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Annales des Sciences et des Sciences Appliquées, UOB, 4 (N° 3/4), Juillet 2018
Annales des Sciences et des Sciences Appliquées, Vol. 4(3/4, juillet 2018), 129-167
Savoirs traditionnels conciliés aux connaissances
scientifiques comme nouveau paradigme de la conservation des
Aires Protégées : cas de Malambo (Réserve Naturelle d’Itombwe,
RD Congo).
Mubalama Kakira1,3
Ã
, Igunzi Alonda ², Banswe Tshibangu 3,
Asesa Lusambya² & Kavusa Kambale3
1 Département de l’Environnement et Développement Durable, Institut Supérieur de
Développement Rural-Bukavu, B.P. 2849 Bukavu, RD Congo.
2 Réserve Naturelle d’Itombwe, Institut Congolais pour la Conservation de la Nature, 852
Bukavu, RD Congo.
3 Programme de Conservation Itombwe, World Wide Fund for Nature, RD Congo.
Manuscrit reçu le 25 Mai 2018; texte révisé reçu le 29 Juin 2018; accepté 13 Août 2018
Abstract
Traditional knowledge reconciled with the scientific knowledge as a new paradigm of the
conservation of protected areas: The Itombwe Natural Reserve Malambo case study, DR
Congo
The relevant question of the protection of the traditional knowledge of the
indigenous people is at the crossing cutting edge of several big challenges to which
has been confronted the international community for about thirty years. The
fundamental challenge is as follows: how traditional knowledge, innovations and
practices as regard to biodiversity can be perpetuated in a world in increasing
interbreeding, and up to what point can be used and developed by the modern
scientific knowledge? This work revealed that the management of the “Malambo”
was basically built upon the traditional values which had allowed the local
à Corresponding author : Lmubalamak@gmail.com
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community to adapt so much to the point that some of them remained almost intact
as a result of customary implementation. The respect of the tradition associated
values and fear with violation of their crowned nature thus constituted the base of
their protection against the anthropogenic threats and activities. Consequently, they
still show regular wildlife occurrence in these days. The status of keystone species
like Cercopithecus ascanius; Pan troglodytes schweinfurthii, and the Gorilla beringei graueri
with high occurrence rates recorded within visited Malambo is obvious. This being
said, the Malambo known as relics of the biodiversity in the Itombwe massif forest
has remained protected thanks to the customary rules which in turn prohibited
certain bad practices related to the exploitation of natural resources. The fact of
creating “sui generis” legal frameworks aiming at protecting the indigenous people’s
knowledge is a legal obligation since the classical frameworks do not suitably help
ensure this mission.
Keywords: Protected area, Itombwe, Malambo, Traditional knowledge, scientific
knowledge.
Résumé
La question de la protection des savoirs traditionnels des peuples autochtones est à
la croisée de plusieurs grands défis auxquels se trouve confrontée la communauté
internationale depuis une trentaine d'années. L’enjeu fondamental est celui-ci :
comment les connaissances, innovations et pratiques traditionnelles en matière de
biodiversité peuvent-elles être perpétuées dans un monde en métissage croissant, et
dans quelle mesure peuvent-elles être utilisées et valorisées par les connaissances
scientifiques modernes? Ce travail a révélé que la gestion des Malambo était fondée
sur les valeurs traditionnelles qui avaient permis à la communauté locale de s’en
approprier au point que certaines d’entre elles sont restées presqu’intactes. Le
respect de la tradition associée et la crainte de violation de leur caractère sacré ont
constitué donc la base de leur protection contre les menaces et activités
anthropiques. Par conséquent, elles enregistrent des fortes concentrations fauniques
en ces jours. La présence d’espèces comme le Cercopithecus ascanius ; le Pan troglodytes
schweinfurthii, et le Gorilla beringei graueri dont le taux de rencontre élevé a été
enregistré au sein des Malambo visités est révélatrice à plusieurs égards. Ceci veut
dire que les Malambo comme reliques de la biodiversité dans le massif forestier
d’Itombwe avaient subsisté grâce aux règles coutumières du milieu qui y
interdisaient certaines mauvaises pratiques liées à l’exploitation de ces ressources.
Le fait de créer des cadres juridiques ‘sui generis’ permettant de protéger les savoirs
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autochtones est une obligation juridique dès lors que les cadres classiques ne
parviennent pas à assurer convenablement cette mission.
Mots - clés : Aire protégée, Itombwe, Malambo, Savoir traditionnel, Connaissance
scientifique.
1. Introduction
La tendance à l’effondrement des pratiques traditionnelles liées à la
protection de la nature n’interdit pas de penser à leur réactualisation, eu égard
aux enjeux environnementaux de l’heure. C’est sous cette perspective que
Roussel (2005) démontre la durabilité des savoirs naturalistes locaux en
soulignant ‘’qu’appartenir à une tradition est considérée comme la garantie
d’une certaine ancienneté et si les éléments de la biodiversité concernée sont
parvenues jusqu’à nous, c’est que l’utilisation qui en est faite est
nécessairement durable’’. À travers l’histoire de l’humanité, les peuples
autochtones et les communautés locales ont géré les ressources biologiques
pour une multitude de raisons, notamment la subsistance, le respect de la
nature, et à des fins culturelles et spirituelles. Cette gestion des ressources
locales devance de plusieurs millénaires les notions modernes d’« aires
protégées », et persiste jusqu’à aujourd’hui.
A partir de 1980, l’importance des savoirs locaux est prise en compte dans les
débats mondiaux sur la nature (Roué, 2012). Cela a ouvert la voie aux
chercheurs de diverses disciplines scientifiques qui en ont trouvé un champ
d’investigation (Sene, 2013). Les savoirs locaux sont de plus en plus sollicités
dans les démarches scientifiques interdisciplinaires ou dans des exercices de
gestion de la nature. L’avènement d’un nouveau type de gestion, à partir des
années 1980, basée sur l’interdépendance entre les connaissances
scientifiques, notamment écologiques et la gestion, du style «connaître pour
mieux gérer» (Thibault, 1991) ainsi que le concept politique de
développement durable a suscité une reconnaissance institutionnelle et dans
le même temps, épistémologique des savoirs dits locaux. Un principe contenu
dans l’Agenda 21 de la déclaration de Rio de 1992 concerne le rôle central
accordé aux peuples autochtones à jouer dans le domaine de
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l’environnement, en raison de leurs connaissances et pratiques considérées
comme « traditionnelles » (Ducros, 1998).
Les clairières forestières sont des ouvertures "naturelles" dans la canopée de
la forêt dense. Elles sont dominées par une végétation majoritairement
composée d’herbacées. Elles constituent des écosystèmes particuliers dont les
influences sur la concentration de la population animale sont encore mal
connues. Ces clairières forestières sont des zones humides riches en
biodiversité, regroupant ainsi des associations animales et végétales
particulières (Vanleeuwe et al. 1998 ; Vande Weghe, 2006). La végétation y
est de type pairie semi aquatique et la flore est largement dominée par de
nombreuses familles dont celles des Cyperaceae et des graminées (Boupoya,
2010). Ce sont des pôles importants de concentration animale pour les grands
herbivores tels que les éléphants (Loxodonta africana cyclotis), les buffles
(Syncerus caffer nanus), les gorilles (Gorilla gorilla), les potamochères
(Potamochoerus porcus) qui y trouvent une végétation digestible à croissance
rapide, disponible tout le long de l'année (Nganongo, 2000).
La présente étude vise à déterminer le rôle que les Malambo jouent pour la
protection des habitats forestiers en tant qu’écosystèmes particuliers avec des
ouvertures naturelles dans la canopée et les espaces ouverts ainsi qu’à mettre
en relief la pertinence des clairières forestières dans la dynamique de la
population animale dans la Réserve Naturelle d’Itombwe (RNI).
Des études ont montré que ces sites, conservés depuis des millénaires, sont
de véritables sanctuaires de biodiversité renfermant des espèces végétales et
animales pouvant être utilisées à des fins alimentaires, médicinales,
artisanales, etc. Il est temps de rassembler tout ce savoir local, le soumettre à
l’analyse scientifique pour mieux l'intégrer dans la science moderne. Les
forêts sacrées, souvent communautaires, sont conservées comme cimetières,
sanctuaires pour des fétiches, lieux de culte ou d’initiation. Le but de cette
étude est de démontrer, à travers la documentation, l’efficacité des pratiques
traditionnelles, croyances et modes de vie des peuples, lesquels ont
sauvegardé pendant plusieurs siècles les phénomènes naturels que représente
aujourd’hui le réseau des aires protégées en République Démocratique du
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Congo (RDC) dont les habitats spécifiques sont de plus en plus connus grâce
à la science. A ce titre, les aires protégées ont un rôle crucial quant au
maintien d’un environnement sain pour les êtres humains et la nature. Elles
sont essentielles pour la conservation de la biodiversité et vitales pour les
cultures et les moyens d’existence des peuples autochtones et des
communautés locales (Mubalama, 2018).
Notre propos dans cette contribution ne sera pas d’exposer l’intérêt que
représentent ces sites pour une histoire des paysages déjà bien explorée, mais
plutôt de soulever des questions qui se posent aujourd’hui plus que jamais en
termes de leur conservation en partant de nos récents travaux de terrain et
des éléments de compréhension des enjeux dont ces sites sont l’objet
aujourd’hui en tenant en compte l’analyse du contexte historique lié à
l’inclusion de ces sites dans la RNI. Cependant, l’avènement d’un nouveau
type de gestion, à partir des années 1980, basée sur l’interdépendance entre
les connaissances scientifiques, notamment écologiques et la gestion, du style
«connaître pour mieux gérer», il est indispensable d'avoir une représentation
adaptée de l'innovation afin de mieux comprendre comment le
développement conjoint d'innovations s'opère (Thibault, 1991).
Dans cette optique, cet article se propose de répondre aux préoccupations
soulevées ci-dessus avec un accent particulier sur les points ci-après : (i) faire
le point sur les recherches en cours sur les pratiques culturelles favorisant la
sauvegarde et la conservation de la diversité végétale dans le massif forestier
d’Itombwe et sur les menaces, les défis et les opportunités ; (ii) mettre au point
une méthodologie concertée de recherche, d'échange et de diffusion des
bonnes pratiques; (iii) proposer des stratégies pour enraciner les politiques,
les plans et les programmes locaux et nationaux d'utilisation de la biodiversité
dans les cultures locales et nationales, et enfin (iv) concevoir de nouvelles
pistes de recherche.
2. Matériel et Méthodes
2.1. Localisation de la zone d’étude
Située dans la Province du Sud-Kivu en RDC, la RNI est une aire protégée
de la VIème catégorie de l’UICN localisée dans le massif forestier d’Itombwe
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(Fig. 1) avec une superficie de 573.222 ha (Mubalama et al. 2013 ; Mubalama
et al. 2017). Une particularité observée dans la répartition d’espèces animales
au sein du cette aire protégée a suscité la curiosité de caractériser les
potentialités écologiques et socioculturelles de leurs habitats. Du point de vue
écologique, les Malambo sont perçus par la population locale comme des
"maternités" (Hart & Mubalama, 2005) du fait que certaines femelles y
migrent au moment de la mise bas pour accéder facilement au sel gemme.
La RNI a été créée par l’arrêté ministériel n°038/CAB/MIN/ ECNEF/2006
du 11 octobre 2006 et complétée par l’arrêté provincial n° 16/026/GP/SK
du 20 juin 2016 portant mesures provisoires d’actualisation des limites issues
de la délimitation participative de la RNI.
Le massif d’Itombwe représente l’ensemble le plus vaste des forêts sub-
montagnardes d’Afrique (Doumenge, 1998). Ce massif, d’une superficie de
12 000 km2 environ, comprend une zone forestière d’un seul tenant, le massif
central, d’une superficie de 6 500 km2 avec une altitude pouvant atteindre
jusqu’à 3 475 m au niveau du Mont Muhi. Le massif central abrite plusieurs
habitats forestiers exceptionnels : bambous, landes, zones transitoires
humides et une savane arborée écotone de haute altitude. On y trouve
d’importantes populations de chimpanzés de l’Est (Pan troglodytes
schweinfurthii) et de l’espèce menacée des gorilles Grauer (Gorilla beringei
graueri, Espèce en danger critique.
http://www.iucnredlist.org/details/39995/0, consulté le 11/11/2016).
Le massif d’Itombwe représente l’une des zones les plus propices à la
conservation des grands singes et de la biodiversité endémique des massifs du
rift Albertin. Le Massif d’Itombwe fait par partie des sites prioritaires pour
leur importance biologique au niveau global et au niveau du Rift Albertin
(Doumenge, 1998).
2.2. Présentation des clairières forestières
Les clairières jouent un rôle dans le maintien de la diversité biologique. Elles
sont de superficies variables allant de quelques mètres carrés à des dizaines
d’hectares. Elles s’installent sur des substrats pédologiques variés allant des
sols profonds et marécageux aux sols maigres sur des affleurements rocheux.
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Letouzey (1985) les identifie comme étant des prairies développées sur
Schistes chloriteux de la série précambrienne peu métamorphisée dont
l’étude est encore très incomplète. Les Monts Itombwe font partie intégrante
de la chaîne montagneuse s’étalant sur toute la frontière Est du Congo, du
Katanga au Nord-Kivu. Cette chaîne borde le fossé tectonique de la branche
occidentale du grand Rift africain, dont le fond est occupé par plusieurs
grands lacs (Jeune Afrique, 1978, 1993).
Figure 1. Localisation de la Réserve naturelle d’Itombwe
On peut distinguer deux grands ensembles géomorphologiques : les plateaux
de la moitié Est, dominés par les montagnes des marges Nord et Est, et les
pentes et plaines fluviatiles de la moitié Ouest. La complexité des sols du
Massif d’Itombwe rend très malaisée leur description en une note succincte.
Cette complexité provient de la variété des roches d’origine, du relief et des
climats. Les Hauts-Plateaux ondulés dérivés de roches burundiennes sont
recouverts de sols acides, peu fertiles, susceptibles d’être transformés en
cuirasses latéritiques ; les sols des vallons et piémonts y sont plus fertiles
(Wilson, 1990 ; Doumenge, 1998 ; Muhigwa et al., 2011).
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Ces clairières sont caractérisées par une végétation à prédominance de la
végétation herbacée dans laquelle la famille des graminées est à la fois la plus
abondante et la plus dominante, ce qui leur confère leur rôle de pâturage
naturel. Les espèces Myrianthus arboreus, Symphonia globulifera, Macaranga
mildbraediana Pax, Harungana Montana et Parinari excels sont les plus
dominantes et les plus abondantes (Tableau 2) et de ce fait, elles influencent
la physionomie des clairières. Le déterminisme de formation et d’évolution
des clairières est mal connu. Aubréville (1948) a assumé que les formations
herbeuses des clairières forestières sont d’origine récentes et émanant de toute
évidence de l’activité humaine seulement. Aussi postulat-il que les clairières
forestières ou les savanes herbeuses des milieux forestiers représenteraient des
reliques paléo climatiques. Letouzey (1985) affirme qu’aucune action
humaine ancienne ne se révèle de façon évidente autour de ces formations et
leur origine anthropique semble ne pas être retenue.
Les clairières forestières restent influencées par la géologie locale et les
conditions climatiques et pédologiques actuelles. Elles jouent des fonctions
diverses aux communautés biologiques et constituent des écosystèmes dont
le rôle écologique n’est pas entièrement exploré à ce jour.
Plusieurs espèces animales, dont celles inscrites aux annexes de l’UICN et
d’autres totalement protégées en RDC ne sont observées qu’autour de
multiples clairières marécageuses que la population locale du milieu appelle
Malambo (Fig. 2 & Tableau 1). Les résultats du sondage ont révélé que les
Malambo ne sont autres que des clairières marécageuses ou zones humides.
Sept d’entre elles ont été visitées au cours de ce travail. Elles ont été protégées
par la tradition et coutume du milieu depuis des temps anciens. Ayant à cet
effet le caractère sacré, elles sont presque totalement exclues aux zones de
chasse.
Du fait des mystères qui les entourent et la crainte profonde qu’ils suscitent
chez les populations, ces endroits sont paisibles. Ils représentent ainsi des
milieux privilégiés de ponte, de refuge et de nurserie pour certaines espèces
aquatiques de la zone. Ceci a permis qu’on y observe ; jusqu’à ce jour ; des
fortes concentrations d’espèces animales. Ainsi, la présence des certaines
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roches salines observées dans la plupart d’entre elles, est à la base de leurs
désignation comme des salines (Ibucwa, 2008).
Figure 2. Une vue de l’Ilambo M’banga non loin de la rivière Kikuzi surplombée par une
lisière de forêt humide dans le Groupement Bashimwenda 1er, Mwenga.
Les clairières forestières seraient la résultante de l’influence de plusieurs
facteurs complexes et dynamiques échelonnés dans le temps. Leurs origines
sont variées et le déterminisme de leur formation est complexe. Elles sont
dépendantes de divers facteurs et on peut citer par exemple: (i) les formations
géologiques Prédominantes; (ii) les formations pédologiques sur lesquelles
elles se sont développées; (iii) les éléments du climat local; (iv) la composition
phytosociologique dominante ; (v) l’activité humaine notamment avec
l’élément feu de brousse qui a un impact sur la végétation de la clairière et
qui est aussi décomposable en plusieurs facteurs (période de mise en feu,
durée de la mise en feu, type et état de la végétation brûlée, …). Elles restent,
en tant que savanes herbeuses des milieux forestiers, influencées par la
géologie locale et les conditions climatiques et pédologiques actuelles (Noupa
& Nkongmeneck, 2008).
2.3. Méthodologie du travail sur la connaissance biologique des Malambo
2.3.1. Identification des plantes et échantillonnage
Vingt-deux clairières sur sol hydromorphe ont été identifiées sur le terrain.
Sept d’entre elles ont été retenues dans le cadre de cette étude. Ce choix a été
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fait en fonction de l’éloignement par rapport à la station Etat-major de la RNI
à Mwenga, des facilités d’accessibilité et des moyens logistiques dont nous
disposions. La taille des clairières, le degré de saturation en eau, le
recouvrement d’arbustes, la présence et l’absence d’activité animale ont aussi
été pris en compte dans ce choix. L’identification des espèces a représenté
une étape importante de ce travail. Une première identification s’est faite sur
le terrain à partir des manuels de botanique forestière, ouvrages pratiques
d’identification de la flore des espèces d’Afrique centrale (Letouzey, 1982,
1983).
Des herbiers de poche ont également été confectionnés in situ pour des
comparaisons avec des spécimens antérieurement récoltés et identifiés car il
est impossible d’emporter les rares flores disponibles sur le terrain. Nous
avons par ailleurs bénéficié sur le terrain de l’expérience des botanistes
locaux. Les déterminations ont été effectuées sur base des flores existantes :
Flore du Congo, d’Afrique Centrale, et Flora of East Tropical Africa.
La recherche de la documentation et références bibliographiques ont fait
partie des bases essentielles dans la production du présent article. Les
documents utilisés ici reposent essentiellement sur la littérature, les enquêtes
et sondage ainsi que les travaux d’analyse des échantillons des sciences du
sol de la Faculté d’agronomie de l’Université Catholique de Bukavu (UCB),
l’herbarium du Centre de recherche en sciences naturelles (CRSN/Lwiro) et
la consultation de certains sites web jugés fiables. La fiche descriptive Ramsar
en ligne, les documents d’orientation relatifs aux inventaires culturels rapides
des zones humides ainsi que la fiche d’inscription des zones humides
d’importance internationale ont permis l’élaboration du questionnaire de
sondage.
Le sondage a été mené auprès de la communauté locale sous forme
d’inventaire culturel rapide conformément à l’exigence de la Convention de
Ramsar (Pritchard, 2010). Il vise la récolte d’informations pertinentes de la
perception des communautés locales sur la thématique liée aux zones
humides. Celui-ci comprenait deux catégories de questions : les questions
ouvertes, où la personne interviewée devait répondre en donnant ses propres
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idées et une seconde dite fermée, où la personne devait choisir une réponse
parmi les assertions proposées. Ces informations ont été collectées pour la
période allant de 04 au 24 juillet 2016 (Igunzi, 2017).
2.3.2. La méthode phytosociologique de Braun-Blanquet
Cette méthode repose sur le principe de discontinuité où la végétation est
formée d’associations floristiques homogènes bien déterminées et définies.
Leurs caractéristiques et leurs distributions sont basées sur des facteurs
écologiques et phytocoenotiques. Cette conception fondamentale,
développée par l’Ecole Zuricho-Montpelliéraine (Braun-Blanquet, 1932),
considère l’association comme un groupement floristique homogène défini
de façon abstraite sur base de la comparaison synthétique des listes
floristiques établies sur des surfaces structuralement et floristiquement
homogènes. La notion d’espèce caractéristique, c'est-à-dire d’espèce
exclusivement présente dans une association, reste fondamentale car elle sert
à définir les différentes associations. Cette méthode a été utilisée par de
nombreux auteurs pour les premières études de végétation tropicale, on peut
citer notamment Lebrun (1947), Duvignaud (1949), Léonard (1950, 1952), &
Troupin (1966).
Bien que l’application de cette méthode en forêt tropicale ait fait l’objet de
nombreuses critiques (Aubreville, 1951 ; Devred, 1961), le caractère azonal
de nos sites d’étude a permis son application car la végétation est composée
majoritairement d’herbacées spécialisées. De ce fait, la méthode de Braun-
Blanquet est applicable pour la caractérisation des groupements des clairières
intraforestières sur sol hydromorphe composés essentiellement de
Cyperaceae et de Poaceae auxquelles s’ajoutent diverses autres espèces.
Une visite a été effectuée dans sept Malambo (Fig. 2) ; la liste a été complétée
plus tard avec les données SMART (Spatial Monitoring and Reporting Tool)
issues de patrouilles des éco-gardes de la RNI. En ce qui concerne leur
écologie, l’étude s’est focalisée sur sept qui ont fait l’objet d’une récolte
d’échantillons botaniques, pédologiques et hydrologiques. Ces sept Malambo
(tableau 1) constituent alors ce que nous appelons dans ce travail "site
d’étude", abrégé "SE". A chacune, il a été accordé un numéro d’ordre
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(exemple SE-01 ; une brève étude phytosociologique a été également réalisée
et des coordonnées géo référencées prises à l’aide de GPS Garmin 64s
(Tableau 1).
Tableau 1 : Coordonnées géo référencées des Malambo échantillonnés
Nom local
d’Ilambo
Coordonnées du lieu en UTM
Distance
au suivant
(Km)
Code
Repère proche
Long.
Lat.
Alt.
(m)
Profondeur
moyenne
ALELE
0695874
9639810
2183
48 cm
0
SE-01
Riv. Asangye
ATOBO
0671857
9640036
1909
28 cm
24,02
SE-02
Riv. Kikuzi
ESSESA
0671547
9640056
1902
41 cm
0,31
SE-03
Riv. Kikuzi
IBU
0672288
9640374
1959
25 cm
0,81
SE-04
Riv. Ibu
KALAMBO
0681120
9646450
1890
30 cm
10,72
SE-05
Anc. Route
LUSASA
0694268
9632690
1945
17 cm
19,03
SE-06
Riv. Lwelaki
M’BANGA
0671445
9640363
1896
19 cm
24,08
SE-07
Riv. Kikuzi
Total
78,97
Légende : Long. Longitude, Lat. : latitude ; Alt. : Altitude, Riv. : T=Riviere, Anc.
Ancienne
L’étude était effectuée au sein des clairières en tenant compte de
l’homogénéité de la végétation. La profondeur moyenne était estimée en
enfonçant en différents endroits la barre graduée. L’inventaire des espèces
ligneuses était mené dans des placettes circulaires de 2,5m de rayon chacune
où le comptage se faisait en suivant un transect linéaire de 1.5 km.
L’inventaire a concerné surtout les espèces ligneuses avec un regard
superficiel aux espèces herbacées. Pour quantifier la représentation des
espèces ligneuses suggère de mesurer leur diamètre à la hauteur du niveau de
la poitrine humaine appelée DBH. Ainsi, une surface totale de 137,37m2 a
été couverte pour les sept clairières. Trois paramètres été étudiés à chaque
espèce à savoir : sa surface terrière (St), sa densité relative (DER) et sa
dominance relative (DOR).
La densité relative (DER) : Elle a tenu compte du nombre d’individus observés
au sein de chaque Ilambo. Avec, Ni = le nombre d’individus d’une espèce ou
d’une famille, et Σ•• = Le nombre total d’individus dans l’échantillon.
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La Surface terrière (St) : Elle a tenu compte de l’occupation d’une espèce ou
d’une famille dans chaque Ilambo. Avec, D = Diamètre de l’individu
considéré au niveau du DBH, et s’exprime en m2/ha.
La dominance relative (DOR) : Elle met en évidence les espèces ou les familles
occupant plus de place au sein des sites d’études. Avec, St = Surface terrière
d’une espèce ou d’une famille, et Σ!"• = St totale d’individus dans
l’échantillon.
La détermination des espèces végétales connues se faisait sur place. Et pour
celles à confusion, elle s’effectuait à l’aide des travaux de (Lebrun, 1991), ou
par identification à l’herbarium du Centre de recherche en sciences naturelles
de Lwiro. Enfin, le tout était réactualisé soit à partir de la world check-list de
Royal Botanic Gardens de Kew, soit à partir du site Conservatoire et jardin
botaniques de la ville de Genève.
Trois échantillons du sol étaient prélevés à chaque Ilambo selon que le lieu
(roche) affichait les traces d’être plus léché par certaines espèces. Après
mélange des trois échantillons, un échantillon unique d’au moins 0,5kg était
maintenu. Celui-ci était transporté dans un sac stérile jusqu’au laboratoire des
sciences du sol de l’Université Catholique de Bukavu, où 17 paramètres
physico-chimiques étaient analysés.
Soulignons qu’autres indices fauniques récentes étaient enregistrées le long
du parcours séparant les différentes zones humides visitées en associant une
coordonnée géographique à chaque indice. Ces indices concernent les crottes
des espèces, les miettes des nourritures, les traces, les cris entendus ou nids
récents observés. Ils ont fait l’objet d’analyses et/ou d’interprétation sous
plusieurs aspects, entre autres sur le taux de rencontre en fonction de la
distance parcourue.
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comme nouveau paradigme de la conservation des Aires Protégées
142
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L’objectif de la classification de variables est de construire des classes de
variables fortement liées entre elles et de supprimer ainsi l’information
redondante. L’approche ClustOfVar utilisée fournit simultanément des
groupes de variables ainsi que les variables synthétiques associées aux classes
de variables. Dans cet algorithme, le critère d’homogénéité repose sur la
notion de corrélation pour les variables quantitatives et de rapport de
corrélation pour les variables qualitatives. L’étape de classification de
variables nous permet d’obtenir des variables synthétiques que nous
proposons de lire comme une sorte de gradient.
Figure 3. Carte montrant les sites d’étude dans la Réserve Naturelle d’Itombwe
Sur nos données, les valeurs correspondent à des regroupements de modalités
distincts et pertinents pour l’interprétation. Cette démarche nous permet de
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comme nouveau paradigme de la conservation des Aires Protégées
143
Annales des Sciences et des Sciences Appliquées, UOB, 4 (N° 3/4), Juillet 2018
lire et d’étiqueter chaque variable synthétique. Nous mettons ainsi en
évidence des tendances qui vont départager l’opinion des agriculteurs quant
à leur prise en compte de l’environnement. Puis, nous précisons ces résultats
en réalisant une classification sur les scores des individus mesurés sur les
variables synthétiques. Sur le plan sociologique, l’apport des variables
synthétiques pour interpréter les profils-types obtenus est évident.
2.3.4. Paramètres environnementaux
Le degré d’hygromorphie du sol a été estime suivant l’échelle proposée par
Senterre (2005) : 1= faible, sol bien drainant, se ressuyant vite après les
pluies ; 2 = moyen, sol ne se ressuyant pas vite après les pluies ; 3 = fort, sol
périodiquement inondé restant longtemps saturé en eau après les pluies ; 4 =
permanent, sol sature en eau même en dehors de la saison des pluies.
L’intensité de la fréquentation animale est obtenue par le taux de rencontre
(TR) de traces (empreintes, crottes, pistes) animales.
Les types phytogéographiques ont été identifiés pour chaque espèce en
référence aux subdivisions phytogéographiques de l’Afrique de White (1983).
Les distributions des espèces ont été déterminées à partir de la world check
list des Royal Botanic Gardens de Kew
(http://apps.kew.org/wcsp/home.do) et des distributions données dans les
flores et articles cités ci-dessus pour identification des espèces. Les types
biologiques de chaque espèce ont été définis suivant le modèle de Raunkiaer
(1934).
2.3.5. Différentes approches des savoirs locaux
Trois grandes approches se dégagent lorsqu’il s’agit d’interpréter les savoirs
locaux, notamment : (i) les savoirs locaux en tant qu’héritage du passé : Cette
approche montre le genre de vénération que l’on devrait avoir pour la sagesse
accumulée par des générations passées, si intensément exprimée dans la
célèbre phrase d’Amadou Hampaté Bâ, «chaque fois qu’un vieillard meurt,
c’est une bibliothèque qui brûle» ; (ii) les savoirs locaux comme incarnation d’un
mode différent et spécifiquement africain de pensée : il s’agit ici d’une «
épistémologie » africaine et donc un moyen de repenser les méthodes de
Mubalama et al. Savoirs traditionnels conciliés aux connaissances scientifiques
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144
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développement dans des domaines tels que la santé, l’agriculture et la gestion
des ressources naturelles.
Les partisans de cette approche soulignent l’échec des méthodologies
actuelles de développement comme preuve du besoin de nouveaux concepts
enracinés dans l’héritage culturel des populations concernées (Bérard et al.
2005 ; Tubiana, 2005) et enfin, (iii) les savoirs locaux en tant que moyen et
processus d’expression de ce que les populations indigènes connaissent, et moyen de les
impliquer dans l’acquisition des connaissances requises pour le développement, et ainsi
de transmettre aux futures générations le meilleur que le présent a à offrir.
Les partisans de cette approche insistent que promouvoir les savoirs locaux
est autant une question de rendre les acteurs locaux capables de produire de
nouvelles connaissances basées à la fois sur l’héritage du passé et une
évaluation lucide des défis actuels, que de simplement répertorier et stocker
les traditions héritées du passé.
3. Résultats et discussion
3.1. Potentialités écologiques des Malambo dans la RNI
Les Malambo abritent l’espèce Terathopius ecaudatus reconnue comme
vulnérable par la liste rouge de l’UICN, elles hébergent également Phataginus
tricuspis, une espèce quasi menacée. Les autres espèces animales ou végétales
rares et communautés écologiques menacés (c’est-à-dire, espèces en danger,
en danger critiques et espèces vulnérables) justifiant l’importance
internationale des Malambo comme zones humides dans le massif forestier
d’Itombwe, sont respectivement détaillées dans le Tableau 3.
3.2. Particularités de l’attraction des clairières sur les espèces fauniques
Cette analyse a permis de démontrer le rôle des clairières dans le
regroupement de la population de la faune. Les clairières sont des points de
concentration de la population de la faune. Du dépouillement des fiches de
collecte des données, il est ressorti que les traces de 16 espèces ont été
rencontrées dans les inventaires faits dans et autour des clairières de Alele,
Atobo, Essesa, Ibu, Kalambo, Lusasa et M’banga (Fig.3 &Tableau 1). Le
calcul des densités spécifiques pour ces différentes espèces en fonction du type
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145
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de milieu (clairière, forêt marécageuse ou forêt hétérogène) a été réalisé à
dessein de quantifier la représentation des espèces ligneuses (Fig. 4 &
Tableau 2).
Il en ressort que les clairières visitées sont caractérisées par une végétation à
prédominance de la végétation herbacées dans laquelle les familles de
cyperaceaes et des graminées est à la fois la plus abondante et la plus
dominante (Fig. 5), ce qui leur confère leur rôle de pâturage naturel. A ce
titre, elles sont des pôles importants de concentration animale pour les grands
herbivores qui y trouvent une végétation digestible à croissance rapide et
riche en sels minéraux (sodium, calcium et magnésium) et en eau, disponible
tout le long de l'année. On peut ainsi distinguer le pic du genre Cephalophus
spp. qui représente la densité cumulée de 4 espèces de Céphalophes : C.
ascanius, C. mitis, C. lhoesti, C. denti. Ce sont des espèces craintives, qui
constituent des proies faciles pour les prédateurs qui fréquentent les zones de
forte concentration d’animaux. Pour cette raison, les Céphalophes évoluent
préférentiellement dans les forêts hétérogènes aux alentours des clairières, ne
faisant que des incursions sporadiques pour brouter dans les clairières
forestières.
Comme cela a aussi été documente dans le Parc National de Boumba-Bek
(Sud-Est Cameroun), les espèces Gorilla gorilla gorilla (gorille), et
Potamochoerus porcus (potamochère), présentent aussi des densités élevées
dans les forêts hétérogènes. Il s’agit en réalité des espèces ubiquistes qui
affectionnent tous les habitats dans le milieu en fonction de leurs besoins
alimentaires. Ce qui n’est pas le cas du Syncerus caffer nanus (buffle) et le
Tragelaphus euryceros (bongo) qui sont des espèces fortement inféodées aux
clairières forestières où elles passent le maximum de leur temps, ne se
déplaçant que pour la recherche des points d’eau lorsqu’il n’y en a pas dans
les clairières.
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Figure 4. Distribution spatiale des habitats spécifiques à clairière dits Malambo dans la
Réserve Naturelle d’Itombwe, Source : ICCN-WWF, 2018)
Les densités de ces espèces sont nettement élevées dans les clairières
comparées à celles des autres espèces. Il s’en dégage que la densité des traces
calculées dans les différents segments d’inventaire dans les 7 clairières suit un
gradient qui décroît au fur et à mesure que l’on s’éloigne du centre de la
clairière. Ceci indique que les animaux (toutes espèces confondues) ne sont
pas uniformément répartis dans le massif forestier autour de la clairière
forestière. Ceci traduit l’influence que cette clairière exerce sur la répartition
de la population animale dans le massif forestier adjacent dans la mesure où
les clairières forestières sont des milieux riches en espèces végétales très
prisées par des herbivores. De plus, la richesse de la clairière en sels minéraux
(sodium, calcium et magnésium) et en eaux constitue pour ces animaux une
source de complément alimentaire. Par ailleurs, le minimum de production
de fruits en saison sèche constitue une véritable pénurie et la survie de la
communauté de vertébrés (herbivores et frugivores) dépend de la
fructification de ces arbres. Or dans les clairières forestières les ressources
alimentaires sont en nombre important.
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Les taux de fréquentation des animaux ont montré que deux espèces en
particulier le Cercopithecus ascanius, Chimpanzé et Gorille semblent trouver
toutes les conditions favorables à leur présence dans ces clairières. En effet,
les taux de fréquence de ces trois espèces ont été les plus importants sur les 9
espèces identifiées. Par ailleurs, les autres espèces ont présenté des taux de
fréquence inférieur à 5% (Tableau 3). La forte présence des chimpanzés dans
cette clairière pourrait s’expliquer par le fait que ces animaux sont fortement
largement distribués dans la Réserve (Mubalama et al. 2017) et inféodés à ces
milieux où ils passent le maximum de leur temps.
Ces résultats ne corroborent guère ceux obtenus par Noupa et al. (2008) qui
ont montré que ce sont plutôt les espèces du genre Tragelaphus qui affichent
un tropisme positif pour les clairières forestières et les zones humides.
Plusieurs études ont montré le rôle majeur que joue les clairières dans
l’éthologie des différentes espèces animales qui trouvent dans ces milieux les
éléments nécessaires à leur survie (une végétation digestive à croissance
rapide, lieu de repos, lieu de broutage, etc. (Nganongo et al. 2000 ; Noupa,
2008).
La protection des Malambo se veut une résultante des actions découlant des
interdits dictés par la coutume traditionnelle. .Ces pratiques très restrictives,
mais qui ont pour avantage de permettre aux gardiens des lieux sacrés de
garder une influence sur la gestion des espaces sacrés y compris les Malambo.
Vu l’importance des forêts sacrées, la RDC a pris en compte lesdites forêts
par la loi sur le code forestier 2002. Les forêts appartenant aux populations
locales sont reconnues ayant pour vocation la conservation et la protection
(Luketa, 2005). Les lois coutumières régissent le système traditionnel de
gestion susceptible d’enrichir la politique nationale en matière de
biodiversité. Ainsi, la Convention sur la diversité biologique (CDB) entrée en
vigueur en 1993 reconnaît « le droit souverain » des Etats de gérer leurs
ressources génétiques et de préserver leurs savoirs traditionnels, élevés au titre
de « patrimoine commun de l’humanité » (Larrère, 1997). En effet, Lors de
la 4ème session de la conférence sur les écosystèmes de forêts denses et
humides d’Afrique centrale, tenue à Kinshasa (RDC) du 10 au 13 juin 2002,
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il a été recommandé la prise en compte des forêts sacrées dans tout processus
d’aménagement forestier.
Comme on s’en rend bien compte, les savoirs locaux sont aujourd’hui au
cœur de la problématique de gestion rationnelle des ressources naturelles. Si
sa reconnaissance est certaine au sein de la communauté internationale,
cependant la pratique ne semble pas être aisée. La prise en compte des savoirs
autochtones dans l’approche de développement durable reste le terrain de
nombreux amalgames et conflits d’intérêt. Le défi qui s’offre aux sciences
sociales, c’est d’arriver à appréhender ces savoirs et trouver des paradigmes
susceptibles de fournir aux intervenants outils permettant de créer une
symbiose dans l’intervention des différents acteurs. C’est ici une opportunité
à saisir par les sciences sociales afin de s’affirmer davantage dans le procès
du développement.
Pour faciliter l’intégration des systèmes traditionnels de gestion dans les
contextes modernes, l’Etat devrait recenser les savoirs traditionnels, renforcer
la collaboration entre les autorités traditionnelles et les institutions étatiques.
Les organisations non gouvernementales qui mettent l’accent sur la
conservation du patrimoine doivent soutenir les efforts des personnes
agissant pour la protection des valeurs ancestrales. Cela peut se traduire par
des soutiens multiformes tels que la mise à disposition des moyens humains
(formateurs) et logistiques qui leur permettront de lutter contre toute forme
de contrebande.
Ces clairières jouent différents rôles dans l’éthologie des différentes espèces
qui les fréquentent: arène nuptiale, lieu de broutage, lieu de repos, etc. Au
bénéfice des interdépendances dans les relations alimentaires entre différentes
espèces animales du milieu, les clairières forestières étant les uniques sites de
broutage pour les herbivores, concentrent autour d’elles toute la complexité
de la chaîne trophique du milieu forestier. Leurs rôles de pôle de
concentration animale sont ainsi mis en évidence par la présente étude.
Il est fort urgent qu’une étude sur la dynamique de ces écosystèmes
particuliers à la base de la stabilité des populations animales dans le massif
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forestier du Bassin du Congo soit faite en vue de leur meilleure valorisation
dans la perspective de l’aménagement de la faune. Malgré la faible durée de
l’étude qui pourrait être considérée comme un facteur limitant dans
l’observation du nombre des animaux, l’activité journalière des animaux en
particulier celles de cercopithecus ascanius et des grands singes ont pu être
observées. Chez ces deux espèces, la météo du jour n’a pas d’influence sur
leur présence ou leur absence dans les clairières (le taux de présence pour les
cercopithecus ascanius se situe à 61.61% contre 14.29% pour le chimpanzé et
7.14% pour le gorille de plaines orientales).
Autant les zones humides font l’objet d’interventions spécifiques et
particulières, autant, il est urgent que soit développé un projet « clairières
forestières dans le bassin du Congo » pour développer une stratégie cohérente
d’aménagement de ces écosystèmes qui sont les points de concentration
animale et donc les centres vitaux au même titre que les points d’eau dans le
massif, entendu qu’aucune évidence ne dément leur rôle dans le
déterminisme des grands migrateurs. Les clairières forestières joueraient-elles
les rôles de relais dans les échanges biologiques? Auquel cas il s’agirait aussi
d’envisager dans les plans directeurs d’aménagement des massifs des
dispositions spéciales pour les clairières situées dans les aires protégées en
tant qu’écosystème des sites vitaux indispensables pour leur survie.
3.3. Paramètres physico-chimiques, pédologiques, hydrologiques et implications
pour la conservation de la RNI
A l’issue d’une analyse physico-chimique effectuée sur des échantillons de
l’eau et du sol des Malambo, les résultats ont révélé que l’appréciation de ces
biotopes par plusieurs espèces animales n’est pas seulement liée à la quiétude
instaurée par la coutume et la tradition, mais aussi liée à la forte teneur en sel
dont détiennent les sols et l’eau de certaines d’entre elles, facteurs qui attirent
d’avantage plusieurs espèces à s’y abreuver en des endroits bien précis. Bien
que la végétation y soit riche en plantes ligneuses et herbacées, cette dernière
n’a pas révélé d’élément particulier d’attraction justifiant l’abondance en
faune sauvage.
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Malgré ces potentialités fauniques et floristiques non négligeables, la RNI ne
possède, à ce jour, aucun statut international. Une confrontation de
potentialités écologiques et socioculturelles des Malambo par rapport aux
critères de la Convention de Ramsar a montré que ces clairières
marécageuses, comme des véritables zones humides, satisfont jusqu’à 44,4%
pour être inscrites sur la liste Ramsar. Cette stratégie une fois mise en œuvre
permettra l’élévation de la RNI comme zone humide d’importance
internationale et entrainera la conservation de sa biodiversité à long terme.
Du point de vue socioculturel, celles-ci sont revêtues d’un caractère sacré qui
font d’elles, en majorité, des zones exclues de chasse (Defailly, 2010)
Tableau 2: Espèces ligneuses justifiant l'importance floristique des Malambo
Espèce
Famille
NI
ST
DOR
DER
DBH
Myrianthus arboreus P. Beauv.
Moraceae
21
0,02
1,07
17,07
0,15
Symphonia globulifera (Lin) f.
Clusiaceae
18
0,03
1,72
14,63
0,19
Macaranga mildbraediana Pax
Euphorbiaceae
15
0,02
1,38
12,20
0,17
Harungana Montana Spirlet.
Hypericaceae
14
0,08
4,89
11,38
0,32
Parinari excels Sabine
Chrysobalanaceae
10
0,13
7,63
8,13
0,40
Entandophragma excelsum Spague.
Meliaceae
8
0,15
9,24
6,50
0,44
Galiniera coffeiodes Delile
Rubiaceae
7
0,30
18,34
5,69
0,62
Strombosia scheffleri Engl.
Olacaceae
5
0,09
5,51
4,07
0,34
Chrisophylum albidum G. Don
Sapotaceae
4
0,24
14,43
3,25
0,55
Grewia malacocarpa Mast.
Malvaceae
4
0,03
2,10
3,25
0,21
Ocotea usambarensis Engl.
Lauraceae
4
0,09
5,20
3,25
0,33
Xymalos monospora (Harv) Bail
Monimiaceae
4
0,13
7,63
3,25
0,40
Polyscias fulva (Hiern).Harms
Araliaceae
3
0,13
8,02
2,44
0,41
Sapium ellipticum (Hochst) Pax
Euphorbiaceae
2
0,07
4,01
1,63
0,29
Bridelia micranta (Hochst) Bail
Euphorbiaceae
1
0,02
1,07
0,81
0,15
Ficalhoa laurifolia Hiern.
Sladeniaceae
1
0,01
0,48
0,81
0,10
Syzygium congolense Vermoesen.
Myrtaceae
1
0,07
4,29
0,81
0,30
Trema orientalis(Lin) Blume
Cannabaceae
1
0,05
2,98
0,81
0,25
Total
123
1,65
100,00
100,00
5,62
Les zones humides inventoriées justifient ce critère par les résultats du
Tableau 2, qui reflètent leur richesse floristique. Il en découle qu’hormis les
cypéracées et les espèces de poaceae dominées par l’imperata cylindrica et le
pennisetum sp. et le sous-bois, les zones humides dans le massif forestier
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d’Itombwe renferment jusqu’ à 16 familles d’espèces ligneuses regroupées en
18 genres.
D’une manière particulière, l’espèce Myrianthus arboreus présente une forte
densité relative en nombre d’individus observés. Les familles à forte densité
floristique peuvent être classées de la manière suivante : Moraceae (17,07%),
Clusiaceae (14,63%), Euphorbiaceae (12,20%), Hypericaceae (11,38%) et
Chrysobalanaceae (8,13%). Il découle de ce résultat que les Malambo
présentent une richesse floristique. La confrontation entre les espèces
ligneuses et herbacées enregistrées au sein des Malambo dans le massif
forestier d’Itombwe, reflète sur leur degré de similarité (Igunzi, 2017).
Figure 5. Degré de similarité floristique entre les sept Malambo visités.
Il en résulte que la flore qui caractérise les zones humides dans le massif
forestier d’Itombwe est regroupée en deux blocs bien distincts. La proportion
de similarité varie approximativement autour de 15 et 30%. Cette faible
ressemblance, c’est-à-dire forte dissemblance floristique s’explique par la
dominance des espèces herbacées de la famille des Cypéracées (Cyperus sp)
qui caractérisent certaines Malambo (Igunzi, 2017). D’autres étant
essentiellement dominées par des espèces ligneuses. Une seule zone humide
(SE-05) a présenté une végétation mixte.
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L’importance des Malambo pour les espèces de la faune a été mise en
évidence en considérant les paramètres physico-chimiques des échantillons
d’eau et de sol. Le but est de comprendre les raisons justifiants l’appréciation
particulière de cette eau et/ ou sol par certaines espèces dans le massif
forestier d’Itombwe. En effet, les clairières du massif forestier d’Itombwe sont
caractérisées par une végétation à prédominance de la végétation herbacée
dans laquelle la famille des graminées est à la fois la plus abondante et la plus
dominante, ce qui leur confère leur rôle de pâturage naturel (Igunzi, 2017).
Les résultats du tableau 3 mettent en relief l’intensité de la fréquentation
animale observée dans différentes zones humides dans le massif forestier
d’Itombwe Il en découle que 112 observations ont été enregistrées le long du
parcours, sur base des observations directes (vues), ou indirectes (crottes
récentes, cris, traces récentes, nids ou miettes de nourritures). Neuf espèces
animales ont été enregistrées pendant ce passage comme fréquentant plus les
Malambo. Viennent en trois premières positions : le Cercopithèque (61,61%
du taux de rencontre), suivi de Chimpanzé (14,29%) et de Gorille avec
(7,14%), etc.
Le tableau 4 présente d’abord d’une manière individuelle les résultats de
chaque paramètre analysé à chacune des zones humides. le pH du sol est
généralement acide, les sols sont plus argileux, etc.). Le tableau 5 présente
également, d’une manière individuelle, les résultats de chaque paramètre
d’eau analysent à chacune de zones humides. Ensuite, il présente la valeur
moyenne du même paramètre pour les trois zones humides dont les
échantillons étaient analysés. Ces résultats renseignent donc dans la globalité
sur la composition physico-chimique de l’eau des zones humides visitées
dans le massif forestier d’Itombwe. Les résultats de l’analyse pédologique
des Malambo présentés renseignent dans la globalité sur la composition
physico-chimique du sol des zones humides visitées dans le massif forestier
d’Itombwe. Il en découle ce qui suit : (i) le pH varie de 3,72 à 5,77 avec une
moyenne de 5,1, soit un pH acide, car inférieur à 6 ; (ii) le pH-Kcl varie de
3,73 à 5,33, avec une moyenne de 4,57 ; (iii) le carbone organique varie de
0,59 à 24,66 % par site avec une moyenne de 5,59, ce qui témoigne une teneur
élevée en matière organique (Teneur > 3%).
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Tableau 3: Taux de rencontre faunique sur les sites d'études
N°
Espèce (nom scientifique)
Non
vernaculaire
Types observation
Total
obs.
Txr/
Km
%
Statut
UICN
Vu
Crotte
Cris
Trace
Nid
Miette
1
Cercopithecus ascanius
Cercopithèque
19
20
9
4
-
17
69
0,20
61,61
VU
2
Gorilla beringei ssp graueri Matschie, 1914
Gorille (*)
-
1
-
-
7
-
8
0,47
7,14
CR
3
Hystrix africaeaustralis Peters. 1852
Porc- épic
-
-
-
5
-
-
5
0,09
4,46
LC
4
Neotragus batesi. Winton 1903.
Antilope
-
3
-
-
-
-
3
0,14
2,68
LC
5
Pan troglodytes. SchweinfurthiiGiglioli, 1872
Chimpanzé (*)
-
2
-
4
10
-
16
0,21
14,29
EN
6
Potamochoerus porcus. Linnaeus, 1758.
Potamochère
-
-
-
1
-
-
1
0,12
0,89
LC
7
Psittacus erithacus Linnaeus. 1758
Perroquet (*)
4
-
-
-
-
-
4
0,52
3,57
VU
8
Tryonomis sp
Rat de Gambie
2
-
-
-
-
-
2
0,17
1,79
-
9
Bitis gabonica Duméril 1854.
Vipère
4
-
-
-
-
-
4
0,06
3,57
-
Total
29
26
9
14
17
17
112
-
100,00
Légende : Obs. : observation
Les teneurs élevées en carbone organique impliquent des limitations en matière organique du sol ; (iv) l’azote total varie de 0,046 à
2,09 % par site avec une moyenne de 0,5 attestant une teneur élevée en azote (Teneur > 0,25%) ; (v) le phosphore assimilable varie
de 22,28 à 54,74 ppm; avec une moyenne estimée à 32,24 ppm (Teneur > 25 ppm) confirmant une teneur élevée en phosphore ; (vi)
le potassium (cmol/Kg) varie de 0,31 à 4,4 cmol/kg avec une moyenne de 2,36, indiquant une teneur élevée en potassium dans six
zones humides visitées (SE-01, SE-02, SE-03, SE-04, SE-06 et SE-07) a l’exception d’une seule (SE-05) dont la teneur en potassium
est faible (0,31 < 0,45) ; (vii) le Sodium (cmol/Kg) varie de 0,87 à 12 cmol/kg avec une moyenne de 7,08cmol/Kg montrant une
teneur élevée en sodium (Teneur >2 cmol/Kg) avec un goût de l’eau jugé désagréable car la concentration du sodium dépasse 200
mg/l (Beed & Myers, 2000) ; (viii) le calcium (cmol/Kg) variant entre 1,53 et 19,59 cmol/kg, avec une moyenne de 11,50 présentant
une teneur élevée en calcium (Teneur > 5) a l’exception de la. la zone humide (SE-05) qui a affiché une teneur faible en calcium
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(Teneur < 5) et enfin, (ix) le magnésium (cmol/Kg) variant entre 2,09 et 5,10 cmol/kg, avec une moyenne de 3,44cmol/Kg, soit des
teneurs élevées en magnésium (Teneur >1,5 cmol/kg).
Tableau 4 : Résultats d'analyses des éléments pédologiques échantillonnés dans les Malambo
N°
Code du site.
N° du laboratoire.
pH
pH-Kcl
Conductivité
électrique(ɥ
S/cm)
Carbone
Organique (%)
Azote total (%)
Phosphore
assimilable (ppm)
CEC (cmol/Kg)
H+Al (cmol/Kg)
Al 3+ (cmol/Kg)
H+ (Cmol/Kg)
Potassium
(cmol/Kg)
Sodium
(cmol/Kg)
Calcium
(cmol/Kg)
Magnésium
(cmol/Kg)
% Argile
% Sable
% Limon
01
SE-01
Z03
5,65
5,32
449
24,66
2,09
22,28
32,39
0,036
0,32
-
1,51
2,97
6,96
3,84
36,2
47,8
16
02
SE-02
K33
4,67
3,73
80,7
2,68
0,046
37,73
10,59
4,7
1,12
3,58
4,4
12
19,59
2,99
12
80
8
03
SE-03
K32
5,23
4,70
98,3
0,72
0,11
31,32
3,84
0,1
0,40
-
2,4
9,2
15,75
3,83
6
92
2
04
SE-04
K34
5,49
4,81
34
0,59
0,23
27,84
3,36
0,5
0,56
-
3,4
8,8
14,69
3,58
4
76
20
05
SE-05
Z01
3,72
3,56
137
5,42
0,44
28,57
10,41
2,66
1,68
0,98
0,31
0,87
1,53
2,09
8,2
81,8
10
06
SE-06
Z02
5,77
5,33
195
3,64
0,30
23,2
8,82
0,072
0,24
-
1,67
3,89
5,36
2,64
10,2
73,8
16
07
SE-07
K31
4,93
4,54
167
1,45
0,30
54,74
6,36
0,5
0,48
0,02
2,8
11,8
16,63
5,10
6
64
30
Moyenne
5,07
4,57
165,86
5,59
0,50
32,24
10,82
1,22
0,69
1,53
2,36
7,08
11,50
3,44
11,80
73,63
14,57
Aussi, de façon globale, la capacité d’échange cationique (CEC) varie de 3,36 à 32,39 cmol/kg, avec une moyenne de
10,82. Ces résultats montrent que les sols des quatre Malambo, à savoir : SE-03, SE-04, SE-06 et SE-07 sont légers (Teneurs
<15). Ils présentent une faible CEC, laquelle s’explique en partie par la texture sableuse du sol qui caractérise les milieux
visités, alors que les sols des SE-01, SE-02 et SE-05, ont plutôt affiché une CEC assez élevée, soit des sols moyens (Teneurs
>15).
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Le degré d’hygrométrie pour de sept Malambo correspond à l’échelle 4, selon la classification hygrométrique proposée par
(Senterre, 2005). Il en découle que les zones humides dans le massif forestier d’Itombwe détiennent un sol permanent,
c’est-à-dire saturé en eau même en dehors de la saison des pluies.
Tableau 5 : Résultats d'analyses des éléments hydrologiques échantillonnés dans les Malambo
N°
Code du site
N° du labo.
pH-H20
Conductivité électrique
(
ɥ
s/cm)
Turbidité(UNT)
Dureté totale ((g/l)
Phosphore total (ppm)
Chlorure (mg/l)
Sulfate (mg/l)
Fluorure (mg/l)
Nitrate (ppm)
Ammonium (ppm)
Potassium (mg/l)
Sodium (mg/l)
Calcium (mg/l)
Magnésium (mg/l)
Bicarbonate (mg/l)
01
SE-01
Z03
6,51
432
129
376,69
0,052
532,5
64,464
3,40
31,2
0,22
169,26
4986,4
1048
265,2
520
02
SE-05
Z01
4,93
122
27,9
32,196
0,012
532,5
51,072
2,51
27,4
0,12
4,29
280,6
250
49,2
550
03
SE-06
Z02
5,84
100
727
51,51
0,041
710
95,568
2,34
30,5
0,16
5,85
230,0
1024
189,6
420
Moyenne
5,76
218,00
294,6
153,47
0,04
591,67
70,37
2,75
29,7
0,17
59,80
1832,3
774
168,
496,67
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3.4. Comparaison des certains paramètres physico-chimiques des échantillons de
l’eau et du sol dans les Malambo
Les résultats du tableau 6 reflètent une comparaison nette qui s’observe entre
différentes concentrations pour l’eau et le sol des Malambo. Les teneurs
moyennes obtenues pour les sept différents paramètres physico chimiques
dans l’eau et le sol montrent que l’eau des Malambo s’avère être plus
concentrée que le sol. En effet, en comparant les teneurs en (pH), potassium
(K), sodium (Na), calcium (Ca) et Magnésium (Mg), on remarque que les
valeurs de l’eau l’emportent sur celles du sol
Tableau 6 : Comparaison entre paramètre physico-chimiques de l'eau et du sol des
Malambo
N°
Paramètres
(moyenne)
Echantillons
analysés
pH
Conductivité
Electrique.
P
(mg/l)
K
(mg/l)
Na
(mg/l)
Ca
(mg/l)
Mg(mg/l)
01
Eau
3
5,76
218
0,04
59,80
1832,3
774
168
02
Sol
7
5,07
165,86
32,24
2.36
7,08
11,50
3,44
3.4.1. Autres paramètres de l’eau des Malambo confrontés à l’eau de breuvage
L’eau de ces clairières étant plus ou moins chargée en sels minéraux
(Magliocca & Gauthier-Hion, 2001), l’effet « saline » constitue donc un
caractère attractif de plus pour cette faune. Vande weghe (2004) abonde dans
le même sens en affirmant que, si les clairières intraforestières sur sol
hydromorphe ont bien une origine hydrologique, leur maintien est dû aux
grands mammifères. Dans ce cas leur présence résulterait des changements
actuels comme le broutage ou le piétinement des herbacées par la grande
faune, en particulier les éléphants. Si les facteurs de création et de maintien
des clairières sur sol hydromorphe ne sont pas encore totalement élucidés, il
semble que le facteur principal ayant présidé à leur création soit l’épaisseur
relativement fine d’un substrat gorgé d’eau.
Ces clairières fournissent d’importantes quantités de végétation herbacée aux
animaux herbivores : l’étude des activités de plusieurs espèces de mammifères
a ainsi montré qu’elles représentaient un espace trophique important pour ces
espèces animales, en liaison avec l'abondance des herbacées et la richesse des
sols et des végétaux en sels minéraux (Magliocca, 2000 ; Magliocca &
Gauthier-Hion, 2001).
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Tableau 7 : Comparaison de résultats d’analyse de l'eau des échantillons des Malambo
par rapport à la préférence animale
Légende : Moy. : Moyenne
De l’analyse des résultats du tableau 6, il en résulte que sept premiers
paramètres analysés (01-07), coïncident avec les résultats de référence. En
effet, l’eau des Malambo présente un pH moyen de 5,7. Une concentration
de 0,04 mg/l de phosphore, 18,32 g/l de sodium, 4,966 g/l en bicarbonate,
0,774 g/l en calcium, 15,346 g/l de dureté totale et 218 μs/cm en conductivité
électrique. Cette concentration élevée en sel s’avère une particularité
attrayante pour la plupart d’espèces animales qui viennent s’y abreuver, mais
aussi lécher le sol en des endroits bien précis ou ces teneurs s’avèrent plus
élevées. Awad El (2001) estime que les "caractéristiques physico-chimiques
extraordinaires des zones humides sont à l’origine de leurs richesses en
biodiversité. Selon Dany (2004), la salinité élevée que contient une telle eau
serait un facteur attrayant aux espèces animales car présentant des teneurs
considérées comme sûres dans l’eau de breuvage aux animaux domestiques
(Beed & Myers, 2000). Les résultats des tableaux (6) & (7) attestent que la
qualité de l’eau des Malambo a une particularité attrayante pour la faune
sauvage.
Beed et Myers (2000)
Résultats trouvés
N°
Paramètres
Seuil de
Concentration
minimum
Concentration
extrême
Maximum
SE-05
SE-06
SE-01
Moy.
01
pH
6,8 - 7,5
< 5,5–8,5 >
4,93
5,84
6,51
5,76
02
Phosphore (P)
0-1 mg/l
-
0,012
0,041
0,052
0,04
03
Sodium (Na)
1000 mg/l
2000
280,6
230,0
4986,4
1832,3
04
Bicarbonate
500 mg/l
-
550
420
520
496,6
05
Calcium (Ca)
500 mg/l
1000
250
1024
1048
774
06
Dureté totale
0-180 mg/l
-
32,19
51,51
376,69
153,46
07
Conductivité.
200 µs/cm
400
122
100
432
218
08
Chlorure (Cl-)
1500 mg/l
3000
532,5
710
532,5
591,67
09
Sulfate (S0
4
2-)
500 mg/l
1000
51,07
95,57
64,46
70,37
10
Fluorure (F-)
1 mg/l
2
2,51
2,34
3,40
2,75
11
Nitrate (N03-)
200 mg/l
400
27,4
30,5
31,2
29,7
12
Magnésium (Mg2+)
250 mg/l
500
49.2
189,6
265,2
168,0
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Tableau 8 : Comparaison entre paramètres physico-chimiques des échantillons de l'eau
et du sol dans les Malambo
N°
Paramètres
(moyenne)
Echantillons
analysés
pH
Conducti-
vité
Electrique
P
(mg/l)
K
(mg/l)
Na
(mg/l)
Ca
(mg/l)
Mg(mg/l)
01
Eau
3
5,76
218
0,04
59,80
1832,3
774
168
02
Sol
7
5,07
165,86
32,24
2.36
7,08
11,50
3,44
Les teneurs moyennes obtenues pour les sept différents paramètres physico-
chimiques dans l’eau et le sol montrent que l’eau des Malambo s’avère être
plus concentrée que le sol et ce, en comparant les teneurs en (pH), potassium
(K), sodium (Na), calcium (Ca) et magnésium (Mg) (Tableau 6). A la faveur
de conditions pédoclimatiques spécifiques, les Malambo du massif forestier
d’Itombwe sont entourées et parfois pénétrées de formations herbeuses sur
sol hydromorphe, connues généralement sous le vocable de « savanes », «
clairière intra forestière sur sol hydromorphe » en référence à Lejoly &
Lisowski (1997).
3.5. Savoirs traditionnels, ressources biologiques et protection suis generis
Dans le contexte d’une économie mondialisée, les ressources biologiques et
culturelles sont devenues de véritables produits dont la valeur marchande
sans cesse croissante attire la convoitise des groupes privés. Il est ainsi devenu
indispensable de s’assurer de la protection juridique non seulement de ces
ressources mais également des savoirs traditionnels qui en résultent. Ces
derniers revêtent aujourd’hui une importance considérable dès lors qu’ils
constituent, selon les termes de l’Organisation mondiale du commerce, une
« ressource mondiale précieuse », ce dont il faut déduire qu’il « est dans
l’intérêt général de l’humanité de créer les conditions qui soient favorables à
leur préservation et au maintien de la vitalité des peuples et des communautés
qui sont à l’origine de ces savoirs et les développent.
En effet, à travers les cultes aux ancêtres, les rites et cérémonies initiatiques,
les populations et les gardiens de la tradition marquent leur commune volonté
de préserver les richesses naturelles, culturelles et spirituelles que constituent
et véhiculent les forêts sacrées, y compris les Malambo. En adoptant de telles
Mubalama et al. Savoirs traditionnels conciliés aux connaissances scientifiques
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159
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pratiques, les pouvoirs traditionnels et les populations locales avaient la
pleine conscience de poser des actes essentiels de survie. Leur souci majeur
de protéger et de pérenniser leur environnement, véritable patrimoine vital
pour la sauvegarde du capital forestier dont la perception de la biodiversité
se traduit, dans le massif forestier d’Itombwe, par le vaste champ sémantique
du mot ITOMBWE. Si le terme Biodiversité est forgé par l’occident, il n’en
demeure pas moins que les communautés locales disposaient des leurs sous
d’autres dénominations. En effet, le mot Itombwe tire son origine en
Kibembe, il provient de la contraction de 3 mots à savoir : (i)
″Mitotombokyo″ qui signifie des gouttelettes d’eau de buée provenant d’une
forêt dense, il signifie en un mot l’humidité ou forêt humide. (ii)
″Milemandooo″ qui signifie que partout dans la forêt, il y avait présence des
chauves-souris, ce qui signifie il y avait présence accrue des chauves-souris.
(iii) ″MikelyaNgyoku″ : Pistes d’éléphants, ce qui veut dire que partout dans
les vallées à travers la forêt, l’on observait des traces de passages des
éléphants. En combinant ces 3 mots « Itombwe lya Mitotombokyo, Lya milema
ndoo, Lya mikela ya ngyoku » ce qui représente la diversité biologique dont
regorge la forêt d’Itombwe. (Ibucwa, 2008).
L’intégration des pratiques traditionnelles dans le processus de gestion
moderne des aires protégées ou de la biodiversité pourrait en constituer une
stratégie efficace et durable dans le contexte de greffage d’une part de la
tradition avec la modernité, et d’autre part, des cultures des communautés de
la région, la pérennisation de ces pratiques. Comprendre, s’adapter et intégrer
les visions du monde, les croyances, les systèmes de représentation, les
besoins, les intérêts, les pratiques traditionnelles ou les significations des
espaces et des ressources appartenant à la population locale sont aussi des
conditions pour la réussite du projet de conservation de la nature, note
(BoyaBusquet, 2006).
Aussi, le mode traditionnel de gestion s’avère déjà inadapté par rapport aux
contextes actuels du milieu bien que les pratiques culturales favorisent encore
la protection des Malambo. Il y a nécessité qu’il soit renforcé par des
stratégies adéquates applicables aux zones humides d’importances
internationales, car la tendance mondiale actuelle est comme le soulignent
Mubalama et al. Savoirs traditionnels conciliés aux connaissances scientifiques
comme nouveau paradigme de la conservation des Aires Protégées
160
Annales des Sciences et des Sciences Appliquées, UOB, 4 (N° 3/4), Juillet 2018
Bérard et al. (2005), ‘’ de conserver les pratiques locales, de réguler
l’utilisation qui en est faite et les valoriser’’. La conservation de la nature était
et demeure encore au cœur de quelques pratiques traditionnelles des
communautés locales d’Itombwe (Kyale & Maindo, 2017). Le champ des
dites pratiques est large. Il touche aux espèces et phénomènes naturels
limitant l’activité de chasse et/ou de pêche, aux rites d’initiation culturelle,
aux interdits alimentaires et aux contes légendaires inspires par la richesse
faunique et floristique, y compris le Malambo.
Nous terminons ce travail en émettant le souhait que ces espaces humides
soient rapidement intégrés pour faire de la RNI un site RAMSAR
(http://www.ramsar.org/ris/key_ris_index.htm), car refermant une
biodiversité élevée. A ce titre, les Malambo seront maintenus en tant que
sources de diversité biologique et en fournissant l’eau et la productivité
primaire dont un nombre incalculable d’espèces de plantes et d’animaux
dépendent pour leur survie. Bien plus, ils entretiendront de fortes
concentrations d’oiseaux, de mammifères, de reptiles, d’amphibiens, de
poissons et d’invertébrés et seront aussi des greniers importants de matériel
génétique végétal. Les interactions entre les éléments physiques, biologiques
et chimiques tels que les sols, l’eau, les plantes et les animaux, permettent au
Malambo, en tant qu’ élément de l’« infrastructure naturelle» du massif
forestier, de remplir de nombreuses fonctions vitales, notamment le stockage
de l’eau ; l’atténuation des sécheresses; le renouvellement de la nappe
phréatique; la recharge et la restitution des eaux souterraines ; l’épuration de
l’eau; la rétention des éléments nutritifs, des sédiments et des polluants; et la
stabilisation des conditions climatiques locales, en particulier du régime des
précipitations et des températures.
Les données réunies dans le cadre de cette étude n’ont été que partiellement
publiées. Leur analyse et leur publication vont se poursuivre. Les résultats de
ce travail pourront servir de référence aux études complémentaires qui seront
effectuées par la suite afin de connaître la dynamique saisonnière de la faune
sauvage dans les clairières et de déterminer l’impact réel des modifications
des paysages qui pourraient arriver dans le futur.
Mubalama et al. Savoirs traditionnels conciliés aux connaissances scientifiques
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161
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4. Conclusion
Les clairières et les forêts sacrées y associées sont une réalité dans la RNI.
Elles constituent un espace d'expression culturelle indéniable pour les
populations locales. Celles-ci permettent de protéger la biodiversité dont elles
sont, aujourd'hui, un véritable sanctuaire. C'est pourquoi elles doivent être
sauvegardées. Aussi, on ne peut guère envisager que les habitats spécifiques
que sont les Malambo en tant que reliques de la biodiversité dans le massif
forestier d’Itombwe aient subsisté sans l’apport des us et coutumes dont les
pratiques de gestion traditionnelle ont considérablement contribué à former
l’héritage naturel et culturel, en créant et en conservant des paysages aptes à
produire de multiples biens et services et à garantir les moyens de subsistance.
Les connaissances traditionnelles dans le domaine des forêts s’appuient de
plus en plus sur la synergie avec la technologie moderne, et dénotent une
compréhension profonde des dynamiques des écosystèmes forestiers ainsi
que des comportements et caractéristiques d’une grande variété d’espèces
d’animaux et de plantes.
Pour que les savoirs forestiers traditionnels soient pleinement incorporés dans
la gestion durable, il convient de renforcer les capacités des communautés et
de développer la recherche sur les connaissances traditionnelles. Il serait aussi
utile d’explorer plus à fond la question du partage des avantages et d’autres
types d’accords de gestion conjointe. Lorsqu’elles sont déconnectées de leur
milieu naturel, les communautés autochtones perdent inévitablement leur
savoir traditionnel et finissent habituellement par compter parmi les
populations les plus pauvres du monde. Toutefois, certains signes d’espoir se
font jour. Les scientifiques forestiers, par exemple, sont de plus en plus
conscients que les communautés locales détenant des savoirs traditionnels sur
les forêts sont à même de jouer un rôle important et de contribuer à mettre en
œuvre une gestion durable de ces dernières.
Pour ce faire, la collaboration entre les décideurs, les gestionnaires des forêts
et les communautés locales est de plus en plus reconnue comme un facteur
clé de la foresterie durable. Ainsi, de nombreuses initiatives d’organisations
de populations autochtones, d’organisations non gouvernementales, de
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comme nouveau paradigme de la conservation des Aires Protégées
162
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gouvernements nationaux et d’autres institutions portant sur la sauvegarde
des savoirs traditionnels.
Remerciements
Nous tenons à remercier les communautés locales dans les différentes entités de la RNI
localisées dans le Territoire de Mwenga qui ont collaboré étroitement avec les équipes ICCN
et WWF pour la réalisation de ce travail. Aussi, cette œuvre n’aurait pas pu voir le jour sans
le financement gracieusement octroyé par le Fonds Mondial pour la nature (WWF) pour la
conservation de la biodiversité dans la RNI. Ce dont nous sommes forts reconnaissants avec
les equpes.
Références bibliographiques
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Française. Paris.
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