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Mise à jour des connaissances concernant quatre maladies délaissées en Haïti : mansonellose, tungose, lèpre, charbon

Authors:
  • Laboratoire National de Santé Publique, Haiti

Abstract and Figures

Haiti, like most limited-resources countries in the world, faces numerous neglected infectious diseases. They represent a real public health issue with lethal consequences especially in children. We are reviewing here the available literature on four neglected infectious diseases, mansonelliasis, tungiasis, leprosy and anthrax. Filariasis, due to Mansonella ozzardi, has been totally neglected since its discovery in 1920 in Haiti; it persists in coastal homes with a high prevalence in adults when an effective treatment is available. The skin lesions caused by Tunga penetrans have existed since the pre-Columbian period in Haiti. They persist in the most retreated and hard-to-reach areas where the population lives in precarious conditions and in extreme poverty. New available research data show the importance of the problem with very high prevalence rates in some rural communities far away from any healthcare center. Cases of leprosy are recently reemerging as no monitoring program has been in place since 2004. Finally, anthrax is still endemic; small epidemics resurfacing periodically in families in rural areas. Screening of people for these diseases and managing the cases are necessary to improve health and reduce morbidity and mortality in Haiti.
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SANTÉ PUBLIQUE / PUBLIC HEALTH
Mise à jour des connaissances concernant quatre maladies délaissées
en Haïti : mansonellose, tungose, lèpre, charbon
Update of knowledge on Neglected Diseases in Haiti: Mansonelliasis, Tungiasis, Leprosy,
and Anthrax
C.P. Raccurt · J. Boncy · R.M.A. Jean-Baptiste · R. Honoré · L.L. Andrecy · P. Dély · L. Mondésir · M. Chatelier ·
A. Existe · P. Adrien
Reçu le 17 septembre 2017 ; accepté le 12 décembre 2017
© Société de pathologie exotique et Lavoisier SAS 2018
Résumé Comme dans la plupart des pays pauvres de la pla-
nète, les maladies infectieuses négligées sont nombreuses en
Haïti où elles représentent un réel problème de santé publique
avec des conséquences létales, surtout pour les enfants. Nous
faisons le point des données accessibles pour quatre dentre
elles. Totalement délaissée depuis la découverte de sa pré-
sence en Haïti en 1920, la filariose due à Mansonella ozzardi
persiste en foyers côtiers avec une prévalence élevée chez les
adultes alors quun traitement efficace est disponible.
Connues depuis la période précolombienne dans lîle dHis-
paniola, les lésions cutanées dues à Tunga penetrans persis-
tent dans les régions les plus reculées et difficiles daccès où la
population vit dans des conditions précaires et dans une très
grande pauvreté. Nous rapportons les données denquêtes
récentes qui montrent limportance de cette ectoparasitose
en Haïti où les taux de prévalence sont très élevés dans cer-
taines communautés rurales isolées. Des cas de lèpre resurgis-
sent en Haïti alors quaucun programme de surveillance nest
effectif depuis 2004. Enfin, la maladie du charbon est endé-
mique dans les régions délevage où des épidémies familiales
resurgissent périodiquement en milieu rural. Le dépistage des
personnes atteintes de ces maladies et leurprise en charge sont
nécessaires pour une amélioration de la santé et une baisse de
la mortalité en Haïti.
Mots clés Maladies négligées · Mansonellose · Tungose ·
Lèpre · Charbon · Haïti
Abstract Haiti, like most limited-resources countries in the
world, faces numerous neglected infectious diseases. They
represent a real public health issue with lethal consequences
especially in children. We are reviewing here the available
literature on four neglected infectious diseases, mansonellia-
sis, tungiasis, leprosy and anthrax. Filariasis, due to Manso-
nella ozzardi, has been totally neglected since its discovery
in 1920 in Haiti; it persists in coastal homes with a high
prevalence in adults when an effective treatment is available.
The skin lesions caused by Tunga penetrans have existed
since the pre-Columbian period in Haiti. They persist in
the most retreated and hard-to-reach areas where the popu-
lation lives in precarious conditions and in extreme poverty.
New available research data show the importance of the pro-
blem with very high prevalence rates in some rural commu-
nities far away from any healthcare center. Cases of leprosy
are recently reemerging as no monitoring program has been
in place since 2004. Finally, anthrax is still endemic; small
epidemics resurfacing periodically in families in rural areas.
Screening of people for these diseases and managing the
cases are necessary to improve health and reduce morbidity
and mortality in Haiti.
Key words Neglected diseases · Mansonelliasis · Tungiasis ·
Leprosy · Anthrax · Haiti
C.P. Raccurt (*)
Département des maladies infectieuses,
Faculté des sciences de la santé, Université Quisqueya,
218 rue Jean-Paul II, Haut-Turgeau, Port-au-Prince, Haïti
e-mail : raccurt@yahoo.fr
J. Boncy · A. Existe
Laboratoire national de santé publique,
52 angle Delmas 33 et rue Charbonnières, Port-au-Prince, Haïti
R.M.A. Jean-Baptiste · L.L. Andrecy · P. Dély · L. Mondésir ·
P. Adrien
Direction dépidémiologie, de laboratoire et de recherches,
52 angle Delmas 33 et rue Charbonnières, Port-au-Prince, Haïti
R. Honoré
Ministère de la Santé publique et de la Population, 1, Angles des
rues Jacques Romain et Maïs Gaté, Delmas, Port-au-Prince, Haïti
M. Chatelier
Direction départementale de la santé de lArtibonite,
Gonaïves, Haïti
Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:17-23
DOI 10.3166/bspe-2018-0005
Introduction
La plupart des maladies tropicales sont longtemps restées
négligées, dans les pays du Sud, faute de moyens et surtout
dintérêt du fait de leur faible pathogénicité et de leur mor-
talité réduite. Récemment, lOrganisation mondiale de la
santé (OMS) a listé 17 maladies tropicales négligées comme
cibles de traitements de masse et dactions de prévention en
vue de leur élimination : des résultats spectaculaires ont été
obtenus pour certaines dentre elles [41]
En Haïti, pays le plus pauvre de lhémisphère occidental,
les maladies transmissibles sont la première cause de morbi-
dité [1,25], dont trois particulièrement délaissées puisque
lOMS ne les a même pas incluses dans sa liste (mansonel-
lose, tungose et charbon). Certaines sont des problèmes de
santé publique majeurs bien identifiés et font lobjet de pro-
grammes de lutte depuis une ou deux décennies. Cest le cas
de la filariose lymphatique due à Wuchereria bancrofti [4] et
des helminthoses intestinales transmises par le sol [8]. Ces
endémies parasitaires largement répandues en Haïti ont béné-
ficié depuis le début des années 2000 de campagnes annuelles
de traitements de masse par lalbendazole dont limpact sur la
santé des populations traitées a été clairement positif [18].
Cependant dautres maladies à transmission vectorielle
représentent en Haïti un risque sanitaire important [5]. Parmi
elles, les arboviroses sont en pleine recrudescence, comme la
dengue [34], ou dintroduction récente : Chikungunyia,
Zika, West Nile virus [14,17,27,40]. Le paludisme [10,11]
et la filariose due à Mansonella ozzardi [30,31] persistent
en Haïti. Les fièvres dues aux arbovirus et à Plasmodium
falciparum ou à Mansonella ozzardi sont généralement trai-
tées de façon empirique sans que le diagnostic étiologique
nait été formellement établi. En effet, les sérodiagnostics
des arboviroses ne sont pas disponibles, pour linstant, en
Haïti. Quant au paludisme et à la mansonellose, les compé-
tences pour en faire le diagnostic ne sont pas toujours au
rendez-vous en milieu rural où ces maladies parasitaires sont
les plus fréquentes
Trois maladies tropicales sont très négligées en Haïti : la
mansonellose, la tungose et le charbon qui ne font donc pas
partie de la liste des 17 maladies négligées. Elles en ont
néanmoins la plupart des caractéristiques, concernant des
populations pauvres, exclues et peu visibles, sans poids poli-
tique. Elles sont cause de stigmatisation, pour certaines, et
intéressent peu la recherche. Pourtant des solutions efficaces
et réalistes existent pour les trois.
La mansonellose, filariose peu pathogène due à M. ozzardi,
est totalement ignorée des autorités sanitaires bien que sa pré-
valence élevée dans certains foyers et son impact aient fait
lobjet de dix années détudes en Haïti [28].
La tungose, dermatose due à la pénétration de Tunga
penetrans dans le derme, est fréquente dans des communau-
tés rurales reculées et enclavées. Des enquêtes récentes ont
montré que cette ectoparasitose affecte une forte proportion
des habitants qui y vivent dans des conditions de pauvreté
extrême et dinsalubrité [15,20].
Bien quen forte régression dans le monde entier au cours
de la dernière décennie, la lèpre semble être en recrudes-
cence en Haïti depuis la disparition du Père Ollivier
en 2004 qui avait mis en place un programme de dépistage
et de lutte aux Gonaïves et dans lArtibonite. La situation
actuelle est mal connue, mais cette maladie fait partie des
17 maladies tropicales négligées contre lesquelles lOMS
recommande une action ciblée.
Quant au charbon, il persiste en Haïti atteignant égale-
ment les enfants [16]. Cette enzootie est mal évaluée et la
vaccination du bétail est faite en fonction des ressources
financières disponibles.
Dans cet article, nous analysons les données disponibles
concernant la situation actuelle de ces quatre maladies tropi-
cales négligées évitables, dans le but dattirer lattention des
autorités sanitaires et des bailleurs de fonds. Il est en effet
nécessaire de pouvoir dépister les malades atteints de ces
maladies parasitaires ou bactériennes grâce à la disponibilité
de moyens diagnostiques performants pour assurer leur prise
en charge avec des traitements spécifiques adaptés.
Méthodologie
Cette analyse a été réalisée en consultant la banque de don-
nées PubMed de lUS National Library of Medicine, Natio-
nal Institutes of Health : pour Mansonelliasis/Haiti, on
trouve 13 articles scientifiques, trois pour Tungiasis/Haiti,
16 pour Leprosy/Haiti et 11 pour Anthrax/Haiti.
À ces articles sajoutent des informations trouvées sur
Internet concernant chacune de ces maladies en Haïti et des
données denquêtes menées dans ce pays mais non publiées.
La mansonellose en Haïti
Cette filariose due à Mansonella ozzardi, exclusivement
néotropicale, est répandue en petits foyers sur le continent
américain du sud du Mexique au nord de lArgentine et dans
certaines îles de la Caraïbe [19,28]. Cette filaire strictement
néotropicale vit à létat adulte chez lhomme dans la cavité
abdominale et dans le mésentère. Les microfilaires sont
retrouvées dans le sang capillaire aussi bien de jour que de
nuit, mais aussi dans le derme. Elles poursuivent leur déve-
loppement chez deux types de diptères nématocères hémato-
phages : les simulies dans le bassin amazonien, et les culi-
coïdes dans la Caraïbe, au Mexique et en Amérique du Sud
[19] Les sujets porteurs de microfilaires présentent souvent
une forte éosinophilie, des réactions de type allergique,
18 Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:17-23
souffrent de prurit, de douleurs osseuses et articulaires, de
paresthésies, de céphalées, daccès fébriles [23]. Récem-
ment, des lésions oculaires ont été rapportées au Brésil chez
des sujets porteurs de microfilaires M. ozzardi [9,12,39]. Elle
a été signalée pour la première fois en Haïti par la mission
Rockefeller en 1920 [29], mais sa présence a ensuite été
rapidement oubliée. Ce nest que 54 ans plus tard, en 1974,
que sa présence a été « redécouverte » en Haïti sur des gout-
tes épaisses prélevées dans le cadre du contrôle du paludisme
[33]. Mansonella ozzardi se maintient en Haïti jusquà nos
jours dans de petits foyers côtiers. Les deux principaux
foyers sont situés dans le nord (entre Port-de-Paix et Cap
haïtien et le long de la vallée de la rivière du Limbé) et dans
le sud où de nombreux cas se concentrent le long de la côte
entre Jérémie et Petit-Trou-de-Nippes, incluant la presquîle
des Baradères et les îles Cayemittes. De petits foyers plus
circonscrits existent à Cabaret, Gressier et Léogane, au fond
du golfe de la Gonâve, autour de Miragoane et sur la côte des
Nippes, depuis Petit-Goâve jusquà Anse-à-Veau, autour de
Saint-Louis-du-Sud, sur le pourtour de lîle de la Gonâve, et
enfin sur lîle à Vache. Les foyers connus dHaïti sont repor-
tés sur la carte de la figure 1.
Une première étude épidémiologique réalisée en 1978 à
Bayeux, village de pêcheurs situé à proximité de la man-
grove sur la côte nord dHaïti, à louest du Cap haïtien, avait
montré une prévalence de 16 % chez les 1 165 villageois
examinés [32]. Une nouvelle enquête communautaire, réali-
sée en 2013 auprès de 462 habitants de Corail et de ses envi-
rons, sur la côte septentrionale de la presquîle sud-ouest,
entre Pestel et Jérémie, a montré une prévalence identique
(16,5 %) et, comme à Bayeux, une atteinte prédominante des
adultes [31]. À Bayeux, les sujets porteurs de microfilaires
M. ozzardi présentaient une éosinophilie élevée, des épiso-
des fébriles à répétition, et souffraient de céphalées, de dou-
leurs diffuses, et surtout de démangeaisons chroniques fré-
quentes [23].
Cette filariose signalée en Haïti depuis presque un siècle,
oubliée, puis redécouverte est restée complètement négligée
par les autorités sanitaires, alors que le traitement par iver-
mectine a donné dexcellents résultats tant à la Trinité (Tri-
nidad) [7,13] que dans le bassin amazonien [3]. Étant donné
la bonne efficacité de ce traitement, il serait temps que les
porteurs de microfilaires soient systématiquement dépistés
dans les foyers répertoriés, et traités par ivermectine, surtout
dans les régions marécageuses colonisées par la mangrove
où prolifèrent ses deux principaux vecteurs en Haïti : Culi-
coides furens [21] et C. barbosai [22].
La tungose en Haïti
Cette ectoparasitose due à Tunga penetrans, une puce ayant
comme réservoir les porcs et/ou des chiens, qui se développe
dans les sols secs et sablonneux en région tropicale, est
Fig. 1 Répartition des foyers de mansonellose en Haïti. Chaque point représente un cas / Distribution of mansonelliasis foci in Haiti.
Each dot is a case [33]
Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:17-23 19
endémique depuis toujours en Haïti. Lors de son premier
voyage en 1492, Christophe Colomb en débarquant à Hispa-
niola, lactuelle Haïti, remarqua chez les Indiens des lésions
caractéristiques provoquées par la pénétration sous la peau
des puces femelles fécondées, notamment au niveau de la
plante des pieds et des orteils, provoquant des lésions
connues sous le nom de chiques [37]. Cette affection est
fréquente chez les personnes marchant pieds nus, en parti-
culier les enfants. La chique se localise, dans la majorité des
cas, au niveau des pieds et essentiellement au niveau du sil-
lon péri-unguéal ou sous-unguéal ou au niveau des plis inter-
digitaux. Cette lésion est généralement très douloureuse pou-
vant entraîner une gêne à la marche, surtout en cas de
surinfection. Elle peut être une porte dentrée pour le tétanos,
complication dramatique en labsence de vaccination. Les
cas compliqués se présentent avec une hyperkératose et
une surinfection (pustules, ulcérations, nécroses), puis lap-
parition de lymphangite, dadénites, enfin une atteinte géné-
rale avec septicémie pouvant entraîner la mort.
De récentes enquêtes menées au cours de la dernière
décennie en Haïti ont montré la persistance de cette ectopa-
rasitose dans des foyers ruraux daccès difficile et très encla-
vés, situés à plusieurs heures de marche du premier centre
de santé. Une enquête menée dans le Plateau central en 2005
auprès de la population [15] a montré que, sur 177 patients,
132 étaient atteints de tungose, soit 74,6 % : 85 étaient de
sexe masculin (64,4 %), 47 de sexe féminin (35,6 %), et
23 étaient des enfants (17,4 %). Chez 45 patients, les lésions
étaient surinfectées (34,1 %). Une deuxième enquête a été
menée en mai-juillet 2009 dans quatre communautés rura-
les : deux situées dans le département de louest Belle
Fontaine (commune rurale de Croix-des-Bouquets) et Vallue
(commune rurale de Petit-Goâve) et deux situées dans le
département du Centre Cerca Carvajal près de la frontière
dominicaine (arrondissement de Hinche) et Savanette
(arrondissement de Lascahobas) [20]. Sur 383 personnes,
119 présentaient des lésions caractéristiques, soit une préva-
lence de 31,1 %. Cependant, la prévalence variait considéra-
blement dune communauté à lautre, passant de 10,6 % à
81,8 % ! Dans ces quatre communautés, les enfants âgés de
1 à 10 ans représentaient le groupe le plus infecté : 44, soit
37 % des cas dépistés. Comme le montre le tableau 1, la
population de sexe féminin était la plus touchée (58 %),
mais cette différence nest pas statistiquement significative.
Une troisième enquête a été menée en mars 2014 à Médor
(6
e
section communale de Petite Rivière de lArtibonite),
dans lArtibonite, où 1 125 cas de tungose dont 127 décès
probablement dus à des surinfections avaient été dénombrés
entre 2007 et 2014. Selon les soignants de la zone, cette
ectoparasitose est présente dans presque toutes les localités
de Médor (Marinette, Morne Georges, Haut Platon, Nan
Fachèt, Sigala, Binot, Kaplesi, Zoranje et Vye Zoranje,
Maugé, Bwajou) et atteint aussi bien les enfants que les
adultes. Les habitants de cette zone rurale marchent le plus
souvent pieds nus. Lenquête menée en 2014 dans cette
même zone rurale de lArtibonite a recensé 178 patients
atteints de tungose. Ils se répartissaient en 78 de sexe mas-
culin (44 %) et 100 de sexe féminin (56 %), et en 64 enfants
âgés de moins de 13 ans (36 %). Comme le montre la
figure 2, sur 29 localités de provenance des cas recensés
au cours de lenquête, quatre concentraient 69,2 % des cas :
Capsin (51 cas), Zorange (30 cas), Simonnette (27 cas) et
Maurant (15 cas).
Ces données montrent la persistance de la tungose en
Haïti dans des communautés rurales isolées et daccès diffi-
cile où les habitants vivent dans une très grande pauvreté et
dans de mauvaises conditions dhygiène, dans de petites
maisonnettes au sol en terre battue, et marchent le plus sou-
vent pieds nus. Des prévalences très élevées ont été obser-
vées dans certaines communautés. Les enfants représentent
environ un tiers des cas. Comme il est habituel, la très grande
majorité des lésions siègent au niveau des pieds et sont surin-
fectées dans la moitié des cas. Cette ectoparasitose invali-
dante provoque une gêne à la marche. En Haïti, les gens
atteints sont stigmatisés et répugnent à se rendre dans des
centres de santé qui sont souvent situés à plusieurs heures
de marche. Une prise en charge de ces cas est pourtant néces-
saire : formation dagents de santé dans les régions touchées
allant au contact des patients pour les dépister et les soigner,
information des personnels de santé et conscientisation des
populations concernées, désinfection des sols des maisons et
de lenvironnement péri-domiciliaire et traitement des ani-
maux domestiques atteints, notamment les chiens, distribu-
tion de chaussures pour protéger les habitants de linfection,
enfin campagnes de vaccination antitétanique dans les zones
les plus touchées, etc.
Tableau 1 Répartition selon le sexe des cas de tungose dans quatre communautés haïtiennes / Distribution according to sex of tungia-
sis cases in four Haitian communities [17].
Belle Fontaine Cerca Carvajal Savanette Vallue Total
Sexe masculin 10 11 23 6 50
Sexe féminin 9 25 25 10 69
Total 19 36 48 16 119
20 Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:17-23
La lèpre en Haïti
La lèpre, ou maladie de Hansen, causée par Mycobacterium
leprae, est connue depuis la plus haute Antiquité. Le bacille
se multiplie très lentement dans lorganisme humain : la
période dincubation de la maladie est denviron cinq ans.
Les symptômes peuvent napparaître quau bout de 20 ans.
Cette mycobactérie se développe dans la peau, les nerfs péri-
phériques, les muqueuses des voies respiratoires supérieures
et les yeux. La lèpre nest pas très contagieuse. Elle est trans-
mise par des gouttelettes dorigine buccale ou nasale, lors de
contacts étroits et répétés avec un sujet infecté et non traité.
Selon lOMS, lélimination de la lèpre à léchelle planétaire
a été atteinte en 2 000 lorsque le taux de prévalence mondial
a été inférieur à 1 cas pour 10 000 personnes. La polychimio-
thérapie a permis de guérir près de 16 millions de patients au
cours des 20 dernières années : le taux de prévalence de la
maladie a baissé de 99 %, passant de 21,1 cas pour
10 000 habitants en 1983 à 0,24 cas pour 10 000 habitants
en 2014. Aujourdhui, à lexception de quelques petits pays
(dont Haïti), la lèpre est considérée éliminée par lOMS.
La situation actuelle de la lèpre en Haïti est mal connue.
Les données sont anciennes : de 1977 à 1999, un plus grand
nombre de cas de formes paucibacillaires que de formes
multibacillaires avaient été enregistrés (Tableau 2) [6]. Or,
entre 2000 et 2004, le département de lArtibonite avait
atteint le seuil délimination avec moins dun cas pour
10 000 habitants. Depuis la mort du Père Ollivier en 2004,
le dépistage systématique ne se fait plus dans ce départe-
ment. Dans le département de lOuest, la destruction par-
tielle du centre de référence de la lèpre, lhôpital Cardinal
Léger, à Léogane, lors du tremblement de terre du 12 janvier
2010, a freiné les activités. En 2012, sur 242 patients hospi-
talisés dans les locaux restaurés, un tiers était des lépreux et
seulement six interventions chirurgicales ont concerné des
lépreux sur les 100 réalisées. Actuellement, de nouveaux
cas continuent à se manifester. En juin 2014, sur 100 patients
vus à la clinique de dermatologie des Gonaïves, 21 cas sus-
pects dont 19 se sont révélés positifs ont été dépistés (don-
nées non publiées) ! Une jeune fille âgée de 16 ans a été vue
à Petit Goâve en juillet 2015 [36]. Le type de lèpre des
19 patients des Gonaïves et de la jeune fille de Petit Goâve
na pas été précisé. Or, les antibiotiques contre la lèpre ne
sont plus disponibles, en Haïti, et aucun système de surveil-
lance ni denregistrement des nouveaux cas nexiste à notre
connaissanceUne remise à lhonneur de cette maladie
négligée simpose : la mise en place dun programme de
formation des personnels de santé au dépistage de la lèpre,
de surveillance effective et de traitement des cas dépistés est
une nécessité en vue de lélimination de cette maladie dans le
pays, à linstar de ce qui a été obtenu dans la plupart des
autres pays dans le Monde.
La maladie du charbon en Haïti
La maladie du charbon, également appelée fièvre charbon-
neuse, est une anthropozoonose due à Bacillus anthracis, qui
atteint les herbivores, et accessoirement les humains.
Lhomme est contaminé le plus souvent suite à la manipula-
tion de la viande dun animal mort du charbon. Cette mala-
die se manifeste généralement sous la forme cutanée : appa-
rition dune plaie noirâtre sur la peau, inflammation et fièvre
et se guérit facilement. On peut aussi contracter la forme
digestive en ingérant une viande contaminée, surtout si
celle-ci est mal cuite. Ce sont des cas beaucoup moins fré-
quents. Il existe aussi la forme respiratoire, beaucoup plus
dangereuse et souvent fatale, et dautres formes graves,
comme une atteinte oculaire pouvant entraîner la cécité.
En Haïti, la maladie du charbon sévit depuis longtemps
[24] et a gagné du terrain ces dernières années. Confinée au
nord et au sud jusquen 1986, elle est devenue endémique
dans tout le pays [35], notamment dans lArtibonite [38] où
sa fréquence a été multipliée par 17 en dix ans, entre 1992 et
Fig. 2 Répartition géographique des 178 cas de tungose vus
dans les communautés rurales de Médor dans lArtibonite en mars
2014 / Geographical distribution of the 178 cases of tungiasis
cases identified in the Médor rural communities (Artibonite)
in March 2014
Tableau 2 Incidence de la lèpre en Haïti de 1977 à 1999 / Inci-
dence of leprosy in Haïti from 1977 to 1999 [6].
Âge Formes
multibacillaires
Formes
paucibacillaires
Tota l
< 15 ans 85 412 497
15 ans 357 1 306 1 663
0-65 ans 442 1 718 2 160
Bull. Soc. Pathol. Exot. (2018) 111:17-23 21
2002 [26]. Chaque année, dans les années 2000, des centai-
nes de têtes de bétail en mouraient, entraînant des pertes
économiques pour les communautés paysannes.
Aujourdhui, grâce aux efforts conjugués du ministère de
lAgriculture et des Ressources naturelles, des Organisations
internationales (ex. FAO), des Organisations non gouverne-
mentales (ex. Vétérimed) et des éleveurs-paysans, le charbon
est en nette régression. Cependant, de janvier 2012 à avril
2013, 6 cas de charbon ophtalmique ont été soignés au Cen-
tre ophtalmologique Brenda des Cayes, dans le sud du pays,
sans que lon ait des précisions sur lorigine géographique
des cas, et en 2014, des cas humains ont été rapportés dans
différentes localités notamment à Corail, 8
e
section commu-
nale de Petit-Goâve, où six bœufs sont morts du charbon et
neuf personnes ont contracté la maladie, selon les paysans de
la régionUn cas récent de charbon ophtalmique en Haïti
vient dêtre publié [42]. La vaccination du bétail coordonnée
par lONG Vétérimed a donné des résultats prometteurs quil
faut renforcer pour arriver à léradication de cette maladie en
Haïti dans un avenir prochain.
Recommandations
En Haïti, comme dans dautres pays dAmérique latine et
des Caraïbes, les maladies infectieuses négligées persistent
et affectent principalement des populations isolées qui vivent
dans des conditions socio-économiques de très grande pau-
vreté [2]. On prête très peu dattention à ces maladies qui ne
sont pas considérées comme des priorités politiques. Or qua-
tre dentre elles pourraient être relativement facilement
contrôlées, si la volonté politique et les moyens financiers
étaient au rendez-vous.
La filariose due à M. ozzardi, limitée à des foyers circon-
scrits le long des côtes haïtiennes, pourrait être éliminée en
traitant systématiquement par ivermectine les habitants por-
teurs de microfilaires, comme cela a été fait à la Trinité
[7,13]. Il importe donc de procéder à des dépistages systé-
matiques dans les foyers côtiers.
La tungose devrait régresser par la mise en place dans les
foyers connus déquipes formées au traitement sur place
des populations atteintes, à la désinfection des sols des habi-
tations contaminées, au dépistage et au traitement dans les
villages concernés des chiens et des animaux domestiques
porteurs de puces-chiques. Une distribution gratuite de
chaussures aux populations les plus démunies, comme cela
a été fait dans un passé récent, serait un complément utile
pour lutter contre la tungose en Haïti.
Pour la lèpre, la reprise du dépistage systématique des
nouveaux cas, notamment dans les écoles, sur lensemble
du territoire est une nécessité en vue de leur traitement avant
lapparition des complications.
Enfin, pour la maladie du charbon, la poursuite de la vac-
cination des animaux, la conscientisation des éleveurs-
paysans sur les risques sanitaires liés à la manipulation de
viandes contaminées, le renforcement des contrôles sanitai-
res des viandes dans les abattoirs et sur les marchés, le dépis-
tage et le traitement des cas humains dans les zones déle-
vage sont autant dactions à promouvoir ou à renforcer et à
réglementer en vue déliminer progressivement le charbon
dHaïti.
Ces mesures de bon sens ne nécessitent pas des moyens
financiers considérables. Elles dépendent avant tout dune
volonté politique et dune détermination des acteurs de la
santé en Haïti.
Liens dintérêt Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens
dintérêt.
Références
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bal health, and infectious disease: lessons from Haiti and
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Analysis of the anthrax incidence in the Russian Federation over the period of 2009–2018 showed that the infections among the population were recorded in 14 regions of 6 Federal Districts. 23 anthrax outbreaks among people were revealed, where 90 people got sick with 3 lethal outcomes. In comparison to the previous ten-year period (1999–2008), the number of cases of the disease was reduced by 1.6 times. Three cases of cutaneous anthrax were registered in two constituent entities of the Russian Federation in 2018 – the Republic of Dagestan (1) and the Republic of Tyva (2). Outbreaks of infection among livestock animals and people were recorded in such neighboring states as Georgia, Kazakhstan, China, Kyrgyzstan, and Ukraine. Epizootiological and epidemiological instability as regards anthrax was observed in several countries of Asia and Africa. Human infection occurred as a result of contact with sick and dead animals in the process of slaughter and cutting of carcasses, consuming infected meat. Anthrax morbidity rates among animals and people in the Russian Federation in 2019 will depend on the comprehensiveness of implementation of the plans for anthrax prevention, and in case those plans will be realized at the maximum scale incidence will be limited to single cases.
Article
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Though plans to eliminate malaria from the island of Hispaniola have recently received much attention, arbovirus surveillance continues to be largely neglected in Haiti. To support surveillance efforts and encourage vector-control strategies, a cross-sectional study of dengue virus (DENV) and West Nile virus (WNV) transmission was conducted using standard seroepidemiological methods. Blood samples (N = 673) were collected from 278 males and 395 females from three locations in the Ouest and Sud-Est Departments of Haiti. Serum was separated and tested for the presence of anti-DENV and anti-WNV immunoglobulin G (IgG) antibodies using an indirect enzyme-linked immunosorbent assay (ELISA). Anti-DENV IgG antibodies were detected in 72.1% (95% confidence interval [CI] = 68.7, 75.5) of the sample population; with no significant differences in seroprevalence by study location, participant gender, or age group (P > 0.1, in all tests). Anti-WNV IgG antibodies were detected in only 1% (95% CI = 0.3, 1.8) of the sample population, all which originated from participants located in Gressier. The high prevalence of anti-DENV IgG antibodies among all age groups, including those in the youngest age group (2–5 years of age), suggests hyperendemic transmission of DENV in the Ouest and Sud-Est Departments of Haiti. In contrast, the relative absence of anti-WNV IgG antibodies, even among older population members, further supports the notion that WNV transmission in this population is largely absent. These findings highlight the large burden of disease from DENV and the need for enhanced arbovirus surveillance and implementation of vector control strategies throughout Haiti.
Article
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Objective To differentiate exposure to the newly introduced chikungunya virus from exposure to endemic dengue virus and other pathogens in Haiti. Methods We used a multiplex bead assay to detect immunoglobulin G (IgG) responses to a recombinant chikungunya virus antigen, two dengue virus-like particles and three recombinant Plasmodium falciparum antigens. Most (217) of the blood samples investigated were collected longitudinally, from each of 61 children, between 2011 and 2014 but another 127 were collected from a cross-sectional sample of children in 2014. Findings Of the samples from the longitudinal cohort, none of the 153 collected between 2011 and 2013 but 78.7% (48/61) of those collected in 2014 were positive for IgG responses to the chikungunya virus antigen. In the cross-sectional sample, such responses were detected in 96 (75.6%) of the children and occurred at similar prevalence across all age groups. In the same sample, responses to malarial antigen were only detected in eight children (6.3%) but the prevalence of IgG responses to dengue virus antigens was 60.6% (77/127) overall and increased steadily with age. Spatial analysis indicated that the prevalence of IgG responses to the chikungunya virus and one of the dengue virus-like particles decreased as the sampling site moved away from the city of Léogâne and towards the ocean. Conclusion Serological evidence indicates that there had been a rapid and intense dissemination of chikungunya virus in Haiti. The multiplex bead assay appears to be an appropriate serological platform to monitor the seroprevalence of multiple pathogens simultaneously.
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Lymphatic filariasis (LF) and soil-transmitted helminths (STH) have been targeted since 2000 in Haiti, with a strong mass drug administration (MDA) program led by the Ministry of Public Health and Population and its collaborating international partners. By 2012, Haiti’s neglected tropical disease (NTD) program had reached full national scale, and with such consistently good epidemiological coverage that it is now able to stop treatment for LF throughout almost all of the country. Essential to this success have been in the detail of how MDAs were implemented. These key programmatic elements included ensuring strong community awareness through an evidence-based, multi-channel communication and education campaign facilitated by voluntary drug distributors; strengthening community trust of the drug distributors by ensuring that respected community members were recruited and received appropriate training, supervision, identification, and motivation; enforcing a “directly observed treatment” strategy; providing easy access to treatment though numerous distribution posts and a strong drug supply chain; and ensuring quality data collection that was used to guide and inform MDA strategies. The evidence that these strategies were effective lies in both the high treatment coverage obtained– 100% geographical coverage reached in 2012, with almost all districts consistently achieving well above the epidemiological coverage targets of 65% for LF and 75% for STH—and the significant reduction in burden of infection– 45 communes having reached the target threshold for stopping treatment for LF. By taking advantage of sustained international financial and technical support, especially during the past eight years, Haiti’s very successful MDA campaign resulted in steady progress toward LF elimination and development of a strong foundation for ongoing STH control. These efforts, as described, have not only helped establish the global portfolio of “best practices” for NTD control but also are poised to help solve two of the most important future NTD challenges—how to maintain control of STH infections after the community-based LF “treatment platform” ceases and how to ensure appropriate morbidity management for patients currently suffering from lymphatic filarial disease.
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Background: Zika virus (ZIKV), first isolated in Uganda in 1947, is currently spreading rapidly through South America and the Caribbean. In Brazil, infection has been linked with microcephaly and other serious complications, leading to declaration of a public health emergency of international concern; however, there currently are only limited data on the virus (and its possible sources and manifestations) in the Caribbean. Methods: From May, 2014-February, 2015, in conjunction with studies of chikungunya (CHIKV) and dengue (DENV) virus infections, blood samples were collected from children in the Gressier/Leogane region of Haiti who presented to a school clinic with undifferentiated febrile illness. Samples were initially screened by RT-PCR for CHIKV and DENV, with samples negative in these assays further screened by viral culture. Findings: Of 177 samples screened, three were positive for ZIKV, confirmed by viral sequencing; DENV-1 was also identified in culture from one of the three positive case patients. Patients were from two different schools and 3 different towns, with all three cases occurring within a single week, consistent with the occurrence of an outbreak in the region. Phylogenetic analysis of known full genome viral sequences demonstrated a close relationship with ZIKV from Brazil; additional analysis of the NS5 gene, for which more sequences are currently available, showed the Haitian strains clustering within a monophyletic clade distinct from Brazilian, Puerto Rican and Guatemalan sequences, with all part of a larger clade including isolates from Easter Island. Phylogeography also clarified that at least three major African sub-lineages exist, and confirmed that the South American epidemic is most likely to have originated from an initial ZIKV introduction from French Polynesia into Easter Island, and then to the remainder of the Americas. Conclusions: ZIKV epidemics in South America, as well as in Africa, show complex dissemination patterns. The virus appears to have been circulating in Haiti prior to the first reported cases in Brazil. Factors contributing to transmission and the possible linkage of this early Haitian outbreak with microcephaly remain to be determined.
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Background: Public health measures are poised for transition from malaria control to malaria elimination on the island of Hispaniola. Assessment of the reservoir of asymptomatic infections from which acute malaria cases may derive is critical to plan and evaluate elimination efforts. Current field technology is ill suited for detecting submicroscopic infections, thus highly sensitive survey methods capable of detecting virtually all infections are needed. In this study the prevalence of infection with Plasmodium falciparum was determined in patients seeking medical care primarily for non-febrile conditions in six departments in Haiti using a newly designed qRT-PCR-based assay. Methods: Three different methods of parasite detection were compared to assess their utility in approximating the prevalence of P. falciparum infections in the population: malaria rapid diagnostic test (RDT) designed to detect histidinerich protein 2 (HRP2), thick smear microscopy, and a quantitative reverse transcription polymerase chain reaction (qRTPCR) assay based upon the small sub-unit ribosomal RNA. The limit of detection of the qRT-PCR assay utilized was 0.0003 parasite/μL of blood. Venous blood was obtained from a total of 563 subjects from six departments in Haiti, all of whom were seeking medical attention without complaints consistent with malaria. Each subject was questioned for knowledge and behaviour using demographic and epidemiological survey to identify risk factors for disease transmission. Results: Among the 563 samples tested, ten and 16 were found positive for malaria by RDT and microscopy, respectively. Using the qRT-PCR test to assess the infection status of these subjects, an additional 92 were identified for a total of 108. Based upon the qRT-PCR assay results, a wide variation in prevalence of infection in asymptomatic subjects was seen between geographic locations ranging from 4–41 %. The prevalence of infection was highest in the Grand Anse, Nord and Sud-Est Departments, and demographic data from questionnaires provide evidence for focal disease transmission. Conclusions: The qRT-PCR assay is sufficiently sensitive to identify an unexpectedly large number of asymptomatic, submicroscopic infections. Identifying and clearing these infections presents a significant challenge to both control and elimination efforts, but the qRT-PCR assay offers a reliable method to identify them. Keywords: Malaria, Haiti, qRT-PCR, Diagnostic tools, Plasmodium falciparum, RDT
Article
Special Operations Forces (SOF) medical personnel function worldwide in environments where endemic anthrax (caused by Bacillus anthracis infection) may present in one of three forms: cutaneous, pulmonary, or gastrointestinal. This report presents a rare periocular anthrax case from Haiti to emphasize the need for heightened diagnostic suspicion of unusual lesions likely to be encountered in SOF theaters. 2016.
Article
Zika virus and Dengue virus serotype 2 were isolated from a patient with travel to Haiti who developed fever, rash, arthralgias and conjunctivitis. The infecting ZIKV was related to Venezuelan and Brazilian strains but evolved along a lineage originating from strains isolated in 2014 in the same region of Haiti.
Article
Haiti lies on the western third of the island of Hispaniola in the Caribbean, and is one of the poorest nations in the Western hemisphere. Haiti attracts a lot of medical attention and support due to severe natural disasters followed by disastrous health consequences. Vector-borne infections are still prevalent there with some unique aspects comparing it to Latin American countries and other Caribbean islands. Although vector-borne viral diseases such as dengue and recently chikungunya can be found in many of the Caribbean islands, including Haiti, there is an apparent distinction of the vector-borne parasitic diseases. Contrary to neighboring Carribbean islands, Haiti is highly endemic for malaria, lymphatic filariasis and mansonellosis. Affected by repeat natural disasters, poverty and lack of adequate infrastructure, control of transmission within Haiti and prevention of dissemination of vector-borne pathogens to other regions is challenging. In this review we summarize some aspects concerning diseases caused by vector-borne pathogens in Haiti. Copyright © 2015 Elsevier Ltd. All rights reserved.