Au cours des années 2000, la découverte de nombreux gisements à préservation exceptionnelle dans la Formation des Fezouata (Ordovicien inférieur), dans la région de Zagora (Anti-Atlas central, Maroc), a permisde documenter, pour la première fois, des assemblages marins particulièrement riches et diversifiés, dont la préservation est comparable à celle des Lagerstätten du Cambrien inférieur à
... [Show full abstract] moyen (Burgess, Chengjiang). Le "FezouataBiota"est en grande partie constitué d'organismes à tests minéralisés caractéristiques de la grande biodiversification ordovicienne (brachiopodes, crinoïdes, graptolites, mollusques, ostracodes, trilobites). Il comprend également de très nombreux restes d'organismes "mous" ou peu minéralisés, qui illustrent la persistance de plusieurs groupes d'affinités cambriennes (anomalocaridides, marrellomorphes, nektaspidides) aux côtés des plus anciens représentants connus de taxons typiquement post-cambriens (cirripèdes, euryptérides, limules). Le FezouataBiota est actuellement le seul Lagerstätte connu au monde permettant de documenter une transition évolutive majeure dans l'histoire de la Vie, à la charnière entre explosion cambrienne et grande biodiversification ordovicienne.
La plupart des sites à préservation exceptionnelle de la région de Zagora ont été découverts depuis près de 15 ans par des marchands de fossiles locaux, spécialisés initialement dans la vente des trilobites, mais qui se sont rapidement reconvertis dans l'exploitation, nettement plus lucrative, des fossiles du FezouataBiota. Depuis plusieurs années, ces derniers sont désormais en vente sur internet et dans toutes les principales bourses de minéraux et fossiles du monde. Face à cet état de fait, deux voies ont été explorées jusqu'à présent. La première a consisté à travailler en étroite collaboration avec certains commerçants, afin de leur acheter au fur et à mesure les pièces les plus importantes d'un point de vue scientifique. L'origine géographique des échantillons et leur position stratigraphique demeurent toutefois le plus souvent imprécises. Cette politique a permis de constituer des collections paléontologiques remarquables, principalement en Amérique du Nord (Peabody Museum) et, dans une moindre mesure, en France (Muséum d'Histoire naturelle de Toulouse). La seconde approche, initiée dès 2002 par une collaboration entre les universités de Marrakech et Dijon (puis Lyon) a consisté à mener des campagnes successives de prospection, puis de fouilles, afin de récolter des échantillons in situ, sur des coupes bien identifiées. La dernière campagne de fouilles (quatre semaines en janvier et février 2014) a ainsi exploité plusieurs horizons à préservation exceptionnelle sur le site de Bou Izargane. L'ensemble du matériel ainsi récolté est enregistré dans les collections du Muséum d'Histoire naturelle de Marrakech.