Actes de la séance commune de la Société préhistorique française et la Hugo Obermaier-Gesellschaft à Strasbourg (16-17 mai 2019) Textes publiés sous la direction de Ludovic Mevel, Mara-Julia Weber et Andreas Maier Paris, Société préhistorique française, 2021 (Séances de la Société préhistorique française, 17), p. 173-194 www.prehistoire.org Abstract: The symbolic use of the underground landscape is one of the most relevant aspects of the behaviour of Upper Palaeolithic societies in Europe. Currently available archaeological data clearly indicate the development of symbolic activities inside the caves from the Aurignacian, with Chauvet as the best example. This symbolic use became generalized until its most widespread levels at the end of the Upper Palaeolithic period, during the Middle Magdalenian. Besides, some of these caves were used during several periods in the Upper Palaeolithic. At the same time, even though the presence of graphic palimpsests was noted from the beginning of research in cave art, the recurrent use of caves for symbolic purposes, basically parietal art, in different periods during the Upper Palaeolithic has received the most interest only after the introduction of 14 C-AMS analyses of charcoal paintings. Thus, until now, the reuse of caves for symbolic purposes, especially rock art, has scarcely been studied. The main goal of the present study is therefore to construct a preliminary overview of the phenomenon in order to establish differences and/or similarities in the reutilisation patterns. The methodology to identify the reuse of caves art in the area of study has been based on the critical re-evaluation of existing information. Previous studies have been partial, mostly because they were restricted to specific geographical areas. In this way, a recurrence has been observed in the use of these symbolic spaces which is especially striking in the central/western Cantabrian region, during the whole period, in a way that is not detected in other regions. This is a very significant observation because it is evidence for a shared form of behaviour regarding graphic codes in human groups that followed one another over time and are archaeologically represented by very different technocomplexes. Résumé : L'appropriation symbolique des paysages souterrains est l'un des comportements les plus marquants de l'Homo sapiens pendant le Paléolithique supérieur en Europe. L'incursion à l'intérieur des grottes à des fins symboliques semble être lié à de rares actes funéraires des populations néandertaliennes et des certaines activités ponctuelles comme celles documentées dans la grotte de Bruniquel. Les données archéologiques actuellement disponibles indiquent clairement le développement d'activités symboliques à l'intérieur des grottes depuis l'époque aurignacienne, avec la grotte Chauvet comme meilleur exemple. Ce processus se généralisera jusqu'à atteindre son paroxysme vers la fin du Paléolithique supérieur, au cours du Magdalénien moyen. Dans certaines régions, les grottes demeurent la principale source d'information pour appréhender l'organisation des sociétés paléolithiques en raison des problèmes de conservation des habitats de plein air. Elles ont en effet été occupées, voire habitées, et utilisées pour différentes fonctions selon des chronologies plus ou moins longues. D'ailleurs, certaines d'entre elles ont été occupées pendant plusieurs périodes, continues ou non, pendant le Paléolithique supérieur. C'est la raison pour laquelle certains spécialistes ont proposé l'idée que certains de ces sites aient eu le statut de « sites d'agrégations », comme l'illustre le cas de la grotte d'Altamira. Cette même idée a également été évoquée sous le nom de « super sites » pour certaines grottes pyrénéennes comme Isturitz ou le Mas d'Azil. Si la présence de palimpseste graphique dans l'art ru-pestre a été mise en évidence depuis les prémices des recherches dans ces contextes, l'utilisation récurrente de grottes à des fins symboliques et artistique a été véritablement démontrée avec le développement des analyses 14 C-AMS sur les peintures réalisées au fusain. Pourtant, jusqu'à présent, la réappropriation de grottes à des fins symboliques n'a guère été un véritable objet d'étude. Seules les grottes de Cantabrie occidentale et centrale ont été évaluées de manière conjointe dans cette perspective, alors que dans d'autres secteurs elles ont été considérées individuellement. Récemment, à travers nos recherches dans l'est de la Cantabrie et dans les Pyrénées occidentales, nous avons détecté l'existence de trois sites qui présentaient des récurrences graphiques : les sites d'Aitzbitarte IV et d'Aitzbitarte V, étaient des ensembles d'art rupestre inconnus. Erberua était pour sa part déjà connu, mais nos travaux ont permis la réinterprétation de certaines gravures. En raison de ces nouveaux indices et dans le but de parvenir à avoir une vision d'ensemble de ce comportement culturel à la fin du Paléolithique supérieur, nous avons répertorié et caractérisé tous les sites d'art rupestre qui présentait une réutilisation des parois en réalisant une réévaluation critique des informations publiées et la discussion de modèles pour le bassin versant du golfe de Gascogne. L'objectif principal de la présente étude était de proposer un premier aperçu de ces phénomènes et de trouver des différences et/ou des similitudes dans les schémas de réappropriation des parois. Au final, nous avons observé une récurrence de ces espaces symboliques qui est particulièrement frappante dans la région de Cantabrie centrale/occidentale, pendant tout le Paléolithique supérieur. Ces résultats permettent de mettre en évidence un comportement partagé pour des codes graphiques par des groupes humains qui se succèdent dans le temps, en transcendant les technocomplexes auxquelles ils appartiennent. L'enquête actuelle s'est limitée à un sujet principal-la distribution géographique et spatiale-et reste préliminaire en raison de notre objectif principal qui était d'obtenir une vue d'ensemble à l'échelle de l'Europe occidentale. Dans tous les cas, des analyses plus approfondies devront être effectuées pour préciser les interactions entre les différentes phases de décors, pour définir les schémas de construction graphique de l'ensemble et bien sûr, pour expliquer les différences mises en évidence. Mots-clés : Grotte ornée, Symbolisme, Réutilisation, Europe, Magdalénien. Zusammenfassung: Die symbolische Nutzung unterirdischer Landschaften ist einer der relevantesten Verhaltensaspekte jung-paläolithischer Gesellschaften in Europa. Die zurzeit verfügbaren archäologischen Daten zeigen deutlich die Entwicklung sym-bolischer Aktivitäten in Höhlen seit dem Aurignacien, mit der Chauvet-Höhle als bestem Beispiel. Diese Art der symbolischen Nutzung erfuhr immer weitere Verbreitung bis zu ihrem Höhepunkt gegen Ende des Jungpaläolithikums, während des Mittleren Magdalénien. Außerdem wurden einige dieser Höhlen zu mehreren Zeitpunkten während des Jungpaläolithikums genutzt. Wenn-gleich Palimpseste bei Höhlenkunst von Beginn der Untersuchungen an beschrieben wurden, wuchs das Interesse an der wieder-holten Nutzung von Höhlen für symbolische Zwecke, hauptsächlich an Wandkunst, zu verschiedenen jungpaläolithischen Epochen erst nach der Einführung von 14 C-AMS-Analysen an Holzkohle-Zeichnungen. Bislang wurde die Wiederverwendung von Höhlen zu symbolischen Zwecken, insbesondere Felskunst, kaum untersucht. Das Ziel dieser Studie ist es daher, einen vorläufigen Überblick über das Phänomen zu geben, um Unterschiede und/oder Gemeinsamkeiten in den Wiederverwendungsmustern herausstellen zu können. Die Methode zur Erkennung der Wiederverwendung von Höhlenkunst im Untersuchungsgebiet basiert auf der kritischen Neubewertung der vorhandenen Informationen. Bisherige Studien betrachteten meist nur einen spezifischen geographischen Raum und waren daher partieller Natur. Auf diese Weise konnte eine wiederholte Nutzung symbolischer Plätze festgestellt werden, die sich in einer besonders hohen Intensität während des gesamten Untersuchungszeitraumes in der zentralen/westlichen kantabrischen Region abzeichnet, wie sie in keiner anderen Region erkannt wurde. Dies ist eine signifikante Beobachtung, da sie beweist, dass zeitlich aufeinanderfolgende Menschengruppen, die archäologisch durch sehr unterschiedliche Technokomplexe repräsentiert sind, eine geteilte Art des Verhaltens in Bezug auf graphische Kodierung hatten.