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LEO HUYLENBROECK
ADRIEN MICHEZ
HUGUES CLAESSENS
GUIDE DE GESTION
DES RIPISYLVES
PRÉAMBULE
Ce guide concerne la gestion de toute vé-
gétation ligneuse présente sur les berges
et les rives des cours d’eau, qui a une
influence directe sur le cours d’eau ou qui
est directement influencée par celui-ci.
Il a été réalisé par la faculté de Gembloux-
Agro-Bio Tech de l’Université de Liège à la
demande de la Direction des Cours d’eau
non navigables (DCENN, SPW Agriculture,
Ressources naturelles et Environnement)
du Service Public de Wallonie, en charge
de la gestion des cours d’eau non navi-
gables de 1ère catégorie. Il fait suite à de
nombreuses collaborations entre l’univer-
sité et cette administration. Il s’adresse :
• aux gestionnaires de cours d’eau
(DCENN, Services Techniques Provin-
ciaux, communes, wateringues, SPW
Mobilité et Infrastructures) ou du milieu
naturel (DNF) ;
• aux associations et entreprises dont
les activités sont en lien avec les cours
d’eau ou le milieu naturel ;
• aux propriétaires riverains ;
• ou encore à toute personne amenée
à s’intéresser à l’arbre en bordure de
cours d’eau ou plus globalement dans
son lit majeur.
Il participe à l’objectif d’une gestion inté-
grée, équilibrée et durable des ripisylves
avec la collaboration de toutes les parties
concernées. Ce nouveau guide, qui met
à jour et remplace une première version
éditée en 2010*, vise à intégrer :
• l’évolution du cadre juridique et
administratif, et la méthodologie des
PARIS (Programmes d’Actions sur les
Rivières par une approche Intégrée et
Sectorisée) ;
• les nouvelles connaissances relatives
aux forêts riveraines ;
• une couverture plus large des problé-
matiques de gestion.
Ce guide s’articule en trois parties. Les
deux premières présentent quelques
éléments fondamentaux relatifs aux
ripisylves et aux spécificités du contexte
wallon. La troisième partie est consacrée
à des recommandations de gestion sous
forme de fiches techniques.
Les modalités de gestion proposées dans
cet ouvrage sont consensuelles et s’ap-
pliquent à des cas idéalisés, typiques des
principales problématiques de gestion.
Cependant, en matière de cours d’eau, les
cas généraux font plutôt figure d’excep-
tion, aussi il convient d’adapter la gestion
à chaque situation particulière. Ce guide
a l’ambition d’apporter l’information
nécessaire à cette démarche. Des sources
d’information complémentaires sont
proposées sous le sigle .
* Mouchet F., Laudelout A., De-
bruxelles N., Henrotay F., Rondeux J.,
Claessens H., 2010. Guide d’entretien
des ripisylves. SPW, DGARNE, DCENN,
Université de Liège, Gembloux Agro-Bio
Tech, Unité de gestion des ressources
forestières et des milieux naturels.
1
PRÉAMBULE
INTRODUCTION
. DÉFINITIONS
. SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES
ASSOCIÉS À LA FORÊT RIVERAINE
.. CONTRÔLE DE L’ÉROSION
.. LUTTE CONTRE
LES INONDATIONS
.. PROTECTION DE LA QUALITÉ
DE L’EAU
.. BIODIVERSITÉ DES ZONES
RIVERAINES
.. PRODUCTIVITÉ ET DIVERSITÉ
DE L’ÉCOSYSTÈME AQUATIQUE
.. ATTRAIT PAYSAGER
LE CONTEXTE WALLON
. CONTEXTE GÉOGRAPHIQUE
. LES FORÊTS RIVERAINES
DE WALLONIE
. CONTEXTE ADMINISTRATIF
.. RÉPARTITION DES
RESPONSABILITÉS
.. LA RÉVISION DU CADRE JURIDIQUE
RELATIF AUX COURS D’EAU
.. LES PARIS
RECOMMANDATIONS
DE GESTION
. RECOMMANDATIONS
GÉNÉRALES
.. FAUT-IL GÉRER
LA FORÊT RIVERAINE ?
.. ENTRETIEN PAR PETITES
TROUÉES
TABLE DES MATIÈRES
.. ARBRES D’INTÉRÊT
BIOLOGIQUE
.. EMBÂCLES ET BOIS MORT
DANS L’EAU
.. ACCÈS ET PÉRIODE
D’INTERVENTION
.. ESPÈCES EXOTIQUES
ENVAHISSANTES
. TECHNIQUES DE GESTION
.. RECÉPAGE
.. TAILLE EN TÊTARD
.. RECOMMANDATIONS
POUR LA PLANTATION
.. GESTION DES PRODUITS
DE COUPE
.. MISE EN PLACE
DE PIÈGES À BOIS
. ADAPTATION AU CONTEXTE
LOCAL
.. ZONE AGRICOLE
.. ZONE FORESTIÈRE
.. ZONE URBANISÉE
.. BERGES ARTIFICIELLES
.. NATURA
.. CASTOR
.. COURS D’EAU NAVIGUÉS
.. PRATIQUE DES LOISIRS
EN RIVIÈRE
. GESTION DES ARBRES MALADES
.. LA CHALAROSE DU FRÊNE
.. LE PHYTOPHTHORA DE L’AULNE
BIBLIOGRAPHIE
CRÉDITS
INTRODUCTION
DÉFINITIONS
SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES
ASSOCIÉS À LA FORÊT RIVERAINE
6
. DÉFINITIONS
Une ripisylve est une formation boisée
qui occupe naturellement les espaces
riverains des cours d’eau, à l’interface
entre les lits majeur et mineur (voir
encadré ci-dessous). Son fonctionnement
est influencé par la proximité d’un cours
d’eau, notamment à travers les processus
d’inondation et d’érosion – déposition.
De ce fait, sa composition en espèces est
particulière.
Les paysages globalement anthropi-
sés rencontrés en Wallonie et ailleurs
en Europe s’éloignent parfois de cette
situation théorique. En eet, le fonction-
nement des écosystèmes riverains a été
profondément altéré par l’aménagement
des cours d’eau et des plaines alluviales
ou encore par l’introduction de nouvelles
espèces. Cet ouvrage ne concerne donc
pas seulement les ripisylves au sens
strict. Il s’étend aux boisements et forêts
riveraines, c’est-à-dire à toute végétation
ligneuse située à proximité directe du
cours d’eau et ayant des interactions
régulières avec celui-ci.
À ces définitions conceptuelles s’ajoutent
leurs transcriptions au sein de la lé-
gislation wallonne (voir encadré page
suivante).
. SERVICES ÉCOSYSTÉ-
MIQUES ASSOCIÉS À LA
FORÊT RIVERAINE
La présence de forêts riveraines est commu-
nément associée à de nombreuses retom-
bées positives pour les sociétés humaines.
Le concept de service écosystémique est
employé pour qualifier toute contribution
au bien-être humain apportée par les
écosystèmes, naturellement ou avec l’aide
de l’homme. Cette section dresse un aperçu
des principaux services qu’apportent les
forêts riveraines ainsi que des conditions
favorables à leur réalisation.
.. CONTRÔLE DE L’ÉROSION
La présence d’une forêt riveraine contri-
bue à limiter l’érosion des berges. D’une
part, la présence de végétaux sur la berge
augmente la rugosité et ralentit l’écou-
lement, qui perd alors de son pouvoir
érosif. D’autre part, les racines des arbres
forment une armature qui favorise la
cohésion et la solidité de la berge. Afin
de garantir cohésion et protection de
surface, la structure idéale d’une forêt
riveraine associe toutes les strates de vé-
gétation : herbacée, arbustive et arborée.
Quant au bois mort dans l’eau, il peut
avoir des eets stabilisateurs ou déstabili-
sateurs sur le lit selon sa position.
LIT MINEUR ET LIT MAJEUR
Au sein de l’espace riverain, on peut distinguer deux grandes zones :
• le lit mineur, situé entre les deux crêtes de berge, est l’espace occupé par le cours d’eau
en dehors des épisodes d’inondation.
• le lit majeur est l’espace inondé épisodiquement par le cours d’eau. Cet espace a parfois
été fortement modifié par l’Homme et ne correspond pas toujours au lit majeur naturel.
L’enracinement des arbres de la ripisylve forme une armature pour les berges (à
gauche). À l’inverse, des arbres non adaptés (épicéas ou peupliers hybrides) peuvent
déstabiliser les berges lorsqu’ils sont en surplomb du cours d’eau (à droite).
DÉFINITIONS JURIDIQUES
(telles que reprises à l’article D.2 du Code de l’Eau wallon)
Cours d’eau : surface du territoire qui est occupée par des eaux naturelles s’écoulant de
façon continue ou intermittente dans le lit mineur, à l’exclusion des fossés d’écoulement
des eaux de ruissellement ou de drainage.
Lit mineur : surface du territoire, artificialisée ou non, occupée par les plus hautes eaux
d’un cours d’eau avant débordement, comprenant le chenal ordinaire d’écoulement et les
berges jusqu’à la crête de berge.
Berge : talus situé de part et d’autre du cours d’eau, limité vers l’intérieur des terres par la
crête de berge.
Crête de berge : ligne reliant les points au-delà desquels les eaux débordent en dehors du
lit mineur à l’occasion des crues.
Ripisylve : toute formation végétale ligneuse et indigène qui croît au bord d’un cours d’eau
en zone d’aléa d’inondation élevé.
Remarque : cette définition de la ripisylve, plus restrictive que la définition écologique pré-
sentée ci-avant, vise à recouvrir au mieux la définition de l’habitat Natura 2000 prioritaire
91E0 « Forêts alluviales » donnée dans le Cahier d’habitats Natura 2000 ; cette dernière
précise notamment que ces formations sont installées sur des alluvions récentes et sont
régulièrement inondées. Cette régularité de crue correspond à la zone d’aléa d’inondation
élevée.
8
.. LUTTE CONTRE LES INONDATIONS
La végétation et le bois mort dans le lit
mineur augmentent les forces de friction
et encombrent le cours d’eau. Ils favo-
risent ainsi localement les débordements
et le stockage d’eau. La diversification des
écoulements et la dynamique des berges
induites par le bois mort sont également
favorables à la création d’annexes hydrau-
liques. Une forêt riveraine luxuriante dans
une zone où les inondations sont peu
dommageables aux activités humaines
constitue donc une zone de retenue : elle
diminue le débit maximum et la vitesse
de montée des eaux dans les zones sen-
sibles situées en aval.
.. PROTECTION DE LA QUALITÉ
DE L’EAU
La forêt riveraine contribue à préserver
une eau de qualité satisfaisante pour les
écosystèmes et les usages humains :
• les arbres aux racines profondes ab-
sorbent les polluants qui transitent vers
la nappe, en particulier les nitrates ;
• la forêt riveraine agit également
comme un piège à sédiments en prove-
nance des versants. En filtrant l’arrivée
des sédiments dans le cours d’eau, elle
limite l’arrivée de polluants stockés
au sein desdits sédiments ainsi que le
colmatage des fonds de gravier.
En milieu agricole, une bande tampon
boisée ou herbacée de quelques mètres
de large est déjà d’une eicacité démon-
trée pour le piégeage des sédiments et
l’absorption des eluents agricoles.
La végétation riveraine
augmente les forces de friction et
ralentit l’écoulement.
.. BIODIVERSITÉ DES ZONES
RIVERAINES
La position des bandes riveraines à
l’interface du milieu aquatique et du
milieu terrestre leur confère une grande
biodiversité. En eet, les zones riveraines
comptent en leur sein des espèces aqua-
tiques, terrestres ou inféodées à l’inter-
face de ces deux milieux.
Par ailleurs, la dynamique naturelle des
zones riveraines est propice au déve-
loppement d’une mosaïque d’habitats,
comme les bancs alluviaux fraîchement
déposés, les mégaphorbiaies, les forêts
alluviales. Ces nombreux habitats abritent
une grande diversité d’espèces et de
communautés animales et végétales. En
particulier, les ripisylves sont des habitats
prioritaires Natura 2000 (91E0* : Forêts
alluviales) et doivent être protégées, y
compris lorsqu’elles sont réduites à un
cordon (voir section 3.3.5 « Natura 2000»).
Le caractère inondable d’une forêt riveraine intensifie ses fonctions d’épuration de l’eau :
l’engorgement temporaire active le processus de dénitrification, où les nitrates sont transfor-
més en diazote. Ainsi, la restauration du régime hydrologique propre des zones inondables
est bénéfique à la qualité de l’eau à l’échelle du bassin versant.
Bansept A. (2013). Eau et forêt.
Deuxième partie: l’influence des arbres
sur la qualité des eaux. Revue Forestière
Française, 65(3), 207-220.
INTRODUCTION | 11
Grâce à leur structure en réseau, les bandes riveraines participent au
maillage écologique en reliant des sites de grande biodiversité. Cette fonc-
tion est cruciale dans les paysages fragmentés, comme en zone agricole.
De nombreux groupes biologiques sont présents au sein des ripisylves. En haut à droite :
le petit mars changeant (Apatura ilia) est un papillon qui fréquente les boisements clairs
et qui utilise les saules arbustifs (en haut à gauche) pour la ponte. Au milieu à gauche :
beaucoup d’oiseaux utilisent les arbres sénescents, de grande dimension ou présentant des
cavités pour nicher. Au milieu à droite : le couvert léger des arbres de la ripisylve permet le
développement d’une flore herbacée diversifiée comprenant des espèces typiques comme la
dorine à feuilles alternes (Chrysosplenium alternifolium, en bas à gauche) ou la benoîte des
ruisseaux (Geum rivale, en bas à droite).
12
.. PRODUCTIVITÉ ET DIVERSITÉ
DE L’ÉCOSYSTÈME AQUATIQUE
La présence de débris ligneux, de racines,
d’arbres sous-cavés, de buissons à
branches basses et de végétaux aqua-
tiques sont favorables à la productivité et
à la diversité de la faune aquatique, tant
invertébrée que piscicole. Ces éléments
contribuent à la diversité de faciès et
assurent la disponibilité en micro-habi-
tats pour la reproduction, l’alimentation
ou l’abri. Ils sont cruciaux pour les cours
d’eau à fond sableux ou graveleux où, en
l’absence de blocs rocheux, ils sont les
seuls à assurer ce rôle de structuration.
Par ailleurs, les retombées de la canopée
(feuilles, insectes, déjections, etc.) ali-
mentent la faune piscicole, particulière-
ment dans le cours supérieur des rivières.
.. ATTRAIT PAYSAGER
En soulignant le cours d’eau dans les
paysages ouverts, la végétation rivulaire
ore une structuration du paysage qui est
appréciée.
Dupont E. (1998). Entretenir les cours
d’eau et l’habitat des poissons. SPW,
DCENN, 136p.
À gauche : La truite utilise les zones plus profondes en amont et en aval des embâcles
comme poste d’aût ou encore comme zone refuge. À droite : L’aouillement des berges
fixées par les arbres de la ripisylve (sous-cavage) entraîne la formation de sous-berges, voire
des cavités inondées qui sont notamment utilisées par la truite comme abri.
INTRODUCTION | 13
La végétation aquatique est un support pour de nombreux invertébrés et peut être
utilisée comme abri ou encore comme substrat de ponte par les poissons. Néanmoins, son
développement excessif est néfaste à l’équilibre biochimique des cours d’eau (eutrophisation
et asphyxie). L’alternance d’ombre et de lumière permet l’installation et le développement
équilibré de la végétation aquatique.
Les cordons feuillus diversifiés en termes
de composition spécifique et de structure
(plusieurs strates) sont recherchés pour la
dimension verticale qu’ils donnent au cours
d’eau et parce qu’ils fournissent un écran
semi-perméable (en haut). À l’inverse, les
formations denses à une seule strate (en
bas), les coupes rases et l’encombrement
du lit par la végétation ou le bois ne sont
généralement pas appréciés d’un point de
vue paysager.
LE CONTEXTE
WALLON
CONTEXTE GÉOGRAPHIQUE
LES FORÊTS RIVERAINES
DE WALLONIE
CONTEXTE ADMINISTRATIF
En Wallonie, on estime que les trois
quarts du linéaire des cours d’eau
sont bordés de forêts riveraines,
parfois réduites à quelques arbres
épars1. Ces forêts riveraines, dont
la gestion relève de plusieurs
gestionnaires et de plusieurs cadres
juridiques, voient leur importance
explicitement reconnue dans la
nouvelle législation relative aux
cours d’eau.
16
. CONTEXTE
GÉOGRAPHIQUE
La Wallonie peut être divisée en 5 régions
naturelles qui dièrent par leurs caracté-
ristiques physiques et d’occupation du sol
(figure 1). Du nord au sud, on distingue :
• La région limoneuse, région la plus
atlantique et au climat le plus doux
de Wallonie (9°C en moyenne), est
un bas-plateau couvert d’une épaisse
couche de limon. Elle accueille une
population dense, des activités indus-
trielles et agricoles intensives. Le taux
de boisement y est de seulement 7%.
Les cours d’eau sont lents, souvent
artificialisés.
• Le Condroz est un plateau au relief
plus marqué, formé d’une alternance
de roches calcaires et psammitiques
parfois couvertes de limon. Les forêts,
riches en feuillus précieux, occupent
25% du territoire. On lui attribue le sil-
lon sambro-mosan fortement urbanisé.
• La Fagne-Famenne est une large
dépression au sol argilo-schisteux,
imperméable et peu profond, qui
induit un régime hydrique irrégulier,
dit « alternatif ». Elle est bordée au sud
d’une bande calcaire, la Calestienne.
Les herbages et la forêt dominent (taux
de boisement de 42%, avec de nom-
breuses chênaies-charmaies).
• L’ Ardenne est un vieux massif hercy-
nien érodé culminant à près de 700m
d’altitude. Le relief marqué, le climat
submontagnard (température moyenne
de 6 à 7,5°C, précipitations de 1000
à 1400mm) et les sols oligotrophes
induisent des cours d’eau acides au
régime torrentiel. Elle est dominée
par des forêts d’épicéa, de hêtre et de
chêne (taux de boisement de 50%) et
des herbages.
• La Lorraine, au climat le plus continen-
tal, présente des sols de nature variable
mais globalement fertiles pour la forêt.
Les forêts sont principalement feuillues
et occupent 42% du territoire. Les
grands cours d’eau s’écoulent dans des
plaines argileuses.
Les cours d’eau wallons appartiennent
aux districts internationaux de la Meuse,
de l’Escaut, du Rhin et de la Seine (fi-
gure2). En Wallonie, le bassin de l’Es-
caut concerne exclusivement la région
limoneuse.
Figure 1. Régions naturelles de Wallonie.
Cours d’eau non navigables
de catégorie 1
Cours d’eau navigables
Région naturelle
Fagne-Famenne-Calestienne
Ardenne
Lorraine belge
0102030 40 km
Région limoneuse
Condroz
Cours d’eau non navigables
de catégorie 1
Cours d’eau navigables
Région naturelle
Fagne-Famenne-Calestienne
Ardenne
Lorraine belge
0102030 40 km
Région limoneuse
Condroz
Cours d’eau non navigables
de catégorie 1
Cours d’eau navigables
Région naturelle
Fagne-Famenne-Calestienne
Ardenne
Lorraine belge
0102030 40 km
Région limoneuse
Condroz
Figure 2. Sous-bassins hydrographiques de Wallonie.
District international
Rhin
Seine
Escaut
Meuse
0102030 40 km
Cours d’eau non navigables
de catégorie 1
Cours d’eau navigables
ESCAUT-LYS
ESCAUT-LYS DENDRE SENNE
HAINE
DYLE-GETTE
MEUSE
AMONT
MEUSE AVAL
MEUSE AVAL
AMBLÈVE
OURTHE
LESSE
SEMOIS-CHIERS
MOSELLE
MOSELLE
VESDRE
OISE
SAMBRE
District international
Rhin
Seine
Escaut
Meuse
0102030 40 km
Cours d’eau non navigables
de catégorie 1
Cours d’eau navigables
ESCAUT-LYS
ESCAUT-LYS DENDRE SENNE
HAINE
DYLE-GETTE
MEUSE
AMONT
MEUSE AVAL
MEUSE AVAL
AMBLÈVE
OURTHE
LESSE
SEMOIS-CHIERS
MOSELLE
MOSELLE
VESDRE
OISE
SAMBRE
District international
Rhin
Seine
Escaut
Meuse
0102030 40 km
Cours d’eau non navigables
de catégorie 1
Cours d’eau navigables
ESCAUT-LYS
ESCAUT-LYS DENDRE SENNE
HAINE
DYLE-GETTE
MEUSE
AMONT
MEUSE AVAL
MEUSE AVAL
AMBLÈVE
OURTHE
LESSE
SEMOIS-CHIERS
MOSELLE
MOSELLE
VESDRE
OISE
SAMBRE
LE CONTEXTE WALLON | 19
Figure 3. Occupation des rives selon la dimension du cours d’eau2.
Largeur du cours d’eau
Proportion (types)
0%
20%
40%
60%
80%
100%
< 5 m5 - 25
m>
25 m
Forêts (excepté cordons rivulaires) Prairies
Cultures Milieux urbanisés
Les rives des cours d’eau wallons ont un
caractère relativement naturel : elles sont
majoritairement occupées par des prai-
ries et des forêts (figure 3). Néanmoins,
les plus gros cours d’eau s’écoulent
souvent dans des milieux urbanisés, où
se concentrent les enjeux socio-écono-
miques (inondations et usages humains)2.
L’ÉTUDE DES FORÊTS RIVERAINES DE WALLONIE
Plusieurs projets de description et de suivi de l’ensemble des cours d’eau wallons ont été
menés ces dernières années.
Un inventaire des bandes riveraines a été mené en 2005. Des informations relatives aux
cours d’eau et aux berges, à la forêt riveraine ou encore à l’occupation des rives ont été rele-
vées sur plus de mille points d’échantillonnage1, 2.
Les projets plus récents utilisent la télédétection pour décrire l’ensemble des cours d’eau
wallons à l’aide d’images aériennes et satellitaires3.
20
Région naturelle
Fagne-Famenne-Calestienne
Ardenne
Lorraine belge
Sureaux (Sambucus)
Frêne (Fraxinus)
Aulne (Alnus)
Érables (Acer)
Saules (Salix)
Aubépines (Crataegus)
Épicéa (Picea)
Région limoneuse
Condroz
Figure 4. Genres ligneux les plus représentés selon la région naturelle1.
. LES FORÊTS RIVERAINES
DE WALLONIE
Les arbres les plus fréquemment rencon-
trés le long des cours d’eau appartiennent
aux genres typiquement alluviaux : aulnes,
saules, érables, frênes. Toutefois, la com-
position des forêts riveraines varie selon la
région naturelle et l’occupation des rives
(figures 4 et 5). Ainsi, l’épicéa, le bouleau, le
sorbier, le hêtre et le saule à oreillettes sont
surtout rencontrés en Ardenne. Dans les
cordons rivulaires de la région limoneuse,
ce sont le sureau, les saules (saules blancs
et saule marsault) et le frêne qui sont les
plus fréquents. L’aulne, essence majeure
des forêts riveraines wallonnes, n’y appa-
rait qu’en quatrième position1.
Les forêts riveraines de la région li-
moneuse (en particulier à l’ouest) et du
plateau ardennais sont moins dévelop-
pées et plus clairsemées que celles des
zones plus bocagères ou forestières des
bas-plateaux mosans et des piedmonts
de l’Ardenne3 (figure 6).
Milieu agricole
Milieu urbanisé
Milieu forestier
Milieu ouvert non exploit
é
Aulnes
Saules
Érables
Frêne
Noisetier
Aubépines
Épicéa
Sureaux
Chênes
Charme
Bouleaux
Hêtre
Prunus sp.
Sorbiers
Peupliers
Viorne
Rosiers
L
onicera sp.
Groseillers
0%10%20%30%40%50%60%
Figure 5. Fréquence des principaux genres ligneux de la forêt riveraine selon l’occupa-
tion du sol sur la rive1.
Claessens H., Rondeux J., De-
bruxelles N., Burton C., Lejeune P.
(2009). Le suivi des bandes riveraines des
cours d’eau de Wallonie. Revue Forestière
Française 61(6) : 595-610.
Debruxelles N., Claessens H., Du-
faysE., Rondeux J. (2008). Le monitoring
des cours d’eau : une vitrine du réseau
hydrographique wallon. Parcs & Réserves
63(4) : 12-18.
Michez A., Lejeune P., Claessens H.,
Piégay H., Desteucq O. (2018). La télédé-
tection 3D pour le monitoring régional
des cours d’eau et des bandes riveraines
associées en Wallonie (Belgique).
Avancées, apports et perspectives de
la télédétection pour la caractérisation
physique des corridors fluviaux - Actes de
la journée technique, 18-27.
7,9
8-10
10-12
12-14
> 14 m
20-30
%
30-40
%
40-50
%
50-60
%
> 60
%
025 50 km
Hau
teur moyenne de la ripisylve (mètre)
Haut
eur moyenne de la forêt riveraine (située
j
usqu'à 12 mètres de part et d'autre du cours
d'
eau) estimée en 2014 par télédétection.
Continuit
é de la ripisylve
Continui
té longitudinale de l’occupation des berges
pa
r une forêt riveraine. Une valeur de 10 % signifie que
10 % de la longueur du
cours d’eau présente des
ber
ges recouvertes par une forêt riveraine.
Figure 6. Hauteur et continuité des ripisylves wallonnes par bassin versant.
LE CONTEXTE WALLON | 23
. CONTEXTE
ADMINISTRATIF
.. RÉPARTITION DES
RESPONSABILITÉS
En Wallonie, l’importance du cours d’eau
détermine qui est gestionnaire (figure 7).
En vertu du Code de l’Eau, le lit mineur
des cours d’eau non navigables est pré-
sumé propriété du gestionnaire et relève
du domaine public. Au-delà des crêtes de
berge vers l’intérieur des terres (figures8
et 9), le riverain conserve ses droits de
propriété, mais reste soumis à certaines
obligations :
• il doit livrer passage aux agents de
l’administration ou aux autres per-
sonnes ou engins chargés de travaux ou
d’études ;
• il doit permettre le dépôt des matières
enlevées du lit et de l’outillage néces-
saire aux travaux sur une bande de 6 m
à compter de la crête de berge.
Figure 7. Répartition des responsabilités pour la gestion des cours d’eau.
C
atégorie de
c
ours d’eau
Liné
aire de
c
ours d’eau
Limit
e
adminis
trative
supérieur
e
Ges
tionnaire Propriétaire
riverain
Commune
(parfois sous
tutelle
provinciale)
Province Région (DGO3)
DCENN
Région (DGO2)
Voies
hydrauliques
Bassin versant :
100 ha
Limite
ancienne
commune
Bassin versant :
5 000 ha
Classement
par le
Gouvernement
11 915 km
répertoriés
4 367 km 5 806 km 1 858 km 890 km
Cours d’eau
non-classés
Cours d’eau non-navigables Voies
hydrauliques
Catégorie 3 Catégorie 2 Catégorie 1
Figure 8. Définition des crêtes de berges et du lit mineur.
Rive :
responsabilité
du riverain
Crête de
berge Crête de
berge
Lit mineur :
responsabilité
du gestionnaire
Figure 9. La délimitation correcte de la crête de berge est essentielle car celle-ci sépare
le lit mineur des rives, qui sont sous la responsabilité respectivement du gestionnaire de
cours d’eau et du propriétaire riverain.
La crête de berge est définie juridiquement comme la « ligne reliant les points au-delà
desquels les eaux débordent en dehors du lit mineur à l’occasion des crues ». En pra-
tique, elle correspond à la rupture de pente. Lorsqu’une des deux crêtes de berges n’est
pas identifiable (cas des cours d’eau s’écoulant à flanc de falaise), elle est définie par la
projection horizontale de la crête de berge opposée. La figure ci-dessous représente la
délimitation de la crête de berge dans quelques cas de figure courants.
Lit mineur
Lit majeur
Lit mineur
Lit majeur
Lit majeur
Lit mineur
Lit mineur
Lit majeur
Lit mineur
Lit majeur
Crêtes de berge
Niveau moyen d’eau
Niveau d’eau maximum
(en période d’inondation)
LE CONTEXTE WALLON | 25
.. LA RÉVISION DU CADRE
JURIDIQUE RELATIF
AUX COURS D’EAU
Le cadre juridique de la gestion des cours
d’eau s’est longtemps cantonné à des
aspects essentiellement hydrauliques,
au détriment d’autres considérations,
notamment écologiques. La reconnais-
sance des diérentes fonctions des cours
d’eau, parallèlement à la transposition
dans le droit wallon des directives 92/43/
CEE, 2000/60/CE et 2007/60/CE ont justifié
la révision de ce cadre juridique, pratique-
ment inchangé depuis 1967.
Le Code de l’Eau, dans sa version révisée
suite à l’entrée en vigueur, le 15 décembre
2018, du décret du 4 octobre 2018, fixe
comme objectif général une gestion
intégrée, équilibrée et durable des cours
d’eau. Une telle gestion vise à concilier les
diérents enjeux liés aux cours d’eau :
• hydraulique : conserver le libre écou-
lement des eaux et gérer les risques
d’inondation ;
• écologique : préserver ou améliorer
la qualité hydromorphologique (voir
encart) des cours d’eau ;
• socio-économique : permettre, le cas
échéant, la navigation, la production
d’énergie, l’alimentation en eau, les
activités touristiques ;
• socio-culturel : tenir compte notam-
ment de la préservation du patrimoine,
de l’intérêt paysager et des activités
récréatives (pêche, baignade, sports
nautiques, navigation de plaisance…).
Les actes de gestion de la ripisylve re-
lèvent principalement de l’enjeu écolo-
gique, surtout s’il s’agit de la ripisylve
visée par la définition du Code de l’Eau,
qui cible implicitement les forêts allu-
viales considérées comme habitat Natura
2000 prioritaire 91E0. Ces actes de gestion
peuvent également relever de l’enjeu
hydraulique lorsqu’il s’agit clairement de
gestion d’embâcles.
LES DIRECTIVES EUROPÉENNES LIÉES À LA GESTION
DES EAUX DE SURFACE
La directive 2000/60/CE, dite directive cadre sur l’eau (ou encore DCE), vise notamment la
non-dégradation ou l’amélioration de la qualité écologique des eaux de surface, avec une
obligation de résultat : l’atteinte du bon état (ou du bon potentiel) écologique des masses
d’eau. Elle impose la rédaction de « Plans de Gestion des Districts Hydrographiques »
(PGDH).
La directive 2007/60/CE, dite directive inondation, impose un cadre pour l’évaluation et la
gestion des inondations, avec une obligation de moyens. Les mesures sont reprises dans
les « Plans de Gestion des Risques d’Inondation » (PGRI).
La directive 92/43/CEE, dite directive habitats, vise à conserver les habitats naturels et les
espèces associées par la mise en œuvre d’un réseau de sites protégés, le réseau Natura 2000.
L’article D.33/2 du Code de l’Eau fixe des
objectifs de gestion qui concernent spéci-
fiquement la ripisylve (telle que définie à
l’article D.2 du Code de l’Eau) : «La Région
et les autres autorités publiques, chacune
dans le cadre de ses compétences et en
coordination entre elles, visent comme
objectifs la préservation, l’amélioration
ou la restauration de la ripisylve, ainsi que
la continuité écologique des cours d’eau
qui permet le bon fonctionnement des
écosystèmes, et la lutte contre les espèces
invasives.»
.. LES PARIS
La gestion intégrée, équilibrée et durable
des cours d’eau est formalisée dans la
méthodologie d’élaboration des« Pro-
grammes d’Actions sur les Rivières par
une approche Intégrée et Sectorisée »
(PARIS). Un outil d’aide à la décision et à
la planification (la plateforme PARIS, voir
encart) est mis à disposition des gestion-
naires de cours d’eau publics afin de faci-
liter l’application de cette méthodologie.
Les PARIS s’appuient sur la notion de
secteur. Un secteur est une portion de
cours d’eau physiquement homogène qui
constitue l’unité de planification fonda-
mentale pour les PARIS. Des orientations
de gestion sur le moyen et long terme y
sont définies selon les enjeux locaux qui
s’y retrouvent. Concrètement, les cours
d’eau sont divisés en secteurs de gestion
de quelques kilomètres de long selon
leurs caractéristiques physiques (terri-
toires écologiques, largeur du lit majeur),
les activités humaines qui s’y tiennent
(occupation du sol dans le lit majeur)
et leurs limites administratives (masses
d’eau définies pour la DCE). Chaque sec-
teur se voit attribuer un ou plusieurs en-
jeux prioritaires, des objectifs de gestion
et un plan d’interventions à 6 ans.
Selon la démarche des PARIS, la gestion
doit être adaptée au contexte local tout
en tenant compte des enjeux à l’échelle
du réseau hydrographique. Par exemple,
en laissant les cours d’eau déborder
dans les zones forestières en amont et
en assurant l’écoulement dans les zones
habitées en aval, on minimise le coût
des inondations (objectif des PGRI), on
améliore la qualité de l’eau et la qualité
hydromorphologique des cours d’eau
(objectif des PGDH).
QU’EST-CE QUE LA QUALITÉ HYDROMORPHOLOGIQUE
D’UN COURS D’EAU ?
Il s’agit de l’intégrité de la morphologie physique et du régime hydrologique des cours
d’eau. La qualité hydromorphologique est évaluée selon plusieurs composantes :
• la naturalité des berges et de la végétation ;
• la diversité des écoulements ;
• la continuité latérale (connexion des lits mineur et majeur, annexes hydrauliques) ;
• la continuité longitudinale (déplacement possible des poissons et des sédiments entre
l’amont et l’aval) ;
• la continuité verticale (transferts entre les cours d’eau et la nappe souterraine).
Figure 10. Définiton des PARIS
Figure 11. Méthodologie d’élaboration des PARIS.
Les Programmes d’Actions sur les Rivières par une approche Intégrée et Sectorisée
Planific
ation des actions
p
ar période de 6 ans,
en phase avec les PGDH
et les PGRI.
Centré sur
le lit mineur. Intégration des :
• enjeux de la gestion,
• politiques et règlementations,
• catégories et gestionnaires
de cours d’eau.
Découpage des cours d’eau en ± 6 000
secteurs (1 secteur = 1 unité de gestion).
Adaptation de la gestion au contexte
local de chaque secteur.
1. Sectorisation
Découpage du linéaire en
secteurs homogènes.
2. État des lieux
Inventaire cartographique
des éléments pouvant
influencer la gestion.
3. Hiérarchisation des enjeux
Quatre enjeux priorisés sur
chaque secteur : inondations,
biodiversité, socio-écono-
mique, socio-culturel.
4. Définition d’objectifs
de gestion
Exemples : assurer
l’écoulement de l’eau,
intégrer la pratique de la
pêche.
5. Programme de mesures
Planification dans l’espace
(par secteur) et dans le temps
(par année, au sein d’une
période de 6 ans) des
mesures à mettre en œuvre
pour atteindre les objectifs
de gestion.
Figure 12. Articulation des PARIS avec les PGDH et les PGRI
Cible des
PGDH : la qualité de l’eau (cycles
na
turel et anthropique), à l’échelle d’un
ba
ssin versant.
Code de l’
eau, art. D7 à D32 et D56 à D445, 2005.
Pilote : SPW-DGO3-DES
Cible des
PARIS : le lit mineur de cours d’eau
et sa qualité hydromorphologique.
Code de l’
eau, art. D33 à D52/1, 2018.
Pilote : SPW-DGO3-DCEN
N
Cible des
PGRI : l’eau en tant que cause
d’inonda
tion, à l’échelle du lit majeur du
co
urs d’eau et de son un bassin versant.
Code de l’
eau, art. D53/1 à D54, 2010.
Pilote : G
TI/DCENN
Agriculture
Collectivités et ménages
Zones protégées
Prélèvements, crues,
étiages, démergement
Assainissement des eaux usées
Industries
Pollutions accidentelles
et historiques
Activités récréatives
Plans de Gestion DCE
de District Hydrographique
(PGDH)
Hydromorphologie
Programmes
Actions Rivières
(PARIS)
2 - Protection
Plans de Gestion
des Risques d’ Inondation
(PGRI)
1 - Prévention
4 – Réparation et analyse post-crise
3 – Préparation
PLATEFORME PARIS EN LIGNE paris.spw.wallonie.be
Une plateforme informatique est disponible en ligne pour l’élaboration, l’encodage et le
suivi des PARIS par les gestionnaires de cours d’eau.
Afin d’assister la définition des enjeux et objectifs propres à chaque secteur, des informa-
tions relatives aux quatre enjeux y sont synthétisées à l’échelle du secteur. Ces informations
se rapportent par exemple à la présence sur le secteur de sites Natura 2000, de zones de
baignade, d’obstacles à la circulation des poissons, d’ouvrages de franchissement. D’autres
indicateurs seront progressivement intégrés à la plateforme, suite au développement de
nouvelles technologies, à l’acquisition de nouvelles données (ex : données LiDAR) et/ou au
calcul de nouveaux paramètres synthétiques pertinents pour la gestion des cours d’eau.
Les PARIS sont élaborés conjointement avec tous les gestionnaires concernés d’un
sous-bassin hydrographique (voir 2.1 « contexte géographique »). L’utilisation d’une
démarche et d’un outil partagés par l’ensemble des gestionnaires pour la planification doit
permettre de dépasser les découpages administratifs qui sont néfastes à la gestion intégrée
des cours d’eau. Dans un souci de transparence, les PARIS sont rendus publics et dispo-
nibles en ligne une fois qu’ils ont été validés.
Les projets de travaux à planifier sur un secteur sont constitués d’une ou plusieurs mesures
de base reprises dans un référentiel standardisé de mesures. Le tableau suivant établit
un parallèle entre, d’une part, quelques actes de gestion de la ripisylve et d’autre part,
les mesures standardisées, plus générales, auxquelles ils se rattachent. L’acte de gestion
contextualisé peut être précisé dans le nom que le gestionnaire attribue à son projet sur un
secteur donné, ou dans le descriptif détaillé du projet planifié.
Acte de gestion Mesure standardisée PARIS
Abattage sélectif des arbres menaçant de déstabi-
liser les berges Entretien superficiel du lit mineur
Enlèvement d’embâcles Entretien superficiel du lit mineur
Mise en place de pièges à embâcles Mise en place de pièges à embâcles
Abattage des arbres non adaptés (ex : épicéas,
peupliers cultivés) Gestion de la ripisylve
Diversification d’une ripisylve dense par recépage
sélectif, mise en lumière du cours d’eau Gestion de la ripisylve
Plantation ou régénération d’une ripisylve Création d’une ripisylve d’essences
indigènes
Surveillance la ripisylve et gestion réactive (en cas
de problèmes survenant en cours de PARIS) Visite et surveillance
Non-intervention Visite et surveillance
RECOMMANDATIONS
DE GESTION
RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES
TECHNIQUES DE GESTION
ADAPTATION AU CONTEXTE LOCAL
GESTION DES ARBRES MALADES
Les forêts riveraines se trouvent
au carrefour de nombreux enjeux
parfois contradictoires. Les
recommandations de gestion
proposées dans ce chapitre
se veulent consensuelles, et
visent à concilier ces diérents
enjeux. Néanmoins, les auteurs
sont conscients du caractère
unique de chaque situation : les
recommandations présentées dans
ce chapitre devront être adaptées
dans la pratique.
32
. RECOMMANDATIONS
GÉNÉRALES
.. FAUT-IL GÉRER
LA FORÊT RIVERAINE ?
Les cours d’eau sont des milieux vivants
en perpétuelle évolution. Parfois, cette
évolution naturelle n’est pas compatible
avec les intérêts humains et des actes de
gestions doivent être posés.
Néanmoins, il n’est pas nécessaire
d’« entretenir » systématiquement la
forêt riveraine. Le gestionnaire n’est
pas tenu d’empêcher toute inondation,
toute érosion ou encore tout mouvement
naturel du lit en tout point du réseau
hydrographique.
Dans certains cas, les aménagements
humains ont profondément altéré les
dynamiques naturelles de l’écosystème
(par exemple la dynamique d’érosion). Il
peut s’en suivre une homogénéisation des
bandes riveraines. Dans ce contexte, les
actes de gestion sont des opportunités de
promouvoir la naturalité des milieux rive-
rains, en rétablissant une certaine diversi-
té en termes d’espèces et de structure.
Une réflexion rigoureuse doit précéder
la décision d’intervention : les moyens
disponibles pour la gestion des cours
d’eau doivent être utilisés dans l’intérêt
général et avec parcimonie. De plus,
la non-intervention est une option de
gestion à part entière prévue au sein de
la nouvelle réglementation. Cette non-in-
tervention peut contribuer à maintenir
une certaine naturalité, ou à atténuer les
crues en aval.
La planification des interventions est
souhaitable afin d’éviter la réalisation de
travaux dispersés et d’optimiser l’alloca-
tion des ressources. Cependant, l’élabo-
ration de plans n’exclut pas la possibilité
de mettre en œuvre des actions urgentes,
par exemple à la suite de tempêtes ou
d’inondations.
.. ENTRETIEN PAR PETITES TROUÉES
L’entretien de la forêt riveraine s’appuie
essentiellement sur le recépage. Celui-ci
permet de rajeunir la forêt riveraine et
d’alléger l’appareil aérien des arbres
au profit de l’appareil racinaire, tout en
pérennisant les souches.
Nous recommandons généralement un
entretien par petites trouées.
... SÉLECTION DES ARBRES
• Couper préférentiellement les es-
pèces non adaptées au milieu ou non
indigènes, les arbres qui menacent de
déstabiliser la berge, les arbres respon-
sables d’une érosion non souhaitée.
• Diversifier la forêt riveraine dans les
strates, âges et espèces : couper préfé-
rentiellement les individus de l’espèce
ou de la strate majoritaire, conserver
préférentiellement les individus de
l’espèce ou de la strate minoritaire.
• Maintenir des arbres d’intérêt bio-
logique (voir section 3.1.3 « Arbres
d’intérêt biologique ») et du bois mort
(voir section 3.1.4 « Embâcles et bois
mort dans l’eau »).
... CONSTITUTION DE TROUÉES
La taille et le positionnement des trouées
doivent être réfléchis pour conserver ou
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 33
Les coupes rases sur de grands linéaires (en haut à gauche) provoquent un apport brutal
de lumière et de sédiments au cours d’eau, en plus de la perte d’habitat immédiate liée au
retrait de tous les arbres. Néanmoins, la gestion « arbre par arbre » (en haut à droite) ne per-
met pas la régénération des souches, qui ont besoin d’être mises en lumière (voir fiche 3.2.1
« recépage »). Les interventions par petites trouées (en bas) ou l’abattage d’une seule rive à la
fois assurent la continuité du couvert tout en permettant la régénération des souches.
34
favoriser une alternance d’ombre et de
lumière :
• éviter de dépasser 20 mètres de long
pour une trouée sur la plupart des
cours d’eau wallons ;
• maintenir entre deux trouées une
ripisylve continue d’au moins deux fois
la longueur d’une trouée ;
• en cas d’intervention sur les deux
berges, disposer les trouées en quin-
conce plutôt qu’en vis-à-vis ;
• adapter la taille et le positionnement
des trouées au contexte local :
- un cours d’eau large ou d’orientation
nord-sud est moins sensible à la
diminution du couvert ;
- un cours d’eau encaissé ou dont les
rives sont occupées par une forêt
peut être mis en lumière plus vigou-
reusement ;
- le prélèvement peut être plus impor-
tant lorsque la densité initiale de la
végétation est importante ;
- d’autres facteurs peuvent être pris
en compte comme l’existence d’un
enjeu écologique ou paysager parti-
culier, ou la diiculté d’accès au site.
L’intervention doit être précédée d’un état des lieux sur le tronçon à
entretenir et d’un marquage des groupes d’arbres à recéper ensemble.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 35
.. ARBRES D’INTÉRÊT BIOLOGIQUE
Les arbres d’intérêt biologique sont des
arbres vivants ou morts développant
des micro-habitats comme des cavités,
des coulées de sève, des décollements
d’écorce, des épiphytes. Ils abritent un
cortège d’organismes spécifiques dont
de nombreux insectes, champignons
et oiseaux. L’abondance et la diversité
des micro-habitats augmentent avec la
dimension de l’arbre.
Dans les forêts de production, les arbres
sont exploités trop tôt pour fournir des
micro-habitats : les espèces qui y sont
liées sont gravement menacées. Les
forêts riveraines, y compris les cordons
rivulaires en milieu agricole, sont plus
riches en arbres-habitats que les autres
forêts : les arbres atteignent rapidement
des dimensions importantes et sont sou-
mis aux crues, aux maladies et à l’activité
du castor.
D’autres arbres développent des mi-
cro-habitats en relation directe avec
le cours d’eau. Il s’agit notamment des
arbres sous-cavés, des arbres aux racines
apparentes et des buissons en surplomb
du cours d’eau, qui orent des abris
hydrauliques à la faune aquatique (voir
section 1.2.5 « biodiversité et productivité
de l’écosystème aquatique »).
À gauche : ces chênes dépérissants
orent un site attractif de nidification pour
les rapaces. À droite : le lierre et le gui
sont utilisés par de nombreuses espèces
d’oiseaux ou de mammifères comme source
de nourriture.
Branquart E., Liégeois S. (2005).
Normes de gestion pour favoriser la bio-
diversité dans les bois soumis au régime
forestier. Complément à la circulaire
2619 du 22 septembre 1997 relative aux
aménagements dans les bois soumis au
régime forestier. SPW, DGARNE, 86p.
36
En haut à gauche : les saules atteignent rapidement des dimensions importantes et dé-
veloppent de nombreuses cavités et autres décollements d’écorce. La taille en têtard permet
de les faire vieillir tout en limitant les risques de chute. En haut à droite : les arbres morts sur
pied exposés au soleil sont colonisés par de nombreux insectes xylophages. En bas : ce buis-
son en surplomb du cours d’eau a été conservé lors d’un entretien. Il ore des caches pour la
faune aquatique, des ressources alimentaires et maintient l’ombrage sur le cours d’eau.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 37
.. EMBÂCLES ET BOIS MORT
DANS L’EAU
Le bois mort dans les cours d’eau est
parfois une menace :
• l’encombrement du gabarit et le ralen-
tissement de l’écoulement favorisent
les débordements locaux lors d’inonda-
tions de faible intensité ;
• lors de crues importantes, les embâcles
peuvent être remobilisés et s’accumu-
ler au droit des ouvrages et y provoquer
des dégâts ;
• les embâcles peuvent concentrer
l’écoulement dans une section réduite
et créer une encoche d’érosion ;
• les embâcles peuvent rendre la navi-
gation dangereuse (voir section 3.3.7
«Cours d’eau navigués »).
Le bois mort dans l’eau est aussi une
opportunité :
• les débordements liés à la présence
d’embâcles sont souhaitables dans
les zones peu sensibles pour limiter la
En haut : le bois qui s’accumule au droit des ouvrages doit être systématiquement retiré :
il aggrave le risque d’inondation et peut provoquer un aouillement des fondations. En bas :
les arbres entravant partiellement le lit mineur peuvent générer des encoches d’érosion
préjudiciables en milieu agricole ou urbain.
38
violence des crues en aval (voir section
1.2.2 « lutte contre les inondations ») ;
• le bois mort peut stabiliser le lit mineur
lorsqu’il est ancré dans le fond, dans
l’extrados d’un méandre ou encore en
ralentissant l’écoulement ;
• sa présence est favorable à la faune
aquatique : il est un support pour la
faune benthique, et diversifie les faciès
d’écoulements (voir section 1.2.5 « pro-
ductivité et diversité de l’écosystème
aquatique »).
Figure 13. Clef décisionnelle pour l’enlèvement du bois.
Emb
âcle composé de matériaux non naturels, accumulation d’ordures ?
NON
OUI
NON
OUI
NON
OUI
OUI
Enlever l’embâcle, il incite à utiliser la rivière comme dépotoir.
Zo
ne bâtie ou amont d’ouvrage ?
Enlever l’embâcle pour lutter contre les inondations/érosions
.
Pr
airie intensive ou culture ?
Enlever les embâcles préjudiciables au propriétaire
(érosion ou inondation). Lors des interventions,
conserver les embâcles stables et non problématiques.
Fo
rêt ou prairie à caractère naturel ?
Conserver les embâcles pour la biodiversité
et pour l’atténuation des pics de crue en aval.
Maridet L., Piégay H., Gilard O.,
Thévenet A. (1996). L’embâcle de bois
en rivière: un bienfait écologique? Un
facteur de risques naturels? La Houille
Blanche 5 : 32 37.
L’enlèvement du bois mort doit donc être
réfléchi au cas par cas et ne doit pas être
la règle. La clef décisionnelle présentée à
la figure 13 ci-dessous reprend quelques
éléments de réflexion pour l’enlèvement
du bois.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 39
Les pièces pouvant être considérées comme stables comprennent :
• les pièces ancrées dans les sédiments du lit ou dans les berges ;
• les pièces plus longues que la largeur du cours d’eau ;
• les accumulations composées de telles pièces.
En l’absence d’une érosion ou d’une inondation préjudiciable au propriétaire, il y a tout à
gagner à conserver ces pièces.
Inutile d’enlever des embâcles sur des cours d’eau forestiers constamment approvision-
nés en bois mort ! Sur des cours d’eau larges, le bois peut être mobilisé lors des crues. Pour
éviter le transfert de bois vers l’aval, on peut mettre en place des pièges à bois (voir section
3.2.5 « mise en place de pièges à bois »).
40
.. ACCÈS ET PÉRIODE
D’INTERVENTION
Les interventions doivent être program-
mées de manière à respecter les principes
suivants :
• les sols doivent être portants (à défaut,
les techniques doivent être adaptées) ;
• il ne doit pas y avoir de relargage de
sédiments fins durant les périodes
critiques pour l’ichtyofaune (migration,
frai et incubation des œufs) ;
• les recépages et tailles sont réalisés
hors saison de végétation ;
• l’entretien de la végétation est réalisé
hors de la période de nidification de
l’avifaune.
La figure 14 ci-contre résume les prin-
cipales périodes critiques. Une concer-
tation préalable avec le DNF permet de
choisir la meilleure période pour l’exécu-
tion des travaux.
CIRCULATION DANS LE LIT DU COURS D’EAU
La loi sur la Conservation de la Nature interdit la circulation d’engins sur les berges et dans
le lit des cours d’eau non-navigables, ainsi que sur les cours d’eau navigables non-navigués
(article 58bis).
Toute intervention dans le lit d’un cours d’eau a des conséquences sur la faune et le
milieu naturel. En particulier, des sédiments peuvent être mis en suspension et colmater le
fond du lit :
• lors du passage d’engins (à gauche) ;
• lors de l’enlèvement d’embâcles ;
• lors de la chute d’arbres ou de grosses branches dans le cours d’eau, par l’apport de boues
ou par la déstabilisation du substrat en place (à droite).
Figure 14. Principales périodes crtitiques à prendre en compte lors de la planification de travaux.
Impact des travaux Périodes critiques à éviter
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Sept. Oct. Nov. Déc.
Mise en suspension de sédiments
(y compris lors de l'abattage
d'arbres dans le cours d'eau)
Période de reproduction des poissons dans la zone à ombre*
Période de reproduction des poissons
dans la zone à barbeau*
Période de reproduction des poissons
dans la zone à brême*
Recépage et élagage
*Les diérentes zones piscicoles sont décrites dans la figure 15.
Saison de végétation
Nidification des oiseaux
Période de reproduction des poissons
dans la zone à truite*
42
Les fonds de gravier bien oxygénés (à gauche) accueillent les jeunes stades de la moule
perlière ainsi que de nombreux poissons (truite, chabot, barbeau, ombre) qui y trouvent un
substrat pour le frai. Le colmatage de ces fonds graveleux par les sédiments fins (à droite)
entraîne la mortalité des sujets enfouis par asphyxie.
Outre le choix de la période, le choix des
techniques d’exploitation et l’organisa-
tion du chantier permettent de minimiser
l’impact des interventions sur le milieu.
On peut notamment citer :
• le débardage à cheval, qui permet
notamment de limiter l’impact de la cir-
culation d’engins sur les sols sensibles ;
• l’utilisation d’engins sur chenilles ou
équipés de pneus basse pression ;
• l’abattage dirigé hors du cours d’eau,
qui évite la remobilisation de sédi-
ments lors de la chute des arbres
abattus ;
• la circulation sur lit de branches ;
• la pose d’une buse ou de rondins lors
de la traversée des ruisseaux ;
• un choix judicieux des chemins d’accès.
Figure 15. Comment situer le
contexte piscicole du chantier ?
1. La zone à truite comprend
les ruisseaux rapides, froids
et bien oxygénés, à fond
caillouteux ou graveleux, sans
végétation aquatique. Elle est
dominée par la truite, le cha-
bot et la loche franche.
2. La zone à ombre comprend
les rivières où les rapides al-
ternent avec des zones calmes.
Elle abrite des ombres, des
truites et des cyprins d’eau vive
comme le goujon, le chevaine.
3. La zone à barbeau, encore à
courant rapide, présente des
eaux plus chaudes et une vé-
gétation aquatique plus abon-
dante, un fond localement
mou. Elle est dominée par les
cyprins d’eau vive comme la
vandoise ou le barbeau.
4. La zone à brême rassemble
les cours d’eau lents à fond
mou, peu oxygénés, avec une
végétation aquatique abon-
dante. Elle abrite des brochets,
des perches et de nombreux
cyprins d’eau calme comme la
carpe, la brême ou la tanche.
1
3
2
4
La DCENN tient une cartographie de ces
zones piscicoles.
44
.. ESPÈCES EXOTIQUES
ENVAHISSANTES
Les espèces exotiques envahissantes,
souvent appelées « espèces invasives »,
sont des espèces végétales ou animales
introduites volontairement ou non par
l’Homme en dehors de leur aire d’origine,
dont l’implantation et la propagation
menacent la biodiversité et les services
fournis par les écosystèmes. Elles peuvent
aussi causer d’importantes nuisances so-
cio-économiques ou sanitaires. Les cours
d’eau et leurs marges y sont particulière-
ment sensibles. La gestion des ripisylves
peut avoir un impact sur la dispersion,
l’implantation et la prolifération de ces
espèces.
Premièrement, les travaux forestiers
peuvent contribuer à disperser des pro-
pagules (graines et fragments végétaux)
d’un chantier à l’autre via le matériel et
les personnes, ou d’amont en aval suite
au transfert de ces propagules dans le
cours d’eau. Par exemple, la renouée du
Japon est capable de reformer un indivi-
du à partir d’un fragment de rhizome de
quelques grammes. Ainsi, le débardage
d’arbres ou le passage d’engins à travers
des massifs de renouée contribuent à
la disperser. Par ailleurs, les sols tassés
suite au passage d’engins sont accueil-
lants pour certaines espèces indésirables
comme la balsamine de l’Himalaya.
Les plantes exotiques enva-
hissantes les plus fréquentes le
long des cours d’eau wallons sont
les renouées asiatiques (Fallopia
japonica en haut, F. sachalinensis
et F. x bohemica), la balsamine de
l’Himalaya (Impatiens glandulifera,
en bas à gauche) et la berce du Cau-
case (Heracleum mantegazzianum,
en bas à droite).
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 45
Deuxièmement, la mise en lumière du
cours d’eau ou des peuplements fores-
tiers adjacents peut favoriser la crois-
sance des plantes invasives. Par exemple,
la mise à blanc d’une pessière ou d’une
peupleraie à proximité d’un cours d’eau
déclenche souvent la germination mas-
sive des graines de balsamine de l’Hima-
laya et de berce du Caucase présentes
dans le sol. Lorsqu’elle est possible, une
surveillance des sites mis à blanc peut
permettre de gérer précocement et de
manière adéquate le développement de
ces plantes.
Enfin, les sédiments peuvent contenir des
propagules d’espèces invasives. L’exon-
dation de ces sédiments, notamment lors
de travaux de curage, peut initier leur
développement.
COMMENT INTERVENIR ?
La gestion des plantes exotiques envahissantes ne s’improvise pas. Elle requiert une
réflexion préalable sur l’utilité d’une intervention, l’utilisation de techniques spécifiques et
des eorts sur le long terme.
De manière générale, au plus l’intervention est précoce, au plus elle est eicace. Elle doit
donc se porter en priorité sur les sites peu envahis et pour les plantes dont la présence
n’est pas encore généralisée.
À gauche : colonisation récente d’une berge par la renouée, probablement au
départ du cours d’eau. À droite : Mimulus guttatus est une plante invasive sporadique en
Wallonie mais en expansion. Dans les deux cas, une intervention précoce permettra une
éradication et évitera l’emploi de moyens plus lourds dans le futur.
46
Lorsqu’un nouveau foyer d’invasion est
observé, il est recommandé :
• de signaler son observation sur
biodiversite.wallonie.be, ou à un
référent local (Contrat de rivière, agent
DNF…) qui jugera de l’opportunité
d’intervenir;
• pour une intervention, de suivre
les bonnes pratiques proposées sur
biodiversite.wallonie.be.
La Cellule interdépartementale
Espèces invasives (CiEi) a édité plusieurs
documents qui décrivent les principales
espèces invasives et les méthodes de
lutte adéquates. Ils sont disponibles en
ligne sur le site biodiversite.wallonie.be/
invasives.
Des plans de lutte systématiques sont mis en œuvre pour la berce du Caucase et pour
les plantes aquatiques invasives (ci-dessus Hydrocotyle ranunculoides, l’hydrocotyle fausse
renoncule).
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 47
. TECHNIQUES DE GESTION
.. RECÉPAGE
Les essences de la ripisylve rejettent
facilement de souche. Un bon recépage
permet le recrutement de rejets vigou-
reux qui pérenniseront la souche et les
services qu’elle procure, en particulier
la protection de la berge. Les conditions
d’un bon recépage sont les suivantes :
• Coupe à ras de terre dans le cas d’un
franc-pied, et juste au-dessus de l’in-
sertion des brins dans le cas de cépées.
Les cépées dont les brins s’insèrent à
plus de 50 cm de la surface du sol sont
coupées à une vingtaine de centimètres
du sol ;
• Coupe franche, nette et oblique afin
d’éviter la stagnation d’eau. Il ne faut
pas blesser la souche ou laisser de
lanière d’écorce, cela rendra diicile la
cicatrisation ;
• Coupe hors saison de végétation,
lorsque les réserves nutritives sont
dans les racines, afin d’obtenir des re-
jets vigoureux et de limiter les blessures
à la souche. La période idéale se situe
à la fin de l’hiver (février-mars) pour
éviter les blessures dues au gel ;
• Mise en lumière des souches ;
• Coupe de l’ensemble des brins : les
«tires-sève » limitent la production
de rejets et risquent de diminuer la vita-
lité de la souche. Eventuellement, un
nombre limité de brins pourront être
sélectionnés par la suite.
La coupe peut être eectuée en deux
temps : l’abattage des tiges suivi de la
coupe de finition à ras du sol.
La coupe à ras
de terre (à droite sur
la photo) favorise le
développement de
rejets vigoureux et
bien insérés sur la
souche.
48
.. TAILLE EN TÊTARD
... MISE EN PLACE ET ENTRETIEN
Comme pour les recépages, les tailles
sont eectuées hors sève, lorsque les
réserves de l’arbre se trouvent dans la
tête du têtard :
• Partir d’une tige de 15 à 40 cm de
circonférence ou d’un plançon de saule
de mêmes dimensions, enfoncé à au
moins 50 cm dans le sol. Étêter la tige à
environ deux mètres de haut.
• Dans les premières années, enlever les
branches latérales tous les ans.
• Étêter tous les deux à trois ans.
• Une fois la tête bien formée, espacer
les étêtages dans le temps. Les rejets
ne doivent toutefois pas dépasser
50cm de circonférence (une dimension
atteinte en 10 à 15 ans pour un saule),
sinon ils risquent de s’arracher.
... RESTAURATION D’ARBRES TÊTARDS
Souvent, les têtards n’ont pas été entrete-
nus pendant longtemps et leurs branches
risquent de céder sous leur propre poids.
Une taille de rattrapage peut être envi-
sagée mais la cicatrisation et la reprise
n’est plus assurée. En ce qui concerne les
saules, le risque d’éclatement est généra-
lement plus élevé que le risque de non-re-
prise, et il y a peu à perdre à les tailler.
Outre son intérêt patrimonial, la taille en
têtard permet de conserver des vieux arbres
et leurs micro-habitats associés tout en
limitant les risques de chute. Les rejets sont
soustraits à la dent du bétail. Les saules sont
fréquemment taillés en têtard mais d’autres
essences peuvent s’y prêter comme l’aulne,
le frêne, l’érable voire le chêne.
La coupe doit être eectuée au-dessus
du bourrelet cicatriciel, mais sans laisser de
chicot.
Le SPW a produit une brochure
«Créer et entretenir un arbre têtard »,
disponible sur biodiversite.wallonie.be
La plantation et la restauration des
arbres têtards peuvent être subven-
tionnées sous certaines conditions.
Prenez contact avec le service exté-
rieur du DNF de votre région.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 49
.. RECOMMANDATIONS
POUR LA PLANTATION
La plantation ne doit être envisagée que
là où la régénération naturelle d’essences
indigènes n’est pas possible: sur des
berges ayant fait l’objet de génie civil ou
à stabiliser rapidement après un chantier,
en l’absence d’arbres semenciers, ou
encore dans un but de diversification des
essences présentes.
Dans le cas d’une régénération artificielle,
une attention particulière doit être portée
au choix du matériel de reproduction
(figure16) :
• les cours d’eau peuvent transporter
des graines ou des fragments de
plantes sur de grandes distances. Ain-
si, que l’on se situe dans un contexte
naturel ou fortement artificialisé, il
est préférable de n’utiliser que des
espèces indigènes;
• il convient de respecter les aires de
répartition et les exigences physio-éco-
logiques des espèces utilisées.
Les distances de plantation imposées
par le code rural doivent être respectées
le long des cours d’eau : 2 m de la crête
de berge pour les arbres à haute tige et
0,5m pour les arbustes. Autrement, il
faut obtenir l’accord du gestionnaire. Si le
but poursuivi est de protéger le bas de la
berge, la ligne inférieure ne doit pas être
éloignée de plus d’un mètre du niveau
d’eau moyen estival. Les espèces à utiliser
dépendront également de cette hauteur
d’implantation.
En prairie pâturée, la simple pose d’une clôture permet
souvent de remédier à l’absence de régénération.
50
Saule Prélever des boutures d’individus locaux
• Individus adaptés
• Pas de pollution génétique
• Pas de propagation de maladies
Autres espèces indigènes Acheter des plants en pépinière
Exiger des variétés non-ornementales de
provenance locale chez un pépiniériste de
confiance ou élever en pépinière des plants
issus de semences vendues par le Comptoir
Forestier.
Les jeunes plants et boutures doivent
s’aranchir de la végétation concurrente
et résister aux crues. Des plants hauts
permettront de limiter les dégagements,
mais devront être maintenus par des
tuteurs robustes. Quant aux boutures, elles
peuvent être enfoncées profondément dans
le sol. On peut limiter les dégâts provoqués
par les crues hivernales en implantant la
végétation au début du printemps, avant le
débourrement. Le cas échéant, les plants
doivent être protégés de la dent du bétail ou
du gibier.
Sur les techniques de plantation ou
de génie végétal, et sur les exigences
des diérentes espèces : Verniers G.,
PetitF., Hallot E., Houbrechts G. (2009).
Techniques végétales : conception,
application et recommandations. SPW,
DGARNE, DCENN, 62 p.
Sur le choix des espèces à planter:
Dethioux M. (1989). Aménagement écolo-
gique des cours d’eau : espèces ligneuses
de la berge. Direction de l’Hydraulique
Agricole (MRW), Centre de Recherche et
de Promotion Forestières (IRSIA).
Figure 16. Choix du matériel de plantation.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 51
.. GESTION DES PRODUITS DE COUPE
Les matières issues de l’entretien de la
forêt riveraine (troncs, branches, feuilles,
broyat…) doivent être évacuées hors du
lit mineur. En particulier, les actions sui-
vantes sont à proscrire et peuvent mener
à une verbalisation :
• le rejet de déchets verts dans le cours
d’eau : il mène à l’eutrophisation et
l’asphyxie des eaux de surface ;
• le dépôt de déchets verts sur les
berges: il mène à une asphyxie des
plantes et de leurs racines, qui ne
peuvent plus stabiliser la berge.
L’enrichissement du milieu favorise le
développement d’une végétation nitro-
phile et banale (orties et liseron), voire
invasive ;
• le brûlage des déchets verts sur la
berge : il détruit le tapis végétal qui
stabilise celle-ci.
Il est interdit de lais-
ser les produits de coupe
dans le lit mineur et sur
les berges.
52
Le brûlage sur les rives est généralement
déconseillé. Il peut se justifier s’il permet
d’éviter des dommages au sol lors de
l’évacuation des bois. Il doit se faire dans
le respect de l’ensemble de la législation :
• le code forestier l’autorise sur les sols
alluviaux moyennant notification au
DNF ;
• le code rural l’interdit «à moins de
100mètres des maisons, des bruyères,
des vergers, des haies, du blé, de la
paille, des meules et des lieux ou le lin
est mis à sécher». Il l’interdit également
à 25m d’une forêt, sauf accord du pro-
priétaire;
• la loi sur la Conservation de la Nature
l’interdit dans les réserves naturelles ;
• les règlements communaux prévoient
parfois d’autres interdictions.
Le bois peut notamment être valorisé
comme bois-énergie. La quantité de bois
contenue dans un kilomètre de cordon
rivulaire bien développé dépasse souvent
300 m, soit 150 tonnes sèches de bois.
Le bois-énergie est plus facilement vendu
par lots importants, en plaquettes plutôt
qu’en bûches : la faible qualité du com-
bustible (impuretés, sédiments, teneur
en cendres élevée) le rend plus apte à
être valorisé dans de grandes unités de
transformation que dans des chaudières
individuelles.
Pour certaines interventions ponctuelles
(abattage d’un ou de quelques arbres dan-
gereux dans une zone diicile d’accès par
exemple), le bois peut être laissé sur place.
Dans l’exemple ci-contre, issu du guide tech-
nique élaboré à l’occasion du projet Walphy,
un tronc a été fixé sur la berge à l’aide de
pieux de chênes afin de créer des habitats
aquatiques.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 53
.. MISE EN PLACE DE PIÈGES À BOIS
Des pièges à bois sont installés dans
certains pays d’Europe à l’amont de zones
sensibles pour y limiter l’arrivée du bois.
Dans sa forme la plus simple, un piège est
constitué de pieux solidement enfoncés
dans le lit du cours d’eau. Ceux-ci sont
espacés de 1 à 3 m et sont disposés en V,
avec l’ouverture vers l’amont ou l’aval:
cette configuration prévient la retenue
complète de l’eau. L’ouvrage doit être
inspecté à chaque crue. Il doit être installé
dans une zone peu sensible aux inonda-
tions, car le niveau d’eau s’élève en amont
de l’ouvrage. Il doit être facile d’accès
pour permettre l’enlèvement des bois.
Pieu
Écoulement
Écoulement
Érosion des berges
Aouillement
Pieu
Figure 17. La mise en place d’un piège à bois peut modifier les conditions d’écoulement.
Selon la disposition des pieux (en V ou en V inversé), il peut se produire des érosions
latérales ou un aouillement du fond. Des protections de berges ou du fond peuvent
s’avérer nécessaires pour éviter ces eets non souhaités. Une étude doit donc précéder
la mise en place d’un tel ouvrage.
Adapté de Lange & Bezzola4
54
. ADAPTATION AU
CONTEXTE LOCAL
Le contexte local peut imposer des
actions spécifiques (protection des
voiries, restauration écologique…) ou
le respect de certaines règlementations.
Cette sous-section présente des recom-
mandations dans quelques cas de figure
fréquents, à adapter à chaque situation.
.. ZONE AGRICOLE
La forêt riveraine fournit de nombreux
services particulièrement utiles dans les
zones agricoles fortement anthropisées:
elle agit comme un tampon pour les
polluants, assure la stabilité des berges,
participe au maillage écologique et
paysager. Pourtant, la forêt riveraine y
est souvent discontinue, voire éparse. Il
convient donc d’une part de maintenir
voire d’augmenter le couvert, ainsi que de
rechercher une structure diversifiée, com-
prenant des strates arborée, arbustive et
herbacée. Une telle structure peut être
obtenue par un régime d’entretien par
petites trouées.
La pose d’une clôture au bord des prairies
pâturées est vivement recommandée, et
de plus en plus souvent obligatoire. Elle
permet d’éviter les détériorations des
berges liées à l’accès du bétail au cours
d’eau (piétinement, pollution par les
sédiments et les excréments), et permet
souvent l’installation et la régénération
d’un cordon rivulaire continu et diver-
sifié. La clôture est distante d’au moins
un mètre de la crête de berge, ou 0,75 m
pour les clôtures installées avant le 1er
avril 2014.
En zone de cultures comme partout ail-
leurs, la pulvérisation est interdite sur une
bande de 6 m de large à compter de la
crête de berge de tout cours d’eau. Cette
bande peut être valorisée avec un couvert
diérent de la culture adjacente, qui aura
un impact positif sur la qualité de l’eau ou
servira d’habitat-relais pour la faune de
plaine. Le couvert peut être spontané ou
implanté, ligneux ou herbacé. L’essentiel
est qu’il soit dense, permanent et com-
posé de plusieurs espèces indigènes. Des
outils existent pour financer cet aménage-
ment, comme la mesure agro-environne-
mentale et climatique (MAEC) « tournière
enherbée » (12 m de large semés, fauchée
une fois l’an), ou les subventions à la
plantation de haies.
Concernant l’abreuvement du bétail,
on peut se référer au guide « Rivières et
agriculture en région mosane » élaboré
par les Contrats de Rivière mosans,
disponible en ligne.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 55
De nombreuses solu-
tions éprouvées existent
pour l’abreuvement du
bétail, comme la pompe
à museau.
En zone de cultures,
une bande non cultivée
sera conservée le long
des cours d’eau. Ici, cette
bande a été plantée
d’arbres indigènes.
Un entretien par
petites trouées promeut
le développement d’une
ripisylve diversifiée.
56
.. ZONE FORESTIÈRE
En milieu forestier, les enjeux de sécurité
des biens et personnes sont souvent
faibles, au contraire des enjeux relatifs à
la biodiversité. L’entretien systématique
est donc déconseillé, d’autant plus que
les conditions d’accès et d’exploitation y
sont souvent diiciles. Le rajeunissement
de la forêt riveraine s’appuiera plutôt sur
les dynamiques naturelles de sénescence,
d’érosion des berges et d’inondations.
Par ailleurs, le bois mort produit dans les
tronçons non entretenus peut augmenter
la rugosité du chenal et contribuer à limi-
ter la violence des crues dans les zones
aval plus sensibles.
Si un entretien s’avère malgré tout néces-
saire, on veillera à exposer les souches
à une lumière suisante pour qu’elles
rejettent vigoureusement.
... PLANTATIONS RÉSINEUSES
Plusieurs règlementations s’appliquent
aux résineux en bord de cours d’eau :
• La loi sur la Conservation de la Nature
interdit de planter, de replanter ou de
laisser se développer les semis de ré-
sineux à moins de 6 mètres des berges
des cours d’eau. Elle interdit également
de maintenir des résineux plantés après
1969 à moins de 6 mètres des cours
d’eau classés.
• Dans les forêts publiques, le code fores-
tier interdit la plantation de résineux
sur 12 m de part et d’autre de tout
cours d’eau, et 25 mètres dans le cas de
forêts établies sur sols hydromorphes.
En zone forestière, les enjeux de biodiversité sont souvent prioritaires.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 57
• En zone Natura 2000, la plantation de
résineux ainsi que la sylviculture favori-
sant les résineux sont interdites à moins
de 12 m de la berge de tout cours d’eau.
• Il est interdit de planter des résineux
en zone naturelle au plan de secteur (le
plan de secteur peut être consulté sur
le geoportail de wallonie).
Le premier objectif dans les zones concer-
nées par des plantations résineuses de-
vrait être la reconstitution d’une ripisylve
feuillue indigène sur les premiers mètres
au-delà de la berge. Néanmoins, le retour
à la forêt feuillue est souhaitable dans
l’ensemble du lit majeur.
Les résineux ne sont pas adaptés aux
bords de cours d’eau. Leur enracinement
superficiel et l’absence de végétation
herbacée sous leur couvert sont respon-
sables de phénomènes intenses d’érosion
(sous-cavage, incision et arrachement de
berge), encore exacerbés lors des coupes
rases. L’ombrage excessif et l’acidification
de l’eau sont également défavorables à la
faune aquatique.
Sur le cas des résineux en bord de
cours d’eau et leur conversion : DurletP.
(2009). Éléments techniques pour la
préservation des ruisseaux. Parc Naturel
Régional du Morvan, ONF, ADAPEMONT,
Parc naturel régional du Haut-Jura, LIFE
Ruisseaux de têtes de bassins et faune
patrimoniale associée, 80 p.
Scénario idéal : une mise en lumière préalable de la bande riveraine lors des éclaircies dans
le peuplement résineux « prépare » les feuillus avant la coupe définitive. Le cordon feuillu est
stable et peut être maintenu ; on évite ainsi la mise en lumière brutale du cours d’eau.
Autres scénarios : Il n’est pas toujours possible d’intervenir en éclaircie dans le peuplement
résineux avant sa coupe définitive. Dans ce cas, les feuillus restants peuvent être instables
suite à leur mise en lumière brutale : ils sont élagués et leur tronc est haut et de faible
diamètre. Ces arbres peuvent être conservés en tant que semenciers ou recépés pour éviter
leur chute. En l’absence de régénération feuillue, une plantation d’essences indigènes peut
être envisagée.
Mise en lumière de
la bande riveraine à
l’occasion des
éclaircies.
Régénération
naturelle suite à
la mise en
lumière des
semenciers.
Coupe définitive
du peuplement
résineux.
Si besoin,
éliminer les
semis résineux.
Figure 18. Restauration de la ripisylve à partir d’une plantation résineuse.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 59
... PEUPLERAIES
Les peupliers cultivés ont un enracine-
ment traçant qui les rend très sensibles
au sous-cavage et au chablis lorsqu’ils
sont implantés en bord de cours d’eau.
Ils peuvent alors entraîner une partie de
la berge dans leur chute. Ils doivent être
plantés à au moins 6 m en recul de la
crête de berge, tandis qu’on laissera s’ex-
primer un cordon d’essences indigènes à
proximité immédiate du cours d’eau.
Bien que les peupleraies n’aient pas la
même valeur biologique qu’une forêt
alluviale spontanée, elles ont leur place
dans le lit majeur des cours d’eau sous
certaines conditions :
• Implanter les peupleraies hors des sols
marécageux, c’est-à-dire hors des sols
où la nappe aleure à moins de 50 cm
de profondeur en été ;
• Abandonner le drainage. Le code
forestier interdit l’entretien des drains
à 25mètres de tout cours d’eau pour
toute nouvelle régénération ;
• Promouvoir la naturalité : conserver
des arbres-habitats et diversifier les
essences, notamment en lisière ;
• Dans les jeunes plantations, se limiter
à des entretiens localisés au pied des
arbres pour permettre le dévelop-
pement d’un sous-étage herbacé ou
ligneux.
60
.. ZONE URBANISÉE
L’entretien de la ripisylve doit être envi-
sagé de manière plus régulière en zone
habitée ou en présence d’infrastructures
(voiries, ouvrages d’art, etc.). La priorité
est d’assurer la sécurité vis-à-vis des
chutes d’arbres, de l’érosion et des inon-
dations. Néanmoins, la gestion intègrera
tant que possible les autres fonctions de
la forêt riveraine, en particulier :
• sa fonction d’ombrage qui limite le
développement des espèces invasives
et l’eutrophisation ;
• sa fonction d’habitat-relais pour la
faune ;
• sa fonction paysagère.
Dans les zones habitées, les interventions
vigoureuses enlevant plus d’un tiers des
arbres sur des linéaires conséquents sont
à proscrire. On veillera tant que pos-
sible à maintenir des arbres à vocation
paysagère, moyennant une taille ou un
élagage des branches problématiques si
nécessaire. Les recépages peuvent être
partiels si leur objectif est de sélectionner
les brins les mieux conformés ou les plus
esthétiques au sein des cépées.
La loi de 1891 sur la police des chemins de fer interdit de maintenir des arbres dont la
hauteur est supérieure à la distance au chemin de fer, à mesurer diéremment selon son
implantation en remblai, à niveau ou en déblai (en rouge dans le schéma).
Le gestionnaire du réseau peut en outre exiger l’abattage des arbres dangereux à 20 mètres
de part et d’autre des rails.
1,5 m
Figure 19. Entretien de la végétation à proximité des chemins de fer.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 61
En ville, les fonctions écologiques et
paysagères de la végétation doivent être
considérées aux côtés de la sécurisation des
biens et des personnes.
62
.. BERGES ARTIFICIELLES
La végétation spontanée qui se déve-
loppe sur les berges artificielles participe
à leur intégration paysagère et en atténue
l’impact écologique. Néanmoins, une
végétation non adaptée peut concourir
à déstructurer les ouvrages. La réfection
des berges après coup est coûteuse, et
justifie d’adopter une démarche préven-
tive et prudente.
Ainsi, il est recommandé d’enlever systé-
matiquement toute végétation ligneuse
qui se développe dans la maçonnerie.
Dans les enrochements, le recépage
régulier des arbres permet de limiter le
développement des parties aériennes, qui
risque à terme de déstabiliser les blocs.
Plus les blocs sont grossiers, plus on peut
laisser la végétation se développer. Enfin,
les arbres de grande dimension situés à
proximité immédiate d’une berge proté-
gée doivent être enlevés s’ils risquent de
basculer, ou d’occasionner des dégâts à la
berge par leur système racinaire.
Colonisation d’un
perré par la végétation
ligneuse, qui risque à
terme de le déstructurer.
Le dessouchage devra
s’accompagner d’une
recharge des vides
laissés par les racines,
voire d’une réfection de
l’ouvrage.
Sur le cas de la végétation sur les
digues : Vennetier M., Mériaux P., Za-
nettiC. (2015). Gestion de la végétation
des ouvrages hydrauliques en remblai.
Cardère éd., Irstea, 232 p.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 63
.. NATURA
Les cours d’eau et leurs marges abritent
de nombreux habitats rares, menacés ou
patrimoniaux : les habitats d’intérêt com-
munautaire. Seule une fraction de leur
surface est reprise dans le réseau Natura
2000 et fait l’objet d’une protection règle-
mentaire. Par exemple, moins de 50% des
forêts alluviales du nord du sillon Sambre
et Meuse y sont reprises. La conserva-
tion des habitats et des espèces se joue
néanmoins autant en dehors qu’au sein
du réseau. En eet, selon la Directive
Habitats, c’est à l’échelle de l’ensemble du
territoire que l’état de conservation doit
être évalué. Par conséquent, la gestion de
la ripisylve doit tenir compte des particu-
larités des habitats, y compris en dehors
des sites désignés.
... QUELQUES HABITATS FRÉQUENTS
AUTOUR DES COURS D’EAU
Les forêts alluviales (91E0, 91F0)
Dominées par l’aulne, les saules ou le
frêne, les forêts alluviales se développent
en relation directe avec le cours d’eau.
Elles sont souvent réduites à un cordon
arboré ou arbustif. Leur état de conserva-
tion peut être amélioré par une série de
mesures en faveur de la biodiversité et du
bon fonctionnement de l’écosystème :
• l’extension de leur surface dans la
vallée ou en linéaire le long des berges,
notamment aux dépens des peuple-
raies et des plantations résineuses ;
• l’adoption d’une sylviculture ou d’un
entretien adapté qui promeuvent les mi-
cro-habitats et la biodiversité (bois mort,
arbres d’intérêt biologique, diversifica-
tion des essences), voire l’arrêt de toute
intervention sur certains secteurs;
• l’évitement de toute dégradation du sol
et de l’eau par des pollutions, mises à
blanc, tassements de sol et orniérages.
Forêt alluviale.
64
Les chênaies-charmaies, les chênaies-
frênaies et les hêtraies (9110, 9120,
9130, 9150, 9160)
Les chênaies-charmaies ou les hêtraies
occupent des portions du territoire plus
hautes que les forêts alluviales et ne sont
pas inondées. Ces forêts sont générale-
ment gérées pour la production de bois
de qualité. Une attention particulière doit
être portée au non-tassement des sols et
au maintien d’arbres d’intérêt biologique
et de bois mort.
Les mégaphorbiaies (6430)
Ces formations ouvertes sont dominées
par de grandes dicotylédones herbacées
et hygrophiles comme la reine des prés,
l’angélique ou la valériane oicinale. Leur
état de conservation est d’abord menacé
par l’envahissement par des espèces
banales (ortie) ou invasives (balsamine de
l’Himalaya). Cet envahissement peut être
causé par la régularisation des débits et
la pollution issue du cours d’eau ou des
parcelles agricoles. Un recépage occa-
1 : chênaie-charmaie. 2 : mégaphorbiaie.
3 : cours d’eau à renoncule.
1
3
2
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 65
sionnel des arbres qui s’y développent
spontanément peut être envisagé pour
les formations en bon état de conserva-
tion. Lorsqu’elle est occupée par des boi-
sements artificiels, la végétation typique
des mégaphorbiaies revient d’elle-même
après la coupe pour peu que la parcelle
soit régulièrement inondée selon le ré-
gime hydrologique qui lui est propre.
Les eaux courantes (3260)
Les eaux courantes abritent diérentes
communautés végétales et animales se-
lon la largeur du cours d’eau, la pente et
la région naturelle. Leur état de conserva-
tion a trait à la fois à la qualité de l’eau et
à l’hydromorphologie.
Les tourbières, les tourbières boisées,
les landes humides et autres bas-marais
(7110, 7120, 7140, 7150, 7220, 91D0,
4010)
Ce complexe d’habitats se développe sur
les sols pauvres et marécageux. Souvent,
leur état de conservation a été durable-
ment dégradé par le drainage et l’enré-
Des fiches descriptives des diérents
habitats et espèces d’intérêt commu-
nautaires sont disponibles sur le site
biodiversite.wallonie.be
Tourbière.
sinement, et leur restauration demande
une maîtrise technique élevée (engins
spécialisés pour les sols non-portants, uti-
lisation de techniques spécifiques comme
le fraisage ou le décapage du sol…).
... EXIGENCES DE QUELQUES
ESPÈCES NATURA
Les espèces concernées par le réseau
Natura 2000 et faisant l’objet d’une
protection sont listées dans les annexes
de la directive 92/43/CEE « Habitats » et
de la directive 2009/147/CE « Oiseaux ».
Elles sont reprises avec d’autres espèces
faisant l’objet d’une protection dans les
annexes de la loi sur la Conservation de
la Nature.
66
La loutre a besoin d’une bonne productivité piscicole et d’une
ripisylve diversifiée : elle bénéficie donc de l’amélioration globale de la
qualité des habitats rivulaires. Elle creuse son terrier dans le système
racinaire des vieux arbres (en particulier chênes, érables et frênes), ou se
cache dans les massifs épineux (prunelliers, framboisiers, ronciers), les
tas de bois, les dépôts d’embâcles…
Le martin pêcheur a besoin
d’eaux claires et poissonneuses,
ainsi que de perchoirs pour se
nourrir. Comme l’hirondelle de
rivage, il niche dans les berges
verticales érodées. Ainsi, son
habitat est étroitement lié aux
possibilités de mobilité latérale
du cours d’eau au sein d’un
espace de liberté. Les berges
doivent être clôturées pour éviter
leur eondrement suite au piéti-
nement du bétail.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 67
La moule perlière et la mulette épaisse dépendent d’une ripisylve dense
qui limite le réchauement de l’eau. Par ailleurs, un soin particulier doit
être apporté pour ne pas apporter de sédiments fins dans le cours d’eau
en amont des sites où elle est présente : les jeunes moules perlières sont
asphyxiées lors colmatage du fond par ces sédiments. Le DEMNA (Départe-
ment d’Etude du Milieu Naturel et Agricole) peut être contacté pour savoir si
un site est occupé par des moules d’eau douce.
La renouée bistorte,
présente dans les prairies
maigres humides arden-
naises, est l’hôte obligatoire
du cuivré de la bistorte,
espèce d’intérêt commu-
nautaire. Les populations
ont régressé suite à l’enrési-
nement, l’intensification ou
encore l’abandon des pra-
tiques agricoles extensives.
... RÈGLEMENTATION DANS
LES SITES DÉSIGNÉS
Les sites Natura 2000 ont fait l’objet d’un
arrêté de désignation. Les interventions
menées dans ces sites doivent être com-
patibles avec le maintien d’un bon état de
conservation et doivent respecter les me-
sures générales et particulières définies
dans l’arrêté de désignation (voir encadré).
Les règlementations à respecter dans
les sites Natura 2000 sont décrites et
tenues à jour dans le document « Guide
de gestion Natura 2000 » édité par
Natagriwal et disponible gratuitement
sur le site natagriwal.be. De manière
non-exhaustive :
• dans tous les sites Natura 2000, la coupe
de plus de 30% des cordons rivulaires
sur dix ans et par parcelle d’un seul te-
nant nécessite une autorisation du DNF ;
• dans tous les sites Natura 2000, l’abat-
tage d’arbres de plus de 100 cm de cir-
conférence entre le 1er avril et le 30juin
requiert une autorisation du DNF ;
• à douze mètres de tout cours d’eau, la
plantation de résineux ou toute sylvi-
culture qui favorise les semis naturels
de résineux est interdite ;
• dans l’UG7 (qui reprend les forêts allu-
viales), la coupe ou la récolte d’arbres
morts nécessite une autorisation
du DNF, sauf pour motif de sécurité
publique le long des routes, chemins,
sentiers, voies de chemins de fer, lignes
électriques et conduites de gaz ;
• dans l’UG7, la transformation ou l’en-
richissement des peuplements par des
espèces non indigènes est interdite.
Elle est également règlementée dans
d’autres UG ;
• dans l’UG1 (qui reprend notamment
les rivières), le DNF doit être averti de
tout entretien dans le lit mineur. Une
autorisation est nécessaire en présence
de moule perlière.
Dans les sites Natura 2000 ou dans les
sites de grand intérêt biologique*, des
outils financiers sont accessibles via le
PWDR (Plan Wallon de Développement
Rural) aux propriétaires et aux gestion-
naires privés ou publics qui désirent
aller plus loin que la règlementation en
matière de conservation de la nature.
MESURES GÉNÉRALES ET MESURES PARTICULIÈRES
Mesures générales : elles s’appliquent à tous les sites Natura 2000.
Cf. arrêté du GW (Gouvernement wallon) du 24 mars 2011 portant les mesures préventives
générales applicables aux sites Natura 2000 ou candidats au réseau Natura 2000.
Mesures particulières : elles sont spécifiques à l’unité de gestion (UG) dans laquelle on se
trouve. Les unités de gestion sont cartographiées sur le geoportail de Wallonie.
Cf. arrêté du GW du 19 mai 2011 fixant les types d’unités de gestion susceptibles d’être
délimitées au sein d’un site Natura 2000 ainsi que les interdictions et mesures préventives
particulières qui y sont applicables.
* Les sites de grand intérêt biologique sont des sites,
repris ou non dans le réseau Natura 2000, qui abritent
des habitats ou des espèces rares, menacés ou proté-
gés. Un inventaire de ces sites est tenu par le Départe-
ment d’étude du milieu naturel et agricole (DEMNA).
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 69
.. CASTOR
Le castor européen (Castor fiber) est de
retour sur nos cours d’eau après près de
deux siècles d’absence. Le castor modifie
son environnement en construisant des
barrages et en rajeunissant la végétation
riveraine. Si son impact sur l’écosystème
est globalement positif, la recolonisa-
tion des rivières par le castor peut poser
problème aux usagers et gestionnaires
de zones riveraines. Le castor figure à
l’annexe IV de la directive habitats, il est
donc intégralement protégé. Il est interdit
de le réguler ou de le perturber, ainsi que
de détruire ses barrages. De toute façon,
les sites vacants sont souvent rapidement
POURQUOI LE CASTOR ABAT-IL DES ARBRES ?
Se nourrir
Le castor est strictement herbivore. Il se nourrit principalement d’herbacées terrestres et
aquatiques, de feuilles, de branches, et d’écorce (surtout les arbres à bois tendre comme
les saules et les peupliers).
Construire son gîte, des barrages
Le castor construit des barrages afin de maintenir l’entrée de son gîte (terrier ou hutte) sous
eau, ou afin d’accroître son espace de vie. En eet, le castor est plus à l’aise dans l’eau que
sur la terre ferme.
Favoriser la végétation qu’il consomme
Les arbres peuvent être abattus pour favoriser le rejet de jeunes pousses qu’il pourra
consommer, ou pour mettre l’écosystème en lumière et faciliter l’installation d’une végéta-
tion appétente.
Le castor adapte son
environnement à ses besoins.
recolonisés. En cas d’installation du cas-
tor, la solution la plus satisfaisante pour le
propriétaire est généralement la coha-
bitation : l’adaptation à la présence de
l’animal et la minimisation de ses dégâts.
En cas d’installation du castor, les arbres
de valeur peuvent être protégés au plus
vite, sans autorisation requise (voir en-
cart). Les dégâts occasionnés aux arbres
se concentrent généralement sur les 10
premiers mètres à partir du cours d’eau,
et parfois jusqu’à 30 mètres.
Les problèmes d’inondations ou de
fouissement de berges sont souvent plus
complexes. Ils nécessitent de poser un
bon diagnostic, et la résolution du pro-
blème peut impliquer des autorisations
spécifiques. Demandez conseil auprès
du DNF, du gestionnaire de cours d’eau,
du DEMNA, de Natagora ou du Contrat de
Rivière local.
PROTECTION DES ARBRES
Si le nombre d’arbres à protéger est limité (quelques dizaines de pieds), la protection
individuelle des arbres par un manchon en treillis est la solution la plus fiable et la plus
économique. Le manchon doit mesurer au moins un mètre de haut, avoir une maille de
5 cm maximum (un treillis à poules convient), et être bien fixé au sol (tuteurs ou piquets).
Il faut prévoir suisamment d’aisance pour ne pas blesser l’arbre, mais il faut éviter que le
castor ne puisse creuser et passer derrière la protection.
Lorsque de nombreux arbres doivent être protégés, on peut également protéger la parcelle
par une clôture. Il faut prévoir un rabat horizontal de 20 cm sur le sol du côté du cours
d’eau pour éviter le fouissage. Il est également conseillé de faire revenir la clôture de 10 m
vers l’intérieur des terres à ses extrémités, afin de prévenir le contournement de la clôture.
Le service public de Wallonie a
édité une brochure spécifique, intitulée
«Cohabiter avec le castor en Wallonie».
Elle est disponible en ligne.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 71
.. COURS D’EAU NAVIGUÉS
Le gestionnaire de voies hydrauliques
peut être tenu pour responsable de
dommages causés par des bois flottants
à des bateaux : le bois « libre » doit donc
être enlevé des cours d’eau navigués. Une
gestion assez interventionniste de la forêt
riveraine est régulièrement promue dans
ce contexte afin de limiter l’apport de bois
au sein des chenaux navigués. Toutefois,
il est important de noter qu’en dehors des
canaux déconnectés du réseau hydrogra-
phique naturel, une part importante du
bois flottant retrouvé au sein des cours
d’eau navigués provient des cours d’eau
en amont à la faveur de crues.
Les berges des cours d’eau navigués sont
soumises à des contraintes mécaniques
importantes dues au batillage (vagues
produites par le sillage des bateaux). Il
convient donc de sélectionner des arbres
solidement enracinés, qui ne risquent pas
de se déchausser, ou de recéper régulière-
ment les arbres pour favoriser la crois-
sance de leur système racinaire.
Sur les voies naviguées, les élé-
ments relictuels d’habitat (ici : buisson
surplombant l’eau, arbre de grande
dimension, végétation semi-aquatique)
doivent être maintenus ou promus, tant
pour la conservation de la biodiversité
que les usages socio-culturels et de
loisirs (pêche, tourisme, promenade).
72
.. PRATIQUE DES LOISIRS EN RIVIÈRE
Les loisirs de plein air pratiqués en ri-
vières (pêche, kayak, baignade, prome-
nade, etc.) permettent de découvrir le
patrimoine naturel. Ils constituent dès
lors une opportunité pour valoriser ce
patrimoine et les aménagements visant à
le préserver. Par exemple, l’amélioration
de la qualité de l’eau pour la baignade
bénéficie également aux écosystèmes
aquatiques et riverains.
Ces activités pratiquées dans la nature
s’appuient sur un milieu naturel préservé
et leur qualité en est dépendante. Les
aménagements visant à faciliter l’accès
à la rivière et la pratique des loisirs ne
sont pas exclus, mais ils ne peuvent pas
concerner l’ensemble de la rivière ; ils
doivent garder une portée locale.
... PÊCHE
Les pratiques de gestion de la ripisylve
proposées dans ce guide ont des vertus
piscicoles, en particulier l’entretien par
petites trouées, le maintien de bois mort
dans l’eau et le choix d’une période
d’intervention adaptée. La végétation
idéale pour la pratique de la pêche ore
un camouflage naturel au pêcheur et lui
laisse suisamment d’accès à l’eau pour y
poser sa ligne.
Les loisirs pratiqués dans la
nature permettent de découvrir le
patrimoine naturel. Ces activités
dépendent d’un milieu préservé !
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 73
Les pêcheurs se sont engagés dans une
démarche d’amélioration des milieux
aquatiques et de protection du patri-
moine piscicole, reconnue et entérinée
dans le décret du 22 mars 2014 relatif
à la pêche fluviale. Les pêcheurs sont
consultés lors de l’établissement des pro-
grammes PARIS, mais doivent disposer
de l’aval du gestionnaire du cours d’eau
pour toute action sur le cours d’eau ou sa
végétation.
... KAYAK
Dans les rivières fréquentées par des
kayaks, les kayakistes et les loueurs
doivent communiquer et collaborer avec
Des débris situés le long des berges en eaux calmes ne posent aucun problème pour
la pratique du kayak (à gauche). A contrario, les embâcles qui obstruent complètement le
passage forcent le kayakiste à un portage sur la berge, qui peut mener à sa déstructuration
par piétinement en cas de forte fréquentation (à droite).
les gestionnaires de cours d’eau pour
sécuriser et permettre la pratique de
manière eicace et équilibrée vis-à-vis
des autres fonctions des cours d’eau. En
particulier, l’autorité gestionnaire devrait
être avertie de tout obstacle entravant la
circulation des kayaks. Elle seule est en
droit d’intervenir dans le lit mineur ou d’y
autoriser des interventions moyennant
le respect de certaines conditions qu’elle
fixe. Selon la situation, les obstacles
pourront être balisés par le loueur ou
le responsable de groupe avant leur
enlèvement.
74
. GESTION DES ARBRES
MALADES
Les forêts riveraines des cours d’eau sont
touchées par deux principales problé-
matiques phytosanitaires : la maladie de
l’aulne causé par Phytophthora x alni, et la
chalarose du frêne causée par le cham-
pignon Hymenoscyphus fraxineus. Les
deux maladies sont déjà bien présentes
sur tout le territoire wallon, et il est
illusoire de penser pouvoir enrayer leur
progression par des abattages à grande
échelle. Pire, l’enlèvement systématique
et anarchique de tous les arbres ma-
lades aaiblirait les arbres restants par
la déstabilisation, le tassement du sol et
les blessures. Ces derniers deviendraient
alors plus sensibles à d’autres maladies.
Ainsi, la première recommandation com-
mune pour la gestion des deux maladies
est de continuer à réaliser les chantiers
«dans les règles de l’art », c’est-à-dire à la
saison adéquate, en minimisant les per-
turbations au sol, en évitant les coupes
rases sur de grands linéaires. Il est très
important de préserver des arbres sains
car ils sont susceptibles de produire une
descendance tolérante aux maladies.
.. LA CHALAROSE DU FRÊNE
... BIOLOGIE ET SYMPTÔMES
La chalarose du frêne est causée par le
champignon Hymenoscyphus fraxineus
(anciennement Chalara fraxinea). La pre-
mière détection de la maladie en Wallonie
date de 2010.
RECONNAÎTRE UNE NÉCROSE DUE À LA CHALAROSE
Les caractéristiques déterminantes sont la couleur noirâtre, le renfoncement de l’écorce
voire du bois, la présence de fissures lorsque la nécrose est ancienne. La dernière photo
illustre une nécrose après dégagement de l’écorce à la grie.
Figure 20. Cycle du champignon Hymenoscyphus fraxineus.
Infection estivale des feuilles.
Flétrissement et mortalité des
pousses et des rameaux.
Dépérissement des houppiers.
Feuilles en décom-
position dans la
litière.
Juin : fructification
sur les rachis.
Ascospores
Nécrose au collet : risque élevé
de mortalité.
1 3
5
2
4
76
Les symptômes de la maladie peuvent
se marquer indépendamment au niveau
du houppier et du collet. Pour les arbres
adultes (> 80 cm de circonférence), ce
sont principalement les nécroses au collet
qui sont responsables de mortalités, et
non les défoliations. Les taux de morta-
lité sont plus importants pour les jeunes
arbres. Les arbres modérément atteints
peuvent encore rejeter de souche mais
leurs rejets sont souvent rapidement
réinfectés.
... GESTION DE LA MALADIE
La non-intervention permettra, suite à
la mortalité des arbres les plus atteints,
l’émergence d’une génération de frênes
résistants ou le relais par d’autres es-
sences. Néanmoins, dans les sites où la
sécurité prévaut, des éclaircies sélectives
peuvent accélérer ce processus.
Afin d’accélérer le relais, les arbres avec
des nécroses au pied seront abattus : leur
survie et leur stabilité sont compromises
dans un délai de 3 à 5 ans. La présence de
nécroses (cf. encart) doit être considérée
comme le seul véritable critère nécessaire
et suisant guidant au prélèvement d’un
individu.
On limitera les abattages de frênes
défoliés et non-nécrosés car ces individus
peuvent encore produire des gourmands
et redémarrer l’année suivante. Qui plus
est, la période d’observation va avoir une
influence importante sur l’établissement
du caractère supposé problématique de
la défoliation. Le risque de confusion sur
les symptômes est important : la seule
période valable pour l’observation des
symptômes foliaires se situe en juin et
juillet. Avant cette période, la feuillai-
son n’est pas encore terminée. En août,
certains frênes peuvent perdre précoce-
ment leurs feuilles indépendamment de
la maladie. Cette perte précoce pourrait
indiquer une résistance à la maladie (dé-
synchronisation des cycles du pathogène
et de l’hôte).
La tolérance à la maladie est sous
contrôle génétique. Il arrive donc de trou-
ver un arbre sans nécrose et au houppier
bien fourni parmi les arbres malades. Le
maintien de ces arbres est essentiel pour
permettre le développement d’une gé-
nération de frênes tolérants à la maladie.
Le prélèvement systématique des frênes
sans égards quant à leur état sanitaire est
donc à bannir. La survie à long terme du
frêne est prioritaire au même titre que
les impératifs de sécurité des biens et
personnes.
Seules les feuilles sont des sources de
spores. Les troncs et branches ne repré-
sentent aucun danger de contamination ;
leur exportation n’est pas justifiée dans le
cadre de la lutte contre la progression de
la maladie.
Gerarts F., Chandelier A., Claes-
sensH., Herman M., Lassois L., Delahaye
L. (2015). Évolution de la chalarose du
frêne en Wallonie. Forêt Wallonne 134:
35-45.
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 77
.. LE PHYTOPHTHORA DE L’AULNE
... BIOLOGIE ET SYMPTÔMES
La maladie de l’aulne, causée par le pa-
thogène Phytophthora alni, a été détectée
pour la première fois en Wallonie en
1999. Si l’état sanitaire des aulnes s’est
rapidement dégradé à l’émergence du
pathogène, la mortalité observée sur les
aulnes rivulaires reste stable et faible : de
l’ordre de 1% par an5.
P. alni se dissémine d’amont en aval via
le cours d’eau, lorsque l’eau est à plus
de 8°C. Il infecte l’arbre via les racines et
le collet au contact de l’eau. Il provoque
ensuite des nécroses du cambium et du
phloème, bloquant ainsi la circulation
de la sève. Le pathogène est régulé par la
rigueur des hivers et la température de
l’eau : le changement climatique pourrait
contribuer à en augmenter l’incidence6.
Symptômes de P. alni
• Présence de nécroses à la base du
tronc jusqu’à deux mètres de hauteur,
(taches noirâtres ou rouille) ;
• Feuilles de taille réduite, jaunâtres en
dehors de la période de sénescence ;
• Cime claire avec présence de branches
mortes.
Figure 21. Diagnostic de l’état sanitaire de l’aulne.
Le diagnostic de l’état sanitaire se base sur une évaluation visuelle du houppier (première
photo) et sur la présence éventuelle de nécroses. Le moment idéal pour observer les houp-
piers et les nécroses se situe à la fin de l’été (août-septembre).
Cimes
très claires
Pas de
symptômes
Mort
?Cime
mourante ?
Cime
très claire ? Nécrose ? Cime
claire ?
Feuilles
réduites
et jaunes ?
Feuilles
réduites
et/ou jaunes ?
Sain
Symptômes
légers
Symptômes
marqués
MourantMort
Clef de détermination du degré de dépérissement
non
ouioui ouioui ouioui
oui
nonnon nonnon
non
non
Cimes
claires
Cimes
mourantes
RECOMMANDATIONS DE GESTION | 79
... GESTION DE LA MALADIE
Il est déconseillé d’intervenir spécifique-
ment pour gérer la maladie. Dans des
zones problématiques, c’est-à-dire dans
des zones sévèrement aectées où les
arbres dépérissants ou morts constituent
un risque, des recépages ciblés peuvent
accélérer la régénération d’un cordon
sain. Ces interventions doivent se baser
sur un diagnostic de l’état sanitaire
(figure21).
On peut retenir des travaux menés sur
l’aulne en Wallonie que :
• Les arbres à symptômes légers ne pré-
sentent généralement plus de symp-
tômes l’année suivante.
• Les arbres mourants ont souvent perdu
leur capacité à rejeter de souche.
• Les arbres à symptômes marqués exté-
rioriseront généralement au moins les
mêmes symptômes l’année suivante,
mais ils sont encore capables de rejeter
de souche. C’est sur ces arbres que les
recépages doivent se concentrer.
Pour obtenir de bons rejets, la souche
doit être recépée entièrement avant un
dépérissement trop important et mise
en lumière. Il convient donc d’intervenir
par petites trouées, dont la longueur et la
disposition (en quinconce ou en vis-à-vis)
dépendra des conditions lumineuses lo-
cales (topographie, taille du cours d’eau,
occupation des rives) et des contraintes
paysagères.
Les billes de pied nécrosées sont des
sources de spores. Elles seront éloignées
du cours d’eau. Néanmoins, l’impact de
quelques billes laissées sur place sera
faible au vu de la présence généralisée du
pathogène en milieu rivulaire. En inter-
venant en hiver, le risque de propagation
de la maladie vers des cordons d’aulnes
sains est limité.
Di Prinzio J., Chandelier A., Henro-
tayF., Claessens H. (2013). La maladie de
l’aulne en Wallonie: évolution depuis son
émergence. Forêt Wallonne 124 : 3-19.
BIBLIOGRAPHIE
ET CRÉDITS
82
BIBLIOGRAPHIE
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5 Di Prinzio J., Chandelier A., Henro-
tayF., Claessens H. (2013). La maladie
de l’aulne en Wallonie : évolution
depuis son émergence. Forêt Wal-
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pour plus d’information sur les habitats
et espèces Natura 2000, sur la lutte
contre les espèces invasives, ou encore
sur la taille des arbres têtards).
83
84
CRÉDITS
RÉDACTION
Leo Huylenbroeck
Adrien Michez
Hugues Claessens
CONTRIBUTIONS
Nous remercions les nombreuses per-
sonnes qui ont contribué à améliorer
l’ouvrage à travers leur relecture avisée,
voire la co-écriture de certaines sections,
en particulier :
• Olivier Desteucq (Direction des
Cours d’eau non navigables, DCENN):
Contexte administratif, relecture de
l’ensemble.
• Frédéric Henrotay et Daniel Waltzing
(Département de la Nature et des
Forêts, DNF) : accès et période d’inter-
vention, relecture de l’ensemble.
• Nicolas Delhaye (DNF), Christine
Keulen (DCENN) et Lionel Wibail (Dé-
partement de l’Étude du milieu naturel
et agricole, DEMNA) : Natura 2000,
relecture de l’ensemble.
• Alain Gillet (DGO2 Mobilité et Voies
hydrauliques, Direction des Études
techniques) : cours d’eau navigués,
relecture de l’ensemble.
• Étienne Branquart (DEMNA) : espèces
exotiques envahissantes.
• Jean-Pierre Crohin (Fédération Royale
Belge de Canoë), Frédéric Dumon-
ceau (Maison Wallonne de la Pêche) et
Emmanuel Gennard (DCENN) : pratique
des loisirs en rivière.
• Jean-Pierre Facon : castor.
• Anne Chandelier (Centre wallon de
Recherches agronomiques) : le Phyto-
phtora de l’aulne.
• Laurence Delahaye (Observatoire wal-
lon de la Santé des Forêts) : la Chala-
rose du frêne.
• Virginie Cuvelier, Bernard De le Court,
Philippe Guillaume, Marjolaine De
Martelaer, Pierre Otte, Louis-Michel
Petiau, Stéphanie Vandresse (DCENN)
et Christophe Descamps (Service Tech-
nique Provincial Namur) : relecture de
l’ensemble.
• Frédéric Mouchet (Contrat de rivière
Haute-Meuse) : relecture de l’ensemble
et rédaction de la version antérieure du
guide, sur laquelle se base cette mise à
jour.
FINANCEMENT ET COORDINATION
La réalisation de ce guide a été finan-
cée par le Service Public de Wallonie,
Direction générale agriculture ressources
naturelles et environnement (DGARNE),
Direction des Cours d’eau non navigables
(DCENN, Directeur : François Ghysel) à
travers la convention «Appui technique et
scientifique des PARIS » avec Gembloux
Agro-bio Tech, Axe Gestion des Res-
sources forestières (responsable Philippe
Lejeune).
CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES
Benker S. p. 70 ; Bocca S. p. 67 bas droite; Branquart É. p. 45 gauche/droite, 46; Claessens H. p. 8, 10 milieu
droite, 12 droite, 55 bas, 56, 64/1, 65, 67 bas gauche, 72, 78 ; Collard A. p. 69 droite ; Colson V. p. 42 bas ; De Marte-
laer M. p.13 milieu, 59, 61; Delacre F. p. 10 haut droite ; Delahaye L. p. 74 gauche/milieu/droite ; Delbart E. p.44
bas gauche ; DSF p. 75/2 ; Dufrêne M. p. 67 haut gauche/droite ; Eva the Weaver/Flickr p. 44 bas droite ; FRBC/
KBKV p.73 droite ; Geerts C. couverture, p. 4-5, 14-15 ; Gerarts F. p. 75/3/4/5 ; GxABT p. 11, 13 haut, 33 bas, 40
gauche, 49, 50, 51 haut, 64/2, 71, 77 gauche/droite; Henrotay F. p. 42 haut gauche/droite, 43/1/2/3/4, 44 haut ;
Huylenbroeck L. p.7 gauche, 9, 10 haut gauche, 10 milieu gauche, 12 gauche, 13 bas, 23, 34, 35 gauche/droite,
36 haut gauche/droite, 36 bas, 37 bas, 39 haut gauche/milieu/droite, 39 bas, 40droite, 48, 51 bas, 55 haut/mi-
lieu, 64/3, 66 haut droite, 66 bas gauche, 69 gauche, 73 gauche ; Kuveskar S./Wiki Commons p. 66 haut gauche;
Michez A. p.42 milieu, 47 ; Mouchet F. p. 7 droite, 63; Neyrinck N. p. 33 haut droite; Otte P. p. 37 haut, 62 bas;
Queloz V./WSL p.75/1; Thiébault S. p. 33 haut gauche ; Walphy p. 52 ; Wibail L. p. 2-3, 10 bas gauche, 10 bas
droite, 30-31, 80-81; Wiki Commons p. 62 haut, 66 bas droite
LEO HUYLENBROECK
ADRIEN MICHEZ
HUGUES CLAESSENS
GUIDE DE GESTION
DES RIPISYLVES
Service public de Wallonie (SPW)
Direction générale de l’agriculture, des ressources naturelles et de l’environnement (DGO3)
Département du Développement, de la Ruralité, des Cours d’eau et du Bien-être animal
Direction des Cours d’eau non navigables (DCENN)
Avenue Prince de Liège 7 • 5100 Namur (Jambes)
Tél. : +32 (0)81 33 63 64 - E-mail : dcenn.drce.dgarne@spw.wallonie.be
environnement.wallonie.be
La reproduction et la diusion de ce document ou de parties de celui-ci sont autorisées à
condition de faire mention de la source sous la forme suivante :
Huylenbroeck L., Michez A., Claessens H. (2019). Guide de gestion des ripisylves. SPW,
DGARNE, DCENN, Namur, 80 p.
Graphisme : Forêt.Nature – foretnature.be
Imprimé sur papier PEFC.
Brochure gratuite - Éd. resp. : Brieuc Quévy, Directeur général, DGO3
SPW n° vert : 1718
wallonie.be