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Construire les réseaux de l’intercompréhension en ligne : scénarios, médiations, évaluations

Authors:
S
ANDRA
G
ARBARINO
C
HRISTIAN
D
EGACHE
INTERCOMPRÉHENSION
EN RÉSEAU
SCÉNARIOS,
MÉDIATIONS,
ÉVALUATIONS
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU
SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
Titre : Intercompréhension en réseau. Scénarios, médiations, évaluations
Directeurs scientifiques : Sandra Garbarino, Christian Degache
Année : 2015- Rééd. 2018
Éditeur : CRTT
Conception graphique : Eva Francescutto, Sandra Garbarino
Rédaction : Eva Francescutto, Sandra Garbarino
ISBN : 978-2-9533061-1-8
SOMMAIRE
Sommaire ............................................................................................................................................................................ 9
Introduction - Construire les réseaux de l’intercompréhension en ligne : scénarios, médiations, évaluations ................ 11
Regard sociolinguistique sur l’Intercompréhension entre langues différentes : enjeux théoriques et pistes
sociodidactiques ................................................................................................................................................................ 28
PREMIÈRE PARTIE LES SCÉNARIOS DE LINTERCOMPRÉHENSION
Quels scénarios pour pratiquer l’intercompréhension interactive ? Entre double mise en abyme, vertige et effectif réduit,
l’analyse itérative et contextualisée d’une session spécifique de formation ..................................................................... 39
Galapro França-Brasil 2013 : analyse de la construction d’un scénario pour un public d’élèves non étudiants .............. 77
Un scénario pédagogique ludique pour le développement de compétences plurilingues .............................................. 101
Costruire competenze plurilinguistiche attraverso il co-apprendimento e l’approccio riflessivo: uno studio pilota
negli USA ..................................................................................................................................................................... 113
L’Intercompréhension dans le monde arabe : description d’une expérience didactique exploratoire à l’Université Paris-
Sorbonne Abou Dhabi .................................................................................................................................................... 127
Intercompreensão e interculturalidade: entre discursos competentes e outras falas ...................................................... 141
Vers une lecture multilingue et interculturelle de la presse en ligne............................................................................... 153
Nouveaux publics, nouveaux scénarios .......................................................................................................................... 163
Les scénarios pour l’Intercompréhension en réseau : définitions, expériences et enjeux ............................................................. 171
DEUXIÈME PARTIE LA MÉDIATION EN INTERCOMPRÉHENSION
Processi di intercomunicazione tra parlanti di lingue affini: analisi di sequenze metalinguistiche ................................ 187
Intercompréhension in praesentia : la reformulation dans une troisième langue comme repair au cours dune
rencontre en langues romanes ......................................................................................................................................... 199
Les approches plurielles et la psychotypologie des apprenants ...................................................................................... 215
Intercompréhension et évaluation formative : quelles médiations développer dans le processus
d’enseignement/apprentissage du FLE professionnel ? .................................................................................................. 227
Regard didactique sur les stratégies cognitives et métacognitives en situation de lecture intercompréhensive ............. 241
Intercompréhension entre langues apparentées et expression théâtrale : médiations au service d’une pédagogie de la
concentration et d’un apprendre à apprendre ensemble .................................................................................................. 253
Le conte africain à la croisée des médiations interculturelles et plurilinguistiques : étude réalisée auprès des élèves de
cinquième au Cameroun ................................................................................................................................................. 269
Modelling Plurilingual Processing in Intercomprehension ............................................................................................. 279
La médiation en Intercompréhension : pédagogie entre locuteurs et entre langues et cultures ...................................... 285
TROISIÈME PARTIE L’ÉVALUATION EN INTERCOMPRÉHENSION
Interkomprehension: evaluieren, bewerten, messen ....................................................................................................... 291
Qu’est-ce que l’Intercompréhension ? Représentations des professeurs de langue en formation continue dans le cadre du
projet Galapro ................................................................................................................................................................. 305
Construire une progression pour l’Intercompréhension .................................................................................................. 323
Intercompréhension des langues dans la Caraïbe : bilan, évaluation et propositions ..................................................... 333
L'évaluation de l'Intercompréhension : problématiques, expériences et perspectives .................................................... 345
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
11
Introduction
Construire les réseaux de l’intercompréhension en ligne :
scénarios, médiations, évaluations
Sandra GARBARINO1, Christian DEGACHE2
,
1 Université Lumière Lyon 2 CRTT EA 4162
2 Université Grenoble Alpes / Universidade Federal de Minas GeraisLIDILEM
sandra.garbarino@univ-lyon2.fr, christian.degache@univ-grenoble-alpes.fr
There are these two young fish swimming along and
they happen to meet an older fish swimming the
other way, who nods at them and says “Morning,
boys. How's the water?” And the two young fish
swim on for a bit, and then eventually one of them
looks over at the other and goes “What the hell is
water?” (D. Foster Wallace, 2005)
Certes, ma famille est une famille plurilingue. Ma
femme parle espagnol, l’espagnol de Buenos Aires ;
ma fille, qui a huit ans, va à école publique du
quartier, elle parle français, le parisien d’une école
publique, populaire. Moi je parle toujours italien,
mais un italien un peu réduit, un italien basique,
pour être sûr qu’on me comprenne. La femme qui
vient faire le ménage le matin parle portugais et ne
parle rien d’autre que le portugais, langue que
personne parmi nous ne parle… (I. Calvino, février
1974, notre traduction)
Comme les poissons dont parlait D. Forster Wallace au début de son célèbre discours au
Kenyon College de 20051 que nous avons mis en exergue, nous nageons dans des eaux plurilingues,
au milieu de l’intercompréhension, mais nous n’en sommes pas conscients. Ainsi, de manière
semblable aux anciens explorateurs, nous faisons l’expérience de cette pratique lors de nos voyages
dans des pays dont nous ne « parlons » pas la langue ou dans des pays de frontière (Ronjat, 1913 ;
Capucho, 2008 ; Grin, 2008 ; Blanche-Benveniste, 2008), mais aussi dans notre vie quotidienne,
dans nos villes et villages, aujourd’hui multiculturels et multiethniques et confrontés, entre autres, à
l’arrivée de migrants. Si nous définissons la notion au sens large (Degache et Garbarino, 2017: 9-
10), nous baignons dans les eaux de l’intercompréhension, depuis toujours et à tout moment de
notre vie, mais sans savoir que ce que nous faisons porte un nom et que nous pouvons apprendre à
systématiser et mieux exploiter cette pratique.
Si nous regardons de près quelques cas de figure, nous nous surprendrons peut-être de
découvrir que l’on fait déjà de l’intercompréhension à l’école. Ici, par exemple, les élèves et les
maîtresses sont confrontés régulièrement à des enfants d’autres nationalités ou à des primo-arrivants
allophones qui, sans hésitation, pratiquent les principales stratégies d’intercompréhension de
manière tout à fait naturelle et spontanée pour se faire comprendre. Lors de ces échanges ils
utilisent ces « habiletés sémiotiques latentes que sait mobiliser, plus ou moins bien, tout sujet
parlant quand il migre d’un espace linguistique à un autre » (Tyvaert, 2008 : 274).
1 Cités par R. Da Silva et repris par E. Sanchez Albarracin dans cet ouvrage.
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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On pratique également l’intercompréhension spontanément à l’Université où, depuis plus de
trente ans (1987-2018) des millions d’étudiants de la « génération Erasmus » provenant du monde
entier, nous apportent leurs cultures, leurs savoirs et leurs différentes langues. On peut parfois aussi
utiliser l’intercompréhension en famille, à la maison. Comme le prouve la citation d’I. Calvino
placée en exergue, dans certains foyers cette modalité de communication exolingue est une pratique
habituelle et ceci non seulement aujourd’hui, dans le nouveau millénaire, époque de
« mondialisation ». La famille Calvino, une famille cosmopolite, l’employait déjà il y a quarante
ans. Dans cette interview, l’auteur italien affirme appliquer, de fait, une des stratégies que nous
enseignons aujourd’hui à nos apprenants et que F. Capucho qualifie d’« interproduction » : le
recours à une langue transparente, pour l’écrivain « une langue simplifiée et basique ». Cet idiolecte
réservé au cadre familial et très proche de la langue utilisée en situation d’intercompréhension était
sans doute une évolution de l’italiano concreto e preciso (Calvino, 1999 :153) que l’auteur prônait
dans ses essais et écrits sur la langue et qui ont fait de lui l’un des écrivains italiens les plus lus dans
le monde en traduction et en version originale.
Mais cela n’est pas tout. Cette approche nous la pratiquons également souvent dans la rue, dans
les magasins ou encore dans les transports en commun, notamment dans les grandes villes où non
seulement nos yeux sont captés par des panneaux et affiches contenant des mots en plusieurs
langues qui définissent notre paysage linguistique (Gorter, 2008). Depuis toujours, nous côtoyons
des personnes de nationalités très différentes :
[c’est] un peu une Babel mais qui correspond aussi à la Babel qui est celle qu’on entend en
allant dans le métro, ou au bar ou dans la rue. Parce que ce n’est pas qu’on entende l’argot
de Céline ou de Queneau. Désormais le prolétariat parisien est en partie espagnol, en plus
large partie portugais, et plus encore de l’Afrique du nord ou de l’Afrique noire. (I. Calvino,
février 1974)
Encore une fois I. Calvino nous surprend en décrivant un panorama social et linguistique que
nous vivons aujourd’hui dans nos villes et villages et qu’il avait, lui, observateur attentif et averti,
déjà remarqué dans la ville de Paris il y a plus de quarante ans.
Ainsi, tous les jours, sans nous apercevoir de ce que nous mettons en pratique, nous nous
exerçons à l’intercompréhension en dialoguant avec d’autres personnes à l’oral (la famille, les amis,
les gens qui nous entourent, les touristes perdus qui demandent des renseignements) ou en regardant
de films (R. Silva, dans cet ouvrage) ou des émissions télévisées : en Italie il n’est pas rare
d’écouter des dialogues entre des sportifs le plus souvent espagnols et des journalistes qui ne
traduisent plus les interviews des hispanophones (serait-ce pour des raisons économiques ?).
Mais aussi, dans notre société à forte tradition écrite (Castagne, 2007), il nous arrive de temps
en temps de pratiquer l’intercompréhension en lisant des livres, des textes spécialisés d’un domaine
qui concerne notre travail ou nos études, des journaux, des contrats, des législations ou tout
simplement les notices des produits que nous achetons. Comme l’a remarqué un étudiant d’un cours
d’intercompréhension :
J’ai déjà lu ce qui est marqué au dos des briques de jus de fruits ou de désodorisants par
exemple (c’est en général marqué en hollandais). Je lis donc chaque notice en hollandais.
(Garbarino, 2015)
Les stratégies de l’intercompréhension nous les adoptons encore, inconsciemment, et souvent,
quand nous surfons sur la toile (Escudé & Janin, 2010 : 48), notamment sur des pages web rédigées
en langues étrangères. Et là non seulement nous faisons de l’intercompréhension mais nous en
faisons de plus en plus en langues romanes. Comme le remarque Anna Queré, en reformulant les
mots de L.J. Calvet et M. Oustinoff (2016 : 19) :
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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Si l’anglais était la langue utilisée sur le Web à 90 % il y a dix ans, le taux a dégringolé à
30% aujourd’hui. [...] Le constat est sans appel : même si l’anglais reste une langue
« hypercentrale », un multilinguisme très dynamique se développe à l’heure actuelle,
langues romanes en tête. Car celles-ci bénéficient d’un précieux outil :
l’intercompréhension est possible, surtout à l’écrit.2
Et enfin, dans ce nouveau millénaire qui nous amène à rencontrer les autres et partager nos
expériences et émotions via les réseaux sociaux, dans notre vie quotidienne qui nous met tous en
relation en nous permettant non seulement de nous rencontrer physiquement mais aussi, de plus en
plus souvent, de nous connaitre et retrouver « virtuellement », grâce aux technologies de
l’information et de la communication nos « autres » à nous sont des personnes qui peuvent vivre à
côté de chez nous mais également n’importe où dans le monde. Or, ces personnes que nous
retrouvons sur Internet sont des gens dont nous sommes conscients de l’existence et pour lesquels
nous avons parfois des représentations3, mais dont nous n’appréhendons la vraie réalité qu’au
moment où nous entrons en contact « direct » avec eux. Ce contact s’établit par le biais des
technologies dites de communication et donne lieu à une activité qui implique en soi la
communication avec l’autre, et par conséquent la découverte de l’autre, de son milieu, de sa culture
et de sa langue.
Afin qu’elle soit « acceptable » (cf. Blanchet dans ce même ouvrage) et ressentie comme
positive, cette découverte de l’altérité peut être accompagnée et médiée par des enseignants-tuteurs ;
elle peut donc et parfois sans doute elle devrait être accompagnée par une démarche
pédagogique pour avoir ensuite des effets bénéfiques sur l’acceptation de ce qu’est vraiment l’autre,
de son univers, de sa langue, de sa culture.
La découverte et rencontre de ces autres qui parlent souvent une langue faisant partie de la
même famille (dans notre cas, les langues romanes), est aujourd’hui possible grâce à des
plateformes de formation à l’intercompréhension en ligne. Cette découverte « accompagnée »
pourrait amener les nouvelles générations à comprendre ce que c’est que cette « eau » dans laquelle
nous nageons tous les jours et que nous n’arrivons cependant pas tous à voir. Car la perception de
cette « eau » n’est pas impossible pour tout le monde.
Comme le vieux poisson qui rencontre les deux jeunes, les chercheurs travaillant dans le
domaine de la didactique de des approches plurielles et de l’intercompréhension savent très bien ce
que c’est que cet élément dans lequel nous vivons et ils l’affirment depuis désormais presque un
tiers de siècle, depuis les premières recherches effectuées par Louise Dabène (1991) et Claire
Blanche-Benveniste (1997). Grace à elles et aux chercheurs qui se sont formés au sein de leurs
projets et laboratoires ou qui ont croisé leurs chemins, en l’espace d’une génération,
l’intercompréhension s’est finalement installée dans le domaine de la recherche en didactique des
langues (Coste, 2011) et a trouvé ses lettres de noblesse, notamment dans le cadre des approches
plurielles (Candelier, 2008 ; Candelier et Castellotti, 2013).
Les institutions européennes sont conscientes de ce que c’est que cette « eau » à leur tour : la
compréhension réciproque des citoyens européens est au cœur de nombreuses initiatives nationales
et internationales. Ainsi, divers financements ont été accordés et le sont encore à ces fins. En
finançant les projets tels que Galatea (1996-1999) et Eurom 4 (années 1990) l’Union européenne a
permis le lancement des premières expériences d’apprentissage de la lecture et compréhension de
langues de la même famille (romane) non connues auparavant. Avec les projets Galanet (2001-
2004) et Galapro (2008-2010), elle a soutenu les formations à l’intercompréhension en langues
romanes en ligne. Avec le projet Lingalog, c’est l’Université de Lyon qui a investi dans la création
d’un site web, un wiki destiné en partie à l’intercompréhension.
2 Anna Quéré, https://www.scienceshumaines.com, 7 avril 2017
3 « A l’intérieur du cadre défini par les images qu’ont les sujets des langues en contact, du pays dans lequel on les parle et des locuteurs
qui en font usage, se construisent également des représentations des systèmes linguistiques, de leurs fonctionnements respectifs, de leurs
probables ressemblances ou différences et des relations qu’ils peuvent entretenir » (Castellotti & Moore, 2002 : 13).
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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Ces trois plateformes, pionnières en matière d’apprentissage par tâches, en interaction et en
ligne, existent depuis de nombreuses années. La première (www.galanet.eu) qui a aujourd’hui
officiellement terminé son activité après environ quinze ans de service ininterrompu a mis en
relation plus de six mille étudiants d’Universités et Lycées situés dans une vingtaine de pays
(Degache, 2017 : 183) et leur a permis d’échanger et de se connaître, en ligne, tout en se formant à
l’intercompréhension entre langues parentes. La deuxième (www.galapro.eu/sessions) a formé des
formateurs, enseignants de langues et d’autres disciplines, à la didactique de l’intercompréhension
en ligne en raison d’une à deux sessions par an, entre 2008 et 2015). La troisième
(www.lingalog.net) fournit un wiki et des forums aux enseignants de langues et propose des espaces
personnalisables où les enseignants peuvent recenser des ressources pour les langues, afficher leurs
programmes et contenus des cours, et ainsi de suite. Ayant déjà pu décrire les scénarios des
formations se déroulant sur les plateformes Galanet et Lingalog dans d’autres contextes (Garbarino
& Frontini, 2017) et le scénario et activités de Galapro ayant été présentés par d’autres collègues
(entre autres Araújo e Sá, 2010 et Araújo e Sá & Melo dans ce même ouvrage), nous nous
contenterons de les avoir passés en revue pour aboutir à leur cadet, le projet qui justifie ce recueil de
recherches : « MIRIADI Mutualisation et Innovation pour un Réseau de l’intercompréhension à
distance »4.
Avec le financement de MIRIADI (2012-2015), l’Agence exécutive pour la culture, l’éducation
et l’audiovisuel de l’Union européenne a permis au groupe de partenaires impliqués dans le projet
de créer un véritable portail évolutif pour l’intercompréhension en ligne, développé à partir de
logiciels libres. Depuis sa création, ce portail réunit le réseau des partenaires engagés dans
l’apprentissage de l’intercompréhension en ligne et contient un espace de formation, des ressources
pour les formations, deux référentiels de compétences destinés aux enseignants et toutes les
publications du réseau, y compris les rapports des activités d’insertion curriculaire de cette future
discipline. Ce projet triennal s’est également donné pour objectif de garantir la pérennisation des
formations et du réseau. Ainsi il a constitué une association, l’APICAD, qui gère la plateforme, est
investie dans des projets européens et opère pour élargir le réseau des partenaires.
Toujours dans le cadre du projet, notamment à partir de la 2e année, nous avons conçu et réalisé
ce livre, publié dans le cadre des « Travaux du CRTT » (Centre de Recherche en Terminologie et
Traduction). Celui-ci rassemble une sélection d’articles issus de communications présentées au
Colloque « IC2014. Intercompréhension en réseau : scénarios, médiations, évaluations », lui-même
un « livrable » du projet. Ainsi, par la même approche qui avait animé cet événement ayant eu lieu
en juin 2014 à l’Université Lyon 2 et qui avait pour but, entre autres, l’extension du réseau de
partenaires travaillant à l’enseignement de l’intercompréhension en ligne et la présentation des
recherches du réseau de partenaires ce recueil expose les recherches d’une partie des membres du
projet international et les met en résonance avec celles d’autres chercheurs extérieurs au partenariat
4 MIRIADI: Mutualisation et Innovation pour un Réseau de l’Intercompréhension à DIstance ; projet triennal (2012-2015) financé
par l'Agence Exécutive Education, Audiovisuel et Culture (EACEA) de l’Union Européenne, dans le cadre du Programme
Transversal KA2, Projet N°531186-LLP-1-2012-1-FR-KA2-KA2NW, http://www.miriadi.net. Ce projet européen a rassemblé une
quarantaine de partenaires :
19 dans la candidature: Université Lumière Lyon 2 (coordinatrice), France ; Universidade de Aveiro, Portugal, Universitat Autònoma
de Barcelona, Espagne ; Università di Cassino e del Lazio meridionale, Italie ; Justus Liebig Universität Gießen, Allemagne ;
Université Grenoble Alpes, France ; Université Al.I.Cuza, Iasi, Roumanie ; Università degli Studi di Macerata, Italie; Universidad
Complutense de Madrid, Espagne ; Université de Mons, Belgique ; Universidad de Salamanca, Espagne ; Università del Salento,
Italie ; Université de Strasbourg, France ; UNED (Universidad Nacional de Educación a Distancia), Espagne ; Università Ca’ Foscari
Venezia, Italie; Lycée Benjamin Franklin, Auray, France; Liceo Linguistico di Stato “Giovanni Falcone”, Bergame, Italie;
Association Mondes Parallèles, Marseille, France ; Le Groupement d’Écoles Martinho Árias Soure, Portugal.
18 associés: Projet Innovalangues, Grenoble ; Università di Corsica; Association Res Libera; Instituto Superior Curuzu Cuatiá,
Argentine ; Association ACYAC BPR, Argentine ; Universitat de Barcelona ; Universidade de Brasília, Brésil ; Universidade de
São Paulo, Brésil ; Universidad Playa Ancha, Chili ; Universidade Federal do Paraná ; University of Mauritius ; Instituto de
Educación Secundaria (Hellin) ; Universidad Nacional de Córdoba, Argentine ; Universidad Estadual de Campinas, Brésil ;
Universidad Ricardo Palma, Pérou ; Fatec de São Paulo ; Universidad Nacional de Rio Cuarto, Argentine ; Universidade Federal do
Rio Grande do Norte, Brésil.
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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mais travaillant sur des thématiques afférentes à l’intercompréhension en réseau.
Pour les partenaires du projet MIRIADI, l’« intercompréhension en réseau » est conçue comme
une pratique de communication et/ou d’apprentissage qui implique :
- l’utilisation voulue et globalement concertée d’au moins deux langues sinon davantage - ces
langues pouvant tout aussi bien appartenir à la même famille linguistique (forme
d’intercompréhension inhérente) ou non (forme d’intercompréhension acquise);
- une phase d’interaction en ligne sur Internet, cette phase pouvant tout aussi bien être incluse
dans un scénario ou ultérieure à une formation scénarisée y préparant.
L’ensemble des travaux réunis dans le présent volume souhaite illustrer comment les concepts
décrits ci-dessus ont été élabos et mis en pratique par les membres du projet Miriadi et par les
chercheurs ne faisant pas partie du projet. Le résultat de ce travail est un dialogue cohérent et
articulé qui prend en compte trois dimensions fondamentales de la formation à
l’intercompréhension : la dimension des scénarios, celle de la médiation et celle de l’évaluation.
La notion de scénario, avec sa dimension nécessairement chronologique, est de première
importance dans la formation à l’intercompréhension en réseau : scénario de communication,
scénario d’assistance ou d’encadrement tutoral, scénario de réalisation de la tâche, scénario de
collaboration... On a désormais coutume de retrouver cette notion associée à un grand nombre de
termes sans être bien certain qu’elle recouvre toujours la même acception. Les articles présentés
dans cette section s’emploient à en clarifier la définition avant de livrer leurs analyses autour des
effets des scénarios concernés.
La notion de médiation, plus souvent associée aux domaines de la traduction et de
l’interprétation - deux moyens de médiation par excellence -, est assez négligée dans le contexte de
l’intercompréhension. Ici le terme est exprimé avec un “s” parce que cette notion peut prendre
plusieurs formes et être observée sous des angles complémentaires, comme en témoignent les textes
réunis sous cette section.
L’évaluation en intercompréhension est un objet d’étude qui demande de plus en plus
d’attention. Les différents travaux présentés permettent d’une part de réfléchir sur les modes
d’évaluation en intercompréhension (évaluation des acquis, de la participation, des besoins, des
retombées, etc.) et sur les acteurs de cette évaluation (enseignant, pairs ou apprenant lui-même) et
d’autre part de présenter des outils de référence permettant une évaluation de qualité des formations
à l’intercompréhension, plus en phase avec cette approche que le Cadre européen commun de
référence pour les langues (CECRL), comme le Cadre de référence pour les approches plurielles
(CARAP) et tout autre référentiel de l’apprentissage de l’intercompréhension à distance.
Pour ouvrir notre réflexion sur les réseaux de l’intercompréhension il nous a paru important de
sortir du milieu des didacticiens et de demander à un sociolinguiste de porter son regard sur ce sujet.
Ceci afin de « réexaminer la notion d’intercompréhension, d’expliciter les apports théoriques de
cette notion, ainsi que de compléter ses fondements et ses enjeux » à travers une approche
pluridisciplinaire croisant l’intercompréhension et la sociolinguistique. Ainsi, en partant d’une
redéfinition du concept de langue et de frontières linguistiques, et en le rapportant à celui
d’intercompréhension (d’habitude utilisée par les linguistes pour établir les limites entre les
langues), Philippe Blanchet interroge les définitions traditionnelles pour nous expliquer à quel
point les langues sont des inventions intellectuelles, socio-politiques, créées pour produire des
identités nationales et un sentiment d’appartenance à des États. Il passe ensuite à observer ce qui
facilite l’intercompréhension et recense d’une part le rôle vital de la pluralité linguistique
« interne » aux langues (qui dessine une sorte de continuum entre plusieurs langues), et d’autre part
l’importance du contexte social et culturel partagé (qui constitue la base de l’intercompréhension).
En conclusion de son texte, le chercheur nous livre un concept fondamental, celui d’acceptabilité.
Par ce terme Ph. Blanchet nous éclaire sur l’importance de l’acceptation de l’altérité de la part
de chacun : seulement si nos représentations de l’autre sont ouvertes nous pourrons le comprendre.
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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Il en découle l’importance de l’éducation aux langues et par les langues pour permettre de faire
tomber les frontières entre les langues, certes, mais d’abord entre les gens.
Les frontières géographiques tombent déjà dans la première partie de cet ouvrage, consacrée
aux scénarios de l’intercompréhension, qui réunit l’expérience d’enseignantes et enseignants
travaillant dans des contextes différents, mais surtout dans des pays et continents différents. Ainsi,
de l’Europe où nous avons souvent tendance à arrêter notre regard eurocentrique, nous nous
déplaçons au Mexique, en Arabie Saoudite, au Brésil, aux États-Unis pour observer, entre autres,
que, si les scénarios changent, le projet politique qui sous-tend la diffusion de l’intercompréhension
est souvent le même : la préservation de la diversité dans l’unité.
Le point de départ de nos réflexions sur les scénarios de l’intercompréhension est l’étude de
Christian Degache qui nous permet de porter notre regard sur deux pays impliqués dans la session
de formation de formateurs Galapro « França-Brasil » de 2013, la France et le Brésil. Avant
d’observer cette expérience de formation, C. Degache nous plonge au cœur du projet Miriadi en
abordant les « scénarios télécollaboratifs en intercompréhension » (STIC). Ce travail – qui a eu pour
but de contribuer à la mise au point d’un générateur de sessions polymorphe actualisable et
modulable, noyau de la création des sessions d’intercompréhension en ligne décrit les spécificités
de ces scénarios et leurs fondements conceptuels et présente un tour d’horizon des scénarios utilisés
dans la pratique de l’intercompréhension interactive en contexte didactique. La session franco-
brésilienne est ensuite l’occasion de mener une analyse qui permet de mettre en discussion la
structure du scénario et de la session elle-même. Ainsi, après avoir dégagé les aspects positifs, les
résistances et les difficultés rencontrées par les participants, C. Degache livre une série de
recommandations fondamentales pour la réussite d’une session. Parmi celles-ci, mieux définir les
aspects temporels (pour que le travail ne devienne pas chronophage), la supervision des tuteurs, les
attentes et obligations des formés, la composition des GT, l’articulation entre le scénario et les
ressources et, finalement, veiller à la variété des langues dans chaque groupe de travail.
À cette série de remarques issues de l’observation et de la pratique de l’intercompréhension en
ligne, fondamentales pour le développement des nouveaux scénarios Miriadi, fait écho le travail de
recherche de Claudine Franchon qui analyse la construction d’un scénario pour un public
enseignant formé à l’intercompréhension et par l’intercompréhension selon le principe de la
« double focalisation plurilingue » (Araújo e Sá & Melo Pfeifer, 2010 : 9). Cette recherche qui
souligne entre autres comment l’intercompréhension permet d’acquérir de nouveaux « droits de
l’homme-usager-des-langues » (le droit à l’approximation, aux compétences partielles, à l’erreur et
autres) nous amène au cœur de la structure de la plateforme Galapro à la découverte de ses outils,
ressources et parcours d’apprentissage (phases, objectifs, activités, produits). Par son travail de
définition et de caractérisation du scénario C. Franchon montre comment les membres de son
groupe interagissent en réalisant leur travail collaboratif et en même temps comment ces formés ont
intériorisé la notion de travail collaboratif en l’appliquant au scénario qu’ils ont eux-mêmes créé en
tant que produit de leur formation. Ainsi, en s’appuyant sur les définitions des rôles de Georges
(2003), elle découvre que le groupe étudié possède, comme dans la réalité quotidienne, un
animateur, des vérificateurs et un quêteur. Concernant la réalisation de la tâche produite par son
groupe (GT6 : scénario pour élèves), elle conclut que les activités, les outils, les ressources,
l’organisation et toutes les options concernant le scénario de formation conçu visent bien à soutenir
et stimuler le travail télécollaboratif ainsi que la présence de plusieurs langues apparentées.
La dimension plurilingue suscitée par la télécollaboration est également mise en valeur dans un
autre scénario en ligne, dessiné par Delphine Chazot qui rapporte les débuts de son expérience de
recherche doctorale finalisée à la création d’un scénario pédagogique ludique basé sur un jeu de
détectives. Ce type de scénario n’ayant jamais existé, elle se positionne tout d’abord vis-à-vis du jeu
sérieux et observe les caractéristiques de la dimension ludique et les avantages de son intégration
dans un contexte de formation. Elle présente ensuite les séquences préconisées pour le déroulement
de la formation-jeu, les outils qu’elle envisage pour le déroulement du scénario (entre autres
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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Facebook) et la méthodologie d’analyse des deux premiers tests à effectuer. Parmi les retombées de
cette formation, elle formule l’hypothèse d’une attitude positive, due à l’aspect ludique, et
vraisemblablement la pratique de l’alternance codique pour ce qui concerne la dimension
linguistique.
Barbara Spinelli nous amène aux États-Unis, un pays où peu d’études existent encore sur la
pratique de l’intercompréhension. Par sa recherche de terrain elle nous montre les impacts d’un
cours hybride plurilingue à l’intérieur d’une classe multilingue. Tout en partant du principe que,
grâce à l’informatique, la compétence de communication embrasse de plus en plus de ‘canaux’ et de
codes et que l’apprenant doit gérer une quantité d’informations de plus en plus ample, elle nous
conduit à réfléchir sur les pratiques pédagogiques qui se sont développées dans ce pays à partir des
années 1990 : multiliteracies pedagogy, multilingual literacies, pluriliteracies practices. À la
lumière de ces changements qui, d’une certaine manière, font ressortir les ressemblances entre le
vieux et le nouveau continent deux mondes qui pour des raisons différentes se voient confrontés
au plurilinguisme elle suggère que les départements de langues doivent se restructurer et revoir
leurs offres de formation en prenant en compte le plurilinguisme, la réflexion transculturelle et la
capacité à co-agir en langue(s) étrangère(s). Et cela tout en proposant de nouvelles formes et
stratégies d’apprentissage (Garcia, 2009) à des apprenants qui sont eux-mêmes plus autonomes au
niveau de l’accès aux informations mais qui manquent parfois d’instruments. Ainsi, dans son
expérience, conduite dans le cadre d’un cours intensif hybride d’italien niveau A2+ pour des
étudiants connaissant au départ au moins une autre langue romane, elle nous permet de voir, par le
protocole think aloud appliqué à l’écrit (wiki), comment ses apprenants ‘rentrent’ dans la
compréhension d’un texte : en se référant souvent les uns aux stratégies utilisées par les autres, en
réfléchissant parallèlement à leur propre potentiel au niveau de la lecture et en construisant ainsi un
espace de co-apprentissage. Un espace où plusieurs langues-ponts coexistent et aident à
l’apprentissage de l’italien ; un espace dans lequel l’enseignant est un scaffolder et les apprenants
sont des co-constructeurs de connaissances, des créateurs de significations qui partagent les uns
avec les autres leurs propres compétences linguistiques dans un contexte d’apprentissage stimulant
et dynamique et qui prend en compte chaque individu.
Nous demeurons dans un pays où l’intercompréhension commence à faire ses premiers pas
grâce au témoignage de Ilham Dupont et Omar Colombo qui relatent une expérience exploratoire
en didactique de l’intercompréhension dans le monde arabe, à l’Université Paris-Sorbonne Abou
Dhabi. Dans ce territoire qui, comme ils nous l’expliquent, accueille d’innombrables immigrés et où
se côtoient l’arabe littéraire (écrit) et les divers arabes dialectaux (oraux), ils ont proposé deux
modules semestriels dont un consacré à l’intercompréhension. Leur article expose cette expérience
de recherche-action dans laquelle il se sont focalisés d’abord sur l’arabe, en partant des dialectes
arabes à l’écrit (en se heurtant au problème des sources écrites en langue dialectale), pour passer
ensuite à l’oral (essayant de démolir les aprioris des étudiants) et pour arriver enfin à
l’intercompréhension entre l’arabe et l’hébreu. Ici, ce qui ressort, c’est l’étonnement des apprenants
vis-à-vis des ressemblances entre les deux langues sémitiques. Ensuite ils ont travaillé sur les
langues romanes, à travers des activités en présentiel (lecto-compréhension par des activités type
Eurom5) et à distance (interaction en intercompréhension sur la plateforme Galanet). Cette
expérience montre que : 1) les étudiants arabophones sans langue romane de référence ressentent
une plus grande sensation d’appréhension et ont, par conséquent, beaucoup plus de difficultés de
compréhension, notamment à l’oral ; 2) les interférences, positives et négatives, sont également
bénéfiques au niveau de l’apprentissage ; 3) l’activité en ligne, effectuée en autonomie totale, a vite
découragé les apprenants qui ont fini par ne pas effectuer les tâches prévues pour la participation à
la session Galanet. Il y a là une leçon à en tirer pour les futures sessions d’apprentissage en ligne.
Tout en abandonnant la dimension connectée, mais en demeurant dans le cadre des médias,
Regina Da Silva nous propose une réflexion sur les liens entre intercompréhension et
interculturalité qui prend appui sur le potentiel du cinéma. Elle nous fait tout d’abord réfléchir sur
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
18
les questions économiques qui sous-tendent le « marché académique » (Ordine, 2013) et
transforment l’éducation en « éducation bancaire » (Freire, 1987) et nous met ensuite en garde
contre tout discours idéologique : seul l’art nous permet de nous apercevoir de ces « eaux » (Foster
Wallace, 2009) interculturelles dans lesquelles nous nageons et qu’on essaye de nous faire oublier,
sous prétexte de gommer les différences entre les hommes. Ensuite, afin de vérifier son hypothèse
qu’il est possible de partir de l’interculturalité pour aller vers la langue mais que partir de la langue
pour arriver aux aspects interculturels est beaucoup plus complexe, R. da Silva analyse trois
manuels d’intercompréhension (Eurom 5, Interlat et Inter-Rom). Elle remarque que ceux-ci donnent
une vision monolithique et homogène des langues qui n’existe pas dans la réalité en oblitérant ainsi
les liens intimes qui existent entre les langues et les cultures. Finalement, pour s’approcher de
l’autre de manière interculturelle et sans l’intermédiaire des discours idéologiques, elle propose
d’apprendre l’altérité par un scénario ayant pour support le cinéma, une fenêtre ouverte montrant
une partie du monde et transmettant des valeurs intraduisibles (Pasolini, 1975). Dans ce média
réside, elle en atteste, un antidote contre toute idéologie prétendant affirmer des universalités,
correspondances et symétries constantes.
Les moyens de communication sont au cœur d’une autre recherche, celle de Caroline Venaille,
qui relate une expérience basée sur la presse ayant eu lieu en Italie et s’éloignant légèrement des
précédentes par le fait qu’elle propose un scénario d’intercompréhension professionnelle. Le
scénario didactique présenté a eu pour but la réalisation d’un atelier de lecture de la presse sur le
web dont la tâche finale était l’écriture d’un article multilingue sur le web par des apprentis
journalistes italiens. Ce travail, qui a conduit chaque étudiant « à devenir un chercheur plurilingue
d’informations », permet à C. Venaille de montrer que les formés découvrent avec étonnement la
facilité avec laquelle ils accèdent aux informations dans d’autres langues qu’ils ne voient presque
plus sous l’angle grammatical mais tout simplement en tant que véhicules d’informations et qu’ils
changent d’attitude au cours de la formation : si au départ ils se focalisaient sur les différences entre
les langues, ensuite ils se concentrent sur les ressemblances. Le mérite et l’intérêt de cette recherche
résident dans le fait qu’elle permet de montrer l’efficacité d’une formation à la recherche et à la
lecture multilingue (et interculturelle) sur Internet. Cette formation devrait, selon nous, être
proposée à tous les étudiants européens, en particulier à tous les futurs acteurs de la communication,
des échanges commerciaux, des relations internationales et aux enseignants de toute discipline.
Dans cette perspective, il faudrait redessiner des scénarios cohérents, flexibles, adaptables et
efficaces pour répondre aux changements au niveau des compétences à développer, des objectifs à
atteindre et des stratégies d’apprentissage pour les nouveaux publics professionnels (en contexte
institutionnel ou de travail).
Tel est l’objectif de la réflexion de Filomena Capucho qui nous accompagne à la découverte
d’Intermar, un projet axé sur l’intercompréhension, destiné aux professionnels de la marine militaire
et marchande et qui a rassemblé 8 pays (PT, ES, FR, BE, RO, FI, LT, LV). Ce projet a eu pour but
de donner aux professionnels de la mer, habitués à communiquer en anglais, les instruments pour
des échanges efficaces prenant en compte la plus-value du plurilinguisme. Ainsi, en marchant coude
à coude avec l’anglais dans une formation de 60h à visée actionnelle, les langues romanes, les
langues baltes et le russe ont pu trouver une place pour affirmer leur utilité dans le dialogue
interculturel, pour une communication plus efficace et pour l’établissement de bonnes relations
humaines. Restent quelques questionnements qui ouvrent de nouvelles perspectives de recherche :
comment évaluer sans des référentiels spécifiques à l’intercompréhension ? Comment développer
une plateforme efficace pour le contexte naval où l’accès à internet est très surveillé ? Comment
créer des possibilités réelles d’interaction entre les sujets de la formation, localisés dans différents
pays ? Comment former les enseignants locaux à l’approche axée sur l’intercompréhension afin de
multiplier les formations ? Ce sont là des questions qui prouvent que l’intérêt de cet article, bref
mais intense, ne réside pas seulement dans ce qu’il démontre mais également dans les interrogations
qu’il soulève.
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
19
En conclusion de la première partie de ce volume, Enrique Sanchez Albarracin nous permet
de tracer un premier bilan de l’évolution des scénarios de l’intercompréhension, à travers une
synthèse du travail du groupe de partenaires internationaux réunis autour du projet Miriadi et des
chercheurs extérieurs à ce réseau présents au colloque IC2014. Son regard de « grand témoin »
permet de saisir les grands enjeux de ce début de millénaire pendant lequel nous assistons à « une
révolution épistémique majeure » qui est en train de modifier profondément la nature, les conditions
et les finalités des apprentissages et de la recherche scientifique. De cela viendrait justement la
nécessité de trouver de « nouveaux scénarios » capables de « nous orienter sans nous contraindre,
afin de nous permettre réellement d’interagir, de collaborer ou de coopérer » dans une perspective
pédagogique et professionnelle axée sur l’intercompréhension, le plus souvent en ligne. Ces
scénarios, présentés par les différents chercheurs, se développent en modalités différentes (hybride,
en ligne, présentielle), ont des publics différents (universitaire, professionnel, associatif), s’appuient
sur des ressources différentes (des manuels, la presse, le cinéma, la poésie, la chanson, les
interactions entre pairs) et ont des objectifs variés (la formation linguistique ou aux approches
intercompréhensives, la sensibilisation au plurilinguisme et/ou à l’interculturel). Cependant, ils se
basent le plus souvent sur un apprentissage actionnel, par tâches, qui lie compétence et interaction
dans une approche à la fois « interactionniste et socioconstructiviste » (Séré & Alonso, 2015) et
permettent « de réduire les dangers de l’ethnocentrisme ou de l’eurocentrisme », tout en facilitant
les « rapprochements culturels » (Chazot ; Dupont & Colombo ; Spinelli ; Venaille dans cet
ouvrage). Les suggestions livrées par Enrique Sanchez Albarracin à la fin de sa synthèse sont
contenues en cinq verbes : « conserver, améliorer, évoluer, étendre, collaborer ». Il incite à
conserver les acquis de l’expérience des acteurs de l’intercompréhension, tout en améliorant la
formation des formateurs, la connaissance des enjeux, des contextes et des ressources et en faisant
évoluer les plateformes par des adaptations aux évolutions du temps. Tout cela dans la finalité
d’étendre cette approche à d’autres familles de langues et d’élargir la collaboration interne et
externe au réseau, dans une démarche qu’il qualifie d’énactive (Masciotra, 2008).
La deuxième partie de cet ouvrage est consacrée aux médiations que nous observons depuis
plusieurs points de vue. Au début de cette partie, Paola Leone attire notre attention sur une
première expérience de télétandem en intercompréhension. Après avoir introduit les principes du
télétandem plus habituel, qu’elle définit comme « à monolinguisme alterné », elle démontre que
dans cette forme de dialogue endolingue les locuteurs ont tendance à se concentrer sur le message
quand ils ont un niveau de compétences élevé (B2-C1) et qu’à l’opposé il se questionnent sur la
forme quand le niveau de langue est inférieur (A2-B1). Toutefois, si dans le dialogue monolingue
alterné le locuteur natif expert dans la langue de l’autre peut prévoir les difficultés rencontrées par
son interlocuteur, dans le télétandem en IC les difficultés ne peuvent pas être anticipées (car les
deux participants ne connaissent généralement pas suffisamment la langue de l’autre). Ainsi, dans
ce dialogue oral où les problèmes de compréhension sont liés à des concepts et non pas à des mots
et où on peut avoir recours au tchat quand l’oral pose problème on assiste à une vraie co-
construction de sens : les interlocuteurs mettent d’abord en lumière ce qui est clair et ensuite ce qui
ne l’est pas, en collaborant pour résoudre les problèmes de communication. En conclusion de sa
recherche P. Leone formule des recommandations pour la réussite du télétandem en IC : des
discussions plutôt brèves (30 minutes au lieu d’une heure), l’accompagnement des étudiants dans la
recherche des sujets de discussions (semi-dirigés), l’appui de matériaux visuels pour accompagner
la conversation et une préparation théorique de didactique de l’IC.
La question de l’oral, abordée par P. Leone dans son article sur l’intercompréhension en face-à-
face en ligne (Develotte & Cosnier, 2011), est également au cœur de la recherche de Vanessa
Piccoli qui nous amène vers l’interaction en IC orale en présence dans le cadre de conversations
spontanées. Sa contribution a pour objet l’analyse d’échanges ayant eu lieu lors d’une rencontre de
pratique de l’IC (en situation semi-contrôlée) et met en lumière les stratégies spontanées utilisées
par les locuteurs en cas de problèmes lexicaux. Parmi celles-ci, les auto-reformulations, le recours à
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
20
un débit assez lent et à une articulation claire, ainsi que l’engagement dans des séquences de
négociation collaborative des signifiés, ce qui atteste que les participants manifestent leur volonté
de co-construction du sens et de résolution collaborative des problèmes (Capucho, 2012 ; Araujo e
Sa & Melo, 2003). En particulier la stratégie sur laquelle se fonde l’analyse est celle de la
reformulation dans une troisième langue (RTL) utilisée comme stratégie de repair lors d’une
conversation en IC en trois langues différentes. Le résultat de l’étude nous confirme que l’échange
en IC montre un fort degré d’engagement de la part des interlocuteurs dans l’activité en cours, un
esprit collaboratif et une grande conscience métalinguistique. À la lumière du succès de cette
approche et de ses effets positifs sur la motivation et la compréhension, V. Piccoli suggère qu’après
avoir si bien travaillé sur les stratégies de compréhension, il faudrait aujourd’hui travailler sur les
stratégies d’inter-production (Capucho, 2013), les identifier, les systématiser et les apprendre,
comme on a systématisé celles d’inter-compréhension.
Nous passons de l’intercompréhension à l’oral à la psychotypologie des apprenants avec
l’article de Jelena Gridina qui nous illustre, par une recherche de terrain qui s’est déroulée en
2014, comment la perception psychotypologique d’un groupe d’étudiants universitaires de Lettonie,
qui apprennent deux langues romanes en parallèle dès le niveau débutant, est sujette à évolution au
fil du parcours académique. Cette recherche, qui a le mérite de nous faire réfléchir sur la relativité
des concepts de transparence et d’opacité, nous repropose une définition de l’intercompréhension de
P. Balboni, importante pour comprendre comment l’apprentissage linguistique bénéficierait de la
recherche de régularités entre les langues (Balboni, 2004) plus que de formules apprises par cœur.
La formation, qui a visé, en plus de la sensibilisation à la transparence, l’utilisation des similitudes
et de la complémentarité interlinguistique en tant qu’outils d’acquisition lexicale, a permis de
remarquer que, dans un contexte non romanophone, l’approche plurielle facilite l’acquisition de
stratégies inférentielles et développe la créativité des étudiants, ce qui se traduit en une découverte
et utilisation positive des ressources linguistiques du répertoire langagier des formés.
Avec Deliana Vasiliu nous abordons la problématique des médiations en intercompréhension
lors de l’enseignement/apprentissage des langues dans le cadre des formations de français des
affaires en Roumanie. Elle travaille avec des étudiants roumains ayant l’anglais comme langue
d’enseignement disciplinaire (EMILE) et étant, comme beaucoup d’homologues, ‘réfractaires’ à
l’apprentissage d’autres langues. Afin de stimuler un apprentissage linguistique différencié,
D. Vasiliu propose l’idée d’un ‘SMIC linguistiqueprévoyant l’apprentissage conjoint de la langue
maternelle, de l’anglais, d’une L2 et de la compétence de lecture plurilingue. Plus concrètement, par
le biais d’un cours de renfort d’intercompréhension, qu’elle a proposé à quinze de ses étudiants, elle
a pu utiliser l’anglais comme langue pont vers d’autres langues romanes, notamment vers le
français ; elle a pu ainsi expérimenter les bénéfices de la réflexion métalinguistique et a pu
remarquer que cette activité a représenté un support fondamental pour les plus faibles, les « Nuls »
en langues. Par les cours proposés, ces derniers ont pu expérimenter un déblocage psychologique
qui a été à l’origine d’une activation de leur motivation. Suite à cette expérience, elle propose les
activités d’intercompréhension comme activités de médiation à mettre en place en classe de langue,
en les associant aux principes de l’évaluation formative (Perrenoud, 1998), pour un changement
d’attitude et pour encourager l’apprenant à l’auto-évaluation, à l’autonomie et à la prise de
conscience de son propre apprentissage. Deux mesures resteraient à prendre, selon cette
chercheuse : la formation des formateurs en langues au plurilinguisme et multiculturalisme et la
sensibilisation des enseignants des disciplines à la perspective intercompréhensive.
Professeur agrégé d’anglais, Frédérique Freund conduit une étude de cas en soumettant un
texte en occitan languedocien à une lectrice experte en langues mais ne connaissant pas celle-ci.
L’intérêt de cette recherche, qui nous permet de parcourir toutes les étapes de la lecture par un
recueil de données inspiré de Malheiros Poulet et al. (1994), réside dans l’individuation des
stratégies cognitives et métacognitives mises en pratique par la lectrice qui, sans avoir été formé à
l’intercompréhension, applique spontanément les stratégies de transfert inter- et intra-linguistique,
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
21
d’inférence, de déduction et d’induction. Du point de vue des stratégies métacognitives, cette étude
montre que la lectrice sait adapter sa performance à la tâche, en utilisant l’autorégulation, qu’elle
sait apprécier sa compréhension (autoévaluation), qu’elle a une idée personnelle de la distance entre
sa langue et celle qu’elle découvre (psychotypologie). Or, l’aspect le plus intéressant est que cette
recherche montre la capacité de la lectrice, enseignante d’anglais, et donc sans doute habituée à une
approche basée sur la traduction et la recherche du sens précis du texte, qui est en mesure de « faire
le deuil » de la compréhension précise du texte, se contentant d’une compréhension globale, et pour
qui, cette tâche - que certains pourraient trouver non aboutie -, réveille sa motivation et lui confère
un sentiment de réussite. En conclusion, nous pourrions affirmer avec F. Freund que, pour entraîner
les apprenants à l’approche plurilingue et plus généralement à « apprendre à apprendre » une
langue, il faut d’abord former à une prise de conscience de la proximité entre les langues et ensuite
il faut encourager l’apprenant à développer ses propres stratégies d’intercompréhension, en lui
apprenant, entre autres, à verbaliser les opérations réalisées au moment de la lecture en une langue
non connue pour qu’il puisse choisir les stratégies les plus adaptées à son style et à ses besoins
d’apprenant.
Dans un contexte mondial où priment l’infobésité, l’isolement et le décrochage scolaire, Marie-
Noëlle Antoine nous livre des conseils précieux pour nous diriger vers l’infoessentialité, vers « une
pédagogie de la concentration » et de « l’apprendre ensemble ». Avec elle, nous explorons le terrain
de l’expression théâtrale, une zone où le co-agir et le co-apprendre typiques de cet art rencontrent la
perspective co-actionnelle et co-culturelle de l’intercompréhension pour donner des fruits au niveau
éducatif et linguistico-culturel. L’atelier théâtral en intercompréhension qu’elle a proposé à des
enfants de l’Institut Français du Chili, basé sur une unité didactique d’Itinéraires Romans, a permis
d’une part, de sensibiliser à la transparence et à l’opacité lexicale entre trois langues romanes
(espagnol, portugais et français) et d’autre part, de donner « une force au conte présenté en ligne »,
par la mise en scène de l’histoire. Une mise en scène qui a finalement eu lieu dans toutes les
langues, y compris le catalan, l’italien et le roumain, car la curiosité envers les autres langues n’a
pas tardé à se présenter et a permis ensuite de jouer physiquement et vocalement avec les
expressions apprises, dans une atmosphère ludique, créative et solidaire.
Nous passons de l’Amérique Latine à l’Afrique avec Léonie Toua qui nous amène au
Cameroun pour découvrir les langues beti-fang et le conte de source orale, un « espace social
composite » qui permet aux élèves d’acquérir des compétences de compréhension orale dans des
langues proches et qui peut contribuer à la construction d’une identité plurielle. Dans son article,
qui relate une recherche-action, elle illustre son expérience d’insertion de l’intercompréhension
dans une classe de cinquième. Elle structure l’activité en 4 étapes dont la première est la prise de
conscience du plurilinguisme de chacun. Cette première étape est suivie de l’écoute d’un conte par
un groupe d’élèves qui, par la suite, doivent le raconter aux collègues qui ne l’ont pas entendu, en
devenant eux-mêmes conteurs. Cette phase permet la discussion des uns avec les autres pour mieux
comprendre l’histoire et est, de fait, à l’origine d’une médiation qui est l’espace de l’inter-
compréhension mais aussi de l’inter-culturel et active ces « compétences transversales » qui
peuvent « contribuer à la construction du répertoire pluriel ».
En conclusion de la partie sur les médiations, Franz-Joseph Meissner nous offre une étude
proposant la modélisation du traitement de la langue en intercompréhension. Basée sur les
observations menées sur le Corpus de données d’intercompréhension romane de Giessen, cette
recherche nous permet de porter notre regard sur le fonctionnement de l’ainsi nommée « grammaire
plurilingue hypothétique ». En partant du principe que l’intercompréhension est un exemple très
spécifique de traitement de la langue qui permet l’interaction de la langue maternelle, de plusieurs
autres langues, de même que des expériences d’apprentissage et de communication interculturelle,
F.J. Meissner remarque que ce n’est qu’avec le CERCL et encore plus avec le CARAP qu’on a mis
en valeur le potentiel dégagé par l’interaction entre les micro-compétences, les ‘ressources’
personnelles telles que les savoirs, savoir-faire et savoir-être, et ces compétences si peu représentées
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
22
dans l’apprentissage traditionnel telles que la résilience. La richesse de cet article réside dans sa
modélisation des processus mis en pratique au moment de l’activité d’intercompréhension qui sont
au moins quatre pour ce chercheur : 1) l’identification des caractéristiques de la langue cible sur la
base des langues connues (transfert ou pont) ; 2) la vérification de la vraisemblance des formes et
contenus décodés de la langue cible ; 3) la vérification de la vraisemblance des schémas de la
langue source (ex. correspondances grammaticales) ; et finalement 4) le monitorage des activités
métacognitives (learning awareness, self sensitivity, efficiency, etc.). Les lecteurs sauront
également apprécier la typologie des activités de transfert qui conclut l’article en classant 5 types de
transfert : intralinguistiques (par rapport à la langue maternelle, aux langues pont et à la langue
cible), interlinguistique (recherche de parallélismes positifs ou négatifs) et enfin le transfert
didactique qui correspond à la compétence d’apprentissage linguistique.
Le bilan des communications du colloque IC2014 ayant pour thème les médiations est effectué
par Filomena Capucho qui, en tant que « grand témoin », classe les recherches en 3 sections :
médiations pédagogiques, entre locuteurs et entre langues et cultures. Pour le premier axe elle
remarque que les communications ont mis en évidence l’importance éducative de
l’intercompréhension (respect des diversités), son utilité pour le développement de l’autonomie de
la concentration, des stratégies de lecture et enfin pour la formation des enseignants de langues.
Pour le deuxième elle remarque la nécessité d’un terme unique, pour lequel elle propose le mot
‘intercomunicazione’, pour réunir ce que les différents chercheurs ont appelé intercompréhension
orale ou in praesentia, interproduction ou encore interaction plurilingue. Comme c’est habituel pour
la terminologie, l’usage nous dira quel mot s’imposera sur les autres pour définir cette activité qui
devient de plus en plus populaire. Pour le troisième axe, enfin, elle souligne que les médiations
entre langues et cultures se sont déclinées en médiations lexicales (formes transparentes vs
opaques ; stratégies compensatoires pour problèmes lexicaux), médiations didactiques et
interlinguistiques (valeur humaniste et défi professionnel, préparation à l’apprentissage d’une
langue éloignée, notamment le roumain) et sociales (dialogue entre langues et cultures pour la
transformation de la société et l’anéantissement des inégalités économiques et sociales).
Finalement, la pluralité de la notion d’intercompréhension, se nourrissant des perspectives les plus
diverses, est ce qui ressort de cette partie sur les médiations.
La troisième partie de ce volume est consacrée aux évaluations qui sont ici considérées à partir
de plusieurs perspectives : en amont de la formation, pour établir des niveaux à partir d’un critère et
une progression de l’apprentissage ; tout au long du processus d’apprentissage pour définir et
réorienter les objectifs d’une formation et les possibilités d’évaluation en conclusion de celle-ci ; en
aval en établissant des statistiques des résultats et en classant par catégories ; en dehors de la
formation, comme évaluation d’une formation de formateurs.
Plongé au cœur de la démarche d’évaluation de la progression des apprenants, le travail de
Christina Reissner vise à discuter des possibilités et des objectifs de l´évaluation dans le cadre de
l´enseignement-apprentissage des langues étrangères basé sur l´intercompréhension. Les questions
posées par la chercheuse concernent surtout la mesurabilité du degré d’intercompréhension, le rôle
des compétences et la manière d’évaluer la progression de l’apprentissage dans le cadre de cette
approche qui mobilise des compétences partielles mais aussi multidimensionnelles. Ceci car
l’identification de méthodes d’évaluation est un pas vers l’insertion de l’intercompréhension dans le
système éducatif. Dans son université (Saarland), elle mène une recherche de terrain visant à établir si
ajoutée au porfolio des étudiants et aux test linguistiques, la lecture-réflexion à haute voix, qu’elle
définit « procès-verbal à haute voix », peut être un instrument d’évaluation. Elle observe 12
protocoles linguistiques rédigés en 2013 dans le cadre d’un séminaire sur l’intercompréhension. Les
étudiants, de français ou d’espagnol, entre 19 et 25 ans, après une formation de 25 heures, devaient
rédiger leur biographie langagière et enregistrer la description des opérations mises en pratique au
moment de la lecture-compréhension de trois textes dans le but de mettre en lumière leurs acquisitions
du point de vue du savoir, savoir-être et savoir-faire. En observant les registres des apprenants,
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
23
l’auteur remarque que, bien que les indications aient été les mêmes, les procédures et activités
effectuées au moment du décryptage du texte sont différentes. Cependant, en reparcourant leurs
activités, les apprenants peuvent tirer des conclusions intéressantes sur leur propre apprentissage et
développer des stratégies de « cross-language » que toute autre approche traditionnelle ne permet pas.
En conclusion, selon C. Reissner, si le CARAP est un instrument précieux, il demeure trop complexe
pour l’utiliser dans sa totalité et il faudrait une version plus « lisible » pour une utilisation quotidienne
par les enseignants. Cela dit, une évaluation multidimensionnelle reste fondamentale et celle-ci peut
être réalisée en joignant plusieurs types d’activités, notamment le portfolio e la biographie
linguistique, des tests mais aussi le procès-verbal à haute voix.
L’évaluation se décline en représentations dans l’article de Helena Araújo e Sá et Sílvia
Melo-Pfeifer qui étudient les visions de l’intercompréhension de la part des professeurs de langue
en formation dans le cadre du projet Galapro. Avant de rentrer dans le vif du sujet, elles remarquent
que l’intercompréhension répond aux besoins de notre société car elle permet le franchissement des
frontières disciplinaires (pluri-, inter- et trans- disciplinarité) et de « la vanité d’une didactique pour
chaque langue » (plurilinguisme) (Araujo e Sa & Melo-Pfeifer à partir de Galisson, 1988 :11), tout
en incluant des aspects interculturels et multimodaux. Toutefois, le concept d’intercompréhension
étant en lui-même difficile à cerner du point de vue disciplinaire et conceptuel pour des
enseignant(e)s formé(e)s à l’approche monolingue, la formation des formateurs devient un aspect
non négligeable et les représentations de ces acteurs de l’enseignement des langues sont
fondamentales pour pouvoir agir sur les cultures et permettre le dépassement des idées reçues et
préjugés qui risqueraient de freiner l’insertion curriculaire de l’intercompréhension. Après avoir
crit l’ergonomie de la plateforme, l’architecture de la formation et la composition des équipes
participantes, les deux chercheuses passent à l’analyse de ces forums orientés à saisir la vision des
participant(e)s afin de saisir : le « contenu sémantique des représentations », « la valeur formative »
attribuée à l’intercompréhension et le « poids des représentations sur les motivations ». Les résultats
de cette recherche montrent que malgré la subjectivité des conceptions sur l’intercompréhension, les
formé(e)s ont une vision « plutôt homogène » (l’intercompréhension est vue comme une pratique,
une capacité et une méthodologie) ; du point de vue de la valeur de la formation, cette approche est
considérée comme un instrument « cognitif et méthodologique » qui permet de dépasser les
obstacles rencontrés au niveau de l’enseignement des langues ; du point de vue motivationnel, les
enseignant(e)s en formation attestent surtout de leur désir d’appartenance à une communauté de
pratiques et de recherche et orientent leurs motivations plus vers le « processus d’apprentissage » et
les tâches formatives que vers le scénario de formation. Cela amène les chercheuses à conclure que,
sans doute, d’autres formats et scénarios d’apprentissage sont à envisager et que quatre
« stratégies » sont à inclure dans les formations : stimuler la verbalisation des représentations et les
conflits cognitifs (résistances, scepticismes), inciter l’échange et le débat entre les participants, ainsi
que la comparaison des représentations avec les biographies des formés.
Nous passons à une réflexion sur la progression avec Nathalie Campodonico et Pierre Janin,
représentants de l’APIC (Association pour la promotion de l’intercompréhension), qui exposent,
dans un article qu’on pourrait qualifier de « Précis de didactique de l’intercompréhension », leur
programmation de la progression, issue d’expériences pratiques de formation à
l’intercompréhension en milieu associatif. Au fil des années l’APIC a proposé plus d’une centaine
d’ateliers-découverte, plus de vingt interventions en formation initiale ou continue, mais aussi
environ 7 sessions-ateliers d’1h30. Se déroulant sur une dizaine de semaines et basés
essentiellement sur la méthode Eurom 4-5, ces ateliers proposent principalement la lecture et
compréhension de textes (accompagnés de leur enregistrement oral) en portugais, catalan, espagnol
et italien. Cette expérience a permis de produire des modèles de formations et d’unités
pédagogiques que les deux responsables de l’association décrivent dans les détails et dont la lecture
nous semble indispensable pour tout enseignant voulant animer un cours d’intercompréhension. De
cette expérience partagée nous retenons en particulier la réflexion sur la progression : après un
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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premier cours, que proposer aux formés voulant continuer ? Les deux formateurs suggèrent que de
la compréhension de l’écrit on passe ensuite à l’interaction orale et enfin à la compréhension orale
sans interaction. La lecture des résultats de leurs expériences encouragerait même les plus réticents.
Seule remarque qu’on pourrait faire à ces formations : il leur manque la dimension connectée, un
aspect qui serait à prendre en compte pour compléter la progression à l’avenir.
Grâce à Renauld Govain, nous découvrons enfin que l’intercompréhension commence à faire
ses pas également dans la Caraïbe, une région multilingue et multiculturelle où se côtoient les
créoles à base française, anglaise et hollandaise mais aussi des langues nationales comme le
français, l’anglais et l’espagnol. Dans ce territoire voué à l’intercompréhension (les haïtiens
pratiquent l’anglais et/ou l’espagnol à côté du français et du créole), des tentatives de projets basés
sur cette approche ont vu le jour et trois séminaires ont eu lieu (2008, 2012, 2013). Cependant, une
fois les manifestations terminées, l’élan s’est perdu. Selon le chercheur, cela est dû en partie au fait
que ces actions n’ont pas touché à la gouvernance des universités et en partie au manque d’un
budget dédié. Des expérimentations ont eu lieu, notamment à partir du créole haïtien, mais
l’obstacle ici est le manque d’enseignants de créole. Ce qui soulève une question cruciale : quel
créole soutenir ? le plus répandu ou bien tous ? Loin de donner une réponse, et tout en soulignant
que de toute façon les créoles sont les langues les plus parlées dans la Caraïbe, le chercheur stimule
les questionnements et propose un projet expérimental d’insertion, en trois étapes, qui part de
l’étude des représentations pour concevoir un dispositif de formation hybride qui sera ensuite
appliqué. Ce projet réunirait par ailleurs les universités de Cuba et Haïti et aurait entre autres
l’objectif de demander une ‘Chaire caribéenne d’intercompréhension de langue’ qui permettrait de
relancer les projets d’intercompréhension et de promouvoir cette approche. Mais pour que cela se
réalise, conclut R. Govain, il faut l’engagement d’institutions en mesure de financer ce projet. De
notre côté nous ne pouvons que nous réjouir de ces projets et proposer l’espace de la plateforme
MIRIADI pour la partie ‘connectée’ de la formation.
Marie-Christine Jamet, grand témoin pour l’axe « Evaluations » au colloque IC2014, conclut cette
partie en faisant le point sur les aspects saillants des communications présentées et trace des pistes pour
l’avenir. Elle remarque en premier lieu que le terme « évaluation » a été lu et interprété sous deux angles :
du point de vue des compétences d’un apprenant et du point de vue de l’évaluation d’une formation, d’un
projet ou d’un produit. Les communications appartenant au premier groupe ont posé des questions
concernant l’établissement de niveaux, d’une progression, de seuils et se sont interrogées sur les
instruments pour l’évaluation. Elles ont ainsi permis de mettre en lumière le besoin de repenser
collectivement la progression des apprentissages. Dans son exposé elle synthétise les découvertes au
niveau de l’évaluation d’une série d’expériences empiriques des projets Cinco (auto-évaluation + portfolio
+ tests écrits et oraux) et Intermar (portfolio + test), de C. Reissner à l’Université de la Sarre (portfolio +
tests + ‘procès verbal’ à voix haute), de S. Deprez qui a essayé d’établir une mesure de la compréhension
de l’écrit sur la base des interactions sur Galanet, d’E. Carrasco qui a mené une expérience d’auto-
évaluation déclarative dans le cadre du projet Formica. En conclusion partielle M.C. Jamet remarque que
l’évaluation résulte dans la plupart des cas d’une combinaison d’outils (tests + portfolios et/ou auto-
évaluations) et ne doit pas être une juxtaposition d’épreuves dans chaque langue mais doit viser une vraie
évaluation plurilingue. Elle rapporte également deux communications basées sur une démarche qu’elle
qualifie de rationnelle, basée sur le Cadre et des finitions données au fil du temps. Ce sont les
interventions de Christian Ollivier, qui propose des pistes pour établir un Cadre pour des outils
d’évaluation en IC et qui souligne le besoin de prendre en compte les capacités de transfert et la dimension
interculturelle, et celle du Lot 4 de Miriadi qui présente la démarche de construction des deux référentiels
d’apprentissage REFIC et REFDIC. Elle conclut en présentant les travaux de N. Campodonico et P. Janin,
d’H.Araújo e Sá et S. Melo et de R. Govain que nous avons présentés plus haut.
Ces communications et les discussions qui ont suivi, ont permis au groupe du Lot 4 de Miriadi
de réfléchir au travail sur les Référentiels de manière collaborative et permettent à M.C. Jamet de
conclure que le résultat du colloque est qu’il montre que l’IC a un potentiel d’extension énorme,
INTERCOMPRÉHENSION EN RÉSEAU : SCÉNARIOS, MÉDIATIONS, ÉVALUATIONS
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qu’elle progresse à grand pas et « concourt au rapprochement des peuples », une conclusion avec
laquelle nous sommes amplement d’accord et qui peut être vérifiée en parcourant les textes qui
composent cet ouvrage.
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Article
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Merci de citer comme : MALHEIROS POULET M.-E., DEGACHE C., MASPERI M. (1994), « L'activité de compréhension écrite en langues voisines (domaine des langues romanes) : stratégies d'accès au sens de textes narratifs », in J.-C. Pochard (éd.), Actes du IXe colloque international "Acquisition d'une langue étrangère: perspectives et recherches. Profils d'apprenants". Cette communication se donne pour but de présenter certains aspects des résultats de la première partie du programme de recherche européen Galatea coordonné par le Centre de Didactique des Langues de Grenoble en collaboration avec plusieurs équipes européennes. Nous en évoquerons dans un premier temps les objectifs généraux avant de voir en quoi l'observation des stratégies empiriques de construction du sens dans une langue inconnue mais voisine peut enrichir la description de l'activité de lecture en Langue Etrangère.
Chapter
Full-text available
Version préalable à sa publication dans: Degache, Christian & Garbarino, Sandra (éd.) (2017). Itinéraires pédagogiques de l’alternance des langues : l’intercompréhension. ELLUG, collection Didaskein. ISBN : 978-2-84310-341-4 Cet article veut dresser une typologie des modalités d'intégration de l'interaction plurilingue en ligne, en réseau de groupes. Il observe notamment l'intégration des scénarios Galanet, Galapro, Aventuras et Puentes.
Article
Full-text available
A partir d’exemples tirés du forum Galanet et de l’expérience des étudiants de deux cours d’intercompréhension, via des questionnaires et des bilans d’activité périodiques, cette recherche tâche de démontrer l’aisance des étudiants à entrer dans une langue par l’intercompréhension écrite et se donne pour objectif de mettre en évidence les avantages de cette approche, notamment l’effet de valorisation des compétences, de sécurisation des apprenants et l’aisance donnée au moment de l’entrée dans une langue étrangère auparavant inconnue par les stratégies d’intercompréhension.