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Optimiser la production par l'apport des normes : étude rétrospective du cas du MSG-3 dans la maintenance de l'armée de l'air américaine

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Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par l'apport des normes : étude rétrospective du cas du MSG-3 dans la maintenance de l'armée de l'air américaine, Revue Internationale de Management et de Stratégie, http://www.revue-rms.fr/. Résumé : Cet article porte sur l'impact de la norme sur la maintenance aéronautique en tant que catalyseur de mesures d'optimisation de la production. L'objectif de cette recherche est d'aborder la thématique de l'optimisation de la maintenance dans le secteur aéronautique. L'aéronautique est un secteur où la norme est omniprésente et dans lequel celle-ci permet une meilleure traçabilité des opérations et une meilleure appréhension des plans d'entretien. Ainsi, nous observons que le coût d'un support peut être amélioré grâce à l'application des normes et à la conjonction de celles-ci avec d'autres approches d'optimisation de la maintenance. L'étude de deux cas, relativement anciens, permet de disposer d'un recul sur les résultats de l'application du MSG-3, norme par ailleurs très connue dans le secteur aéronautique. Dans cette recherche nous utiliserons une méthode abductive par études de cas. Dans les deux cas étudiés, la disponibilité des aéronefs augmente significativement. En conclusion, la bonne utilisation de la norme MSG-3 permet une amélioration significative de la qualité de service et de la fiabilité des aéronefs en rendant notamment plus efficaces les mesures d'optimisations de processus conjointes. Abstract : This article deals with the impact of the standard on aeronautical maintenance as a catalyzer for production optimization measures. The objective of this research is to address the topic of maintenance optimization in the aeronautical sector. Aeronautics is a sector where the standard is omnipresent and where it allows a better traceability of operations and a better understanding of maintenance plans. Thus, we observe that the cost of a support can be improved thanks to the application of standards and the conjunction of these standards with other maintenance optimization approaches. The study of two relatively old cases provides a perspective on the results of the application of MSG-3, a standard that is also very well known in the aeronautical sector. In this research we will use an abductive method by case studies. In the two cases studied, the availability of aircraft increases significantly. In conclusion, the correct use of the MSG-3 standard allows a significant improvement in the quality of service and reliability of the aircraft by making joint process optimization measures more effective.
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Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
Stratégie, http://www.revue-rms.fr/.
Optimiser la production par l'apport
des normes : étude rétrospective du
cas du MSG-3 dans la maintenance de
l’armée de l’air américaine.
Quentin Commine
BETA, Université de Strasbourg
Jérémie Aboiron
Strat Lab, Neofaculty Europe
Résumé :
Cet article porte sur l’impact de la norme sur la maintenance aéronautique en tant que catalyseur de mesures
d’optimisation de la production.
L’objectif de cette recherche est d’aborder la thématique de l’optimisation de la maintenance dans le secteur
aéronautique. L’aéronautique est un secteur où la norme est omniprésente et dans lequel celle-ci permet une
meilleure traçabilité des opérations et une meilleure appréhension des plans d’entretien. Ainsi, nous observons
que le coût d’un support peut être amélioré grâce à l’application des normes et à la conjonction de celles-ci
avec d’autres approches d’optimisation de la maintenance. L’étude de deux cas, relativement anciens, permet
de disposer d’un recul sur les résultats de l’application du MSG-3, norme par ailleurs très connue dans le
secteur aéronautique.
Dans cette recherche nous utiliserons une méthode abductive par études de cas.
Dans les deux cas étudiés, la disponibilité des aéronefs augmente significativement.
En conclusion, la bonne utilisation de la norme MSG-3 permet une amélioration significative de la qualité de
service et de la fiabilité des aéronefs en rendant notamment plus efficaces les mesures d’optimisations de
processus conjointes.
Mots clés : Norme ; Maintenance ; Aéronautique ; Management des opérations ; Gestion de la connaissance.
Abstract :
This article deals with the impact of the standard on aeronautical maintenance as a catalyzer for production
optimization measures.
The objective of this research is to address the topic of maintenance optimization in the aeronautical sector.
Aeronautics is a sector where the standard is omnipresent and where it allows a better traceability of operations
and a better understanding of maintenance plans. Thus, we observe that the cost of a support can be improved
thanks to the application of standards and the conjunction of these standards with other maintenance
optimization approaches. The study of two relatively old cases provides a perspective on the results of the
application of MSG-3, a standard that is also very well known in the aeronautical sector.
In this research we will use an abductive method by case studies.
In the two cases studied, the availability of aircraft increases significantly.
In conclusion, the correct use of the MSG-3 standard allows a significant improvement in the quality of service
and reliability of the aircraft by making joint process optimization measures more effective.
Keywords : Standard ; Maintenance ; Aeronautics ; Operations management ; Knowledge management.
Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
Stratégie, http://www.revue-rms.fr/.
1. Introduction
La maintenance des aéronefs est, quelle que soit leur catégorie, un thème fondamental qui relève d’une bonn
appréhension des coûts totaux de possession (Zwingelstein, 1996 ; Ellram, 2002 ; Wouters et al., 2005). Les
coûts liés à la maintenance des actifs sont une question centrale et sont à l’origine du concept d’efficience à
iso effectivité recherchée par nombre d’acteurs, notamment lorsque ces derniers étudient la possibilité
d’externaliser leur maintenance (Commine, 2020). Si la fiabilité des aéronefs est une donnée centrale dans
l’étude des coûts de possession, c’est bien la maintenance qui représente les coûts principaux de possession
d’un aéronef. La conception d’un plan de maintenance permettant d’exploiter la marge la plus haute de
possible de la fiabilité de l’actif considéré est donc une donnée centrale. Il s’agit ainsi d’optimiser au maximum
la maintenance afin d’en lisser les coûts, sans possibilité d’apparition d’une défaillance et donc d’une atteinte
à la sécurité aérienne. Les coûts de support (Glade, 2005) peuvent être optimisés par différents leviers dont
celui de la norme, dimension encore peu étudiée sous cet aspect par la littérature existante dans le cadre de
la maintenance aéronautique. Par une étude de cas ayant trait à deux approches conjointes au sein de l’armée
de l’air américaine, nous montrons comment la maîtrise de l’aspect normatif permet de catalyser des
processus innovants et d’en retirer des résultats optimaux.
Cet article s’intéresse à la norme aéronautique MSG-3, une norme à la fois éprouvée et en constante évolution.
Ainsi, si le MSG-3 est appliqué depuis longtemps sur les avions, sa mise en place sur hélicoptère est encore
très récente (le premier hélicoptère d’Airbus Helicopters sous format MSG-3 est l’EC 175, mis en service en
1974). L’objet étudié, deux cas assez anciens au sein de l’armée de l’air américaine, permet donc à la fois
d’observer un grand recul et d’explorer une norme dont l’actualité d’utilisation est très significative.
Créer une norme, c’est délimiter des contours afférents à un objet, une pratique, ou un processus. Au-delà de
cette définition basique, la question de la norme induit l’idée de Knowledge Management au travers d’une
meilleure gestion, d’un ordonnancement optimal de l’information en vue de l’atteinte d’objectifs préalablement
définis. Nous définissons ces concepts clés dans la partie suivante.
2. Concepts clés
Kodama (2019) pose la question récurrente de la différence fondamentale qui existe dans les différents
niveaux de connaissance entre les individus et les organisations. Selon lui, il est tout aussi important de
connaître les limites de la connaissance et d’avoir connaissance des limites. Il s’agit ici à la fois d’une
problématique de perception et de couverte de la connaissance. A ce titre l’auteur identifie les impacts de
la qualité des connaissances sur la créativité et l'innovation des personnes et des organisations. De plus, il
montre que la connaissance des limites est avant tout une pensée stratégique de l’organisation qui permet la
créativité et l’innovation. L’exécution des tâches à la fois au niveau personnel et organisationnel permet de fait
d’apporter des solutions aux problèmes complexes. La bonne gestion des connaissances devient alors un
facteur clé de succès.
Au début du XXème siècle, les chercheurs avaient convenu que l’individu prenait systématiquement une
décision rationnelle. Or Simon (1979) a remis en cause cette posture en introduisant la notion de rationalité
limitée. En effet, un individu prend une décision uniquement en fonction des informations qu’il a en sa
possession au moment où il prend sa décision. Dans le même temps, Simon démontre que l’individu n’ayant
pas toutes les informations nécessaires à sa prise de décision, il ne cherche pas de solutions alternatives en
vue d’obtenir le résultat qui serait le plus satisfaisant. Au contraire, l’individu choisira quasi systématiquement
la solution « la moins pire ». D’où l’importance d’avoir un système d’information permettant de collecter et
d’analyser un nombre important et croissant de données. Ceci permettant au décideur d’avoir un maximum
d’informations pour optimiser sa prise de décision.
Simon (1979)
1
décrit la décision selon trois formes distinctes : la décision structurée ; semi-structurée ; et non-
structurée. Selon Anthony (1965) la prise de décision varie suivant le type de contrôle sur lequel opère la
décision. Il se décompose en trois grandes typologies : Stratégique (long terme) ; Management (tactique) ; et
Opérationnel (au quotidien). Plus tard Gory (1971) crée une matrice mettant en corrélation le type de contrôle
et la forme de décision. L’objectif étant qu’à chaque niveau de l’organisation et à chaque enjeu, la prise de
décision se fonde sur une analyse optimale des données dans le but de se débarrasser des facteurs
d’incertitude qui pèsent sur l’organisation.
1
Opus cit.
Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
Stratégie, http://www.revue-rms.fr/.
Le concept de gestion des connaissances (Knowledge Management ou KM) est apparu ritablement sous
ce nom dans les années 1990 et peut s’appuyer aujourd’hui sur un courant important développé en particulier
par Nonaka et Takeuchi. Ils ont découpé la connaissance à travers deux formes de savoir : le savoir explicite
et le savoir tacite. À cela, Grundstein (2000) ajoute que « le management des activités et des processus est
destiné à amplifier l’utilisation et la création de connaissances dans les organisations selon deux finalités
complémentaires fortement imbriquées : une finalité patrimoniale et une finalité d’innovation durable ». C’est
dans ce contexte que l’ensemble des informations qui sont collectées, traitées, stockées et utilisées par
l’entreprise constituent un patrimoine immatériel indispensable au développement de l’entreprise. La gestion
des connaissances est la première étape d’une dynamique d’innovation et de création d’une organisation
apprenante.
Le Knowledge management permet d’améliorer considérablement les résultats des équipes projets en
entreprise mais seulement lorsqu’il est développé de façon optimale. Plusieurs limites peuvent remettre en
question la pertinence de cet outil et son efficacité par rapport aux moyens colossaux que son développement
implique tant au niveau financier qu’au niveau organisationnel. Les connaissances tacites tout d’abord sont
très difficiles à transmettre alors qu’elles représentent une grande partie de ce qui fait la valeur ajoutée d’une
entreprise en se différenciant des concurrents par des moyens autres que techniques. En effet, la technique
est aujourd’hui disponible beaucoup plus facilement, en revanche, les éléments clés porteurs des
compétences clés qui garantissent presque le succès d’un projet sont eux beaucoup plus rare. Le Knowledge
Management doit donc encore se développer afin de faire de ces connaissances tacites un élément
transmissible facilement au même titre que les connaissances explicites. Le Knowledge Management peut
être considéré comme un outil ambivalent. Il va d’une part mettre en mouvement un système ou un ensemble
de systèmes informatiques et technologiques très important mais d’autre part il va se baser sur le capital
humain qui sera même en définitive l’élément majeur de l’outil.
Il nous semble évident que la démarche de gestion des connaissances est un facteur d’innovation et de
création d’avantages concurrentiels durables. Dans un contexte d’incertitude, les entreprises renforcent leurs
métiers et leurs compétences de base afin de permettre à l’organisation de mettre en œuvre des
expérimentations sous-jacentes et faire émerger des innovations. Construire une organisation apprenante,
c’est aussi avoir une culture du défi et de l’échange. Ce qui signifie être capable de remettre en cause les
systèmes établis, renouveler les expériences et améliorer constamment les connaissances acquises.
Construire une organisation apprenante c’est aussi lutter contre les freins de cet apprentissage collectif,
comme : les luttes de pouvoir, l’expérience personnelle comme acquis, la compétition entre les individus ou
groupes d’individus, l’influence des parties prenantes et l’accès à l’information. La norme s’inscrit dans le
Knowledge Management en tant que construit des savoirs agrégés par une organisation et permet ainsi aux
individus qui la composent de s’approprier individuellement ces savoirs en vue de leur application et ainsi
d’entretenir une amélioration continue de l’organisation (Pellicer et al., 2018). La norme semble permettre une
optimisation des processus décisionnels au travers d’un cadre donné à ces derniers et une mitigation de la
rationalité limitée des agents.
La norme semble ainsi permettre une meilleure efficacité des processus inhérents aux organisations. L’objet
de cet article est d’étudier cette hypothèse au travers d’un objet précis : la maintenance aéronautique. Nous
posons ainsi la question suivante :
La pleine appréhension des normes permet-elle aux processus de maintenance d’être plus efficace ?
Nous répondrons à cette question par l’exemple de la norme de maintenance MSG-3 et par une illustration au
moyen de deux cas. Nous expliquons tout d’abord ce qu’est une norme avant de décrire la maintenance et de
montrer comment celle-ci est décrite au moyen de la norme MSG-3.
2.1 Influence normative, de quoi parlons-nous ?
Une norme désigne un ensemble de spécifications décrivant un objet, ou une manière d’opérer (Revel, 2013).
Cela crée un principe servant de règle et de référence technique. La norme n’est pas obligatoire, il s’agit d’une
adhésion volontaire, sauf si celle-ci est reprise par une loi, un décret ou autre texte réglementaire. Les normes
sont élaborées par de nombreux organismes internationaux, communautaires ou nationaux. Les plus connus
sont l’International Organization for Standardization (ISO), la Commission Electrotechnique Internationale
(CEI), le Comité Européen de Normalisation (CEN), et enfin l’Association Française de Normalisation
Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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(AFNOR). Ici la norme qui nous intéresse sera la Maintenance Steering Group (MSG-3). Nous développerons
plus loin cette norme. Les normes, lorsqu’elles ne présentent aucun caractère obligatoire, sont appliquées par
tous les acteurs qui souhaitent y adhérer, ainsi que par les organismes qui les créent et les contrôlent.
Nous conviendrons que les normes sont comme l’état de l’art du secteur privé devenu une norme formelle ou
institutionnelle. Aujourd’hui, ces normes impactent, contraignent, et dirigent l’environnement concurrentiel de
l’ensemble des secteurs d’activité au niveau national et international, le secteur de l’aéronautique n’échappe
donc pas à la règle. Les normes techniques sont donc une forme de gouvernance privée de l’activité
économique sous forme de référentiel, de guide de bonnes pratiques. C’est une forme de pouvoir invisible qui
régule les activités privées et dont personne ne sait qui en est à l’origine. La norme privée (ISO, NF, MSG, ...)
ne s’oppose pas à la norme publique (lois et circulaires) mais apporte une complémentarité et une spécificité
de la conformité pour l’ensemble des secteurs d’activité. Il existe donc un jeu d’influence entre acteurs publics,
acteurs privés et auditeurs qui se partagent des revenus sur le compte sous couvert de régulation d’intérêt
général.
En France, pour tout secteur confondu, le marché de la normalisation est estimé à 300 millions d’euros. Pour
les acteurs économiques, maîtriser l’ensemble des règles et des normes est ainsi aujourd’hui un facteur clé
de succès déterminant pour intervenir sur un marché. Afin de rester compétitives, les entreprises doivent en
plus de maîtriser l’ensemble des règles et normes, être capables de créer à leur tour des contraintes pour les
autres acteurs de leur secteur. Ces contraintes peuvent être créées par l’intermédiaire de nouvelles normes
c’est-à-dire de nouvelles bonnes pratiques dans le métier, ou par le dépôt de brevets. Ce dernier en plus
d’imposer une norme, impose un process de production. Ce qui revient à dire que non seulement la norme
peut contraindre à certains résultats mais aussi à la façon dont on va les atteindre. Le MSG-3 est une norme
appliquée à la maintenance des aéronefs : posons ainsi maintenant la question de ce qu’est la maintenance,
au travers d’un prisme normatif, avant d’aller plus loin avec la norme spécifiquement étudiée.
2.2 La maintenance
Pour définir la maintenance, on peut se baser sur plusieurs définitions, la première étant celle de l'Association
Française de Normalisation : « l'ensemble des actions permettant de maintenir ou de rétablir un bien dans un
état spécifié ou en mesure d’assurer un service déterminé » (normes AFNOR NFX 60-010 datant de 1994).
On distingue plusieurs niveaux de maintenance, en fonction de la technicité, du matériel nécessaire, de la
qualification des personnels et du temps d'intervention afférent à l'opération. Ces niveaux sont normés dans
le tableau suivant :
Fig. n°1 : niveaux d'intervention définis par l'AFNOR - NF X 60-010
La maintenance est définie en plusieurs types dont les deux principaux sont la maintenance préventive visant
à empêcher un dysfonctionnement d'arriver, et la maintenance corrective qui vise elle à intervenir une fois la
panne confirmée. Ces types de maintenance sont définis dans la figure suivante :
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du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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Fig. n°2 : classification des types de maintenance d'après la norme NF X 60-010
Le processus MSG-3 ayant surtout trait à l'entretien des aéronefs, donc à la maintenance préventive, c'est sur
ce point que sera porté toute l'attention de cette étude.
En aéronautique, l'entretien est une notion ayant beaucoup évolué au cours du temps. En effet, les premiers
règlements de navigabilité stipulaient dès 1930 : « les instruments et les équipements devront être révisés à
intervalles suffisants pour assurer leur fonctionnement correct à tout moment. »
2
. Les exigences en termes
d'entretien ont donc largement évolué, afin d'augmenter la fiabilité des aéronefs. Il s'agit donc d'éviter une
panne d'un élément, qui pourrait être préjudiciable au fonctionnement de l'aéronef, tout en évitant -au possible-
la sur-maintenance, perçue comme un gaspillage (Raddam et al., 2015). Il convient maintenant de définir ce
qu'est la notion d'entretien d'un aéronef.
Premièrement, on peut définir l'entretien d'une machine en usant du concept de maintenance préventive de la
norme NF X 60-010 : « maintenance ayant pour objet de réduire la probabilité de défaillance ou de dégradation
d’un bien ou d’un service rendu. Les activités correspondantes sont déclenchées selon un échéancier établi à
partir d’un nombre prédéterminé d’unités d’usage (maintenance systématique), et/ou des critères
prédéterminés significatifs de l’état de dégradation du bien ou du service (maintenance conditionnelle) ».
En aéronautique et dans la sémantique de la navigabilité, il s'agit très souvent des opérations légères
effectuées « en ligne » par opposition à la maintenance lourde effectuée « en base ». Cette différence se fait
notamment en termes de technicité et de complexité de l'opération à effectuer, des moyens matériels
3
, du
temps d'intervention nécessaire et (spécifique à l'aviation) du degré de l'approbation pour remise en service
(APRS).
La maintenance préventive est effectuée en ligne, mais également en base. Les visites d’entretiens
périodiques sont le meilleur exemple de maintenance lourde dédiée à l’entretien des aéronefs. L'entretien d'un
aéronef est un processus global.
Nous définissons maintenant les diverses formes de maintenance préventive. Il en existe trois types : la
maintenance systématique, la maintenance conditionnelle, la maintenance prévisionnelle.
En se basant sur la norme NF X 60-010, on peut définir ces types de maintenance de la façon suivante :
- Maintenance préventive systématique : « Les remplacements des pièces et des fluides ont lieu quel que
soit leur état de dégradation, et de façon périodique ». Les échéances calendaires en documentation
aéronautique sont un exemple de ce type de maintenance. En effet, une pièce identifiée comme telle
dispose d'un temps limite de vie (TLV) ou d'un temps limite avant remplacement (TLR).
- Maintenance préventive conditionnelle : « les remplacements ou les remises en état des pièces, les
remplacements ou les appoints en fluides ont lieu après une analyse de leur état de dégradation. Une
décision volontaire est alors prise d'effectuer les remplacements ou les remises en état nécessaires. » Un
exemple de ce type de maintenance réside dans l'application de certaines consignes de navigabilité ou
2
Cité et traduit du chapitre 7 E section 5, Aeronautical Bulletin, Transport airline inspection service (l’ancêtre de la FAA) par Chenevrier,
(2001).
3
Infrastructures, rechanges, outillage et documentation notamment.
Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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plus simplement dans la surveillance de certains éléments lors des visites systématiques (avant, inter-, et
consécutive aux vols).
- Maintenance prévisionnelle : « maintenance préventive subordonnée à l'analyse de l'évolution de
paramètres significatifs de la dégradation du bien, permettant de retarder et de planifier les interventions ».
La maintenance préventive permet ainsi d'éviter les opérations de maintenance curative, bien plus coûteuses
en termes de main d’œuvre, de rechanges, de coûts “environnementaux” (infrastructures, usure des
outillages...) et dont l’occurrence n'est pas souhaitable pour des questions de fiabilité et de sécurité des vols.
Il s'agit donc d'intervenir avant le dysfonctionnement d'un élément. Cette maintenance est normée pour plus
de traçabilité et d’efficacité, nous étudions ceci dans la sous-partie suivante.
2.3 La norme en aviation
Les normes concernent une très grande partie des réalisations de l'homme, aujourd'hui. La norme est ainsi
définie par l'Organisation Internationale de Normalisation : « document, établi par consensus et approuvé par
un organisme reconnu, qui fournit, pour des usages communs et répétés, des règles, des lignes directrices ou
des caractéristiques, pour des activités ou leurs résultats, garantissant un niveau d'ordre optimal dans un
contexte donné »
4
. La norme apparaît ainsi en tant que « soft law » façonnée au gré de l'influence de divers
groupes d’intérêts, agissant donc en tant que « soft power »
5
. Cochoy (2000) définit la normalisation industrielle
comme une « diplomatie des techniques », alternative à la guerre commerciale dans son sens strict.
Nous pouvons principalement regrouper la notion de norme sous quatre formes :
- Les normes fondamentales, comme les normes portant les unités de mesure (ISO 31) - Les normes
de spécification, comme les normes portant sur la conformité de pièces.
- Les normes d'analyse et d'essais
- Les normes d'organisation, ce sont ces dernières qui seront intéressantes dans cette étude. Dans le
secteur aéronautique, l'étendue des normes est immense et couvre un grand nombre de secteurs.
2.3.1 Un exemple de norme en aviation : l'ATA-100
Créée en 1936, l'Air Transport Association of America regroupe à l'époque 14 compagnies aériennes
américaines et est la seule association de ce type dans le monde. Elle fut donc pionnière dans l'établissement
de normes aéronautiques qui sont encore d’usage aujourd'hui, alors que l'ATA en tant que telle n'existe plus.
Cette entité (et son dérivé actuel A4A) représenta les intérêts de l'industrie américaine des principaux
opérateurs de transport aérien devant diverses organisations de décideurs comme le congrès américain mais
aussi l'organisation de l'aviation civile internationale (OACI).
La norme ATA-100 a été créée dans un objectif de sécurité aérienne pour la maintenance aéronautique. Celle-
ci compte des chapitres allant de 00 (chapitre administratif) à 92 (installations électriques et électroniques)
6
.
Si la norme ATA 100 reste utilisée pour des machines de l'aviation générale ou pour certains systèmes déjà
anciens (cas de l'EC 665 TIGRE pour les remontées de pannes), celle-ci a évolué en i Spec 2200 puis S1000D,
dans l'évolution la plus récente (Mayer, 2010).
Couplée à une utilisation de l'anglais « contrôlé » (Ryan, 2009)
7
, permettant de ne pas interpréter la
documentation aéronautique (afin de l'appliquer stricto-sensu), cette normalisation permet d'optimiser la
maintenance aéronautique en facilitant la compréhension et la recherche de solutions techniques dans la
documentation.
Cet exemple permet de comprendre l'action de l'ATA dans l'harmonisation et la sécurisation de la maintenance
aéronautique, aux prémices de la méthodologie MSG-3
8
.
4
Directives ISO/CEI, Partie 2, Règles de structure et de rédaction des Normes internationales. Cinquième édition 2004.
5
On peut définir le concept de soft power d’après Nye (2008) : « Soft power is the ability to affect others to obtain the outcomes one
wants through attraction rather than coercion or payment ».
6
Lugan, G. (2015) : pp. 10-12.
7
On peut notamment évoquer l'anglais simplifié « ASD STE-100 Simplified Technical English ». Voir : Ryan (2009).
8
Voir la définition du MSG3 comme « standard » issu de l'ATA : la dimension normative est bien présente
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du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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2.3.2 La méthodologie MSG-3
MSG est l'acronyme de « Maintenance Steering Group ». En 1967, United Airlines va pour la première fois
produire un document afin d'optimiser les processus de maintenance, celui-ci est connu sous la forme suivante
: « Diagrammes de décision pour l’analyse logique des programmes de maintenance ».
Les éléments de la norme MSG-3 ayant été produits à partir de travaux communs de l'industrie, on note déjà
un esprit « collégial » dans la démarche et qui est au fondement de la méthodologie MSG-3 comme norme de
processus avec un fort impact organisationnel.
D’un point de vue historique, c’est lors du développement du BOEING 747, avec un programme de
maintenance approuvé par la conférence interairline du B747, qu’est née -en 1969- la norme MSG-1
9
. Le 25
mars 1970, un nouveau document est publié par l’Air Transport Association : l'Airline-Manufacturer
Maintenance Program Planning Document. Ce dernier est destiné à définir la maintenance programmée du
DC10 et du Lockheed 1011, donnant ainsi naissance à la méthodologie MSG-2 (Chenevrier, P. (2001), p.17.
L'avènement de la méthodologie MSG-3 se produira en 1978 quand United Airlines (principalement) et le
département de la défense américain développent une évolution du MSG-2, en basant sur l’expérience de ce
processus et de son application en aéronautique. Cette étude est alors également complétée par un plus grand
recul technique aéronautique permettant l’établissement d’une norme plus précise dans son appropriation
10
.
Plus tard, diverses mises à jour et adaptations ont vu le jour telle que la création de l'EMSG (European
Maintenance System Guide) publié en février 1973 par l’Association of European Airlines. Il fut notamment
développé pour les programmes de maintenance d’aéronefs alors modernes tels que les A300 B2 et B4, ainsi
que pour le Concorde (Chenevrier, 2001, p.17). Chenevrier (2001) nous apprend également que l'une des
dernières évolutions du MSG 3 consiste en la publication par l'ATA, le 30 septembre 1980, de l'Airline
Manufacturer Maintenance Program Development Document, amendé en 1988 et 1993, avant l’avènement
d’autres versions ultérieures parallèlement aux évolutions de la technicité et du marché des aéronefs. Ce
document vise par ailleurs à concevoir les programmes de maintenance des aéronefs A310, A300-600, A319-
320-321, A330-340 et B757-767-777. Le processus MSG-3 montre ainsi une démarche itérative d’amélioration
continue, que nous décrivons dans la figure suivante, en prenant une période allant de 1968 à 2002.
Figure N°3 : création et évolution du MSG entre 1968 et 2002 (Hinsch, 2011)
Comme énoncé plus tôt, la norme résulte d’un construit évolutif de savoirs et permet par un cadrage de ces
derniers une appropriation par les individus de pratiques uniformisées, permettant ainsi une fluidification
d’activités telles que la production et en améliorant l’efficience et l’efficacité. Nous nous intéressons maintenant
de manière plus précise aux principes inhérents au MSG-3.
2.3.3 Le principe du MSG-3 : plus d’efficience pour une efficacité optimale.
Deschamps (2014) définit le MSG-3 de la manière suivante : « La méthode MSG-3 fut développée afin de
définir quoi, quand et comment maintenir les aéronefs. Elle produit des tâches de maintenance orientées sur
les coûts, les aspects opérationnels et la sécurité. L'intention de ces tâches de maintenances sont préventives
afin d'éviter des défaillances ainsi que la recherche de défaillances ». Le MSG-3 est une méthode de
maintenance basée sur la fiabilité (MBF) que l'on peut résumer selon quatre grands principes immuables
(selon Smith, 1993).
9
En 1960, l'industrie aéronautique américaine forme une « task force » afin de développer les possibilités de maintenance préventive, ce
qui aboutira sur la maintenance « on condition », voir : Boeing QTR_04 06 Quartulary Publication-Maintenance Program Enhancement-
« history of maintenance », p.6.
10
Boeing QTR_04 06 Quartulary Publication-Maintenance Program Enhancement- « history of maintenance », p.6.
Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
Stratégie, http://www.revue-rms.fr/.
Le premier principe consiste à préserver la « fonctionnalité du système ». Ce principe se concentre sur la
fonctionnalité obtenue comme résultat des opérations de maintenance et non sur lesdites opérations en elles-
même. C'est un concept à la fois pratique et très théorique car il s'oppose à l'idée de « préserver les
équipements ». Le second principe est d'identifier les différentes possibilités de pannes qui peuvent affecter
la fonctionnalité. Il s'agit ici de savoir ce qui peut se passer, et d'identifier les différentes ampleurs possibles
pour le phénomène afin d'être capable de concevoir la maintenance préventive d'un système et quantifier les
pertes possibles, en termes de fonctionnalités. Ce principe pousse ainsi les acteurs à conduire une véritable
analyse de risques en vue de produire une norme permettant une gestion optimale de ceux-ci. Le troisième
principe consiste, dans la gestion du processus de maintenance, à évaluer et assigner des priorités techniques
en tenant compte des pertes fonctionnelles induites. Le quatrième et dernier principe, consiste à identifier et
ne sélectionner des actions de maintenance préventive qui ne peuvent être qu'applicable et effectives afin de
« préserver des défaillances fonctionnelles » (Chenevrier, 2001, p.19).
En se basant sur les trois derniers principes, il est possible de déterminer les actions de maintenance
préventive que l'on pourrait entreprendre. Pour ce faire, il est également nécessaire d’utiliser un « filtre » qui
est de déterminer si ces tâches sont applicables et effectives.
Tout d’abord, on entend par applicable la chose suivante : rentrer dans le cadre de la maintenance préventive
en prévenant une panne, détectant le déclenchement une panne ou découvrant une panne cachée.
Également, on définit comme effective le cas d'une opération dont on juge qu'il est nécessaire de mettre les
moyens pour la réaliser.
On apprend donc par Smith (1993) que quatre grands principes sont fondamentaux pour toute maintenance
basée sur la fiabilité, donc dans le cadre du MSG-3 : « Preserve functions, identify failure modes that can
defeat the functions, prioritize function needs, select only applicable and effective PM tasks ».
Enfin, l'approche MSG-3 se distingue du MSG-2 par son paradigme « top-down », au contraire de la
philosophie « bottom up » prônée jusque- : On identifie le système défaillant et la remontée s'effectue
jusqu'au composant pour avoir la meilleure définition de la défaillance possible. Nous montrons cette différence
entre MSG-2 et MSG-3 par la figure suivante que nous citons Ackert (2010).
Figure N°4 : Approche top-down du MSG-3 Ackert (2010, p.4)
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du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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La norme MSG-3 vise à rationaliser le nombre de tâches d'entretien afin de diminuer celles-ci tout en se basant
sur des agrégats de données modélisant la fiabilité dans différentes zones de l'aéronef, afin de rationaliser les
coûts sans amoindrir la sécurité comme montré par Anderson (1999). La fluidification induite par le MSG-3 se
traduit donc dans la conception du plan d’entretien des aéronefs.
2.3.4 L'analyse MSG-3 dans la conception d'un plan d'entretien
Une analyse MSG-3 se compose de trois types de programmes :
Tout d’abord, un programme « moteurs et systèmes » identifiant les MSI (Maintenance Significant Items)
déterminés par les spécialistes du type d'aéronef et pouvant avoir un effet délétère car mettant en jeu la
sécurité des vols, ou pouvant être à l’origine d’une perte en termes de revenus opérationnels ou rester non
détectés.
Après avoir détaillé le type de défaillance et quantifié les dommages possibles, une analyse des risques est
effectuée d'après quatre points : fonctions touchées, type de défaillance, fréquence de l’occurrence et causes.
On utilise par la suite un « arbre d'analyse logique MSG-3 » (Chenevrier, 2001, p.19) dont l'idée est d'évaluer
si cette défaillance est détectable par l'équipage, facteur influant très directement sur la criticité de la
défaillance considérée. Dans cet esprit, ce type d’arbre d'analyse logique permet également de définir le degré
de criticité d'une défaillance sur un système ainsi que d'en évaluer le type de criticité : celle-ci peut être critique
en termes de sécurité des vols (auquel cas elle est prioritaire) ou entacher l'efficacité opérationnelle ou
économique du vol. Cet arbre est matérialisé dans la figure suivante.
Fig. n°5 : Arbre d'analyse logique MSI (Chenevrier, 2001, p.20)
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Le second programme concerne la structure : il s'agit ici de définir les SSI (Structure Significant Items) selon
deux principaux critères. Le premier concerne les conséquences de la défaillance et le second la probabilité
de défaillance selon trois possibilités : accident, environnement défavorable, fatigue des matériaux.
On rejoint par exemple l'équation de Weibull, si l'on considère la présence de corrosion sur l'item structural
étudié (Chenevrier, 2001). La corrosion, par exemple, doit être surveillée selon trois niveaux, selon qu'elle soit
dans les tolérances, hors tolérances ou menaçant la sécurité. La figure suivante nous montre un modèle de
détection et d'acceptation d'un défaut structural.
Fig. n°6 : Détection et évolution d'une défaillance structurale (Ackert, 2010, p.5)
Afin de prévenir toute défaillance structurale grave, le MSG 3 prescrit un programme de contrôle et de
prévention de la corrosion (CPCP)
11
et encourage certaines innovations par les constructeurs comme dans le
cas d'Airbus au travers de pratiques de conception de telles sortes que les items pouvant présenter une
défaillance structurale critique puissent être visible de l’extérieur. On utilise, dans le cas des SSI, un arbre
similaire au MSI, précédemment étudié. Enfin, les Airworthiness Limitations Items (ALI) représentent les items
critiques en termes de fatigue, de cycles de vol et de corrosion (Chenevrier, 2001).
Enfin, les programmes d'inspection de zones (ZIP) divisent l’aéronef en huit zones distinctement délimitées
12
.
Ce programme ne comporte qu'un seul type de tâche : l'inspection visuelle. Ce type de tâche comporte : la
11
Ackert, S. P. (2010), p.5.
12
Ces zones sont : fuselage inférieur jusqu’à la cloison pressurisée arrière, fuselage supérieur jusqu’à la cloison pressurisée arrière,
section arrière et empennage, moteurs, pylônes et nacelles, aile droite, aile gauche, train d’atterrissage et trappes de train, portes
d’embarquement passagers et cargo. Voir : Chenevrier, P. (2001), p.21.
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vérification de parties et de défauts visibles, la bonne installation et le freinage de divers éléments ainsi que la
fixation des capots. Un exemple de cette décomposition des aéronefs est illustré dans la figure suivante.
Fig. n°7 : Exemple de zones d'inspection sur Boeing 737
13
Les différentes tâches de maintenances prescrites sont liées à des seuils déclenchant leur exécution et de
nombreux défauts constatés sur les MSI et SSI peuvent donner lieu à des tâches dans le ZIP (Chenevrier,
2001). La maintenance pendant le stockage des aéronefs donne lieu à des mesures de stockage en en
fonction de la durée du stockage et de la configuration de l'aéronef (Ackert, 2010). Avec l'ensemble de ces
éléments, des éléments réglementaires et des éléments liés à la certification (Ackert, 2010, p.9) ainsi qu'à la
navigabilité de l'aéronef, est construit le MRBR (Hinsch, 2011). Ce dernier évolue en MPD, document «
pratique » quant à la maintenance effective des aéronefs.
De manière générale, l'élaboration d'un plan de maintenance préventive au moyen du MSG-3 est représentée
dans la figure suivante.
Fig. n°10 : Création d'un MRBR (Lugan, 2015, p.42)
13
Voir Maintenance Review Board Report (MRBR) Boeing Document D6-82981-MRBR- révision de mai 2007, p. D-6.
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Le MSG-3 permet de normer une méthode de définition des plans d’entretien, en fonction de l’analyse des
risques effectuée sur chaque aéronef considéré. La figure suivante montre un exemple d’échelonnement des
visites d’entretien en fonction des aéronefs.
Fig. n°11 : échelonnement des visites de maintenance par aéronefs
14
Expliquons les différents types d’entretiens ci-dessus. Un programme de maintenance préventive se compose
ainsi de visites périodiques (Checks), ici quatre : de A à D. Le but d'une approche MSG3 est donc de maintenir
un aéronef en état de vol tout en minimisant la fréquence -et l'exhaustivité- des vérifications.
La réalisation des opérations se fait selon trois grandes approches décisionnelles :
- HT (Hard Time) : pratiqué avant le MSG, consistant à remplacer systématiquement les pièces selon
des échéances définies et intégrant des programmes de maintenance extrêmement exhaustifs.
- OC (On condition) : Inspections à intervalles réguliers afin d'optimiser les échanges de pièces dès
constatation des défaillances.
- CM (Condition monitored) : On admet la défaillance de systèmes non vitaux, que l'on observe afin de
maintenir la sécurité du vol, tout en minimisant les coûts de maintenance.
L'évolution de ces procédés s'est ainsi faite du « hard time » vers le « condition monitored » du fait de la
méthodologie MSG-3. La figure suivante illustre cette transformation de la maintenance du fait de l’adoption
de la norme MSG-3.
Fig. n°12 : évolution de la typologie des actions de maintenance entre 1964 et 1987 (Smith, 1993)
14
Transport Studies Group (2008) : Innovative Cooperative Actions of R&D in EUROCONTROL Programme CARE INO
III Dynamic Cost Indexing-Technical Discussion Document 9.0 Aircraft maintenance marginal delay cost University of
Westminster London
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L’étude de ces données montre donc une diminution significative des échanges systématiques de pièces avant
une défaillance significative sur la sécurité aéronautique de celles-ci. Le MSG-3 semble permettre une
meilleure efficience à iso-efficacité. Nous cherchons maintenant, par une étude de cas double, à vérifier
l’hypothèse émise selon laquelle cette norme permet l’atteinte d’une meilleure disponibilité des matériels en
tant que catalyseur de processus de maintenance innovants.
3. Méthodologie
L’approche de cet article suite essentiellement une méthodologie abductive fondée sur un aller-retour entre
théorie ancrée et études de cas, dont la méthode renvoie à l’utilisation de sources documentaires secondaires
telles que décrites dans les études de cas au sens de Yin (2003).
Deux cas sont étudiés ici, ces derniers ont tous deux traits à l’armée de l’air américaine :
1) L’utilisation conjointe du lean management à une mise en place du MSG-3 dans le cas du C5 Galaxy
(approche processuelle).
2) La mise en place conjointe du MSG-3 dans l’étude de scénarios d’optimisation dans la maintenance
du F15 et KC 135 (approche spatiale).
L’utilisation d’une méthode abductive est ici particulièrement intéressante pour créer de la connaissance car
elle “débute par l'observation de certains faits et s'achève dans la supposition d’un principe général qui, s’il
était vrai, expliquerait que les faits soient tels qu’ils sont (Pierce, 1958-1966). Plusieurs conclusions sont dès
lors possibles dans l’inférence abductive” (Angué, 2009). Le sens de cette méthode est ici justifié par
l’existence d’un phénomène assez ancien (la norme en aéronautique) et la nécessité d’un modèle afin de
décrire les évolutions dudit phénomène.
L’utilisation d’études de cas double permet, au sens de Yin (2012), de mieux cerner une réalité dont les
contours “flous” induisent une perspective narrative pour chaque cas et traduisent une évolution de ceux-ci et
de leurs contours associés (Dumez, 2013). Le choix de deux études de cas portant des entités militaires
américaines permet à la fois d’inscrire celles-ci dans un facteur culturel commun tout en dissociant leurs unités
d’analyse du fait des systèmes étudiés : le cas de la maintenance lourde (principalement en “dépot”) du C5
Galaxy et celui du F15 ainsi que du KC135 (maintenance lourde mais plus “agile”). Le croisement des résultats
de ces deux études de cas permet ainsi de dégager des caractéristiques communes et applicables en termes
d’implications managériales en termes d’utilisation de la norme en maintenance aéronautique.
De la même manière, au travers de ces deux cas, nous croisons une approche processuelle (MSG-3 conjoint
au lean management) et une approche spatiale (cas du F15 et du KC135 avec la régionalisation des visites).
Également, le cas afférent au C5 porte sur une mesure conjointe alors que le cas traitant du F15 et KC135
implique la mise en place du MSG-3 en tant qu’unique mesure, ces deux types de scénarios induisent
également une différence de perspectives plus marquée entre les deux cas, en vue de trianguler les résultats
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de l’étude de ces derniers. L’objectif est ici de réaliser une triangulation permettant de mieux cerner l’objet
étudié au travers d’au moins deux points de vue différents (Caillaud et al., 2016).
Enfin, notre étude porte sur deux cas relativement anciens. Ce choix conscient permet d’observer des
phénomènes accomplis et de considérer leurs contextes respectifs avec un plus grande objectivité. Par
ailleurs, l’utilisation de ce type de cas s’inscrit totalement dans une démarche abductive dans laquelle la
confirmation de notre hypothèse implique nécessairement un retour sur le terrain actuel en termes de
recommandations managériales.
4. Etudes empiriques
4.1 Cas N°1 : l'approche MSG-3 appliquée à la maintenance du C-5 Galaxy.
Ce cas illustre l’application conjointe des principes normatif du MSG-3 et du lean mangement à la maintenance
du C-G GALAXY. Le Lockheed C- 5 Galaxy est l'un des plus grands aéronefs jamais construits et dont 52
devraient être en service en 2017, sa conception étant contemporaine à celle du Boeing 747 (il est livré dans
sa première unité opérationnelle en 1970
15
), il est un objet d'étude intéressant notamment du fait de sa durée
de vie. L'application de plans de maintenance orientés MSG-3 est bien postérieure à la mise en service de
l'aéronef et a donné lieu à de nombreuses études, ce qui rend ce cas particulièrement pertinent.
Appliqué au C-5, ces concepts de lean maintenance et d’application du MSG-3 ont rencontré un franc succès,
notamment du fait que ceux-ci soient directement dérivés de ce qui se faisait déjà dans les compagnies
aériennes civiles
16
. Ce constat fut également celui de la Royal Air Force britannique, le national audit office
ayant rapporté en 2007 une économie de 1,3 milliards de livres, depuis l'application de processus lean en
maintenance aéronautique
17
.
La mise en place du MSG-3 s’est réalisée sur une période de 4 ans entre 2006 et 2009, avec un passage
définitif au MSG-3 en 2010. Cette chronologie est décrite dans la figure suivante.
Fig. n°13 : Mise en place du MSG-3 pour la maintenance du C-5 Galaxy (Van Patten, 2007)
L’analyse de ce cas montre que cette approche permit de voir passer le nombre de jours de maintenance de
l'aéronef de 339 à 220 entre 2001 et 2004, soit une réduction de 35 pour cent des actions de maintenance.
De la même manière, de notables progrès en termes d’efficacité ont pu être noté par la réduction drastique
des retards de production.
15
Site internet de l’armée de l’air américaine sur la maintenance des C5 GALAXY et l’implémentation du MSG3,
http://www.af.mil/AboutUs/FactSheets/Display/tabid/224/Article/104492/c-5-abc-galaxy-c-5m-supergalaxy.aspx, consulté le
01/02/2017.
16
MRO Yearbook (2011) : UBM Publications, p.83.
17
Ibid., p.84 et Davies et al. (2007).
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du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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Une approche MSG-3, qui est donc venue s'associer à une approche Lean en base (Base de Robin où sont
effectués les grands chantiers
18
) entre 2001 et 2004, a permis d'observer le résultat dans la figure suivante.
Fig. n°14 : résultats d'une politique Lean sur la base de Robin, entre 2001 et 2004 (Barett et al., 2005)
La mise en œuvre de la politique Lean vient donc raccourcir le temps de maintenance en chantier des aéronefs
et ainsi permettre des livraisons plus fréquentes et en temps.
Concernant l'application du MSG-3 dans l'US Air force, chaque C-5 dispose d'un plan de maintenance de huit
ans, ponctué par des chantiers d'entretien : mineurs ou majeurs. Les informations données par l'US Air Force
sur l'implémentation de cette nouvelle méthodologie montrent un raccourcissement significatif de la durée des
chantiers d'intervention, notamment mineurs
19
: « Prior to 2008, the average Westover Minor ISO
20
inspection
took 40-plus days to accomplish," said Master Sgt. Peter Michaud, the 436th MXS Operation Location Alpha
detachment chief. "With the integration of the 436th MXS OLA, 439th MXS and the advent of the MSG-3
process, the ISO was reduced by 26 days down to an 18 day average ».
L'érosion des budgets de défense concernant le C5 et le vieillissement de la flotte ont contraint l'US Air force
à retirer du service 14 aéronefs en 2005 à des fins de cannibalisation (Heiman, 2009), dans le but d'améliorer
la disponibilité technique opérationnelle des aéronefs restants
21
. Le MSG-3 devait, selon les attentes de l'Air
Mobility Command, augmenter la fiabilité des aéronefs C-5 de vingt pour cent, et ce, en organisant une
majeure partie des opérations les plus complexes lors des entretiens majeurs, tous les huit ans (Heiman,
2009).
Cet objectif est atteint. Le MSG-3 a permis à l'US Air Force d'optimiser l'utilisation de ses C-5 Galaxy, et ce
faisant, d'accomplir deux objectifs majeurs : utiliser ceux-ci jusqu'en 2040 et augmenter l'utilisation
opérationnelle de ces aéronefs pour une flotte se réduisant dans le temps (Keller, 2015, p.2). Si 7 millions de
dollars ont été investis dans l’élaboration de nouveaux processus, notamment en standardisant ceux-ci. Ces
investissements ont ainsi permis un gain d’efficacité constaté avec notamment environ 32 pour cent de
réduction des coûts entre intervalles de maintenance pour les C5 (Van Patten, 2007).
Analyse du cas :
On voit donc ici que la mise en place du MSG-3 a été un projet sur le long terme. Il est également à noter que
la partie concernant la réécriture des cartes de travail, afin de les rendre plus ergonomiques et augmenter
l'efficience des tâches de maintenance est l’un des aspects les plus significatifs mais également les plus
prégnants dans la mise en place et les effets induits par le MSG-3. Dans le cadre d’une démarche lean, portée
sur un découpage et une standardisation des processus, le MSG-3 permet ainsi une grande complémentarité
avec ce type de maintenance.
18
Un autre fait intéressant, et très actuel, est la récente étude menée en France sur les temps de réalisation des grandes visites sur les
hélicoptères de la défense. On note un problème très similaire au niveau des entités devant réaliser les grands chantiers. Voir : Avis
fait au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées sur le projet de loi de finances pour 2017 (n°4061) Tome IV
Défense et préparation et emploi des forces terrestres. Par le député F. Lamy. http://www.assemblee-
nationale.fr/14/budget/plf2017/a4130tIV.asp (consulté le 02/02/2017).
19
Voir site de l'US Air Force, article « Keeping the C5 fleet in check »
http://www.af.mil/News/ArticleDisplay/tabid/223/Article/633228/keeping-the-c-5-fleet-in-check.aspx, consulté le 01/02/2017.
20
ISO : Isochronal, l'implémentation d'inspections isochrones a permis de rallonger le temps entre inspections et donc de diminuer le
nombre de jours de maintenance par aéronef.
21
On mesure la disponibilité technique opérationnelle en divisant le nombre d'aéronefs disponibles pour le service, par le parc en
dotation (parc en exploitation et parc en chantier à l’extérieur).
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Le présent cas confirme ainsi que la norme MSG-3, inscrite dans une démarche d’optimisation des processus,
peut être considérée comme un catalyseur de l’utilisation du lean management dans le cadre de la
maintenance aéronautique sur le cas considéré.
Le choix de la seule mise en place du MSG-3 permet-il une amélioration de l’efficacité de la maintenance ?
C’est ce qui est étudié dans le cas suivant.
4.2 Cas N°2 : le MSG-3 appliqué au F15 Eagle et au KC 135 Stratotanker
A l'instar du C-5 Galaxy, et de nombreux autres aéronefs militaires américains, le F15 Eagle -aéronef
beaucoup plus jeune que le C-5 en termes de mise en service opérationnelle mais très ancien à l’échelle des
aéronefs actuellement en service dans les forces armées américaines
22
- a également subi une reconfiguration
de son plan d'entretien selon une méthodologie MSG-3. Le Boeing KC 135 Stratotanker est quant à lui un
aéronef très ancien, dont la mise en place remonte à 1956. La physionomie de cet aéronef place ce dernier
entre le C-5 Galaxy (avion-cargo lourd) et le F15 (chasseur avec une empreinte technico-logistique élevée).
Nous étudions donc maintenant les effets de la mise en place d’une norme, non comme un catalyseur, mais
en tant que mesure propre. Également, à l’inverse de la mise en place du lean évoquée dans le cas précédent,
la mesure alternative proposée consiste en une mesure spatiale (régionalisation des entretiens lourds).
D’un point de vue contextuel, le F15 est un système dont la maintenance requiert des visites extrêmement
poussées pour une consommation de potentiel correspondant aux besoins de l’armée de l’air américaine. La
question se pose ainsi, dans ce cas, de réduire le nombre d’heures de maintenance nécessaires pour la
production d’un nombre d’heures de vol donné. En effet, pour l'US Air Force, il s'agit -au moment de l’évaluation
des projets mentionnés ci-après- de réduire le nombre d'heures nécessaires à la maintenance après vol
(Hourly Post Flight Inspection) ainsi que lors des entretiens périodiques. Avant la mise en place du MSG-3, il
fallait 1001 heures de maintenance (un cycle d'entretien complet) pour produire 1200 heures de vol
opérationnelles (Van Patten, 2007, p.13).
Le KC 135 montre, par sa grande durée de services au sein des forces armées américaines, un vieillissement
prononcé et ainsi une hausse notable des coûts de maintenance. Le recul technique affiché sur cet aéronef a
permis à l’US Air Force de discriminer les coûts en termes de localisation des pannes et du vieillissement sur
les différents ensembles de l’aéronef.
Afin d'optimiser la disponibilité technique opérationnelle de la flotte F15, la solution portée sur le MSG-3 a
finalement été retenue. En effet, la facilité d'utilisation de cette méthodologie, permettant d'évaluer et de
quantifier les probabilités de défaillance de chaque aéronef a permis d'optimiser la maintenance, et ce, bien
mieux que dans le cadre de réformes structurelles (Van Patten, 2007, p.22). Dans le cas du F15, on estime
alors le coût d'une analyse MSG-3 préliminaire à environ 10 millions de dollars et une réduction des coûts de
47,3 millions de dollars par suite de l'implémentation du MSG-3(Van Patten, 2007, p.26). D'un point de vue
plus centré sur l’opérationnel, le MSG-3 permit d'obtenir un supplément équivalent de 17 aéronefs pour la
flotte de F15, ce qui cadre avec l'aspect fonctionnel décrit par le MSG-3 (Van Patten, 2007, p.28).
Lors de la reconfiguration de l'entretien des F15, trois options co-existent alors :
1) Ne rien changer et rester ainsi en endurant une réduction de personnel (« stay the course »), cette
solution induisant une chute de la disponibilité technique opérationnelle car aucune mesure n'est prise
sur le plan organisationnel comme fonctionnel.
2) Régionaliser les inspections en les réalisant directement les aéronefs sont basés : il s’agit ici
d’un arbitrage entre prise en main localisée (avec une empreinte technique et logistique disséminée)
et maintenance lourde centrale des aéronefs (rationalisation de l’empreinte technique et logistique).
Il s’agit d’une mesure optimisation spatiale de la maintenance.
3) Implanter le MSG-3.
La figure suivante résume les bénéfices de ces trois options.
22
La première mise en service opérationnelle du F15 a eu lieu en 1974.
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Figure n°15 : Le MSG-3, la meilleure des trois options envisagées (Van Patten, 2007, p.29)
Dans ce cas, le MSG-3 apparaît comme la solution ayant permis d'augmenter la disponibilité technique et
donc fonctionnelle des flottes F15 et KC 135. Ces résultats semblent obtenus en modifiant les processus de
maintenance et d'entretien d'après une analyse rigoureuse et qualitative des risques de défaillances (Martin,
2006).
Analyse du cas :
Ce cas montre que l’adoption de la norme seule, peut permettre une réduction des coûts par une rationalisation
des processus de maintenance. Une critique à ces résultats réside dans les coûts afférents à la mise en place
et à la mise en conformité à la norme : l’évaluation du coût total de possession pour chaque flotte semble ici
très incomplète, malgré les résultats en termes de disponibilité et les économies qui semblent pouvoir être
réalisées par l’adoption du MSG-3. Ce cas permet néanmoins de confirmer l’hypothèse selon laquelle la norme
peut permettre une meilleure efficacité des processus.
5. Discussion, portée et limite
Les défis techniques portés par des systèmes dont le maintien en condition est de plus en ardu du fait d’une
technicité croissante conduisent nécessairement à poser la question des leviers innovants et efficaces pour
assurer la disponibilité des matériels. L’utilisation de la norme, telle qu’ici avec le MSG-3, semble être un de
ces leviers. Les résultats de cette étude montrent que si la norme est un levier pouvant produire des effets
particulièrement significatifs, c’est la combinaison de leviers organisationnels (managériaux avec les
approches Lean ou en matière d’optimisation organisationnelle) avec l’implémentation de la norme MSG3 qui
permettent d’optimiser les résultats.
Cette étude, bien que se basant sur le cas américain, peut trouver de nombreux champs d’applications dans
la maintenance, même non aéronautique. Des liens puissants existent ainsi entre les implications théoriques
sur les déterminants et les effets des normes et les implications managériales que celles-ci peuvent exercer
sur le terrain. La théorie peut ainsi intégrer la notion de combinaison entre la norme et les pratiques
managériales dans le cadre d’activités de maintenant et, au sens plus large, de production à haute valeur
ajoutée.
Au vu de ces deux études de cas, plusieurs éléments peuvent être analysés. L'implémentation de la
méthodologie MSG-3 a permis de rationaliser les processus de maintenance et ce, dans les deux cas.
Intéressant est de voir comment une approche en termes de lean management appliqué à la maintenance des
gros porteurs C-5 Galaxy a permis de réduire significativement les délais de prise en main de ces aéronefs
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lors des visites périodiques. La solution apportée par le MSG-3 ayant permis de rallonger les échéances entre
visites et de rationaliser ces dernières en centrant la maintenance sur la fiabilité.
Dans le deuxième exemple étudié, si la gionalisation des visites périodiques semble également être une
solution profitable car augmentant la disponibilité technique, le MSG-3 réorganise quant à lui les pratiques
dans les fondements de leur exécution.
La question du « retour sur investissement opérationnel » est relève d’un intérêt particulier : on parle ici de
l'utilisation accrue des aéronefs par l'utilisateur du fait de l’atteinte d'une meilleure disponibilité. L'étude sur le
F15 montre par exemple un accroissement d'un équivalent de 17 chasseurs, avec l'adoption du MSG-3,
optimisant donc le potentiel de combat de cette flotte. Cette même considération pourrait être observée avec
le C5-Galaxy, mais se mesurerait là par une capacité d'aérotransport améliorée permettant des gains en terme
capacitaires (le C-5 dispose d'une bien plus grande capacité de transport que le C-17) mais également en
termes économiques : disposer de capacité propres d'aérotransport permet de limiter les recours aux
externalisations, utilisées par de nombreux pays de l'OTAN pour pallier au manque d'avions de transport
tactiques disposant d'une allonge et d'une capacité de transport suffisante
23
.
Notre étude de cas permet ainsi de répondre à la question initiale par l’affirmative : les normes permettent aux
processus de maintenance d’être plus efficaces à la lueur des cas étudiés. La norme est un levier d’efficacité
car celle-ci permet une utilisation plus efficiente de la connaissance au sein d’une organisation et dans une
logique inter organisationnelle. Il est néanmoins nécessaire de borner cette affirmation en prenant en compte
trois perspectives de recherches sur ce sujet :
1) Les coûts de mise en place (et notamment de contrôle de conformité des pratiques) d’une norme
doivent être explorés afin de les intégrer de manière plus exhaustive dans les coûts de possession
d’un actif.
2) L’aspect concurrentiel afférent à la « guerre des normes » doit également être pris en compte :
l’édiction de normes obéit à une logique d’intérêts parfois divergents entre les acteurs. Comment
prendre en compte le fait qu’une norme puisse d’avantage profiter à un agent qu’à un autre ?
3) La compliance des agents est également un facteur à mieux étudier car l’impact d’une norme dépend
de la manière dont les agents concernés la mettent en place et en application.
6. Conclusion
L’enjeu de la normalisation continue d’être une thématique porteuse de nombreuses interrogations et constitue
l’un des pans de la vision stratégique que se doivent d’adopter toutes les organisations désireuses d’améliorer
leurs résultats par une meilleure appréhension de leur environnement par les agents, notion renvoyant ainsi
aux travaux de Simon. Dans le cas de l’aéronautique, et de l’armée de l’air américaine, l’adoption du MSG-3
semble avoir montré des résultats très significatifs et permis une maximisation de l’utilisation de cet outil
opérationnel. Nous avons également montré des limites dans l’études de ces deux cas, celles-ci ont
principalement trait à la mise en place même de la norme et à la nécessité de complètement en évaluer les
coûts. Au sein d’une organisation vue comme un « construit social » par Crozier et al. (1977), les agents sont
les acteurs de leurs pratiques et de l’utilisation des normes qui y sont associées. Les normes ATA et le MSG-
3 sont essentiellement le fruit d’acteurs américains et la perspective stratégique de l’élaboration des normes
a précédemment été posée : quelles sont les perspectives pour l’Europe dans le cadre d’un affaiblissement
de la position des constructeurs et opérateurs américains. Du fait de l’affaiblissement de certains de ces
acteurs au profit d’autres en Europe ou dans d’autres aires géographiques (Chine), comment étudier
l’évolution de la norme dans une multipolarisation constante du monde? Cette question ouvre vers l’étude de
nombreuses possibilités de redistribution des rôles sur la scène internationale et ne se limite pas au secteur
aéronautique.
23
La France notamment, fait partie du contrat SALIS (Strategic Airlift Interim Solution) et fait appel à des transporteurs privés
comme la compagnie ukrainienne Volga Dniepr, basée à Leipzig et disposant d'Antononv AN-124, l'avion ayant en son temps «
détrôné » le C-5 Galaxy comme ayant la plus grande capacité de transport au monde. Voir :
http://www.nato.int/cps/en/natolive/topics_50106.htm (consulté le 02/02/2017)
Commine Q., Aboiron J., 2021, Optimiser la production par lapport des normes : étude rétrospective du cas
du MSG-3 dans la maintenance de larmée de lair américaine, Revue Internationale de Management et de
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Thesis
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L’externalisation est un phénomène ancien qui n’est décrit de manière opérationnelle par aucune théorie. Au travers d’une revue de la littérature sur la théorie des coûts de transaction et les approches basées sur les core competencies, cette thèse propose une théorie de l’externalisation dont le fondement empirique repose sur une étude de cas dans le contexte de la maintenance aéronautique de l’Aviation Légère de l’Armée de Terre, que nous considérons en tant que HRO. L’externalisation est ainsi définie de manière dynamique au travers d’une approche évolutive fondée sur quatre grandes variables : la propension à externaliser, la rentabilité économique du projet, la cardicité et l’appréciation de l’apprentissage organisationnel. Se reposant sur approche originale de praticien chercheur et par l’utilisation d’une méthode d’analyse innovante, nous démontrons l’applicabilité de cette théorie et sa possible utilisation à l’ensemble des HRO en vue d’une généralisation plus marquée.
Article
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This paper focuses on knowledge differences that occur between people and organizations, and various “dissimilar things,” and presents the concept of “boundaries knowledge” or “boundaries knowing” that arises from the awareness, perception, and discovery by people and organizations of such differences. Then, through in‐depth case studies, the paper identifies the impacts that the quality of boundaries knowledge and boundaries knowing has on the creativity and innovation of people and organizations. Moreover, the paper shows that “boundaries knowledge (knowing)” is a strategic thinking and action that provides optimized creations, solutions, and processes for new knowledge creation such as strategy creation and execution as personal, organizational, or corporate targets, or solutions for problems and issues faced, as “the fourth knowledge” continuing from tacit knowledge, explicit knowledge, and phronesis.
Article
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The purpose of this article is to identify the drivers, success factors, benefits, and barriers to innovation in a medium size construction firm with a standardized innovation management system. The case study method is used to compare theory to reality from different perspectives, building explanations from a Spanish contractor observed over a three year period. Findings suggest that innovation management can be standardized, which leads to an organizational improvement for the company, and at the same time this improvement facilitates organizational problem-solving on a regular basis, increasing technical capabilities, knowledge management, business profit, and client satisfaction. The framework described in this research aims to provide guidance for managers, thus they can innovate in a systematic way; however, this exploratory study has still to be validated by empirical investigations on a larger scale through a significant number of certified companies, which is currently not yet the case in the Spanish construction industry.
Article
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L’article s’intéresse au mouvement historique de marchandisation des normes industrielles, c’est-à-dire au passage de la normalisation des produits (confinée au monde productif cher aux ingénieurs) à la certification des biens et services (plutôt destinée à la sphère de l’échange et au consommateur). À partir de deux études de cas portant sur la normalisation des appareils à gaz et du meuble au lendemain de la deuxième guerre mondiale, l’auteur montre comment les normalisateurs français ont été conduits à inventer puis à développer, au-delà de la pure nécessité économique, la marque « NF » de conformité aux normes françaises. Soucieux de maintenir leur « utilité » de « faiseurs de consensus » face à des partenaires industriels puissants, les normalisateurs ont trouvé dans la certification et la rhétorique de l’intérêt du consommateur le moyen de faire valoir un point de vue et une expertise spécifiques dans la mise au point des normes… à ceci près que les consommateurs réels (ou du moins les consuméristes) ont vite pris les normalisateurs au mot et sont venus, tels les balais de l’apprenti sorcier, infléchir à leur tour l’évolution du système normatif.
Article
La traduction technique étant rigoureusement " cibliste ", le traducteur technique ne saurait rendre une traduction non conforme à ce que l'utilisateur reconnaît comme un document réalisé dans les règles de l'art. C'est pourquoi une connaissance des langues contrôlées et surtout des principes qui les sous-tendent constituent un outil de travail précieux et un gage de qualité. Les langues contrôlées sont des sous-ensembles de la langue naturelle et donc " solubles " dans celle-ci : puisque leurs règles restrictives ne heurtent pas les règles constitutives de la langue naturelle, elles peuvent se mélanger entre elles et avec la langue technique générale en toutes proportions et à discrétion. L'ensemble des règles des langues contrôlées peut être considéré ainsi comme un corpus de recommandations de portée générale.
Article
Résumé Dans une perspective de clarification, cet article revient sur la liaison existant entre les concepts d'abduction et d'hypothèse. Il vise d'une part à préciser et établir la logique de l'inférence abductive en la replaçant dans la philosophie pragmatiste de Peirce à qui l'on en reconnaît d'ailleurs la paternité et, d'autre part, à démontrer la compatibilité des modes de raisonnement abductifs avec les outils tant qualitatifs que quantitatifs. Il s'agit donc de mener une réflexion épistémologique et méthodologique centrée sur l'oeuvre de Peirce pour en présenter sa pièce maitresse qu'est l'abduction et illustrer la fécondité de cette démarche à l'aide d'un exemple concret « doublement abductif » qui s'incarne dans l'analyse textuelle de 244 projets de collaboration technologique noués dans le cadre de l'initiative paneuropéenne Eurêka.
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