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LE « MONTREAL MODEL » : ENJEUX DU PARTENARIAT
RELATIONNEL ENTRE PATIENTS ET PROFESSIONNELS DE LA
SANTÉ
Marie-Pascale Pomey et al.
S.F.S.P. | Santé Publique
2015/HS - S1
pages 41 à 50
ISSN 0995-3914
Article disponible en ligne à l'adresse:
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http://www.cairn.info/revue-sante-publique-2015-HS-page-41.htm
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Pour citer cet article :
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Pomey Marie-Pascale et al.,« Le « Montreal model » : enjeux du partenariat relationnel entre patients et professionnels
de la santé »,
Santé Publique, 2015/HS S1, p. 41-50.
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Santé publique volume 27 / N° 1 Supplément - janvier-février 2015 s41s41
1re partie – Nouveaux rôles et compétences des patients
Synthèse des connaissances
Le « Montreal model » : enjeux du partenariat relationnel
entre patients et professionnels de la santé
The Montreal model: the challenges of a partnership relationship between
patients and healthcare professionals
Marie-Pascale Pomey1, Luigi Flora2, Philippe Karazivan1, 3, Vincent Dumez4, Paule Lebel5, Marie-Claude Vanier6,
Béatrice Débarges4, Nathalie Clavel7, Émmanuelle Jouet2, 8
û Résumé
Dans le souci d’améliorer la santé de la population et d’améliorer
la qualité des soins et des services délivrés par le système de santé,
une des voies prometteuses est l’engagement des patients à tous
les niveaux du système de santé ainsi que dans la formation des
professionnels de la santé. Depuis 2010, un nouveau modèle rela-
tionnel, basé sur le partenariat entre les patients et les profession-
nels de la santé, a été développé à la Faculté de médecine de
l’Université de Montréal. Ce modèle de partenariat patient s’appuie
sur la reconnaissance des savoirs expérientiels du patient, issus
de la vie avec la maladie, et complémentaires des savoirs scienti-
continuum
d’engagement des patients et peut s’appliquer dans les milieux de
soins, de la formation des professionnels, de l’enseignement et de
la recherche. Nous exposerons dans cet article, les fondements
théoriques du partenariat patient, puis comment ce nouveau
modèle peut être mis en œuvre aux niveaux clinique, organisa-
tionnel et systémique et quels en sont les facteurs de réussite tant
du côté des patients que des professionnels de la santé. Le
« Montreal Model », en rendant le patient un partenaire incontour-
nable pour toutes les décisions qui le concernent et comme expert
de l’organisation des soins, offre aujourd’hui des perspectives
pertinentes pour la gestion des maladies chroniques. Cette
approche devrait avoir un impact important sur la santé des popu-
lations en améliorant la santé physique, psychologique et le
bien-être des personnes. Dans ce cadre, plusieurs programmes de
recherches sont actuellement en cours pour en évaluer l’impact.
Mots-clés : Partenariat patient ; Relations professionnel de santé-
patient ; Transfert ; Participation du patient ; Savoirs expérien-
tiels, pratiques collaboratives, patient partenaire, patient-expert,
patient-formateur, patient-ressource, patient-chercheur.
û Summary
A promising approach to improve the population’s health and the
quality of care and services provided by the health system consists
of patient engagement at all levels of the health system together
with training of health professionals. Since 2010, a new rational
model based on the partnership between patients and healthcare
professionals has been developed at the University of Montreal’s
Faculty of Medicine. This patient partnership model is based on
the recognition of the patient’s experiential knowledge gained
from living with a disease, which is complementary to the
This partnership is part of a continuum of patient engagement
and can be applied in healthcare, professional training, education
and research settings.
This article describes the theoretical basis for patient partnerships
and how this new model can be implemented in clinical,
organizational and systemic levels, as well as the success factors
in both patients and healthcare professionals.
The Montreal Model provides relevant outlooks for chronic disease
management by making patients essential partners in all decisions
affecting them and by treating them as experts in the organisation
population’s health by improving physical, psychological health,
as well as the patient’s well-being.
As part of this new framework, several research programs are
currently underway to evaluate the impact of this model.
Keywords: Patient partnership; Professional-patient relations;
Patient participation; Transfer (psychology); Experiential
knowledge, collaborative practices, partner patient, expert-
patients, trainer-patients, contact-patient, researcher-patient.
1
Succ. « Centre-ville » – H3C 3J7 Montréal Québec – Canada.
2
publique – Université de Montréal – Québec – Canada.
3 Centre de recherche du Centre hospitalier universitaire de Montréal – Université de Montréal – Montréal Québec – Canada.
4 Direction collaboration et partenariat patient – Centre de pédagogie appliquée aux sciences de la santé – Faculté de médecine – Université de
Montréal – Québec – Canada.
5 Département de Médecine familiale et médecine d’urgence – codirectrice de la Direction collaboration et partenariat patient – Centre de pédagogie
appliquée aux sciences de la santé – Faculté de médecine – Université de Montréal.
6 Faculté de Pharmacie – présidente du Comité inter-facultaire opérationnel de formation à la Collaboration et au partenariat de soins – Université de Montréal
– CSSS de Laval.
7 École de santé publique – Université de Montréal – Montréal – Canada.
8 Laboratoire de recherche en psychiatrie sociale – Établissement public de Santé Maison Blanche.
Correspondance : M.-P. Pomey Réception : 01/05/2014 – Acceptation : 07/11/2014
marie-pascale.pomey@umontreal.ca
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Santé publique volume 27 / N° 1 Supplément - janvier-février 2015
M.-P. Pomey, L. Flora, P. Karazivan et al.
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Introduction
Construits entre les années 1940 et 1970, les systèmes
de santé se sont structurés autour des soins aigus et haute-
ment spécialisés, offerts dans des établissements de santé.
Or, on constate qu’au cours de ces 30 dernières années, les
besoins ont considérablement changé dû à l’augmentation
Celles-ci sont actuellement la principale cause de morbidité
tendance ne fera que s’accentuer au cours des prochaines
rapport publié en 2010, le Commissaire à la santé et au
bien-être du Québec mettait en évidence que ces mutations
-
tudes de vie, un renforcement de l’autogestion par les
patients, une accessibilité accrue aux professionnels de
la santé, une meilleure continuité et coordination des soins
et des services. Aussi, dans le souci d’améliorer la santé
de la population et d’améliorer la qualité des soins et
des services délivrés, une des voies prometteuses réside
dans l’engagement des patients à tous les niveaux du
un continuum dans l’engagement des patients, tel celui de
Carman et al.
cation. Toutefois, aucun ne va aussi loin que celui mis en
place par la Faculté de médecine de l’Université de Montréal
(UdM) que l’on nommera dans cet article le Montreal
model
Nous présenterons tout d’abord les fondements théo-
riques du partenariat patient sur lesquels s’appuient les
différents secteurs d’application : en milieu de soins, de
l’enseignement et de la recherche. Nous déclinerons égale-
ment comment ce partenariat peut se mettre en œuvre aux
niveaux clinique, organisationnel et systémique et quels
sont ses facteurs de réussite. Nous conclurons par la présen-
tation des perspectives actuelles et des recherches en cours
pour évaluer l’impact de ce nouveau modèle sur la santé
de la population.
Les fondements théoriques du partenariat
patient : un nouveau de paradigme
La perspective du partenariat patient propose de consi-
dérer le patient comme un soignant et un membre à part
une vingtaine d’années, les approches paternalistes des
soins ont laissé progressivement la place aux approches
centrées sur le patient qui prennent en considération les
Partout dans le monde, les organisations de soins, les insti-
tutions et les universités redoublent d’efforts pour impli-
quer les patients et rendre leur participation de plus en plus
toutefois le monopole du rôle de soignant. La perspective
du partenariat de soins et de services du Montreal model
franchit un pas de plus en considérant le patient comme un
acteur de soins à part entière dont le statut de soignant
une rupture et s’affranchit donc de l’approche centrée
généralement pas être guéries complètement, avec
lesquelles les personnes doivent vraisemblablement
composer pour le reste de leur vie et dont l’évolution est
intimement liée aux habitudes de vie, l’expérience devient
une source riche de savoirs, essentielle pour la prise de
Montreal model s’appuie sur le savoir
patient, issus du vécu de ses problèmes de santé ou psycho-
sociaux, de son expérience et de sa connaissance de la
trajectoire de soins et services, ainsi que des répercussions
de ces problèmes sur sa vie personnelle et celle de ses
Ainsi, dans la perspective d’un partenariat, une décision
et des actes de soins de qualité reposent sur les connais-
-
Le patient doit pouvoir faire valoir son expérience, ses
concernant et exercer un certain niveau de leadership, au
même titre que les professionnels apportent leur expertise
actions avec les professionnels dépend en partie de son
niveau d’expérience dans sa maladie (savoirs expérientiels
qu’il acquiert au fur et à mesure de la vie avec la maladie)
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Santé publique volume 27 / N° 1 Supplément - janvier-février 2015
LE PARTENARIAT PATIENT EN SANTÉ PUBLIQUE
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mais aussi du niveau de développement de ses compé-
tences relationnelles (capacités de communiquer ses
et les intervenants suppose aussi de la part des profession-
nels la responsabilité d’informer mais surtout d’entretenir
ci développe la compréhension de sa maladie, de ses déter-
minants et de son traitement pour lui permettre de devenir
progressivement autonome et actif dans la dynamique de
la pleine compréhension permet de revoir comment consi-
dérer le traitement des maladies chroniques.
À l’échelle internationale, des expériences pionnières de
partenariat patient ont eu lieu, notamment aux États-Unis
où un programme de formation vise à outiller les patients
dans le développement de leur capacité de soins pour gérer
dans le cadre de l’approche de soins Expert patients
programmes
à développer les compétences d’autogestion chez des
patients atteints de maladies chroniques. En France, la
Faculté de médecine Pierre et Marie Curie – Sorbonne
Université, a créé un diplôme universitaire et un master où
des professionnels de la santé et des patients sont formés
Une autre initiative s’est organisée en santé mentale et en
dépendance à l’initiative du Centre Collaborateur de l’Orga-
comme cela se fait déjà en Amérique du Nord. Dans toutes
ces initiatives, il s’agit d’accompagner une transformation
des représentations et comportements en considérant le
patient comme un sujet apprenant qui s’insère dans une
organisation de soins, laquelle devient elle-même appre-
nante dans le but d’améliorer la qualité de vie des malades
atteints de maladies chroniques et la qualité des soins
-
Au Canada, le Ministère de la santé de la Colombie-
Britannique a implanté, en 2007, l’approche patients as
partners, qui favorise l’implication et la prise de décision
des patients dans leur processus de soins en leur permet-
tant de développer des capacités/compétences et en les
impliquant dans l’amélioration continue de la qualité de
-
riat patient dans le système de santé s’est diffusée depuis
2011 dans les établissements de santé, sous l’impulsion de
la Direction collaboration et partenariat patient (DCPP) de
la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, laquelle
a été la première faculté à l’échelle internationale à recruter
-
ment dans les soins mais aussi dans l’enseignement et la
-
cement de l’Agence de la santé et de services sociaux (ASSS)
de Montréal par le biais d’un appui méthodologique de la
DCPP, ont été initiées. Ces programmes de partenariat de
soins et de services se sont concentrés sur les maladies
chroniques et des établissements de santé mais s’inté-
ressent à présent aussi aux soins de ville.
Vers un nouveau modèle : le Montreal model
L’engagement des patients proposé par l’Université de
Montréal permet de développer un modèle multidimen-
sionnel du continuum de l’engagement du patient inspiré
des travaux de Carman et al.
faire au niveau des soins, de l’organisation de services et de
La dispensation directe des soins
Ce niveau réfère aux interactions entre les professionnels
de la santé et les patients. Elles peuvent se faire dans le
cadre du colloque singulier entre un patient et un profes-
sionnel mais également au sein d’une équipe de profession-
nels de la santé incluant le patient. Dans ce cadre d’activité,
sont intégrées pour chaque intervenant ses valeurs et ses
expériences qui peuvent aussi bien toucher à la promotion,
la prévention que le diagnostic, le traitement et les soins
prend en considération sa santé, choisit ses professionnels
de la santé et est couvert ou pas pour son risque maladie.
À ce niveau de participation, les patients peuvent recevoir
Figure 1 : Le modèle « patient partenaire » et ses prédécesseurs
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des documents comprenant de l’information sur leur
maladie (information), être amenés à porter un jugement
sur les soins (consultation) voire discuter avec les
pro fessionnels de la santé des décisions les concernant
(collaboration).
Dans le cas du partenariat de soins du Montreal model,
le patient est impliqué tout au long du processus qui
le concerne comme lors de son plan de soins, les décisions
étant prises en fonction de ses savoirs, ses propres valeurs
et ses objectifs de vie. Par exemple, dans le cas d’un patient
atteint d’un cancer, le patient est présent au cours de la
réunion interdisciplinaire et participe activement à la prise
de décision le concernant. Sa parole est considérée au
même titre que celle des autres personnes présentes, le
patient peut être accompagné d’un proche ou d’un patient-
ressource pour pouvoir être plus à même d’exprimer ses
choix. Pour favoriser cette participation, et sachant qu’il
n’est pas facile pour une personne qui doit faire face à des
situations complexes en lien avec sa santé de s’exprimer,
des patients-ressources ou encore des pairs-aidants dans le
domaine de la santé mentale sont de plus en plus déployés
particularité d’avoir traversé les mêmes parcours thérapeu-
tiques et peuvent aider individuellement des personnes à
passer au travers de ces épreuves (encadré 1).
De plus, le partenariat de soins demande aux profes-
sionnels une ouverture d’esprit, des habiletés à travailler
en équipe et la capacité de partager l’information avec
tous les membres de l’équipe, incluant le patient. Cela peut
aussi se traduire par le partage du dossier médical, tenu
conjointement par le patient et les professionnels de la
Figure 2 : Cadre théorique du continuum de l’engagement des patients inspiré de Carman et al. (2013)
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LE PARTENARIAT PATIENT EN SANTÉ PUBLIQUE
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Encadré 1 : Le rôle des patients-ressources dans le programme
d’amputation de la main au Centre hospitalier universitaire
de Montréal (CHUM)
Depuis 2010, le Centre d’expertise en réimplantation ou
revascularisation microchirurgicale d’urgence (CEVARMU) fait appel,
sur une base ponctuelle, à d’anciens patients ayant terminé
leur processus de réadaptation afin d’accompagner et de soutenir
les patients nouvellement arrivés au Centre dans leur propre
processus de soins. Considérés comme des partenaires à part entière
de l’équipe, ils sont invités à venir rencontrer les patients
hospitalisés ou qui sont en processus de réadaptation au CEVARMU
sur une base bénévole afin de témoigner de leur expérience
mais aussi de s’assurer que les plans de traitement proposés
aux patients soient bien compris par ces derniers et qu’ils répondent
à leurs besoins.
L’organisation des services et la gouvernance
dans les établissements de santé
La participation des patients peut aussi se faire au niveau
organisationnel, que cela soit dans le cadre de l’organisa-
tion des programmes et des services que dans la gouver-
médicaux, d’établissements de moyen et long séjour,
de centres de réadaptation, etc. À ce niveau, l’expérience
des patients devient une source d’informations précieuses
pour améliorer l’intégration et la continuité des soins et
la plus harmonieuse du point de vue du patient. Les patients
peuvent participer avec les gestionnaires ou les adminis-
trateurs à des projets d’amélioration continue de la qualité
l’offre et l’évaluation de soins et de services. Au niveau de
la gouvernance, les patients peuvent être présents dans
les comités d’usagers ou les conseils d’administration,
ils peuvent également être impliqués dans le recrutement
de personnels, la formation et le développement de
compétences.
Lors d’un engagement de type partenariat au niveau de
l’organisation des programmes et des services, les patients
co-construisent les décisions en étant inclus aux différentes
étapes de conduite du projet (diagnostic, implantation de
changement, transfert d’expertise et d’outils, réévaluation
du soutien de la DCPP qui a structuré un programme
Partenaires de soins et de services (PSS). Ce programme
débute par une sensibilisation de la direction au change-
ment culturel qu’une telle démarche va entraîner et l’obten-
tion de son engagement formel. Ensuite, les services, qui
sont volontaires pour s’engager dans l’amélioration de
leurs pratiques collaboratives basées sur le PSS, mettent
en place un comité d’amélioration continue du partenariat
de soins et de services. Ces comités sont constitués de
secrétaires, assistantes sociales ou autres personnes) et de
patients (deux au moins). Les patients, présents sur ces
comités, sont considérés comme des patients-ressources,
c’est-à-dire qu’ils ne sont plus dans un épisode aigu de soins
mais ont été soignés dans le programme où s’inscrit le
ayant pris du recul sur ce qu’ils ont vécu et partager leur
vision des dysfonctionnements ou lacunes qu’ils ont pu
-
leurs besoins. Les critères de sélection de ces patients-
ressources portent en particulier sur la richesse de l’expé-
rience de soins, la capacité à s’exprimer et à prendre leur
place au sein d’un comité et la motivation de s’engager
à améliorer les services/programmes pour l’ensemble
des patients. Ces patients sont préalablement formés par la
DCPP avant de participer à ces comités et sont accompa-
gnés jusqu’à leur autonomie. En complément, pour favo-
riser un travail harmonieux entre les membres du comité,
des soins et des services qui peuvent être mis en place
de pratique visibles rapidement. Les actions pour parvenir
soutien de l’organisation et de la DCCP. Une évaluation
régulière de l’atteinte des objectifs est ensuite réalisée.
Québec, se sont impliquées dans ce programme entre 2011
et 2014. Ces équipes sont en médecine générale, soins à
domicile, soins de longue durée, soins spécialisés (santé
mentale, cancérologie, diabète, réadaptation, etc.). Des
Au niveau de la gouvernance, il n’existe actuellement pas
au Québec de partenariat à proprement parler, excepté
ceux mis en œuvre par certains comités d’usagers dont
les membres élus travaillent en étroite collaboration avec
des patients-ressources qui peuvent alimenter leurs
L’élaboration des politiques de santé
La participation peut concerner aussi le développement,
l’implantation et l’évaluation des politiques et programmes
mis en œuvre par les Agences régionales de santé ou le
Ministère de la santé. L’engagement à ce niveau peut être
réalisé soit par des patients, soit par des citoyens ou le grand
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public. C’est ainsi que des représentants peuvent collaborer
avec des décideurs pour trouver des solutions dans la
priorités de santé ou d’allocation de ressources. À ce niveau,
l’engagement peut être individuel ou s’exercer via des asso-
ciations représentatives de patients ou de groupes, ou de
-
tiques publiques sur le modèle du partenariat. Cependant,
le Ministère de la santé soutient l’approche patient parte-
naire
depuis 2011 sur la grande région de Montréal, le ministère
-
taine d’établissements ou de réseaux de santé sur l’ensemble
de la province du Québec dans la structuration de l’enga-
gement et de la participation des patients ainsi que la
conception de transferts de méthodologies, de connais-
sances et de compétences à destination de ces sites.
Les enjeux de réussite du partenariat
L’engagement des patients aux différents niveaux
du système de santé et à différents moments du continuum
communs à tous les modes d’engagement.
Les facteurs généraux
Dans l’article de Carman et al.
sont mis en évidence et sont corroborés par les travaux
menés par la DCPP au niveau des soins directs et de l’orga-
du patient : ses valeurs, ses connaissances, ses attitudes,
ses croyances et ses expériences antérieures sont autant de
comme son niveau d’éducation, son état de santé, sa
de santé, l’engagement des patients est dépendant de la
culture institutionnelle qui est plus ou moins ouverte et
réceptive aux points de vue du patient et de ses proches. En
fonction aussi des politiques et des pratiques, les organisa-
tions peuvent rendre plus ou moins facile la participation
active des patients. Les normes sociales peuvent aussi être
plus ou moins favorables à la participation des patients et
des citoyens et entraîner un impact sur la perception de la
valeur ajoutée de leur engagement aux différents niveaux.
De plus, les modalités de rémunération des professionnels,
des établissements et des patients peuvent favoriser ou pas
Les facteurs spécifiques
simultanée des patients et des professionnels à cette
évidence que la parole des patients a du mal à se construire
surmonter l’asymétrie de connaissances, de faire valoir leur
point de vue devant l’absence d’intérêt des professionnels,
de se confronter aux relations de dépendance et de
toujours à l’aise avec l’idée de partager l’information, de
cerner l’apport des patients et de remettre en question leur
pratique. Souvent, la participation des patients est vue comme
•La formation des patients
qui ont à interagir auprès de personnes dans le système de
santé, il est important de mettre à disposition des patients
de l’information de qualité que cela soit par l’intermédiaire
de sites internet, de documents écrits ou de centres de
documentation comme les espace de rencontres et d’infor-
mation qui ont été mis en place dans les centres de lutte
et l’État a un rôle important à jouer pour s’assurer que cette
information réponde aux besoins, au niveau de littératie
valides.
Au niveau des services, et plus particulièrement de l’im-
plication des patients dans des groupes d’amélioration
continue de la qualité ou de co-construction de programmes
de santé publique, il est important de prendre en considé-
ration que tous les patients ne peuvent être présents sur ce
type de groupes de travail. Le but de ces comités est de
trouver des solutions pour faire en sorte que le système
est fondamental que les personnes qui y participent ne
soient pas dans un processus aigu de soins ou encore une
démarche de revendication de droits mais plutôt qu’ils
soient présents en raison de leur capacité à poser un regard
même si le recrutement de patients paraît parfois complexe,
des critères de sélection sont à respecter et de gages de
des patients eux-mêmes. Ensuite, il est nécessaire que
comprendre le contexte dans lequel ils sont amenés à
intervenir et ce qui est attendu de leur contribution. Cette
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LE PARTENARIAT PATIENT EN SANTÉ PUBLIQUE
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formation devrait idéalement être assurée par des patients-
formateurs
rencontres avec des patients, de s’assurer qu’ils sont satis-
réajuster les modalités de leur participation pour maintenir
participent à des activités de formation à l’UdM.
La DCPP développe actuellement une école du partena-
patients qui souhaitent participer à des activités dans les
•La formation des professionnels
La formation initiale
Pour soutenir ces changements majeurs de pratiques
dans les soins et les organisations de santé, les nouvelles
générations de professionnels de la santé doivent être
prêtes à pratiquer dans des contextes de pratiques collabo-
ratives et contribuer au déploiement du partenariat dans
les milieux cliniques. C’est ainsi qu’à l’Université de
Montréal, depuis 2011, des patients sont intégrés à des
cours visant le développement progressif des compétences
de collaboration interprofessionnelle et de partenariat
de 13 disciplines différentes des sciences de la santé et
sciences psychosociales. Dès la première année d’étude,
les étudiants de ces programmes sont réunis et explorent
ensemble le concept au travers d’exemples personnels et
de témoignages de patients. Lors de la deuxième année,
ils sont amenés à se familiariser avec le déroulement d’une
-
rentes professions et appliquer le concept de partenariat
troisième année, les étudiants intègrent le concept de
partenariat lors d’une simulation de réunion d’équipe
interprofessionnelle d’élaboration d’un Plan d’intervention
-
lisée. Chaque cours regroupe environ 1 400 étudiants. Des
patients-formateurs ont été graduellement intégrés dans
ces trois cours et ce, depuis l’année académique 2012-
2013. Les données d’évaluation de ces cours par les
-
dèrent que l’expérience partagée par le patient a enrichi les
discussions en classe et que la co-animation profession-
partenariat de soins dans leur pratique future. En plus de
ces cours, des activités interprofessionnelles en stage et de
Le développement professionnel continu
pratiques collaboratives et le partenariat. L’utilisation de
matériel pédagogique commun dans les cours de formation
initiale et les activités de développement professionnel
continu permet d’assurer une cohérence entre le milieu
académique et les milieux cliniques. De plus, le recrutement
de tuteurs pour les cours inter facultaires dans les milieux
cliniques favorise le transfert des connaissances lors du
retour des cliniciens dans leur équipe clinique. À ces
équipes, se sont ajoutés les professionnels impliqués
et des services sociaux et qui, jusqu’à présent, n’incluaient
pas de manière systématique des patients. Aussi, ce
nou veau programme permet de former les professionnels
et les patients qui travaillent dans des démarches Lean au
en santé pour structurer l’engagement patient dans les
établissements concernés.
Le partenariat en recherche
L’implication des patients à la recherche
des patients dans l’élaboration des priorités de recherche
et dans la réalisation des recherches. C’est ainsi que depuis
l’automne 2013, des groupes de deux à trois patients cher-
cheurs sont régulièrement sollicités pour donner leur avis
plus, depuis 2013, un projet de structuration de l’engage-
ment des patients et des citoyens est en cours d’élaboration
à l’échelle nationale pour accompagner les équipes de
recherche qui désirent intégrer des patients chercheurs
dans les meilleures conditions. La nouvelle Stratégie de
d’ailleurs que l’engagement des patients ainsi que des clini-
Les travaux de recherche en cours
valeur les effets du partenariat patient sur les populations
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Tableau I : Cours Collaboration en sciences santé (CSS) année académique 2013-2014
Cours Première année (CSS1900) Deuxième année (CSS2900) Troisième année (CSS3900)
Objectifs pédagogiques Découvrir la collaboration
et le partenariat de soins. Appliquer les concepts de
collaboration et de partenariat
de soins.
Intégrer les concepts de collaboration
et de partenariat de soins.
Activité pédagogique
reliée au partenariat Partie 1 : Discussion en petit groupe
en alternance avec plénière
sur le partenariat de soins
et partage d’expériences de soins
vécues par eux ou leurs proches.
Partie 2 : Découverte des
professions en petites équipes.
Partie 1 : Visionnement de la vidéo
sur réunion d’équipe
interdisciplinaire, discussion
en équipe et plénière.
Partie 2 : Discussion en petit groupe
pour identifier les besoins,
les interventions possibles
et clarifier les rôles entre
les intervenants pour une situation
clinique ambulatoire de pédiatrie.
Simulation d’une réunion clinique
interprofessionnelle visant à produire
un plan d’intervention
interdisciplinaire (PII) pour un patient
âgé hospitalisé pour un accident
vasculaire cérébral.
Rôle spécifique des
patients-formateurs,
en plus de la
co-animation,
lors de l’atelier
interfacultaire
Partage son expérience de soins
et discussion sur les enjeux
du partenariat de soins
pour un patient.
Donne de la rétroaction
aux étudiants lors de la discussion
sur les expériences de soins vécues.
Répond aux questions des étudiants
lors de la partie de la découverte
des professions.
Partage son point de vue de patient
sur sa présence et participation à
une réunion interprofessionnelle.
Participe aux discussions
avec les étudiants et le tuteur.
Assure la représentation
des objectifs et intérêts de la jeune
patiente et de ses parents
dans le contexte de la situation
clinique fictive.
Participe aux discussions
avec les étudiants et le tuteur.
Assure la représentation des objectifs
et intérêts du patient de la situation
clinique lors de la discussion
interprofessionnelle visant à produire
un plan d’intervention
interdisciplinaire.
Nombre d’étudiants 1 555 1 467 1 295
Nombre de tuteurs
professionnels
de la santé
31 75 68
Nombre de patients
formateurs 35 72 63
Programmes de provenance des étudiants inscrits à ces cours : audiologie, ergothérapie, kinésiologie, médecine, médecine dentaire, nutrition,
optométrie, orthophonie, pharmacie, physiothérapie, psychologie, sciences infirmières, travail social.
de leur utilité sociale en contribuant à l’amélioration des
soins et services de santé et les intervenants ont retrouvé
le sens fondamental de leur engagement professionnel
•Le troisième analyse l’impact de différentes stratégies
d’implantation de PSS sur les équipes de cancer et de
santé mentale sur les patients (expérience de soins,
qualité et sécurité), les équipes professionnelles (satis-
-
•Le quatrième étudiera la perception des patients, des
intervenants et des gestionnaires sur la co-construction
du partenariat au travers de programmes de prévention
et de gestion des maladies chroniques au sein des Centres
processus de co-construction et son impact sur les
populations visées en termes d’accessibilité, d’adhésion
au traitement et de qualité de vie.
atteintes de maladies chroniques, un certain nombre de
projets de recherche sont en cours.
•Le premier consiste à appréhender les pratiques mises
en œuvre par les patients qui participent aux activités
pratiques mises en œuvre pour construire un partenariat
•Le deuxième porte sur les milieux de soins et leur trans-
DCPP. Un premier bilan a mis en évidence une améliora-
tion de la qualité aux différentes étapes du processus de
soins (accueil, annonce du diagnostic, informations trans-
mises aux patients, mécanismes de communication, acti-
service à un autre) ainsi qu’une amélioration des
pratiques collaboratives et de la culture du partenariat
avec le patient. Les patients ont ressenti un renforcement
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Santé publique volume 27 / N° 1 Supplément - janvier-février 2015
LE PARTENARIAT PATIENT EN SANTÉ PUBLIQUE
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Conclusion
L’engagement des patients est vu depuis plusieurs années
comme une des voies prometteuses pour améliorer la santé
de la population et les problèmes auxquels sont confrontés
-
rientiels constituent une richesse inestimable pour identi-
évaluées jusqu’à présent. Le Montreal Model, développé
à l’Université de Montréal par la DCPP, illustre comment
l’expertise de la vie avec la maladie des patients peut être
patients-ressources
qui contribuent à l’amélioration de la qualité des soins et
de la qualité de vie tant des patients que des profession-
nels ; au niveau de l’enseignement des professionnels
de santé et du psychosocial avec les patients-formateurs
et au niveau de la recherche par l’implication de
patients-chercheurs.
Le succès de l’engagement et le niveau de participation
des patients dans les différentes strates du système de
santé, et la satisfaction rencontrée par l’ensemble des
acteurs ayant fait l’expérience de cette approche de parte-
nariat, permettent d’envisager à terme une amélioration
des pratiques et de l’état de santé des populations atteintes
de maladies chroniques ; plusieurs programmes de
recherche en cours devraient en démontrer plus largement
-
mène et ses conséquences tant sur l’individu que sur l’orga-
Le partenariat patient part donc de l’expérience des indi-
vidus avec la maladie, les seuls dans l’organisation actuelle
à être détenteurs d’une vue systémique, pour la mettre à
disposition d’autres patients, de la formation de profession-
nels, actuels et futurs, des organisations et de travaux
de recherche. C’est la combinaison de la participation
des patients aux milieux de soins, comme l’ont démontrée
Boivin et al.
la santé des populations atteintes de maladies chroniques
et de créer les milieux de pratiques et d’enseignement de
demain plus humanistes.
Aucun conflit d’intérêt déclaré
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier chaleureusement Linette
Saul-Cohen pour la relecture de l’article.
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Figure 3 : L’engagement des patients en santé
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Santé publique volume 27 / N° 1 Supplément - janvier-février 2015
M.-P. Pomey, L. Flora, P. Karazivan et al.
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