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Écrire avec des tablettes à l’école élémentaire : analyse de l’activité des élèves

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: Chronique d'activité de deux élèves au profil opposé quant à leur maîtrise de la tablette. Les élèves ayant un bon niveau de maîtrise de la tablette s'engagent dans l'activité rédactionnelle sur de plus longues périodes sans s'interrompre. ▪ Activité rédactionnelle L'activité rédactionnelle en tant que telle représente en moyenne 38 % du temps total passé à réaliser la tâche (entre 21 % et 60 % du temps de l'activité en fonction des élèves ; cf. tableau 3). Planification. Il est d'abord à noter que les textes produits sont très proches des documents mis à disposition par l'enseignante tant par le vocabulaire utilisé que la syntaxe des phrases. Ils ne contiennent pas d'idées nouvelles ; il s'agit le plus souvent de paraphrases. La planification est donc peu sollicitée lors de cette tâche. Des temps de pause avant l'écriture, habituellement consacrés à la recherche et à l'organiser des idées ne sont par exemple pas observables. Par ailleurs les élèves s'expriment peu sur l'organisation des idées dans le texte. Seule une élève indique avoir réfléchi à l'organisation de l'exposé : « Une page pour l'alimentation, le déplacement, tout ça ». Mise en texte. Les chroniques d'activité rendent en revanche visible des temps consacrés à la lecture des documents avant d'écrire (cf. figure 1, chronique d'activité de Marie). La génération du texte consiste pour eux à sélectionner des informations dans les documents mis à disposition, puis à les recopier ou à les paraphraser. « j'ai un texte à côté donc il fallait faire des phrases avec mais sans trop recopier le texte […] On essaie de transformer les phrases… On prend les mots et on les met ensemble. » La transcription (traduction du texte sous forme graphique) a lieu via le clavier virtuel tactile. Selon les réponses au questionnaire, 83 % des élèves de la classe préfèrent l'utilisation du clavier virtuel à celui d'un crayon pour écrire. On note que 85 % des élèves disent se sentir à l'aise pour utiliser une tablette. Cependant, son utilisation est perçue différemment en fonction du niveau de maîtrise de la tablette. Dans les entretiens, une partie des élèves dit que la tablette facilite le geste de production : « Ça va plus vite » « Ça fait moins mal au poignet », tandis que quelquesuns expriment une gêne ou des difficultés : « c'est pas le même geste », « On cherche les lettres », « Ça fait bizarre parce que ce n'est pas l'alphabet, c'est dans le désordre ».
… 
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Écrire avec des tablettes à l’école élémentaire : analyse de
l’activité des élèves
Sandra Nogry
Caroline Beauvais
Introduction
La tablette tactile fait désormais partie des dispositifs numériques fréquemment
proposés aux élèves dans l’espace scolaire à l’école primaire comme au collège. Il
convient donc d’analyser les utilisations pédagogiques des tablettes en classe
(Bruillard et Villemonteix, 2013).
Dans cette recherche, nous avons choisi de porter notre attention sur l’utilisation de
la tablette en situation de production d’écrit. L’utilisation d’environnements
numériques pour écrire fait partie des pratiques régulières en classe (Zheng et al.,
2016) ; selon l’enquête PROFETIC (2015)
1
, 33 % des enseignants disent utiliser le
numérique pour écrire au moins une fois par semaine. Des pratiques d’écriture sur
tablettes sont recensées dans certaines classes ; il s’agit notamment de travailler la
maîtrise du geste grapho-moteur propre à l’écriture cursive ou de produire des
documents enrichis (par des images, de la vidéo, du son). Comme le montre le
chapitre précédent (Boulc’h et Bernard, 2017) les études menées apportent des
résultats encourageants quant à l’efficacité de la tablette dans la maîtrise du geste
graphique (voir également Jolly et Gentaz, 2013), en revanche les usages de la tablette
tactile en production d’écrits restent peu étudiés. À l’école élémentaire, période
durant laquelle les élèves se familiarisent avec la production d’écrits, de nombreuses
interrogations subsistent quant à l’effet de la tablette sur cette activité et à son intérêt
pour l’élève.L’usage de la tablette dans des situations de production d’écrit à l’école
primaire reste donc encore à investiguer.
Cette étude vise à caractériser l’activité de production d’écrit sur tablette, à préciser
en quoi la tablette constitue une ressource dans cette activité et quelles contraintes
elle impose. Pour répondre à ces questions, deux études exploratoires sont présentées
dans ce chapitre. La première vise à caractériser l’activité instrumentée de production
d’écrits enrichis chez des élèves de CM1 et CM2. La seconde étude s’attache à étudier
plus spécifiquement l’activité rédactionnelle sur tablette chez des élèves en classe de
CE2.
L’activité de production d’écrit
L’activité de production d’écrit par des enfants a fait l’objet de nombreuses études en
psychologie cognitive et en sciences de l’éducation. Ces champs disciplinaires
1
https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/profetic-1d-2015/.
envisagent cette activité sous différentes perspectives : dans une perspective
cognitiviste elle est appréhendée en caractérisant les processus cognitifs impliqués,
tandis que dans une perspective historico-culturelle la dimension temporelle et le
caractère situé de l’activité sont plus centraux.
Produire un texte : une activité complexe impliquant la mise en œuvre
de processus cognitifs
En psychologie cognitive, l’écriture est définie comme une activité complexe
impliquant de la part du rédacteur qu’il mette en œuvre un ensemble de traitements
linguistiques (liés à la forme) et conceptuels (liés aux idées). Cette mise en œuvre
permet une transformation des idées initialement conceptuelles en une trace
linguistique écrite (Plane, Alamargot et Lebrave, 2010).
C’est à Hayes et Flower (1980) que revient la première description de l’activité
rédactionnelle ; elle est décrite comme une activité cognitive mettant en œuvre trois
principaux processus, la planification, la mise en texte et la révision. La planification
permet au rédacteur de récupérer les idées stockées en mémoire à long terme (MLT)
et de les organiser en un plan de texte hiérarchisé tenant compte du but de la
production (par exemple, en fonction du type de texte à produire). La mise en texte
assure la formulation des contenus préverbaux élaborés en planification. Enfin, la
révision permet d’évaluer la qualité du produit mis en texte et éventuellement de
l’améliorer.
Berninger et Swanson (1994) reprennent ce modèle princeps pour décrire la mise en
place de l’activité rédactionnelle selon trois phases, du CP à la classe de troisième.
La première phase de l’apprentissage de la production écrite (CP, CE1, CE2) est
marquée par l’émergence de la mise en texte. Selon Berninger et Swanson (1994),
deux sous-processus contribuent à la mise en texte : la transcription, qui a trait à
l’aspect graphique de l’écriture et de l’orthographe des mots, et la génération de texte,
qui permet la mise en mots des idées récupérées en mémoire. La transcription est le
premier sous-processus par lequel les jeunes rédacteurs entrent dans la rédaction et
contraint alors toutes les ressources en mémoire de travail (MDT) jusqu’au CE2.
Au début de la seconde phase (CM1, CM2, 6e), la mise en texte contraint encore
beaucoup la rédaction. Il faut attendre le CM2 (10 ans) pour observer un début
d’automatisation de la transcription et une complexification de la génération de
texte. Cette automatisation rend alors possible la complexification des processus de
haut niveau tels que la révision. À ce stade, elle peut porter sur le paragraphe et non
plus uniquement sur un mot isolé après sa transcription.
La troisième phase de développement (5e, 4e, 3e) consiste principalement en une
complexification des trois processus rédactionnels. Les traitements de haut niveau
associés aux processus de planification et de révision sont alors mieux gérés. Les
processus sont en interaction au sein de la MDT et interviennent de façon récursive
tout au long de la rédaction. Cette interaction est caractéristique de l’expertise
rédactionnelle (Hayes et Flower, 1980).
Pour résumer, en étudiant la mise en place et la complexification des traitements
rédactionnels en fonction des niveaux scolaires, Berninger et Swanson (1994) ont pu
montrer que les traitements complexes, de haut niveau, étaient rendus possibles
grâce à l’automatisation des processus de bas niveau libérant progressivement des
ressources en MDT (McCutchen, 1996).
Produire un texte : une activité diachronique, collective, multi-
instrumentée
L’approche cognitive permet une description précise des processus impliqués dans
l’activité rédactionnelle. Néanmoins, l’élaboration d’un texte commence avant même
de se saisir d’un stylo ou d’un clavier et d’écrire les premiers mots. Elle se déroule le
plus souvent dans un empan temporel large qui inclut non seulement la planification
et la rédaction du texte mais aussi des phases pré-rédactionnelles consacrées à la
recherche d’inspiration et à l’inscription de notes, puis des phases de remaniement
du manuscrit une fois le premier jet achevé. Ainsi, comme le souligne l’approche
génétique fondée sur l’analyse des brouillons « la production textuelle est une activité
dont les frontières ne coïncident pas avec celles des actes de scription » (Plane,
Alamargot et Lebrave, 2010).
Dans cette perspective, en situation écologique, en classe comme chez des scripteurs
plus experts, cette activité s’inscrit dans un environnement matériel et social riche.
De multiples artefacts sont mobilisés (notes, listes, carnets, brouillons, dessins,
photos, vidéos etc.) dans la phase pré-rédactionnelle comme pendant la rédaction du
texte (Bationo-Tillon, Folcher et Rabardel, 2010 ; Decortis, 2015) ; ces artefacts
permettent de construire des liens entre ces différentes phases (Bationo-Tillon,
Folcher et Rabardel, 2010). Les interactions sociales jouent également un rôle dans
l’activité de production d’écrit : en classe, les médiations de l’enseignant ou les
échanges avec les pairs participent à l’élaboration du récit, que ce soit à la génération
d’idées nouvelles, à la mise en texte (suggestion de vocabulaire adapté, etc.) ou à la
révision du texte produit (Decortis, 2015 ; Wollscheid, Sjaastad et Tømte, 2016).
L’activité d’élaboration d’un texte est donc à envisager dans une perspective
diachronique évolution de l’activité dans le temps sur un empan temporel large
comme une activité collective et multi-instrumentée.
L’écriture sur ordinateur
La variété des médiums de production, en lien avec l’essor des nouvelles technologies
au sein des milieux scolaires, invite à considérer leur impact sur l’activité de
production écrite. L’écriture mobilisant un éditeur de texte sur ordinateur a
particulièrement été investiguée.
En psychologie cognitive, plusieurs hypothèses ont été émises sur l’impact du
traitement de texte : l’utilisation du traitement de texte et du clavier permettraient de
contourner les contraintes liées au geste graphique et de libérer des ressources
cognitives pour les processus de plus haut niveau (planification et révision). De plus,
les fonctionnalités du traitement de texte (correcteur orthographique, fonctions
méta-textuelles) faciliteraient la révision des textes.
Afin de tester ces hypothèses, un ensemble d’études expérimentales comparant tâche
d’écriture de texte libre ou tâche de révision d’écrits selon les modalités papier-
crayon et traitement de texte sur ordinateur ont été réalisées auprès d’élèves à l’école
primaire ou en début d’étude secondaire(Connelly et al., 2007 ; Crinon, 2002 ;
Nicolet, Genevay et Gervaix, 1992 ; Wollscheid, Sjaastad et Tømte, 2016 pour des
synthèses). Les résultats obtenus sont contrastés :
Lors de l’écriture de textes libres, une écriture manuscrite est plus fluide et
plus rapide qu’une écriture tapuscrite quel que soit le niveau de classe ;
l’utilisation d’un éditeur de texte à un effet sur la longueur et sur la qualité
des productions variable suivant le niveau de maîtrise du geste graphique
et du clavier par les élèves ;
le traitement de texte a un impact important sur la révision de textes par les
enfants et les adolescents : ainsi, Nicolet et al. (1992) montrent qu’avec le
traitement de texte, des élèves de 12-13 ans se centrent davantage sur des
aspects formels et mécaniques (syntaxe) que sur des corrections plus
profondes (révision de l’organisation du texte).
D’autres études ont été réalisées en situation écologique. Il s’agit notamment d’études
réalisées en classe en s’appuyant sur des observations, des entretiens avec les
différents acteurs et sur l’analyse des productions (voir Zheng et al., 2016 ; Wollscheid
et al., 2016 pour des synthèses). D’après la méta-analyse réalisée par Zheng et al.
(2016), l’édition de textes apparaît comme l’un des usages les plus répandus de
l’ordinateur à l’école. Les ordinateurs peuvent être utilisés dans chaque étape de
l’activité d’écriture (recherche d’information, planification, rédaction d’un premier
jet, édition, échange sur le texte, publication). Les élèves reçoivent plus de
commentaires sur leur écriture, modifient et révisent leur texte plus souvent, et
publient ou partagent davantage leur travail avec d’autres (Warschauer, 2008 ; Zheng
et al., 2016).
Les études conduites en situation écologique mettent également en évidence des
effets positifs de l’utilisation du traitement de texte sur l’écriture numérique (voir
Wollscheid et al., 2016 pour une synthèse) : elles montrent que les élèves qui
apprennent à écrire en utilisant l’ordinateur (CP, CE1) produisent des textes plus
longs, même s’ils ne maîtrisent pas parfaitement la graphie de toutes les lettres. Il est
à noter que dans ces situations, le rôle de l’enseignant semble déterminant dans
l’utilisation de ces instruments (Wollscheid et al., 2016).
L’écriture sur tablette en classe
La tablette n’était pas initialement conçue pour remplacer l’ordinateur et être un
support à l’écriture. Néanmoins, elle a différentes propriétés qui semblent en faire un
outil adapté aux apprentissages (Melhuish et Falloon, 2010) et plus particulièrement à
l’apprentissage de la lecture (Ecalle et al., 2016) et de l’écriture. Les caractéristiques de
son interface, écran tactile et clavier numérique proche de la zone d’écriture,
facilitent son utilisation par les enfants : « pointage direct sur une icône ou sur un lien
avec le doigt, usage du multitouch, simplicité et rapidité des actions à effectuer sur la
tablette qui engagent des gestes simples, utilisés dans la vie de tous les jours » (Young
et al., 2012).
Différentes applications éducatives sont utilisées en classe dans des tâches d’écriture
(Karsenti et Fievez, 2014). Il s’agit d’éditeurs de textes (exemple : textkraft), de livres
ou des présentations (par exemple bookcreator), d’applications dédiées à la prise de
notes (par exemple evernote), à l’annotation de documents ou de dictionnaires et
autres applications dédiées à la détection des erreurs orthographiques.
Des expérimentations innovantes menées en classe sont régulièrement mises en
avant sur le web ou lors d’événements dédiés
2
. Elles reflètent la diversité des
possibilités offertes par ces artefacts : les textes numériques associent différentes
formes sémiotiques (mots, sons, images, liens hypertextes, vidéo) qui en font des
documents multimodaux ; certaines applications favorisent une écriture
collaborative ; l’utilisation au collège de réseaux sociaux tels que tweeter favorise de
nouvelles formes d’écriture et de littérature (Longhi, 2015).
2
Voir par exemple les contributions au colloque ecritech, http://www.ecritech.fr/.
Voir par exemple les témoignages présentés sur l’agence des usages des TICE
http://www.cndp.fr/agence-usages-tice/temoignages/production-d-un-livre-numerique-sur-
tablette-tactile-1247.htm.
Pourtant, les recherches réalisées sur les pratiques ordinaires d’écriture sur tablette
sont peu nombreuses. En classe, différentes utilisations des tablettes pour écrire sont
mises en évidence principalement dans l’enseignement secondaire. Selon une
enquête réalisée auprès d’enseignants et d’élèves québécois au collège (Karsenti et
Fiévez, 2013), la tablette a des effets positifs sur la production écrite : les élèves
annotent plus facilement les documents, produisent des travaux écrits de meilleure
qualité, plus créatifs et qui s’appuient sur un plus grand nombre de ressources. Elles
favorisent également l’écriture collaborative au sein d’un groupe (Burden et al., 2012 ;
Clarke et al., 2013 ; Sullivan, 2013).
À l’heure actuelle, on ne trouve pas d’enquête portant spécifiquement sur les
pratiques d’écriture sur tablette à l’école primaire. Quelques études de cas (Bernard,
Boulc’h et Arganini, 2013 ; Hutchison, Beschorner et Schmidt-Crawford, 2012 ; Walsh
et Simpson, 2013, 2014) mettent en évidence différentes utilisations de la tablette par
exemple pour annoter des documents lus en vue de faciliter leur compréhension (voir
par exemple Hutchison, Beschorner et Schmidt-Crawford, 2012) ou pour rédiger des
textes documentaires (Walsh et Simpson, 2013, 2014). La tablette est également
utilisée dans une phase pré-rédactionnelle afin de faire des recherches documentaires
ou de prendre des notes (Bernard, Boulc’h et Arganini, 2013 ; Walsh et Simpson,
2014). Ce champ de recherche reste donc à investiguer.
Présentation de la recherche
Des usages des tablettes en classe pour produire des écrits enrichis existent, mais
jusque-là, la façon dont cet artefact influe sur l’activité de production des écrits des
élèves a été peu étudiée. Aussi, nous avons choisi de réaliser deux études
exploratoires en vue de répondre aux questions suivantes :
Qu’est-ce qui caractérise l’activité de production d’écrit sur tablette à l’école
primaire ? En quoi cet instrument offre-t-il des ressources ou impose-t-il des
contraintes dans la mise en œuvre des processus en jeu dans l’activité
rédactionnelle ?
Pour y répondre, des observations ont d’abord été conduites dans le cadre du projet
ExTaTe (Experience Tablettes tactiles à l’école primaire) (Villemonteix et al., 2014) en
vue de caractériser l’activité des élèves dans différentes tâches de production d’écrit
sur tablette tactile. Puis une seconde étude a été menée en vue de documenter
l’influence de la tablette sur l’activité rédactionnelle elle-même.
Dans ces deux études, l’activité a été analysée dans une perspective diachronique en
tant qu’activité collective, située et multi-instrumentée. Cette approche s’inscrit dans
le champ de l’ergonomie orientée enfant (Decortis, 2015) qui vise à comprendre
l’activité des enfants en situation dans une perspective développementale. L’unité
d’analyse, l’activité instrumentée, comporte trois pôles : le sujet qui agit, l’objet vers
lequel l’activité est orientée et l’instrument (comprenant une composante matérielle
et un schème associé) qui assure un rôle de médiation entre le sujet et l’objet
(Rabardel, 1995). Un point de vue intrinsèque est privilégié : l’analyse ne se limite pas
à des observations du comportement, mais prend en considération le point de vue de
l’enfant sur sa propre activité. Durant cette analyse, nous avons porté une attention
particulière à l’activité rédactionnelle et aux trois processus qui la composent :
planification, mise en texte et révision.
Étude 1 : caractérisation de l’activité instrumentée de production d’écrits
enrichis
Le projet EXTATE, commandé par le ministère de l’éducation nationale, avait pour
but d’étudier les usages mis en place spontanément par les enseignants dans les
écoles primaires participant au projet, plusieurs séances observées portaient sur la
production d’écrit. La place de la tablette dans ces séances et l’activité des élèves y
ont été caractérisées.
Méthodologie
Le terrain d’étude était constitué de huit écoles primaires retenues par le ministère
réparties dans huit départements. La méthodologie consistait à observer différentes
séances instrumentées par la tablette durant 3 journées (deux jours après 1 semestre
d’utilisation des tablettes et une journée 6 mois plus tard) et à mener des focus
groups auprès des élèves.
Parmi les séances observées et enregistrées, sept portaient sur des activités de
production d’écrit en français (cf. tableau 1). Ces séances conduites dans des classes
du CP au CM2 portaient sur la production de textes (textes courts en cycle 2, textes
documentaires ou procéduraux en cycle 3, roman-photo) ; ces textes étaient
multimodaux, complétés par des images ou du son.
Tableau 1 : Séances de production d’écrit sur tablette observées et analysées.
École
Niveau
Objectif de
la séance
Logiciel
utilisé
Organisation
du travail
1
Ec 6
Zone péri-
urbaine
CP-CE1
Rédaction
d’un texte
court
Book
Creator
Individuelle
2
Ec 6
Zone péri-
urbaine
CE1
Rédaction
et partage
de texte
Evernote
Individuelle
3
Ec 2
Zone péri-
urbaine
CE1-
CE2
Réalisation
d’un
roman-
photo
Strip-
designer
Collaborative
4
Ec 2
Zone péri-
urbaine
CE2
Réalisation
d’une fiche
de lecture
Strip-
designer
Individuelle
5
Ec 8
École
rurale
CE2
Réalisation
une recette
de cuisine
Pic-
collage
Individuelle
6
Ec 8
École
rurale
CE2
Réalisation
d’un texte
documentai
re
Page
Individuelle
7
Ec 3
École
rurale
CM1-
CM2
Réalisation
d’un texte
au passé
Page,
Antidote
Individuelle
Durant les séances, l’activité des élèves sur tablette était filmée (circulation du
chercheur dans la classe en orientant la caméra sur l’écran). À partir de ces
enregistrements, une analyse de l’activité instrumentée des élèves a été réalisée.
Observations réalisées
La place attribuée à la tablette dans des séquences observées est très variable suivant
les classes (cf. tableau 1). Elle peut être utilisée dans une phase pré-rédactionnelle
pour prendre des notes ou des photos en amont de la production du texte, pour
rédiger un premier jet et le réviser ensuite, ou uniquement pour mettre en forme et
enrichir un texte préalablement rédigé sur papier en vue de le diffuser. Ces
utilisations dépendent moins du niveau de classe que des choix pédagogiques des
enseignants.
Une production multi-modale. Contrairement à une activité d’écriture papier-crayon,
avec la tablette la phase de production ne se limite pas à la rédaction du texte. Dans
les séances observées du CP au CE2, les élèves alternent la rédaction du texte avec des
activités de prises de photos ou l’enregistrement audio et l’organisation des différents
éléments du document (image, son, texte, bulles de BD). Cette organisation est
réalisée avec une plus ou moins grande facilité suivant l’ergonomie de l’application
utilisée.
Activité rédactionnelle. Dans 6 des 7 séances observées, dans la phase rédactionnelle
les élèves utilisent un éditeur de texte sur tablette, mais mobilisent aussi d’autres
ressources telles qu’un cahier de brouillon (support au recopiage), une fiche de
vocabulaire (inspiration pour rédiger le texte/vérification de l’orthographe d’un mot)
ou une image (source d’inspiration/support à la description). La tablette fait ainsi
parti d’un système de ressources plus large.
Un effet des fonctions méta-textuelles sur la révision. Une analyse plus systématique
des épisodes de révision des textes produits par des élèves de CP, CE1 et CE2 a été
réalisée à partir des vidéos. La révision a lieu en continu suite à l’apparition de
feedbacks donnés par l’éditeur de texte, principalement des suggestions de mots
apparaissant dès l’écriture de quelques lettres (fonction d’écriture prédictive). Ainsi le
mot peut être révisé avant même d’avoir été complètement écrit. Lors de l’apparition
de ces suggestions plusieurs attitudes sont observées, un même élève pouvant
adopter une ou plusieurs attitudes durant la même séance :
l’élève ne tient pas compte des suggestions,
il accepte une suggestion uniquement si elle est jugée adéquate,
il lit les suggestions, ce qui l’amène à corriger sa proposition initiale
gou » amène la suggestion « goûter » l’élève efface alors le mot pour
écrire « joue »),
il s’interrompt dans sa rédaction pour supprimer la suggestion ;
il accepte la suggestion même si elle est erronée re » (pour réveil)
devient « référence »).
Dans de nombreux cas, l’écriture prédictive semble être une source d’interférence au
cours de la production, en particulier pour les élèves de CP CE1, qui utilisent une
orthographe approchée (transcription phonème-graphème). Suite à cette première
caractérisation de l’attitude des élèves durant la révision, une analyse plus
systématique des attitudes adoptées durant la révision en fonction du profil des
élèves est nécessaire.
Ces observations ont permis un premier éclairage sur ce qui caractérise l’activité
d’écriture instrumentée. Pour mieux comprendre en quoi la tablette tactile peut
constituer une ressource ou une entrave à l’activité d’écriture, l’étude 2 se propose de
compléter ces premières données en apportant un regard sur la mise en œuvre des
processus impliqués dans l’activité rédactionnelle lorsqu’il s’agit, pour les élèves,
d’écrire sur tablette tactile.
Étude 2 : L’activité rédactionnelle dans une tâche de production d’écrit
sur tablette tactile en CE2
La présente étude vise à caractériser plus spécifiquement l’activité rédactionnelle des
élèves lors de la réalisation d’une tâche spécifique en focalisant l’analyse sur les
processus en jeu dans cette activité.
Méthode
Une situation écologique a été étudiée. Trois séances d’écriture sur tablette ainsi que
deux séances d’écriture sur papier-crayon ont été observées et/ou filmées en vue de
contraster les deux situations. Durant les séances d’écriture sur tablette, huit élèves
choisis en fonction de leur niveau de maîtrise de la tablette tactile (faible maîtrise vs.
bonne maîtrise) et de leurs compétences en écriture (bon niveau/faible niveau) ont
été filmés. Leur activité instrumentée a été analysée à partir d’observations,
d’enregistrements vidéo et d’entretiens conduits après les séances. Une séquence
d’écriture sans tablette ayant lieu à ce moment-là a également été filmée en vue de
constituer une situation de référence pour établir un contraste. Durant cette
séquence les mêmes élèves ont été filmés.
Participants
25 élèves de CE2 d’une école primaire de centre-ville de l’académie de Versailles ont
participé à l’étude (cf. tableau 2).
Tableau 2 : Caractéristiques des participants à l’étude.
Effectif
Genre
Âge moyen
Écart-type
CE 2
25
14 filles ; 11 garçons
8,6
0,48
L’enseignante en charge de la classe était expérimentée (plus de 20 ans d’ancienneté),
experte dans l’usage des TIC (ancienne référente TIC) et proposait à sa classe un
usage régulier des TIC (TNI, blog). Les tablettes étaient utilisées en classe depuis le
début du semestre, notamment pour faire de la recherche documentaire et des tâches
de production orale. Un premier texte documentaire avait également été produit
collectivement sur tablette.
Présentation des séances observées
Les séances observées ont été élaborées par l’enseignante. Elle avait prévu de
proposer plusieurs séances consacrées à la production d’exposés dans différents
domaines. Il s’agissait de séances d’écriture sur tablettes tactiles utilisant l’application
book Creator en vue de produire un document expositif présentable à la classe. Le
premier exposé portait sur les monuments romains. Il faisait suite à une séquence
d’histoire sur ce thème. La tâche proposée consistait à rechercher sur internet une
image de chaque monument préalablement étudié et à le présenter en quelques
lignes. Pour ce faire, les élèves disposaient d’un document source distribué par
l’enseignante rappelant les monuments travaillés en cours.
La seconde séance portait sur la réalisation d’un exposé sur les animaux, en
préambule d’une séquence à venir. Un magazine portant sur un animal était prêté à
chaque élève, celui-ci devait le lire à la maison avant d’élaborer un document
expositif articulant texte et image pour présenter cet animal à la classe.
Durant ces séances, la classe était équipée de 15 tablettes tactiles. La classe était
organisée en demi-groupes constitués aléatoirement par l’enseignante, chaque sous-
groupe réalisait la tâche proposée sur tablette pendant 30 minutes. La même séance
était répliquée deux fois successivement pour chaque groupe. La tâche de production
d’écrit était individuelle.
Deux séances d’écriture « papier-crayon » proposées à la même période ont par
ailleurs été observées. Ces séances faisaient suite à l’étude d’un poème de Bernard
Friot. Il s’agissait d’adapter ce poème : la structure du texte devait être conservée,
mais les personnages du texte, leurs qualités et leurs actions devaient être
personnalisées. Dans ce but, du vocabulaire était projeté au tableau par l’enseignante.
Cette séquence d’écriture s’est prolongée sur quatre à cinq séances.
Protocole
Les caractéristiques des élèves possiblement déterminantes dans l’activité ont été
documentées préalablement : (1) le niveau de familiarité avec les tablettes,
appréhendé à partir d’un questionnaire visant à rendre compte de la fréquence
d’utilisation de la tablette tactile à l’école et à la maison et de leur sentiment de
compétence dans différentes tâches ; (2) le niveau général de français indiqué par
l’enseignante en charge de la classe.
Deux séances de réalisation d’exposés ont été filmées systématiquement (cf. section
précédente). Dans chaque demi-groupe, deux élèves choisis en fonction de leur
niveau en français et de leur niveau de maîtrise de la tablette étaient filmés
successivement (15 minutes par personne), soit quatre élèves filmés durant la même
séance. Deux caméras une orientée sur l’écran de la tablette, l’autre orientée sur
l’élève enregistraient l’activité de l’élève et l’interaction avec l’interface tactile. Ces
enregistrements étaient complétés par des observations libres.
À l’issue de chaque séance, 4 à 5 élèves dont les élèves filmés participaient à un
focus group portant sur leur activité durant la séance. Les questions étaient inspirées
de la technique d’entretien d’explicitation (Vermersch, 1994). Ces entretiens visaient
à documenter le point de vue subjectif des enfants sur leur activité : compréhension
de la tâche, déroulement de l’activité, difficultés rencontrées, etc.
Analyses des données
Six des huit enregistrements vidéo étaient exploitables et ont fait l’objet d’une
analyse. Après avoir précisé les différentes actions réalisées par les enfants à partir des
entretiens, une chronique d’activité (figure 1) a été faite pour chacun. Celle-ci décrit à
la fois la façon dont s’agencent les différentes activités liées à la production du
document et le temps consacré à chacune d’elles.
L’activité rédactionnelle a ensuite fait l’objet d’une analyse plus détaillée. Les
verbatims des élèves ont apporté des éléments sur les dimensions non observables de
l’activité rédactionnelle, tandis que l’analyse des épisodes de rédaction sur tablette à
partir des vidéos a permis de documenter l’attitude des élèves vis-à-vis de l’écriture
prédictive ou du correcteur d’orthographe ainsi que le nombre et la nature des
révisions (orthographe, syntaxe, ponctuation, organisation des idées).
Résultats : analyse de l’activité des élèves
Activité pré-rédactionnelle
Tout d’abord, notons que l’activité d’élaboration de l’exposé commence avant la
séance de production d’écrit sur tablette. Le travail relatif à l’exposé sur les
monuments gallo-romains a en effet commencé lors d’une séance précédente par la
découverte de ces monuments à partir de documents et par la recherche de photos
sur le web à l’aide de la tablette. Pour le second exposé portant sur la présentation
d’un animal, l’élaboration commençait à la maison par la lecture d’un article sur
l’animal choisi. Suite à cette lecture, les entretiens ont montré que plusieurs élèves
s’étaient interrogés sur le texte qu’ils projetaient d’écrire, en vue de dégager les
éléments importants, qu’ils avaient pris des notes ou même rédigé un premier jet.
Durant la séance : une alternance entre des tâches de nature différente
Lors des séances observées, entièrement dédiées à la réalisation de l’exposé, l’activité
des élèves ne se limite pas à la rédaction de texte sur tablette. La constitution d’un
document multimodal (texte et image) les conduit à consacrer une part importante
du temps au choix et à l’insertion de photos ou à la mise en forme du document.
Cette possibilité de mise en forme est considérée par les élèves comme l’un des atouts
majeurs de la tablette : « on peut tout changer […] on peut faire tout on peut mettre les
couleurs, on peut tout décider, couleur de texte, couleur de page, on peut enregistrer
l’image, copier, coller ». Les élèves les moins à l’aise avec la tablette passent également
du temps à prendre en main l’application.
Durant la séance, l’activité est principalement individuelle, néanmoins, des
interactions sociales sont présentes : on peut observer des échanges entre pairs sur le
fonctionnement de l’application et sur la production réalisée quel que soit le niveau
de maîtrise de la tablette ou le niveau de maîtrise deu français. L’enseignante
interagit par ailleurs avec les élèves en difficulté, relit les productions de chacun et
échange avec eux en vue de réviser les erreurs éventuelles.
Le temps consacré aux différentes facettes de laproduction du document est variable
d’un élève à l’autre et peut aboutir à une activité « fragmentée » en particulier chez
les élèves ayant un faible niveau de maîtrise de la tablette. Ce contraste est rendu
visible par les chroniques d’activité (figure 1). Marie, élève qui maîtrise l’utilisation de
la tablette et qui a un bon niveau de français, accorde 60 % de son temps à écrire.
Lorsqu’elle insère une photo à son exposé, cette activité lui prend un temps limité
(1 min) puis elle s’engage dans l’activité rédactionnelle (lecture de document pour
rechercher des idées, écriture). Pour Vincent, un élève peu familier de la tablette
tactile, l’insertion d’une photo prend 3 fois plus de temps. Sa méconnaissance des
gestes à effectuer pour sélectionner une zone de texte, déplacer une image, etc. est
également source de fortes interférences entre la mise en texte, sa mise en forme et la
prise en main de la tablette. Ceci limite le temps qu’il consacre à l’activité
rédactionnelle ainsi que la longueur de sa production.
Figure 1 : Chronique d’activité de deux élèves au profil opposé quant à leur maîtrise de la
tablette.
Les élèves ayant un bon niveau de maîtrise de la tablette s’engagent dans l’activité
rédactionnelle sur de plus longues périodes sans s’interrompre.
Activité rédactionnelle
L’activité rédactionnelle en tant que telle représente en moyenne 38 % du temps total
passé à réaliser la tâche (entre 21 % et 60 % du temps de l’activité en fonction des
élèves ; cf. tableau 3).
Planification. Il est d’abord à noter que les textes produits sont très proches des
documents mis à disposition par l’enseignante tant par le vocabulaire utilisé que la
syntaxe des phrases. Ils ne contiennent pas d’idées nouvelles ; il s’agit le plus souvent
de paraphrases. La planification est donc peu sollicitée lors de cette tâche. Des temps
de pause avant l’écriture, habituellement consacrés à la recherche et à l’organiser des
idées ne sont par exemple pas observables. Par ailleurs les élèves s’expriment peu sur
l’organisation des idées dans le texte. Seule une élève indique avoir réfléchi à
l’organisation de l’exposé : « Une page pour l’alimentation, le déplacement, tout ça ».
Mise en texte. Les chroniques d’activité rendent en revanche visible des temps
consacrés à la lecture des documents avant d’écrire (cf. figure 1, chronique d’activité
de Marie). La génération du texte consiste pour eux à sélectionner des informations
dans les documents mis à disposition, puis à les recopier ou à les paraphraser.
« j’ai un texte à côté donc il fallait faire des phrases avec mais sans trop recopier le
texte […] On essaie de transformer les phrases… On prend les mots et on les met
ensemble. »
La transcription (traduction du texte sous forme graphique) a lieu via le clavier
virtuel tactile. Selon les réponses au questionnaire, 83 % des élèves de la classe
préfèrent l’utilisation du clavier virtuel à celui d’un crayon pour écrire. On note que
85 % des élèves disent se sentir à l’aise pour utiliser une tablette. Cependant, son
utilisation est perçue différemment en fonction du niveau de maîtrise de la tablette.
Dans les entretiens, une partie des élèves dit que la tablette facilite le geste de
production : « Ça va plus vite » « Ça fait moins mal au poignet », tandis que quelques-
uns expriment une gêne ou des difficultés : « c’est pas le même geste », « On
cherche les lettres », « Ça fait bizarre parce que ce n’est pas l’alphabet, c’est dans le
désordre ».
Suggestions/Révision. On note que la révision du texte produit se déroule en trois
temps. Dans un premier temps, elle a lieu au cours de l’écriture, incitée par
l’activation de la fonction d’écriture prédictive. Cette fonction affiche des suggestions,
en nombre variable (cf. tableau 3), pas toujours appropriées. Dans les situations
filmées, en moyenne 35 % de suggestions sont inappropriées, mais cette moyenne
cache des disparités importantes qui ne dépendent pas seulement du niveau de
maîtrise de la langue de l’élève (cf. tableau 3).
Tableau 3 : Utilisation des fonctions méta-textuelles lors de l’activité
rédactionnelle des élèves filmés.
Marie
Béatrice
Thomy
Vincent
Louise
Christophe3
maîtrise
tablette
+
-
+
-
+
+
niveau en
français
bon
bon
Bon
faible
faible
faible
temps consacré
à l’écriture
60 %
30 %
61 %
21 %
41 %
49 %
nb total de
suggestions
10
3
12
6
6
16
% suggestions
adéquates
60 %
100 %
17 %
50 %
50 %
19 %
% suggestions
validées
60 %
67 %
25 %
33 %
17 %
19 %
mots soulignés
(correcteur
orthographique)
1
0
1
2
1
3
changement
suite au
soulignement
1
0
0
2
1
2
Les suggestions sont parfois perçues comme gênantes et non appropriées : « ça me
dérange », « ça affiche un mot que je ne veux pas », « C’est pas le bon mot ».
Néanmoins les élèves soulignent également leur intérêt pour orthographier
correctement certains mots ou augmenter la vitesse d’écriture. Les observations
montrent que ces suggestions sont prises en compte et souvent validées (cf.
tableau 3). La recherche de l’orthographe des mots est facilitée par la présence du
document sur lequel ils s’appuient. Durant la rédaction du texte, les suggestions
peuvent apparaître en cours d’écriture de mots et conduisent parfois les élèves à
apporter des corrections dans l’instant.
Au vu des résultats obtenus, on peut émettre l’hypothèse d’une corrélation entre le
niveau de maîtrise du français et le nombre de suggestions correctes validées,
hypothèse à vérifier sur un échantillon plus large. Une autre fonction incitant la
révision, le correcteur orthographique, est supposée souligner les erreurs
orthographiques commises par les élèves. Or, le nombre d’erreurs soulignées pour
chaque élève est faible et non systématique. En effet, dans cette application,
l’orthographe grammaticale, les erreurs d’accord ou de syntaxe ne sont pas signalées.
Du point de vue des élèves, les entretiens laissent apparaître que cette fonction
n’apparaît pas essentielle. Lorsqu’on les interroge sur les aides apportées par la
tablette, ils font référence immédiatement à l’écriture prédictive mais ne citent pas
3
Prénoms modifiés.
spontanément le correcteur orthographique. Dans un second temps, une seconde
révision a eu lieu lors du passage de l’enseignante, qui indique alors différentes
révisions à faire, à la fois des révisions de surface (accords, ponctuation, ajout de
déterminants) et des révisions plus profondes telles qu’un retour sur le sens du texte.
Enfin, à l’issue de cette séance, lors d’un troisième temps de révision, une production
est présentée par l’enseignante sur le TNI à la fois comme modèle de ce qui peut être
fait et en vue de réviser collectivement la production. Les commentaires portent alors
davantage sur l’organisation du document lui-même.
Contraste avec la situation de référence
La tâche de production d’écrit sur tablette présentée dans la section précédente n’est
habituellement pas proposée aux élèves de cette classe en format papier-crayon. C’est
la présence des tablettes et de l’application book creator qui a suscité cette
proposition. Aussi la situation de référence que nous avons observée est d’une autre
nature. Il s’agit de la production d’un texte littéraire à partir d’un texte original de
Bernard Friot préalablement étudié en classe. Cette situation correspond aux
séquences de production d’écrit usuellement mises en œuvre par l’enseignante.
Dans cette séquence la tâche était très structurée par l’enseignante. Il s’agissait de
réaliser un texte analogue au texte original en choisissant des personnages différents
et d’autres caractéristiques. Le caractère humoristique du texte devait être présent.
Pour faciliter la réalisation de cette tâche, du vocabulaire dans le champ lexical du
texte était projeté au tableau. Il était demandé aux élèves de réaliser plusieurs jets du
texte. Chaque nouvelle version était corrigée et annotée par l’enseignante. La dernière
séance consistait à mettre en forme le texte à l’aide de l’iPad et de bookcreator.
L’activité rédactionnelle des élèves a été documentée à partir des observations et des
entretiens réalisés après deux séances. Le tableau 4 met en évidence les différences
observées dans l’activité des élèves entre ces deux situations.
Dans ces deux séquences, les prescriptions de l’enseignante, les ressources mises à
disposition ainsi que les médiations proposées sont de nature différente. L’activité
rédactionnelle diffère également, notamment lors de la révision des textes ; elle est
très dépendante des prescriptions. Sur papier, les élèves prennent le temps de relire la
totalité du texte, de faire des révisions de surface et d’évaluer la cohérence du texte
ainsi que l’effet produit sur le lecteur, une élève précise ainsi : « j’ai fait beaucoup de
modifications parce que c’était pas très fluide ». En revanche lors de la production
d’écrit sur tablette, ils révisent le texte au cours de son écriture (modification du mot
au cours de son écriture) mais ne prennent pas le temps de le relire ou de relire
l’ensemble de l’exposé, quel que soit leur niveau. Du point de vue du texte, ils
semblent focalisés sur l’unité mot plutôt que sur l’unité phrase ou paragraphe. Ils
accordent néanmoins une attention particulière à la mise en forme et à l’esthétique
de l’exposé.
Tableau 4 : Activité rédactionnelle dans les deux situations observées.
Production d’exposé sur
tablette
Production de texte en papier
crayon
Ressources
mises à
disposition
Texte documentaire
Texte littéraire, autre
vocabulaire, dictionnaire
Planification
Choix du thème de chaque
page de l’exposé
Recherche d’idées originales
(nouveaux personnages) à l’aide
des ressources à disposition
Organisation du texte analogue
au texte initial
Génération du
texte
Sélection d’informations
dans le texte documentaire
Transcription
Orthographe
des mots
difficiles
Clavier virtuel,
Utilisation de l’écriture
prédictive
Papier crayon
Utilisation du dictionnaire
Révision
Révision de surface de
l’unité mot dans l’instant
Pas de relecture du texte
complet
Révisions de surface
Révision du paragraphe
avec l’aide de l’enseignante
au cours de la séance
Relecture du texte à la fin du
premier jet
Attention à l’effet produit sur le
lecteur
Révisions de surface
Révisions plus profondes
(cohérence du texte) : écriture
d’un autre jet
Relecture par l’enseignante :
écriture d’un nouveau jet
Discussion
Ces deux études exploratoires mettent en évidence différentes caractéristiques de
l’activité des élèves dans des tâches de production d’écrit sur tablettes à l’école
élémentaire.
1- L’élaboration du document commence en amont de l’activité rédactionnelle sur
tablette et se poursuit ensuite, par exemple lors de son exploitation sur le TNI. De
multiples artefacts, dont la tablette, sont mobilisés tout au long de cette activité : la
tablette est donc l’un des artefacts utilisés au sein d’un système d’instruments plus
complexe. Elle ne remplace pas systématiquement l’écriture papier-crayon mais est
utilisée de façon complémentaire, notamment en vue d’élaborer et de mettre en
forme un document multimodal à partir de sources élaborées préalablement.
2- La réalisation d’un document associant texte et image conduit les élèves à alterner
des tâches de différentes natures (rédaction du texte, choix et insertion de photo,
mise en forme) et à ne consacrer qu’un temps limité à l’activité rédactionnelle. Cette
alternance, déjà observée par Walsh et Simpson (2014), est qualifiée par ces auteurs
de « matérialité dynamique » ; Selon eux, ces passages successifs d’une modalité à
l’autre (texte, image, son, vidéos) contribuent à la construction du sens des
documents élaborés. Dans les situations que nous avons étudiées, le faible niveau de
maîtrise de la tablette conduit à une alternance d’une tâche à l’autre à un rythme
rapide, ce qui interfère avec la rédaction du texte.
3- Dans la seconde étude réalisée, durant l’activité rédactionnelle, les élèves focalisent
leur attention sur la mise en texte et sur des révisions de surface (orthographe).
4- L’écriture prédictive propre aux iPad est à la fois une ressource pour la mise en
texte et une source d’interférences. Elle interrompt les élèves dans la rédaction du
mot et peut susciter un doute sur leurs connaissances orthographiques,
particulièrement chez les élèves les moins assurés en français. Elle favorise des
corrections superficielles au niveau du mot. Le correcteur orthographique du
traitement de texte (Crinon, 2002) avait déjà pour effet d’induire des révisions de
surface au cours de la production. Des effets similaires sont observés avec l’écriture
prédictive. En première analyse, celle-ci semble amplifier cet effet en focalisant
l’attention des élèves sur le mot en cours d’écriture ; cette hypothèse serait à
confirmer dans une étude comparative.
5- Dans les situations observées, les processus de planification et de révision mis en
œuvre par les élèves sont très dépendants des prescriptions, des ressources mises à
disposition et des médiations proposées par l’enseignant. Conformément au modèle
de développement de la production de textes (Berninger et Swanson, 1994), les jeunes
rédacteurs (CP au CE2) consacrent la plupart de leurs ressources à la mise en texte.
Les processus de haut niveau (planification et révision) sont en émergence et
nécessitent, pour être mis en œuvre, un étayage extérieur et explicite. La guidance
proposée par l’enseignante permet de soutenir ce travail de plus haut niveau ; la
tablette soutient dans une moindre mesure la révision en facilitant les révisions de
surface.
6- Si cette première recherche exploratoire met en évidence un ensemble de
caractéristiques de l’activité de production d’écrit sur tablette, elle comporte
néanmoins de nombreuses limites. L’effectif sur lequel les analyses ont été conduites
est faible, le nombre de séances observées est limité ; dans la seconde étude, la
situation de référence, assez différente de la séquence d’écriture sur tablette, limite la
portée des contrastes mis en évidence entre ces situations.
Ces limites nous conduisent à ce jour à être prudents quant aux conclusions faites sur
l’utilisation des tablettes tactiles en production d’écrits. Des investigations
complémentaires sont nécessaires à la fois sur l’activité des élèves et sur l’activité des
enseignants dans ces situations.
Concernant l’effet de la tablette tactile sur l’activité rédactionnelle des élèves, deux
questionnements ont émergé de ces premières observations et font l’objet de
recherches expérimentales (projet EcriTAB
4
). Tout d’abord, comme le traitement de
texte à son époque, l’utilisation des tablettes soulève des questions liées à l’utilisation
du clavier tactile. La présence du clavier numérique sur le même plan que la zone
d’écriture et son caractère tactile permettent-ils de réduire les contraintes
graphomotrices et de libérer des ressources cognitives pour des processus de plus
haut niveau impliqués dans la production de textes de qualité ?
Pour tenter de répondre à cette question, des tâches de production impliquant
différents processus (tâche graphomotrice (Abbott et Berninger, 1993), dictée,
production d’une narration) seront comparées en fonction du médium utilisé
(papier-crayon vs. tablette tactile) et du niveau scolaire des élèves (CE2, CM2). Ces
résultats pourront nous permettre de rendre compte d’un possible allégement des
ressources cognitives liées au geste graphique grâce au clavier virtuel, et d’un
éventuel effet de l’usage de la tablette sur la qualité des textes produits, ceci en
fonction du degré de maîtrise de la tablette tactile par l’enfant. Cette étude est menée
dans une perspective développementale.
Au vu des observations relatives à la révision des textes, la question de l’effet des
fonctions méta-textuelles propres aux interfaces tactiles mérite également d’être
investiguée. Une seconde étude expérimentale en cours porte sur l’effet de
l’utilisation de la tablette tactile sur la révision des textes : comment les fonctions
méta-textuelles (écriture prédictive et correcteur orthographique) sont-elles
appréhendées par les élèves en fonction de leur niveau de maîtrise de l’écriture et de
leur familiarité avec la tablette ? En quoi ces fonctions modifient-elles le processus de
révision du texte ? Une étude en cours (projet EcriTAB 2016-2017) consiste à
comparer le nombre et la nature des révisions faites lors de la production sur tablette
tactile (dictée ou production libre) lorsque l’écriture prédictive et activée ou non. Des
4
https://www.u-cergy.fr/fr/laboratoires/ema/recherche/ema---tice/projet-ecritab.html.
enregistrements de l’activité des élèves au cours de la production d’écrit pourront
permettre de caractériser l’utilisation qui en est faite en vue de déterminer dans
quelle mesure l’écriture prédictive est bénéfique, ou au contraire délétère pour la
qualité orthographique des documents écrits.
En considérant l’activité de production de texte dans une perspective diachronique, il
serait également nécessaire de mieux caractériser la place et la fonction de la tablette
dans un système d’instruments plus large mobilisé pour produire un document
numérique (Bationo-Tillon et al., 2010). De par son caractère mobile, la tablette
semble adaptée pour recueillir des traces des expériences vécues en amont de la
production, qu’en est-il réellement ? Une étude en cours consiste à étudier l’activité
d’élaboration de document écrit dans une perspective diachronique en analysant le
rôle de la tablette comme « instrument transitionnel » (Bationo-Tillon et al., 2010)
entre les environnements dans lesquels elle circule (classe, déplacements et visites en
dehors de la classe, de l’école, environnement quotidien).
Enfin, nous avons pu constater que l’activité rédactionnelle et en particulier la
planification et la révision sont très dépendantes de la structuration par l’enseignant
de la tâche de production d’écrit. Comprendre l’activité des élèves en situation passe
donc par une analyse des pratiques de production d’écrit sur tablette proposées par
les enseignants. Quels sont les documents travaillés de façon privilégiée sur tablette ?
Quels sont les avantages ou les contraintes perçues par les enseignants relatifs à
l’utilisation de ces artefacts ? Quelles sont les modalités d’organisation de
l’enseignement mises en œuvre de façon privilégiée lors de quence de production
d’écrit sur tablettes ? L’activité des enseignants au cours des séances de production
d’écrit mériterait également d’être analysée. L’introduction de ce nouvel artefact
modifie-t-il les gestes professionnels mis en œuvre par les enseignants ? Conduit-il à
mettre en œuvre de nouveaux schèmes professionnels (Gelis et Villemonteix, 2015)
adaptés aux spécificités de cette forme d’écriture ?
Ainsi, suite à cette première recherche exploratoire sur l’activité des élèves en
situation de production d’écrit sur tablettes à l’école primaire, les pistes de recherche
à investiguer sont multiples. Ces recherches sont nécessaires en vue d’accompagner
les enseignants dans la conception et la mise en œuvre d’activités de production
d’écrits instrumentées adaptées aux besoins de leurs élèves.
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Introduction of Tablet Technologies and Mathematics Teaching in Primary School: utilization of professional schemes and teachers discourses This paper deals with the introduction of touchscreen tablets in French primary schools during mathematical learning. In order to understand what is at stake from a didactical point of view, this text focuses on the teacher’s activity. It points out different utilizations of professional schemes, specific to mathematics and constructed by teachers involved in an experimentation proposed by the French Ministry of Education. Five schemes were identified from observation material. The discussion relates these schemes to teachers’ discourses in order to bring to light some factors that affect their appearance.
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This text introduces the special issue " Touch and mobile artifacts in Education." It provides context for these new technical devices with waves of introduction of technology in education, and present the current research, which tend to focus more on the phenomena of appropriation that learning issues.
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RESUME : L’utilisation des technologies informatisées dans les apprentissages scolaires et en particulier pour la lecture fait actuellement l’objet de nombreux travaux. L’objectif de cet article est de présenter des exemples d’applications sur tablettes tactiles pour aider les enfants en difficulté dans l’apprentissage de la lecture. Après en avoir décrit les bases théoriques et les principes, nous présentons trois applications qui visent à stimuler l’apprentissage du code alphabétique et du décodage. L’une est basée sur la stimulation des habiletés phonologiques, la deuxième sur l’apprentissage des lettres en insistant sur une approche multi-sensorielle et la troisième sur le traitement syllabique. La conclusion porte sur l’utilisation des tablettes dans les pratiques pédagogiques, leurs aspects ergonomiques et les conditions de leur efficacité. MOTS-CLÉS: Nouvelles technologies, supports tactiles, littéracie, aides à l’apprentissage ABSTRACT: The use of new technologies into academic learning and more specifically into reading is currently the subject of numerous works. The aim of this paper is to present examples of apps on tablets to help children with difficulties in learning to read. Having described the theoretical foundations and principles, three apps are successively presented to stimulate the alphabetic code and the decoding procedure. One is based on the stimulation of phonological skills, the second on learning letters emphasizing a multisensory approach and the third on the syllabic processing. The conclusion focuses on the use of tablets in teaching practices, their ergonomic aspects and conditions of their effectiveness. KEYWORDS: New technologies, tactile supports, literacy, training
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Over the past decade, the number of one-to-one laptop programs in schools has steadily increased. Despite the growth of such programs, there is little consensus about whether they contribute to improved educational outcomes. This article reviews 65 journal articles and 31 doctoral dissertations published from January 2001 to May 2015 to examine the effect of one-to-one laptop programs on teaching and learning in K–12 schools. A meta-analysis of 10 studies examines the impact of laptop programs on students’ academic achievement, finding significantly positive average effect sizes in English, writing, mathematics, and science. In addition, the article summarizes the impact of laptop programs on more general teaching and learning processes and perceptions as reported in these studies, again noting generally positive findings.
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As touch technologies such as phones, tablets and touch screen tables become more present within classrooms there is a need to examine the relationship between literacy and physical action, particularly non-linear reading paths. This paper presents data, that is part of an ongoing international study, to provide some insights from classroom observations of Year 5 students using iPads as well as traditional paper-based texts within their literacy lessons. This is ongoing research with a large corpus of data being analysed. We use specific examples to examine the reading and writing process for some students as they interact with the physical interface of the touch pads through the mode of gesture. Our goal was to investigate the cognitive and interactional processes that take place when the students read digital texts on a touch pad and to understand the processes used to render hybrid, multimodal ‘texts’ meaningful. We employ the concept of dynamism to interrogate the embodied iterative explorations students demonstrate through their learning, scaffolded by their teacher’s pedagogical adaptation to the potentials of the touch technology.