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10,5 x 14,8 cm | 64 pages
ISBN (LIVRE) : 978-2-84516-916-6
ISBN (EPUB) : 978-2-84516-918-0
Prix TTC: 4,50 € (LIVRE), 3 € (EPUB)
RELATIONS PRESSE
Benjamin Ducher
(+33)4 73 34 68 11
benjamin.ducher@uca.fr
DIFFUSION & DISTRIBUTION
FMSH DIFFUSION (CID)
18-20 rue Robert-Schuman, CS 90003
94220 Charenton-le-Pont
(+33)1 53 48 56 30
CID@msh-paris.fr
Bertrand Valiorgue est Professeur de stratégie et gouvernance
des entreprises à l’Université Clermont Auvergne. Il a co-dirigé
de 2012 à 2019 la Chaire Alter-Gouvernance consacrée à la
stratégie et aux pratiques de gouvernance des coopératives
agricoles et bancaires. Ses travaux portent sur la gouvernance et
la responsabilité sociale des entreprises auxquelles il a consacré
de nombreux articles et chapitres d’ouvrages.
www.bertrand-valiorgue.com
L’AUTEUR
Au cœur de notre quotidien, l’entreprise est à l’origine de nombreux
déséquilibres sociaux et environnementaux interrogeant sa contribution à
la vie de la Cité. Comment l’entreprise doit-elle fonctionner? Cet ouvrage
fait le point sur les origines du malaise qui ont conduit le législateur à revoir
en profondeur la raison d’être de l’entreprise par des modications du Code
civil et du droit des sociétés.
Il évalue aussi les dés pratiques posés par ces évolutions juridiques pour
dessiner en creux une nouvelle entreprise au service du progrès social et
environnemental.
PRÉSENTATION DE L’OUVRAGE
— En librairie (en rayon ou sur commande) ;
— Auprès de notre diuseur : FMSH Diusion (CID) (voir coordonnées ci-contre) ;
— Sur Le Comptoir des Presses d’universités (www.lcdpu.fr) et les principaux sites
de vente de livres en ligne.
Où se procurer nos ouvrages?
pubp.univ-bpclermont.fr
SITE INTERNET
PARUTION | 12 MARS 2020
THÈMES-CLÉS
entreprise • fonctionnement •
gouvernance • stratégie • Code civil •
loi PACTE • progrès social • environnement
par Bertrand Valiorgue
Loi PACTE : les contours de l’entreprise de demain.
La raison d’être, un outil pour (re)dénir le projet stratégique de
l’entreprise
Quels risques d’instrumentalisation et de dérives ?
COLLECTION
L’opportunE
Chaque année les entreprises se révèlent être en capacité de fournir des biens
et services toujours plus performants, de payer des salaires et de dégager
en même temps des dividendes pour des millions d’épargnants-actionnaires.
Ces performances économiques et technologiques des entreprises ne doivent
cependant pas masquer une réalité politique qui devient chaque jour plus évidente:
la dynamique de progrès social et environnemental est en panne.
Suivez notre actualité sur et !
AVIS DE PARUTION
LA RAISON D’ÊTRE DE L’ENTREPRISE
“
“
Sommaire
Introduction : Prospérité économique,
panne du progrès social
et environnemental 5
1. Pourquoi la raison d’être
et pourquoi maintenant ? 13
2. Gouverner la nouvelle entreprise 29
Conclusion : Dernière ruse
ou dernière chance ? 55
Bibliographie sélective 59
Webographie 63
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Introduction :
Prospérité économique,
panne du progrès social
et environnemental
Les entreprises occupent une place essentielle dans nos vies quo-
tidiennes. Elles fournissent l’ensemble des aliments nécessaires
à la physiologie humaine depuis la production des matières
premières agricoles jusqu’à la distribution de la nourriture. Elles
assurent notre mobilité à travers la fabrication d’infrastruc-
tures et supports de déplacement. Elles nous habillent, nous
soignent et fournissent l’énergie dont chacun d’entre nous a
besoin pour mener à bien ses occupations. Elles sont égale-
ment à l’origine de nombreux biens culturels qui déterminent
notre manière de penser et d’être au monde. Chaque jour, les
entreprises innovent et eectuent des prouesses pour mettre
sur les marchés une multitude de biens et de services qui
permettent aux individus de satisfaire leurs besoins (des plus
fondamentaux et urgents jusqu’aux plus triviaux et futiles).
Elles eectuent ces mises sur le marché avec des niveaux de
performance élevés qui autorisent simultanément le verse-
ment annuel de milliards d’euros de dividendes à des millions
d’actionnaires qui préparent ou vivent une paisible retraite.
Si l’on s’en tient à l’observation d’indicateurs traditionnels,
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le bilan de santé des entreprises françaises n’est pas mauvais.
En 2019, les quarante plus grandes entreprises françaises
ont versé la somme record de 49 milliards d’euros à leurs
actionnaires. Ce montant est supérieur à celui de 2008 qui
constitue le précédent record avec un montant de 43 milliards.
Ces résultats amènent certains analystes à saluer un état de
prospérité économique retrouvé. Un certain regard optimiste
pourrait ainsi conduire à une appréciation positive du système
économique par rapport à son état de fonctionnement actuel.
Un coup d’œil rapide sur les conditions de production et de
distribution de la valeur économique générée par les grandes
entreprises permet toutefois de considérablement nuancer ces
niveaux de performance.
1.
Le montant des dividendes versés chaque année aux
actionnaires ne représente qu’une partie des résultats
économiques réalisée par les grandes entreprises. Une part
signicative des prots réalisés est utilisée pour eectuer
des rachats d’actions et faire augmenter les cours de bourse
des entreprises concernées. Ces opérations boursières
servent les intérêts des investisseurs et des dirigeants. Les
premiers voient la valeur de leurs portefeuilles boursiers
croître et les seconds leurs rémunérations s’envoler. Ces
rachats d’action détruisent une valeur économique qui
n’est pas redistribuée en salaires ou en projets d’investis-
sements susceptibles de préparer l’avenir des entreprises
et de durablement soutenir l’activité économique. Pour
l’économiste William Lazonick ces pratiques de rachat
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la raison d’être de l’entreprise
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d’action de dividendes sont directement à l’origine d’un
essouement de l’économie et d’une faiblesse des dyna-
miques d’innovation.
2.
La fraction des résultats économiques versés sous formes de
dividendes ne bénécie qu’à une partie des salariés et des
ménages qui sont capables de constituer une épargne. Les
outsiders qui sont des salariés travaillant chez des sous-trai-
tants des grandes entreprises, dans des PME ou tout
simplement des salariés ubérisés, ne perçoivent aucune
part des bénéces que leur travail permet toutefois de
créer. C’est ainsi que toute une économie précarisée et
périphérique s’est mise en place an d’extraire une valeur
économique dont une partie (croissante) des salariés est
tout simplement exclue. Ce salariat a plusieurs vitesses
contribue à créer des inégalités économiques durables qui
fragilisent le tissu social et alimentent des contestations de
plus en plus fortes et visibles.
3.
Si les grandes entreprises dégagent d’importants bénéces
pour rémunérer les épargnants et maintenir des cours
d’action élevés, c’est aussi grâce aux pressions qu’elles
exercent sur leurs partenaires économiques de taille plus
modeste. Les grandes entreprises dégagent des bénéces
importants car elles ont acquis des positions dominantes
et un pouvoir économique1 sans précédent qui leur per-
met d’imposer des prix, des volumes et des qualités à des
1 Voir les travaux de Jean-Philippe Robé.
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partenaires économiques qui sont délibérément maintenus
dans un état de vassalisation.
4.
L’empreinte environnementale des entreprises et les consé-
quences de leurs activités sur l’environnement naturel
constituent une réalité prégnante. La multiplication des
externalités et des coûts laissés à la charge de l’environ-
nement sont si importants que les spécialistes du système
Terre Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz parlent
aujourd’hui d’une nouvelle ère géologique – l’anthropo-
cène – pour désigner l’impact considérable et négatif de
l’activité des entreprises sur la nature et le vivant. Dans
de nombreux secteurs d’activité, les entreprises vivent au
crédit de l’environnement et sont directement à l’origine
de dommages dont elles n’intègrent pas les coûts dans
leurs processus de décision et de production2. Le compte
de résultat environnemental de l’entreprise Kering fait
ressortir un coût environnemental qui s’élève à plus de
500 millions d’euros chaque année et qui correspond à
la somme des externalités négatives générées par l’activité
de cette entreprise (pollution de l’air, utilisation de terre,
déchets, pollution de l’eau…). Comme d’autres entre-
prises moins transparentes sur le sujet, une grande partie
des bénéces réalisés par Kering se fait au détriment de
l’environnement.
Si elles sont souvent appréhendées comme de simples acteurs
économiques, enchâssées dans des marchés au sein desquels
2 Trucost., Natural capital at risk […] (voir sitographie).
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la raison d’être de l’entreprise
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elles espèrent prospérer, les entreprises, et en particulier les
grandes entreprises, constituent des acteurs au centre de nos
sociétés contemporaines. Elles ont une multitude d’impacts
sur notre quotidien et déterminent notre futur. Si l’on s’en
tient aux indicateurs économiques traditionnels, la situation est
appréciable. Chaque année les entreprises se révèlent être en
capacité de fournir des biens et services toujours plus perfor-
mants, de payer des salaires et de dégager en même temps des
dividendes pour des millions d’épargnants-actionnaires. Ces
performances économiques et technologiques des entreprises
ne doivent cependant pas masquer une réalité politique qui
devient chaque jour plus évidente : la dynamique de progrès
social et environnemental est en panne.
C’est dans ce contexte particulier que le législateur français
a souhaité interroger la place et la contribution de l’entre-
prise à la vie de la cité. Ce travail législatif s’est traduit par
l’adoption d’une loi – la loi PACTE3 – qui contient plusieurs
dispositions susceptibles d’amener les entreprises à développer
une croissance inclusive et de mieux prendre en charge les
conséquences de leurs activités au niveau de l’environnement
et de leurs parties prenantes. Ces changements législatifs sont
décrits par les protagonistes comme une fusée à trois étages.
Le premier étage consiste à revenir sur un des articles du
Code civil (article 1833) an de repréciser la nature d’une
3 La loi PACTE (Plan d’action pour la croissance et la transformation des
entreprises) a été adoptée le 11 avril 2019 et validée par le Conseil
constitutionnel le 16 mai 2019.
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entreprise et de stipuler noir sur blanc que si une entreprise a
bien vocation à réaliser des prots, cela doit se faire en « prenant
en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son
activité ». Cette modication du Code civil ne supprime pas
La loi PACTE
La loi PACTE est une loi qui comporte de nombreux changements
législatifs afin de renforcer la compétitivité des entreprises française
et de repenser leurs contributions à la vie de la cité. La loi a fait
l’objet d’un important dispositif de consultation avant sa rédaction
afin de faire émerger des thématiques et de dégager un consen-
sus sur les mesures clés. Elle comporte des éléments polémiques
comme la privatisation partielle d’Aéroport de Paris. La loi PACTE
a porté des réformes inédites sur la place de l’entreprise dans
la société et sa contribution au progrès social et environmental.
Au-delà des modifications du Code civil et du Code de commerce,
elle a également conduit à renforcer la participation des salariés
dans la gouvernance des entreprises. Elle permet également le
développement de nouvelles logiques de gouvernance à travers
la promotion des fondations actionnaires. Domaine sur lequel, la
France accuse un retard notable par rapport à d’autres pays euro-
péens. Si certaines dispositions de la loi PACTE ont fait l’objet de
critiques et commentaires, elle a été dans l’ensemble positivement
reçue par le monde syndical aussi bien du côté des salariés que
des dirigeants.
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la raison d’être de l’entreprise
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l’essence même d’une entreprise mais précise que la génération
d’un prot doit se faire dans certaines conditions qui visent
à mieux prendre en considération les conséquences négatives
de son activité sur l’environnement et les parties prenantes.
Le deuxième étage, qui se situe toujours au niveau du Code
civil (article 1835), donne la possibilité aux entreprises qui le
souhaitent d’inscrire une raison d’être dans leurs statuts. Cette
raison d’être est constituée des « principes dont l’entreprise se
dote et pour le respect desquels elle entend aecter des moyens
dans la réalisation de son activité ». Cette raison d’être exprime
la contribution que l’entreprise attend développer par rapport
à son savoir-faire et aux aspirations profondes qui traversent la
société. Elle précise l’impact et les capacités de transformation
positives que l’entreprise souhaite développer pour le bénéce
du plus grand nombre. Le dernier étage de ce projet de redé-
nition de la place de l’entreprise se situe au niveau du Code de
commerce. Il donne aux dirigeants qui le souhaitent la possi-
bilité de devenir des « entreprises à mission ». Ces entreprises
inscrivent une raison d’être dans leurs statuts et précisent les
objectifs sociaux et/ou environnementaux qu’elles souhaitent
poursuivre dans le cadre de leurs activités commerciales. Les
organes de gouvernance de ces entreprises à mission doivent
également être adoptés et recongurés an de s’assurer que
l’entreprise alloue les ressources nécessaires et remplie les
objectifs sociaux et environnementaux qu’elle s’est xés4. Cet
4 Pour une présentation des enjeux et du mode de fonctionnement
des entreprises à mission voir les travaux de Blanche Sergrestin et
Kevin Levillain (2018).
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ensemble de mesures législatives vise à traiter de manière
directe et par diérentes voies complémentaires les limites,
voire les impasses, du système économique actuel caractérisé
par une performance économique qui se fait au détriment de
la prospérité sociale et du respect de l’environnement.
Notre objectif dans cet essai ne saurait être de juger et
d’évaluer les eets de ces transformations législatives sur la
dynamique du système économique dans son ensemble. Nous
souhaitons, plus modestement, nous interroger sur les origines
et les problèmes de fond dans le fonctionnement des grandes
entreprises qui ont poussé le législateur français à promouvoir
des changements législatifs substantiels an de pousser les
entreprises à mieux contribuer au progrès social et environ-
nemental (partie 1). Nous proposons également de dessiner les
contours de la nouvelle entreprise qui se dessinent à l’issue de
la loi PACTE en détaillant l’ensemble des changements qu’il
convient de mettre en place an de redénir la contribution
de l’entreprise à la vie de la cité et d’enclencher une nouvelle
dynamique de progrès social et environnemental (partie II).
Nous concluons en soulignant les risques d’instrumentalisation
de la notion de raison d’être en raison d’un travail législatif
qui demeure en grande partie inachevé.
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