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Les espèces exotiques envahissantes
et leur gestion
Florian Charvolin, Patrick Grillas, Loïc Marion, Alexandre Millon,
François Moutou, Elise Tancoigne, Aline Treillard
Avec la participation de Dominique Aribert et Jean-Marc Thiollay
LPO- Conseil Scientifique et Technique Janvier 2018
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Sommaire
RESUME ................................................................................................................................................... 4
1. Préambule ....................................................................................................................................... 9
2. Introduction. Les EEE, un concept envahissant ............................................................................. 10
2.1. Quelques définitions ............................................................................................................. 10
2.2. Un concept difficilement opérationnel ................................................................................. 12
2.3. Une vision spécifique de la nature ........................................................................................ 13
2.4. Métaphores et politiques publiques ..................................................................................... 13
3. Législation et cadres stratégiques : état des lieux ........................................................................ 15
3.1. Qualification de l’espèce en fonction de son aire de répartition naturelle .......................... 15
3.2. Définition juridique de l’espèce exotique envahissante ....................................................... 15
3.2.1. Le droit de l’Union Européenne .................................................................................... 15
3.2.2. Le droit français ............................................................................................................. 17
4. Des exemples d’EEE ....................................................................................................................... 21
5. Origines des introductions ............................................................................................................ 22
6. Quantification du problème à l’échelle de l’UE et de la France .................................................... 23
6.1. Combien d’espèces exotiques arrivent en Europe et d’où viennent-elles (EEE) ? ................ 25
6.2. Devenir des espèces introduites (combien deviennent envahissantes) ? ............................ 27
6.3. Espèces EEE préoccupantes en Europe et en France (OM et métropolitaine): .................... 29
6.3.1. Origine des espèces préoccupantes en France métropolitaine .................................... 30
7. Impacts des EEE ............................................................................................................................. 30
7.1. Impacts écologiques .............................................................................................................. 31
7.1.1. Menaces représentées par les EEE sur les plantes ..................................................... 33
7.1.2. Menaces représentées par les EEE sur les oiseaux ....................................................... 34
7.2. Impacts économiques ........................................................................................................... 36
7.2.1. Coût de l’impact des EEE sur les espèces menacées ..................................................... 37
7.2.2. Espèces les plus coûteuses en termes de lutte en métropole ...................................... 38
7.2.3. Espèces les plus coûteuses en termes de lutte en outre-mer ....................................... 38
7.3. •Impacts sanitaires ................................................................................................................ 39
7.4. Les impacts positifs des EEE sur la biodiversité ..................................................................... 39
7.4.1. Impacts positifs des EEE en métropole ......................................................................... 39
8. Gestion des EEE ............................................................................................................................. 40
8.1. Prévention ............................................................................................................................. 40
8.1.1. Maitriser le flux d’arrivée des EEE ................................................................................. 41
8.1.2. Identifier les espèces susceptibles de devenir envahissantes ...................................... 42
8.2. Détection précoce ................................................................................................................. 43
8.3. Gestion des EEE établies........................................................................................................ 44
8.4. Mise en œuvre de la stratégie de gestion des EEE ................................................................ 45
............................................................................................................................................................... 46
Références ............................................................................................................................................. 47
ANNEXE 1 : Liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l'Union. ......................... 53
ANNEXE 2. Diversité des régimes d’introduction et de gestion des espèces invasives en droit interne.
............................................................................................................................................................... 54
ANNEXE 3 Les 12 propositions de la stratégie nationale relative aux EEE (MEEM 2017). ................... 56
ANNEXE 4. Liste des espèces très préoccupantes et préoccupantes en France ................................... 57
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RESUME
Les espèces exotiques envahissantes et leur gestion
CST LPO 2018
DEFINITION
1. Parmi les nombreuses terminologies et définitions utilisées, y compris règlementaires (nationales,
européennes, UICN), nous avons retenu Espèce Exotique Envahissante (EEE ; Invasive Alien
Species en anglais) pour décrire « toute espèce allochtone dont l'introduction par l'Homme,
volontaire ou fortuite, l'implantation et la propagation menacent les écosystèmes, les habitats ou
les espèces indigènes entrainant des conséquences écologiques ou économiques ou sanitaires
négatives».
2. La notion d’Espèce Exotique Envahissante conjugue deux caractéristiques distinctes: l’introduction
par l’Homme et l’impact négatif notable sur la diversité, le fonctionnement des écosystèmes, la
santé et/ou l’économie.
3. La notion reste toutefois basée sur des notions variables selon l’origine géographique, la date
d’introduction prise comme référence et l’ampleur du caractère envahissant.
4. Les termes d’exotique et d’envahissant, joints tous les deux, ont une connotation sociale négative
qui porte sur ce qui vient d’ailleurs. Comme métaphore rapprochant sciences biologiques et grand
public, ils débordent le seul champ des espèces vivantes pour s’inscrire dans des visions plus
générales touchant aussi les personnes humaines. D’autre part les EEE impliquent un sens
ordinaire de responsabilité vis-à-vis de l’étranger, de recherche des causes et des remédiations
que les scientifiques partagent avec les acteurs de la société en général. Ce sens ordinaire
concerne également la manière cognitive d’appréhender la nature sous forme catégorielle, qui,
implicitement, se fonde sur des distinctions, des standards, des hiérarchisations variées selon
l’aire culturelle et les références de base choisies pour objectiver ce qui compte comme EEE.
PROCESSUS ECOLOGIQUES & CARACTERISATION DU PROBLEME
5. L’augmentation des déplacements et les modifications importantes de la répartition de l’espèce
humaine à l’échelle du globe aux XVI-XVIIIème siècles associées à l’intensification considérable des
échanges de biens et de personnes au cours des siècles suivants ont engendré le déplacement
d’espèces au sein de territoires qui leur étaient inaccessibles par le processus naturel de
dispersion. Les introductions ont été et sont volontaires (acclimatation) ou accidentelles.
Beaucoup de données anciennes (répartition, déplacement) sont peu précises. La vitesse d’arrivée
de nouvelles espèces ne montre aucun ralentissement dans la plupart des régions du Monde et le
nombre d’EEE est bien corrélé aux échanges commerciaux/économiques.
6. Parmi les espèces ainsi exportées hors de leur zone de distribution naturelle, seule une minorité
parviendra à s’acclimater au nouvel environnement (processus de naturalisation). Il y a de très
grandes différences entre taxons dans le monde (et selon les zones), les mammifères et les
plantes arrivant très largement en tête, secondairement les araignées, insectes, poissons et
batraciens, tandis que les oiseaux et les reptiles arrivent très loin derrière. Parmi ces espèces
naturalisées, une minorité aura des conséquences négatives importantes sur l’écosystème
5
autochtone et sera considérée comme EEE. L’expérience montre que la probabilité qu’une espèce
introduite devienne envahissante varie fortement selon les taxons : plus faible chez les plantes
que chez les vertébrés, et selon les zones. Des espèces ont été catégorisées comme EEE parmi
tous les groupes taxonomiques, micro-organismes compris.
7. La résilience d’un écosystème aux EEE est fortement variable. Un écosystème préalablement
fragilisé par des actions anthropiques sera plus sensible aux EEE. Les écosystèmes insulaires, de
par leur faible redondance écologique, sont également plus vulnérables aux EEE que les
écosystèmes continentaux. L’endémicité étant élevée sur les îles, les impacts peuvent y être
spectaculaires, notamment sur les îles isolées, où les cas de disparition d’espèce sont les plus
nombreux.
8. Les EEE altèrent la structure et le fonctionnement global des écosystèmes en modifiant les
interactions biotiques telles que la compétition et la prédation, de manières multiples directes
(compétition, prédation) ou indirectes (compétition apparente). Parmi les EEE les plus
impactantes, on trouve des espèces prédatrices comme le Vison d’Amérique sur le continent et,
au sein d’écosystèmes insulaires, des espèces comme le Rat noir, la Petite Mangouste indienne ou
le Lapin de garenne ainsi que les mammifères domestiques. Chez les plantes, des espèces très
dominantes comme les jussies ou les renouées asiatiques sont parmi celles ayant le plus
d’impacts sur les écosystèmes.
9. Le caractère envahissant d’une espèce exotique peut se manifester longtemps après son
introduction et sa naturalisation. Celui-ci peut n’être que transitoire (ex. Caulerpa taxifolia en
Méditerranée). Par exemple, les changements climatiques à venir pourront moduler le caractère
envahissant des espèces introduites dans un sens comme dans un autre
10. Si certaines espèces sont reconnues aujourd’hui comme des EEE particulièrement délétères dans
de multiples régions du Monde, le caractère envahissant d'une espèce dépend néanmoins de
nombreux paramètres, intrinsèques (liés à l'espèce) et extrinsèques (liés à l’environnement et à la
société), variables dans l’espace et dans le temps. En conséquence, les prédictions quant aux
impacts relatifs à une espèce donnée dans un environnement donné peuvent s’avérer difficiles.
MESURE DES IMPACTS
11. Les impacts des EEE sont multiples incluant des impacts écologiques, économiques et sanitaires.
12. L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) considère les EEE comme la 5ème
cause d’érosion de la Biodiversité à l’échelle mondiale. Les EEE sont identifiées comme le principal
facteur impactant pour 5% des espèces au statut de conservation jugée défavorable, dans des
contextes insulaires pour la plupart des cas. Pour comparaison, la dégradation ou la perte
d’habitats (43%) et la surexploitation (chasse, pêche, cueillette ; 37%) représentent de loin les
causes principales de déclin des populations animales et végétales sur notre planète. Ces facteurs
se combinent et s’additionnent.
13. Les EEE contribuent à l’érosion globale de la biodiversité, par la réduction des populations
animales et végétales indigènes, pouvant mener à l’extinction de certains taxons. Les mécanismes
sont multiples, les plus généralisés étant la dominance (exclusion compétitive), la prédation des
espèces indigènes et l’altération de la structure et du fonctionnement des écosystèmes.
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14. Toutefois, parmi les espèces qualifiées d’EEE peu ont pu faire l’objet d’une analyse rigoureuse
quant à leur contribution relative parmi l’ensemble des facteurs de dégradation, notamment
d’origine anthropique.
15. Les impacts des EEE ne sont pas systématiquement ou seulement négatifs. Par exemple, si
l’Ecrevisse de Louisiane peut avoir des impacts négatifs sur les espèces indigènes d’écrevisses, la
végétation et les peuplements d’invertébrés aquatiques, elle a un impact très positif sur les
populations d’espèces qui s’en nourrissent (notamment les Ardéidés ou la Loutre d’Europe).
16. Les impacts négatifs des EEE peuvent s’amenuiser avec le temps ou devenir indétectables. Dans
le cas de certaines introductions d’espèces très anciennes, l’écosystème d’origine n’est plus
connu. Des expériences d’éradication en milieux insulaires ont toutefois révélé l’impact réel des
EEE sur les espèces indigènes et d’une manière plus générale, sur le fonctionnement de
l’écosystème.
17. Les EEE peuvent avoir des impacts importants sur l’économie, par exemple par leurs effets sur les
infrastructures (Ecrevisse de Louisiane, Ragondin sur les infrastructures hydrauliques), sur les
populations d’espèces exploitées (crépidule sur les sites de reproduction des poissons plats,
Frelon asiatique sur les abeilles domestiques et la production de miel). Les impacts sanitaires
concernent particulièrement l’introduction d’espèces vectrices de maladies (par exemple
Moustique tigre vecteur de la dengue et du chikungunya), allergisantes (pollen de l’Ambroisie), ou
toxique (sève phototoxique de la Berce du Caucase). Les impacts sanitaires expliquent une grande
partie des coûts (plus de 50% en Outre-mer, 25% pour le seul Moustique tigre en métropole).
18. Les EEE sont devenues un sujet porteur, drainant des ressources importantes, tant au niveau de
la recherche scientifique que dans les administrations. Les actions de gestion et de conservation
doivent intégrer l’ensemble des facteurs à travers une analyse coûts/bénéfices globales, et pas
seulement ceux liés aux EEE, si l’on souhaite enrayer la dégradation des écosystèmes de manière
efficace.
ETAT DES LIEUX REGLEMENTAIRE
19. L’inventaire DAISIE recense 12 122 espèces exotiques (ou allochtones) en Europe dans sa
géographie Paléarctique (i.e. hors Outre-Mer), dont 2600 en France (3ème rang européen, mais
c’est le pays le plus vaste).
20. Les EEE font l’objet de réglementations diverses fondées sur un savoir catégorique et des critères
reconnus. Elles sont à la fois une qualification issue de constats et de débats scientifiques, et une
liste officielle et normative à laquelle on indexe des espèces. Leur définition associe scientifiques
et administratifs dans la mesure où elle engage aussi les Etats et les instances supra-étatiques.
Cela introduit des procédures et des compromis qui ne sont pas exempts d’une plus ou moins
grande déviation par rapport aux exigences scientifiques de revue par les pairs (peer reviewing) et
d’atteinte du consensus à partir de l’expression des diverses options de priorisation en jeu.
21. L’Union Européenne a adopté en 2014 un règlement visant à lutter contre les EEE préoccupantes
à dire d’experts, présentes dans au moins 2 pays, et contraignant tous les Etats membres à limiter
ou éradiquer ces espèces (sans possibilité pour les états membres de se prononcer sur chaque
espèce mais sur la liste globale). Une première liste prioritaire de 37 espèces a été publiée en
2016 (14 plantes, 9 mammifères, 6 crustacés, 3 oiseaux, 2 poissons, 1 amphibien et 1 insecte),
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puis une seconde en 2017 de 12 espèces (9 plantes, 2 mammifères, 1 oiseau). Ces listes s’écartent
sensiblement des 100 espèces jugées les plus préoccupantes en Europe (liste DAISIE) ou dans le
monde (liste UICN), là aussi à dire d’experts, car ont été notamment exclues des espèces
présentant un intérêt économique pour certains états (ex. vison d’Amérique). La France est allée
plus loin dans l’application de ce règlement européen en rajoutant des espèces dont certaines
introduites depuis très longtemps (ex. carpe) et surtout en incluant des espèces natives protégées
(Grand cormoran, goélands et Loup).
22. Tout en contribuant à la liste de l’Union Européenne, le ministère de l’environnement français a
confié au Conseil Général du Développement Durable une analyse indépendante sur les espèces
les plus préoccupantes en France, selon 66 organismes de gestion de la biodiversité, en analysant
les impacts négatifs ou positifs ainsi que les coûts de lutte, selon la métropole et l’Outre-Mer. Les
2/3 des EEE préoccupantes et des coûts concernent l’Outre-Mer. En métropole, 51 espèces ont
été classées parmi les plus préoccupantes ou les plus répandues dont 39 plantes, 3 crustacés, 3
mammifères, 2 poissons, 2 mollusques, 1 reptile et 1 insecte (aucun oiseau). Les 10 pires, en ordre
décroissant sont la Renouée du Japon, la Jussie à grande fleurs, l’Ambroisie, le Ragondin,
l’Ecrevisse de Californie et celle de Louisiane, l’Erable Négundo, l’Elodée du Canada, la Jussie
rampante et le Vernis du Japon. Trente-trois autres espèces sont jugées moins préoccupantes
(dont 21 plantes). L’écart de ces listes avec celle de l’Europe est considérable (seules 20 espèces
communes sur les 133 espèces cumulées).
STRATEGIES DE GESTION
23. La gestion des EEE doit être fondée sur une stratégie associant la prévention, la surveillance et
une analyse des risques d’impacts et de gestion. Lorsque des mesures de gestion sont nécessaires,
une analyse coûts-bénéfices de celles-ci doit être impérativement menée pour en évaluer la
pertinence, l’efficacité tant du point de vue écologique que social. Les mesures de gestion des EEE
envisageables incluent l’éradication, la réduction des densités localement, la limitation du front
d’invasion.
24. La limitation des ressources dédiées à la préservation de l’environnement préconise une
concentration des efforts sur les EEE dont les impacts importants sur l’écosystème sont avérés.
Toutefois, ceux-ci apparaissent typiquement lorsque la phase d’envahissement est amorcée.
25. La probabilité de succès de l’éradication d’une EEE est d‘autant plus élevé et inversement le coût
du contrôle d’autant plus faible ou que les mesures sont mises en place tôt. La difficulté est de
trancher rapidement entre espèce peu envahissante et véritable EEE. Attendre d’en être certain
risque de rendre aléatoire la probabilité de succès des mesures de gestion. Agir trop tôt risque de
mobiliser pour une espèce peu agressive dans un contexte de moyens limités. La veille
bibliographique sur l’impact des EEE à l’international peut fournir des informations intéressantes
afin de diriger les efforts de conservation de manière optimale.
26. Des opérations d’éradication d’EEE (Rat noir et autres espèces de rongeurs, chat haret comme
cibles principales) ont été entreprises avec succès sur des îles océaniques autour de l’Australie et
de la Nouvelle-Zélande notamment, via des campagnes d’empoisonnement. A ce jour, la plus
grande île d’où ces EEE ont été éliminées est Campbell Island (113 km² ; Nouvelle-Zélande). De
même le Ragondin et le Rat musqué ont été éradiqués de Grande-Bretagne.
8
27. Des effets de synergies entre EEE et espèces natives peuvent rendre désastreuses des opérations
d’éradication partielle ou totale (ex. sur Crozet et Kerguelen, interaction entre chat et rat ou
l’éradication d’une seule des deux espèces peut amplifier les effets négatifs sur les populations
d’oiseaux, tout comme l’augmentation de la hauteur de la végétation suite à l’éradication des EEE
herbivores). Les mesures de limitation ou d’éradication ne doivent pas avoir d’effets collatéraux
sur les espèces natives protégées, conformément à la réglementation européenne.
28. La meilleure façon de lutter contre les EEE reste sans aucun doute d’en prévenir l’introduction au
sein de nouveaux territoires. Le taux d’introduction montre en effet une croissance exponentielle
pour la plupart des groupes taxonomiques, à l’exception des mammifères et des poissons, et ce
dans toutes les grandes régions du Monde.
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1. Préambule
Par courrier du 23 janvier 2017, le Conseil d’Administration de la LPO faisait appel au
Président du Conseil Scientifique et Technique de la LPO pour mener une réflexion sur les
espèces exotiques envahissantes (ci-après « EEE »), sujet de débat déjà ancien à la LPO (de
Grissac 2017). L’objectif de cette saisine est d’apporter un soutien scientifique à la
clarification de la position générale de l’association sur cette thématique : dresser le cadre,
l’état des lieux et les bonnes questions à se poser. La lettre de saisine demande
explicitement que la dimension éthique de la problématique ne soit pas abordée par le
Conseil Scientifique et Technique (CST). Le Conseil Scientifique et Technique en prend acte
mais tient toutefois à alerter quant au fort degré d’interdépendance qui unit les
questionnements scientifiques et sociaux dans le cadre de cette thématique (voir section 2.4
et de Grissac 2017). A cette fin, le Conseil Scientifique et Technique souhaite préciser que les
termes mêmes d’espèces « exotiques envahissantes » supposent déjà l’acception implicite
de postulats scientifiques dont les fondements sont remis en cause par certains auteurs, et
que la construction de cette métaphore procède de nombreux aller-retour entre sciences,
politiques publiques et média. En outre, les mécanismes qui sous-tendent les invasions sont
à la fois d’ordre biologique, sociologique et économique. Par conséquent, la thématique des
EEE ne peut être abordée sans tenir compte de sa dimension sociale (au sens large), ni du
sens qu’elle prend aujourd’hui dans les débats sur la gestion et la conservation de la
biodiversité.
La méthodologie retenue par le CST pour répondre à la demande du Conseil
d’Administration a consisté à rendre compte des controverses qui animent la thématique,
dès le stade de la définition de l’espèce exotique envahissante (section 2). Elle se poursuit
ensuite par une synthèse quantitative du problème à l’échelle de l’UE et de la France
(sections 3 et 4) afin de saisir les impacts (section 5) et les coûts liés à la gestion des EEE
(sections 6 et 7).
Le rapport se fonde sur une revue de la littérature et sur la connaissance experte qu’ont
acquise certains de ses membres en tant qu’acteurs de la construction des cadres législatifs
sur les EEE. Il est le fruit de réflexions pluridisciplinaires qui invitent à conclure à
l’impossibilité de dresser un portrait-robot univoque des EEE tant elles désignent des réalités
différentes et tant les causes et conséquences sont à distinguer. Toutefois cette impossible
définition catégorique ne doit pas faire oublier les conséquences et les bouleversements
pour l’homme et la nature encourus par le développement des espèces envahissantes sur le
territoire.
10
2. Introduction. Les EEE, un concept envahissant
L’étude des EEE est délicate et riche de nombreux paradoxes. Il semble bien qu’Homo
sapiens et quelques autres espèces humaines qui l’ont précédé soient les seules espèces à
avoir envahi l’ensemble des terres habitables de la planète. Or d’une part, les représentants
du genre Homo n’ont jamais voyagé seul. Animaux, plantes, microorganismes les ont
accompagnés, de façon volontaire ou accidentelle. D’autre part, la dernière espèce humaine
arrivée semble bien avoir contribué, d’une façon ou d’une autre, à la disparition des espèces
humaines précédentes. Déplacer des espèces, qu’elles qu’en soient les motivations puis les
conséquences, semble représenter une constante de l’espèce humaine. Ce qui surprend
aujourd’hui les gestionnaires et acteurs de la biodiversité, ce sont les volumes échangés et la
rapidité actuelle de ces déplacements ainsi que le constat bien documenté de quelques
conséquences écologiques et économiques sévères associées à certaines de ces
introductions.
En outre, le CST de la LPO tient à mettre en évidence un point qui lui semble être trop peu
mentionné dans la littérature scientifique analysée et concernant la France. Les réflexions
menées et les solutions envisagées ne peuvent être appliquées de manière identique entre
d’un côté le territoire métropolitain (c’est-à-dire continental) et de l’autre les territoires
insulaires. Ces derniers sont davantage concernés en ce sens qu’ils sont plus vulnérables. Les
impacts négatifs des EEE les extinctions notamment se manifestent d’ailleurs
principalement dans les milieux insulaires, ce qui pourrait justifier une position plus nuancée
dans le cadre de la lutte contre les EEE sur le territoire métropolitain continental.
L’expression « espèce exotique envahissante » ne peut se comprendre sans avoir recours à
deux autres conceptions qui existent en miroir de celle-ci : celle d’espèce « autochtone »
d’une part ; et celle d’espèce « naturalisée », d’autre part. Cette conceptualisation de la
thématique des EEE suivant une double dichotomie autochtonie/allochtonie et
intégration/absence de contrôle, soulève un certain nombre de questions et de difficultés
que nous retrouverons dans chacune des parties de ce rapport, à commencer par les
définitions.
2.1. Quelques définitions
La notion d’EEE implique plusieurs étapes dont les définitions restent en partie ambigües,
concernant l’origine géographique (« exotique ») et le caractère envahissant.
Une espèce est dite autochtone d’une entité géographique donnée et pour une période
donnée quand elle est représentée sur cette entité par des populations pérennes
(=autonomie de reproduction) au début de cette période considérée (Pascal et al. 2006,
Thévenot 2014). A l’inverse, une espèce allochtone1 est une espèce qui, absente de cette
1 La littérature scientifique sur les espèces envahissantes ou invasives a tendance à considérer le
terme d’ « exotique » comme synonyme d’allochtone.
11
entité au début de la période considérée, l’a par la suite "colonisée" et y a constitué des
populations pérennes (par rapport à sa population d’origine). Toutefois, la problématique
des EEE telle que posée par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN),
ou la Communauté Européenne ne retient que les espèces qui ont été introduites
(volontairement ou non) par l’homme. Elles doivent aussi être envahissantes, dans le sens
qu’elles menacent les espèces autochtones, leurs écosystèmes voire l’économie.
Espèce Exotique Envahissante (EEE) : ce terme, traduit de l’expression
internationale « Invasive Allochtonous Species » ou « Invasive Alien Species », est
celui que nous retiendrons dans ce rapport. Il s’agit d’espèces introduites par
l’homme hors de leur aire normale de distribution puis qui se sont naturalisées (=
populations pérennes) et qui ont un effet délétère important sur les espèces
et/ou les écosystèmes autochtones (= natifs).
Des imprécisions persistent quant à la notion de limites géographiques à prendre
en compte pour l’allochtonie et à l’ampleur de l’impact écosystémique ou
économique (cf. 2.2).
Espèce passagère : traduit de l’anglais « passengers species ». Espèces introduites qui
deviennent envahissantes parce qu’elles profitent des modifications préalables des
écosystèmes par l’homme (MacDougall & Turkington 2005, Teyssèdre & Barbault 2009).
Elles ne sont pas intrinsèquement « mauvaises », elles le deviennent à cause des
perturbations anthropiques déjà subies par les écosystèmes, ce qui explique souvent que
des espèces deviennent envahissantes hors de leur aire de répartition alors qu’elles ne le
sont pas dans celle-ci. Le changement global (« Global Change » : combinant à la fois
changement climatique et perturbations des écosystèmes par l’homme) va accélérer
fortement l’arrivée naturelle d’espèces allochtones et favoriser leur naturalisation.
Une espèce naturalisée est une espèce parvenue naturellement ou par introduction par
l’homme hors de son aire habituelle et qui réussit à devenir autonome par rapport à sa
population d’origine2.
Une espèce naturalisée devient envahissante lorsqu’elle échappe aux mécanismes de
régulation (Branquart & Fried 2016) qui limitent la variation de sa population dans le temps
2 La majorité des espèces qui parviennent hors de leur aire de répartition disparaissent rapidement,
l’étape de la naturalisation concernant une minorité d’espèces, et environ une sur mille d’entre elles
poseront problème (envahissantes) (Williamson 1996). cf. chap 6.2
12
autour d’une valeur moyenne (Rockwood 2015)3. Elle peut ne plus être envahissante lorsque
des mécanismes de régulation se mettent en place.
2.2. Un concept difficilement opérationnel
Les espèces autochtones et allochtones sont définies selon des bornes spatiales et
temporelles. Or, il est empiriquement très difficile de fixer ces bornes. La position de Pascal
et al. (2006) est issue d’un choix méthodologique très discutable, à savoir la preuve de la
présence des espèces dans les restes archéologiques. Or certaines espèces se conservent
très mal (os des oiseaux), et surtout les restes archéologiques dépendent des habitudes
alimentaires des humains à ces époques reculées, en partie liées à leurs coutumes, leurs
religions, leurs moyens de capture. En outre, les régions ne sont pas comparables du point
de vue conservation de restes archéologiques (présence humaine historique, existence de
grottes inviolées, couches géologiques adéquates, etc…). La notion d’EEE s’appuie ainsi sur la
notion de faunes et de flores figées à une date arbitraire (holocène = 11 000 ans, 5000 ans,
ou de référentiel arbitraire. Ainsi, l’année 1500 est retenue par l’UICN pour des raisons de
connaissance historiques sur les répartitions [pourtant très faible avant le XXème siècle] et
par le début des grandes explorations ayant permis l’établissement de colonies outre-mer
par les Européens).
L’autre problème soulevé par le travail de Pascal et al. (2006) concerne les limites
géographiques à prendre en compte. Ces auteurs sont allés très loin dans cette direction, en
parlant d’allochtones de zones purement administratives (départements, régions) qui n’ont
aucune valeur biologique. Les frontières des Etats n’en ont pas d’avantage. La seule notion
géographique qui a un sens est la zone biogéographique définie pour chaque groupe
biologique considéré (plantes, poissons, mammifères, oiseaux, etc… dont les facultés de
déplacement et de colonisation diffèrent largement, et par conséquent l’homogénéité
géographique de leurs communautés). Mais les Etats ont tendance à ne considérer que leurs
limites géographiques (idem pour l’Union Européenne).
Par ailleurs la stabilité numérique, et par conséquent géographique des populations, est un
leurre. L’instabilité est la règle, en fonction des dynamiques de populations qui obéissent à
de nombreux facteurs (ressources alimentaires, succès de reproduction, taux de mortalité,
en fonction des autres espèces compétitrices, parasitaires ou prédatrices, y compris
3 Certains auteurs (Valéry et al. 2008, Valéry et al. 2009, Wilson et al. 2009a,b) ont avancé l’idée que des
espèces autochtones peuvent devenir envahissantes, c’est-à-dire modifier de manière importante le
fonctionnement d’un écosystème, généralement par modification préalable des conditions trophiques (ex :
apports de nutriments ou de ressources alimentaires) ou physiques (ex : modification de niveaux d’eau,
décapage du sol…). C’est par exemple le cas du Chiendent qui envahit la Baie du Mont Saint Michel,
probablement à cause de l’augmentation des nitrates apportés depuis le bassin versant. D’autres auteurs
défendent une conception biogéographique stricte du phénomène d’invasion biologique (seule une espèce
exotique peut être envahissante.
13
l’homme, des variations climatiques, etc…). En général on se contente donc de la distinction
entre espèces introduites par l’homme (=allochtones) ou pas (=autochtones), l’introduction
étant un fait moins difficile à établir que l’allochtonie ou l’autochtonie (Thévenot 2014).
2.3. Une vision spécifique de la nature
La dichotomie autochtone/allochtone contient en outre un soubassement théorique
discutable. Ici, l’intégrité des écosystèmes est envisagée comme un principe essentiel de la
protection de la nature. Elle renvoie à une référence de naturalité qui se manifeste par un
fonctionnement non altéré des écosystèmes, et la présence exclusive d’espèces
autochtones : une référence « édénique » de naturalité (Head 2017).
Cela interroge le choix méthodologique de l’unité considérée. Soit l’on arrête l'analyse
écologique sur une unité naturelle bordée, un contenant lié à un stock, soit on peut
considérer la nature comme un flux, et les espèces selon des trajectoires (Blandin 2009).
Une alternative serait de faire de l' « invasivité » de l'espèce une affaire de gradients, et de
plus ou moins de déviation dans les trajectoires spatiales, historiques et évolutionnistes des
espèces sur le territoire.
Une autre interrogation concerne la place que l’Homme se donne dans ce système de
représentation. Les concepts d’espèces « indigène » et « exotique » liés aux EEE créent une
représentation de la naturalité dont l’homme serait absent. C’est lui qui, par son action
représentée comme extérieure à cette nature, son action de déplacement (volontaire ou
non) transforme une espèce « indigène » en une espèce « exotique ». La notion d’EEE
contient donc une référence de naturalité dont l’homme est lui-même exclu, étranger (Head
2017).
2.4. Métaphores et politiques publiques
Beaucoup de littérature, y compris de biologie, fait état de l'usage abondant de métaphores
pour décrire les espèces envahissantes, d'une part sur ce qui fait le caractère natif d'une
espèce, et d'autre part sur la qualité d’"envahissant" : métaphores militaires, médicales,
nationalistes, culturelles (Tassin & Kull 2012). L'analyse porte alors sur le caractère de
métaphore du vocabulaire utilisé pour qualifier ces espèces envahissantes, dont plusieurs
auteurs estiment qu'elle est consubstantielle à la catégorie et non pas éliminable comme
biais non scientifique. Certains plaident alors pour une "responsible metaphor management"
qui suppose d'expliciter les métaphores utilisées dans le langage des biologistes sur ces
questions, pour en gros faire des choix en connaissance de cause, du point de vue
méthodologique interne à la science, et aussi pour mieux maîtriser les allers et retours entre
science, politiques publiques et média (Verbrugge et al. 2016).
Des travaux de SHS exploitent également la résonnance entre d’une part envahissant ou
indigène (ou « natif ») pour des espèces faunistiques et floristiques, et d’autre part les
débats sur l'étranger dans la société en général, à partir d'une méthode analogique (Rémy &
14
Beck 2008). Il s'agit ici d'exposer des airs de famille entre débat sur le statut de l'étranger et
le débat sur les espèces envahissantes, voire même avec le courant nazi et l'apartheid pour
certains (Peretti 2010)4.
Le rapport à la société de la question des plantes envahissantes n'est pas seulement que
métaphorique. Il s'établit de manière frappante par des politiques publiques à forte teneur
scientifique. Le fonctionnement conjoint des catégories d'« invasivité » dans le domaine
naturaliste d’une part et politique d’autre part, trouve par exemple des démonstrations
éclatantes avec le fait noté qu'aux Etats-Unis, sous la présidence de Georges W. Bush
l'Animal and Plant Health Inspection Service, qui s'occupe des espèces envahissantes, a été
inclus dans le département du Homeland Security qui s'occupe de la sécurité nationale
(Larson 2005). L'auteur qui rapporte ce fait montre ainsi la propension de rencontre entre
ces deux univers, naturalistes et militaires.
Le fait n'est pas isolé, si l'on considère que la nature voit marcher main dans la main le
scientifique et l'administratif depuis des siècles, les uns enquêtant les autres protégeant, ou
gérant ce qu'on appelle maintenant la biodiversité. C'est ainsi que l'entomologie nord-
américaine du début XXe était déjà très liée à la question de la protection du territoire par
rapport aux espèces envahissantes, en installant ses stations d'étude et de contrôle à
proximité des grands ports où transitaient marchandises et immigrants (Castonguay 2004).
Les questions de l'insecte étranger et de l'étranger humain ou marchand, étaient déjà liées.
D'autres initiatives récentes incitent à accroitre notre double lecture à la fois biologique et
sociale des plantes envahissantes. Un rapport suisse de la Commission fédérale d'éthique
pour la biotechnologie datant de 2008, porte sur "La dignité de la créature dans le règne
végétal. La question du respect des plantes au nom de leur valeur morale" (CENH 2008, Fall
& Matthey 2011). Les auteurs qui analysent ce rapport repèrent les mêmes catégories
d'altérité et de non-contrôlabilité des espèces végétales migrantes. Ils notent enfin l'appel
de cette idée de "pureté" pour le public en général et les allers et retours entre savants et
société suisse dans le domaine.
4 Ces considérations sont reprises par certains scientifiques, non pas pour critiquer la science mais pour noter la
proximité étroite entre savoir savant et savoir populaire autour de deux éléments clés : la responsabilité
humaine des introductions, et le danger qui est encouru par les autres espèces. Le vocabulaire de la
responsabilité humaine, voire la désignation des coupables, et le sentiment de courir un danger sont en effet
des traits communs à la sensibilité ordinaire tant des savants que des citoyens (Verbrugge et al. 2016, p.276).
15
3. Législation et cadres stratégiques : état des lieux
Un ensemble de références juridiques règlementent les EEE au niveau national, européen et
international.
3.1. Qualification de l’espèce en fonction de son aire de répartition naturelle
L’article 3 du règlement européen n°1143/2014 du Parlement européen et du conseil du 22
octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des
espèces exotiques envahissantes définit comme exotique: « tout spécimen vivant d’une
espèce, d’une sous-espèce ou d’un taxon de rang inférieur d’animaux, de végétaux, de
champignons ou de micro-organismes introduit en dehors de son aire de répartition
naturelle, y compris toute partie, gamète, semence, œuf ou propagule de cette espèce, ainsi
que tout hybride ou toute variété ou race susceptible de survivre et, ultérieurement, de se
reproduire ». Le règlement prend parti de ne pas qualifier une espèce comme exotique
quand l’évolution de son aire de répartition naturelle est le résultat de la modification de
conditions écologiques et du changement climatique (article 2 paragraphe 2.a). Pour le
législateur européen donc, le critère de l’intervention humaine est déterminant pour
qualifier une espèce comme étant exotique.
Il est important de noter que le qualificatif d’ordre géographique retenu pour identifier une
espèce ne préjuge pas de son caractère envahissant. A ce jour la réglementation sur les
espèces envahissantes ne prend en compte, dans le droit de l’Union Européenne et le droit
français (loi du 8 août 2016), que les exotiques. Une espèce exotique peut changer de statut
et devenir une « espèce exotique envahissante » dès lors qu’elle pose problème au maintien
de la diversité biologique.
3.2. Définition juridique de l’espèce exotique envahissante
3.2.1. Le droit de l’Union Européenne
L’article 3 du règlement européen n°1143/2014 du Parlement européen et du conseil du 22
octobre 2014 relatif à la prévention et à la gestion de l’introduction et de la propagation des
espèces exotiques envahissantes définit l’espèce exotique envahissante comme « une
espèce exotique dont l’introduction ou la propagation s’est révélée constituer une menace
pour la biodiversité et les services écosystémiques associés, ou avoir des effets néfastes sur la
biodiversité et lesdits services ». Ce règlement constitue l’instrument juridique principal pour
la gestion des EEE. Une brochure du Conseil de l’Europe expose la mise en place de la
stratégie européenne relative aux EEE (Genovesi & Shine 2004).
Il fait suite à la Stratégie de l’UE en matière de biodiversité à l’horizon 2020 adoptée en 2011
(CE 2011). Il complète un dispositif morcelé qui se compose du règlement n°338/97 du
9/12/1996 et du Règlement 708/2007 relatif à l’utilisation en aquaculture des espèces
exotiques et des espèces localement absentes. Le règlement de 2014 affiche comme
16
objectif de prévenir, réduire et atténuer les effets néfastes intentionnels ou non
intentionnels de l’introduction et de la propagation des EEE. Le législateur européen a opté
pour une approche hiérarchisée des priorités. Il contient une liste positive énumérative
« d’EEE considérées préoccupantes pour l’Union ». Les critères de sélection de cette liste
reposent sur l’impact et les coûts de gestion. Un règlement d’exécution du 13 juillet 2016
vient compléter le dispositif et identifie 37 espèces (23 espèces de faune comprenant neuf
mammifères, trois oiseaux, deux poissons, un amphibien, un reptile, six crustacés et un
insecte ainsi que 14 espèces de flore)5. En 2017 un nouveau règlement d’exécution ((UE)
2017/1263 du 12 juillet 2017) ajoute 12 espèces à cette liste dont 9 espèces de plantes, deux
de mammifères et une espèce d’oiseau. Les états n’ont pas la possibilité de se prononcer sur
chaque espèce mais seulement sur la liste globale présentée par la commission
européenne ; ainsi la France s’est opposée en vain à l’inclusion de l’Ibis sacré dans cette liste.
Il est prévu une mise à jour de la liste tous les 6 ans. Elle peut toutefois être complétée à la
demande des Etats sur la base de nouvelles évaluations.
Le règlement retient des modalités d’action hiérarchisées selon le triptyque suivant :
prévention/éradication/gestion en fonction du stade, de l’ampleur et du coût de gestion du
caractère envahissant des espèces listées.
Ainsi, si l’espèce identifiée comme étant envahissante à l’échelle de l’Union
Européenne n’est pas présente sur le territoire d’un des Etats membres, celui-ci a
pour obligation d’interdire les manipulations intentionnelles de l’espèce désignée. Il
est également contraint d’élaborer un plan pour lutter contre les voies d’introduction
et de propagation non intentionnelles de celle-ci. Cela nécessite de mettre en place
des surveillances, de multiplier les contrôles lors de l’importation de marchandises et
de développer les réseaux d’observateurs.
Dès lors que l’Etat identifie l’apparition d’une EEE listée sur son territoire, il doit
immédiatement en informer la Commission Européenne, le notifier à l’ensemble des
autres Etats membres et prendre les mesures d’éradication le plus rapidement
possible (art.16 à 18).
Si l’EEE est déjà répandue sur le territoire d’un Etat, celui-ci doit prendre des mesures
de gestion efficaces et proportionnées. Dans ce cadre, il est obligé de prendre des
mesures de restauration des écosystèmes dégradés sauf si l’analyse coût avantage
est disproportionnée, la charge de cette démonstration incombant à l’Etat.
Pour la doctrine, le règlement présente deux insuffisances majeures. D’une part, il n’insiste
pas suffisamment sur l’approche en amont autrement dit sur l’importance d’agir sur le
dysfonctionnement des écosystèmes dans lesquels les EEE s’implantent. De plus, la
restauration ne vise que la réparation des dommages causés par l’envahissement. D’autre
part, le règlement est trop évasif sur la communication appropriée quant aux politiques
5 Règlement d'exécution (UE) 2016/1141 de la Commission du 13 juillet 2016 adoptant une liste des espèces
exotiques envahissantes préoccupantes pour l'Union conformément au règlement (UE) n° 1143/2014 du
Parlement européen et du Conseil, JOUE L.189 du 14/07/2006, p.4-8. Voir annexe.
17
menées. Cette critique renvoie au caractère éthique de cette règlementation et met une fois
de plus en lumière la nécessité de penser l’aspect communicationnel des politiques de
gestion des EEE. De plus, il ne prévoit aucun mécanisme de financement dédié. Enfin,
l’élaboration de ces listes d’espèces pose le problème des critères employés, qui selon
Vanderhoeven et al. (2017) se résument souvent à des avis d’experts fonctionnant en circuit
fermé (cf. infra).
3.2.2. Le droit français
Le droit français applicable aux EEE a été remanié par la loi du 8 août 2016 pour la
reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Elle s’inscrit dans la continuité
de la Stratégie nationale relative aux EEE lancée le 12 juillet 2016 (MEEM 2017), elle-même
déclinée en 5 axes de travail et 12 propositions, qui fait elle-me suite aux assises
nationales sur les EEE organisées en septembre 2014, dans la continuité de la Stratégie
nationale pour la biodiversité 2011-2020 (MEDDE 2012)6.
Le droit français fait coexister six régimes quant à la gestion des espèces en France7 dont
deux concernent directement l’introduction et la gestion des espèces exotiques
envahissantes.
D’après l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (2003-2018), « La définition
souvent admise d'une espèce exotique envahissante (EEE) est la suivante : « Une
espèce exotique envahissante est une espèce allochtone dont l'introduction par
l'Homme (volontaire ou fortuite), l'implantation et la propagation menacent les
écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes avec des conséquences
écologiques ou économiques ou sanitaires négatives » (UICN 2000, McNeely et
al. 2001, McNeely 2001). Une autre définition acceptée est celle de la stratégie
européenne relative aux espèces exotiques envahissantes : « espèce, sous-
espèce ou taxon de rang inférieur, introduit hors de son aire de répartition
naturelle, passée ou présente. L'introduction ou la propagation menace la
diversité biologique. La définition inclue toutes les parties, graines, œufs ou
propagules d'espèces de ce type qui pourraient survivre et se reproduire ».
(Genovesi & Shine, 2003).
Le droit français ajoute des contraintes par rapport au règlement européen : il ajoute des
espèces et des spécificités de gestion. En ce sens, le droit français se démarque du droit de
l’Union Européenne dans la mesure où il prévoit un régime juridique pour les espèces
indigènes envahissantes (article L411-4 du Code de l’environnement) en plus d’un régime
6 Voir annexe 3.
7 Cf. tableau p.308-310 tiré de Cans & Cizel (2017) (Annexe 2)
18
juridique pour les espèces exotiques envahissantes qui reprend, de manière incomplète, le
droit de l’Union Européenne (article L411-5 du Code de l’environnement)8.
Le régime relatif aux espèces indigènes « problématiques »
Ce régime est encadré par l’article L411-4 du Code de l’environnement. Il s’agit de la
principale innovation du droit français par rapport au droit de l’Union Européenne. Il vise le
contrôle de l'introduction dans le milieu naturel de spécimens appartenant à certaines
espèces animales et végétales indigènes :
Est interdite l’introduction d’espèces indigènes dans le milieu naturel, qu’elle soit volontaire,
par négligence ou par imprudence lorsqu’elle est susceptible de porter préjudice aux milieux
naturels, aux espèces et aux usages associés de ces milieux. La liste des espèces est prise par
arrêté du ministère chargé de l’environnement, et peut être complétée par le préfet de
région. L’introduction d’une des espèces listées peut toutefois être autorisée par arrêté
préfectoral pour des « motifs d’intérêt général » (article L411-4, II).
La liste des espèces concernées n’a pas encore été publiée mais elle inclurait des espèces
dont les effectifs posent des problèmes de gestion. La liste provisoire mêle des espèces
gibiers « susceptibles d’occasionner des dégâts » (Sanglier, Sus scrofa) et des espèces
protégées (le Grand cormoran, Phalacrocorax carbo, de goélands, Larus argentatus et L.
michahellis ainsi que le cygne tuberculé, Cygnus olor).
Le régime relatif aux espèces exotiques envahissantes
Ce régime encadre l’introduction dans le milieu naturel des espèces exotiques envahissantes
selon deux niveaux (article L411-5 et L411-6 du Code de l’environnement).
Au titre du premier niveau, est interdite l’introduction d’espèces non indigènes
envahissantes dans le milieu naturel, qu’elle soit volontaire, par négligence ou par
imprudence lorsqu’elle est susceptible de porter préjudice aux milieux naturels, aux espèces
et aux usagers associés de ces milieux. La liste des espèces est prise par arrêté du ministère
chargé de l’environnement9. L’introduction d’une des espèces listées peut toutefois être
autorisée par arrêté préfectoral pour des « motifs d’intérêt général » (article L411-5, II du
Code de l’environnement).
Au titre du second niveau, est interdite l’introduction sur le territoire national, ainsi que le
transit sous surveillance douanière, la détention, le transport, le colportage, l’utilisation,
l’échange, la mise en vente ou l’achat d’espèces exotiques envahissantes. Une autorisation
d’introduction et de diffusion peut également être délivrée dans des conditions strictes.
8 Compte tenu qu’il s’agit d’un règlement, le législateur français n’a pas pour obligation de transposer le droit
de l’Union dans l’ordre interne. Le règlement est d’applicabilité directe et il a force obligatoire.
9 Deux listes coexistent : une liste d’espèces animales non indigènes et non domestiques et une liste d’espèces
végétales non indigènes et non cultivées.
19
Les espèces domestiques sont-elles envahissantes ?
Arrêté du 11 août 2006 fixant la liste des espèces, races ou variétés d’animaux
domestiques paru au JO du 07 octobre 2006.
o Les espèces domestiques ne sont pas toujours associées au concept EEE, pourtant
elles peuvent jouer un rôle important dans le phénomène. Tout d’abord, les zones
connues de domestication sont restreintes comparées aux zones de présence
actuelle de toutes ces espèces. En Europe de l’Ouest elles ont toutes été
introduites. Dans le cas du cochon (Sus domestica), un enrichissement génétique à
partir de sangliers (S. scrofa) locaux a eu lieu après l’arrivée des premiers individus
domestiques mais cela ne semble pas avoir été le cas pour les autres mammifères
domestiques, dont les ancêtres sauvages étaient absents de la zone, sauf l’aurochs
(Bos primigenius), éliminé depuis. La présence des troupeaux domestiques a vite
représenté une concurrence spatiale et trophique forte vis-vis des équivalents
écologiques locaux. Les arbitrages ont plutôt dû avoir eu lieu en faveur des
troupeaux domestiques. On peut ajouter que de nombreux animaux et sans doute
de nombreux troupeaux redevenus sauvages, marrons, ont pu s’installer, aux
dépends de la faune indigène. Des cas d’hybridation ont pu avoir lieu, les
conséquences dépendant des effectifs relatifs des uns et des autres. On peut citer
chèvre (Capra hircus) et bouquetin (C. ibex, C. pyrenaicus) (Alpes et Pyrénées),
mouton (Ovis aries) et mouflon (Ovis gmelinii), porc et sanglier, chat domestique (F.
catus) et chat forestier (F. silvestris), chien (Canis domesticus) et loup (C. lupus). Ces
contacts de proximité, au pâturage ou lors des hybridations, sont également source
démontrée d’échanges de microorganismes, dont certains potentiellement
pathogènes et lourds économiquement parlant.
o On peut aujourd’hui constater que l’aurochs, ancêtre des bovins domestiques est
éteint, comme les ancêtres des chevaux domestiques. La chèvre égagre (C.
aegagrus) survit difficilement à l’est de la Méditerranée et l’ancêtre du mouton a
peut-être disparu. Le chat forestier régresse partout où il est encore présent à la
suite de la concurrence avec les chats domestiques, hybridation, transmission de
microorganismes et concurrence écologique. Le chien exerce les mêmes pressions
vis-à-vis de plusieurs espèces de canidés sauvages.
o Le sanglier représente un réservoir potentiel du virus de la maladie d’Aujeszky, de
celui de la peste porcine classique, bientôt de celui de la peste porcine africaine qui
arrive de Russie par l’est (plusieurs cas diagnostiqués dans des états membres de
l’UE en 2017), de la bactérie responsable de la brucellose porcine et de celle de la
tuberculose bovine.
o On retrouve des exemples proches chez les oiseaux avec le cas supplémentaires des
canards appelants (Anas sp.) en France (virus influenza).
o La domestication a bien eu et a encore un impact sur la biodiversité par le caractère
envahissant de ses pratiques.
o La domestication des abeilles domestiques (Apis mellifera) a conduit depuis 7000
ans à leur expansion numérique et à de nombreux échanges entre régions. Cette
domestication a conduit à une augmentation de leur diversité génétique (Oldroyd
2012) mais aussi à une dispersion de leurs agents pathogènes. Le varroa (Varroa
destructor), acarien parasite d’abord identifié à Java (1904) est aujourd’hui présent
dans presque toutes les régions d’apiculture. Il existe un impact réel pour les
hyménoptères sauvages.
20
A partir de quand une espèce peut-elle être considérée comme autochtone ?
La plupart des espèces exotiques naturalisées sont intégrées dans le
fonctionnement des écosystèmes sans poser de problème mais, vis-à-vis de la
réglementation, resteront toujours « exotiques ».
o Là aussi la subjectivité est de règle dans la réglementation. La Carpe commune
a été introduite dans une partie de la France par les Romains, mais l’arrêté
ministériel en préparation (2017) sur la lutte contre les EEE l’inclut. Par contre,
ce même arrêté n’inclut pas les espèces de poissons introduites en France
souvent au XXème siècle, qui représentent la majorité de la communauté
piscicole (40 espèces !), et dont beaucoup pourraient être considérées comme
envahissantes. L’Atlas des oiseaux nicheurs et hivernants de France (Issa &
Muller 2015) considère l’Ibis sacré comme faisant désormais partie de
l’avifaune française au même titre que l’Ibis falcinelle, mais le projet d’arrêté
ministériel exige son éradication.
o La règle de l’année 1500 comme limite antérieure aux EEE adoptée par l’UICN
se justifie par le début de la colonisation des pays ultramarins par les Etats
européens, avec des conséquences majeures sur la biodiversité locale. Mais
elle n’est pas adaptée à la situation européenne. Si les dates de colonisation
ultramarine sont connues avec relativement de précision (historiques des
expéditions financées par les Etats), on ne connait que très peu de choses
(comparativement à aujourd’hui ) sur l’état des flores et des faunes sur une
grande partie de la planète et même avant Linné en Europe ou Buffon en
France (XVIIIème siècle), et les données restent très partielles jusqu’à la fin du
XIXème siècle excepté pour quelques espèces d’intérêt économique ou
sociologique (ex. le Loup). Les « flores » et « avifaunes » départementales de
la fin du XIXème siècle restent souvent très imparfaites, et il a fallu attendre
1936 pour avoir un premier inventaire des oiseaux en France, d’ailleurs non
exhaustif (Mayaud et al. 1936). Le baguage de quelques espèces d’oiseaux n’a
commencé à exister timidement qu’à partir des années 1920. Difficile dans
ces conditions de trancher sur le caractère allochtone ou autochtone de
certaines espèces avant le XXème siècle, d’autant que les modifications bien
documentées de l’avifaune française ne serait-ce que depuis les 50 dernières
années sont considérables et doivent rendre prudentes les extrapolations
passées, comme l’a démontré Laurent Yeatman (1971) dans son « histoire des
Oiseaux d’Europe ».
21
4. Des exemples d’EEE
Plantes : De nombreuses espèces de plantes ont été introduites volontairement ou
involontairement avec les activités humaines au cours de l’histoire. Quelques espèces
posent de sérieux problèmes de gestion des écosystèmes, notamment dans les zones
humides comme par exemple les jussies (Ludwigia spp), le Baccharis (Baccharis halimifolia),
l’Eventail de Caroline (Calomba caroliniana), la Jacinthe d’eau (Eichornia crassipes), deux
espèces de myriophylles (Myriophyllum aquaticum et M. heterophyllum), Lagarosiphon
major, Egeria densa. Si les plantes aquatiques sont les plus abondantes dans la liste
européenne des EEE préoccupantes pour l’UE, certaines espèces semblent manquer comme
par exemple les renouées asiatiques (la Renouée du Japon - Reynoutria japonica, la
Renouée de Sakhaline - Reynoutria sachalinensis et la Renouée de Bohême - Reynoutria x
bohemica) qui posent des problèmes sérieux le long des cours d’eau. D’autres espèces
posent des problèmes de gestion des infrastructures hydrauliques (Amorpha fruticosa). Les
ambroisies et plus particulièrement l’Ambroisie à feuille d’armoise et la Berce du Caucase
posent des problèmes de santé humaine importants (respectivement allergies et brûlures).
Invertébrés : Quelques espèces d’invertébrés peuvent
modifier l’organisation des écosystèmes comme plusieurs
espèces d’écrevisses (Ecrevisse de Louisiane, Procambarus
clarkii), ou la Pyrale du buis (Cydalima perspectalis)
récemment apparue en France où elle dévaste les
peuplements de Buis (Buxus sempervirens). Le Moustique
tigre (Aedes albopictus) est vecteur de virus responsables
de maladies graves (chikungunya, dengue). Cependant, bien
que les insectes représentent environ un quart des espèces
exotiques arrivant en Europe (Figure 3), seul le Frelon asiatique (Vespa vetulina nigrithorax)
est présent dans la liste des EEE préoccupantes pour l’UE et seulement deux espèces sont
mentionnées parmi les espèces préoccupantes en France, la Coccinelle asiatique (Harmonia
axyridis) et un termite d’origine américaine (Reticulitermes flavipes).
Mammifères : les quelques mammifères exotiques
aujourd’hui présents sur le territoire national se
partagent des histoires quelque peu différentes. Le Daim
(Dama dama) et le Cerf sika (Cervus nippon) ont été
introduits pour de raisons cynégétiques, le daim il y a
plusieurs siècles, le sika nettement plus récemment (XIX°
siècle). Les espèces suivantes : Chien viverrin
(Nyctereutes procyonoides), Raton-laveur (Procyon lotor),
Ragondin (Myocastor coypus), Rat musqué (Ondatra
zibethicus), Vison d’Amérique (Mustela vison) ont été
introduites au moins en partie pour la fourrure, soit directement en France soit dans des
pays proches. Echappés ou relâchés les animaux ont fait souche. Le Raton-laveur a
probablement aussi bénéficié de sa position de mascotte dans certaines bases militaires
nord-américaines installées en Europe occidentale. On commence à observer des espèces
initialement introduites comme animaux de compagnie et retournées à l’état libre comme le
Tamia de Sibérie (Tamias sibiricus) ou l’Ecureuil à ventre rouge (Callosciurus erythraeus).
22
Objectivement, les impacts de ces diverses espèces ne sont pas du même ordre de grandeur
même si des estimations chiffrées restent rares et partielles. Il semble un peu paradoxal de
parler d’EEE pour Daim et Sika par exemple au vu des tableaux de chasse associés, comparés
à ceux des cervidés indigènes.
Les problèmes les plus importants se situent probablement au niveau de la trilogie Rat
musqué - Ragondin - Vison d’Amérique, mais même pour ces trois espèces des chiffres
représentatifs sont difficiles à appréhender. Il est plus facile de trouver le chiffre des coûts
annoncés de lutte contre mais ce n’est pas la même chose.
Poissons : les introductions de poissons ont été faites à grande échelle dans le monde mais
leurs effets ont été peu étudiés. L’exemple le plus célèbre concerne la Perche du Nil
introduite dans le lac Victoria (Latex niloticus), qui possédait des centaines d’espèces
endémiques de poissons dont près de la moitié ont disparu suite à cette introduction
(Lockwood et al. 2013). L’introduction d’un salmonidé sur deux lacs andins aurait contribué à
la disparition de deux Grèbes endémiques (Del Hoyo & Collar (2014). Des cas de
transmission de parasites aux poissons autochtones par des introductions de poissons
allochtones ont également eu lieu à plusieurs endroits (Simberloff 2014).
Oiseaux : à l’échelle mondiale les impacts d’oiseaux introduits sont peu importants
comparativement aux plantes, invertébrés et mammifères herbivores dans la mesure où ils
impactent généralement peu les écosystèmes. Dans sa synthèse sur les impacts majeurs par
les espèces envahissantes, Simberloff (2014) n’évoque que des cas limités de participation à
l’extension de plantes envahissantes par zoochorie chez le Martin triste (Acridotheres tristis)
et le Bulbul orphée (Pycnonotus jocosus), et des risques d’hybridation avec des espèces
natives par le canard colvert (Anas plathyrynchos) et l’Erismature rousse (Oxyura
jamaicensis). Chez les rapaces, le Grand-duc de Virginie (Bubo virginianus) aurait participé à
l’extinction d’une tourterelle des îles Marquises (Del Hoyo & Collar (2014).
5. Origines des introductions
Les origines des introductions volontaires ou involontaires sont multiples et le plus souvent
liées à l’activité économique : agriculture, aquaculture, transports, commerce d’espèces
exotiques… Ainsi les jardineries et les pépiniéristes sont des sources importantes d’espèces
végétales. La lutte biologique contre des espèces considérées « nuisibles » représente une
des raisons pour lesquelles des espèces exotiques ont été introduites à travers la planète.
Les conséquences ont souvent été désastreuses. C’est le cas de la Petite mangouste indienne
(Urva auropunctata) introduite sur de nombreuses îles tropicales (Martinique et Guadeloupe
par exemple) pour lutter contre les rats (Rat noir, surmulot), eux-mêmes introduits
accidentellement, du Crapaud bœuf d’origine sud-américaine (Rhinella marina) en Australie
(Martinique et Guadeloupe également), officiellement introduit pour lutter, sans aucun
succès, contre un insecte parasite de la canne à sucre et d’un escargot carnivore (Euglandina
rosea) introduit pour lutter contre une Achatine africaine (Lissachatina fulica) introduite
avant lui et qui a en fait éliminé des dizaines d’espèces de gastéropodes terrestres et
arboricoles endémiques, par exemple des partulines (Partulina sp. et Achatinella sp.)
d’archipels entiers, là où ces deux mollusques avaient été successivement introduits
(Williamson 1996).
23
6. Quantification du problème à l’échelle de l’UE et de la France
En passant d’exemples d’espèces exotiques envahissantes à leur dénombrement statistique
dynamique sur longue période, on gardera à l’esprit l’impossibilité relative à faire la part des
choses, dans les évolutions enregistrées, entre ce qui relève de l’augmentation dans la
nature et ce qui relève de l’intensification de la pression d’observation sur les espèces. Il est
préférable de considérer les chiffres ci-dessous avec la précaution qui consiste à voir aussi
dans l’accélération actuelle de l’ « invasivité », le résultat d’une focalisation de l’attention sur
les dénombrements de populations, leur répartition et les conséquences que l’on peut tirer
de cette relative nouvelle couverture statistique de la diversité biologique. Les connaissances
sur l’ « invasivité » naissent aussi de l’émergence de certaines espèces envahissantes comme
problème public (Gramaglia 2010), et de la systématisation des données naturalistes depuis
les années 1980 avec en France l’émergence progressive de l’INPN et aussi la création de
listes d’espèces spécifiques comme DAISIE.
Compte tenu de cette lecture circonspecte des évolutions des EEE, on note qu’au niveau
global le nombre d’espèces exotiques, mais pas forcément envahissantes, enregistrées par
continent ne cesse d’augmenter depuis le XVI° siècle jusqu’en 2000 (au-delà les données
sont probablement incomplètes). Presque tous les groupes taxonomiques montrent un taux
constant d’introduction (pas de signe de ralentissement) ou une augmentation (Figures 1 et
2). Les seules exceptions sont les mammifères avec une diminution du taux d’augmentation
à partir des années 1950 (données globales, Seebens et al. 2017)
Figure 1. Tendances (lignes) de l’évolution du nombre d’espèces nouvelles recensées par région pour les
différents groupes taxonomiques (Seebens et al. 2017, Supplément)
.
24
Figure 2. Nombre cumulé d’espèces exotiques pour différents groups taxonomiques. La tendance est indiquée
par une moyenne mobile avec une fenêtre de 25 ans (ligne rouge) ; les bandes grises et blanches
correspondent à des périodes de 50 ans (extrait de Seebens et al. 2017, Supplément)
L’accélération de la vitesse des transports et de l’intensité des échanges commerciaux, des
voyages dans la deuxième moitié du XX° siècle explique cette augmentation des échanges
d’espèces dans le monde (Hulme 2009) et la forte augmentation des introductions d’espèces
(Lin et al. 2007, Westphal et al. 2008, Pyšek et al. 2010a, Seebens et al. 2017). D’autres
facteurs jouent également comme le climat (Lin et al. 2007) mais ils correspondent
davantage au succès des espèces introduites et jouent peu sur leur introduction.
La richesse d’espèces introduites naturalisées à l’échelle mondiale est plus important dans
les îles que sur les continents, notamment celles densément peuplées par l’Homme et au
climat chaud, ainsi que les zones côtières. Il y a de très grandes différences entre taxons, les
mammifères et les plantes arrivant très largement en tête, secondairement les araignées,
insectes, poissons et batraciens, tandis que les oiseaux et les reptiles arrivent très loin
derrière (Dawson et al. 2017, Figure 3).
25
Figure 3. Points chauds « Hotspots » de la richesse en espèces introduites naturalisées dans le monde par
taxon (Dawson et al. 2017).
6.1. Combien d’espèces exotiques arrivent en Europe et d’où viennent-elles (EEE) ?
12 122 espèces allochtones sont identifiées en Europe dans l’inventaire DAISIE (2018) dont
55% de plantes terrestres, 23% d’invertébrés terrestres, 8% d’organismes marins et 7% de
champignons (Figure 4). La France, le pays le plus vaste d’Europe, est le troisième pays pour
le nombre d’espèces exotiques identifiées avec 2623 espèces (après la Grande-Bretagne :
3254 et la Belgique : 2633) (DAISIE 2018). Les autres pays avec plus de 2000 espèces
exotiques identifiées sont l’Italie (2236), la République tchèque (2063) et l’Allemagne 2016).
26
Figure 4. Nombre d’espèces, pour chaque groupe environnemental, qui ont été classées comme exotiques
dans au moins une partie de l’Europe (DAISIE 2009.).
En 2013, l’Inventaire National du Patrimoine Naturel a identifié au moins 2 201 espèces
introduites en métropole, 91 % étant continentales (terrestres et aquatiques) et 9 % marines
(Figure 5). 111 d’entre elles sont considérées comme envahissantes (5 %), dont 72 espèces
végétales continentales, 31 espèces animales continentales et 6 marines (MNHN (INPN)
2013 cité par MTES 2018).
Figure 5. Nombre d’espèces introduites considérées comme envahissantes en France (source MTES 2018).
0
200
400
600
800
1000
1200
1400
terrestre marin terrestre marin terrestre marin
animaux végétaux autres*
Nombre d'espèces introduites et envahissantes en
France métropolitaine
introduites
envahissantes
Source : MNHN (INPN), 2013.
27
Les espèces exotiques progressent en France comme le montre l’analyse de Touroult et al.
(2016) du taux d’augmentation du nombre d’espèces exotiques par partement (Figure 6).
Figure 6. Représentation de l’augmentation du nombre d’espèces exotiques par département (en France) sous
la forme de l’accroissement moyen par période de 10 ans. L’ensemble est calculé sur un panel de 84 espèces
(50 de flore et 34 de faune) dont 37 jugées préoccupantes à l’échelle européenne (Touroult et al. 2016).
6.2. Devenir des espèces introduites (combien deviennent envahissantes) ?
L’établissement dans un nouveau territoire suit plusieurs étapes correspondant à des
barrières à leur expansion (Figure 7).
Une fois introduite (barrière de dispersion franchie) une espèce peut survivre et
franchir ainsi la barrière environnementale.
Lorsqu’elle se reproduit sur son nouveau territoire (barrière de reproduction) elle est
considérée comme « acclimatée ».
L’espèce est considérée comme « naturalisée » lorsqu’elle se disperse et se reproduit
de façon autonome après un délai variable selon les auteurs (entre 10 et 25 ans, Brun
2007).
Quelques espèces naturalisées prolifèrent et deviennent envahissantes. Elles
peuvent d’abord proliférer sur des habitats perturbés par les activités humaines et
établir des populations importantes. Dans un deuxième temps une partie de ces
espèces colonise les habitats naturels posant les problèmes environnementaux les
plus aigus.
Seule une fraction des espèces franchit chaque étape et quelques espèces seulement
deviennent envahissantes. Une règle empirique (la « règle des 3 X 10 », Williamson & Brown
1986, Williamson 1996) propose qu’environ 10% seulement des espèces franchit chaque
étape : 10% des espèces introduites s’établissent avec succès, parmi ces dernières, 10%
deviennent naturalisées, dont 10% deviennent envahissantes. Cette règle empirique a été
28
critiquée et testée par différents auteurs (Jeschke and Strayer 2005; Jeschke 2008) mais
reste globalement un concept utile (Rodriguez et al. 2013) pour souligner qu’une fraction
seulement des taxons introduits deviennent envahissants et génèrent des impacts sur la
biodiversité, l’économie ou la santé. Les proportions d’espèces considérées comme
envahissantes peuvent largement varier d’un groupe à l’autre et en fonction du contexte
écologique mais aussi en fonction du critère retenu pour caractériser le caractère
« envahissant ». La proportion d’espèces exotiques devenant envahissante semble plus
faible chez les plantes que chez les vertébrés et parmi ces derniers que les mammifères ont
un plus grand taux de succès que les oiseaux (Jeschke 2008, 2009). En Europe, selon
l’inventaire DAISIE de 2009, sur les 10822 espèces allochtones présentes en Europe environ
10% étaient connues pour avoir un impact écologique (cette proportion correspond à la
règle des 3 X 10 puisque elle ne prend en compte que les espèces naturalisées).
Figure 7. Schéma illustrant les stades d’invasion d’une espèce ; EEE= Espèce Exotique Envahissante (d’après
Richardson et al. 2000, Goudard 2007 cités par INPN 2003-2018).
Au moins deux mécanismes sous-tendent les traits d’histoire de vie des espèces : leur
potentiel de prolifération et la vulnérabilité des écosystèmes récepteurs. Ces deux aspects
de la biologie de l’invasion interagissent, la perte des habitats naturels ou leur perturbation
facilitant la dynamique des populations des espèces exotiques par divers mécanismes
(Didham et al. 2007). La perturbation des habitats peut ainsi permettre l’établissement de
populations abondantes d’espèces exotiques et leur donner un avantage numérique sur les
espèces indigènes. Dans d’autres cas, la modification des habitats peut modifier le mode
d’action ou la réponse fonctionnelle des espèces exotiques pour leur donner un avantage
disproportionné à leur abondance.
Pour une partie des espèces exotiques envahissantes, des mécanismes de contrôle de leur
dynamique de populations se mettent en place au bout de quelque temps et leur abondance
Actions et stade d'invasion Barrière limita nt la dispe rsion Stade d'invasion du taxon
importation
Barrière géographique individu ou population importés
introduction
Barrière environnementale taxon introduit
acclimatation
tentative de reproduction
Barrière reproduction Taxon acclimaté
naturalisation
Barrière dispersion Taxon naturali
prolifération expansion
EEE
Impacts sur la biodiversité,
l'économie ou la santé
EEE
29
régresse alors fortement. Ainsi, le doryphore (Leptinotarsa decemlineata), originaire du
Colorado, qui a été une préoccupation majeure en Europe dans une grande partie du XX°
siècle est presque devenue une curiosité entomologique. Il sévit cependant toujours dans
d’autres régions du Monde. La régression du Doryphore n’est pas due aux nombreux
moyens de lutte mis en place, ni aux modifications du paysage mais serait à imputer à une
évolution génétique propre aux populations d’Europe occidentale (Fraval 2001).
La Caulerpe (Caulerpa taxifolia) apparue en 1984 en Méditerranée occidentale a rapidement
colonisé les côtes souvent au détriment des posidonies (Posidonia oceanica). A partir de
2007, les surfaces envahies ont diminué en quelques années (80% de réduction en 2011,
Albouy 2017) pour des causes qui restent hypothétiques.
A long terme l’intégration dans les écosystèmes des EEE est la plus probable mais celle peut
être précédée par des impacts irréversibles sur la biodiversité.
6.3. Espèces EEE préoccupantes en Europe et en France (OM et métropolitaine):
Selon l’inventaire DAISIE de 2009, sur les 10822 espèces allochtones présentes en Europe
seules 1094 (10%) étaient connues pour avoir un impact écologiques et 1347 (12%) un
impact économique. L’étude d’impact du Règlement UE 2014 a por le nombre d’EEE à
1500, soit 14% des espèces allochtones, toutefois sans hiérarchiser l’ampleur des impacts.
Parmi ces espèces, la Commission européenne a adopté une liste de 49 espèces exotiques
envahissantes (EEE) préoccupantes pour l’Union européenne (règlement d’exécution
2016/1141 et 2017/1263). Cette première liste, respecte les critères du règlement européen
n° 1143/2014 du Parlement européen et du Conseil. Cette liste de 49 espèces (Annexe 1)
comprend 23 espèces de plantes exotiques envahissantes dont 6 sont absentes du territoire
européen), 11 de mammifères, 6 de crustacés, 4 d’oiseaux, 2 de poissons et seule espèce
d’insecte et d’amphibien.
Mais aussi bien dans la liste des 1500 espèces exotiques envahissantes que dans celle des
497 jugées préoccupantes pour l’UE, l’appréciation des impacts est objectivement très
difficile. La liste des espèces préoccupantes en Europe est le résultat d’une négociation entre
les états et peut-être d’un souci de limiter les budgets nécessaires pour s’acquitter des
obligations de contrôler ces espèces. Ainsi le Vison d’Amérique, une menace majeure pour le
Vison d’Europe en France, n’a pas été inscrit sur la liste à la demande du Danemark qui a
d’importants élevages de cette espèce (Albouy 2017) dont l’élevage génère en Europe plus
de 7200 emplois directs (Wittman & Fores-Ferrer 2015).
L’enquête du Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) menée en France à
la demande du Ministère de l’Environnement de 2009 à 2013 (Wittman & Fores-Ferrer,
2015), basée sur 200 contributeurs de 66 organismes, montre que sur les 600 EEE présentes
en France, dont 1/3 en métropole et 2/3 outre-mer, un tiers sont préoccupantes (86/245=
35% en outre-mer et 83/272 =30% en métropole). Parmi les 51 espèces les plus
30
préoccupantes et/ou seulement préoccupantes mais étendues en métropole, 40 sont des
plantes (77%), en premier lieu les renouées, les jussies et l’Ambroisie. Les autres groupes
viennent très loin derrière : 3 écrevisses américaines, 2 poissons (Poisson-chat et Perche-
soleil), 3 mammifères (Ragondin, Rat musqué et Vison d’Amérique), 2 mollusques (Crépidule
et Huître creuse du Pacifique), 1 reptile (Tortue de Floride) et 1 insecte (Frelon asiatique).
Aucun oiseau ne figure dans cette liste (sur les 16 espèces introduites et naturalisées en
France selon Thévenot 2014).
La liste des espèces jugées seulement préoccupantes retient 33 espèces en métropole
française, dont 63,6% de plantes (dont le Mimosa), 12,1% d’oiseaux (Ouette d’Egypte,
Bernache du Canada, la Perruche à collier et l’Ibis sacré), 9% de mammifères (l’Ecureuil à
ventre rouge, le Tamia de Sibérie et le Surmulot), 6% d’insectes (Termites, Frelon asiatique),
et à égalité 3% pour les champignons (Chancre coloré du Platane), les mollusques (Moule
zébrée), et les poissons (Carpe commune).
6.3.1. Origine des espèces préoccupantes en France métropolitaine
Parmi les 51 espèces les plus préoccupantes (ou préoccupantes mais les plus étendues) en
France retenues par Wittman & Fores-Ferrer (2015), 48% sont originaires d’Amérique du
Nord, 19,2% d’Amérique du sud ou centrale, 19,2% d’Asie, 3,8% d’Océanie, 1,9% d’Afrique
du Sud, auxquelles s’ajoutent une espèce méditerranéenne (Europe-Afrique du nord) et une
du Caucase (frontière Europe-Asie). Les espèces jugées seulement préoccupantes
proviennent à 34,4% d’Asie, 22,9% d’Amérique du Nord, 16,7% d’Afrique et autant d’Europe,
6,25% d’Océanie et 3,1% d’Amérique du sud. Cette répartition (et notamment l’origine très
faible de l’Afrique et de l’Europe pour les espèces les plus préoccupantes) confirme que le
risque représenté par une espèce exotique de devenir envahissante est probablement lié à
son éloignement biogéographique et notamment aux barrières naturelles qu’elle n’aurait
pas pu franchir au cours de l’évolution (océans, montagnes, distance) en fonction de ses
capacités propres de dissémination, et par conséquent à la forte probabilité de se retrouver
dans un écosystème et/ou une communauté d’espèces très différents de celle de son origine
géographique.
7. Impacts des EEE
Les espèces exotiques envahissantes, par leur prolifération, génèrent de multiples impacts
impliquant la structure et le fonctionnement des communautés végétales et animales. Les
impacts diffèrent selon qu’il s’agisse d’EEE opportunistes ou dominantes (Branquart & Fried
2016).
Les EEE opportunistes ont chez les plantes des taux de croissance élevés pouvant
bénéficier des perturbations de l’environnement et d’apports de nutriments
(eutrophisation), une maturité sexuelle précoce, une forte condité, une longévité
31
réduite et souvent une taille faible. Elles montrent une faible sélectivité de leur
habitat et se développent surtout dans des milieux transformés par les activités
humaines. Les animaux opportunistes ont un large spectre alimentaire, une tendance
au grégarisme avec souvent des comportements coopératifs.
Les EEE dominantes ont des profils plus difficiles à définir mais présentent des traits
qui leur donnent un avantage compétitif dans des milieux naturels ou semi-naturels
où la compétition est forte. Les plantes exotiques envahissantes compétitives sont
souvent de grande taille, monopolisant l’espace, avec la formation de massifs
clonaux (renouée du Japon par exemple), des organes souterrains développés
permettant de stocker des réserves. Certaines produisent des composés chimiques
qui les rendent impropres à la consommation des herbivores et/ou faisant dépérir les
plantes voisines. D’autres peuvent fixer l’azote atmosphérique leur donnant un
avantage compétitif important (par ex Robinier faux-acacia). Les EEE animales
compétitives sont souvent plus grandes que leurs congénères et possèdent des
caractéristiques physiologiques ou comportementales leur donnant un avantage.
Cela peut être encore accentué par l’absence des espèces réservoirs ou hôtes
intermédiaires de leurs parasites dans le nouvel habitat. C’est un avantage important
bien démontré chez certains poissons de l’océan Pacifique déplacés des Marquises à
Hawaï (Vignon 2009).
La nature et l’intensité des impacts des EEE sont très variables selon les situations. . Il ne faut
pas oublier que d’autres perturbations existent presque toujours dans les mêmes
écosystèmes et qu’il est souvent malaisé de distinguer le rôle particulier de chaque facteur.
On distingue trois grands types d’impacts : écologiques, économiques et sanitaires.
7.1. Impacts écologiques
Les impacts écologiques des EEE sont multiples, les plus généralisés étant la réduction de la
biodiversité par la dominance (compétition) ou la prédation des espèces indigènes et
l’altération de la structure et du fonctionnement des écosystèmes. La dominance est
souvent favorisée par des excès de nutriments. Ces impacts sont similaires entre espèces
envahissantes exotiques ou indigènes. Certains impacts sont plus subtils, des plantes
exotiques envahissantes (balsamine de l’Himalaya, Renouée du japon, …) peuvent accaparer
les insectes pollinisateurs, limitant la fertilité des espèces indigènes.
Les espèces animales envahissantes sont souvent très efficaces pour accaparer les
ressources, sont agressives et peuvent repousser voire dévorer leurs concurrents, et
défendent leur territoire ou leurs sites de nidification. Les prédateurs peuvent réduire
l’abondance de populations de proies et ainsi augmenter le risque d’extinction des espèces
indigènes menacées.
L’hybridation avec les espèces indigènes peut être un risque pour des espèces endémiques
et/ou en faible effectif (par exemple les truites américaines avec les truites endémiques en
32
Europe et du bassin méditerranéen, Erismature rousse (Oxyura jamaicensis) et l’Erismature à
tête blanche (O. leucocephala).
Les EEE sont considérées comme la 5ème cause de perte de biodiversité au niveau mondial
par l’UICN mais le rôle des EEE reste faible relativement aux autres causes de déclin de la
Biodiversité (Figure 8). Cependant, il y a peu d’analyses précises sur les causes d’extinctions
des espèces. Une analyse de plus de 18 000 espèces (UICN 2003, Gurevitch & Padilla 2004)
montrait que pour moins de 6% des espèces menacées les effets directs et indirects des EEE
étaient mentionnés. De même pour les 762 espèces documentées comme éteintes du fait
des activités humaines, moins de 2% mentionnaient les EEE comme une cause.
Une part disproportionnée des extinctions d’espèces concernent des faunes et flores
endémiques, isolées sur des îles (Antilles, Océan Indien, Pacifique), et leurs situations ne
peuvent pas être généralisées au reste du monde, contrairement à d’autres menaces
comme la destruction des habitats, les prélèvements excessifs (pêche, chasse), les
pollutions. En France il convient donc de différencier la métropole de l’outre-mer, et parmi
celle-ci les différentes collectivités concernées qui correspondent chacune à une situation
différente. Il convient aussi de différencier les catégories d’êtres vivants tant du côté des EEE
que du côté des espèces menacées (cf. points précédents).
Figure 8. Principales menaces sur la biodiversité (Monastersky et al 2014). Les données sont extraites de
l’analyse des menaces, assignées en 7 catégories, pour 3430 populations dans le cadre du Living Planet Index
(WWF-International 2014).
Il est très difficile de mesurer le degré d’impact exercé par une EEE sur d’autres espèces.
Toutes les espèces, y compris natives, exercent obligatoirement avec les autres espèces (et
pour leurs propres congénères) une compétition pour les ressources (espace occupé,
ressources trophiques), et pour les prédateurs un prélèvement direct sur les espèces proies.
Les conditions abiotiques jouent évidemment un grand rôle dans la disponibilité des
33
ressources et sur les causes de mortalité, variables spatio-temporellement. Les fluctuations
d’effectifs et d’aires géographiques sont la règle, la stabilité n’existe pas.
Il est vrai néanmoins que retirer des EEE sur de petites îles qui semblaient « à l’équilibre »,
comme cela a déjà été fait, a permis d’assister à des récupérations spectaculaires d’espèces
locales manifestement très impactées par ces EEE mais dont la prédation n’était plus perçue,
par exemple à Zembretta, Tunisie (Bourgeois et al. 2013) ou à Campbell Island, Nouvelle-
Zélande (McClelland 2011).
Mesurer l’impact d’une EEE sur d’autres espèces implique de pouvoir différencier le rôle
respectif de tous les facteurs en cause dans la dynamique des populations, ce dont on n’est
que très rarement capable, y compris pour les espèces natives : par exemple quel est
l’impact de la Mésange bleue (Cyanistes caeruleus) sur les écosystèmes et les autres
espèces ? On n’en sait rien. Même chose pour les 34 espèces allochtones d’oiseaux qui se
sont établies naturellement en France, pour lesquelles on ne se pose même pas la question.
Condamner une espèce exotique uniquement d’après son régime alimentaire parce qu’elle a
été introduite est discutable. L’origine exotique ne doit pas être un argument suffisant, sauf
si l’on est adepte de la pureté des flores et faunes originales (notion de bioxénophobie,
Rémy & Beck 2008, Davis et al. 2011). Il est symptomatique de constater que les motifs
ayant permis de considérer les 4 espèces d’oiseaux dans la liste des espèces exotiques
préoccupantes en France (mais pas très préoccupantes) (Annexe 4) paraissent
scientifiquement très mal établis. Par exemple l’UICN (2017) ne retient pas l’Ibis sacré dans
sa liste des 100 espèces envahissantes les plus problématiques.
Par contre, on a plus d’indications sur les tendances lourdes pesant sur les espèces
menacées, et sur la phase ultime représentée par leur disparition.
7.1.1. Menaces représentées par les EEE sur les plantes
Il y a peu d’analyses de synthèses sur les effets des plantes exotiques envahissantes sur les
écosystèmes. Deux méta-analyses (Vilà et al. 2011, Pyšek et al. 2012) montrent que les
plantes exotiques ont une grande diversité d’impacts à différents niveaux d’organisation des
écosystèmes : au niveau des espèces (fitness, croissance), des communautés de plantes
(production, recouvrement, densité, diversité, …), des espèces animales (reproduction,
survie, croissance), des communautés animales (biomasse, densité, diversité, pâturage,
prédation, mobilité), des écosystèmes et des cycles biogéochimiques (stocks et disponibilité
du carbone et de l’azote et du phosphore notamment mais aussi risque d’incendie).
L’ampleur et la direction des modifications causées par les plantes exotiques envahissantes
varient très largement selon le contexte (espèces exotiques X espèces indigènes X
écosystème) et la forme de croissance des plantes. En général, les plantes exotiques tendent
à diminuer la diversité des communautés et à augmenter leur biomasse. Les effets sur la
faune dépendent en partie de leur utilisation des espèces exotiques (consommation, habitat,
..). Cependant la compréhension des impacts des plantes exotiques est limitée à quelques
34
espèces (Pyšek et al. 2010b). Par exemple, une étude des impacts de 3 espèces de plantes
exotiques envahissantes, Hydrocotyle ranunculoides, Ludwigia grandiflora et Myriophyllum
aquaticum sur 32 mares (Stiers et al. 2011) a montré (1) une tendance générale à la
diminution de la richesse spécifique des plantes indigènes mais avec un impact dépendant
de l’espèce et lié aux formes de croissance (submergée, flottante, émergente) et (2) une
forte corrélation négative entre le recouvrement des plantes exotiques envahissantes avec
l’abondance des invertébrés associée à une modification de la composition des
communautés, notamment une quasi absence des éphémères.
Ces deux méta-analyses divergent sur la comparaison entre les écosystèmes des iles et des
continents. Pour Vilà et al. (2011) les impacts des plantes exotiques sur la flore et la
végétation ne semblent pas différer entre les iles et les écosystèmes continentaux.
Contrairement aux oiseaux, jusqu’à présent peu d’extinctions d’espèces indigènes sur les iles
semblent pouvoir être imputées aux espèces exotiques envahissantes (Sax & Gaines 2008).
Inversement pour Pyšek et al. (2012) les plantes exotiques envahissantes ont une probabilité
plus élevée d’avoir des impacts significatifs sur la flore et la faune indigène sur les iles que
sur les continents. Ces différences peuvent être dues à des sélections différentes des travaux
publiés mais soulignent les lacunes dans la compréhension des impacts des plantes
exotiques envahissantes.
7.1.2. Menaces représentées par les EEE sur les oiseaux
Deux études récentes de BirdLife permettent de mesurer l’impact des EEE sur la disparition
des espèces d’oiseaux au niveau mondial depuis 1500 : Stattersfield & Caper (2000) et Del
Hoyo & Collar (2014, 2016).
Sur les 128 espèces disparues recensées dans le premier travail, les espèces envahissantes
sont au moins partiellement suspectées (parallèlement à d’autres causes majeures comme
les pertes d’habitat, chasse, prélèvement d’œufs, maladies…) dans 53 cas (41%), mais avec
beaucoup de suppositions car on ne sait rien sur 34 espèces (64% !), les suppositions ne
résistent parfois pas à l’analyse des faits. Les EEE (réelles ou supposées, seules ou à
plusieurs) qui ont contribué à ces disparitions sont les rats (43,4%), les chats (13,2%), les
moustiques vecteurs de maladies (9,4%), les chiens (7,6%), les chèvres (3,8%), tandis que la
Petite mangouste indienne, un serpent, une truite et une tortue sont citées une seule fois
(1,9%), de même qu’un seul oiseau, le Grand-Duc de Virginie (Bubo virginianus) suspec
d’avoir contribué aux Marquises à la disparition d’une tourterelle, le Ptilope de Mercier
(Ptilopus mercierii), parallèlement aux rats, chats, chasse et destruction d’habitat. Or on sait
que la chasse (droit acquis lors de la Révolution) et le braconnage ont joué un grand rôle
dans la disparition des oiseaux sur les îles colonisées par les Français, comparativement aux
îles anglaises.
Le second travail, effectué avec plus de recul et de précision, indique 157 espèces disparues
dont seulement 107 bien décrites (spécimen collecté). 150 espèces vivaient sur des îles
(toutes du Pacifique hormis l’Huitrier des Canaries) et 7 sur les continents. Parmi ces
35
dernières, les EEE ne sont citées comme contributrices à la disparition que pour 2 grèbes
endémiques, le Grèbe de l’Atitlan (Podilymbus gigas) sur un lac au Guatemala (introduction
d’une truite, aggravée par la collecte d'œufs, la coupe de roseaux, et plus tard par
l’urbanisation) et le Grèbe des Andes (Podiceps andinus) sur un lac de Colombie
(introduction d’une truite, aggravée par drainage, baisse du niveau d'eau, pesticides, coupe
de roseaux, chasse, et plus tard urbanisation). Les 5 autres espèces disparues sur les
continents concernent le Mexique (Quiscale de Mexico, Quiscalus palustris), l’Amérique du
Nord (Pigeon migrateur, Ectopistes migratorius, Eider du Labrador, Camptorhynchus
labradorius et Conure de Caroline, Conuropsis carolinensis) et l’Atlantique Nord (Grand
Pingouin, Pinguinus impennis), pour lesquelles l’action directe de l’homme est en cause.
Il est donc très exagéré de prétendre que des oiseaux considérés comme EEE pourraient
mettre en danger des espèces d’oiseaux patrimoniales en Europe et encore plus en France.
Pour ce dernier pays, l’excellent travail collectif coordonné par Rocamora & Yeatman-
Berthelot (1999) sur les Oiseaux menacés et à surveiller en France, dresse les menaces
pesant sur les 201 espèces dont la conservation mérite une attention particulière en France.
La mortalité non naturelle concerne 38% des espèces : 21% par les lignes électriques, 18,5%
par tir d’espèces protégées, 13,7% par hydrocarbures, 10,7% par prélèvements trop
importants, etc… (EEE non citées), auxquels il faudrait rajouter aujourd’hui l’éolien et les
effets indirects des pesticides (Gibbons et al. 2015), encore mal quantifiés. Les
dérangements affectent 44% des espèces : 46% par fréquentation touristique ou sportives,
31,7% par la chasse, 13,6% par la pêche, 4,3% par les travaux forestiers… La colonisation
d’îlots par les rats est citée pour les Puffins et l’Océanite tempête (Hydrobates pelagicus),
mais l’action des Ragondin et Rat musqué sur les roselières n’est pas quantifiée. Les lâchers
de Faisan de Colchide (Phasianus colchicus) et de Perdrix (Alectoris spp.) allochtones ont pu
affecter plusieurs populations autochtones de gibier. Le risque d’hybridation de l’Erismature
à tête blanche par l’Erismature rousse est cité mais la disparition de la première de Corse a
été due bien avant au dérangement humain sur l’étang de Biguglia, perturbation qui persiste
malgré la création d’une réserve naturelle. La pollution génétique par des lâchers de gibier
d’élevage est citée pour le Canard colvert, la Perdrix rouge, la Perdrix grise, la Caille des blés
et le Pigeon biset. Aucune EEE n’est citée comme prédateur, seules certaines espèces natives
favorisées par l’homme posant localement problème (Goéland leucophée, Larus michahellis,
Goéland argenté, L. argentatus, Corneille noire, Corvus corone), ainsi que des prédateurs
naturels tels le Grand corbeau (Corvus corax), le Geai des chênes (Garrulus glandarius) ou les
mustélidés qui peuvent affecter 9 espèces d’oiseaux. Mais ce sont les modifications et
dégradations des habitats par l’homme qui représentent les principales menaces : 55,5% des
espèces affectées par l’agriculture et l’élevage, 39,5% par la transformation des zones
humides, 25,5% par l’urbanisation, 18% par la sylviculture, 15,5% par l’emboisement
spontané, 7% pour le réchauffement climatique. On peut par conséquent se demander si
l’énergie dépensée contre les EEE (médias, administrations, moyens financiers) ne se fait pas
au détriment des véritables menaces pesant sur la biodiversité. Les conflits d’intérêts ne
36
sont peut-être pas totalement étrangers à cette situation (sujet à la mode permettant
d’obtenir des crédits des autorités et des facilités de publications dans des nouvelles revues
spécialisées, à condition de grossir les menaces dans les deux cas). Il est extrêmement
difficile de publier des articles démontrant l’innocuité d’espèces allochtones dans ce type de
revue, et les auteurs qui appellent à un examen plus équilibré de l’impact des espèces
exotiques (ex. Beisel & Levêque 2010, Tassin 2014) sont mêmes taxés de « négationnisme »
par les tenants de la nuisibilité des espèces allochtones par principe (Simberloff 2016, Russel
& Blackburn 2017).
7.2. Impacts économiques
Les impacts économiques directs liés aux EEE sont difficiles à évaluer et peu documentés. À
l’échelle de l’Europe continentale, on estime que les coûts générés par la lutte et la
réparation des dégâts atteignent 12 milliards d’euros par an (Kettunen et al. 2008). Ces coûts
incluent des éléments plus ou moins discutables d’évaluation : des coûts directs des espèces
(pertes de rendement agricole, coûts sanitaires) mais aussi les coûts de contrôle et de
gestion des espèces sur le terrain, les coûts de restauration des milieux naturels envahis et
les impacts sur les services rendus par les écosystèmes (UICN-France 2015). Une enquête du
CGDD (Wittmann & Flores-ferrer 2015) identifie un coût total de 38M€/an entre 2009 et
2013 dont environ la moitié pour les impacts directs et résiduels et la moitié pour la lutte
contre les EEE. Ce coût est probablement sous-estimé lorsqu’il est comparé à celui au niveau
européen. Les deux tiers de ces coûts (68%) sont dans les territoires d’Outre-mer et 32% en
métropole. Les coûts peuvent être importants lorsqu’ils réduisent la production agricole
(Ambroisie, Ragondin, Frelon asiatique, ..), sylvicole (Erable negundo, Graphiose de l’Orme,
Capricorne asiatique, …). Les impacts sur les infrastructures sont également fréquents
(Buddleia davidii sur les pistes, Mercerielle (Ficopotamus enigmaticus) dont les colonies
modifient le fonctionnement hydrologique des lagunes et peuvent boucher des
canalisations, la Moule zébrée, les jussies ou les élodées qui peuvent colmater des ouvrages
hydrauliques, le Ragondin ou l’Ecrevisse de Louisiane qui peuvent percer des digues, …
Les services écosystémiques peuvent être réduits par suite des impacts écologiques sur le
fonctionnement des écosystèmes (Figure 9).
Les impacts sanitaires expliquent une grande partie des coûts (plus de 50% en Outre-mer,
25% pour le seul moustique tigre en métropole) (Wittmann & Flores-ferrer 2015).
37
Figure 9. Impacts des espèces exotiques envahissantes sur les services écosystémiques (extrait de UICN-France
2015, adapté de Charles & Dukes 2007))
7.2.1. Coût de l’impact des EEE sur les espèces menacées
L’enquête du CGDD (Wittmann & Flores-Ferrer 2015) n’a pas pu différencier l’impact
économique sur la seule biodiversité par rapport aux impacts socio-économiques et
sanitaires, mais l’a fait d’une manière indirecte d’après les Plans Nationaux d’Action sur les
espèces menacées. Sur les 68 PNA en cours en métropole entre 2009 et 2013, seuls 3
indiquent une menace de l’espèce native par des EEE : la Cistude d’Europe menacée en
Rhône Alpes par la Tortue de Floride, l’Ecrevisse américaine, le Ragondin, le Rat musqué, les
carpes chinoises (Cyprinus spp.), le Black-bass (Micropterus salmoides) et la Jussie (surcoût
26% du PNA), la Tortue d’Hermann (Testudo hermanni) menacée en PACA par les tortues
exotiques (6% de surcoût) et le Vison d’Europe (M. lutreola) menacé en Aquitaine par le
Vison d’Amérique (28% de surcoût).
Par contre les 3 PNA ultramarins concernent des espèces impactées par les EEE : le Gecko
vert de Manapany (Phelsuma inexpectata) concurrencé à la Réunion par le Grand Gecko vert
de Madagascar (P. grandis) (mais seulement 6% de surcoût), l’Iguane des Petites Antilles
(Iguana delicatissima) menacé d’hybridation par l’Iguane commun (I. iguana) à la Martinique
(12% de surcoût), et le Pétrel noir de Bourbon (Pseudobulweria aterrima) menacé à la
Réunion par les rats et les chats harets (26% à 36% de surcoût). .
38
Dans tous ces cas peu nombreux la menace représentée par les EEE ne représente qu’un
surcoût de lutte minoritaire (17% en moyenne) par rapport aux autres actions de
restauration.
7.2.2. Espèces les plus coûteuses en termes de lutte en métropole
Dix familles de plantes représentent 79% des dépenses (4,48 millions €), avec en tête les
jussies (67% des dépenses totales, puis loin derrière les renouées, l’Ambroisie et le
Baccharis). Arrivent ensuite 4 mammifères (15% des dépenses : Ragondin et Rat musqué
pour 764 000€, Ecureuil à ventre rouge et Tamia de Sibérie pour 216 000 €), les écrevisses
exotiques (2,7% des dépenses avec 179 000 €), le Frelon asiatique (2,2% des dépenses avec
152 000 €), la Grenouille Taureau (0,9% des dépenses avec 60 000 €) et deux oiseaux (0,7%
des dépenses avec 45 000 € pour l’Erismature rousse et la Bernache du Canada). Ce
classement montre que les fonds octroyés ne concernent pas toujours les espèces les plus
préoccupantes (Ecureuil à ventre rouge, Tamia de Sibérie, Erismature rousse et Bernache du
Canada), et qu’a contrario beaucoup d’espèces préoccupantes ne disposent d’aucun soutien
économique de lutte ou d’études.
A chaque découverte d’une nouvelle espèce exotique installée, le défi est de savoir s’il faut
agir ou non et selon quels critères de décision. Si l’espèce n’est pas connue en dehors de son
aire de répartition naturelle et s’il faut attendre la démonstration de l’existence de dégâts
non discutables pour intervenir, alors cela peut-être trop tard.
7.2.3. Espèces les plus coûteuses en termes de lutte en outre-mer
L’Outre-mer représente 68% des dépenses de lutte contre les EEE en France. Hormis le
Moustique tigre pour des raisons sanitaires vis-à-vis de l’Homme, les EEE les plus coûteuses
(lutte et effets résiduels) outre-mer sont les rats, Souris grise, Chats harets (Polynésie
française, TAAF, Réunion, Saint-Martin), la Jacinthe d’eau (Martinique), l’Acacia (Guyane), le
Cerf de Java et le Cochon féral (Nouvelle-Calédonie). Aucun oiseau n’y figure. La Réunion, la
Nouvelle-Calédonie et les TAAF représentent 50% des dépenses en France (métropole +
outre-mer). Néanmoins Soubeyran et al (2011) signalent un programme de contrôle du
Busard de Gould (Circus approximans) dans le cadre du programme de conservation du
Monarque de Tahiti (Pomarea nigra) en Polynésie française ainsi qu’une lutte obligatoire
contre le Bulbul orphée (Pycnonotus jocosus) à La Réunion. Il existe également un
programme de contrôle du grand gecko vert de Madagascar (P. grandis) à La Réunion et le
PNA Iguane des Petites Antilles (I. delicatissima) devrait inclure un plan de contrôle de
l’Iguane commun (I. iguana).
39
7.3. Impacts sanitaires
Les impacts sanitaires pour les plantes, les animaux et l’homme sont nombreux et
diversifiés. De nombreuses espèces exotiques envahissantes sont des vecteurs ou des
réservoirs de microorganismes (virus, bactéries, parasites, champignons). Elles assurent
l’amplification, la dispersion et la transmission d’organismes pathogènes vers d’autres
espèces de façon proportionnelle à leur abondance. Parmi les exemples les plus connus
peuvent être cités l’impact sur les populations de lapins de Garenne et de clapier de la
myxomatose (virus introduit en France dans les années 50) et de la maladie virale
hémorragique, provoquée par un virus de la famille des Calicivirus (introduit dans les années
90). Le Moustique-tigre est vecteur du virus responsable du chikungunya et de ceux
responsables de la dengue. Le Chien viverrin est devenu réservoir de la rage en Europe de
l’est et dans les pays baltes. Le virus est différent de celui présent chez le Renard, le cycle
épidémiologique est indépendant. Un ver parasite (Anguillicola crassus) importé avec des
anguilles japonaises (Anguilla sp.) infecte la vessie natatoire de l’anguille européenne
(Anguilla anguilla); elle est une des causes pouvant expliquer la très forte régression de ses
populations. Avec les écrevisses américaines a été introduite la peste des écrevisses, (causée
par le champignon Aphanomyces astaci), qui est mortelle pour les espèces indigènes.
7.4. Les impacts positifs des EEE sur la biodiversité
7.4.1. Impacts positifs des EEE en métropole
Quarante-deux EEE ont été citées dans l’enquête du CGDD de 2015 comme ayant des
impacts économiques positifs, concernant l’horticulture, la sylviculture, la pêche, la chasse et
le tourisme. Concernant les impacts positifs sur des espèces protégées, l’Ecrevisse de
Louisiane est citée en tant que nouvelle ressource alimentaire (Loutre, mais on peut aussi
mentionner le Butor étoilé, Botaurus stellaris, et plusieurs oiseaux coloniaux dont les
effectifs ont augmenté en partie grâce à cette manne alimentaire : Ibis falcinelle, Plegadis
falcinellus, Spatule blanche, Platalea leucorodia, Grande aigrette, Casmerodius alba…)
(Poulin et al. 2007), parallèlement à ses effets négatifs sur d’autres espèces (macrophytes,,
habitats…). L’Ibis sacré, non retenu dans cette enquête comme espèce problématique, est
citée comme ayant un impact positif en tant que gros consommateur de cette écrevisse.
Des escargots d’eau introduits aux Antilles françaises (Martinique et Guadeloupe) ont
remplacé un escargot indigène qui participait au cycle de la bilharziose. Le nématode
responsable de la bilharziose cycle entre un escargot aquatique et les humains. La planorbe
glabre (Biomphalaria glabrata), indigène, est remplacée par la planorbe jaune paille (B.
straminea) introduite accidentellement dans les années 1950, suivie de la Mélanie bordée
de rouge (Melanoides tuberculata) importée dans les années 1970. La maladie a disparu
avec la planorbe glabre, considérée éteinte en 2000, pour cause de compétition avec les
nouvelles venues (Albouy 2017)
40
8. Gestion des EEE
Un consensus général apparait sur la stratégie de gestion des espèces exotiques
envahissantes (par exemple Simberloff et al. 2013, Sakai et al. 2001,). Elle répond à
l’adaptation des objectifs et moyens de gestion en fonction du temps depuis l’introduction
correspondant au stade d’invasion. A chaque stade une analyse de risque et coût/bénéfice
est nécessaire pour optimiser l’efficacité, c’est-à-dire concentrer les efforts sur les situations
avec le plus de risques et celles avec le meilleur rapport coût-efficacité (Figure 10).
Figure 10. Stratégie de gestion des espèces exotiques envahissantes. La stratégie optimale évolue avec le
temps depuis l’introduction avec une diminution progressive de l’efficacité et une augmentation des coûts
(Extrait de Simberloff et al 2013).
Cette stratégie générale est à adapter aux cas particuliers incluant une évaluation rigoureuse
du degré de menace que représentent les espèces (notamment espèces opportunistes ou
dominantes), la probabilité d’introductions répétées, les rapports coûts-efficacité et les
considérations éthiques.
8.1. Prévention
Cette stratégie est d’abord basée sur la prévention des introductions des espèces risquant
de devenir envahissantes. Elle dépend de la capacité à maitriser les flux d’espèces et à
identifier les espèces les plus susceptibles de devenir envahissantes.
41
8.1.1. Maitriser le flux d’arrivée des EEE
Le développement du commerce international associé à la rapidité des échanges, paraissent
contradictoires avec une possibilité simple de contrôler les flux. On doit y ajouter les
transports via le ballast des navires pour les espèces marines. La « conteneurisation » du
commerce international ne va pas non plus dans le sens d’une meilleure connaissance ni
d’une meilleure maîtrise des flux et des contenus. Techniquement cela doit être possible
mais la volonté et les moyens ne suivent pas. Les restrictions à l’importation semblent
pouvoir limiter le nombre de nouvelles espèces exotiques envahissantes. Ainsi, après la mise
en place de contrôles stricts à l’importation en Australie et en Nouvelle-Zélande ces pays
montrent une stabilisation du nombre d’EEE depuis plusieurs dizaines d’années alors que
celui-ci ne cesse d’augmenter en Europe (Simberloff et al. 2013). Cependant, l’isolement
géographique de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande facilite le contrôle des flux d’espèces.
En Europe, avec une continuité territoriale, des frontières ouvertes, des règlements
hétérogènes et des échanges économiques de grande ampleur, les législations actuelles ne
semblent pas en mesure de limiter les flux de nouvelles espèces.
Le commerce par internet échappe en partie aux règles du commerce traditionnel. Qui plus
est, le commerce en ligne de certaines espèces cataloguées « nuisibles » ou « susceptibles
d’occasionner des dégâts » apparait délicat à contrôler légalement dans l’état actuel du
droit. Ainsi il semble toujours possible d’acheter en ligne des visons d’Amérique comme
animaux de compagnie alors même que le PNA vison d’Europe lutte contre cette espèce.
Récemment des écureuils roux du Japon (Sciurus lis) étaient officiellement vendus en ligne
alors que renseignement pris, il s’agissait de l’Ecureuil roux (S. vulgaris), protégé et donc
interdit de vente dans le contexte découvert. Cela illustre les lacunes existant à tous les
niveaux de ce commerce. Il est probable que les entrées seront difficiles à empêcher.
Il faut revoir le droit français et peut-être le droit européen pour réussir à interdire de fait la
mise sur le marché d’espèces interdites (protégées ou « susceptibles d’occasionner des
dégâts »). Les nouvelles réglementations aux niveaux national et européen vont dans ce sens
mais elles ne semblent cependant pas en mesure d’endiguer le flux de nouvelles espèces. En
effet, d’une part ces réglementations visent surtout le contrôle des espèces déjà identifiées
comme envahissantes et les listes d’espèces ciblées sont le résultat de négociations entre
états où les intérêts économiques prennent le pas sur les considérations environnementales.
La notion de biosécurité, évoquée au tout début, peut se justifier ici. En effet, l’encadrement
juridique du commerce international est sous la coupe de plusieurs textes. Dans le contexte
des risques sanitaires, il existe un accord sanitaire et phytosanitaire (accord SPS) au niveau
de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) qui encadre l’usage des motifs sanitaires
dans les échanges commerciaux internationaux. Le but est d’éviter l’instauration de
barrières sanitaires non fondées. Pour garantir l’absence ou la maîtrise du risque sanitaire
associé aux échanges d’animaux, de produits animaux et de végétaux il est demandé des
analyses de risques selon une méthodologie standardisée et transparente. Ceci permet à
l’importateur comme à l’exportateur d’apprécier le plus objectivement possible les risques
associés. Bien que la question concerne essentiellement les espèces domestiques, d’élevage,
deux chapitres d’une récente monographie sur les questions de biosécurité se réfèrent
explicitement et respectivement aux risques liés aux déplacements d’espèces sauvages et
aux espèces exotiques envahissantes (Buller H. 2013, Fall J.J. 2013).
42
Non seulement la règlementation serait à adapter mais le public serait à informer voire à
éduquer, ce dont nous semblons assez loin aujourd’hui. L’augmentation des volumes et
l’accélération de la vitesse des échanges sont, de fait, contradictoires avec une meilleure
maîtrise.
8.1.2. Identifier les espèces susceptibles de devenir envahissantes
Il n’existe pas de critères généralisables pour prédire quelles espèces peuvent devenir
envahissantes. Les traits d’histoire de vie peuvent donner des indices importants,
notamment les traits démographiques ou de taux de croissance (espèces compétitives,
espèces opportunistes notamment). A minima, les espèces déjà connues comme
envahissantes dans d’autres régions du monde (y compris dans leur aire d’origine) devraient
faire l’objet de précautions renforcées.
Problème posé par la gestion administrative des EEE Selon Vanderhoeven et al. (2017), la
constitution des listes d’espèces envahissantes s’effectue très largement à dire d’experts,
souvent en cercles fermés et partisans de la lutte contre les allochtones par principe, sans
méthode scientifique rigoureuse, avec une part trop importante de subjectivité, ce qui
entraîne à juste titre des contestations. La liste (DAISIE 2018) des 100 espèces envahissantes
les pires au niveau européen est particulièrement exemplaire de ces dérives. Les
administrations y ajoutent souvent des considérations politiques en fonction des lobbies
économiques. La démarche de l’Union Européenne est particulièrement préoccupante quant-
aux conséquences de l’application du Règlement Européen sur les EEE de 2016. Alors que
chaque pays peut adopter une liste propre d’espèces envahissantes, et qu’en principe ne
doivent être retenues à l’échelle européenne que celles présentant un caractère envahissant
grave et généralisé, et qu’on peut détruire si c’est encore possible et à un coût financier ou
environnemental acceptable, sans effets environnementaux collatéraux négatifs, on a assisté
à l’inclusion d’espèces très localisées (par ex. le Gunnera qui n’est envahissant qu’aux Açores),
ou impossibles à éradiquer (Ragondin, écrevisses d’origine américaines), ou ayant des impacts
mineurs ou non avérés ou contestés (Ibis sacré, Perruche à collier, Strubbe et al. 2010, Marion
2013 mais voir aussi Dubois 2017). La France est ainsi forcée de contraindre les
établissements commerciaux à liquider les stocks de ces espèces, mais tout en pénalisant
ensuite les particuliers qui les détiendraient. Tous les jardins botaniques ou les particuliers qui
possèdent des Gunneras depuis des décennies, plante qui est un élément horticole essentiel
et inoffensif des pièces d’eau des parcs en Europe continentale, vont devoir les détruire. Un
propriétaire pourrait être condamné à ne pas avoir éradiqué les Ragondins ou les Ecrevisses
américaines. Les projets d’arrêtés ministériels français pris en application de ce Règlement
européen en 2016 et 2017 l’ont été avec zèle, alors que beaucoup d’espèces ne devraient pas
y figurer compte tenu des principes liminaires du Règlement européen, et les effets
collatéraux sur l’environnement des mesures d’éradication y ont été totalement minimisés.
Ainsi, les destructions d’Ibis sacrés vont pouvoir être réalisées par l’ONCFS dans les colonies
mixtes d’Ardéidés et de Spatule sans autorisation des propriétaires de ces sites qui s’y
opposaient jusqu’à présent, ce qui contrevient au Règlement européen compte tenu des
effets déjà observés (perturbation importante des colonies mixtes en Loire-Atlantique et
Morbihan, Marion & Benhammou 2017). La déontologie sur la souffrance animale n’est
également pas prise en compte (adultes tués lors des vols alimentaires, condamnant leurs
jeunes à mourir de faim dans les nids).
43
8.2. Détection précoce
La détection précoce implique la présence d’un réseau d’observateurs compétents. Ces
observateurs sont trouvés dans le monde scientifique et technique et parmi les réseaux
naturalistes amateurs à condition qu’ils soient sensibilisés à la problématique des EEE. C’est
le cas en France et en Europe où la problématique est de plus en plus reconnue.
Lorsqu’une nouvelle espèce est détectée en milieu naturel ou semi-naturel une analyse de la
situation doit être réalisée au-cas-par cas. Elle vise à une analyse du risque et à une décision
d’intervention ou non. Cette analyse est basée sur les caractéristiques biologiques de
l’espèce, savoir si elle connue pour être envahissante, sa localisation et la taille de sa
population. Une surveillance pour vérifier si d’autres populations existent autour et sur sa
dynamique.
Il y a également un consensus dans la littérature scientifique sur le fait que les interventions
sur les EEE doivent intervenir à un stade précoce pour avoir une chance d’être efficaces et
optimiser le rapport coût efficacité. En effet la dynamique des populations des EEE est
généralement exponentielle (bien que des stades préliminaires de paliers soient parfois
rencontrés) et le coût de gestion augmente proportionnellement à la taille des populations
et l’aire concernée.
Lorsqu’une population d’EEE est à un stade précoce de colonisation, l’éradication est
l’approche la plus efficace. Elle a été appliquée avec succès dans un certain nombre de
situations notamment sur des iles (en Angleterre : Rat-musqué et Ragondin ; Vison
d’Amérique dans les îles de la Baltique) mais pas exclusivement (Ecureuil à ventre rouge en
Belgique, Branquart & Fried 2016). Si le coût de l’éradication peut paraitre important il sera
probablement moins important que les coûts de gestion à long-terme résultant d’une action
incomplète ou d’une détection tardive. Ainsi par exemple le coût total de l’éradication du
ragondin en Angleterre représente la moitié des sommes investies annuellement en Italie
pour le contrôle de la population de l’espèce (Branquart & Fried 2016).
On peut revenir sur le cas de l’écureuil à ventre rouge. Les écureuils associent plusieurs
paramètres assez illustratifs des difficultés et paradoxes représentées par les EEE. Ce sont
des espèces plutôt appréciées, « attendrissantes », parfois vendues comme animaux de
compagnie (espèces exotiques) alors que l’espèce indigène (Sciurus vulgaris) est strictement
protégée. L’introduction de l’écureuil gris du nord-est américain (S. carolinensis) en Grande-
Bretagne a fait considérablement régresser l’espèce locale (S. vulgaris). Il existe de ce fait
une sensibilité chez les scientifiques continentaux vis-à-vis de ce problème. L’acclimatation
du Tamia de Sibérie puis de l’Ecureuil à ventre rouge ont fait réagir, avec divers arguments,
écologiques et sanitaires. En France, le 05 mars 2015, le préfet des Alpes Maritimes a signé
l’arrêté n°2015-205 de lutte contre cette espèce, valable pour la période 2015-2018
44
8.3. Gestion des EEE établies
Lorsque les EEE sont largement répandues la seule option envisageable semble l’atténuation
(Figure 11). Les coûts impliqués par les opérations de contrôle visant à la réduction des
nuisances peuvent être très élevés et l’augmentation continue du nombre d’espèces
concernées questionne sur la durabilité.
Figure 11. Evolution du nombre d’espèces exotiques de mammifères naturalisées en Nouvelle-Zélande et en
Europe depuis 1800. D’après Simberloff et al. 2013, in Branquart & Fried 2016.
Par ailleurs, l’éradication des EEE peut s’avérer dangereuse en modifiant les nouveaux
équilibres fonctionnels dans les écosystèmes dans lesquels elles se sont insérées, entraînant
des effets négatifs importants et imprévus sur des espèces natives (Courchamp et al. 1999,
2000, Roemer et al. 2002, Collins et al. 2009, Figuet 2013).
La restauration des écosystèmes et de leur fonctionnement devrait faire partie de la
stratégie de gestion des EEE. En effet, la prolifération de ces espèces est très souvent
associée à des dégradations plus ou moins importantes des milieux, ouvrant des
opportunités d’installation. Par exemple l’installation du Séneçon en arbre, Baccharis
halimifolia, dans les roselières est favorisée par les incendies. Les apports excessifs de
nutriments (eutrophisation) ou la surexploitation des ressources naturelles (par exemple,
pression de prélèvement excessives : pêche) favorise l’établissement d’espèces
opportunistes comme les EEE.
45
8.4. Mise en œuvre de la stratégie de gestion des EEE
La gestion pratique des EEE est dans une large mesure une question d’évaluation objective
des risques ou des impacts associés à l’arrivée d’une ou plusieurs espèces exotiques, des
risques de gestion incluant la probabilité du succès mais aussi des impacts éventuellement
négatifs des opérations de contrôle, de l’acceptation sociale du contrôle des espèces et
finalement de priorités d’allocation de moyens du fait du nombre importante et toujours
croissant d’espèces exotiques arrivant sur un territoire.
Plusieurs étapes sont à considérer dans une évaluation des risques liés à la gestion des
espèces exotiques (d’après Booy et al. 2017, modifié) :
Définir un scénario d’envahissement pour chaque espèce. Cela doit être spécifique à
chaque situation, c’est-à-dire l’espèce et la région considérées. Cela peut impliquer
une surveillance de la dynamique des espèces établies.
Evaluer les impacts de l’espèce
Définir une stratégie d’éradication ou de contrôle. Sur la base du scénario
d’envahissement définir une stratégie réaliste de gestion utilisant les moyens
appropriés et incluant des moyens de suivi et d’évaluation
Evaluer la stratégie d’éradication ou de contrôle :
a. Efficacité des moyens incluant les aspects pratiques et logistiques
b. Coût de la mise en œuvre des moyens de gestion
c. Effets négatifs des moyens de gestion, incluant les effets environnementaux,
économiques et sociaux
d. Acceptabilité de la stratégie d’éradication ou de contrôle (par ex. espèces
« attendrissantes »)
Evaluer la pertinence de la mise en œuvre au regard de la dynamique d’expansion de
l’espèce exotique considérée.
Evaluer le risque d’introductions répétées (sources potentielles, moyens de réduire
les risques d’introduction)
Evaluation globale de la faisabilité de l’éradication ou du contrôle en fonction des
points précédents et prioriser les actions en privilégiant les actions sur les espèces
ayant le plus fort impact et avec les plus grandes chances de succès. .
Ces évaluations doivent se faire avec un panel diversifié d’experts se basant sur des
évidences scientifiques (Sutherland et al. 2004).
Au-delà de ces actions techniques, spécifiques à chaque situation des actions générales sont
nécessaires pour prévenir les entrées d’EEE et limiter les risques d’expansion de ces espèces.
Il s’agit notamment :
d’éduquer, de former et de sensibiliser le grand public à la problématique des EEE
46
de suivre et d’évaluer de manière pluridisciplinaire la diversité des impacts (positifs
et négatifs des espèces)
de promouvoir la restauration et le bon état des écosystèmes comme mesure de
prévention des risques
de sensibiliser les politiques à l’importance d’améliorer les textes législatifs
47
Références
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ANNEXE 1 : Liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l'Union.
Extrait du Règlement européen n°1143/2014 du Parlement européen et des règlements d’exécution
2016/1141 du 13 juillet 2016 (Liste 1) et 2017/1263 du 12 juillet 2017 relatifs à la prévention et à la
gestion de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes du 22 octobre
2014.
-
Nom scientifique
Nom commun Liste
Plante
Baccharis halimifolia L.
Bac charis à f euilles d’arroche ou sé neçon en arbre 1
Plante
Cabomba caroliniana Gray
Eventail de Caroline 1
Plante
Eichhornia crassipes (Martius) Solms
Jac inthe d’eau 1
Plante
Heracleum persicum Fischer
Berce de Perse 1
Plante
Heracleum sosnowskyi Mandenova
Berce de Sosnowsky 1
Plante
Hydrocotyle ranunculoides L. f.
Hydroc otyle fausse renonc ule 1
Plante
Lagarosiphon major (Ridley) Moss
Grand la garosiphon 1
Plante
Ludwigia grandiflora (Michx.) Greuter & Burdet
Jussie à grandes fleurs 1
Plante
Ludwigia peploides (Kunth) P.H. Raven
Jussie rampa nte 1
Plante
Lysichiton americanus Hultén and St. John
Faux a rum 1
Plante
Myriophyllum aquaticum (Vell.) Verdc.
Myriophylle du Brésil 1
Plante
Persicaria perfoliata (L.) H. Gross = (Polygonum
perfoliatum L.)
Renouée perfoliée 1
Plante
Parthenium hysterophorus L.
Grande camomille 1
Plante
Pueraria montana (Lour.) Merr. var.
lobata (Willd.) (Pueraria lobata (Willd.) Ohwi)
Kudzu 1
Plante
Alternanthera philoxeroides (Mart.) Griseb., 1879 Herbe à alligator 2
Plante
Asclepias syriaca L., 1753 Asclépiade de Syrie 2
Plante
Elodea nuttallii (Planch. ) H.St.Jo hn, 1920 Élodée de N uttall 2
Plante
Gunnera tinctoria (Molina) Mirb., 1805 Rhubarbe géante du Chili 2
Plante
Heracleum mante gazzianum Sommier & Levier, 1895 Be rce du Cauc ase 2
Plante
Impatiens glandulifera Royle, 1833 Balsamine de l'Himalaya 2
Plante
Microstegium vimine um (Trin.) A. Camus Herbe à é chasses ja ponaise 2
Plante
Myriophyllum hete rophyllum Michx., 1803 Myriophylle à feuilles hétérogènes 2
Plante
Pennisetum setaceum (Forssk.) C hiov. (Cenchrus
setaceus (Forssk.) Mo rrone, 2010)
Herbe f ontaine 2
Insecte
Vespa velutina nigrithorax de Buysson, 1905
Frelon asia tique 1
Crustacé
Procambarus fallax (Hagen, 1870) f. virginalis
Ecrevisse marbrée 1
Crustacé
Eriocheir sinensis H. Milne Edwards, 1854
Crabe chino is à mitaines 1
Crustacé
Orconectes limosus Rafinesque, 1817
Écrevisse américaine 1
Crustacé
Orconectes virilis Hagen, 1870
Ecrevisse ca licot, Écrevisse calico , Écrevisse à carapace
fine
1
Crustacé
Procambarus clarkii Girard, 1852
Écrevisse de Louisiane, Écrevisse rouge de Louisiane,
Écrevisse rouge des marais
1
Crustacé
Pacifastacus leniusculus Dana, 1852
Écrevisse de Californie, Écrevisse signal, Écrevisse du
Pacifique
1
Amphibien
Lithobates (Rana) catesbeianus Shaw, 1802
Grenouille ta ureau 1
Reptile
Trachemys scri pta Schoepff, 1792
Tortue de Floride, Trachémyde écrite 1
Poisson
Perccottus glenii Dybowski, 1877
Goujo n de l'Amour 1
Poisson
Pseudorasbora parva Temminck & Schlegel, 1846
Pseudorasbo ra, Goujon a siatique 1
Oiseau
Corvus splendens Viellot, 1817
Corbeau fa milier 1
oiseau
Oxyura jamaicensis Gmelin, 1789
Érismature rousse 1
oiseau
Threskiornis aethiopicus Latham, 1790
Ibis sacré 1
oiseau
Alopochen aegyptiacus L innaeus, 1766; Ouette d'Egypte, Oie d'Egypte 2
Mammifère
Callosciurus erythrae us Pallas, 1779
Écureuil à ventre ro uge ou Écure uil de Pallas 1
Mammifère
Herpestes javanicus É. Geoffroy Saint-Hilaire,
1818
Mangous te de Java 1
Mammifère
Muntiacus reevesi Ogilby, 1839
Muntjac de Chine 1
Mammifère
Myocastor coypus Molina, 1782
Rago ndin 1
Mammifère
Nasua nasua Linnaeus, 1766
Coa ti roux, Coat i brun, Coachi 1
Mammifère
Procyon lotor Linnaeus, 1758
Raton laveur, Ra coon (Guadeloupe) 1
Mammifère
Sciurus carolinensis Gmelin, 1788
Ecureuil gris 1
Mammifère
Sciurus ni ger Linnaeus, 1758
Ecureuil fa uve ou Ecureuil-renard 1
Mammifère
Tamias sibiricus Laxmann, 1769
Tamia de Sibérie, Écureuil de Corée, Rat de Corée,
Écureuil japo nais
1
Mammifère
Nyctere utes procyonoides Gray, 1834 Chien viverrin 2
Mammifère
Ondatra zibethicus Linnaeus, 1766 Rat musqué 2
54
ANNEXE 2. Diversité des régimes d’introduction et de gestion des espèces invasives en
droit interne.
In C. Cans et O. Cizel, « Loi biodiversité, ce qui change en pratique », Editions législatives,
2017, p.308-310
Catégories/référence
s réglementaires
Mesures
Conditions
Espèces visées
Espèces non
domestiques (ex-
nuisibles)
-C. envir.,
art. R. 427-6
-Arr. 2 sept. 2016 : JO,
14 sept.
-Arr. 30 juin 2015 :
JO, 47 Juil.
-Arr. 3 avr. 2012 : JO,
25 avr.
Destruction par tir,
piégeage
Emploi de produits
toxiques interdits
Inscription de
l’espèce sur une :
-
liste ministérielle,
annuelle
-
ou, liste
ministérielle
complémentaire
trienn
ale, par
département, sur
proposition du
préfet
-
ou, liste
ministérielle
annuelle des
espèces pouvant
être classées
nuisibles par arrêté
annuel du préfet
-bernache du Canada,
chien viverrin, ragondin,
rat musqué, raton laveur
et vison d’Amériques ;
-
belette, fouine, martre,
putois, renard, corbeau
freux, corneille noire, pie
bavarde, geai des chênes
et étourneau sansonnet ;
-
lapin de garenne,
pigeon ramier et sanglier
Espèces détenues par
les établissements
d’élevage
-Arr. 10 aout 2004 :
JO, 30 sept.
-Arr. 10 aout 2004 :
JO, 25 Sept.
; rect.
JO, 1er janv. 2005
Autorisation des
espèces détenues ou
autorisation de
l’établissement en
détenant
Limitation de la
cession de ces
espèces
Inscription des
espèces sur une
liste :
-d’espèces
soumises à
autorisation
préfectorale de
détention et à
marquage ;
-
d’espèces ne
pouvant être
détenues que par
un établissement
autorisé
-cormoran, ibis sacré,
bernache du Canada,
perruches, tortues
terrestres, etc. :
-
kangourou, vison
d’Amérique
, daim,
varans, colibris,
chouettes, serpents,
grenouilles, etc.
Organismes nuisibles
aux végétaux
-C. rur., art. L. 251-3 à
L. 251-3-1
-Arr. 31 juil. 2000 : JO,
31 aout
-Arr. 26 déc. 2012 :
JO,28 déc.
Interdiction
d’introduction, de
détention de
transport, sauf
autorisation
Mesures préventives
Mesures de
destruction (plans
de lutte notamment)
Inscription de
l’espèce par arrêté
sur la liste des
organismes
présentant un
danger sanitaire de
-1er catégorie
-2e catégorie
Ragondin (lutte chimique
sur autorisation), rat
musqué, fourmi
d’Argentine, etc. (lutte
obligatoire)
Frelon asiatique (danger
sanitaire 2e catégorie)
55
Espèces non
indigènes
-C. envir., art L. 411-5
à L. 411-10
-Arr. 30 juil. 2010 : JO,
10 sept.
-Arr. 2 mai 2007 : JO,
17 mai
Interdiction
d’introduction seule
Interdiction
d’introduction,
d’importation, de
détention, de
transport,
d’utilisation,
d’échange, de
cession, sauf
autorisation du
préfet
Mesures de contrôle
Mesures de capture,
prélèvement, garde
ou destruction
Plans nationaux de
lutte
Inscription de
l’espèce s
ur une
liste ministérielle :
-
des animaux non
indigènes et non
domestiques
-
des végétaux non
indigènes et non
cultivés
Nouvelles listes non
encore publiées
Anciennes listes (pour
mémoire) :
-vertébrés
: 22 espèces
dont 14 mammifères, 4
oiseaux et 4
amphibiens :
-
invertébrés (non
publiée, sauf frelon
asiatique)
-
plantes (non publiée),
sauf deux espèces de
jussies
Espèces indigènes
C. envir., art. L. 411-4
Interdiction
d’introduction sauf
sur autorisation du
préfet
Inscription de
l’espèce sur liste
ministérielle
Non encore publiée
Espèces piscicoles
-C. envir., art. L. 436-9
-C. envir., art. L. 432-
10, 2° et R. 432-
6 et
s. ; Arr. 17 déc. 1985 :
JO,
26 janv. 1986 et
Arr. 6 aout 2013 : JO,
28 sept.
Interdiction
d’introduction
Autorisation du
préfet po
ur les
espèces non
représentées
Inscription de
l’espèce sur une
liste :
-
des espèces
pouvant créer des
déséquilibres
biologiques ;
-
des espèces non
représentées :
-
des poissons
carnassiers
-perche-soleil, poisson
chat, crabe chinois,
écrevisses autres
qu’indigènes et
grenouilles autres
qu’indigènes :
-
espèces ne figurant pas
sur la liste des espèces
représentées
-brochet, perche, sandre
et black-bass
Espèces nuisibles à la
santé humaine (1)
-
C. santé publ., art. L.
1338-4 à L. 1338-4
Limitation ou
inte
rdiction des
cessions à titre
onéreux ou gratuit
d’espèces
proliférantes
Information de
l’acheteur
Inscription de
l’espèce animale
ou végétale sur
une liste publiée
par décret
Liste non publiée
(1) K. n° 2016-41, 26 janv. 2016, de modernisation de notre système de santé, art. 57 : JO, 27
janv.
56
ANNEXE 3 Les 12 propositions de la stratégie nationale relative aux EEE (MEEM 2017).
Axe I. Prévention de l’introduction et de la propagation des espèces exotiques
envahissantes
Objectif 1Identifier et hiérarchiser les espèces exotiques envahissantes en vue de
planifier les actions
Objectif 2Surveiller les espèces exotiques envahissantes et leurs voies
d’introduction et de propagation
Objectif 3Renforcer et mettre en œuvre la réglementation
Axe II Interventions de gestion des espèces et restauration des écosystèmes
Objectif 4Intervenir rapidement sur les espèces exotiques envahissantes
nouvellement détectées sur un territoire
Objectif 5Maîtriser les espèces exotiques envahissantes largement répandues
Objectif 6Gérer et restaurer les écosystèmes
Axe III Amélioration et mutualisation des connaissances
Objectif 7 Renforcer et poursuivre l’acquisition de connaissances
Objectif 8 Développer les méthodes et outils de gestion
Axe IV Communication, sensibilisation, mobilisation et formation
Objectif 9Développer des réseaux et des outils pour échanger l’information
Objectif 10Sensibiliser et collaborer avec le grand public, les acteurs économiques
et politiques
Objectif 11Former les acteurs socio-économiques, les gestionnaires d’espaces et
les scolaires aux invasions biologiques
Axe V Gouvernance
Objectif 12 Animer la stratégie
57
ANNEXE 4. Liste des espèces très préoccupantes et préoccupantes en France
(source Wittman & Fores-Ferrer, 2015). Les espèces citées parmi les 100 pires dans l’UE
(DAISIE 2018) sont surlignées en gris.
Espèces très préoccupantes
Espèces préoccupantes
Nom scientifique
Nom commun
Nom scientifique
Nom commun
Fallopia / Reynoutria
japonica Renouée du Japon Acacia dealbata Mimosa argenté, Mimosa
des fleuristes
Ludwigia grandiflora
Ludwigie à grandes
fleurs, Jussie
Araujia sericifera Faux kapok
Ambrosia artemisiifolia
Ambroisie
Bunias orientalis
Bunias d’Orient
Myocastor coypus (
Ragondin
Campylopus introflexus
Mousse cactus
Pacifastacus leniusculus
Écrevisse de Californie
Carpobrotus edulis
Griffe de sorcière
Procambarus clarkii
Écrevisse de Louisiane
Cotoneaster horizontalis
Cotonéaster horizontal
Acer negundo
Érable Négundo
Elægnus angustifolia
Olivier de Bohème
Elodea canadensis
Élodée du Canada
Euphorbia × pseudovirgata
Euphorbe fausse-baguette
Ludwigia peploides Jussie rampante Hydrocotyle ranunculoides Hydrocotyle fausse-
renoncule
Ailanthus altissima
Faux-vernis du Japon,
Vernis du Japon,
Ailanthe
Lagarosiphon major Grand Lagarosiphon
Cortaderia selloana Herbe de la Pampa,
Roseau à plumes Laurus nobilis Laurier sauce
Fallopia / Reynoutria
sachalinensis
Renouée de Sakhaline Nicotiana glauca Tabac glauque
Heracleum mantegazzianum Berce du Caucase,
Berce de Mantegazzi Panicum miliaceum Millet cultivé
Robinia pseudoacacia
Robinier faux-acacia,
Carouge
Periploca graeca Bourreau-des-arbres
Ondatra zibethicus
Rat musqué
Polygonum polystachyum
Renouée à épis nombreux
Azolla filiculoides
Azolle fausse-fougère
Senecio cineraria
Séneçon Cinéraire
Elodea nuttalii
Élodée à feuilles étroites
Spartina anglica
Spartine anglaise
Fallopia/ Reynoutria x-
bohemica
Renouée de Bohême Spartina alterniflora Spartine à feuilles alternes
Solidago gigantea /
canadensis
Tête d'or, solidago
américain
Undaria pinnatifida Wakame
Baccharis halimifolia
Séneçon en arbre
Yucca filamentosa
Yucca filamenteux
Egeria densa
Egérie dense
Yucca gloriosa
Yucca superbe
Phytolacca americana Raisin d'Amérique,
Phytolaque américaine Alopochen aegyptiaca Ouette d'Égypte
Impatiens glandulifera
Basalmine de l'Himalaya
Branta canadensis
Bernache du Canada
Orconectes limosus
Écrevisse américaine
Callosciurus erythraeus
Écureuil de Pallas
Lepomis gibbosus
Perche-soleil
Cyprinus carpio
Carpe commune
Vespa velutina Frelon à pattes jaunes,
frelon asiatique Dreissena polymorpha Moule zébrée
Aster / Symphyotrichum
lanceolatus
Aster lancéolé Harmonia axyridis Coccinelle asiatique
Myriophyllum aquaticum Myriophylle aquatique,
Myriophylle du Brésil Psittacula krameri Perruche à collier
58
Artemisia verlotiorum Armoise des Frères
Verlot, Armoise de Chine Rattus norvegicus Rat surmulot
Ameiurus nebulosus
Poisson-chat
Reticulitermes flavipes
Termites
Trachemys scripta
Tortue de Floride
Tamias sibiricus
Tamia de Sibérie
Bidens frondosa
Bident à fruits noirs
Treskiornis aethiopicus
Ibis sacré
Crassula helmsii
Crassule des étangs
Cerratocystis Plantani
Chancre coloré du platane
Eichhornia crassipes
Jacinthe d'eau,
Calamote
Prunus serotina Cerisier tardif, Cerisier
noir, Cerisier d'automne
Datura stramonium
Datura officinal
Galega officinalis
Galéga officinal
Glyceria stricta
Glycérie droite
Helianthus tuberosus
Topinambour
Impatiens parviflora
Balsamine à petites
fleurs
Opuntia stricta
Oponce
Panicum capillare
Millet capillaire
Panicum dichotomiflorum
Millet des rizières
Parthenocissus inserta
Vigne vierge
Pinus nigra
Pin noir (native en F)
Prunus laurocerasus
Laurier-cerise
Senecio inaequidens
Séneçon du Cap
Symphyotrichum X salignum
Aster à feuilles de saule
Crepidula fornicata
Crépidule
Neovison vison
Vison d'Amérique
Crassostrea gigas
Huître creuse du
Pacifique
Research
Full-text available
La multi exposition environnementale peut être définie comme le fait d’être exposé à plusieurs facteurs environnementaux au cours d’une vie. Nous pouvons alors parler d’exposome (complémentaire du génome), concept qui définit l’ensemble des expositions environnementales au cours d’une vie (depuis sa conception intra-utérine jusqu’à sa mort) que subi le corps humain.