrise des excédents pour une gestion durable
de la ressource ; in l’Etat des ressources en eau du Maghreb en 2009 ;
UNESCO, Unesco office in Rabat ; 2009.
GIEC (2013) : Résumé à l’intention des décideurs, Changements climatiques
2013: Les éléments scientifiques. Contribution du Groupe de travail I au
cinquième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental
sur l’évolution du climat [sous la direction de Stocker, T.F., Qin D., Plattner
G.K., Tignor M., Allen S.K., Boschung J., Nauels A., Xia Y., Bex V.,
Midgley P.M.]. Cambridge University Press, Cambridge, Royaume-Uni et
New York (État de New York), États-Unis d’Amérique.
Hamza M. (1991) : Géologie et hydrogéologie de la Tunisie. Bilan et
spécificités des ressources en eaux souterraines ; 9ème Journée des ressources
en eau, Avr. 1991
Horriche F., Besbes, M., (2006) : Analyse du Réseau Piézométrique National
Tunisien ; Revue des Sciences de l’Eau, 19(4) (2006), pp. 347-363.
IPCC (2008) : Climate Change and Water, Technical Report VI. Inter
governmental Panel on Climate Change.
IPCC (2009) : The Copenhagen Diagnosis; Updating the World on the Latest
Climate Science, Interim Report Inter governmental Panel on Climate
Change. Climate Change Research Centre, 2009
Kallel R. (1994) : Caractéristiques morphologiques et hydrologiques du
réseau hydrographique Tunisien
King L., Nasr Z., Almohamad H., Maag C.C. (2007) : le Climat ; in
« MARH, GTZ, Gopa, Exaconsult : Stratégie nationale d’adaptation de
l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques »,
Ch.7.2. ; Tunis Janvier 2007.
Lahache Gafrej R. (2007,a) : Les Ressources en eau, in « MARH, GTZ,
Gopa, Exaconsult : Stratégie nationale d’adaptation de l’agriculture
tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques », Ch.7.3. ;
Tunis Janvier 2007.
Lahache Gafrej R. (2007,b) : Comment réduire la consommation d'Eeau
dans le secteur touristique en Tunisie, approche et stratégie ; Water demand
management in the Mediterranean, progress and policies. Blue Plan,
Zaragoza, March 2007.
MARH, GTZ, Gopa, Exaconsult (2007) : Stratégie nationale d’adaptation de
l’agriculture tunisienne et des écosystèmes aux changements climatiques
Marsily G., de (2006) : Les Eaux Continentales, by Académie des Sciences ;
coordonné par G. de Marsily ; EDP Sciences, Paris.
OSS (2006) : Modèle de la Djeffara tuniso libyenne, Observatoire du Sahara
et du Sahel, Tunis.
OSS (2003) : Système Aquifère du Sahara Septentrional, Rapport de
synthèse, Observatoire du Sahara et du Sahel, Tunis.
Qiaozhen Mu, Heinsch, Zhao, Running (2007) : Development of a global
Evapotranspiration algorithm based on MODIS and global meteorology data
; Remote sensing of Environment; 111 (2007) 519-536
Tixeront J., Berkaloff E. (1954) : Recherches sur le bilan d’eau en Tunisie.
UGGI-AIHS , assemblée générale de Rome, 1954.
Waterwatch (2008) : Water Balance and Evaluation of Water Saving
Investments in Tunisian Agriculture; draft version, 2008. Study under
assignment of the World Bank in Washington DC, USA; Authors: S.J. Zwart
and W.G.M. Bastiaanssen from WaterWatch in Wageningen.
WWAP, (2009) : The United Nations World Water Development Report 3,
Case Studies Volume: Facing The Challenges. World Water Assessment
Programme.
Zebidi, H (1966) : Etat des nappes phréatiques de Tunisie ; BIRH, Mai 1966,
Tunis
Zebidi, H (1980) : Bilan des ressources en eau, Note DRE, Déc.1980
Figures & tableaux
Liste des figures
Figure 3.1 Carte générale de situation et des bassins versants
Figure 3.2 Extension des nappes phréatiques et profondes.
Figure 3.3 Evolution des ressources en eau et des prélèvements.
Figure 3.4 Lame d'eau précipitée moyenne sur la Tunisie et tendance à long terme
Figure 3.5 Ressources pluviales de la Tunisie de 1916 à 2004.
Figure 3.6 Isohyètes moyens (mm/an)
Figure 3.7 Index d’exploitation des eaux souterraines.
Figure 3.8 Salinités des eaux des nappes profondes et phréatiques
Figure 3.9 Evolution des températures et précipitations moyennes au cours du 20ème
siècle en Tunisie
Figure 3.10 Bilan des Grands Barrages, en Millions de m3
Figure 3.11 Evolution du nombre de forages publics et privés
Figure 3.12 Bilans régionaux Ressources - Allocations par gouvernorat
Figure 3.13 Schéma des grands transferts d’eau à travers la Tunisie
Figure 3.14 Rabattements de nappe en mètres, observés au Bled Sisseb
Figure 3.15 Nappes phréatiques, surexploitées, et celles qui seront totalement épuisées
avant la fin du XXIe siècle.
Figure 3.16 Réalisation d'un forage illicite, Bled Sisseb
Figure 3.17 Nouvelle palmeraie, extension illicite
Figure 3.18 Le cycle anthropique de l’eau.
Figure 3.19 Le cycle des eaux pluviales de Tunisie, en km3/an.
Liste des tableaux
Tableau 3.1 Bilan d'eau de différents bassins
Tableau 3.2 Ressources en eau des nappes souterraines de Tunisie
Tableau 3.3 Estimations successives des ressources et des prélèvements
Tableau 3.4 Apport moyen en eau de surface par bassin hydrographique
Tableau 3.5 Bilan de la partie tunisienne du SASS
Tableau 3.6 Classes de salinité des prélèvements d'eaux souterraines
Tableau 3.7 Répartition des ressources par rapport au seuil de 1.5 g/l.
Tableau 3.8 Volumes exploités par catégorie d'usages et classe de salinités.
Tableau 3.9 Variation des précipitations de la deuxième moitié du XXIè siècle
Tableau 3.10 Résultats de la Mission WaterWatch pour les années de référence
Tableau 3.11 Les différents usages des ressources en eau de 1990 à 2010
Tableau 3.12 Esquisse de Bilan régionalisé 2010, par source d'eau et par usage
Tableau 3.13 Etat de surexploitation des grandes régions hydrogéologiques
Liste des Acronymes
AEP
ANPE
BIRH
CI
CT
COPEAU
CRDA
CRUESI
DGBGTH
DGGREE
DGRE
DPH
ENIT
ERESS
EUT
FAO
GDA
GDE
GIRE
INAT
INS
JORT
MARH
OMS
OMVPI
ONAS
OSS
PASA
PDEC
PDEN
PDES
PISEAU
PNEE
PPI
R&D
SECADENORD
SINEAU
SONEDE
alimentation en eau potable
Agence nationale de la protection de l’environnement.
Bureau d’inventaire des ressources hydrauliques
Nappe du continental intercalaire
Nappe du complexe terminal
Réseau de surveillance et de contrôle de la pollution de l’eau.
Commissariat régional au développement agricole
Centre de recherches sur l’utilisation de l’eau en irrigation
Direction générale des barrages et grands travaux hydrauliques
Direction générale du génie rural et de l’exploitation des eaux
Direction générale des ressources en eau (MARH)
Domaine public hydraulique
Ecole nationale des ingénieurs de Tunis
Etude des ressources en eau au Sahara septentrional
eau usée traitée.
Organisation mondiale pour l’alimentation et l’agriculture
Groupement de développement agricole (AIC/ GIC)
Gestion de la demande en eau.
Gestion intégrée des ressources en eau.
Institut national agronomique de Tunisie
Institut national de la statistique
Journal officiel de la République tunisienne
Ministère de l’Agriculture et des ressources hydrauliques
Organisation mondiale pour la santé
Office de mise en valeur des périmètres irrigués
Office national de l’assainissement.
Observatoire du Sahara et du Sahel
Programme d’ajustement structurel agricole
Plan directeur de l’utilisation des eaux du centre.
Plan directeur de l’utilisation des eaux du nord.
Plan Directeur de l’utilisation des eaux du sud
Projet d’investissement dans le secteur de l’eau
Programme national d’économie d’eau
périmètre public Irrigué
recherche et développement
Société d’exploitation du canal et adductions des eaux du nord.
Système d’information national sur l’eau
Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux
ResearchGate has not been able to resolve any citations for this publication.
Article
Full-text available
Résumé L’observation régulière du niveau des eaux souterraines a débuté en Tunisie il y a plus de soixante ans. Depuis, le réseau piézométrique national, composé aujourd’hui de près de 3 700 points de surveillance (puits, forages et piézomètres), permet l’observation de 148 systèmes aquifères et comporte des séries de mesures parfois longues d’une cinquantaine d’années. Pour caractériser le réseau piézométrique national, deux types d’indicateurs sont définis : a) des indicateurs portant sur la qualité intrinsèque des réseaux existants; b) des indicateurs décrivant le besoin d’informations complémentaires et la nécessité de consolidation des réseaux. Les indicateurs de qualité sont liés à la densité spatiale, la durée de surveillance, le fonctionnement, la couverture du réseau par des piézomètres, le contrôle de l’exploitation et l’évolution temporelle du réseau. Les indicateurs de consolidation des réseaux sont relatifs à la variabilité piézométrique, au taux d’exploitation ou de surexploitation, aux ressources exploitables et aux superficies des systèmes aquifères. Se fondant sur ces indicateurs, la classification des systèmes aquifères surveillés met en évidence les nappes disposant de réseaux de meilleure qualité et celles nécessitant une consolidation de leur réseau. La synthèse globale des différents indicateurs a permis de dégager les systèmes aquifères nécessitant des actions prioritaires en matière de rationalisation des réseaux piézométriques. Les résultats obtenus au terme de cette analyse concordent bien avec la situation actuelle observée sur le terrain.
Article
Full-text available
The objective of this research is to develop a global remote sensing evapotranspiration (ET) algorithm based on Cleugh et al.'s [Cleugh, H.A., R. Leuning, Q. Mu, S.W. Running (2007) Regional evaporation estimates from flux tower and MODIS satellite data. Remote Sensing of Environment 106, page 285–304- 2007 (doi: 10.1016/j.rse.2006.07.007).] Penman–Monteith based ET (RS-PM). Our algorithm considers both the surface energy partitioning process and environmental constraints on ET. We use ground-based meteorological observations and remote sensing data from the MODerate Resolution Imaging Spectroradiometer (MODIS) to estimate global ET by (1) adding vapor pressure deficit and minimum air temperature constraints on stomatal conductance; (2) using leaf area index as a scalar for estimating canopy conductance; (3) replacing the Normalized Difference Vegetation Index with the Enhanced Vegetation Index thereby also changing the equation for calculation of the vegetation cover fraction (FC); and (4) adding a calculation of soil evaporation to the previously proposed RS-PM method.
Usage de l'eau par l'industrie tunisienne
  • A Ben Messaoud
Ben Messaoud, A. (1998) : Usage de l'eau par l'industrie tunisienne ;
Etude de la persistance de la sécheresse en Tunisie par utilisation des chaînes de Markov
  • Z Benzarti
  • Habaieb
Benzarti.Z, Habaieb.H (2001) : Etude de la persistance de la sécheresse en Tunisie par utilisation des chaînes de Markov (1909-1996) ;
Etat de l'exploitation des nappes phréatiques de Tunisie
DGRE (2005): Etat de l'exploitation des nappes phréatiques de Tunisie.
La surexploitation des nappes ; note inédite présentée pour la préparation du Projet
DGRE (2007) : La surexploitation des nappes ; note inédite présentée pour la préparation du Projet d'Investissement dans le Secteur de l'Eau ; MARH, 2007.
Annuaire de l'exploitation des nappes profondes
DGRE (2007) : Annuaire de l'exploitation des nappes profondes.
Stratégie pour le développement des ressources en eau de la Tunisie au cours de la décennie
DGRE (1990) : Stratégie pour le développement des ressources en eau de la Tunisie au cours de la décennie 1991-2000 ; Septembre 1990.
Rapport National sur la mise en valeur des ressources en eau en Tunisie ; Nations Unies
  • H L Frigui
Frigui H.L. (2005) : Rapport National sur la mise en valeur des ressources en eau en Tunisie ; Nations Unies ; Commission Economique pour l'Afrique ;
Caractérisation des événements extrêmes en Tunisie et possibilités de la maîtrise des excédents pour une gestion durable de la ressource
  • L Frigui
  • S Touzi
Frigui L., Touzi S. (2009) : Caractérisation des événements extrêmes en Tunisie et possibilités de la maîtrise des excédents pour une gestion durable de la ressource ; in l'Etat des ressources en eau du Maghreb en 2009 ;