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Recherches en didactique des langues et des
cultures
Les cahiers de l'Acedle
17-2 | 2020
Recherchescollaborativesendidactiquedeslangues
Le partenariat comme déclencheur de la recherche
participative dans un projet école-musée-famille
pour/par le plurilinguisme
RaquelCarinhas,MariaHelenaAraújoeSáetDanièleMoore
Éditionélectronique
URL : http://journals.openedition.org/rdlc/8112
DOI : 10.4000/rdlc.8112
ISSN : 1958-5772
Éditeur
ACEDLE
Référenceélectronique
Raquel Carinhas, Maria Helena Araújo e Sá et Danièle Moore, « Le partenariat comme déclencheur de
la recherche participative dans un projet école-musée-famille pour/par le plurilinguisme », Recherches
en didactique des langues et des cultures [En ligne], 17-2 | 2020, mis en ligne le 27 avril 2020, consulté le
13 mai 2020. URL : http://journals.openedition.org/rdlc/8112 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rdlc.8112
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NonCommercial-NoDerivatives 4.0 International License
Le partenariat comme déclencheur
de la recherche participative dans
un projet école-musée-famille pour/
par le plurilinguisme
Raquel Carinhas, Maria Helena Araújo e Sá et Danièle Moore
Introduction
1 Dans les écologies plurilingues qui forment le tissu de nos sociétés et de l’école, de
nombreux chercheurs soulignent à la fois l’importance de construire la continuité
entre les différents espaces où circulent et apprennent les enfants (Ishimaru et al.,
2015 ; Simonin & Thamin, 2018), et l’importance pour les enseignants de travailler en
étroite collaboration avec les familles et les communautés pour construire le projet
pédagogique qui sera le leur. Il existe encore peu de recherches didactiques qui
permettent d’explorer finement comment les pratiques linguistiques et culturelles et
les savoirs des familles, des communautés locales et des institutions, peuvent être
investis dans les partenariats éducatifs (Bottoms, Ciechanowski, Jones, de la Hoz, &
Fonseca, 2017) ni comment une recherche participative, fondée sur la collaboration, la
réflexivité et le partage des expertises, se déploie sur le plan méthodologique et
conceptuel.
2 La recherche en éducation et en didactique des langues et du plurilinguisme (DLP) a
pourtant largement montré, depuis plusieurs décennies, que des projets partenariaux
entre école, familles et communautés contribuent au succès scolaire et au
développement intégral des élèves (Ishimaru, Barajas-López, & Bang, 2015 ; Santos,
Araújo e Sá, & Simões, 2012), tout en soulignant l’importance de créer des situations
éducatives œuvrant pour la mise en continuité des espaces de socialisation et
d’apprentissage des apprenants (Simonin & Thamin, 2018). Toutefois, peu de
recherches se centrent sur les partenariats pédagogiques multi-situés, impliquant tout
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à la fois l’école, les musées et les familles, notamment autour de projets centrés sur le
plurilinguisme (Moore, sous presse). Encore moins d’études se centrent plus
particulièrement sur les dynamiques réflexives de mutualisation des expertises des
réseaux d’acteurs-chercheurs dans le développement collaboratif de ressources
pédagogiques plurilingues (Beaumont & Moore, 2020).
3 C’est dans ce creux que s’inscrit notre réflexion qui porte sur l’analyse d’un partenariat
éducatif autour du plurilinguisme comme déclencheur d’approches participatives
(Anadon, 2013), dans le sens où celles-ci supposent aussi la coopération et la
contribution des partenaires à la démarche d’investigation sur un même objet de
recherche (Desgagné, 1997). Après une revue de littérature sur les défis des projets
partenariaux développés sur la diversité linguistique et culturelle en DLP, nous1
présentons notre étude qui s’inscrit dans une perspective auto et ethnographique pour
mieux comprendre comment se développe, du point de vue des acteurs, ce processus
partenarial visant l’éducation au plurilinguisme d’enfants de l’école primaire en
Uruguay.
Contexte de la recherche et méthodologie
4 Cette contribution se situe dans le contexte de l’éducation primaire en Uruguay, niveau
d’enseignement qui s’adresse à des élèves de 6 à 12 ans. L’école de notre étude est une
école de Tiempo Completo2 (temps complet), située dans un quartier défavorisé de la ville
de Montevideo. Cette école présente le pourcentage le plus élevé d’élèves étrangers
(issus majoritairement de l’Amérique Latine) en Uruguay. La langue de scolarisation est
l’espagnol et les enfants apprennent l’anglais et le portugais comme langues
étrangères. Même si les politiques linguistiques du pays soulignent l’importance d’un
curriculum en langues selon une orientation plurilingue, les programmes invitent
plutôt à juxtaposer les apprentissages des différentes langues enseignées.
5 Le projet de partenariat en étude implique l’école en question (notamment sa
directrice, des enseignants, des enfants et leurs familles), les trois chercheuses, et
plusieurs musées de la ville : le MUMI – Museo de las Migraciones, le MAPI – Museo de Arte
Precolombino e Indígena, et le Museo Histórico Cabildo). Au moment de la recherche (2019),
seul le Musée des Migrations proposait déjà des ateliers adressés à des enfants avec une
approche interculturelle. Pour les autres institutions muséales du réseau, le
plurilinguisme restait encore une voie à explorer.
6 Ce partenariat a conçu un projet visant une approche plurilingue qui a été développé
pendant une année scolaire (de mars à novembre de 2019). La recherche, de type
ethnographique, a permis le recueil de plusieurs types de données : des observations
participantes lors des activités (de la planification à la mise en œuvre à l’école et dans
les musées), des enregistrements des interactions synchrones et asynchrones entre les
partenaires (pendant la planification et les phases de rétroaction) et le journal réflexif
et le carnet de recherche de la chercheuse principale (note 1).
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Plurilinguismes et partenariats éducatifs école,
familles et institutions muséales
7 Peu de recherches ont été menées en contexte partenarial mobilisant les institutions
muséales (Moore, Hoskyn, & Mayo, 2018), malgré leur potentiel reconnu pour
développer des programmes sur la diversité culturelle et linguistique
(Charalampopoulou, 2013). Ce sont en effet des lieux d’apprentissage et facilitateurs de
rencontres interculturelles (Walton, Paradies, & Mansouri, 2016). Un état des lieux de
ces recherches montre l’ampleur des défis relevés par le partage d’expertise entre
praticiens, chercheurs et partenaires éducatifs lorsqu’ils mettent en place des projets
éducatifs qui prennent en compte la diversité des langues et des cultures des
apprenants. La complémentarité des expertises et des cultures de travail est vécue par
les partenaires à la fois comme une potentialité et comme une contrainte. En effet, si
cette complémentarité rend possible le développement de projets éducatifs perçus
comme cohérents entre les contextes formels et non-formels d’apprentissage, elle
implique aussi des tensions fréquentes entre les divers acteurs éducatifs. La dynamique
partenariale demande donc qu’il soit possible de gérer ces tensions d’une façon
productive à l’égard des objectifs du partenariat (Auger, Azaoui, Houée, & Miquel,
2018). Le public cible de la plupart des recherches recensées sont des populations
minorisées, notamment des allophones (Clerc, 2015), des immigrés (Bautista Garcia-
Vera, Limón Mendizábal, Oñate, De La Rasilla, & Rostand Quijada, 2016), des Roms
(Auger et al., 2018) ou bien des autochtones (Flückiger, Diamond, & Jones, 2012). Dans
ce cadre, et quand ils incluent la participation des parents (surtout des mères, voir par
exemple Auger et al., 2018 ; Flückiger et al., 2012), les projets pédagogiques sur lesquels
portent ces études visent pour la plupart la prise de voix des populations minorisées et,
par conséquent, la valorisation des langues minoritaires, des langues de la maison et
des répertoires plurilingues des enfants (Auger et al., 2018 ; Flückiger et al., 2012 ; Li,
Anderson, Carr, & Hare, 2018).
8 Pour ce qui concerne les dynamiques des projets conduits à travers la participation de
différentes institutions ayant des responsabilités éducatives, les études montrent
qu’elles ne sont pas uniformes et exigent la constante adaptation aux contextes et aux
cultures des plusieurs partenaires (Beaumont & Moore, 2020 ; Clerc, 2015 ; Milutinović
& Gajić, 2010).
9 Le degré de participation des partenaires est flexible et instable, chaque partenaire
pouvant assumer différents rôles tout au long d’un même projet. Dans les projets
partenariaux impliquant une collaboration entre école et familles, la participation de
ces dernières reste plutôt périphérique au projet d’école, et relève plus généralement
du volontariat et des apprentissages à la maison (Epstein, 2002)3. Mais lorsque les projets
sont menés entre école et musées, les degrés de participation entre les partenaires
semblent plus équitablement distribués, dans le sens où le projet éducatif se co-
construit par l’ensemble des partenaires. En revanche, une seule étude traite d’une
association entre écoles, familles et musées ; le degré d’investissement des partenaires
y est plutôt du type volontariat (Auger et al., 2018).
10 Ces conclusions invitent à se pencher sur les contraintes et les obstacles associés à une
participation plus engagée et soutenue des familles dans la mise en œuvre des projets
partenariaux. Il semble central d’interroger les modes de participation des familles
dans ces projets de recherche participative, surtout quand celles-ci sont issues de
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milieux fragilisés et/ou minoritaires. Nous analyserons ici le processus de constitution
et de la dynamique d’un partenariat éducatif entre école, musées et familles, dans le
contexte de cette recherche en cours à Montevideo (Uruguay).
La mise en place de la recherche et de la démarche
partenariale
11 Les projets partenariaux comportent différentes étapes de mise en place (Depetris &
Eames, 2017). Le chemin que nous avons parcouru comprend 4 étapes : les deux
premières concernent la construction du partenariat et le dessein du Projet Plurilingue et
Interdisciplinaire (désormais PPI) ; la troisième - où nous sommes à l’heure actuelle -
correspond à la mise en place du PPI4 ; une quatrième étape portera sur l’extension du
projet sur la base de l’analyse critique des étapes précédentes.
12 La préparation de l’entrée sur le terrain (Étape 1) a compris l’élaboration d’un
prospectus présentant les trois chercheures universitaires impliquées et expliquant les
buts de la recherche et de notre proposition, comme mobilisateur des motivations
(Moore et al., 2018). Nous avons aussi procédé à un relevé exhaustif de tous les musées
de Montevideo comportant des programmes éducatifs à destination de jeunes publics
(février 2019), ce relevé étant fondamental pour informer et approcher tous les
partenaires potentiels.
13 La sélection de l’école s’est effectuée sur deux critères : d’une part, le volontariat d’une
équipe scolaire qui a toujours affiché une forte disponibilité pour accueillir des projets
de recherche ; d’autre part, sa localisation, puisqu’il s’agit de la seule école d’éducation
primaire et publique à la Ciudad Vieja, le quartier où se situe la plupart des musées, ce
qui facilite la mobilité des participants, circonstance essentielle pour la viabilité de ce
type de réseautage (Depetris & Eames, 2017 ; Monroe et al., 2016). L’école constituant le
nœud du réseautage partenarial, nous nous sommes appuyées sur la thématique
nucléaire de son projet pour l’année scolaire 2019 – les jeux universels –, pour ensuite
associer trois musées historiques et ethnographiques situés près de l’institution, ceci
pour éviter des coûts associés au transport des partenaires et des participants du
projet. Les trois musées contactés ont accepté de faire partie du partenariat : le MUMI
(Museo de las Migraciones), le MAPI (Museo de Arte Precolombino e Indígena), et le
musée historique de la ville (Museo Histórico Cabildo).
14 Pendant les mois de mars et avril 2019, les partenaires pressentis se sont réunis à trois
reprises pour discuter du projet pédagogique et de son articulation à une recherche
participative. Ces premières séances ont eu lieu à l’école pendant les rencontres
hebdomadaires des professeurs. Le nombre élevé de personnes réunies (20), et le
déséquilibre entre les cultures professionnelles représentées, avec une prédominance
d’enseignants de l’école, se sont révélés peu productifs pour discuter ensemble de la
construction d’un projet éducatif de l’école impliquant les musées et les familles. Ces
déséquilibres ont par ailleurs constitué un obstacle de taille pour le développement
d’une dynamique partenariale construite sur des expertises partagées pendant ces
réunions, provoquant de fortes tensions à l’égard des rôles à jouer par chaque
partenaire. L’expertise pédagogique des partenaires universitaires et des familles
n’était pas nécessairement accueillie comme valide, tandis que familles et enseignants
se sentaient peu légitimes au sein d’une collaboration de recherche. On voit ici se
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dérouler une perception différente, dans le sein du partenariat, de la recherche
participative, en particulier entre une recherche « auprès » de participants ou bien
« avec » eux (Litalien, Moore, & Sabatier, 2012). Dès la fin de la troisième séance, un
comité partenarial a été mis en place, composé d’un nombre moins important de
participants, mais qui se déclaraient prêts à s’engager dans le développement et le
pilotage du projet (participer régulièrement aux réunions, collaborer à la construction
du matériel pédagogique et à la mise en place des activités didactiques, s’engager dans
une démarche de recherche par le biais de la collecte de données et la participation à
des discussions pédagogiques réflexives). Du côté de l’école, une seule enseignante a
choisi de s’investir activement dans ce réseau, même si les autres enseignants ont
manifesté leur accord pour mettre en place les activités dans leurs salles de classe, une
fois celles-ci développées. Cette enseignante de l’école a joué un rôle fondamental pour
que nous puissions présenter le projet aux familles des élèves.
15 Le tableau 1 présente le profil des 9 partenaires qui, au final, constituent le nœud de ce
réseau partenarial et en assurent la cohérence et la continuité pour l’ensemble des
autres acteurs engagés dans ce travail collaboratif. Nous y ajoutons la directrice de
l’école (P2), qui, bien qu’absente physiquement à la plupart des réunions, a joué un rôle
fondamental dans le fonctionnement de ce partenariat, surtout au moment de la mise
en œuvre des activités du PPI et de la gestion des ressources scolaires.
Tableau 1 – Caractérisation des partenaires
Code Partenaire Institution Rôle Profil linguistique et de mobilité
P1 scolaire école
primaire enseignante
Uruguayenne. Elle a vécu pendant 10 ans en
Galice. Elle est retournée en Uruguay il y a 9
ans.
P2 scolaire école
primaire directrice
Uruguayenne. Elle déclare l’espagnol comme
sa langue maternelle. Elle a étudié le français,
l’anglais et l’italien, mais elle précise ne plus
les parler. Elle a vécu une partie de son
enfance (de 1 à 5 ans) en Argentine.
P3 muséal
Musée
Historique
Cabildo
directrice
Uruguayenne. Elle a toujours vécu en Uruguay.
Ses parents viennent de Galice et elle parlait le
galicien à la maison. Son rattachement à cette
langue est très fort, mais elle déclare
l’espagnol comme sa première langue. À
l’école, elle a étudié l’anglais et le français.
P4 muséal musée MAPI
médiatrice
(secteur
éducatif)
Uruguayenne. Elle a toujours vécu en Uruguay
et ne parle et comprend que l’espagnol.
P5 muséal musée
MUMI
médiatrice
(secteur
éducatif)
Uruguayenne. Elle a toujours vécu en
Uruguay- L’espagnol est sa langue. Elle parle le
portugais et comprend l’anglais à l’écrit.
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5
P6 familial famille mère
Chilienne. Elle est récemment arrivée en
Uruguay. Elle a vécu en Argentine, au Brésil et
en Catalogne. L’espagnol est sa langue et elle
comprend le catalan.
P7 familial famille mère
Cubaine. Elle est récemment arrivée en
Uruguay. Elle a vécu au Venezuela et au Brésil.
Elle parle le portugais.
P8 muséal freelancer
médiatrice
(secteur
éducatif)
Uruguayenne. Elle a vécu en Colombie pendant
plusieurs années. Elle a travaillé avec des
populations minoritaires et migratoires dans
des ONG. Elle travaille comme freelancer dans
plusieurs musées.
P9 muséal musée MAPI
médiatrice
(secteur
éducatif)
Uruguayenne. Elle a toujours vécu en Uruguay.
L’espagnol est sa langue maternelle et elle
comprend un peu de portugais et d’anglais.
P10 académique université
chercheuse
principale
(impliquée sur
le terrain)
Portugaise (chercheuse principale). Elle vit en
Uruguay depuis 12 ans. Elle est enseignante et
doctorante. Elle a étudié le français, l’anglais,
l’espagnol, l’allemand, le latin et le russe.
P11 académique université
chercheuse
(co-direction de
la recherche)
Portugaise. Elle vit au Portugal. Elle a étudié le
français, l’anglais, l’italien et l’allemand. Elle a
vécu en France.
P12 académique université
chercheuse
(co-direction de
la recherche)
Française. Elle vit au Canada. Elle parle
français et anglais et s’intéresse à la
revitalisation des langues autochtones au
Canada. A vécu en France, en Angleterre, en
Suisse, au Canada, au Japon.
16 Le tableau 1 nous montre que ce partenariat est hétérogène sur plusieurs plans : les
professions, les institutions d’appartenance et les cultures professionnelles des acteurs
sont différentes. Le projet intègre par ailleurs des personnes présentant des parcours
de vie diversifiés avec des trajectoires plurilingues et des expériences de mobilité
variées. Cette hétérogénéité s’est révélée assez utile à l’heure de la conceptualisation
des activités plurilingues du projet, lesquelles sont le résultat du partage des
expériences, des savoirs et des savoir-faire des membres du partenariat. Ainsi, le PPI
comprend un ensemble d’activités menées dans une perspective dialogique qui
englobe, en continuum et en interaction permanente, tous les partenaires : des ateliers
dans l’école dynamisés par plusieurs acteurs éducatifs (enseignants, chercheurs,
familles, animateurs des musées), des visites guidées et interactives aux musées, des
ateliers dans les musées, des promenades par le paysage linguistique (visuel et sonore)
du quartier de l’école, la création de dispositifs muséologiques par les enfants.
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La mise en place d’un partenariat école-musées-
familles : quels enjeux ?
17 Le corpus d’étude, sur lequel s’appuie cette contribution, comprend trois types de
données discursives recueillies pendant les deux premières étapes du projet (initiation
et constitution du partenariat) et au début de la troisième (mise en place du PPI) : le
carnet de bord de la chercheuse principale5, l’enregistrement des interactions
asynchrones, multilatérales et bilatérales, entre les membres du partenariat (courrier
électronique et Whatsapp), la transcription de l’enregistrement d’une rencontre du
partenariat portant spécifiquement sur les motivations des partenaires, les dynamiques
du réseautage et les possibilités et perspectives de participation dans une recherche
académique.
18 Pour ces analyses, nous avons utilisé un logiciel d’analyse qualitative (webQDA) qui
permet d’établir, individuellement ou collectivement, de manière synchrone ou
asynchrone, un système catégoriel pour filtrer et organiser les données discursives en
unités signifiantes pour les partenaires de la recherche. L’analyse nous a ainsi permis
de noter l’existence de catégories avec une forte occurrence d’unités de contenu, ces
catégories étant en rapport avec : (i) les rôles assumés par les partenaires, (ii) les défis
posés par le partenariat et (iii) les possibilités de mise en marche d’une recherche
participative.
Les rôles des partenaires
Un rôle endossé de facilitatrice pour la chercheure sur le terrain (P10)
19 La construction d’un partenariat éducatif part souvent de la conjugaison d’un besoin
individuel et d’une problématique sociale identifiée par un individu qui s’intéresse
simultanément aux questions éducatives et communautaires, et qui prend l’initiative
de créer un partenariat pour les aborder. Après la constitution du partenariat, cette
personne, désignée comme la facilitatrice, conserve souvent des responsabilités de
coordination et de gestion du réseautage (Monroe et al., 2016).
20 Dans notre étude, la chercheuse principale (P10) a joué ce rôle dès le début du projet,
en particulier au niveau de la coordination générale du réseau, de la communication, de
la gestion des tensions, de l’opérationnalisation du PPI et du maintien de la motivation
des partenaires. Ce rôle concerne tout particulièrement :
la coordination des rencontres,
Inicialmente, tínhamos marcado esta reunião para dia 9, no MUMI, mas,
como havia poucas confirmações, decidi adiá-la para esta sexta-feira. » (CR/
16/08/2019)6
la préparation des rencontres et du matériel du partenariat,
Durante esta semana, fui preparando diversos materiais para a reunião. (CR/
06/09/2019)7
la communication,
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Logo pela manhã comecei a ligar aos pais que não me tinham confirmado a
receção da mensagem. (CR/07/06/2019)8
l’opérationnalisation du PPI et la mobilisation des partenaires,
Enviei um email à parceria com um resumo da reunião. Era necessário
começar a definir vários assuntos e mobilizar os parceiros que têm tido uma
presença mais tímida na construção de algumas atividades. (CR/19/08/2019)9
la gestion des tensions,
Vou tentar reunir-me com ela na quinta-feira [...] e tentar convencer, mas
sem impor, a ideia da parceria, mais no sentido de que em rede conseguimos
fazer mais coisas [...] Tenho de gerir isto com pinças. (CR/09/03/2019)10
21 Ces tâches appellent des compétences diversifiées de la part de P10, en particulier des
compétences stratégiques et de négociation qui transforment la démarche partenariale
en une tâche exigeante et, dans certaines situations, assez ardue :
« Começa a ser pesado, duro mesmo, ter de lidar com esta situação de
liderança da diretora [da escola]... » (CR/08/05/2019)11.
22 Le rôle de facilitatrice de P10 est reconnu par tous les partenaires comme essentiel au
bon fonctionnement du projet pédagogique collaboratif (« y que tú estás haciendo un
trabajo como de ir enlazando todo »12- P8/RR/06/09/2019). Les participants considèrent
même que ce rôle est le plus difficile à endosser dans une dynamique partenariale (« lo
organizativo es lo más difícil del trabajo en red »13 - P1/RR/06/09/2019). On note par ailleurs
la stabilité dans ce rôle auto et hétéro-assigné au sein du réseau partenarial, ce qui n’est
pas nécessairement le cas pour ceux joués par les autres partenaires, en particulier les
enseignants et les parents, comme nous allons pouvoir le voir ci-après.
Des rôles partagés entre partenaires
23 Le partenariat de notre recherche se caractérise par le jumelage de cultures
professionnelles et éducatives et de terrains d’action très diversifiés : « las dimensiones
del trabajo de cada uno / los accionares de cada uno /son muy diferentes. »14 - P1/RR/
06/09/2019) (cf. tableau 1). La dynamique partenariale se caractérise en effet souvent
par la fluidité et la flexibilité des rôles assumés par des partenaires (Epstein, 2002), dont
l’engagement dépend souvent du contexte et de la culture de travail ou institutionnelle
de laquelle ils proviennent.
24 Cette hétérogénéité reconnue par les sujets conduit à des modalités de participation
très différentes et des rôles clairement identifiables, notamment au sein de l’institution
scolaire. Ainsi, nous avons pu vérifier que les musées sont plus participatifs et engagés
dans la mise sur pied du projet que les autres partenaires (école, familles, chercheurs).
Nous avons noté en particulier que travailler avec des musées, c’est aussi partager des
idées avec toute l’équipe éducative muséale qui reste, dans la plupart des cas, dans les
coulisses du partenariat : « Para P4, é essencial a contribuição de toda a equipa educativa »15
(CR/22/05/2019). Ce sont aussi les musées qui ont le plus impulsé le développement de
ressources permettant la mise en place des activités-clés du projet pédagogique : « A P3
deu logo uma ideia genial de uma exposição que ela tinha visto em Buenos Aires com mapas
sonoros »16 (CR/22/05/2019).
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25 Dans notre réseau, les contributions des familles se sont limitées jusqu’à aujourd’hui à
la logistique des activités, tout en identifiant des possibilités et d’éventuelles
contraintes à leur mise en place : « P6 e P7 estavam atentas a pormenores como a gestão do
tempo »17 (CR/22/06/2019). De ce fait, pour que les parents (dans la situation étudiée,
des mères) participent de manière engagée, il était nécessaire de les (re)contacter
individuellement, par des messages Whatsapp, en leur proposant de partager des
responsabilités de conceptualisation et de dynamisation de quelques activités-clés qui
doivent se dérouler, par exemple, lors des visites dans les musées (comme participer à
la prise de photos ethnographiques ou le recueil des sons de la ville avec les enfants).
Leur entrée plus tardive dans le réseau semble avoir restreint leur participation active
dans la conceptualisation du projet et des activités et ressources pédagogiques.
26 Enfin, bien que la directrice de l’école (P2), n’ait pas assisté à toutes les réunions, elle a
joué un rôle fondamental de gardienne (gatekeeper) de la recherche et du projet chez les
enseignants18 en accomplissant aussi d’autres tâches telles que l’explicitation du projet
pédagogique aux familles (avec P1, qui a joué ce même rôle) et le partage
d’informations concernant le PPI avec d’autres éventuels collaborateurs (« Vos hablá con
los museos y dejá las maestras para mí »19 - CR/27/02/2019 ; « Os do CdF tinham estado pela
escola, ela comentou-lhes sobre o projeto e passou-lhes o meu contacto, pois eles tinham-se
mostrado interessados »20 - CR/12/08/2019). D’une façon plus large, nous remarquons que
P2 a joué un rôle essentiel dans l’opérationnalisation de ce projet éducatif multi-sites,
et ceci à plusieurs niveaux. P2 investit la responsabilité de tâches aussi diverses que la
relecture critique du matériel de diffusion produit par le partenariat ainsi que la
relecture du guide d’activités du PPI, la programmation des espaces et des horaires des
activités à implémenter à l’école, et la mise à disposition du matériel didactique et des
autres ressources nécessaires comme, par exemple, des photocopieuses.
27 Au final, si les musées semblent plus engagés dans le développement des ressources
pédagogiques et dans la mise en place des activités didactiques, ce sont bien les
partenaires issus de l’institution scolaire qui sont le nœud spatial et le ciment du
partenariat, en assurant l’engagement des élèves et des familles, et la continuité du
projet.
Les défis d’une posture de chercheur-acteur dans une démarche
partenariale participante
28 La conceptualisation, la planification et la mise en œuvre d’un partenariat comportent,
nous l’avons vu, de nombreux défis et demandent de la part de tous les acteurs
impliqués la prise en charge de plusieurs types de responsabilités, ainsi que des
compétences interpersonnelles et stratégiques. Nous nous intéressons ici plus
particulièrement aux défis auxquels engage la posture de chercheur-acteur dans la
démarche partenariale participante de P10, tout particulièrement au moment de la
mise en marche du partenariat (étape 2). Cette étape s’est particulièrement marquée
par de nombreux moments de risque qui ont mobilisé ses compétences
interpersonnelles et stratégiques de facilitatrice, en particulier au niveau de la gestion
des tensions.
29 Les analyses ont permis de mettre en avant deux aspects qui caractérisent ces moments
de risque pour le chercheur-acteur. Un premier se rattache aux attentes initiales de la
part de la directrice de l’école (P2) par rapport au projet éducatif plurilingue et
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interculturel, qu’elle pensait pouvoir fusionner avec le projet pédagogique de l’école,
centré cette année-là sur les jeux universels. De l’avis de P2, les rencontres
hebdomadaires des enseignants de l’école avec les autres partenaires étaient, ainsi, la
meilleure procédure pour travailler ensemble. Pourtant, après deux ou trois de ces
rencontres, P10 note, dans ses observations et ses actions de terrain, combien cette
décision influe sur l’organisation de cet espace fortement marqué par la culture
scolaire (« O clima marca muito : este é o espaço dos professores. »21 - CR/07/05/2019). Aussi
elle considère que cet espace de réunion était très (trop) peuplé (avec plus de 20
personnes) et, de la sorte, susceptible de réduire le potentiel créatif d’un projet
plurilingue partenarial (« as salas eram muito absorventes, os professores acabam por ter
quase todo o “tempo de antena” e não são um espaço nada prático para a criação de um projeto
plurilingue »22 - CR/22/05/2019). La mise en place du partenariat appelle flexibilité et
adaptation de la part de P2, de la part des autres partenaires, et tout particulièrement
de la part de P10, dont le rôle ne se borne pas à observer les participants : P10 y joue
une importante fonction d’impulsion des actions, de coordination et de stimulation des
partenaires impliqués.
30 Un deuxième exemple montre comment P10 adapte la forme de la participation des
partenaires en changeant les codes préalablement co-établis des réunions du groupe,
en particulier par P2. Le modèle très collégial, ouvert à tous, fondé sur la mise en
commun d’expertises diversement situées qui était celui des premières réunions, parce
qu’il ne réussit pas à engager la participation, est remplacé en cours de route par une
redistribution des rôles des participants. Se constitue alors, sous l’impulsion de P10, un
comité de pilotage qui assume cette responsabilité, jusque-là surtout endossée par P2 :
(« A P4 corroborou […] que achava que estávamos “colgadas” na reunião, que não havia
abertura »23 - CR/09/05/2019).
31 Une autre situation problématique est en rapport avec la nécessité ressentie par P10,
dans son rôle de chercheuse principale de l’étude : motiver constamment les membres
du réseautage afin d’éviter les abandons en cours de route, tout en cherchant les
stratégies et les modalités les plus adéquates pour dépasser les contraintes de toute
sorte perçues par les partenaires : « A P4 comentou que está a fazer de tudo para que a
atividade vá avante, mas desabafou que, até ontem, pensava que o MAPI teria de desistir da
parceria... »24 (CR/16/08/2019). Selon les partenaires, un partenariat se construit aussi
selon un processus d’entonnoir (embudo), c’est-à-dire, par un moment, souvent initial,
d’abandon de certains partenaires : « después comienza como el embudo / como a decantar »
25 (P1/RR/06/09/2019). Par exemple, la gestion du temps (comment faire coïncider les
contraintes horaires des différents membres) s’est constituée comme un nœud
caractéristique limitant la participation des partenaires (« A grande maioria dos familiares
apenas podia da parte da manhã, o que tornaria difícil a participação da P1 »26 - CR/
06/06/2019). Si la mise en place de modalités alternatives de communication, comme le
courrier électronique ou les messages Whatsapp, a permis de lever certaines barrières,
il reste que les pratiques linguistiques et culturelles et les savoirs des familles ont
difficilement pu être investis directement, pour le moment, au sein du projet. On
observe toutefois que les activités pédagogiques développées collaborativement
donnent voix aux communautés locales27, au musée et dans la rue, interrogeant leur(s)
histoire(s), leurs objets et leurs pratiques.
32 Ces défis qu’il faut gérer en temps réel et qui engagent le chercheur à jouer de
différents équilibres dans la posture de chercheur-acteur, définissent au final le
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caractère de la participation. En effet, ces moments de doute dans la construction
partenariale, ainsi que les glissements dans les rôles et les postures participatives, sont
de nature à favoriser la réflexivité et le dialogue et, partant, d’interroger le processus
participatif dans la recherche.
Le partenariat comme déclencheur de la participation
en recherche
33 Un espace partenarial où un ensemble d’acteurs sociaux partage des expériences et des
ressources pour construire un projet plurilingue favorise, à notre avis, la recherche
participative. Autrement dit, ces acteurs sociaux s’y configurent comme des sources de
co-production de connaissances (Gillet & Tremblay, 2017). En nous appuyant sur
l’analyse des voix plurielles des partenaires, nous cherchons à comprendre les
possibilités de mise en place d’une recherche participative et les enjeux qu’implique
une telle démarche dans notre contexte de recherche, afin de tracer le meilleur chemin
possible.
34 Mobiliser une diversité d’expertises autour d’un projet commun (ici autour du
plurilinguisme) pour mieux le comprendre et le mener à bien, se situe comme l’enjeu
central de la mise en œuvre du partenariat. Pouvoir développer une culture commune
de recherche dans l’intervention, un savoir-faire méthodologique (« ¿Y cómo serían esas
instancias ? ¿Serían como estas ? ¿Cómo sería la metodología ? »28 - P8/RR/06/09/2019),
pouvoir répartir les rôles de chacun dans la co-construction des savoirs (« ¿Qué aportar
a la investigación ? »29 -P4/RR/06/09/2019), constituent des nœuds de questionnements
récurrents à cet égard. Par exemple, l’observation en tant que modalité de recherche
participative qui donne accès à une compréhension plus approfondie et partagée des
activités développées par le partenariat (comme l’observation des extraits des
enregistrements vidéos de ce que font les enfants) est considérée par les partenaires
comme une activité complexe, dont ils considèrent qu’ils ne maitrisent ni les enjeux ni
les techniques (« Con qué claves tendríamos que mirar y observar qué cosas en esas instancias
// no me queda de todo claro »30 - P8/RR/06/09/2019), ce qui confirme l’importance de
trouver des modalités de « médiation entre les cultures de pratiques et celles de la
recherche » (Giglio, 2016 : 46). En revanche, la participation des différents membres à la
collecte des données (comme l’enregistrement photographique des activités du projet
ou l’enregistrement audiovisuel du feedback des participants après leur mise en place),
s’est avérée plus aisée pour les différents membres du réseau qui se sont ainsi sentis
vraiment inclus dans le processus de recherche collaborative : « P8 até se prontificou a
fazer o levantamento fotográfico das atividades... »31 (CR/21/03/2019) / « A mí me parece bien
/ lo que dijo P8/sacar ahí en el momento alguna opinión... »32 (P4/RR/06/09/2019). Il reste
plus difficile pour les différents partenaires de comprendre la valeur des savoirs et des
langues des familles (y compris et peut-être surtout de la part de celles-ci) dans ce
projet de recherche participative qui pourtant s’organise autour du développement
d’activités et de ressources plurilingues par/pour le plurilinguisme. Les parents sont
restées jusqu’ici plus en retrait, une tendance que nous espérons voir s’inverser dans
les prochaines étapes du travail collaboratif.
35 La mise en place d’une recherche participative est vécue comme le résultat naturel de
ce projet conçu à partir d’une démarche partenariale (« A mí / sí / porque es parte // es un
poco del por qué hicimos esto / ¿no ? / Es lo que salió de todo esto ¿no ? »33 - P4/RR/
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06/09/2019). Ce sont en effet les malentendus et la mise en évidence des écarts des
attentes, des représentations et des pratiques qui fondent un processus qui fait appel à
l’engagement, à la réflexivité et à de nouveaux apprentissages (« Es todo un aprendizaje »
34 - P1/RR/06/09/2019), aspects qui sont au cœur de ce type de recherche (Gillet &
Tremblay, 2017). Ce sont bien dans ces interstices que se construit la collaboration.
Conclusion
36 Nous avons dans cette contribution cherché à mettre en avant certaines dynamiques de
la collaboration au moment de l’établissement et de la mise en place d’un projet
éducatif impliquant un partenariat visant à engager école, familles et institutions
communautaires (comme ici les musées) autour de la valorisation du plurilinguisme de
jeunes élèves de l’école primaire en Uruguay. Nous y avons retracé différentes étapes
de la mise en place d’un tel projet pour discuter ensuite comment se construit la
participation des partenaires, ainsi que le rôle ambigu du chercheur-acteur dans ces
configurations partenariales multi-situées. Nous avons cherché à montrer combien une
telle démarche de recherche, qui se construit comme variable, complexe et dynamique
(Blanchet & Chardenet, 2011), est reliée à des questionnements fondamentaux sur la
responsabilité sociale de la recherche et sur l’éthique dans le processus de construction
de la connaissance (Anadon, 2013). Ainsi, la recherche participative doit-elle
s’accompagner du partage de volontés et de valeurs, de la complémentarité
d’expertises et de compétences, et de démarches adaptées aux contextes
d’appartenance et d’action des partenaires de la recherche, tout autant qu’à l’écologie
locale qui marque leur domaine d’action.
37 En éclairant certains enjeux qui entourent les conditions de mises en place de
recherches qui impliquent les enseignants, les familles, les élèves et les intervenants
muséaux comme coparticipants dans des expériences éducatives où les
questionnements sont impulsés, nous espérons contribuer, à notre mesure, à un
questionnement qui demeure central dans la recherche actuelle en DLP. C’est en effet la
mise en réseau des professionnels de l’éducation (scolaire et muséale) et des familles
qui permet, pour l’enfant, d’investir la continuité des apprentissages entre les
différents pôles qui constituent son univers quotidien (Bottoms et al., 2017).
38 Quand ce partenariat associe aussi les institutions muséales dans les projets
d’apprentissage, on voit se démultiplier l’expérience de l’altérité. Nos analyses
soulignent la valeur de ces espaces de collaboration qui favorisent l’expression des
acteurs et le partage de leurs expériences, l’innovation pédagogique, le développement
de la professionnalité par/dans la recherche, l’action et la formation (Giglio, 2016) mais
aussi la difficulté de leur mise en place. En ce sens, le partenariat comme déclencheur
de la recherche participative inscrit la démarche comme un « incubateur de ressources »
(Sperano, Roberge, Bénech, Trgalova, & Andruchow, 2019). On espère dans la suite de
nos recherches pouvoir montrer que ce partenariat, qui s’inscrit dans un paradigme de
la diversité, a des effets bénéfiques pour l’ensemble des apprenants et des partenaires
éducatifs (Beacco et al., 2016).
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NOTES
1. La première auteure de cet article est la chercheuse principale, celle qui a mené l’étude de
terrain. Les autres deux co-auteures sont les directrices de la recherche.
2. Il y a trois types d’écoles primaires : les écoles Tiempo Completo (temps complet, 7h30/jour), les
écoles Tiempo Extendido (6h/jour) et les écoles Comunes (4h/jour).
3. Epstein (2002) identifie 6 types de participation par degrés croissants d’investissement : 1) rôle
parental ; 2) communication ; 3) volontariat ; 4) apprentissage à la maison ; 5) prise de décision ;
6) collaboration avec la communauté.
4. Différents partenaires sont entrés à des moments différents des étapes de mise en place de ce
réseautage.
5. 40 entrées ont été objet d’analyse (depuis l’entrée sur le terrain de la chercheuse principale, en
février 2019, jusqu’à la première rencontre réflexive du partenariat réalisée au début de
septembre 2019).
6. « Au départ, nous avions prévu cette réunion pour le 9, au MUMI, mais, comme il y avait peu
de confirmations, j’ai décidé de la reporter à ce vendredi ».
7. « Au cours de cette semaine, j’ai préparé divers documents pour la réunion ».
8. « Tôt le matin, j’ai commencé à appeler les parents qui n’avaient pas confirmé la réception du
message ».
9. « J’ai envoyé un courriel au partenariat avec un résumé de la réunion. Il a fallu commencer à
définir différentes problématiques et à mobiliser les partenaires qui ont eu une présence plus
timide dans la construction de certaines activités ».
10. « Je vais essayer de la rencontrer jeudi [...] et essayer de la convaincre, mais sans imposer, sur
l’idée du partenariat […] plus dans le sens que dans un réseau on peut faire plus de choses [...] je
dois gérer ça avec une pince à épiler ».
11. « Ça commence à être lourd, vraiment dur, d’avoir à faire face à cette situation de leadership
du directeur [de l’école] … »
12. « … et que vous faites un travail comme de tout relier ».
13. « L’organisation est le plus difficile dans un travail en réseau ».
14. « Les dimensions de travail de chacun/ les actions de chacun/ sont très différentes ».
15. « Pour P4, la contribution de toute l’équipe pédagogique est essentielle ».
16. « P3 a immédiatement donné une excellente idée d’une exposition qu’elle avait vue à Buenos
Aires avec des cartes sonores ».
17. « P6 et P7 étaient attentives aux détails tels que la gestion du temps ».
18. On notera que P11 et P12 jouent un rôle similaire auprès de P10. Nous ne l’analysons pas ici.
19. « Vous vous occupez des musées et vous me laissez les enseignantes ».
20. « Ceux du CdF étaient allés à l’école, elle a commenté le projet et transmis mon contact, car ils
avaient montré de l’intérêt ».
21. « L’ambiance marque beaucoup : c’est l’espace des professeurs ».
22. « Les salles étaient très absorbantes, les professeurs ont fini par avoir presque tout le « temps
d’antenne » et ce n’était pas du tout un espace adéquat pour créer un projet plurilingue ».
23. « P4 a corroboré […] le fait qu’elle pensait que nous étions « coincés » à la réunion, qu’il n’y
avait pas d’ouverture ».
24. « P4 a commenté qu’elle faisait tout pour faire avancer l’activité, mais elle a confié que
jusqu’à hier, elle pensait que le MAPI devrait abandonner le partenariat ».
25. « Puis cela commence comme l’entonnoir / c’est comme décanter ».
26. « La grande majorité des membres de la famille ne pouvait que le matin, ce qui rendrait
difficile la participation de P1 ».
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27. Par le biais, par exemple, de l’étude des sons de la ville effectuée lors d’une sortie au musée
des enfants (une des activités plurilingues développées par l’équipe partenariale, activités qui ne
sont pas explorées dans le cadre de cet article).
28. « Et à quoi ressembleraient ces rencontres ? Seraient-elles comme celles-ci ? À quoi
ressemblerait la méthodologie ? ».
29. « Quoi amener à la recherche ? »
30. « Avec quelles clés nous devrions regarder et observer quelles choses dans ces cas ? Ce n’est
pas clair pour moi ».
31. « P8 a même proposé de faire un relevé photographique des activités ... ».
32. « Cela me semble bien/ ce que P8 a dit / avoir un feedback là-bas tout de suite… ».
33. « Pour moi / oui / parce que cela fait partie // c’est un peu pourquoi nous avons fait ça /
non ? / C’est ce qui est sorti de tout ça non ? ».
34. « C’est tout un apprentissage ».
RÉSUMÉS
La contribution porte sur une recherche en cours dont l’objectif est de comprendre comment se
construit un partenariat pédagogique et de recherche impliquant un travail collaboratif entre
une école, des familles et plusieurs musées de la ville, autour du développement de scénarios
didactiques pour/ par le plurilinguisme pour des enfants du primaire, à Montevideo (Uruguay).
L’enjeu est d’éclairer certaines conditions d’élaboration d’un tel partenariat impliquant des
enseignants, des praticiens de l’éducation muséale, des chercheurs en didactique des langues et
des parents d’élèves. Par le biais d’une approche (auto)-ethnographique, nous chercherons à
comprendre : (i) comment ce partenariat éducatif est envisagé par les différents partenaires – ses
enjeux et ses contraintes pour chacun ; (ii) leurs rôles dans l’éclairage et la compréhension d’une
recherche visant une innovation pédagogique autour du plurilinguisme. Nous explorerons en
particulier quelques implications pour le chercheur-acteur, ainsi que les transformations qu’elles
supposent, tant au niveau des pratiques professionnelles que des pratiques et de la posture de
recherche. La contribution pose ainsi quelques jalons pour mieux comprendre les enjeux, les
savoirs et les méthodes des recherches collaboratives en didactique des langues et du
plurilinguisme, ainsi que leur potentiel pour la transformation des pratiques (de recherche et en
éducation).
Este texto apresenta uma investigação em curso cujo objetivo é a compreensão de como se
constrói uma parceria educativa e de investigação entre uma escola, famílias e diversos museus
da cidade, implicados no desenvolvimento de cenários didáticos para e pelo plurilinguismo
destinados a alunos de uma escola primária em Montevideu, no Uruguai. Pretende-se refletir
sobre as condições de formação de uma tal parceria implicando professores, mediadores de
museus, famílias de alunos e investigadores em didática de línguas. Inserida num paradigma
(auto)-etnográfico, a investigação visa compreender : 1) como é que este partenariado educativo
é compreendido pelos sujeitos (suas potencialidades e constrangimentos) ; 2) quais são os papéis
dos parceiros numa investigação visando a inovação pedagógica em torno do plurilinguismo.
Exploramos, ainda, algumas implicações para o investigador-ator, bem como as transformações
que elas acarretam tanto ao nível das práticas profissionais como das práticas e da postura da
investigação. O estudo permite identificar alguns elementos fundamentais para aprofundar o
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conhecimento sobre as possibilidades, saberes e abordagens de investigação colaborativa em
didática das línguas e do plurilinguismo, bem com o seu potencial para a transformação das
práticas (de investigação e de educação).
INDEX
Mots-clés : partenariat école-musée-famille, plurilinguisme, recherche participative
Keywords : partnerships schools-museums-families, plurilingualism, participative research
AUTEURS
RAQUEL CARINHAS
Universidade de Aveiro, CIDTFF, Universidad de la República, Camões, I.P
Doctorante du Programme Doctoral en Éducation de l’Université d’Aveiro, Portugal. Chercheuse
dans le domaine de la didactique des langues et du plurilinguisme. Elle s’intéresse actuellement à
des questions liées aux partenariats éducatifs entre école, familles et musées dans une visée
d’éducation plurilingue et interculturelle. Lectrice de portugais du Camões – Institut de la
Coopération et de la Langue à l’Université de la République à l’Uruguay.
raquelcarinhas[at]ua.pt
MARIA HELENA ARAÚJO E SÁ
Universidade de Aveiro, CIDTFF
Professeure de Didactique des Langues au Département d’Éducation et Psychologie de
l’Université d’Aveiro, Portugal. Elle dirige actuellement le Centre de Recherche en Didactique et
Technologie dans la Formation des Formateurs (CIDTFF) et est coresponsable du L@LE,
laboratoire qui travaille dans le domaine de la Didactique du Plurilinguisme et de
l’Interculturalité. Elle est responsable du Doctorat en Éducation de son université.
helenasa[at]ua.pt
DANIÈLE MOORE
Simon Fraser University, CRECHE – PluriLCo et DILTEC, Paris 3 Sorbonne Nouvelle
Professeure à la Faculté d’Éducation de l’université Simon Fraser à Vancouver au Canada, et
Directrice de recherche (HDR) à la Sorbonne Nouvelle - Paris 3 en France, ses recherches
couvrent les domaines de la sociolinguistique et de la didactique des langues et du
plurilinguisme. Ses travaux récents investissent des recherches collaboratives portant sur le
développement de pratiques éducatives innovantes autour du plurilinguisme et de la
revitalisation des langues autochtones, ces recherches impliquant écoles, familles, centres
communautaires et musées.
dmoore[at]sfu.ca
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