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cahier rnf
RÉSERVES NATURELLES DE FRANCE
8
AOÛT 2020
Guide technique
de mise en œuvre
d’une étude
Syrph the Net
Retours d’expérience de l’Atelier
du groupe inter-réseaux Syrphes
Cédric Vanappelghem, Raphaël Vandeweghe, Nicolas Debaive,
Jocelyn Claude, Cyrille Dussaix, Joseph Garrigue, Simon Gaudet,
Dominique Langlois, Gregory Maillet, Véronique Sarthou, Jean
Pierre Sarthou, Aurélie Soissons, Martin Speight, Bruno Tissot,
Damien Top, Sylvie Tourdiat et Anne Vallet
Les Réserves naturelles forment le premier réseau d’espaces protégés de France
métropolitaine et d’outre-mer : en nombre (plus de 300), en surface (près de 68 millions
d’hectares), en diversité des paysages et milieux naturels.
Près de 700 personnes travaillent à connaître, protéger et gérer ces espaces,
ainsi qu’à sensibiliser les habitants, usagers et visiteurs à leur beauté, à leur fragilité,
à la nécessité de leur sauvegarde.
Mais qui sait tout ce dévouement, tout cet enthousiasme, toute cette compétence ?
Les Cahiers de RNF veulent les faire connaître et reconnaître.
Publiés depuis 2013 pour rendre compte de leurs travaux,
ils sont disponibles uniquement en version électronique et sont diffusés gratuitement.
Directeur de la publication : Arnaud Collin, directeur de RNF.
Rédacteur en chef : Nicolas Debaive, chargé de projet forêts de RNF.
Coordination : Cédric Vanappelghem (CEN Nord Pas de Calais), Nicolas Debaive (RNF)
Rédaction : Cédric Vanappelghem & Raphaël Vandeweghe
Comité de rédaction : Jocelyn Claude, Nicolas Debaive, Cyrille Dussaix, Joseph Garri gue, Simon
Gaudet, Dominique Langlois, Gregory Maillet, Véronique Sarthou, Jean Pierre Sarthou, Aurélie
Soissons, Martin Speight, Bruno Tissot, Damien Top, Sylvie Tourdiat, Cédric Vanappelghem et
Anne Vallet
Mise en page : Studio Préférences
Crédits photographiques et illustrations : Jocelyn Claude, Joseph Garrigue, Xavier Houard, Martin
Speight, Cédric Vanappelghem et Raphaël Vandeweghe, Axel Falguier.
Réserves Naturelles de France
La Bourdonnerie
2 allée Pierre Lacroute
CS 67524
21075 DIJON CEDEX - France
Tél. : +33 (0)3 80 48 91 00
Fax : +33 (0)3 80 48 91 01
www.reserves-naturelles.org
ISBN : 978-2-490598-01-4
cahier rnf
cahier rnf
RÉSERVES NATURELLES DE FRANCE
8
AOÛT 2020
SOMMAIRE
1. Présentation de la méthode 9
1.1 Pourquoi les syrphes 11
1.2 Syrph the Net (StN) 12
2. Méthodologie et protocole 17
2.1 Avant de se lancer 19
2.3 Inventaire des habitats 20
2.4 Collecte des syrphes 25
2.5 Tri 37
2.6 Détermination 40
2.7 Stockage 42
3. L’analyse 45
3.1 Préparation et compréhension des données pour l’analyse 47
3.2 Interprétation de l’analyse 40
3.3 Analyse par utilisation de Syrph the Net Interactive 51
4. Exemples d’études Syrph the Net 55
RNN de Chalmessin 56
RNN de la Tourbière des Dauges 62
RNN de la Tourbière de Machais 66
RNN de la Forêt de la Massane 70
RNN du Marais Vernier 74
RNN du lac de Remoray 80
Saint-Mars-la-Brière 86
RNN du ravin de Valbois 92
Vallon du Vivier 98
RNR de l’Escaut rivière 102
Bibliographie 107
Index des figures
Figure 1 : schéma de constitution d’une liste d’espèces prédites 14
Figure 2 : constitution et utilisation des 3 listes d’espèces 14
Index des tableaux
Tableau 1 : arguments faisant des Syrphes de bons bio-indicateurs 12
Tableau 2 : extrait de la typologie des habitats de StN. 23
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4
Tableau 3 : exemple de coût du matériel pour le piégeage des syrphes 31
Tableau 4 : estimation du coût du matériel pour la chasse à vue 36
Tableau 5 : estimation du coût du matériel pour le tri 29
Tableau 6 : estimation du coût du matériel pour la détermination 41
Tableau 7 : extrait de la base de données StN (Speight et al. 2016a), 49
Tableau 8 : classe de valeurs de la qualité du modèle et de l’intégrité écologique 50
Index des illustrations
Illustration 1 : photographie d’un dispositif crépine 20
Illustration 2 : extrait de « Contenu et Glossaire » présentant les habitats et
habitats supplémentaires (Speight et al. 2015) ??
Illustration 3 : tente Malaise bien positionnée sur un couloir de vol (lisière) 25
Illustration 4 : tente Malaise dégradée par une bourrasque de vent (cliché RNN Massane) 26
Illustration 5 : tente Malaise protégée par une clôture 27
Illustration 6 : tente Malaise posée avec piquets et fils de tension 28
Illustration 7 : exemple de panneau explicatif 29
Illustration 8 : différents flacons utilisés pour la phase de collecte et de laboratoire 30
Illustration 9 : tête de tente Malaise fixée au piquet 32
Illustration 10 : situation des tentes Malaise 33
Illustration 11 : individu étalé (Speight et al. 2016c) 36
Illustration 12 : aile de syrphe, Lapposyrphus lapponicus (Speight et al. 2016d) 37
Illustration 13 : comparaison d’un Diptère non Syrphidae et d’un syrphe
(Brachyopa sp.) (cliché : RNN Massane) 37
Illustration 14 : poste de tri 39
Illustration 15 : étiquette pour la conservation des échantillons 42
Illustration 16 : logo des matières inflammables 43
Illustration 17 : logo de l’AGIS 51
5. Annexe 111
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5
Remerciements
Ce guide de mise en œuvre d’une étude utilisant la base de données Syrph the
Net a été rendu possible grâce à la participation de nombreuses personnes, de
différents organismes. Toutes ne peuvent pas être citées individuellement, mais
les contributions suivantes doivent être particulièrement mentionnées :
– Martin Speight est le maître à penser de cette méthode ; sa bienveillance, son
soutien et ses conseils sur la mise en œuvre de la méthode sont toujours très
appréciés ;
– les membres bénévoles de l’atelier « groupe inter réseaux pour les syrphes » de
RNF qui ont contribué à la création et à la dynamique du groupe depuis 2008
et en particulier : Brunot Tissot, Dominique Langlois, Jocelyn Claude et Joseph
Garrigue.
Cette étude a mobilisé de très nombreux gestionnaires de RN et de sites
gérés pour la conservation de la nature mais sans statut de protection. Sans
leur implication, ce travail n’aurait pu avoir lieu. C’est pourquoi le comité de
rédaction tient à les remercier vivement pour leur enthousiasme et l’énergie
qu’ils ont mis à tester cette méthode.
Enfin, tous nos remerciements également à l’équipe salariée et au CA de RNF qui
ont soutenu cette démarche originale dès 2008.
Ce document a été réalisé avec le soutien financier de
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Résumé
Testée et lancée à la fin du siècle dernier, la méthode d’évaluation de l’intégrité
écologique à l’aide des syrphes (méthode Syrph the Net) a percolé dans les
réseaux d’espaces protégés grâce notamment à l’implication des auteurs
initiaux (Martin C.D. Speight et Emmanuel Castella) et de leurs relais français
(Véronique et Jean-Pierre Sarthou). En 2008, un groupe de travail dédié est
créé au sein de Réserves Naturelles de France dans le but de promouvoir la
méthode Syrph the Net en France auprès des gestionnaires d’espaces naturels
protégés. Sa dimension inter-réseau, avec la Fédération des Conservatoires
d’espaces naturels notamment, est forte.
Ce guide a pour vocation de rendre techniquement accessible la méthode
Syrph the Net à tous les lecteurs et a fortiori les gestionnaires. Basée sur
la comparaison de cortèges observés et prédits de syrphes, la méthode
trouve toute sa pertinence dans l’utilisation d’une base de données de traits
écologiques et de vie des syrphes d’Europe. Si le guide accorde une place à la
présentation des attendus, aux principes et aux concepts de cette méthode,
il se veut surtout un outil opérationnel pour accompagner pas à pas les
gestionnaires dans sa mise en œuvre. Ces derniers trouveront notamment des
outils leur permettant de poser les bonnes questions avant de se lancer ainsi
que des réponses à des questions très concrètes telles que la mise en place
des pièges (tentes Malaise), la collecte des données sur les habitats, le tri et la
détermination. Des clefs d’analyse sont également données aux lecteurs pour
leur permettre d’appréhender l’analyse.
Afin de rendre ce guide plus concret, 10 fiches, présentant de manière
synthétique les résultats et enseignements de certains gestionnaires, sont
compilées en seconde partie du guide. Elles font état d’expériences réalisées
au sein de Réserves naturelles et d’autres espaces naturels diversifiés en termes
de milieu, de localisation biogéographique mais également d’implication du
gestionnaire dans la méthode, illustrant ainsi les différentes modalités de mise
en œuvre. L’ouvrage est complété, en annexe, par un guide d’utilisation de StN
interactive, une application produisant des tableaux d’analyses pour Syrph the
Net.
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Eristalinus sepulchralis (L.), 1758
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Partie 1
Présentation de la méthode
1.1 Pourquoi les syrphes 11
1.2 Syrph the Net (StN) 12
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10
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1111
Présentation de la méthode
1.1 Pourquoi les syrphes ?
Les Syrphidae sont une famille de l’ordre des Diptères. En Europe, la faune
syrphidologique compte approximativement 950 espèces (Speight et al.,
2017a), dont 563 en France (Speight et al., 2018). La diversité spécifique de cette
famille est importante mais d’autres raisons ont justifié le choix de ce taxon
pour le développement de cette méthode.
Tous les imagos des syrphes se nourrissent de nectar ou de pollen, ils sont
reconnus comme étant des pollinisateurs (Ssymank et al., 2008 ; Gadoum &
Roux Fouillet, 2016). La détection des adultes est donc relativement aisée. La
tente Malaise (Malaise, 1937) permet de standardiser la méthode de collecte
des imagos, ce piège d’interception ayant l’avantage d’être très efficace, en un
temps de collecte réduit.
A l’état larvaire, l’écologie spécifique est plus variée, les espèces peuvent être
zoophages, microphages ou phytophages. Elles occupent un grand nombre
de niches écologiques ; de la cime des arbres aux racines des graminées, en
passant par les mares ou le bois mort. Parfois, les conditions écologiques
caractérisant l’habitat larvaire sont très ténues (coulées de sève d’un arbre
blessé, etc.). Les syrphes investissent ainsi presque la totalité des écosystèmes
terrestres, exceptés les milieux aquatiques courants ainsi que les milieux
aquatiques profonds et les grottes. En France, on connaît les caractéristiques
écologiques de plus de 95 % des espèces de syrphes (Speight et al., 2016 ;
Speight et al., 2017a)
La détermination des adultes est accessible grâce aux nombreux ouvrages
disponibles en Europe et aux publications complémentaires de Syrph the Net
Publications. Certains genres diversifiés de la zone méditerranéenne restent
néanmoins délicats à appréhender.
En Europe, la base de données Syrph the Net (StN) (Speight et al., 2016a)
synthétise la connaissance accumulée sur les espèces de syrphes. Cette base de
données est diffusée gratuitement, sous licence, par Syrph the Net Publications.
Elle constitue un système expert expert1 sur les syrphes européens.
1 Un système expert est un outil capable de repro-
duire les mécanismes cognitifs d’un expert sur un
domaine précis.
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12
Les syrphidés sont de bons bio indicateurs. Les connaissances acquises et
les dynamiques de recherches actuelles sur cette famille, en font un modèle
inégalé à ce jour (Tableau 1)
Tableau 1 : Arguments en faveur des Syrphes comme bons bio indicateurs
Arguments biologiques
Quasi-totalité des écosystèmes terrestres
investie.
Écologie larvaire finement associée aux
paramètres de l’habitat.
Relations trophiques variées.
Arguments techniques
Échantillonnage standard des adultes (tente
Malaise) faisable et reproductible.
Identification accessible.
Base de données StN existante, disponible et
régulièrement mise à jour.
1.2 Syrph the Net (StN)
1.2.1 Syrph the Net : qu’est-ce que c’est ?
La base de données Syrph the Net (StN) a été développée à partir de 1990
(Speight, 2017a) par Martin C.D. Speight et Emmanuel Castella. Elle compile
les données disponibles sur la distribution, la biologie et l’écologie des
espèces de syrphes européens. Elle est régulièrement alimentée par un réseau
d’utilisateurs et de spécialistes européens, animé par Martin C.D. Speight.
La base de données est en constante évolution avec les ajouts des nouvelles
espèces européennes, la stabilisation taxonomique de certains taxons (Speight,
2017b), les actualisations de la chorologie, des traits de vie, etc. Ce système
expert a été conçu pour être utilisable par des non spécialistes, comme la
plupart des gestionnaires d’espaces naturels (Speight, 2017a).
La base de données StN est au centre des productions de StN Publications
mais d’autres fichiers viennent la compléter :
la base de données Syrph the Net avec les informations codées sous
forme de classeur au format Excel ;
le volume « Content and Glossary », lexique expliquant l’ensemble des
termes utilisés dans la base de données StN et notamment donnant
une définition précise de chaque habitat avec le lien dans les typologies
CORINE biotopes, EUNIS et phytosociologique sigmatiste. Il existe deux
versions de ce document, l’une française et l’autre anglaise, (Speight et
al. 2015 ; Speight et al. 2016b) ;
le volume « Species account », compilation de monographies des espèces
traitées dans la base de données. Ce document apporte des compléments
aux informations contenues dans la base de données, notamment avec
des éléments bibliographiques ;
les volumes « StN Key to Genera » et « StN key to Species », des clefs
d’identification au genre et à l’espèce pour certains genres, développées
spécifiquement pour StN Publications ;
des publications occasionnelles sont également éditées (rapports
d’études). En 2018, les cartes de distribution départementale des
espèces de syrphes de France ont été compilées et publiées (Speight
et al., 2018).
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13
1.2.2 Syrph the Net : que contient la base de données ?
Les données de la base Syrph the Net sont de plusieurs natures :
habitats « préférés » des espèces ;
distribution des espèces à plusieurs échelles géographiques (pays,
domaine biogéographique au sens de la Directive Habitat Faune Flore
(92/43 CEE)) ;
niveau de menace des espèces à plusieurs échelles géographiques (la
méthode d’évaluation ne suit pas la méthode UICN) ;
caractéristiques des habitats larvaires des espèces ;
traits de vie des espèces (relations trophiques, cycle de vie, etc.).
La base de données, en quelques chiffres (Speight et al., 2016a) :
4 2 5 habitats référencés ;
108 caractéristiques d’habitats larvaires ;
1 0 7 traits de vie des syrphes concernant la larve, la pupe ou l’adulte.
Toutes les informations compilées dans StN sont codées en fonction du
degré d’association entre l’espèce et le facteur considéré. Ce codage n’est pas
binaire mais dit « flou » (Castella et Speight, 1996) pour permettre plus de
combinaisons et rendre compte de la plasticité de l’écologie des espèces :
3 : l’espèce est associée préférentiellement à ce paramètre ;
2 : l’espèce est associée normalement avec ce paramètre ;
1 : l’espèce peut être associée à ce paramètre sous certaines conditions ;
vide : l’espèce n’est pas associée à ce paramètre.
1.2.3 Syrph the Net : comment ça marche ?
L’objectif premier de la base de données était de développer un outil prédictif
permettant d’évaluer la biodiversité de sites naturels à des fins de gestion et
de conservation (Speight, 2017a).
Le principe général de fonctionnement se base sur la comparaison entre
une liste d’espèces observées sur un site avec une liste d’espèces attendues
(prédictive).
La liste d’espèces observées est constituée grâce à une campagne de piégeage
réalisée préférentiellement par tente Malaise sur le site étudié. Les individus
sont triés et identifiés à l’espèce. Il n’est pas tenu compte de l’abondance,
qu’elle soit relative ou absolue.
La base de données Syrph the Net fonctionne dans un premier temps comme
un modèle de prédiction. A partir des habitats relevés dans le périmètre de
collecte des tentes (300 à 500 m), il est possible de dresser une liste d’espèces
potentiellement présentes. Cette liste est ensuite filtrée en fonction des
espèces présentes dans le secteur géographique du site d’étude (« liste
régionale ») et permet d’obtenir une liste d’espèces prédites (Figure 1).
Temnostoma meridionale Krivosheina &
Mamayev, 1962
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14
Figure 1 : schéma de constitution d’une liste d’espèces prédites
Association espèces/habitats (base de données StN)
Espèces prédites sur les habitats de la réserve
Liste d’espèces prédites
Filtre :
habitats
inventoriés
Filtre :
liste
« régionale »
La liste des espèces prédites est ensuite comparée à la liste des espèces
observées (Figure 2) qui sont classées en trois groupes :
les espèces «au rendez-vous» : les espèces prédites et observées ;
les espèces «inattendues» : les espèces observées et non prédites ;
les espèces «manquantes» : les espèces prédites et non observées.
Chacun de ces groupes permet de construire des indicateurs (Figure 2).
La qualité du modèle de prédiction est évaluée avec les espèces
inattendues.
L’intégrité écologique1 est estimée avec les espèces au rendez-vous.
Les espèces manquantes permettront d’analyser, grâce aux traits de vie des
syrphes et caractéristiques des habitats larvaires, les dysfonctionnements2
des habitats ou du site d’étude.
Les détails de cette mise en œuvre seront présentés dans le reste de ce guide
technique.
Figure 2 : constitution et utilisation des 3 listes d’espèces
Espèces attendues
(prédites)
Espèces manquantes
% manquantes sur attendues
Dysfonctionnement Intégrité écologique Qualité du modèle
Espèces au rendez-vous
% au rdv sur attendues
Espèces inattendues
% inattendues sur observées
Espèces observées
(piégées)
1.2.4 Quelles informations tire-t-on de la méthode ?
Cette méthode vise avant tout à fournir une évaluation synthétique de l’intégrité
écologique. Elle permet également d’évaluer d’éventuels dysfonctionnements
d’un habitat et permet d’établir un diagnostic pouvant servir de base pour
adapter les actions de gestion et améliorer l’intégrité écologique.
1 La traduction littérale anglaise est « fonction de
maintenance de la biodiversité », ici l’expression est
un raccourci. On considère qu’un site ou un habitat
possédant une fonction de maintenance de la bio-
diversité écologique élevée a des fonctions écolo-
giques intègres et non altérés.
2 Le terme désigne ici une fonction écologique alté-
rée du site ou de l’habitat (présence de bois mort,
hauteur du toit de nappe), déduite de l’analyse des
traits de vie ou des caractéristiques écologiques
communes d’une partie significative des espèces
manquantes.
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15
Exemples d’application : Si toutes les espèces liées aux niveaux trophiques
pauvres d’un système prairial sont absentes, il y a de toute évidence un
dysfonctionnement sur la trophie des prairies. De même, dans un boisement,
le manque ou une faible présence d’espèces liées aux arbres sénescents
indique un dysfonctionnement lié à l’absence de ce stade d’évolution du
bois. La méthode permet de décrire et d’analyser des états par rapport à des
références.
Cette méthode utilise un modèle biologique (indicateurs directs) pour décrire
un milieu, et non des mesures ou des indicateurs indirects pouvant posséder une
part de subjectivité ou de simplification. Ce sont les cortèges qui alimentent
les indicateurs d’évaluation et les interprétations écologiques. Cette méthode
est néanmoins complémentaire d’autres méthodes d’évaluation des habitats
ou des espaces naturels (RNF, 2013). Le prise en compte de facteurs plus
globaux ou anciens est nécessaire pour bien interpréter ces cortèges.
La méthode peut également contribuer à évaluer l’état de conservation d’un
habitat. Cependant, les apports concrets de la méthode StN pour ce type
d’évaluation, notamment pour les habitats forestiers, demandent encore à
être approfondis.
Ce guide est consacré à la mise en œuvre de la méthode, issue de l’expérience
de gestionnaires de Réserves naturelles, de Conservatoires d’espaces
naturels, mais aussi d’autres gestionnaires (Office national des forêts,
Conseils départementaux, etc.). La dernière partie de ce cahier illustre leurs
expériences.
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16
Ischyroptera bipilosa Pokorny, 1887
les cahiers rnf
1717
Partie 2
Méthodologie et protocole
2.1 Avant de se lancer 19
2.3 Inventaire des habitats 20
2.4 Collecte des syrphes 25
2.5 Tri 37
2.6 Détermination 40
2.7 Stockage 42
les cahiers rnf
18
19
les cahiers rnf
19
2 Méthodologie et protocole
2.1 Avant de se lancer
Comme pour toute étude, il s’agit d’abord d’identifier le contexte, la
problématique et la question à laquelle on veut répondre. Ces éléments
sont essentiels pour définir le protocole d’échantillonnage, c’est-à-dire,
la localisation des tentes, leur nombre, le temps nécessaire aux différentes
étapes, les modalités d’utilisation de l’outil Syrph the Net, etc.
Le choix de l’échelle d’analyse est très important. L’étude peut ainsi être
menée à l’échelle d’un habitat, d’un complexe d’habitats ou de sites, voire être
réalisée à l’échelle des paysages (Burgio & Sommagio, 2007). Le plus souvent,
l’échelle choisie sera un site, un habitat, ou un complexe d’habitats. Ce guide
a principalement été rédigé pour ces échelles spécifiques (et davantage
adaptées à l’échelle d’action des gestionnaires d’espaces naturels).
L’échelle et les habitats visés, le nombre et la disposition des tentes, ainsi que
la durée de l’étude sont les éléments indispensables à considérer, en tenant
compte des moyens mis en œuvre. On considère généralement que chaque
habitat doit être couvert par deux tentes et qu’une collecte sur deux années
est une situation idéale.
Pour estimer la durée de la phase de collecte des données espèces, il est
nécessaire de tenir compte des durées de tri et de détermination, elles-
mêmes proportionnelles au nombre de tentes posées.
Il est par ailleurs important de préciser que les fichiers StN ne sont que des
outils produisant des données élaborées. L’interprétation reste du ressort du
gestionnaire.
Quelques exemples de questions soumises à l’analyse StN.
Quelle est l’intégrité écologique de mon aulnaie marécageuse ?
StN peut-il m’aider à savoir si cet habitat est dans un état de conservation
satisfaisant ?
Le volume de bois mort laissé sur ma Réserve peut-il être considéré
comme suffisant ?
les cahiers rnf
20
Les modalités de gestion forestière permettent-elles de maintenir
l’expression de la biodiversité ?
Dans le cadre d’une compensation : quel est l’état de mon site, et
comment le gérer pour en améliorer l’intégrité écologique ?
Il n’existe pas de texte législatif relatif à la protection des espèces de syrphes
sur le territoire français, ni de convention internationale. Cependant, le
piégeage et la capture dans un espace naturel protégé peuvent relever d’une
infraction liée au site de l’étude.
Outre l’aspect réglementaire, d’autres espèces non ciblées, dont des espèces
menacées ou protégées, peuvent se retrouver piégées par les tentes Malaise.
Il est nécessaire d’anticiper les conséquences potentielles d’un tel dispositif
de piégeage et éventuellement d’utiliser des méthodes de réduction ou
de suppression de l’impact. Par exemple, la mise en place d’une crépine
(Illustration 1) ou de croisillons à l’entrée des tubes de collectes, afin
d’empêcher les gros insectes de pénétrer, notamment des papillons de jour,
s’est avérée efficace sur la majorité des sites l’ayant testée.
Illustration 1 : photographie d’un dispositif crépine
2.3 Inventaire des habitats
La typologie d’habitats de StN est différente de la typologie CORINE biotopes
et de la phytosociologie (Speight, 2017a), les découpages ne correspondant
pas à l’utilisation des habitats par les syrphes ou ne couvrant pas totalement
la zone géographique de la base de données. La méthode Syrph the Net se
base sur une typologie adaptée. Cette dernière est présentée et définie, ainsi
que les correspondances vers les typologies CORINE biotopes, EUNIS et
phytosociologique sigmatiste, dans le volume StN « Content and Glossary »
(Speight et al., 2016) et sa traduction française « Contenu et Glossaire » (Speight
et al., 2015). La typologie StN définit deux catégories d’habitats :
les « macrohabitats », correspondant aux habitats en tant que
communautés végétales comme dans les typologies CORINE biotopes
ou phytosociologique ;
les cahiers rnf
21
les habitats supplémentaires, regroupant les éléments ponctuels ou
linéaires comme les habitats aquatiques (sources, mares, cours d’eau), les
chemins, les clairières. Ces habitats supplémentaires sont liés aux macro-
habitats dans le relevé des habitats.
Les habitats supplémentaires viennent affiner la description du site permettant
de compléter la liste des espèces prédites. Par exemple, une forêt avec des
clairières herbeuses abritera théoriquement plus d’espèces qu’une même forêt
dépourvue de ces clairières.
Dans la suite du document nous utiliserons le terme d’habitats pour celui de
macro-habitats et conserverons celui d’habitat supplémentaire.
Le relevé des habitats s’effectue sur une distance comprise entre 300 et 500 m,
voire 800 m dans les milieux très ouverts, autour de l’emplacement de chaque
tente Malaise. Son objectif est de recenser les habitats dans la zone d’étude,
mais également d’inventorier les habitats supplémentaires dans chacun de
ces habitats.
Dans le cadre d’une étude StN, l’application de cette typologie (dont
l’utilisation des habitats supplémentaires) demande une attention particulière.
Elle s’avère plus aisée à aborder quand le site est déjà doté d’une cartographie
des habitats. Cette étape est primordiale car elle influe directement sur la liste
des espèces prédites, et donc, a posteriori, sur l’analyse.
Lors de la première utilisation de StN, il est conseillé de commencer par prendre
connaissance de la typologie des habitats pour appréhender la manière dont
sont structurés et découpés les habitats. Il est également recommandé de lire
attentivement la description des habitats, le nom seul pouvant parfois porter
à confusion.
Pour réaliser l’inventaire des habitats, plusieurs possibilités s’offrent au
gestionnaire en fonction de sa problématique :
pour connaître l’état de l’habitat, y compris les menaces, et son stade
de développement, au moment de la collecte, on relève les habitats en
prenant les milieux tels qu’ils nous apparaissent ;
pour évaluer l’état de conservation des habitats (voir RNF, 2013) on relève
les habitats potentiels en prenant les milieux tels qu’ils devraient être
(définis dans les objectifs à long terme d’un plan de gestion par exemple).
La structure spatiale (intégrer par exemple la strate buissonnante quand
on évalue une pelouse) ou temporelle (prendre en compte tous les
stades d’un cycle forestier, du jeune peuplement au sur-mature) doivent
être prises en compte pour obtenir une bonne évaluation ;
pour adapter un mode de gestion, on relève les habitats en prenant
les milieux tels qu’ils devraient être en l’absence de menaces ou de
contraintes, ce qui suppose d’anticiper les impacts futurs sur les habitats
du site.
Le cahier scientifique numéro 2 des Réserves Naturelles de France (RNF, 2013)
renseigne sur les méthodes d’évaluation de l’état de conservation des habitats
forestiers et des éco-complexes alluviaux, ainsi que sur les potentialités de ces
milieux et les altérations possibles. Il est disponible gratuitement à l’adresse
suivante : http://www.reserves-naturelles.org/publications/numero-2-des-
cahiers-rnf-evaluation-de-l-etat-de-conservation-habitats-forestiers-et
les cahiers rnf
22
Le rapport de Claude et al. (2013) illustre une comparaison entre un relevé
des habitats tels qu’ils sont avec un relevé des habitats tels qu’ils devraient
être sur des systèmes prairiaux amendés. Dans cette étude, un premier
travail de recensement des habitats prairiaux présents sur le site a mis
en évidence les deux habitats suivants « prairies amendées fauchées » et
« prairies amendées pâturées » (Lowland improved grassland Hay - code
23213 / Lowland improved grassland Heavily grazed cattle - code 232121).
Suite à l‘analyse StN, ces habitats ont obtenu des indices d’intégrité
écologique excellents de 94 %.
Cependant au travers de la bibliographie, il a été constaté que les prairies
amendées (eutrophes) étaient mésotrophes avant 1985. Un nouveau travail
a alors été réalisé pour faire un relevé des habitats tels qu’ils devraient
être. L’habitat « Prairies extensives de montagne » (Montane unimproved
grassland: calcareous - code 23122) a été retenu comme état de référence
des prairies mésotrophes. Une nouvelle analyse StN a donc été faite sur cet
habitat. Les intégrités écologiques nouvellement calculées sont beaucoup
plus basses que celles des prairies amendées. Avec une moyenne globale
de 54 %, les résultats sont considérés comme moyen.
L’illustration suivante montre une comparaison entre les deux types
d’approches.
Cet exemple illustre l’importance du choix des habitats fait lors de
la comparaison des cortèges. Ce choix doit être mûrement réfléchi en
fonction des questions auxquelles on souhaite répondre.
Figure : comparaison des résultats d’analyse basés sur deux approches
différentes du relevé des habitats
les cahiers rnf
23
2.3.1 En pratique
Pour réaliser l’inventaire des habitats, il est possible de réaliser le relevé des
habitats selon n’importe quelle typologie (phytosociologie, EUNIS, CORINE
biotopes ou StN). Quelle que soit la typologie, les volumes « Content and
Glossary » ou « Contenu et Glossaire » permettront d’en lister l’inventaire au
sens StN. Certains habitats dans StN étant très proches les uns des autres, une
lecture attentive des descriptions des habitats est nécessaire.
Outre la typologie spécifique, la méthode de description des habitats
introduit la notion d’habitats supplémentaires qui précisent la description du
site. Ces habitats supplémentaires regroupent les habitats aquatiques mais
également des clairières, chemins, etc. Chaque grand type d’habitat (forestier,
cultivé, ouvert ou de zones humides) comporte un certain nombre d’habitats
supplémentaires qu’il est possible d’utiliser pour compléter la description d’un
habitat. Dans l’exemple, d’une « chênaie-charmaie avec une clairière et une
source », la chênaie-charmaie est l’habitat, et la clairière et la source sont les
habitats supplémentaires. La lecture des volumes « Content and Glossary »
ou « Contenu et Glossaire » permet d’en appréhender toutes les possibilités.
Tableau 2 : extrait de la typologie des habitats de StN.
Illustration 2 : extrait de « Contenu et Glossaire » présentant les habitats et
habitats supplémentaires (Speight et al., 2015)
CATÉGORIES NOMBRE
Habitats forestiers supplémentaires
Clairière ou bords de piste à strate herbacée haute
Clairière ou bords de piste à courte strate herbacée haute
Rive de mare permanente sous la canopée
Mare permanente sous canopée
Source en forêt
Résurgence en forêt
Petites zones ouvertes en forêt avec résurgence
Fossé de drainage en forêt
Fossé de drainage le long de piste en plantation
Ruisseau saisonnier en forêt
Berges de ruisseau en forêt
Berges de rivière en forêt
Bouses de vache en forêt
Affleurement rocheux en forêt
Fourrés d’Opuntia
Touffes d’asphodèles
211f
234f
7462f
713f
731f, 732f
733f
7331f
734f
735f
7332f
7442f
7441f
7131f
75f
76f
77f
MACROHABITATS FORESTIERS (gen.)
Forêts de feuillus (gén.)
Forêts de feuillus sèches (gèn.)
Chênaie thermophile (gén.)
sur-mature
mature
jeunes arbres
Quercus pubescens occidental
sur-mature
mature
jeunes arbres
1
11
111
1111
11111
11112
11113
11114
111141
111142
111143
La cartographie des habitats des Réserves est généralement intégrée au plan de
gestion. Il est possible de faire la correspondance entre la typologie utilisée et la
typologie StN. Outre l’analyse des correspondances, la méthode StN nécessite
l’identification d’habitats supplémentaires, qui peut demander une visite sur le site.
les cahiers rnf
24
Ce travail est délicat car il n’y a pas de correspondance exacte entre les habitats
des différentes typologies. Certains codes CORINE biotopes se retrouvent
dans plusieurs codes de la typologie StN : par exemple, le code CORINE 44.92
correspond aux saulaies marécageuses des zones inondables, des bords de
plans d’eau, ou de bas-marais. La typologie StN différencie ces situations en
deux codes. A l’inverse, plusieurs codes CORINE biotopes sont regroupés sous
une seule codification Syrph the Net comme pour les hêtraies. Une lecture
attentive des descriptions de la typologie StN est nécessaire.
Il est important de relever l’intégralité des habitats et habitats supplémentaires
au sein du périmètre théorique de portée des tentes Malaise, et de les intégrer
au modèle pour l’analyse. Si la totalité des habitats n’est pas intégrée, certaines
espèces collectées seront considérées, à tort, comme inattendues, et il ne
sera pas possible d’utiliser l’indicateur de qualité du modèle. Il est plus facile
d’expliquer une faible quantité d’espèces inattendues du fait des habitats
périphériques. D’un autre côté, intégrer trop d’habitats comme des habitats
en lisière de la portée théorique des tentes Malaise ou de très petite taille,
compliquera inutilement le modèle et l’analyse globale.
Pour ce type d’étude, il est possible d’externaliser l’inventaire des habitats.
Cependant, il est indispensable qu’il y ait une réelle coopération entre
le prestataire et le gestionnaire pour identifier les habitats et habitats
supplémentaires qui serviront de base au modèle de prédiction.
En 2016-2017 au Marais de Saône (25) 4 tentes Malaise ont été implantées
dans une vaste zone humide alimentant en eau potable la majorité de la
ville de Besançon (Claude et al., 2018). L’habitat forestier principal est une
forêt alluviale. Lors de l’analyse, les associations végétales identifiées dans
la bibliographe (Carici acutiformis - Alnetum glutinosae, Carici remotae -
Fraxinetum excelsioris) correspondent aux forêts de frênes et d’aulnes des
ruisselets et des sources (rivulaires) (habitat StN n°1133 - Zone d’expansion des
crues de ruisseau). La présence de Neoascia annexa, Orthonevra geniculata
et Xylota meigeniana en témoigne. Se limiter à l’utilisation de cet habitat
pour l’analyse fonctionnelle n’a cependant pas semblé satisfaisant. Toute
une communauté de syrphes observée (Brachyopa bicolor, Brachypalpoides
lentus, Brachypalpus laphriformis, B. valgus, Cheilosia soror, Chrysotoxum
festivum, Eristalis picea, Meligramma cincta, Pipiza festiva, Rhingia borealis,
Temnostoma bombylans, Volucella inflata, Xylota abiens, X. sylvarum),
indicatrice des boisements alluviaux de bois durs, n’étant en effet pas
prise en compte à ce stade de l’analyse. Apparaissant alors beaucoup plus
stratifiées, diversifiées en essences et soumises à un régime d’inondation plus
important (en amplitude et en intensité), que décrit dans la phytosociologie
(datant d’une quinzaine d’années), l’habitat qui a été retenu pour l’analyse
Syrph the Net correspond aux boisements de frênes et d’aulnes liés aux
rivières des larges vallées ou des plaines à courant faible et uniforme (habitat
StN 1132 - Forêt alluviale de bois dur), cet habitat a d’ailleurs été retrouvé en
périphérie du site.
les cahiers rnf
25
2.4 La collecte des syrphes
Il existe deux modes de collecte des Syrphidés :
le piégeage par tente Malaise ;
la chasse à vue au filet entomologique.
Le piégeage par tente Malaise est privilégié du fait de son caractère standard
et reproductible sans effet observateur. Si la chasse à vue peut être pratiquée
dans une perspective de contrôle de la qualité de l’échantillonnage, la collecte
par tente Malaise est privilégiée dans le cadre d’une étude Syrph the Net.
2.4.1 Piégeage
Le piégeage mis en place dans cette méthode est réalisé selon un échantillon-
nage standardisé, reproductible. La tente Malaise, piège d’interception passif et
non sélectif permet d’avoir, a priori, un échantillonnage représentatif du cortège
de syrphes. Il ne constitue cependant pas un inventaire exhaustif. Des travaux
sont en cours avec le CEFE-CRNS de Montpellier et L’Office Français pour la Bio-
diversité pour évaluer au mieux la qualité des inventaires par tente Malaise. La
chasse à vue peut compléter aux marges l’inventaire par les tentes Malaise mais
si les tentes sont bien placées et que l’échantillonnage est suffisant, la capture à
vue n’est pas nécessaire dans le cadre d’une étude Syrph the Net.
2.4.2 Matériel
La tente Malaise
La tente Malaise porte le nom de son inventeur (Malaise, 1937). Elle ressemble
à une petite tente canadienne avec une toile centrale verticale (Illustration 3).
Un dispositif particulier, appelé « tête », situé à l’une des extrémités du toit,
recueille les insectes en les piégeant dans l’alcool. La tente utilise le principe de
phototropisme positif des insectes. Les insectes volants bloqués par la paroi
centrale la remontent, attirés par la lumière du soleil, et terminent dans le
flacon collecteur rempli d’alcool. La tente Malaise est un piège d’interception
non attractif et non sélectif, ce qui peut être un avantage dans le cadre de
protocole standard de collecte de données d’espèces sur le terrain, du fait de
l’absence de biais lié à l’attraction plus ou moins forte de produits.
L’emplacement de la tente Malaise, qui a une portée de capture de 300 à 500 m
(jusqu’à 800 m en milieu très ouvert) est un paramètre important (cf. 2.4.3.2).
Illustration 3 : tente Malaise
bien positionnée sur un couloir
de vol (lisière)
les cahiers rnf
26
Il existe plusieurs couleurs de tente Malaise : entièrement noire, noire avec
le toit blanc ou entièrement blanche. La couleur de la tente ne semble pas
avoir d’impact sur les captures. Par contre, les tentes noires et blanches ou
entièrement blanches sont beaucoup plus visibles que celle entièrement
noires. Ces dernières sont donc recommandées sur sites ouverts au public ou
si elles sont visibles de loin. En milieu forestier, plus ombragé, un toit blanc est
préférable.
En conditions d’utilisations similaires, la durée de vie d’une tente du
commerce variera entre un et trois ans, en fonction de la qualité du tulle,
pour un même fournisseur de tentes.
Il existe d’autres alternatives : La Réserve naturelle de la Tourbière des
Dauges a opté pour des tentes artisanales fabriquées par une couturière
locale. Le coût est légèrement plus élevé, mais est compensé par une
durée de vie plus importante.
La durée de vie de la tente dépend également de plusieurs autres facteurs sur
lesquels il n’est pas toujours possible d’agir :
l’exposition de la tente et l’intensité de l’ensoleillement vont fortement
dégrader le tissu en le rendant cassant par action des ultra-violets et
accélérer son vieillissement ;
les rafales de vent peuvent détruire le toit de la tente et rendre la tente
inopérante (Illustration 4). De petits extenseurs placés à la base des fils
de tension donneront la possibilité à la tente de se coucher en cas de
vent fort ;
le bétail peut être cause de dégradation. La pose d’une clôture (électrifiée
ou fixe) évitera qu’il ne s’approche trop près de la tente (Illustration 5) ;
les flacons de récolte en plastique rigide sont soumis au rayonnement
UV. Après quelques années d’utilisation (2 à 4 ans), ils deviennent cassants
et ne supporteront pas des conditions météorologiques difficiles (grêle).
Illustration 4 : tente Malaise dégradée par une bourrasque de vent (cliché
RNN Massane)
les cahiers rnf
27
Illustration 5 : tente Malaise protégée par une clôture
Les piquets
La pose des tentes se fait à l’aide de deux piquets situés à l’avant et à l’arrière
de la tente. Ils doivent être de grande taille pour soutenir le haut de la tente.
Le piquet à l’avant accueillera la tête de la tente.
La taille et la section des piquets doivent être adaptées à la nature du substrat
dans lequel les piquets seront plantés. D’un piquet de clôture, section 3 à 6 cm,
au fer à béton, pour des sols très durs, l’éventail des possibilités est large. Le
piquet portant la tête de tente peut être haubané en fonction du sol (stabilité,
humidité).
Il existe des tentes auto-portées ne nécessitant pas de piquets avant et arrière.
Ces tentes ont l’avantage de pouvoir être installées très facilement mais ne
font pas l’unanimité dans la communauté syrphidologique, pour leur efficacité
jugée moindre.
Les sardines
Les sardines en plastique souvent fournies avec la tente ne sont pas très
solides et sont à réserver aux sols meubles. Les sardines en métal peuvent être
utilisées pour tous les types de sols.
Les colliers de serrage ou le scotch américain
La fixation de la tente Malaise au piquet se fait grâce à 2 colliers de serrage
en métal, parfois fournis avec la tente Malaise, adaptés à la taille du piquet. Il
est important de vérifier que leur taille correspond à celle des piquets utilisés
pour la fixation de la tente.
Le scotch toile américain est une alternative aux colliers de serrage pour fixer
la tête de la tente au piquet. Il a pour avantage de pouvoir être adapté, quelle
que soit la dimension des piquets. Il est très résistant, même en zone humide
dans des conditions de pluviométrie importante, mais moins durable qu’un
collier en métal réutilisable.
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28
Un collier de serrage est obligatoire pour attacher la toile de la tente à la tête
de la tente Malaise.
Les fils de tension
La mise sous tension de la tente Malaise s’effectue à l’aide de fils de tension
(fil pour tente de camping ou corde à linge par exemple). Les fils doivent être
résistants aux conditions extérieures, sectionnables, et suffisamment souples
pour être noués. On les fixe au sol ou sur des sardines plantées à proximité de
la tente (Illustration 6).
Illustration 6 : tente Malaise posée avec piquets et fils de tension
Liste du matériel nécessaire à la pose d’une tente :
– 2 piquets de tailles adaptées ;
– jusque 14 sardines (en fonction de l’utilisation des piquets de tension, du
haubanage du piquet de tête, etc.) ;
– 3 colliers de serrage (1 pour attacher la toile de la tente à la tête et 2
pour fixer la tête de la tente au piquet) ou 1 collier de serrage et du
scotch américain ;
– une bobine de fil de tension ;
– 4 piquets de tension (optionnels) ;
– des tendeurs, petits et grands ;
– une crépine pour filtrer les gros insectes (orthoptères, anisoptères,
grands papillons).
Signalétique
Il est nécessaire d’informer les usagers du site de la présence du dispositif
principalement à des fins de sensibilisation et de réduction du vandalisme.
Ces panneaux sont importants sur sites ouverts au public, ainsi que pour
les dispositifs visibles depuis l’extérieur d’une zone protégée non accessible
(Illustration 7). Une feuille plastifiée sur un simple panneau de bois est
suffisante mais ne perdurera pas au-delà d’une année.
les cahiers rnf
29
Illustration 7 : exemple de panneau explicatif
Alcool
Le principe de collecte de la tente Malaise pousse les insectes interceptés vers
la tête de la tente où ils tombent dans un flacon rempli d’alcool.
L’alcool est utilisé à deux moments : lors de la collecte et lors de la
détermination et le stockage des individus.
Il est conseillé d’utiliser de l’éthanol à 70° permettant aux individus de rester
assez souples et de moins se décolorer que dans l’alcool à 90°. Il faut que les
individus gardent une certaine souplesse pour leur manipulation et notamment
pour extraire les genitalia en cas de nécessité.
Il est recommandé d’acheter de l’alcool dénaturé, moins cher et plus facile à se
procurer dans les laboratoires spécialisés car il est impossible de fabriquer de
l’alcool de consommation à partir de celui-ci. D’autre part, il est recommandé
de ne pas acheter d’alcool avec un additif de couleur, comme celui vendu
dans les pharmacies pour éviter d’une part de colorer certains critères sur
les individus et d’autre part de les rendre cassants du fait du produit ajouté à
l’alcool.
La quantité d’alcool sera adaptée en fonction du nombre de relevés à réaliser
et du nombre de tentes. En moyenne, sur une saison de piégeage, il faut prévoir
deux relevés de 500 ml par tente et par mois, soit 1 l d’alcool par tente et par
mois. La fréquence de relevé peut varier en fonction de la période de l’année,
du type de milieu, de la latitude et de l’altitude.
Les périodes de vol sont aussi impactées par la latitude et l’altitude et pourront
moduler la période de piégeage.
Flacons
Pour la collecte des individus plusieurs types de flacons sont nécessaires.
Selon leur usage, leurs caractéristiques sont différentes.
les cahiers rnf
30
Illustration 8 : différents flacons utilisés pour la phase de collecte et de laboratoire
Flacons de collecte du piégeage (flacon numéro 1 de l’illustration 8)
Ce sont des flacons à col large d’une contenance d’au moins 500 ml permettant
de récupérer facilement les échantillons issus des flacons de la tente Malaise.
Ils doivent être hermétiques car le tri des collectes ne se fait pas forcément
immédiatement après la récolte des spécimens. Un étiquetage mentionnant a
minima la période de piégeage (y compris l’année), le site d’étude et le code
de la tente est indispensable.
La composition des flacons importe peu, mais un plastique non cassant, type
polyéthylène haute densité ou du verre, plus écoresponsable et préférable. Il
faut prévoir un flacon par relevé et par tente. Les flacons doivent être stockés
à l’abri de la lumière.
Flacons de tri (flacon numéro 2 de l’illustration 8)
La contenance des flacons sera variable (20, 40, 60, 100 ml) en fonction du
nombre d’individus et du niveau de tri à réaliser (syrphes seuls ou autres
taxons - voir partie 2.5). Ces flacons ayant vocation à être stockés, parfois sur
une longue durée, ils doivent être hermétiques. Les flacons en polypropylène,
matière rigide et souple à la fois, sont les moins fragiles mais les flacons en
verre sont plus écoresponsables.
Flacons de collection (flacon numéro 3 de l’illustration 8)
Ces flacons de collection, d’une contenance de 4 ml, sont utilisés pour
conserver les individus identifiés à l’espèce. Il est recommandé de choisir
des flacons à col à vis parfaitement hermétique, avec septum, afin d’éviter
l’évaporation de l’alcool lors de la mise en collection, et si possible en verre,
de préférence borosilicaté (type Pyrex), matière ayant une bonne résistance
aux chocs.
Pissette de laboratoire
Deux pissettes de laboratoire sont utilisées pour le rinçage des flacons et
filtres utilisés au cours du protocole : l’une contenant l’alcool, la seconde de
l’eau distillée ou du robinet.
Il est possible d’acheter les flacons en gros auprès de Technical treatments
(Réf 2001 : flacon de 700 ml, Réf 1001 : flacon de 300 ml et Réf 4001 : flacon de
1250 ml). Bien qu’ils n’expédient pas, le colis peut être acheminé par transporteur,
avec un prix global (flacon + transport) relativement intéressant.
les cahiers rnf
31
Tableau 3 : exemple de coût du matériel pour le piégeage des syrphes (en date
du 1er juin 2019)
Matériel Quantité estimée Prix unitaire Fournisseur
Tente Malaise variable 150 à 280 www.wildcare.eu
cahurel-entomologie.com
Flacon de collecte variable 5 e
http://www.entomology.org.uk/
www.wildcare.eu
cahurel-entomologie.com
https://www.technical-treatments.co.uk
Flacon de tri variable > 0,05 e unité en
achat groupé
https://www.carlroth.com/fr/fr/
https://www.humeau.com/
Flacon de collection variable 0,4 e unité pour
200 pièces https://www.carlroth.com/fr/fr//
Pissette de laboratoire 2 minimum 5 ehttps://www.carlroth.com/fr/fr/
https://www.humeau.com/
Alcool 70° 0,5 l par relevé
pour une tente 90 e pour 20 l www.humeau.com
Fil de tension 1 bobine 5 e
(2 x 10 m) Magasin de sports, grandes surfaces
Scotch américain 1 6,21 e
(5m) Grande surface
Collier de serrage en
métal
Minimum 3 par
tente
4 € (2 pièces, Ø
47-67 mm) Magasin de bricolage
Sardines de camping 12 par tente 4,95 e
(10 pièces) Magasin de sports, loisirs ou pêche
2.4.3 Pose du matériel
Référencement de l’emplacement des tentes
Les coordonnées des tentes seront géoréférencées et enregistrées sous SIG.
Photographies des tentes Malaise et du milieu d’étude
Des photos des tentes Malaise et du milieu environnant sont à réaliser au cours
de l’étude, au moins lors de la pose et de l’enlèvement. Les photographies des
tentes apportent des informations nécessaires à l’étude, telles que l’orientation
de la tente Malaise et son intégration dans l’environnement immédiat. Les
photographies du milieu illustrent les zones étudiées, facilitant par la suite la
compréhension des résultats.
2.4.3.1 Comment ?
Les étapes principales pour la pose d’une tente Malaise sont les suivantes :
dégager la végétation sur la zone de pose. Veiller à bien retirer les plantes
susceptibles d’abîmer la toile de tente (ronces, etc.) ;
planter dans le sol, le grand piquet à l’avant de la tente. Sa hauteur doit
être ajustée en fonction de la hauteur de la tente, le bas de tente doit être
au ras du sol :
accrocher la tête de la tente à la toile et fixer la base de la tente sous la
tête avec une sardine, la toile doit être au ras du sol ;
fixer la tête de la tente au piquet (Illustration 9) ;
planter le piquet à l’arrière de la tente et le fixer à la toile pour la tendre ;
finir par fixer la toile au sol et la tendre à l’aide de sardines et de fils de
tension.
les cahiers rnf
32
Il est nécessaire de garder une certaine souplesse et ne pas trop tendre les
différentes fixations, pour éviter que la toile de la tente ne se déchire sous
l’action du vent par exemple.
Pour activer le piège, un flacon de tente rempli au 2/3 d’alcool (soit environ
500 ml) sera fixé à la tête. Dans certain cas, pour cette opération, un adaptateur
est fourni. A la fin de la pose, il faut vérifier que l’orifice de capture, à l’intérieur
de la tente, soit bien dégagé (Illustration 9).
Illustration 9 : tête de tente Malaise fixée au piquet
2.4.3.2 Où ?
Les recommandations suivantes sont à bien prendre en compte, une tente
Malaise mal posée ne capture pas efficacement :
placer la tente perpendiculairement aux couloirs de vol utilisés par les
syrphes. Les couloirs de vols suivent souvent les ruptures dans la structure
de la végétation comme les lisières, les bords de cours d’eau, les falaises ;
veiller à ce que les habitats visés soient représentés dans la portée des tentes
(300 m à 500 m de rayon autour de la tente) ;
adapter l’exposition de la tente par rapport au soleil en fonction de sa
situation ;
dans le nord de la France, la tente doit être exposée au soleil. Pour cela adopter
une orientation de la tête de la tente allant du sud-ouest ou sud-est ;
dans le sud, l’orientation vers le soleil est à nuancer, voire à déconseiller.
Dans les secteurs très chauds, privilégier un emplacement à l’ombre car, avec
les chaleurs estivales, les insectes se réfugient dans des zones plus fraîches ;
installer la tente à proximité de secteurs fleuris, à défaut, aux bords de cours
d’eau (notamment pour des habitats de pelouses ou climats secs) ou les
clairières pour les milieux forestiers : le nombre de captures est dépendant
de la proximité des lieux de vie des syrphes.
Il est toujours important de garder à l’esprit que l’emplacement des tentes
doit correspondre à la question posée, voire à l’habitat ou aux habitats ciblés.
On cherchera à maximiser la capture des syrphes en restant, en priorité, dans
le cadre de la problématique posée.
les cahiers rnf
33
La pose des tentes en zone de pente peut être délicate. Un arbre peut servir
de support pour maintenir l’ensemble du dispositif.
En 2012, dans les prairies du Montrinsans (25160), deux tentes Malaise
ont été installées pour réaliser un diagnostic écologique (site d’étude de
60 ha, entre 860 et 900 m d’altitude) (Claude et al., 2017).
Les prairies de l’exploitation du Montrinsans possèdent dans leur
globalité une intégrité écologique de 34%, taux relativement faible. Sur
les 67 espèces prédites pour ces prairies, seules 23 sont présentes contre
44 espèces manquantes. Compte tenu des contraintes liées au pâturage,
les tentes Malaise ont été placées au milieu des prairies, à proximité des
clôtures, pour faciliter leur protection. Un emplacement à proximité des
lisières aurait été plus efficace. Les niveaux d’intégrité écologique des
différents macro-habitats du Montrinsans sont le reflet d’un mauvais plan
d’échantillonnage qui ne permet pas d’établir un diagnostic écologique
complet. Il conviendra de refaire ce travail prochainement pour vérifier
ces résultats, les rendre robustes et comparables avec d’autres études StN.
Illustration 10 : exemple de positionnement de tente Malaise défavorable
2.4.3.3 Combien de dispositifs ?
Le principe de la méthode est de poser deux tentes par habitat afin d’assurer,
d’une part, un réplicat, et d’autre part, de couvrir une plus grande zone de
capture.
Le nombre de tentes peut être augmenté si la zone à couvrir est très grande ou
si l’effort d’échantillonnage a besoin d’être plus conséquent.
Si l’objectif est de couvrir tous les habitats d’une réserve, la réflexion sera différente.
Il sera alors nécessaire d’augmenter le nombre de tentes Malaise pour couvrir
l’ensemble des habitats du site et de s’inscrire dans une perspective pluriannuelle.
2.4.3.4 Quand ?
La période de piégeage «idéale» est celle de la durée de végétation. Il va sans
dire que plus elle est longue, plus on a de chances de trouver un nombre
les cahiers rnf
34
d’espèces important, et notamment les plus précoces. Cependant, lorsque le
temps de piégeage doit être réduit pour des raisons de disponibilité ou de
budget, il convient de poser les pièges pendant la période la plus active : au
printemps (entre mars-avril et mai-juin selon la latitude ou l’altitude), et si
possible de nouveau en fin d’été (août-septembre jusqu’à octobre), en fonction
de la latitude et de l’altitude.
La méthode Syrph the Net permet de prédire la liste d’espèces en tenant
compte d’un filtre temporel basé sur les périodes de vol des espèces.
La latitude influe sur la période de piégeage de manière importante. Dans la
moitié nord de la France, la période de vol s’étend du mois de mars jusqu’au
mois de septembre. Au sud et plus particulièrement en zone méditerranéenne,
les temps de piégeage sont plus longs et peuvent même s’étaler sur la totalité
de l’année. Il y a également une phénologie différente entre ces deux zones. Les
latitudes les plus hautes présentent des pics de syrphes en fin de printemps,
alors que les latitudes basses ont deux pics plus marqués (un au printemps et
un en fin d’été/début d’automne).
Une même relation est retrouvée en altitude avec des périodes de vol plus
courtes en s’élevant en altitude. C’est pourquoi il est important de relier la
période de piégeage à la zone géo-climatique.
2.4.3.5 Combien de temps ?
Le temps alloué à une étude dépend de plusieurs paramètres. Certains
facteurs matériels, comme les moyens financiers et le temps alloués par année,
sont parfois déterminants pour fixer la durée de l’étude. La question posée
initialement peut également nécessiter une certaine durée d’étude pour y
répondre. Selon l’habitat visé, la taille du site, ou une gestion particulière, la
durée de l’étude va varier d’une à plusieurs années.
Il est envisageable de monter une étude sur une année en maximisant les
moyens alloués, mais il est conseillé d’étaler une étude sur au moins 2 ans pour
s’affranchir d’une année climatique qui pourrait être défavorable (printemps
très humide et froid par exemple).
2.4.4 Relevés des tentes
Un relevé est très rapide, de l’ordre de 2 minutes par tente. Le relevé consiste
à récolter le bidon contenant les insectes, et à le remplacer par un nouveau
bidon d’alcool.
Un relevé par mois en début et en fin de saison peut suffire. Le rythme
classique est généralement d’un relevé toutes les deux semaines, ce qui
permet également de vérifier l’état de la tente. Lors de fortes températures,
une augmentation de la quantité d’insectes capturés et une évaporation plus
importante de l’alcool peuvent nécessiter un relevé par semaine.
Il est important de surveiller le niveau de capture des tentes pour ne pas laisser
le pot se remplir, empêchant la collecte d’autres individus.
Pour permettre l’identification de chaque pot relevé, un étiquetage est
nécessaire sur et dans le flacon. Ces étiquettes sont écrites au crayon HB
ou à l’encre de chine pour ne pas être effacées. Elles comportent, a minima,
les cahiers rnf
35
la date du relevé, le lieu du relevé (localité), le nom ou numéro de la tente
Malaise. L’étiquette à l’intérieur du pot au contact de l’alcool a besoin d’être
plus épaisse pour ne pas se déstructurer dans le liquide (papier de 100 g/m²).
A chaque relevé la végétation doit être éclaircie aux abords de la tente
pour dégager ses accès, et une vérification de la tenue de la tente doit être
réalisée. Une inspection de la tête de tente sera faite au niveau de l’orifice de
capture, depuis l’intérieur de la tente. Il doit être bien dégagé. Plusieurs cas
d’obstruction quasi-complète de l’orifice de capture ont été observés, avec
des chenilles de pyrale du buis par exemple ou par des toiles d’araignées pour
lesquelles ce piège peut être une belle aubaine.
Il faut éviter au maximum de secouer les flacons lors du transport pour ne pas
abîmer les échantillons et risquer de répandre les écailles de papillons.
Astuce : Pour le remplissage des flacons de collecte sur les tentes, il est possible
d’utiliser de l’alcool où est mélangé l’alcool « neuf » (issu directement des
bidons achetés) et l’alcool filtré issu de campagnes de piégeage précédentes.
Ce dernier possède une couleur jaune-orangé assez marqué et un mélange 1/3
neuf et 2/3 filtré permet de recycler et de faire des économies substantielles
en consommation d’alcool.
Par contre pour la détermination et le stockage, il est préférable de n’utiliser
que de l’alcool neuf, pour avoir une meilleure vision des détails et éviter des
colorations de certains critères, surtout dans le cas où la détermination des
individus n’est pas réalisée rapidement après le tri.
Au retour du terrain, les flacons des tentes peuvent être vidés dans les pots
de collecte pour permettre une réutilisation rapide. Ils seront ainsi prêts à
retourner sur le site pour le prochain relevé. Les pots de collecte sont très
utiles dans le cas où le tri n’est pas opéré dans les jours suivants le relevé.
2.4.5 La chasse à vue
Cette méthode de collecte est non standardisée contrairement aux tentes. Elle
n’est pas recommandée mais peut être pratiquée. Si elle révèle trop d’espèces
nouvelles par rapport aux tentes Malaise, l’échantillonnage doit être remis en
cause.
Sur le terrain
Cette chasse se fait en utilisant un filet entomologique. Les animaux récoltés
sont stockés dans une boîte de collecte (pour les individus à sec) ou un flacon
d’alcool. Des conditions météorologiques favorisent cet échantillonnage :
un temps ensoleillé (sans précipitations), plutôt chaud (supérieur à 15°C) en
évitant d’avoir trop de vent, sont des conditions optimales pour la chasse des
syrphes. Cette chasse se fait dans la portée de capture des tentes Malaise.
Sur le terrain, la chasse implique de pouvoir rapidement identifier un syrphe
en vol ou posé. La distinction des syrphes sur le terrain s’acquiert assez
rapidement. En revanche, la détection des secteurs favorables à la prospection
demande davantage d’expérience.
La chasse à vue est plus efficace le matin et en fin d’après-midi. En tout début
de matinée, les syrphes se réchauffent au soleil et on les cherchera dans les
puits de lumière sur les feuilles ou au sol. Dans la matinée, on les cherchera sur
les fleurs, feuillages, troncs, blessures des arbres, voire sur des points d’eau en
les cahiers rnf
36
fin de matinée ou en période de fortes chaleurs. En fin de journée, les zones
ensoleillées seront inspectées comme en début de matinée.
Les syrphes nécessitant une identification sous loupe binoculaire doivent être
collectés.
En laboratoire
Les individus collectés à sec (pas dans l’alcool), seront épinglés à des fins
d’identification. Lors de l’étalage, il est important de laisser visibles les
différentes parties du corps et pour les mâles de rendre visible les genitalia
(Illustration 11).
Les individus collectés en alcool sont conservés ainsi.
Le syrphe doit être conservé avec plusieurs étiquettes :
la date de capture, la localité, les coordonnées géographiques et le nom
du récolteur ;
le nom de genre et d’espèce, le descripteur historique de l’espèce, le nom
du déterminateur et la date de détermination.
Ces étiquettes seront fixées sous l’individu sur la même épingle ou dans le flacon
de stockage de l’individu en alcool. Elles sont imprimées, vierge, sur du papier
épais (au moins 200 g) avec une imprimante laser. Des fournisseurs en matériel
entomologique en vendent déjà imprimées. Les mentions d’identification et
de localisation sont inscrites avec un crayon à encre de chine ou imprimées
directement sur les étiquettes.
Illustration 11 : individu étalé (© Speight)
Tableau 4 : estimation du coût du matériel pour la chasse à vue
Matériel Quantité estimée Prix unitaire Source
Filet entomologique 1 40 à 60 ehttp://www.maunakea.be
cahurel-entomologie.com
Pot de transport 1 5 ewww.entomo-silex.com
Épingles entomologiques Taille
00 variable 3,20 e
(100 pièces)
http://www.maunakea.be
http://www.entosphinx.cz
Épingles de maintien variable 2,50 ehttp://www.maunakea.be
http://www.entosphinx.cz
Boîte de collection 1 à 2 27,00 e
(30x40x5,4 cm)
http://www.maunakea.be
cahurel-entomologie.com
Éther acétique optionnel 5,62 e (125m L) cahurel-entomologie.com
Bocal à cyanure optionnel 35 ewww.humeau.com
Stylo à encre (étiquette) Au moins 1 2,50 ePapeterie
les cahiers rnf
37
2.5 Le tri
Le tri est une étape qui nécessite de l’attention et de la précision. Chaque pot
collecté transporte son lot d’individus de syrphes qui constitue les espèces
« observées » de la méthode Syrph the Net. Le tri des syrphes implique
de connaître les traits caractéristiques communs aux Syrphidae. Souvent
mimétiques des Hyménoptères, il est possible de les confondre et donc de
négliger certaines données. Certaines espèces ressemblent également à des
mouches noires et peuvent passer inaperçues. En cas de doute pendant le tri,
il est préférable d’intégrer les individus douteux dans les Syrphidae, quitte à les
retirer lors de l’identification, plutôt que de risquer de manquer des espèces.
Pour bien reconnaître, un syrphe il faut s’assurer des critères suivants
(Illustration 12) :
une nervation alaire marquée par un faux-bord en vert sur l’illustration 12 (les
cellules n’atteignent pas le bord postérieur de l’aile) ;
la présence de la vena spuria de part et d’autre de la nervure R-M, qui est une
fausse veine au milieu de l’aile, en rouge sur l’illustration 12 ;
la forme « en pointe » de la cellule anale, en bleu sur l’illustration 12.
Illustration 12 : aile de syrphe, Lapposyrphus lapponicus (Speight et al., 2016d)
La vena spuria est observable chez la quasi-totalité des syrphes, exception
faite des genres Eristalinus et Psilota pour lesquels elle est plus difficile à voir
ou absente.
Les syrphes peuvent avoir des morphologies très variées. En
effet, certains syrphes ressemblent à s’y méprendre à d’autres
Diptères (Illustration 13), ou à des bourdons, des abeilles, voire
des guêpes. D’autres ne mesurent pas plus de 6 mm (Paragus ;
Pelecocera ; Neoascia). Il faut donc vérifier consciencieusement
les critères (Illustration 13).
Illustration 13 : comparaison d’un Diptère non-Syrphidae et
d’un syrphe (Brachyopa sp.) (© RNN Massane)
les cahiers rnf
38
En plus des syrphes, un grand nombre d’organismes est piégé dans les tentes. Il
est possible de trier également d’autres groupes, afin de valoriser les individus
capturés et pour générer de la connaissance supplémentaire. Cette approche
est d’autant plus importante lorsque l’étude prend place dans un espace
protégé. Il est possible de s’initier à la détermination de quelques groupes
seuls mais il est conseillé de faire valider ses déterminations par un spécialiste.
La consultation des réseaux entomologiques régionaux, voire nationaux, peut
être nécessaire.
Un exemple de mise en valeur des individus non-Syrphidae est
présenté dans le cahier scientifique n°4 réalisé par Réserves
Naturelles de France (Langlois, 2014). Il est disponible à l’adresse
suivante : (http://www.reserves-naturelles.org/ressources/cahiers-
scientifiques).
Cet article montre les apports de ce type d’initiative au sein d’un
réseau d’entomologistes. Cette valorisation scientifique a permis
de générer de la connaissance sur le patrimoine naturel local, mais
également au niveau national avec la découverte de nouvelles espèces
non répertoriées sur le territoire français. Ces réserves s’appliquent
à déterminer l’ensemble de leurs échantillons, transmettent leurs
expériences lors de rencontres entomologiques et publient leurs
résultats.
Les individus non-triés sont conservés dans un pot avec de l’alcool.
Le tri des individus est une phase qui prend du temps et dépend de la quantité
d’organismes capturés et du nombre de groupes triés. On estime une durée de
1 à 3 heures par pot lorsque seuls les Syrphes sont triés. Le recours à de la main
d’œuvre en extra (bénévoles, étudiants, …) permet de réduire cette durée.
Après le relevé des pots, si le tri n’est pas réalisé rapidement, il est recommandé
de retirer les lépidoptères le plus rapidement possible pour empêcher la
diffusion des écailles dans l’alcool car elles ont tendance à opacifier le contenu
du pot pendant le stockage des échantillons.
2.5.1 En pratique
Transfert des échantillons dans le bac de tri
Pour une meilleure visibilité et un tri efficace, les individus doivent être mis
dans un bac de tri. Il est possible de réaliser le tri dans l’alcool en versant le
contenu du pot de collecte directement dans le bac et doit se faire dans des
conditions bien aérées ou préférentiellement sous hottes aspirantes. Le tri
dans l’eau, plus agréable que l’alcool, est fortement conseillé (pour la santé du
trieur !) en passant au préalable par une étape de filtrage.
Pour réaliser ce filtrage, il existe plusieurs matériels : le filtre à café, le filtre en
nylon, ou la passoire à mailles fines. Un entonnoir est conseillé pour accueillir
le filtre à café ou le filtre nylon. Le filtrage se réalise au-dessus d’un récipient
pour récupérer l’alcool usagé. Cet alcool doit être examiné pour récupérer
éventuellement les tout petits organismes difficilement détectables à l’œil nu
susceptibles de passer les mailles comme les petits hyménoptères chalcidiens
de certaines familles (Mymaridae et autres…). Ensuite les individus sont mis en
eau dans le bac de tri. Pour éviter que de petits individus (syrphes ou autres
groupes) restent bloqués dans le filtre ou la passoire, veiller à bien rincer le
dispositif à l’aide d’une pissette d’eau.
les cahiers rnf
39
Comment techniquement procède-t-on pour le tri ?
Quand les individus sont dans les bacs (Illustration 14), la première chose à
réaliser est de retirer les organismes volumineux ou les organismes qui attirent
l’œil à cause de leur coloration (Tipulidae, Lépidoptères, Hyménoptères,
Odonates, etc.). Ces individus volumineux doivent être observés avec
attention car ils peuvent emporter, dans leurs pattes, d’autres petits individus
qu’il est important de conserver pour le tri. Dans le cas où le tri se réalise dans
l’eau, il faudra préalablement éponger les individus avant de les mettre dans
l’alcool pour éviter de diluer la solution d’éthanol. Utiliser pour cela du papier
absorbant.
Tri fin
Le tri fin nécessite un bon éclairage apporté par des lampes d’appoint. Cette
lumière va permettre de distinguer des critères difficiles à voir telle que la
nervation alaire.
Le passage des organismes sous la loupe binoculaire peut être nécessaire afin
de les trier finement, comme par exemple pour extraire d’autres familles de
diptères. Certains syrphes (comme les genres Psilota et Brachyopa ou la tribu
des Pipizinii) sont susceptibles d’être vérifiés également.
Illustration 14 : poste de tri
Tableau 5 : estimation du coût du matériel pour le tri
Matériel Quantité estimée Prix unitaire Source
Bac de tri 2 à 3 8,00 €https://www.carlroth.com
www.coop-labo.com
Loupe de philatélie 1 15,00 €Grandes Surfaces
Pinces souples 2 3,20 €www.entosphinx.cz
Filtre à café variable 1,99 €
(80 filtres) Grandes surfaces
Filtre nylon 1 3,00 €Grandes surfaces
Pissette 1 10,00 €Grandes surfaces
les cahiers rnf
40
2.6 La détermination
La détermination est une des parties les plus délicates d’une étude Syrph the
Net. Cette étape demande de l’humilité, de l’observation et de la concentration.
L’identification est un exercice laborieux quand on est débutant, mais qui au
fur et à mesure, s’améliore par la connaissance, l’utilisation des ouvrages et
articles spécifiques, ainsi que par les échanges avec les spécialistes.
2.6.1 Le matériel
La détermination nécessite un matériel adapté.
La loupe binoculaire : elle doit posséder a minima :
un bon grossissement (au moins x 40) ;
une bonne qualité d’objectif ;
des oculaires (grossissement x 10 et x 20) ;
un zoom intégré ;
une distance de travail suffisante pour manipuler sous la loupe binoculaire
(supérieure à 80 mm).
Une source de lumière : des lampes de bureau LED peu coûteuses sont de bons
substituts aux matériels intégrés sur les loupes ou proposés en complément
par les marques d’optique.
Un récipient pour contenir les syrphes ou les genitalia de syrphe : par exemple,
de petites boîtes de Pétri en verre. Il faut que l’ensemble du spécimen soit
totalement immergé pour pouvoir observer tous les critères de détermination.
Les pinces souples : utilisées pendant le tri, sont employées de nouveau
pour manipuler les individus. Chaque utilisateur trouvera les pinces qui lui
conviennent en fonction de leur forme, leur dureté et leur longueur.
2.6.2 En pratique
Afin d’améliorer les compétences en détermination, il existe des sessions de
formation proposées soit par l’Agence française pour la biodiversité (AFB), soit
par des spécialistes des syrphes (bureau d’études privés). Elles se décomposent
en différents niveaux d’expertise, de l’initiation à la valorisation des résultats
par la méthode StN.
Le travail de détermination peut se faire avec l’implication plus ou moins
importante du gestionnaire. La détermination nécessite de la pratique pour
certains genres. Il est important de garder de l’humilité dans les déterminations
et ne pas vouloir chercher systématiquement à attribuer un nom. Dans le cas
de déterminations ardues, il est nécessaire de demander l’avis d’un spécialiste
pour validation. Il est également possible d’externaliser toute l’identification à
des bureaux d’études ou auprès d’experts indépendants.
Tableau 6 : estimation du coût du matériel pour la détermination
Matériel Quantité estimée Prix unitaire Source
Loupe binoculaire 1 300 à 600 €Fournisseurs de matériel optique
Source de lumière froide 1 414 € (LED) Fournisseurs de matériel optique
Lampe LED 1 12,95 € (88 lm) Magasins de meubles, luminaires, etc.
Boîte de Pétri 1 ou plus 2,40 €Fournisseurs de matériel de laboratoire
les cahiers rnf
41
2.6.3 Collection de référence
La collection de référence est un outil d’aide à la détermination et à la
validation des déterminations. Cette collection est indispensable pour toute
personne souhaitant déterminer des syrphes. Dans l’alcool, elle permet de
conserver les individus issus des tentes Malaise. Le montage sur épingle des
individus collectés dans l’alcool est long et fastidieux mais pas impossible.
Certains critères sont plus visibles dans l’alcool et d’autres sur les individus
montés sur épingle.
La collection est constituée de flacons de collection contenant un ou plusieurs
individus. Chaque flacon est identifié à l’aide de 2 étiquettes en papier, écrites
à l’encre indélébile et insérées à l’intérieur du flacon dans l’alcool. La première
informe de la localité (réserve, identifiant de la tente...), de la date de récolte,
du type de piège et du nom du récolteur. La seconde étiquette répertorie
le nom de genre, le nom d’espèce, le descripteur de l’espèce et le nom du
déterminateur.
2.6.4 Saisie des données de détermination
Afin de suivre les identifications au fur à mesure de l’avancée du travail et
également pour pouvoir revenir sur certaines, un tableur est proposé ci-dessous
Feuille 1 : Métadonnées de l’étude
La première feuille de calcul comprend les informations sur :
le nombre de tentes ;
la localisation des tentes (coordonnées géographiques) ;
les relevés : date, nom du récolteur, observations pendant le relevé
(vandalisme, renversement du contenu du pot…) ;
si une carte ait été réalisée, on peut l’ajouter sur cette page.
Feuille 2 : Données d’identification
Pour saisir les données issues des déterminations, on utilise un tableur où est
consigné un minimum d’informations, par exemple :
nom de l’espèce suivant le référentiel StN (quasiment équivalent de
Taxref du MNHN) ;
nombre par sexe ;
date ou période de capture ;
coordonnées de capture ;
moyen de capture (tente Malaise, filet…) ;
identifiant de la tente Malaise d’où est issu le spécimen (si capture en
tente) ;
nom du récolteur et du déterminateur.
Feuille 3 : Liste des espèces françaises
La troisième feuille peut comprendre la liste des espèces françaises, basée sur le
référentiel Syrph the Net. L’utilisation de cette liste vise à éviter les erreurs de
saisie dans l’onglet consacré aux déterminations en générant des menus déroulants
utilisés lors de la saisie dans le deuxième onglet. Cette liste peut être encore
réduite à un secteur plus restreint si vous avez accès à une liste plus locale.
Création de menus déroulants
Sur Excel :
créer une liste avec les noms scientifiques. Nommer cette liste.
cliquer sur l’onglet « Données »
les cahiers rnf
42
puis sur « Validation des données » ; une fenêtre s’ouvre
dans l’onglet « options », sélectionner « liste » comme entité dans le
menu déroulant
saisir le nom de la liste créée au départ dans « source : »
Sur LibreOffice :
créer une liste avec les noms scientifiques
cliquer sur l’onglet « Données »
puis sur « Validité... » ; une fenêtre s’ouvre
dans l’onglet « critère », sélectionner « plage de cellules » comme entité
dans le menu déroulant
cliquer sur le bouton situé au bout de la barre de saisie dans la partie
« source : »
sélectionner la plage de cellules où sont référencés les noms scientifiques
des espèces
Les déterminations des espèces non-Syrphidae
Que l’identification soit faite par l’opérateur de l’étude ou par un autre
opérateur, ces espèces doivent être saisies dans la base de données du maître
d’ouvrage de l’étude et suivre ensuite les mêmes vecteurs de partage des
données.
2.7 Le stockage
Le stockage des flacons doit être fait de manière méthodique et organisée
pour éviter de perdre ou mélanger des flacons. L’étiquetage de tous les flacons
utilisés est une priorité.
Stockage des flacons de collecte
Lors du transfert du contenu des pots des tentes Malaise, les flacons de collecte
sont doublement étiquetés à l’intérieur et à l’extérieur. Ces étiquettes, écrites
au stylo à encre de chine, pour éviter que l’écriture ne s’efface avec l’alcool ou
l’eau, comportent, au minimum, la date de récolte de l’échantillon, le lieu, le
nom ou le numéro de la tente, et le nom du récolteur.
Pour plus de simplicité et de lisibilité, il est possible d’utiliser des étiquettes
automatisées (Illustration 15), réalisées sur ordinateur et imprimées avec une
imprimante laser. Dans l’exemple de l’étiquette ci-dessous, il suffit d’ajouter
manuellement le jour et le mois de récolte.
Illustration 15 : étiquette pour la conservation des échantillons
Stockage des flacons de tri
Pour stocker les flacons de tri, une étiquette semblable à celle des flacons de
collecte est apposée à l’intérieur et à l’extérieur du pot. Il faudra cependant
renseigner en plus le groupe taxonomique trié. Les pots où sont conservés les
syrphes seront regroupés.
Alimentation d’autres bases de
données
Ces données représentent un
travail significatif à partager dans
les bases de données naturalistes
régionales (SINP régionaux), ou
nationales (SINP), afin de pouvoir
être accessibles dans l’INPN et les
bases régionales partagées le cas
échéant.
les cahiers rnf
43
Stockage des flacons de collection
Le stockage des flacons de collection se réalise après la détermination. Les
flacons de collection doivent avoir deux étiquettes à l’intérieur, une avec les
informations de date, localité, tente, récolteur et une étiquette avec le nom de
genre, le nom de l’espèce, le nom du descripteur de l’espèce, le sexe ainsi que
le nom du déterminateur. Deux spécimens de même sexe provenant de deux
échantillons différents ne doivent pas être regroupés dans un même flacon.
Les flacons sont étiquetés individuellement et constitueront une collection
de référence dans l’alcool.
Le stockage de l’éthanol et des flacons contenant de l’éthanol est soumis
à quelques règles. Une fiche complète sur les règles d’utilisation de
l’éthanol est disponible à l’adresse suivante (www.inrs.fr/fichetox). Les
règles de stockage sont rappelées ci-dessous :
– stocker l’éthanol à l’air libre ou dans des locaux frais, bien ventilés,
à l’abri de toute source d’ignition ou de chaleur (flammes, étincelles,
rayons solaires...) et à l’écart des produits oxydants. Le sol de ces locaux
sera incombustible, imperméable et formera cuvette de rétention afin
qu’en cas d’écoulement accidentel, le liquide ne puisse se répandre au
dehors ;
– mettre le matériel électrique en conformité avec la réglementation
en vigueur ;
– interdire de fumer ;
– prendre toutes dispositions pour éviter l’accumulation d’électricité
statique ;
– conserver à l’abri de l’air dans des récipients soigneuse-
ment fermés et correctement étiquetés ;
– reproduire l’étiquetage en cas de fractionnement des
emballages.
Suite au stockage des pots avec les individus collectés, triés ou déterminés,
il est nécessaire de vérifier le niveau d’alcool au moins tous les 2 ans. L’alcool
risque de s’évaporer et d’entraîner le séchage des individus. Un individu ayant
complètement séché devient rigide et cassant, et ne sera plus manipulable.
les cahiers rnf
44
Merodon pruni (Rossi, 1790)
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4545
Partie 3
L’analyse
3.1 Préparation et compréhension des données pour l’analyse 47
3.2 Interprétation de l’analyse 50
3.3 Analyse par utilisation de Syrph the Net Interactive 51
les cahiers rnf
46
les cahiers rnf
4747
3. L’analyse
L’analyse Syrph the Net demande de la réflexion et de la rigueur dans son
exécution. La première étape consiste à préparer les données qui permettront
la production du fichier d’analyse par automatisation des calculs sur une
application adaptée appelée Syrph the Net Interactive ou StNI : création de la
liste « régionale » des espèces de syrphes, de la liste des espèces observées, et
de la liste des espèces prédites.
L’application StNI est disponible sur simple demande auprès de l’AGIS (Ateliers
du groupement inter-réseaux Syrphe) à Réserves Naturelles de France. Elle a été
développée par Roland Jamault (société GeoEco). Un simple runtime Access
suffit pour faire fonctionner l’application sous Windows. Nous recommandons
d’utiliser le runtime Microsoft Access 2013.
Par ailleurs, il est indispensable d’installer le pack LibreOffice (gratuit) sur
l’ordinateur utilisé, le fichier de sortie du logiciel StNI ne s’ouvrant qu’avec
celui-ci. Il est ensuite possible d’utiliser le fichier sous Microsoft Office.
https://fr.libreoffice.org/download/libreoffice-stable/.
3.1 Préparation et compréhension des données pour l’analyse
Cette partie détaille d’une part, les données à préparer avant analyse, et d’autre
part, le déroulement de l’analyse et les calculs réalisés lors de l’analyse StN.
3.1.1 Création de la liste « régionale »
La création de la liste « régionale » est une étape préalable indispensable.
Cette liste couvre le département du site diagnostiqué et les départements
limitrophes dans la mesure où cela a un sens écologique et climatique. Pour
les zones frontalières, cela nécessite d’aller rechercher dans les départements,
cantons, ou régions limitrophes, les données existantes.
On estime à 200 le nombre minimum d’espèces permettant de constituer une
liste « régionale ». Cette liste regroupe des espèces de milieux très différents
(littoral, forestier, plaine, etc.), le milieu dans lequel se déroule l’étude
important peu.
les cahiers rnf
48
Pour constituer cette liste, on utilise les ressources à disposition localement.
Ainsi une ou plusieurs sources peuvent être utilisées en fonction des
informations qu’elles proposent :
le volume 100 de Syrph the Net Publications (Speight et al., 2018) ;
la bibliographie locale ;
les réseaux entomologiques : entomologistes, associations, et muséums
régionaux ;
les bases de données naturalistes régionales ou nationales (avec les
précautions d’usage sur la validation des données).
Un point de vigilance est soulevé sur la prise en compte ou non des espèces
anciennement citées. Dans l’idéal, leur présence dans la liste permet de mettre
en évidence la dimension historique des dégradations faites aux écosystèmes
et à leur fonctionnement. Néanmoins il faudra s’attacher à ce que les données
soient valides. On préférera des données anciennes issues de collections
consultables plutôt que des données issues d’articles anciens non vérifiables.
Cela reste toutefois à l’appréciation de chacun.
3.1.2 Création de la liste des espèces observées sur le site
Les espèces observées correspondent à celles piégées par les tentes Malaise,
mais également capturées par la chasse à vue ou tout autre moyen de capture.
Il s’agit de sélectionner et reporter chaque espèce une seule fois par tente
Malaise, la fréquence de collecte ou le nombre d’individus déterminés n’étant
pas utilisé dans l’analyse.
3.1.3 Établissement de la liste des espèces prédites pour chaque habitat
La liste des espèces prédites est déterminée au travers de deux filtres
(Tableau 7).
Le premier est celui des habitats, en utilisant la codification des espèces pour
les habitats. Les espèces prédites par le modèle sont :
les espèces codées « 2 » et « 3 » dans la base de données pour les habitats
considérés : ces espèces utilisant préférentiellement et normalement
l’habitat ;
les espèces codées « 1 », pour ces habitats, à condition qu’elles soient
codées également « 1 » dans l’un des habitats supplémentaires inventoriés
pour cet habitat dans l’inventaire des habitats (cf. 2.3).
Dans cet exemple (Tableau 7), l’inventaire des habitats a relevé une Chênaie
thermophile, comme habitat, code 1111, avec un fossé de drainage, comme
habitat supplémentaire, code 734 f. Si on suit la logique de prédiction :
Chalcosyrphus femoratus est prédit car codé « 2 » pour l’habitat
Chalcosyrphus eunotus est codé car prédit « 1 » à la fois pour l’habitat et
l’habitat supplémentaire ;
Chalcosyrphus nemorum n’est pas prédit car bien qu’il soit codé « 1 » pour
l’habitat, il ne l’est pas pour l’habitat supplémentaire.
Le second filtre est celui de la liste « régionale » des espèces. Ce filtre adapte
la prédiction à la zone biogéographique où se situe l’étude et permet de ne
conserver que les espèces qui ont été ou sont présentes dans la « région ».
Évidemment, si au cours de l’étude une espèce est observée et qu’elle ne
figure pas dans la liste régionale, elle l’intègre de fait.
les cahiers rnf
49
Tableau 7 : extrait de la base de données StN (Speight et al., 2016a)
(Speight et al., 2016a)
Habitats supplé-
mentaires fores-
tiers
Macrohabitats
forestiers Forêts de feuillus
Fossé de drainage
en forêt (gén.) (gén.) Sèches Chênaie thermophile
(gén.) (gén.) Sur-mature mature
Espèces \ Catégories No. : 734 f 1 11 111 1111 11111 11112
Chalcosyrphus eunotus Loew,
1873 1 3 3 1
Chalcosyrphus femoratus (L.),
1758 3 2
Chalcosyrphus jacobsoni
(Stackelberg), 1921 3 2
Chalcosyrphus nemorum
(Fabricius), 1805 3 1 1 1 1 1
Chalcosyrphus nigripes
(Zetterstedt), 1838 3 3
Au travers de ces deux filtres, la liste des espèces prédites pour le site est
composée, agglomérant les listes de chacun des habitats étudiés.
La liste des espèces observées et la liste des espèces prédites sont croisées
pour former 3 nouvelles listes d’espèces : les espèces au « rendez-vous », les
espèces « inattendues » et les espèces « manquantes ».
3.1.4 Production des 3 listes d’espèces
Les espèces prédites avec les espèces observées sont croisées pour obtenir les
trois listes présentées :
la liste des espèces au « rendez-vous » : espèces prédites par le modèle
et observées ;
la liste des espèces « inattendues » : espèces non prédites mais observées ;
la liste des espèces « manquantes » : espèces prédites mais non observées.
Ces listes d’espèces sont les piliers de l’analyse car elles assurent le rôle de
support pour les calculs et l’interprétation.
3.1.5 Utilisation et interprétation des trois listes d’espèces
L’analyse StN s’appuie sur 2 indicateurs fondamentaux :
1. L’indicateur d’intégrité écologique (IE)
Cet indicateur représente l’intégrité écologique du milieu ou de l’habitat. Le
principe est de comparer la situation observée à une situation idéale :
Intégrité écologique (IE) = sp. au rendez-vous / sp. prédites (en %)
L’interprétation se base sur un barème liant le chiffre obtenu par calcul à des
classes définies par les auteurs suite à leurs expériences (Tableau 8). L’indice
d’IE renseigne sur l’état de l’habitat. Cette note est tout d’abord calculée
globalement sur le site, puis pour chaque habitat. Ces valeurs pourront mettre
en évidence des défaillances et les points forts du site global et des habitats.
les cahiers rnf
50
Tableau 8 : classes de valeurs de la qualité du modèle et de l’intégrité écologique
Classe Intégrité / qualité du modèle
[0-20 %] Très faible
[21-40 %] Faible
[41-50 %] Moyenne
[51-75 %] Bonne
[76-85 %] Très bonne
[86-100 %] Excellente
On exprime également comme pour les habitats, des intégrités écologiques
pour les traits de vie des syrphes (larves, pupes et adultes) mais aussi pour les
caractéristiques des micro-habitats larvaires.
Cet indice permettra de mettre en évidence les dysfonctionnements présents
sur le site qui seront identifiés et analysés par la suite avec les traits de vie des
espèces manquantes.
2. L’indice de qualité du modèle
Cet indice reflète la qualité du modèle de prédiction :
Qualité du modèle = sp. au rendez-vous / sp. observées (en %)
Cette qualité du modèle est calculée pour la globalité du site (tous les
habitats). Il permet d’évaluer la qualité de la description des habitats et
habitats supplémentaires.
3.2 Interprétation de l’analyse
3.2.1 Interprétation de l’indice de qualité du modèle
La lecture des résultats commence par les résultats globaux du site. La
première valeur à prendre en compte, la qualité du modèle, est garante de la
robustesse et la validité des résultats et de la prédiction. Cet indicateur doit
être clairement expliqué avant d’interpréter les résultats.
Dans le cas où son indice est faible, il faut l’expliquer. On analyse le cortège
inattendu avec des habitats présents à proximité ou que l’on a initialement
volontairement exclus de l’analyse ne s’intéressant qu’à un seul habitat. Une
relance du modèle de prédiction avec l’ensemble des habitats permettra de
vérifier la qualité de la description, même si on ne se focalise que sur un ou
quelques habitats. Si on ne parvient pas expliquer la faible qualité du modèle,
la prise de contact avec l’auteur de la base de données est indispensable.
3.2.2 Interprétation des indices d’intégrité écologique (IE)
L’IE est une représentation de l’état de fonctionnement de l’habitat. Il
permet de distinguer, par sa valeur, les habitats présentant des défaillances
de fonctionnement. Plus la valeur de l’indice est basse, plus l’habitat est
dégradé, et plus les dysfonctionnements sont importants. L’IE globale du site
peut être considérée à titre informatif mais, au-delà de la simple valeur, il faut
entreprendre une analyse plus détaillée. Les traits de vie des syrphes et les
caractéristiques des micro-habitats larvaires ont aussi une valeur d’IE (nombre
d’espèces au rendez-vous / nombre d’espèces prédites). Ces derniers servent à
l’identification des dysfonctionnements sur le site et dans les habitats.
les cahiers rnf
51
L’IE est une notation facilitant la lecture des résultats. Son barème
d’interprétation est arbitraire. Les indices d’intégrité écologique peuvent être
comparés entre habitats différents du site, pour cibler les habitats les plus
dégradés.
Des valeurs seuils sont proposées pour évaluer l’IE (Tableau 8). Néanmoins
on ne poursuit pas l’analyse sur l’identification des dysfonctionnements
uniquement à partir d’un seuil défini. L’opérateur peut choisir, en fonction
de la distribution des valeurs des différents habitats ou par souci d’analyse
approfondie, d’analyser tous les habitats quelle que soit leur valeur d’IE.
3.2.3 Interprétation sur les traits de vie et caractéristiques des micro-
habitats larvaires
Cette interprétation est basée principalement sur l’assemblage d’espèces
manquantes, en correspondance avec la base de données StN. On exprime,
comme pour les habitats, une valeur d’IE pour chaque trait de vie de ces
espèces, ainsi que pour les caractéristiques des micro-habitats larvaires.
L’interprétation sur les traits de vie des espèces manquantes se réalise par
habitat pour l’ensemble des habitats. Les traits ou caractéristiques présentant
les intégrités les plus faibles seront ceux qui sont dégradés. Leur recoupement
permet d’interpréter les dysfonctionnements des habitats ou plus globalement
du site.
Il est possible d’aborder l’analyse en commençant par les relations trophiques
des espèces manquantes ainsi que les milieux qu’elles investissent à l’état
larvaire. Le codage des espèces manquantes est également à prendre en
compte dans l’interprétation. Il faut regrouper les espèces manquantes en
groupes fonctionnels pour expliquer plus simplement les dysfonctionnements.
Une attention particulière sera portée aux indices calculés sur les micro-
habitats larvaires basés sur un faible nombre d’individus prédits. Lorsque ce
cas de figure se présente, les résultats sont peu robustes pour l’interprétation.
En effet, la présence ou l’absence d’une espèce peut changer fortement la
valeur de l’indice.
L’identification des dysfonctionnements permet d’étudier les causes de la
dégradation et d’établir un diagnostic adapté de la gestion présente et à venir.
Pour analyser complètement et finement l’ensemble des résultats et aller
plus loin, la participation aux formations de spécialistes sur les syrphes ou
celles de l’Office français de la biodiversité est recommandée. Il est également
possible de consulter de la bibliographie existante sur le sujet et de se
reporter à d’autres publications d’études StN. Une prise de contact avec l’AGIS
de RNF vous permettra aisément d’avoir accès à un échantillons conséquents
de rapports. Les éditions StN publient régulièrement des rapports d’études
utilisant cette méthode.
3.3 Analyse par utilisation de Syrph the Net Interactive
3.3.1 Présentation du logiciel
Développé par GéoEco, le logiciel est géré par l’Atelier du groupe inter-réseaux
sur les Syrphes (AGIS) (financé par Réserves Naturelles de France et les Amis
de la Réserve naturelle du Lac de Remoray). L’outil StNI permet de référencer
le site d’étude, les tentes Malaise, pour y ajouter la liste « régionale » des
les cahiers rnf
52
espèces, la liste des espèces observées et l’inventaire des habitats. Après la
saisie des données, il calcule les indices d’intégrité écologique et de qualité du
modèle, pour le site et pour les habitats.
StNI est un outil permettant un gain de temps considérable sur les calculs et
l’utilisation des données. Il est cependant essentiel d’intégrer les différentes
notions abordées dans les parties précédentes du guide pour bien comprendre
l’analyse réalisée par le logiciel. Ce logiciel est disponible sur demande à
Réserves Naturelles de France ou auprès des membres de l’AGIS.
3.3.2 Fonctionnement
L’installation et l’utilisation du logiciel StNI sont expliquées et illustrées dans
un document mis en annexe à la fin de ce guide (Annexe 1).
3.3.3 Résultat de l’analyse par le logiciel
Le logiciel StNI calcule les indicateurs d’évaluation que sont l’intégrité
écologique et l’indice de qualité du modèle. Il réalise automatiquement les
calculs cités dans les parties précédentes, en ajoutant les traits de vie et
caractéristiques de micro-habitats larvaires des espèces prédites.
Le fichier contient plusieurs feuilles de calcul : le premier onglet reprend une
brève présentation du site, le second concerne l’analyse totale du site. Suivent
les onglets d’analyse par habitat codé, celui des espèces menacées et enfin
celui des espèces inattendues.
Dans chaque onglet habitat, les valeurs d’IE sont calculées pour l’habitat, mais
également pour chaque trait de vie et caractéristiques des micro-habitats
larvaires. L’indice de qualité du modèle est également noté pour l’habitat. Au
sein de chaque onglet habitat, les listes des espèces prédites, au rendez-vous,
manquantes, et inattendues sont détaillées. Sont ajoutés les traits de vie de
ces espèces pour les larves, les pupes et les adultes et les caractéristiques des
micro-habitats larvaires.
les cahiers rnf
53
les cahiers rnf
54
Platycheirus albimanus (Fabricius, 1781)
les cahiers rnf
5555
Partie 4
Exemples d’études Syrph the Net
RNN de Chalmessin 56
RNN de la Tourbière des Dauges 62
RNN de la Tourbière de Machais 66
RNN de la Forêt de la Massane 70
RNN du Marais Vernier 74
RNN du lac de Remoray 80
Saint-Mars-la-Brière 86
RNN du ravin de Valbois 92
Vallon du Vivier 98
RNR de l’Escaut rivière 102
les cahiers rnf
56
RNN de Chalmessin
Localisation :
Région : Grand Est
Commune(s) : Vals-des-Tilles (52)
Statut(s) juridique(s) : RNN
Organisme gestionnaire : Conservatoire d’espaces naturels de Champagne-Ardenne
Surface : 123,65 ha
http://www.reserves-naturelles.org/chalmessin
Objectifs
Évaluer l’évolution du degré de naturalité des espaces forestiers de la RNN (ici état initial)
Localisation des tentes
L’objectif principal de l’étude étant de définir l’intégrité écologique des habitats forestiers, le choix de
l’implantation a été orienté vers les secteurs paraissant les plus favorables pour intercepter les espèces
concernées, en l’occurrence les lisières du marais. En effet, la forêt occupant essentiellement les pentes
d’une combe dont le fond est occupé par le marais, et le marais étant un des principaux milieux ouverts,
il est probable que nombre d’espèces parcourent ses lisières. En 2016, deux tentes ont été posées sur la
petite pelouse sèche occupant le plateau afin de compléter l’échantillonnage.
Si l’on considère que le rayon d’action d’une tente Malaise est de 200-250 m (Martin Speight, comm. pers.),
on peut estimer que les individus capturés au cours de ces trois années proviennent quasi exclusivement
des milieux inclus dans la RNN, ce qui facilite l’analyse et donne plus de poids aux résultats obtenus.
les cahiers rnf
57
Durée du piégeage
2 tentes Malaise par an pendant 3 années consécutives (2015, 2016, 2017), de fin mars à fin septembre avec
relevé tous les 15 jours.
Inventaire des habitats
Réalisé à partir des habitats phytosociologiques décrits par le gestionnaire dans le plan de gestion. 7
macro-habitats ont été décrits au sein de la RNN de Chalmessin (voir carte) ; les habitats supplémentaires
« Sources » (code StN : 731w/732w et 731f/732f) et « Berges de ruisseau » (code StN : 7442w et 7442f) ont
été associés à la Frênaie et au Bas-marais.
Remarque : La question s’est posée d’intégrer comme habitats supplémentaires des forêts, les « Clairières
ou bords de piste à courte strate herbacée » (234f). Il a été fait le choix de ne pas le prendre en compte car
cela correspond essentiellement, sur ce site, à des lignes de parcelles (donc liées à l’exploitation forestière
et non à l’habitat « naturel »). Cela ne fait donc pas partie des éléments que l’on cherche à évaluer en terme
d’intégrité écologique des habitats forestiers.
Liste régionale
Exercice compliqué que d’établir la liste des espèces
potentiellement présentes sur un territoire totalement
méconnu en ce qui concerne les Syrphidés : ni liste haut-
marnaise, ni liste champardennaise, 5 espèces en Haute-
Marne répertoriées dans l’INPN, aucune publication sur les
Syrphes de Haute-Marne ou de Champagne-Ardenne.
Donc pour constituer cette liste, ont été compilées les
quelques données de Haute-Marne ainsi que les données des
départements et/ou régions limitrophes (Côte d’Or, Lorraine,
Haute-Saône). Pour les analyses, la liste « régionale » (= filtre
géographique) contient 322 espèces.
Remarque : Cette zone géographique étant large (8
départements), il est probable que certaines espèces
qui ressortent comme manquantes dans l’analyse soient
logiquement manquantes (car jamais présentes sur le Plateau
de Langres) ; mais seule l’amélioration des connaissances sur
ce territoire permettra d’affiner cette liste.
Analyse
Globalement, la forêt de la RNN de Chalmessin a une intégrité écologique moyenne (42 % soit 53 espèces
au rdv sur 126 prédites). Néanmoins les habitats forestiers dominants (hêtraies avec 77 ha et chênaie-
charmaie avec 27 ha) présentent une bonne intégrité écologique (respectivement 58% et 53 %). C’est la
frênaie des bords de ruisselets et des sources (10 ha) qui tire la « note » vers le bas avec une faible intégrité
écologique (36 %).
0% 20% 40% 60% 80% 100%
Frênaie
Chênaie-charmaie
Hêtraie
Forêt globale 53/126
31/53
36/68
24/66
42%
58%
53%
36%
Intégrité écologique des macro-habitats forestiers (rdv/prédites)
Intégrité écologique de la hêtraie (rdv/prédites)
0% 20% 40% 60% 80% 100%
Stade sur-mature
Stade mature
Stade jeune
Hêtraie 31/53
12/17
20/29
28/48
58%
71%
69%
58%
Le rapport d’étude détaille l’analyse par habitat forestier (en distinguant stades jeunes, stades matures et
stades surmatures).
0% 20% 40% 60% 80% 100%
Tombés sans écorce
Tombés avec écorce
Tombés (gen.)
Debouts
Gros bois morts (gen.)
Ecorce décollée
Coulées de sève/lésions
Dégâts d'insectes
Caries
Cavités de troncs
Arbres surmatures sénescents (gen.)
Intégrité écologique des micro-habitats indicateurs de la maturité forestière
15/41
12/25
5/9
7/20
37%
48%
29%
56%
7/24
8/17
3/10
0/2
5/9
5/8
3/4
0%
35%
47%
30%
56%
63%
75%
ARBRES SURMATURES SENESCENTS
GROS BOIS MORTS
Remarque sur la maturité de la forêt de la RNN de Chalmessin : Au moment de la description des habitats
s’est posée la question de considérer les habitats forestiers avec leurs trois stades de maturité – jeune, mature,
sur-mature – ou uniquement avec les deux premiers stades. L’analyse StN a donc été testée avec ces deux
scénarii. Résultat, sans les stades sur-matures, la qualité de description des habitats est de 66 %, alors qu’avec
les stades sur-matures, elle est de 76 %. Ce qui veut dire que, globalement, la forêt de la RNN présente des
stades sur-matures, mais n’a pas atteint son optimal en terme de maturité. Focus sur les espèces saproxyliques :
Dans le cadre de ce diagnostic qui vise principalement à évaluer la maturité des habitats forestiers de la
RNN de Chalmessin, la guilde des espèces saproxyliques est l’indicateur privilégié.
Compte-tenu des habitats présents, 43 espèces saproxyliques étaient attendues. Parmi elles, 16 espèces
ont été au rendez-vous, soit 37 %. Il manque donc 27 espèces, ce qui explique que les stades forestiers
sur-matures aient une intégrité écologique moindre que les autres stades.
les cahiers rnf
58
les cahiers rnf
59
L’analyse StN (voir graphique ci-dessus) permet de mettre en évidence à quels types de micro-habitats sont
liées les espèces saproxyliques manquantes. Au sein de la forêt de la RNN de Chalmessin (tous habitats
confondus), il ressort qu’il y a un manque de gros et très gros bois sénescents, présentant en particulier
des caries, cavités de tronc, coulées de sève et lésions, ainsi qu’un déficit de gros bois mort debout.
Les constats qui ressortent de l’analyse StN sont corrélés avec les résultats du PSDRF (Protocole de Suivi
Dendrométriques des Réserves Forestières) notamment :
Une part assez faible de très gros bois (les plus riches en dendromicrohabitats – ce qui est aussi mis
en évidence par le PSDRF) ; il s’agit en effet de peuplements relativement jeunes, issus de taillis sous
futaie, (sur)exploités dans le passé pour le charbon de bois.
Des volumes de gros bois mort au sol relativement important (près de 10 m3/ha en moyenne à
l’échelle de la RNN, et jusqu’à 20 m3/ha sur les 47 ha en libre évolution).
Des volumes de gros bois mort debout moindre que celui tombé.
Contribution à la connaissance faunistique
Sur les 3 années de piégeage, 98 taxons ont été dénombrés (dont 17 espèces saproxyliques), améliorant
substantiellement la connaissance du site, mais aussi du département et de la région.
Principales conclusions et enseignements
Globalement, il ressort que la Hêtraie et la Chênaie-charmaie, habitats qui représentent plus de
90 % des espaces forestiers de la RNN, sont en bonne intégrité écologique mais n’ont pas atteint
leur optimum en terme de maturité. L’analyse StN montre en effet que les stades matures et surtout
surmatures présentent la moins bonne intégrité écologique, avec en particulier des manques au niveau
des arbres surmatures sénescents et du gros bois mort debout.
Il est intéressant de noter que ces résultats sont en parfaite concordance avec d’autres études menées
sur la RNN, notamment le suivi dendrométrique avec le protocole appelé PSDRF et le suivi de l’avifaune
nicheuse. Il paraît essentiel que l’ensemble des suivis mis en place sur les forêts du site, et évoqués dans
l’introduction de ce document, perdurent dans le temps. A terme, cela devrait permettre d’établir des
corrélations entre les divers paramètres suivis : volumes de bois morts (avec distinction au sol/debout,
gros bois ou non), part de gros bois et très gros bois, densité par hectare de tel ou tel dendromicrohabitats,
intégrité écologique « StN »…etc.
La courbe de richesse cumulée des espèces capturées de 2015 à 2017, laisse penser que 3 années consécutives
de piégeage est un minimum pour réaliser ce diagnostic StN (même s’il faut rappeler qu’il s’agit d’un
échantillonnage, et que l’on ne vise pas l’exhaustivité). Il est même probable qu’une nouvelle année de piégeage
apporterait de nouvelles espèces (une courbe d’accumulation basée sur le nombre d’espèces observées et le
nombre d’individus capturés permet d’extrapoler et montre qu’en capturant encore 2 700 individus – soit
autant que durant les 3 années d’étude –, 20 espèces supplémentaires pourraient être observées ; ce calcul a
été réalisé par Cédric Vanappelghem). Néanmoins, si l’on regarde les espèces saproxyliques, donc celles qui
sont les meilleures indicatrices quant à la maturité des forêts, une seule nouvelle espèce a été observée en
2017 ; les analyses qui suivent peuvent donc être considérées comme représentatives.
0
20
40
60
80
100
120
2015 2016 2017
Courbe de richesse cumulée des Syrphes
capturés de 2015 à 2017
Nombre d'espèces total Nombre de saproxyliques
les cahiers rnf
60
Il semble intéressant de signaler que si 3 tentes ont capturé moins d’espèces (TM2, TM4 et TM5) – car
situées sur des secteurs globalement moins favorables aux butineurs (en particulier TM2 et TM5) – chacune
a permis de capturer, par année, des espèces que l’autre n’a pas piégé. Sans grande surprise, cela justifie la
nécessité d’installer un « binôme » de tente Malaise par milieu échantillonné.
Temps et moyens de chaque étape
Temps total pour les 3 années d’étude : 56 jours
Dont :
Terrain : 12 jours (relevés et mise en place/rangement des Tentes Malaise)
Tri et détermination : 37 jours pour les 2700 spécimens de syrphes capturés + sous-traitance à la Réserve naturelle
du Lac de Remoray pour vérifier et confirmer toutes les déterminations (6 jours en 2016 et 6 jours en 2017)
Analyse et rédaction du rapport : 7 jours
Remarques : Opérateur novice ayant bénéficié de la formation ATEN/AFB (3 sessions) avant et pendant la
réalisation de cette étude. Une partie de la détermination (données 2015) et de l’analyse a été réalisée lors
de ces formations (temps inclus dans les décomptes ci-dessus).
Temps de tri et détermination inégal selon les années car grosses différences du nombre d’individus
capturés : en 2015, 650 individus pour 61 espèces, en 2016, 1700 individus pour 54 espèces et en 2017, 370
individus pour 54 espèces.
Et si c’était à refaire
Reconduction à l’identique
Contact de l’auteur de la fiche
Romaric LECONTE (chargé de missions)
rleconte@cen-champagne-ardenne.org
Référence du rapport complet
LECONTE R., 2017 – Diagnostic écologique des habitats forestiers de la Réserve naturelle nationale
de Chalmessin (Haute-Marne) par la méthode Syrph the Net – Conservatoire d’espaces naturels de
Champagne-Ardenne, 28 pages + annexes
Bibliographie issue de l’étude
LECONTE R., 2018 – Contribution à la connaissance des Syrphes (Diptera, Syrphidae) de Haute-Marne –
Bulletin de la Société de Sciences Naturelles et d’Archéologie de Haute-Marne, n°17, p. 37-40
les cahiers rnf
6161
les cahiers rnf
62
RNN de la Tourbière des Dauges
Localisation :
Région : Nouvelle Aquitaine
Commune(s) : Saint-Léger-la-Montagne (87340)
Statut(s) juridique(s) : RNN
Organisme gestionnaire : Conservatoire d’espaces naturels de Nouvelle Aquitaine
Surface : 199,5 ha
http://www.reserves-naturelles.org/tourbiere-des-dauges
Objectifs
1. Évaluer la qualité écologique et apporter de nouveaux éléments sur l’état de conservation des habitats
de la R éserve naturelle, via une méthodologie normée et reproductible.
2. Établir un premier inventaire des syrphes de la RNN.
3. Contribuer à l’amélioration des connaissances (régionales surtout) des syrphes.
Localisation des tentes
Cartographie des habitats
(typologie Eunis) et
localisation des 12 tentes
Malaise
les cahiers rnf
63
Durée du piégeage
De mars à octobre, durant trois années (2013 à 2015), douze tentes Malaise ont été placées dans différents
habitats de la Réserve naturelle (2 dans chaque habitat). Toutes les 2 semaines, les flacons d’échantillonnage,
ont été systématiquement récoltés.
Inventaire des habitats
Réalisé à partir des habitats « Eunis » déjà définis par le gestionnaire (plan de gestion), 17 macro-habitats
sont identifiés.
Liste régionale
Difficile d’obtenir ce genre de données dans une région délaissée par les diptérophiles. Cependant, en
condensant les résultats obtenus sur la Tourbière des Dauges, ainsi que ceux récoltées par Martin SPEIGHT
sur les départements de la Haute-Vienne, la Creuse, la Corrèze et le Puy de Dôme, on obtient une liste de
203 espèces de syrphes.
Analyse globale
0% 50% 100%
GLOBAL RN
Châtaigneraie
Chênaie acidophile
Hêtraie
Bétulaie
Pin sylvestre
Sapin, Epicea, Mélèze
Fourrés d'ajoncs
Lande tourbeuse
Lande à bruyère
Prairie oligitrophe de montagne non amendée
Prairie humide de plaine non amendée
Gazon à Nard raide
Saulaie
Tourbière haute
Tourbière de couverture
Bas marais acide
Tourbière de transition
Intégrités écologiques des 17 habitats de la RNN (RDV/prédite)
Le nombre d’espèces observées est de 115 sur les 2905 syrphes identifiés. Cela représente 57% de la liste
régionale et 22% de la faune française métropolitaine.
Le peu d’espèces inattendues (18) témoigne, d’une bonne description des habitats et de la très bonne
représentativité des habitats de la RNN dans le paysage environnant.
26 espèces sont menacées ou en déclin à différentes échelles (Europe, France et Suisse). La pauvreté des
données locales rend compliquée l’analyse patrimoniale.
Analyse écologique : les milieux fermés
L’intégrité écologique des milieux forestiers des Dauges est bonne (60%), 109 espèces étaient prédites et
65 sont au rendez-vous.
La hêtraie de 25 hectares, qui d’un point de vue paysager « naturaliste » semble intéressante (n’ayant pas
subi de grosses coupes récentes), devrait accueillir 69 espèces de Syrphes. 27 manquent à l’appel.
La majeure partie de cette guilde voit ses larves se développer au sein de végétaux.
les cahiers rnf
64
En termes de déficit de milieux de développement larvaire, concernant d’importants contingents d’espèces,
on peut mettre en exergue 2 éléments :
8 espèces traduisent un déficit lié aux arbres sénescents et dans une moindre importance au gros bois
mort au sol (contrairement au bois mort debout). Une partie des larves liées aux caries, dégâts d’insectes
et coulées de sèves et/ou lésions sont également manquantes.
D’autres espèces sont également absentes, en étroite relation avec la végétation herbacée : la litière
herbacée, dans les plantes de cette litière, dans leurs feuilles ou leurs tiges, dans la zone racinaire de ces
plantes, dans les bulbes ou tubercules. Par son absence, un assemblage de 19 espèces semble traduire
principalement un déficit de litière (forestière). Les hêtraies acidiphiles atlantiques à Houx et chênaies-
hêtraies acidiphiles à Houx rencontrées dans la RNN de la tourbière des Dauges relèvent toutes les deux
de la même association phytosociologique, Teucrio scorodoniae-Fagetum sylvaticae Billy, ex Renaux,
Le Hénaff, Choisnet & Seytre 2015 rattachée à la sous-alliance de l’Ilici aquifolii-Quercenion petraeae
Rameau in Bardat et al. 2004 prov.
Ces forêts sont naturellement très pauvres en espèces herbacées en raison du substrat très acide
(granite) sur lesquelles elles se développent (Teucrium scorodonia, Vaccinium myrtillus, Avenella flexuosa,
Melampyrum pratense). La plupart des espèces herbacées, hôtes de larves de Syrphidae, manquent donc
naturellement dans ce type d’habitat. Il faudrait distinguer dans le protocole « Syrph the Net » les hêtraies-
chênaies acidiphiles, des hêtraies-chênaies acidiclinophiles ou neutroclinophiles. Ces dernières ayant une
diversité d’espèces végétales sans commune mesure avec les boisements acidiphiles, évaluée à plus de 30
espèces par relevé. Fort de ces constats, on peut ainsi faire passer l’intégrité écologique de la hêtraie des
Dauges, de bonne à très bonne !
Concernant la chênaie acidophile, il est fait le même constat que pour la hêtraie, avec un delta moindre,
mais surtout un déficit lié à la vieillesse de la forêt, qui est en Limousin, le résultat d’une déprise agricole
de l’après deuxième guerre mondiale. La forêt est ici jeune et dense, les arbres luttent par une croissance
verticale et non pas horizontale, limitant de fait les cavités, trouées et autres caries.
Concernant les espèces liées aux résineux avec 59% d’intégrité écologique (Abies/Larix/Picea), 2
espèces manquantes indiquent clairement un manque de sénescence et de bois mort. Par contre 9 autres
indiquent par leur absence des carences dans la strate arbustive (mature) et du sous-étage. Ce constat est
symptomatique des peuplements réguliers.
Les boulaies et châtaigneraies sont en pleine forme. Ces dernières sont bien présentes sur le versant sud
du bassin versant avec régulièrement de gros fûts ; chaque famille se devait jadis de posséder et chérir son
verger de châtaigniers pour la nourriture hivernale.
Contribution à la connaissance faunistique
Cette étude aura permis d’inventorier 115 espèces de syrphes nouvelles pour la Réserve naturelle de la
Tourbière des Dauges (dont 4 seulement au filet entomologique). C’est le premier travail d’envergure
concernant ces insectes sur le département de la Haute-Vienne et limitrophes.
Principales conclusions et enseignements (hors forêt)
Les milieux ouverts ont une intégrité écologique de 67 %, plus importante que celle des milieux
forestiers. Dans l’ensemble, l’état de conservation varie de bon à très bon. Quelques espèces manquent
toutefois au sein des zones humides : celles qui sont faiblement tolérantes à l’inondation. Le système
d’approvisionnement en eau de la tourbière, en majorité souterrain, provoque vraisemblablement des
battements de nappe trop conséquents pour ces espèces.
Concernant les milieux naturels ouverts, comme les landes sèches et tourbeuses, la tourbière et le bas
marais acide, les résultats de l’étude montrent un état de santé très satisfaisant.
Il est heureux de constater que les travaux de restauration entrepris sur ces milieux ouverts par le CEN de
Nouvelle Aquitaine, depuis bientôt 20 ans, ont porté leurs fruits.
les cahiers rnf
65
Poursuites données à l’évaluation
Reconduction du protocole à n+10
Nouvelles campagne de piégeage hors RNN sur des sites gérés par le Conservatoire.
Détermination (interne et spécialistes) des autres insectes et araignées capturés avec les syrphes.
Temps et moyens de chaque étape (110j)
Terrain : 20 jours (relevés et mise en place/rangement des TM + prospections filet)
Tri : 10 jours (Stagiaire et ressources internes)
Déterminations : 40 jours pour les 2 905 spécimens de syrphes (ressources internes novices) et aides
ponctuelles de M.C.D SPEIGHT et B. TISSOT pour les espèces les plus difficiles.
Analyse et rédaction du rapport : 40 jours (Ressources internes et relecture par J. CLAUDE).
Et si c’était à refaire
Reconduction à l’identique, en déplaçant légèrement les tentes qui ont peu piégé.
Contact de l’auteur de la fiche
Philippe DUREPAIRE (conservateur) :
rndauges@conservatoirelimousin.com
Référence du rapport complet
DUREPAIRE P., 2017. Diagnostics écologiques des habitats de la Réserve naturelle nationale de la tourbière
des Dauges (87), par la méthode « Syrph the net », Conservatoire d’espaces naturels du Limousin, 29p et
annexes.
Bibliographie issue de l’étude
Philippe DUREPAIRE, « Diagnostic écologique des habitats dans la Réserve naturelle de la Tourbière des
Dauges (Haute-Vienne) par la méthode « Syrph the Net » », Annales Scientifiques du Limousin, Tome 27,
2018.
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RNN de la Tourbière de Machais
Localisation :
Région : Lorraine
Commune(s) : La Bresse (88)
Statut(s) juridique(s) : RNN, APPB, site classé
Organisme gestionnaire : Parc Naturel Régional des ballons des Vosges : http://www.parc-ballons-
vosges.fr/
Surface : 144,73 ha
http://www.reserves-naturelles.org/tourbiere-de-machais
Objectifs
1. Etablir un inventaire initial des syrphes de la RNN,
2. Evaluer la qualité écologique et apporter de nouveaux éléments sur l’état de conservation des habitats
de la Réserve naturelle,
3. Comparer les îlots de sénescence avec le reste de la forêt exploitée (état des lieux 0),
4. Mettre en place un protocole de suivi sur le long terme.
Localisation des tentes
TOURBIERE DE MACHAIS
Cartographie des habitats (typologie StN) et localisation des 2 tentes Malaise
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Durée du piégeage
Au niveau de l’APPB et au niveau de l’îlot de sénescence, deux pièges par tentes Malaise ont été placés du
29/04/2009 au 20/09/2009.
Inventaire des habitats
Réalisé à partir de la cartographie des habitats du Conservatoire des Sites Lorrains (2007),
9 macro-habitats sont présents.
Liste régionale
La liste régionale retenue correspond à la région administrative de la Lorraine agrégée avec la liste d’Alsace
compte tenu de sa proximité géographique. La liste locale de référence atteint 297 espèces.
20
23
23
20
16
24
17
29
20
14/70
18/77
15/66
4/20
5/31
5/25
4/23
2/7
2/10
020 40 60 80 100
Humid fagus (gen.)
Mesophilous/calciphilous Picea (gen.)
Abies (gen.)
Betula/Pinus swamp (gen.)
Lowland unimproved grassland : humid, oligotrophic
Lowland unimproved grassland : humid,…
Fen carr
Transition mire
Raised bog
Analyse globale
Comparaison %
Expliquées (rdv/observées) 84 (27/32)
Intégrité écologique (rdv/prédites) 16 (27/166)
Inattendues (inatt./observées) 16 (5/32)
Manquantes (manquantes/prédites) 84 (139/166)
Analyse globale
Intégrités écologiques des 9 habitats de la RNN (RDV/prédite)
Le nombre d’espèces observées est très faible (32). Cela représente à peine 11 % de la liste régionale, et 6 %
de la faune syrphidologique française ! Le peu d’espèces inattendues (5) témoigne d’une bonne description
des habitats.
Aucune espèce n’est jugée comme patrimoniale sauf Brachyopa bicolor qui est en déclin à l’échelle
française selon les critères de StN 2010.
Analyse écologique
Le plan d’échantillonnage appliqué lors de cette étude s’avère insuffisant et biaisé. Cela explique que 139
espèces soient manquantes, sur les 166 prédites !
Le prérequis à minima pour réaliser un diagnostic complet avec la méthode StN est l’emploi de 2 tentes
Malaise (ce qui était le cas ici). Ces dernières doivent cependant être réparties dans un même macro-
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habitat et placées dans une zone suffisamment ensoleillée (grande clairière ou lisière forestière) pour
échantillonner correctement. Or, les 2 pièges utilisés ont été placés en secteur complètement ombragé. Le
faible nombre d’individus de syrphes capturés (397) et le nombre d’espèces identifiées (32) témoignent du
mauvais positionnement de ces pièges Malaise.
La tente Malaise «APPB» au début de la feuillaison des hêtres
Notons par ailleurs que la description des habitats n’est pas en cause : 5 espèces (16 % des espèces observées)
sont inattendues, ce qui est peu.
Les niveaux d’intégrité écologique des différents macro-habitats de la RNN n’ont donc aucune
signification. Ils sont le reflet d’un mauvais plan d’échantillonnage qui ne permet pas d’établir un
diagnostic écologique de la RNN de la tourbière de Machais.
Contribution à la connaissance et faunistique
Cette étude aura permis d’inventorier, au moment de sa réalisation (2009), 10 espèces nouvelles pour la
Lorraine. 6 d’entre elles ont été trouvées depuis dans d’autres sites environnants (Cheilosia rhynchops,
Chrysotoxum intermedium, Melangyna lasiophthalma, Meligramma cingulata, Parasyrphus macularis et
Platycheirus immaculatus).
La RNN de la tourbière de Machais reste cependant le seul site lorrain actuellement connu pour Brachyopa
bicolor, B. pilosa, B. scutellaris et Psilota anthracina. Notons aussi que Psilota anthracina est nouvelle pour
la liste locale de référence (Alsace et Lorraine).
Principales conclusions et enseignements
Très incomplète, cette étude ne répond pas aux objectifs de départ. L’expérience de ce plan d’échantillonnage
déficient renforce l’intérêt du présent guide technique, pour que ce type d’erreur ne soit pas réitéré dans
d’autres études.
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Ce travail aura cependant permis d’établir une liste partielle des syrphes de la RNN de la tourbière de
Machais. Les 166 espèces attendues et l’examen de l’écologie de chacune des 32 espèces observées
traduisent un fort potentiel du site, dans une région à forte capacité (297 espèces de syrphes).
La diversité des habitats présents (forestiers, humides, prairiaux), leur répartition en mosaïque et leur
typicité à l’échelle biogéographique constituent l’atout principal de la RNN de la tourbière de Machais. Les
assemblages caractéristiques et complexes d’espèces sont favorisés par ce type d’imbrication d’habitats
sur une faible superficie (145 ha) comme le montre d’autres études (RNN du lac de Remoray, RNN du ravin
de Valbois, Saint-Mars-la-Brière…). Autre atout important, l’ancienneté de l’état boisé est avérée.
Ces caractéristiques assurent donc une fonctionnalité potentiellement bonne à très bonne à l’échelle
de la RNN. Il conviendra de mettre en place à court terme une nouvelle étude, basée cette fois-ci
sur un protocole d’échantillonnage robuste, pour évaluer correctement la fonctionnalité et mesurer
correctement les fonctions de réservoir de biodiversité de ce site prestigieux.
Poursuites données à l’évaluation
La disposition des piégeages ne répondant pas aux objectifs de départ, 2 aspects ont été travaillés par la
nouvelle Conservatrice :
• communication dans le réseau des réserves naturelles et des conservatoires d’espaces naturels nationaux
de ce retour d’expérience à ne pas renouveler,
• définition d’une nouvelle stratégie d’échantillonnage des syrphes, dans le cadre du nouveau plan de
gestion, afin de répondre correctement aux objectifs de départ. N’étant pas réalisable avec la méthode
StN, l’objectif 3 (comparaison de l’îlot de sénescence avec le reste de la forêt) est abandonné.
Temps et moyens de chaque étape (33j)
Terrain : 2,5 jours (relevés et mise en place/rangement des Tentes Malaise)
Tri : 20 jours : 4 jours de ressource externe novice et 16 jours de sous-traitance
Déterminations : 6 jours : 4 jours pour les 387 spécimens de syrphes (ressources internes novices) et 2 jours
de sous-traitance
Analyse et rédaction du rapport : 4,5 jours (sous-traitance)
Et si c’était à refaire
Réalisation d’une campagne de piégeage sur 2 années, en plaçant 2 tentes Malaise en lisière forestière (ligne
de vol) en ciblant la partie nord de la zone ouverte la première année puis la partie sud l’année suivante.
Contact de l’auteur de la fiche
Jocelyn CLAUDE (chargé de mission, Les Amis de la Réserve Naturelle du Lac de Remoray) :
jocelyn.claude@espaces-naturels.fr
Alix BADRE (conservatrice) : a.badre@aprc-ballons-vosges.fr
Référence du rapport complet
Vallet a. (entomo-logic), 2012. Résultats du piégeage des Diptères Syrphidés par tentes Malaise dans la
Réserve naturelle nationale de la Tourbière de Machais et analyse des résultats selon « Syrph-the-Net »,
Rapport final RNN TM, entomo-logic, 17 p.
Bibliographie issue de l’étude
claude J. & tissot B., 2013. Les syrphes de la Réserve naturelle nationale de la tourbière de Machais (88) : Bilan
méthodologique et proposition d’une nouvelle stratégie d’échantillonnage, Note technique pour le PNR du
Ballon des Vosges, Les amis de la Réserve naturelle du lac de Remoray, Labergement-Sainte-Marie, 7 p.
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RNN Forêt de la Massane
Localisation :
Région : Occitanie (Pyrénées Méditerranée)
Commune(s) : Argeles/mer (66)
Statut(s) juridique(s) : RNN
Organisme gestionnaire : Association des amis de la Massane : http://www.rnnmassane.fr
Surface : 336 ha
http://www.reserves-naturelles.org/foret-de-la-massane
Objectifs
1. Compléter l’inventaire des syrphes de la RNN,
2. Évaluer la qualité écologique et apporter de nouveaux éléments sur l’état de conservation des habitats
de la Réserve naturelle,
3. Contribuer à l’amélioration des connaissances (régionales et nationales) des syrphes.
Localisation des tentes
Localisation des tentes Malaise en 2008 (2) et 2009 (4)
Durée du piégeage
2 tentes Malaise en 2008 et 4 tentes Malaise en 2009 à l’année. Toutes les 2 semaines, les flacons
d’échantillonnage, étaient récoltés. Dans certains cas, ces relevés ont été plus fréquents du fait des
intempéries, notamment des forts vents couchant les tentes sur le site.
FORET DE LA MASSANE
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Inventaire des habitats
Réalisé à partir des habitats phytosociologiques déjà définis par le gestionnaire (plan de gestion) 5 macro-
habitats sont identifiés.
Liste régionale
La liste retenue correspond à la région administrative du département des Pyrénées-Orientales comprenant
224 espèces.
Analyse globale
Habitat Espèce RDV/prédites Intégrité écologique
Global RNN 108/127 85 %
Hêtraie mésophile 87/93 93,5 %
Chênaie termophile 57/6 8 83,8 %
Pelouses xériques 23/27 85,1 %
Landes 14/16 87,5 %
Maquis haut 22/24 91,7 %
Intégrités écologiques des 5 habitats de la RNN (RDV/prédite)
Comparaison %
Expliquées (rdv/observées) 81 (108/133)
Intégrité écologique (rdv/prédites) 85 (108/127)
Inattendues (inatt./observées) 19 (25/133)
Manquantes (manquantes/prédites) 15 (96/127)
Analyse globale
Le nombre d’espèces observées (133) est remarquable en contexte de forêt méditerranéenne sur seulement
336 hectares. Cela représente 59 % de la liste départementale des Pyrénées-Orientales en 2009, mais
est à relativiser en diversité spécifique, comparé à d’autres sites comme la RNN du lac de Remoray en
Franche-Comté qui, pour une surface équivalente, cumule 210 espèces ! La liste actualisée pour les
Pyrénées-Orientales compte maintenant 293 espèces (X. Lair, 2018). La Massane accueille 45 % des espèces
départementales.
Dès les premières prospections, les auteurs insistaient sur la faune remarquablement complète de syrphes
saproxyliques de forêt caducifoliée tempérée européenne, d’autant plus intéressante du fait de la localisation
géographique de la Massane à l’extrémité des Pyrénées, en contexte méditerranéen. L’analyse confirme cette
affirmation avec une très bonne représentation des espèces dont les larves ont un cycle de développement
long qui est une caractéristique des vieilles forêts et de la continuité forestière. Temnostoma vespiforme est
la seule espèce considérée comme manquante, et dont l’absence reste énigmatique.
Développement larvaire supérieur à 1 an
Caliprobola speciosa
Callicera aurata
Callicera fagesii
Callicera macquarti
Callicera spinolae
Myolepta dubia
Myolepta vara
Spilomyia manica
Quelques espèces de la Massane à cycle de développement long
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Analyse écologique : l’exemple de la hêtraie
La hêtraie de la Massane n’est pas exploitée officiellement depuis 1880, mais en fait, de nombreuses parties
de la forêt ne sont plus exploitées depuis plusieurs siècles du fait des coupes antérieures non vendues à
l’époque. Cette forêt a fait l’objet d’investigation très poussée en matière d’inventaire avec plus de 8000
espèces répertoriées sur seulement 336 ha, mais aussi sur son histoire, à l’aide de techniques diverses comme
la génétique ou l’étude des charbons, qui toutes confortent l’hypothèse d’une forêt ayant eu le rôle de refuge
glaciaire. Les cartes les plus anciennes étudiées, de 1743 à nos jours, montrent une continuité forestière dans
le temps, qui, conjuguée à une forte naturalité ont permis la conservation d’une très riche diversité. Cette
richesse se traduit dans ce travail par une excellente intégrité écologique avec 93,5% des espèces prédites
observées. Seule l’absence de Pipizella viduata pourrait indiquer un léger dysfonctionnement de cet habitat
avec un impact excessif du pastoralisme sur la présence de grandes ombellifères.
Le constat apporté par les syrphidés concorde avec les autres groupes étudiés sur la richesse de cette
forêt, notamment due aux complexes saproxyliques, avec la présence de vieux arbres et de bois mort. La
méthode StN démontre ici pleinement son efficacité, sa robustesse et sa finesse dans la détection d’un
dysfonctionnement due à la présence de grands herbivores domestiques qui permet au gestionnaire
d’affiner sa gestion pour assumer pleinement ses responsabilités de conservation de la nature en faisant
évoluer les pratiques pastorales.
Contribution à la connaissance faunistique
Pendant de nombreuses années la Massane a été la seule référence pour la liste des Pyrénées-Orientales,
avec cette contribution, 22 espèces ont été ajoutées à ce département dont 29 pour la Réserve. Ce travail
a été l’occasion d’actualiser et de publier la liste des Pyrénées-Orientales.
Principale conclusion et enseignement
Les résultats pour la hêtraie, qui est le principal objet du classement en Réserve naturelle, montrent
une très bonne intégrité écologique du site (93,5 %), notamment avec une très bonne représentation
des espèces liées aux complexes saproxyliques. Ces résultats montrent toute la pertinence de la non
exploitation de la forêt en matière de conservation de