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GOUVERNANCE & EMPLOI
Patrick THILL - CEPS/INSTEAD
Les parlements nationaux et la Stratégie
Européenne de l’Emploi (SEE). Vers un dialogue
coexistant au Luxembourg ? (1ère partie)
GOUVERNANCE & EMPLOI N°8 Mai 2009
Alors que les activités de la Chambre
des Députés en tant qu’organe du pou-
voir législatif mettant la dernière touche
aux textes législatifs sont devenues plus
connues au Luxembourg, l’implication
accrue de la Chambre dans les affaires
communautaires et dans le processus de
Lisbonne, entamé en 2000 lors du Conseil
européen de Lisbonne, reste encore
entourée d’un certain mystère.
Dans le cadre d’une recherche plus glo-
bale du rôle des parlements nationaux
dans la stratégie de Lisbonne, cette pre-
mière partie poursuit un double objectif :
d’une part, éclairer l’implication parlemen-
taire à l’échelle communautaire et, d’autre
part, identier au sein du cercle des prin-
cipaux acteurs nationaux engagés dans le
processus de réformes, le rôle d’un nouvel
acteur proche des citoyens et de la société
civile qui se trouve encore en quête de sa
propre identité européenne.
En 2006, l’économiste Mariusz-
Jan Radlo a conclu dans son étude
sur les Programmes nationaux de
réforme, appelés par la suite PNR
et envoyés en 2005 par les Etats
membres de l’Union européenne à
la Commission européenne dans le
cadre de la relance de la stratégie de
Lisbonne que « dans la plupart des
cas, le rôle des parlements (…) a été
bien limité » et que « la tendance a
été de traiter les PNR comme tout
autre document communautaire
qui a été soumis aux parlements »
(Radlo, 2006 : 54). En ce qui
concerne le contrôle parlementaire
a posteriori des PNR, l’économiste
Ian Begg a afrmé que « les
parlements nationaux n’avaient pas
réellement les moyens de surveiller
la performance gouvernementale »
(Begg, 2006 : 19). D’autres ont
qualié les PNR comme étant
seulement des « rapports d’activité
bureaucratiques » (Comité écono-
mique et social européen, 2005)
et l’échec de l’Agenda 20101 dans
son ensemble a souvent été mis
en exergue (Collignon, 2008). Plus
récemment, la thèse a été soutenue
parmi des académiciens que l’UE
aurait généralement amoindri le
pouvoir des parlements nationaux
(Duina, Oliver, 2005 : 176).
Compte tenu du rôle plus signicatif
dévolu par la réorientation de la
stratégie de Lisbonne de 2005 à
la société civile, aux partenaires
sociaux et aux parlements nationaux
dans le cadre d’un engagement des
dirigeants européens d’impliquer
1 La stratégie de Lisbonne (Lisbonne I) a été lancée par les Etats membres de l’Union européenne
lors du Conseil européen de Lisbonne (23-24 mars 2000) en réaction aux multiples dés qu’ont
posé le succès économique des Etats-Unis, la baisse signicative du chômage américain (4%
en 2000) et une augmentation des investissements dans la recherche et les nouvelles technolo-
gies à la n des années 1990 sous l’administration Clinton. Il s’agissait à Lisbonne et au
cours des Conseils suivants de dénir une stratégie nouvelle et commune visant à renforcer sur
le plan communautaire, l’emploi, la cohésion, la compétitivité des économies européennes face
aux croissances considérables des Etats-Unis et des pays de l’Asie, ceci dans l’objectif
d’instaurer une société de la connaissance. La stratégie de Lisbonne repose nalement sur trois
piliers : le pilier économique, le pillier social et le pillier environnemental (ajouté lors du Conseil de
Göteborg). Après des résultats très mitigés constatés lors d’une révision à mi-parcours en 2005 lors de
la Présidence luxembourgeoise et basés notamment sur le rapport Kok, rédigé par un groupe
d’experts de haut niveau dirigé par Wim Kok, la relance de la stratégie de Lisbonne (Lisbonne II)
a été décidée lors du Conseil européen de Bruxelles en mars 2005. Parmi les principaux objectifs
de la relance à réaliser d’ici 2010 gurent : un taux d’emploi global de 70% en 2010 (67% en
2005), un taux d’emploi des femmes de 60% en 2010 (57% en 2005), un taux d’emploi des tra-
vailleurs âgés (55-64 ans) de 50% en 2010, ainsi que l’implémentation jusqu’en 2010 de struc-
tures de garde pour 90% des enfants de trois ans et plus et pour 30% des enfants de moins de 3
ans. En matière d’innovation, une croissance des dépenses pour la recherche et le développe-
ment (R&D) à 3% du budget a été visée d’ici 2010.
Introduction
2
Gouvernance & Emploi 8-2009
2 Avant la dernière révision constitutionnelle de 2009, la Chambre des Députés exerçait le pouvoir législatif conjointement avec le Grand-Duc. Selon
l’article 47 de la Constitution luxembourgeoise, elle possède le droit d’initiative en matière législative ainsi que le pouvoir d’instruire et de voter les lois.
Dans le cadre de la procédure de confection d’une loi, les commissions parlementaires au sein de la Chambre examinent ou amendent les textes.
Après le vote d’un texte législatif, c’était le Grand-Duc qui, d’après l’ancienne version de l’article 34 de la Constitution, sanctionnait (mission relevant du
pouvoir législatif) et promulguait (mission relevant du pouvoir exécutif) le texte. De par son droit de promulgation, il attestait la teneur de la loi et en
ordonnait la publication dans le Mémorial et son exécution. En pratique, la procédure de sanction et de promulgation se faisait par l’apposition de la
signature grand-ducale en bas du texte de la loi qui était revêtue d’une formule de promulgation. C’est la raison pour laquelle les lois ne portent pas
la date du vote de la Chambre, mais celle de la signature grand-ducale. Toutefois, une révision constitutionnelle par le biais de la loi du 12 mars 2009
portant révision de l’article 34 de la Constitution a supprimé le droit de la sanction de la Constitution, de manière à ce que le Grand-Duc n’ait plus qu’à
promulguer les lois.
3 Pour le fonctionnent de la Chambre des Députés et la procédure législative en général, il est référé aux livres et articles de Daniel Andrich, Pierre
Majerus, Nicolas Als et Michael Schroen (voir bibliographie).
4 En ce qui concerne notamment les lignes directrices pour les politiques de l’emploi (LDI 17 à 24), le PNR 2008-2011 luxembourgeois se réfère par
exemple à la loi sur le statut unique (LDI 21), au projet de loi concernant l’enseignement fondamental, la réforme de la formation professionnelle, le
projet de loi sur la création d’un Institut national de langues ou sur l’introduction du congé linguistique (LDI23).
5 « Travaillons ensemble pour la croissance et l’emploi. Un nouvel élan pour la stratégie de Lisbonne » (2005), Commission européenne.
6 Traité de Lisbonne : Protocole sur le rôle des Parlements nationaux dans l’Union européenne.
7 Voir Agenda 2010.
8 Les lignes directrices se composent des LDI macroéconomiques, des LDI microéconomiques (LDI 1-16) et des LDI sur les politiques de l’emploi (LDI
17-24), cf. Encadré 1.
9 L’acquis communautaire recouvre l’ensemble de la législation communautaire adoptée et révisée depuis le Traité de Rome en 1957.
davantage ces acteurs an
d’aiguillonner d’un commun effort
l’Agenda 2010 de Lisbonne, cette
première partie de la recherche
s’efforce de montrer de quelle
manière et avec quels moyens le
pouvoir législatif a pu contribuer
au processus. Dans le but de
combler une lacune qui existe dans
la littérature sur la participation
d’acteurs non-gouvernementaux
à ce processus, cette publication
propose d’éclairer les principales
étapes de l’implication de la Chambre
des Députés dans l’Agenda de
Lisbonne.
Pour ce faire, cette première partie
inscrit le rôle des parlements
nationaux dans le contexte européen
de la stratégie européenne de
l’emploi (SEE) et de l’ère de la post-
relance de la stratégie en 2005 lors
de la Présidence luxembourgeoise
du Conseil européen. Sans
aller dans le détail des missions
législatives2 et du fonctionnement
interne de la Chambre des
Députés3, nous nous focaliserons
dans une deuxième partie de la
recherche sur les grandes étapes
parlementaires de l’élaboration du
PNR luxembourgeois et les débats
afférents.
L’alternative à l’afrmation précitée
du « rôle limité » des parlements
nationaux dans le processus serait
d’admettre que l’implication plus
poussée des parlements ait pu se
manifester par le besoin de ceux-ci
de réagir de façon plus prématurée
à l’élaboration de documents et de
textes législatifs communautaires,
parmi lesquels gurent aussi
les PNR. Toutefois, n’est-il pas
antagonique de qualier, dans un
contexte plus large, de limitatif, le
rôle des parlements, si ce sont eux
auxquels incombe nalement la
mission de discuter, de débattre et
de voter les lois qui sont censées
produire les impulsions pour
atteindre les objectifs de Lisbonne4 ?
Dans le contexte de la confection
d’un texte législatif détaillant une
réforme, ne pourrait-on pas parler
d’un double emploi si le pouvoir
législatif chapeautait un processus
de réformes pour lesquelles il donne
lui-même son aval nal et pour
lesquelles le Gouvernement assure
une évaluation régulière a posteriori
(p.ex. rapports de mise en œuvre)?
Comme cette publication le montrera
aussi, le Traité de Lisbonne de 2007
donnerait aux parlements nationaux,
s’il entre en vigueur, de nouvelles
opportunités de s’exprimer sur les
documents communautaires et, si
nécessaire, d’intervenir à un stade
précoce et selon une procédure
dénie.
A titre de clarication, nous
distinguons entre la société civile
qui comprend des représentants
d’organisations nationales non-
gouvernementales (ONG, associa-
tions…) et les partenaires sociaux
(représentants du patronat et du
salariat) regroupant ceux qui se
retrouvent avec le Gouvernement
au sein du Comité de coordination
tripartite (Clément, 2008 : 48).
1. Contexte européen
Si l’année 2005 a été marquée
par la fameuse relance de la
stratégie de Lisbonne, sous
Présidence luxembourgeoise
du Conseil européen (avec un
nouveau recentrage autour de la
croissance et de l’emploi) et sur
base de propositions avancées par
la Commission européenne5, la
Chambre des Députés a connu aussi,
parallèlement à cette relance, une
évolution signicative s’inscrivant
dans un contexte qui se caractérisa
par une volonté d’impliquer
davantage les parlements nationaux
et de « renforcer leur [les parlements
nationaux] capacité à exprimer leur
point de vue sur les projets d’actes
législatifs de l’Union européenne
ainsi que d’autres questions qui
peuvent présenter pour eux un
intérêt particulier6 ».
A la base de la relance de la stratégie
de Lisbonne7 (dénommée souvent
« Lisbonne 2 » ou « Nouveau
partenariat pour la croissance et
l’emploi »), conclue lors du Conseil
européen de mars 2005 à Bruxelles,
peut être identié un mode de
gouvernance communautaire qui
s’est vu doté de la structure
suivante : les Lignes directrices pour
la croissance et l’emploi8 (appelées
par la suite LDI), approuvées en
accord avec les modalités de
l’acquis communautaire9 par le
Conseil européen en 2005 suite à
une proposition de la Commission
I. Une évolution en parallèle
Gouvernance & Emploi 8-2009
3
européenne. Les LDI telles qu’elles
ont été dénies pour assurer
l’élaboration des Programmes
nationaux de réforme regroupent
dans un texte unique et simplié les
Grandes orientations des politiques
économiques (GOPE10), instrument
général de la coordination des
politiques économiques, avec les
Lignes directrices pour les politiques
de l’emploi (LDE). Les LDI actuelles
sont subdivisées en LDI macro-
économiques, micro-économiques
et LDI pour les politiques de l’emploi
comprenant actuellement les LDI 17
à 24.
Les lignes directrices intégrées ont
eu comme but la rationalisation
et la synthétisation des priorités
identiées par les Etats membres
de l’UE an de développer les
réformes nationales nécessaires qui
devraient impulser la compétitivité
des économies européennes
face aux dés d’une concurrence
internationale de plus en plus accrue
10 Art. 128 du Traité CE (1997).
11 Clément, F. et Marlier, E. (2006) « Programmes Nationaux de Réforme, stratégie de Lisbonne « recentrée » et coopération européenne en matière
sociale : rappel historique, enjeux et dés », Population et Emploi (Differdange : CEPS/INSTEAD).
12 www.eco.public.lu/documentation/publications/pnr/index.html
(Etats-Unis, pays de l’Asie…). En
recentrant les priorités (avec comme
centre d’intérêt le volet économique,
social et environnemental), la
stratégie de Lisbonne a dû,
à partir de ce moment, être
simpliée en fusionnant dans une
nouvelle stratégie les trois grands
processus antérieurs de l’intégration
européenne : les Processus de
Luxembourg, de Cardiff et de
Cologne11.
Les LDI de 2005 ont servi de
base pour l’élaboration des PNR
nationaux couvrant la période 2005-
2008. L’idée devait être que chaque
Etat membre de l’UE soit chargé
de l’élaboration d’un programme
d’action12 qui devrait mettre en
exergue les priorités et objectifs des
Etats membres. Ces PNR n’avaient
pas seulement remplacé les Plans
d’action nationaux (PAN) que
chaque Etat membre avait dû établir
sur base de lignes directrices dans
le cadre de la SEE (Best, Bossaert,
2002 : 4), mais les éléments clés
de la procédure annuelle pour la
création des LDI ont été conservés
(Ashiaghor, 2005 : 128). A la
Commission européenne a incombé
la mission de l’évaluation et de la
formulation de recommandations
aux Etats membres.
Ainsi a été établi pour un
premier cycle de trois ans (2005-
2008) un premier PNR triennal
luxembourgeois, intitulé Plan natio-
nal pour l’innovation et le plein
emploi. Celui-ci a été soumis à la
Commission européenne en octobre
2005 après avoir été mis à l’ordre
du jour du Comité de coordination
tripartite (Clément, 2008) et de la
Chambre des Députés. Un deuxième
PNR annonçant un nouveau cycle
triennal a été publié en octobre 2008
après avoir été de nouveau soumis
à un débat à la Chambre. Dans
un souci d’évaluation régulière,
les Etats membres ont élaboré et
publié également deux rapports de
Encadré 1 : Lignes directrices intégrées pour la croissance et l’emploi (2005-2008) et (2008-2011)
Lignes directrices macroéconomiques (GOPE)
1. Assurer la stabilité économique en vue d’une croissance durable.
2. Assurer la viabilité de la situation économique et budgétaire
3. Favoriser une affectation efcace des ressources axée sur la croissance et l’emploi.
4. Veiller à ce que l’évolution des salaires contribue à la stabilité économique.
5. Favoriser une plus grande cohérence des politiques macroéconomiques, structurelles et de l’emploi.
6. Contribuer au dynamisme et au bon fonctionnement de l’UEM.
Lignes directrices microéconomiques (GOPE)
7. Accroître et améliorer l’investissement dans la recherche et le développement, notamment de la part des entreprises.
8. Faciliter l’innovation sous toutes ses formes.
9. Faciliter la diffusion et l’utilisation effective des technologies de l’information et de la communication (TIC) et créer une société
de l’information pleinement inclusive.
10. Renforcer les avantages compétitifs de la base industrielle européenne.
11. Encourager l’utilisation durable des ressources et renforcer la protection de l’environnement.
12. Développer et approfondir le marché intérieur.
13. Assurer l’ouverture et la compétitivité des marchés pour faire face à la mondialisation.
14. Rendre l’environnement des entreprises plus concurrentiel.
15. Encourager l’esprit d’entreprise et créer un environnement favorable aux PME.
16. Étendre, améliorer et relier les infrastructures européennes et achever les projets transfrontaliers prioritaires.
Lignes directrices pour l’emploi (LDI, anciens LDE)
17. Appliquer des politiques de l’emploi visant à atteindre le plein-emploi, à améliorer la qualité et la productivité du travail et à ren-
forcer la cohésion sociale et territoriale.
18. Favoriser une approche fondée sur le cycle de vie à l’égard du travail.
19. Créer des marchés du travail qui favorisent l’insertion, augmenter l’attractivité du travail, rendre le travail nancièrement attrayant
pour les demandeurs d’emploi, y compris pour les personnes défavorisées et les inactifs.
20. Améliorer la réponse aux besoins du marché du travail.
21. Favoriser la exibilité en la conciliant avec la sécurité de l’emploi et réduire la segmentation du marché du travail, en tenant
dûment compte du rôle des partenaires sociaux.
22. Assurer une évolution des coûts du travail et des mécanismes de xation des salaires favorable à l’emploi.
23. Accroître et améliorer l’investissement dans le capital humain.
24. Adapter les systèmes d’éducation et de formation aux nouveaux besoins en matière de
compétences.
4
Gouvernance & Emploi 8-2009
mise en œuvre (2006 et 2007)13 qui
devaient donner un état des lieux
sur les actions entreprises par le
Gouvernement.
2. Mode de gouvernance
Le mode de gouvernance qui
embrasse le processus de la relance
n’est pas nouveau, étant donné que
ses principaux mécanismes ont
déjà été ancrés depuis longtemps
dans la SEE. La structure des LDI
et celle des PNR a été développée à
partir des modalités qui avaient été
conclues lors du Conseil européen
extraordinaire sur l’Emploi sous
Présidence luxembourgeoise du
Conseil européen (21 novembre
1997). Le Conseil sur l’emploi
qui est à la base de ce qui est
couramment appelé le Processus de
Luxembourg, a précédé le Conseil
européen d’Amsterdam (16 et 17
juin 1997) et a fait lancer la SEE.
Cependant, l’importance de l’emploi
dans cette nouvelle stratégie
européenne avait déjà été anticipée
dans les Traités grâce à l’inclusion
de l’article 2 au Traité de Maastricht
(1992) : ce nouvel article incite les
Etats membres à promouvoir au-delà
d’un dialogue social européen avec
les syndicats (Rhodes, 2005 : 288),
un « haut degré de convergence »
tout comme « un niveau d’emploi
et de protection sociale élevé ».
Parallèlement, l’innovateur Livre
blanc sur la croissance, la
compétitivité et l’emploi (1993)
de Jacques Delors, rédigé à
une époque de la construction
européenne où les politiques
de l’emploi ressortaient encore
exclusivement et consciemment de
la compétence des gouvernements
nationaux européens, suggère « le
développement de marchés de
travail nationaux vers un marché de
travail communautaire14 ».
Poussé par la Présidence allemande
lors du Conseil européen d’Essen
(9-10 décembre 1999), celui-ci a
été le premier Conseil à se pencher
sur la question de savoir comment
réduire d’un commun effort le
chômage (appelé communément
le Processus d’Essen) en centrant
les efforts européens sur 5 objectifs
(cf. Encadré 3), à un moment où
l’écart du taux de chômage de l’EU
tout comme celui du taux d’emploi
(avec un taux de chômage de
9,8% pour l’UE-15 en 1997 contre
4,7% aux Etats-Unis en décembre
199715), était signicatif par rapport
aux Etats-Unis (Dinan, 2005 : 458-
464).
Revenons toutefois au Traité
d’Amsterdam qui a progressivement
mené l’Europe vers une législation
communautaire coordonnée en
matière d’emploi. Le Traité
d’Amsterdam, signé le 2 octobre
1997, a réussi à formaliser la SEE
moyennant l’intégration dans le droit
communautaire d’un nouveau titre
relatif à l’emploi (Titre VIII, regroupant
les articles 125 à 130 du Traité de la
Communauté européenne CE).
La nouvelle stratégie en matière
d’emploi prévoyait à ce premier stade
que les Etats membres soumettent
annuellement des plans d’action qui
furent analysés pour la première
fois lors du Conseil européen de
Cardiff sous Présidence britannique.
Une association des politiques de
l’emploi aux GOPE, telle que prévue
par le recentrage au moment de
la relance de la stratégie en 2005,
a été anticipée dans le Traité
d’Amsterdam, étant donné que
l’article 126 du Traité en question
stipule que les objectifs visés à
l’article 125 en matière d’élaboration
d’une stratégie coordonnée
européenne pour l’emploi et de
la promotion de la main-d’œuvre
qualiée, doivent être compatibles
avec les GOPE16. Parallèlement
au Traité d’Amsterdam, une
résolution du Conseil d’Amsterdam
sur la croissance et l’emploi a
été approuvée17 par les Etats
membres. Le compromis dégagé
13 Pour les deux rapports de mise en œuvre 2006 et 2007 : http://www.odc.public.lu/publications/pnr/index.html
14 Croissance, compétitivité, emploi – Les Dés et les pistes pour entrer dans le XXIème siècle – Livre blanc COM (93) 700, décembre 1993.
15 http://www.bls.gov/
16 « Les Etats membres, par le biais de leurs politiques de l’emploi, contribuent à la réalisation des objectifs visés à l’article 125 d’une manière compatible
avec les grandes orientations des politiques économiques des Etats membres et de la Communauté (…) ».
17 Si le Traité d’Amsterdam a introduit avec le Titre VIII la base pour une politique communautaire en matière d’’emploi, la résolution a davantage mis en
exergue la volonté des Etats membres de « donner une impulsion nouvelle, an de maintenir résolument l’emploi au premier plan des préoccupations
politiques de l’Union européenne » et d’assurer l’approfondissement de la SEE.
Encadré 2 : Consultation de la France sur le PNR : feuille de route (2005)
• Le Comité interministériel sur l’Europe a validé le PNR français envoyé à la Commission euro-
péenne n octobre 2005.
• Le PNR, intitulé Programme national de réforme pour une croissance sociale, a été présenté le
21 octobre 2005 aux partenaires sociaux par le Ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du
logement au cours d’un Comité du dialogue social sur les questions européennes et internatio-
nales. Des prises de positions ont dés lors été communiquées à la Commission européenne.
• Le Ministre délégué aux affaires européennes a présenté le PNR au Conseil économique et
social en date du 25 octobre.
• Le Ministre de l’économie, des nances et de l’industrie fut auditionné en date du 30 novembre
par la Commission parlementaire des affaires économiques, de l’environnement et du territoire
de l’Assemblée nationale française.
• Saisi sur demande du Premier ministre, il fut demandé au Conseil économique et social de
fournir ses réexions sur le PNR et son suivi. Dans le cadre d’une saisine permanente de la part
du gouvernement sur le PNR, une communication du CES sur le processus de Lisbonne a été
publiée en date du 2 mars 2007.
Sources : Gouvernement français/internet
Gouvernance & Emploi 8-2009
5
lors du Conseil devait, selon un des
représentants du Gouvernement
suédois de l’époque, faire en sorte
que « les Etats membres restent
responsables de leurs politiques
d’emploi, alors que l’UE assure une
stratégie commune, un agenda de
réforme qui comprend des objectifs,
tout comme un processus continu
d’apprentissage et d’amélioration »
(Lund, 2002 :18).
Au-delà d’une coopération plus
étroite entre les gouvernements
européens en matière d’emploi,
il semble aussi se concrétiser
avec l’instauration de nouveaux
mécanismes que prévoit le Traité
d’Amsterdam, une tendance vers un
rôle plus marquant des institutions
européennes. Les gouvernements
européens prégurent déjà en 1997
ce qui culminera plus tard dans
les stratégies de Lisbonne I et II,
soulignant lors du Conseil européen
sur l’emploi à Luxembourg que
les lignes directrices de l’emploi
(LDE) « s’inspirent directement
de l’expérience acquise dans
la surveillance multilatérale
des politiques économiques »
et qu’il s’agit de «créer, pour
l’emploi, comme pour la politique
économique, la même volonté de
convergence vers des objectifs
décidés en commun, vériables et
régulièrement mis à jour18 ».
Dans un souci d’encadrer la
stratégie de nouveaux mécanismes
de gouvernance, le Conseil
européen de Lisbonne de 2000
a élaboré la méthode ouverte
de coordination (MOC). Faisant
partie des mécanismes de la
gouvernance douce19, elle peut être
qualiée d’ordre intergouverne-
mental dans le cadre de laquelle
les Etats membres sont évalués par
d’autres Etats membres, avec la
Commission européenne assumant
une fonction de surveillance20.
Parmi les objectifs de la MOC qui
touche entre autres les domaines de
l’emploi et de la protection sociale
existent l’identication d’objectifs
communs, l’échange d’informations
critique (p.ex. l’évaluation par
les pairs…), des instruments
de mesure (indicateurs, lignes
directrices…) ou la comparaison des
performances des Etats membres
(« benchmarking »).
18 http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/00300.F7.htm
19 La gouvernance douce regroupe un ensemble de mécanismes volontaires (dialogues, plans d’action, implication des acteurs de la société civile, con-
sultation, l’évaluation par les pairs…) qui peuvent déterminer des actions communautaires.
20 Le Conseil européen de Lisbonne a lui-même déni les modalités de cette nouvelle méthode en stipulant qu’elle devrait «(…) dénir les
lignes directrices pour l’Union (…), établir, le cas échéant des indicateurs quantitatifs et qualitatifs des critères d’évaluation par rapport aux
meilleures performances mondiales (…), traduire ces lignes directrices européennes en politiques nationales et régionales (…), procéder pério-
diquement à un suivi, une évaluation et un examen par les pairs, ce qui permettra à chacun d’en tirer des enseignements ».
21 www.odc.lu
22 Ian Begg, Economic Reform Governance in the EU and its Limits, in National Reform Programs: Key to successful Future of the European project?,
Polish Lisbon Strategy Forum, Gdansk Institute for Market Economics, January 2006, p.20.
23 Rapport 2006 du Ministère de l’Economie et du Commerce extérieur, p. 213.
Alors que les LDI à appliquer ont été
clairement dénies par le Conseil,
les PNR de leur côté, suivis par les
deux rapports de mise en œuvre
(2006 et 200721), ont toutefois gardé
une certaine autonomie ainsi que
leur caractère sui generis en ce qui
concerne leur contenu, étant donné
que ceux-ci peuvent être adaptés
aux priorités spéciques de chaque
Etat membre de l’UE (Begg, 2007).
Il a été observé que cette autonomie
relative au contenu du document
en question pourrait expliquer
la diversité et, selon certaines
critiques, le manque de réalisme22
de beaucoup de PNR nationaux.
Au Luxembourg, la coordination du
PNR a été assurée par l’Observatoire
de la compétitivité du Ministère de
l’économie et du commerce extérieur
(Clément, Marlier, 2006). Au niveau
organisationnel du Gouvernement,
un groupe ad hoc, le « Réseau
Lisbonne », a été constitué en
2005 regroupant les responsables
des départements ministériels
de la coordination de la stratégie
de Lisbonne. Le réseau dont
l’Observatoire de la compétitivité a
assumé la coordination23 a comme
Encadré 3 : La Stratégie européenne de l’emploi (1997-2001)
Processus de Luxembourg (novembre 1997)
• Naissance de la stratégie européenne de l’Emploi (SEE) : coordination communautaire des politiques de l’emploi.
Processus de Cardiff (juin 1998)
• Introduction de la protection de l’environnement dans la mise en œuvre de toutes les politiques communautaires (Art.
6 Traité CE).
• Rapports Cardiff I et II.
Processus de Cologne et d’Essen (juin et décembre 1999)
• Renforcement des processus de Luxembourg et de Cardiff.
• Création d’un pacte pour l’emploi.
• Identication de 5 priorités : a) le renforcement des investissements dans la formation professionnelle, b) l’augmen-
tation de l’intensité de la croissance en emploi, c) la réduction des coûts indirects du travail, d) l’accroissement de
l’efcacité de la politique du marché de travail, e) l’accroissement des mesures en faveur des groupes menacés
d’exclusion du marché de travail
Processus de Lisbonne et de Göteborg (juin 2001)
• Elaboration d’une stratégie basée sur 3 piliers : économique, social et environnemental.
• Formulation d’objectifs.
• Adoption d’une stratégie en matière de développement durable (Göteborg).
• Ajout du pilier environnemental aux deux piliers de la stratégie de Lisbonne
(Göteborg).
Sources : Commission européenne/Internet
6
Gouvernance & Emploi 8-2009
mission « d’assurer les procédures
de consultation (…), de garantir
l’appropriation nationale24 » et
de rassembler les différentes
contributions ministérielles dans un
document unique et cohérent. Selon
une personne impliquée dans la
rédaction du PNR, le Ministère de
l’emploi et du travail a rédigé la partie
du PNR portant sur les politiques de
l’emploi.
Dans d’autres pays, la coordination
des PNR a été conée soit à la
chancellerie du Premier ministre,
comme en Belgique et en Irlande
(Radlo, 2006), soit au Ministère des
nances (Slovénie), au Ministère
des affaires européennes (Italie)
ou au Comité interministériel sur
l’Europe présidé par le Premier
ministre25 en France. En France, la
coordination technique du PNR a été
assumée par le Secrétariat général
des affaires européennes qui assure
la coordination interministérielle des
dossiers européens26. En Espagne,
la coordination du PNR a été conée
en juin 2005 à une nouvelle unité
ministérielle (Unidad Permanente
de Lisboa27), placée sous l’égide de
l’Ofce économique du Président du
Gouvernement28.
Au-delà de la création de
certaines nouvelles antennes
gouvernementales abritant l’élabo-
24 Bilan de Compétitivité 2008, Ministère de l’Economie et du Commerce extérieur (http://www.odc.public.lu/publications/bilan_compete/index.html), p.5.
25 http://www.sgae.gouv.fr/actualites/docles/pnr.pdf (p.6).
26 http://www.sgae.gouv.fr/actualites/htmlpages/actu_dossiers.html
27 http://www.lamoncloa.es/PROGRAMAS/OEP/PublicacionesEInformes/PNR/UnidadPermanente.htm
28 Ocina Económica del Presidente del Gobierno.
29 http://www.parlament.cat/
30 http://www.ec.europa.eu/growthandjobs/pdf/nrp_2005-2008_gesamtentwurf_de.pdf (p.3).
ration des PNR, l’appropriation de
la stratégie au niveau national a
aussi comporté l’implication des
régions, provinces, départements
ou parlements régionaux comme
éléments capitaux dans la mise
en œuvre des réformes visées par
l’Agenda 2010 (Heichlinger, Määttä,
Unfried, 2007). Dans ce contexte,
le Parlament de Catalunya (Parle-
ment régional de la Catalogne) qui
dispose d’une certaine indépen-
dance en matière législative que lui
accorde son Statut d’autonomie de
1979, constitue un exemple concret
de l’implication parlementaire
régionale, notamment en ce qui
concerne la réalisation de certaines
réformes au niveau régional29.
Toutefois, les LDI ne prévoient pas
d’itinéraire pour l’implication de la
stratégie au niveau des régions.
Ainsi, en Allemagne, les Länder ont
contribué au PNR en faisant part
au Gouvernement fédéral de leurs
priorités et ce sont eux qui doivent
mettre en pratique les réformes
proposées dans leurs PNR30. Sur
le terrain, dans certains cas, la
corrélation de la politique nationale
avec les acteurs régionaux contribue
à la mise en œuvre de réformes
dans le cadre de l’Agenda 2010.
Un élément novateur du mode de
gouvernance de la relance a été
la désignation d’un coordinateur
national au niveau des Etats
Membres, la « Madame » ou « le
Monsieur Lisbonne », en charge
de veiller à l’implémentation des
réformes sur le plan national. Bien
que la mission de coordination
s’avère en principe louable, la
désignation d’un coordinateur
national donne lieu à certaines
contestations, notamment pour ce
qui est de la hiérarchie. Si la tâche a
été assurée dans beaucoup de pays
par un ministre du Gouvernement
(Italie, Pologne, Malte), beaucoup
de gouvernements ont opté pour la
désignation de hauts fonctionnaires
ministériels (Pays-Bas, Portugal,
Espagne, France, Irlande, Estonie).
La même remarque peut être
formulée pour la panoplie de
départements différents chargés de
coordonner la stratégie de Lisbonne.
Au Luxembourg, la coordination
nationale du PNR a été conférée
au Ministre de l’économie et du
commerce extérieur.
3. Les parlements nationaux et la
stratégie de Lisbonne
Avec le recentrage décidé de
la stratégie et les mécanismes
de simplication au niveau de la
gouvernance en place, l’élaboration
des PNR devait se dérouler dans un
Encadré 4
Le mode de gouvernance de la stratégie européenne de l’emploi (1997-2005)
• Lignes directrices intégrées : priorités communes pour les Etats membres en matière d’emploi.
• Plans d’action nationaux pour l’emploi : mise en pratique à l’échelle des priorités communes.
• Rapport conjoint sur l’emploi : document des synthèses des NAPS servant de base pour l’élaboration des lignes directrices.
• Recommandations : adoption des recommandations spéciques par pays par le Conseil.
Le mode de gouvernance de la stratégie européenne de l’emploi, simpliée dans le cadre de la stratégie de Lisbonne
(2005)
• Les lignes directrices intégrées pour la croissance et l’emploi (conjointement avec les lignes directrices pour les politiques
macroéconomiques et microéconomiques).
• Les programmes nationaux de réforme (PNR).
• Rapport annuel de la Commission sur la croissance et l’emploi: analyse des PNR de tous les Etats membres.
• Recommandations adoptées par le Conseil.
• Implication plus accentuée des partenaires sociaux, des parlements nationaux et de la société civile.
Gouvernance & Emploi 8-2009
7
climat de débat et de consultation
nationale auquel ont pris part la
société civile, avec ses acteurs
représentatifs (associations,
ONG…) et, plus particulièrement,
les parlements nationaux et les
partenaires sociaux. Au Luxembourg,
c’est le Conseil économique et
social (CES) qui a relevé très tôt cet
esprit de dialogue et de consultation
régulière, soulignant dans un
premier avis sur les LDI de 2005 qu’il
« s’agit là d’un aspect essentiel pour
garantir l’appropriation nécessaire
de ces programmes par tous les
acteurs concernés31 » et que « les
Etats membres devraient prendre
des engagements et se xer des
objectifs conformes aux lignes
directrices et aux recommandations
de l’Union européenne »32.
Un bref examen des principaux
textes européens de la stratégie de
Lisbonne débouche sur quelques
observations. D’une part, il semble
avoir existé un consensus parmi
les gouvernements européens et
les acteurs nationaux clés pour
faire engager de nouveaux acteurs,
et notamment les parlements
nationaux, dans le processus de
Lisbonne. Cette prise de conscience
semble avoir été le résultat du
constat que les citoyens européens
ont participé insufsamment à
l’Agenda 2010 et qu’une sorte de
« décit démocratique33 » en matière
d’intégration européenne a été
largement ressentie en Europe.
A titre d’exemple, les sondages
Eurobaromètre34 effectués en
octobre et novembre 2004
et 2005 sur les attitudes des
Européens par rapport à l’évolution
économique au courant d’une
période qui peut être caractérisée
de riche en événements européens
(élargissement de l’UE avec 10
nouveaux membres…), révélèrent
un certain degré de pessimisme
(moins ressenti désormais par
les Luxembourgeois) en ce qui
concerne les développements
sur les marchés de l’emploi. Les
mêmes sondages de cette époque
soulignèrent une méconnaissance
générale des institutions
européennes auprès des citoyens
européens, voire une résistance
aux institutions supranationales qui
culminait par le dernier « non » des
trois référendums français (1972 et
1992) le 29 mai 2005 au sujet de la
ratication du Traité établissant une
constitution pour l’Europe, signé à
Rome le 29 octobre 2004.
Par contre, les conclusions
formulées au Conseil européen
de Lisbonne de 2000 laissent à
penser que l’appropriation de la
stratégie de Lisbonne devrait, du
moins en théorie, se déplacer ou
même s’étendre progressivement à
la société civile dans son ensemble
et à ses représentants. De nouveau,
les textes ne proposent pas
d’itinéraire qui permette de mettre
en marche cette décentralisation
de l’appropriation de la stratégie
vers la société civile. Toutefois, la
nouvelle responsabilité (qui coexiste
avec celle des partenaires sociaux
depuis le Traité de Maastricht, voir
Rhodes, 2005 : 288) incombant
aux parlements nationaux les
confrontait à un engagement de
la part des décideurs européens à
faire en quelque sorte recrédibiliser
la stratégie de Lisbonne auprès
des citoyens et de les faire
participer davantage, soit par leurs
représentants politiques élus, soit
par l’intermédiaire d’autres formes
de représentation de la société civile
ayant un intérêt particulier pour un
des piliers de la stratégie.
Avec une stratégie qui se basait
de nouveau sur des LDI et des
programmes d’action, les modalités
conçues dans le cadre du
Processus de Luxembourg en 1997
ont été reprises en 200035. Ainsi,
est-il convenu à Lisbonne dans un
souci d’impulser la compétitivité
européenne que «l’approche retenue
sera totalement décentralisée,
conformément au principe de
subsidiarité; l’Union, les Etats
membres, les collectivités régionales
et locales, ainsi que les partenaires
sociaux et la société civile seront
activement associés dans diverses
formes de partenariat36 ».
A cela s’ajoute que le rapport Kok37
(2004) souligne dans le cadre
d’un diagnostic à mi-parcours de
l’Agenda 2010 que l’implication
des parlements nationaux, des
partenaires et des citoyens en
général était fortement insufsante,
de sorte que « la pression exercée
sur les gouvernements a été
moindre que ce qu’elle aurait pu ou
dû être38 ». Pour le groupe d’experts,
il s’agit « d’instaurer une coopération
plus étroite entre les différents
intervenants, qui doivent s’engager
à s’encourager et à se soutenir
mutuellement » et de « s’engager
dans un partenariat pour la réforme
à mettre sur pied en tenant compte
du contexte particulier de chaque
État membre39 ». Les PNR devraient
en quelque sorte pallier la non-
participation nationale à la stratégie.
Dans la même optique, le Traité
établissant une Constitution pour
l’Europe (2004) a consacré son
premier Protocole au rôle des
parlements nationaux dans l’UE. La
base de l’obtention d’un pouvoir de
contrôle sur le respect des principes
de subsidiarité et de proportionnalité40
a été ancrée dans le Traité de la
31 http://www.ces.etat.lu/GOPE2005.pdf, p. 7.
32 Ibidem (p.71)
33 La notion de « décit démocratique » au niveau de l’UE a été contestée au niveau de la théorie sur la gouvernance européenne et a notamment été
analysée par Andrew Moravcsik (voir bibliographie).
34 http://ec.europa.eu/public_opinion/standard_fr.htm
35 http://consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/00100-r1.f0.htm
36 Ibidem
37 Dans le cadre d’un état des lieux à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, le Conseil européen avait coné cette révision de la stratégie à un groupe
d’experts de haut niveau, présidé par Wim Kok, ancien Premier ministre des Pays-Bas. Le résultat consistait en un rapport, remis le 3 novembre 2004
à la Commission européenne, qui dressait un tableau mitigé des résultats obtenus par la stratégie de Lisbonne. Bien que le rapport souligne que
certains résultats étaient encourageants, il amena à la conclusion qu’il était improbable d’atteindre en matière d’emploi l’objectif xé d’un taux d’emploi
de 70%.
38 http://ec.europa.eu/growthandjobs/pdf/kok_report_fr.pdf, p.45.
39 Ibidem
40 Le Traité de Maastricht (1992) a introduit le principe de subsidiarité dans la législation communautaire par le biais de l’article 3B stipulant que les
décisions dans l’UE sont prises au niveau le plus proche des citoyens (i.e. les Etats membres). Le principe de proportionnalité vise à limiter et à enca-
drer l’action des institutions de l’UE: elle doit se limiter à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs énoncés dans les traités.
8
Gouvernance & Emploi 8-2009
Traité Référence aux parlements nationaux
Acte unique (1986) • Pas de référence.
Traité de Maastricht (1992)
• Une déclaration, intitulée « Déclaration sur le
rôle des parlements nationaux dans l’Union euro-
péenne » a été ajoutée aux titres et protocoles du
Traité.
• Renforcement des contacts et réunions entre les
parlements nationaux et le Parlement européen.
• Transmission par les gouvernements des Etats
membres de projets de directives aux parlements
nationaux.
Traité d’Amsterdam (1997)
• Au-delà du Titre VIII relatif à l’emploi est ajouté un
« Protocole sur le rôle des parlements européens
dans l’Union européenne », formalisant et détaillant
les missions de la COSAC (Conférence des
organes spécialisés dans les affaires communau-
taires et européennes des parlements de l’Union
européenne).
• Le Protocole prévoit que les parlements nationaux
disposent d’un délai de six semaines pour examiner
un projet de texte législatif, avant que celui-ci soit
mis à l’ordre du jour du Conseil.
Traité de Nice (2001) • Reprise du Protocole sur les parlements de 1997.
Projet de Traité établissant une
Constitution pour l’Europe (2004)
• Le Protocole sur les parlements nationaux devient
le premier Protocole ajouté aux Titres du Traité.
Traité de Lisbonne (2007)
• Texte identique, incluant aussi dans un Titre I (art.
1 à 8) des informations destinées aux parlements
nationaux, dont le transfert obligatoire des textes
législatifs entre les institutions communautaires et
les parlements nationaux (art. 2) et le droit de ceux-
ci de dresser des avis motivés à l’adresse du Par-
lement européen, du Conseil et de la Commission
européenne, statuant ainsi sur la conformité d’un
acte législatif avec le principe de la subsidiarité (art.
3).
• Dans le cas où le Traité entre en vigueur, une « pro-
cédure du carton jaune et orange » sera en place :
dans le respect du principe de la subsidiarité, la
Commission européenne doit réviser ou même reti-
rer un projet de loi communautaire si un tiers des
parlements européens opine que le projet légis-
latif va à l’encontre de ce principe. En revanche,
la Commission européenne renvoie le projet au
Conseil et au Parlement pour décider de poursuivre
ou non la procédure législative, dans le cas où elle
maintient le projet et qu’une majorité de parlements
nationaux émet encore des objections.
Encadré 5 : Les parlements nationaux dans les Traités européens (1986-2007)
Gouvernance & Emploi 8-2009
9
Communauté européenne (CE). Le
Traité de Lisbonne (2007) reprendra
le même protocole (cf. Encadré
5). Ainsi, le Protocole prévoit, s’il
prend ses effets, une implication
plus accentuée des parlements
nationaux en matière législative
communautaire, notamment par le
biais d’une procédure d’implication
parlementaire sui generis. On
constate que le rôle des parlements
nationaux et la création de la
COSAC41 ont été formalisés à une
même époque où la SEE a été
formulée. Dans les conclusions du
Conseil européen de mars 2005 à
Bruxelles, les gouvernements des
Etats membres de l’UE ont été invités
à « présenter les programmes de
stabilité/convergence et les avis du
Conseil y relatifs à leurs parlements
nationaux42 ».
Du côté des syndicats européens,
la Confédération européenne des
syndicats43 (CES) a salué en 2005
l’implication des partenaires sociaux
et des parlements nationaux telle
que proposée par le rapport Kok44.
La même Confédération a remarqué
plus tard dans un avis sur le Traité
établissant une Constitution pour
l’Europe que « le nouveau rôle
coné aux parlements nationaux
offre une garantie contre d’éventuels
excès de réglementation au niveau
européen », étant donné que « la
Commission est obligée de les
informer de toute nouvelle initiative
et le «mécanisme d’alerte précoce»
leur donne un pouvoir de contrôle de
la subsidiarité »45.
41 Conférence des Organes spécialisés dans les affaires communautaires et européennes des parlements de l’Union européenne, voir p.21.
42 http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=DOC/05/1&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en (p. 1).
43 http://www.etuc.org/fr
44 http://www.ogb-l.lu/pdf/publications/ogbl_info/2005/FR_Memorandum_Presidence.pdf
45 http://www.ogb-l.lu/html_fr/dossiers/archives/traite/prises_positions_7_fr.pdf
46 Onofhängege Gewerkschaftsbond Lëtzebuerg (Confédération syndicale indépendante du Luxembourg) et Lëtzebuerger Chrëschtlesche Gewerk-
schafts-Bond (Fédération des syndicats chrétiens luxembourgeois).
47 Ibidem (p. 7)
48 Rapport déposé par la Délégation pour l’Union européenne sur le suivi de la stratégie de Lisbonne (2005), Assemblée nationale française. Roger
Briesch, Président en 2003 du Comité économique et social européen (CESE) évoque la non-participation de la société civile dans le cadre sa contri-
bution Selling strategy to EU’s citizens dans le Financial Times du 20 octobre 2003 « At a political level, we know that the strategy is behind schedule
and that the temptation to cherry pick has eroded the holistic intentions of the strategy’s architects but, (…) we have also singularly failed to capture
the public imagination ». Roger Briesch semble ici reéter la position du CESE en 2005 qui recommanda dans un avis de 2005 que les débats parle-
mentaires sur les PNR « soient organisés avant le débat au Conseil, et qu’ils se tiennent le même mois, et si possible la même semaine, dans tous les
Etats membres ». Il opta pour un réseau interactif d’initiatives de la société civile» (Avis du Conseil économique et social européen sur « Le chemine-
ment vers la société européenne de a connaissance – La Contribution de la société civile organisée à la stratégie de Lisbonne », décembre 2005).
49 http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/en/ec/89013.pdf (p. 3).
50 http://www.consilium.europa.eu/showPage.asp?lang=fr&id=1296&mode=g&name=
51 http://ec.europa.eu/growthandjobs/pdf/1206_annual_report_france_en.pdf
52 Avis Nr. 1527 du 31 aout 2005 concernant le programme national de réformes : http://www.cnt-nar.be/AVIS/avis-1527.pdf
53 www.bruegel.org/
Les deux principaux syndicats
luxembourgeois ne semblaient pas
être entièrement satisfaits des LDI
et de la manière dont elles avaient
été conçues. En mai 2005, l’OGB-L46
et le LCGB ont fait remarquer dans
un avis conjoint sur les LDI que
« les bonnes réponses que ces
nouvelles lignes directrice intégrées
(…) sont censées apporter sont à
peu de chose près les mêmes que
précédemment » et que malgré leur
bien-fondé, elles relèvent « plus de
retouches cosmétiques liées à la
méthode et la gouvernance que d’un
changement de direction que l’on
aurait pu atteindre (…).»47. Selon
les deux syndicats, ce qui compte
nalement, c’est que l’augmentation
du taux d’emploi devrait notamment
aller de pair avec une amélioration
de la qualité et de la sécurité du
travail.
Du point de vue parlementaire,
notons que l’Assemblée nationale
française souligne, dans un rapport
d’évaluation sur la stratégie, qu’en
2005 « les parlements nationaux,
qui devraient constituer des relais
indispensables pour parvenir à une
véritable appropriation de la stratégie
par les diverses forces des sociétés
nationales, n’ont guère débattu du
contenu et de la mise en œuvre de
la stratégie » et que la « stratégie
de Lisbonne associe si peu les
Européens à sa mise en œuvre que
rares sont d’ailleurs ceux qui savent
ce que ces termes recouvrent »48.
Une année plus tard, dans la période
de la post-relance de la stratégie, le
Conseil européen des 23 et 24 mars
2006 à Bruxelles a dressé un bilan
sur les efforts réalisés en constatant
que les Etats membres «ont fait des
efforts pour impliquer les parlements
nationaux et les représentants des
autorités régionales et locales,
ainsi que d’autres partenaires
sociaux et autres intervenants de
la société civile »49. La Commission
européenne de son côté a noté
dans le cadre de son évaluation du
PNR luxembourgeois qu’il «a fait
l’objet d’une importante concertation
entre Gouvernement, Parlement et
partenaires sociaux »50.
A l’échelle nationale, les Etats
membres ont choisi des chemins
différents pour incorporer les
parlements nationaux et la société
civile dans le processus de Lisbonne
(cf. Encadré 6), étant donné que la
procédure de consultation varie
selon les spécicités et traditions
parlementaires de chaque pays. Au
niveau de la consultation directe
du public, les gouvernements
ont engagé certaines initiatives
variées : alors que la France a
consulté le public via Internet51,
le Gouvernement belge a reçu un
avis commun du Conseil central de
l’économie et du Conseil national du
travail52 sur les domaines prioritaires
qui devaient gurer à l’agenda
de Lisbonne. Une étude récente
du laboratoire d’idées Bruegel53
(cf. Graphique 1) conclut que 9
parlements nationaux n’ont pas
10
Gouvernance & Emploi 8-2009
Encadré 6 : Les Etats membres et l’implication de leurs parlements nationaux54
Etats membres de l’UE Implication du parlement Débat au parlement et remarques
Allemagne
En raison d’élections au niveau du « Bundestag »
(18 septembre 2005) et des contraintes avec la
date xée par la Commission européenne pour
l’envoi des PNR, un débat n’a pas été organisé.
Le PNR allemand n’a été envoyé à la Commission
qu’en date du 7 décembre 2005. Toutefois, les
Länder tout comme les commissions parlemen-
taires compétentes ont apporté des contributions
aux rapports de mise en œuvre 2006 et 2007.
Autriche Le projet de PNR a été débattu en séance plénière
du parlement autrichien du 29 septembre 2005.
Belgique
Le projet de PNR a été examiné par la
Commission des nances et des Affaires
économiques et la Commission des
affaires sociales.
Le premier PNR comporte un volet fédéral (« Pacte
de solidarité entre générations ») et des contribu-
tions des régions (amande, wallonne et bruxel-
loise) et des communautés (amande, française
et germanophone)
Danemark
La Commission parlementaire des affaires
européennes a reçu le PNR en tant que
document d’information et les LDI y ont été
étudiées à plusieurs reprises.
Le gouvernement a pu être questionné au sujet du
PNR.
Finlande
Le parlement nlandais n’a pas été formel-
lement impliqué. Le Gouvernement a reçu
certaines contributions de commissions
parlementaires au sujet de la stratégie de
Lisbonne
Le PNR a été approuvé par le gouvernement en
date du 14 octobre 2005 et envoyé au parlement
pour information. Toutefois, il y a eu un large débat
avec les partenaires sociaux dans le cadre de la
Présidence nlandaise en 2006.
Italie
Pas d’implication du parlement italien au
PICO (Plan pour l’Innovation, la croissance
et l’emploi).
Lituanie Implication poussée du parlement litua-
nien (Seimas).
Un groupe informel sur la stratégie de Lisbonne a
été crée le 24 mars 2005 comprenant 13 membres
de la Seimas. Au niveau du groupe de travail du
gouvernement (établi en juillet 2005), un membre
de la Commission parlementaire des affaires
européennes a participé en tant qu’observateur.
Au-delà de réunions bilatérales de la Commission
parlementaire des affaires européennes avec des
représentants de l’OCDE55 et de la Commission
européenne, quatre commissions parlementaires
ont fait part de leurs priorités au gouvernement.
Pologne Le parlement polonais n’a pas formelle-
ment participé.
Portugal
Le coordinateur de la stratégie de Lis-
bonne au niveau gouvernemental s’est
réuni deux fois avec la Commission des
affaires européennes de l’Assembleia-
da Republica pour discuter l’élaboration
du PNR (4 octobre 2005 et 15 novembre
2005).
République tchèque
Le PNR a été délibéré en sein du Comité
pour l’économie, l’agriculture et le trans-
port du Sénat, composant avec la Cham-
bre des Députés, le parlement tchèque.
Une large consultation avec les partenaires
sociaux tchèques, rassemblés dans un organe tri-
partite (Tripartita ou CAES) a été menée entre le 6
juin et le 15 septembre 2005.
Slovaquie
Le projet de PNR adopté par le gou-
vernement slovaque a été discuté au
sein de la Commission des affaires
européennes (20 octobre 2005).
Le PNR a été adopté par le gouvernement le 12
octobre 2005 et discuté en séance plénière du par-
lement le 9 novembre 2005.
Suède
Le PNR a été soumis au parlement sué-
dois (Riksdag) sous forme de communica-
tion gouvernementale en octobre 2005.
Comme le prévoit la procédure législative
suédoise, chaque député a eu l’occasion
de déposer des motions au sujet du PNR.
En date du 6 septembre 2005, un séminaire a
été organisé par le gouvernement dans le cadre
duquel les représentants de la société civile sué-
doise ont eu l’opportunité de discuter le projet de
PNR.
Royaume-Uni
Il n’y a pas eu d’implication, ni au niveau
du House of Commons, ni à celui du
House of Lords.
54 L’Encadré 6 reprend succinctement l’implication de certains parlements nationaux de l’UE dans l’élaboration de leurs PNR. Les informations sont en
majorité basées sur un questionnaire que chaque parlement avait envoyé au Parlement européen dans le cadre d’une rencontre parlementaire entre le Par-
lement européen et les parlements nationaux qui a eu lieu du 31 janvier au 1 février 2006 (Source: Dossier documentaire du Parlement européen
intitulé « Les parlements en route vers Lisbonne » 2006, Internet et Commission européenne).
55 Organisation de coopération et de développement économiques (www.oecd.org).
Gouvernance & Emploi 8-2009
11
G1L’appropriation nationale des Programmes Nationaux de Réforme
Source : Bruegel
discuté ou examiné le premier
PNR 2005-2008 au sein de leurs
commissions parlementaires
(Pisani-Ferry, Sapir, 2006 : 4). Dans
d’autres parlements, le PNR a été
présenté, examiné ou mentionné
dans le cadre de programmes
généraux de réformes nationaux. A
titre d’exemple, le PNR élaboré par
le Gouvernement danois informe
que la réforme structurelle danoise,
illustrée succinctement dans le PNR,
a été mise en œuvre moyennant 50
lois différentes56.
56 http://uk.fm.dk/Publications/2008/1642-Denmarks%20National%20Reform%20Programme.aspx (p.15).
12
Gouvernance & Emploi 8-2009
III. La Chambre des Députés
à l’échelle de l’UE
57 http://www.chd.lu/docs/pdf/ResumeStrateurCHD.pdf
58 Ibidem
59 www.cosac.eu
60 http://www.euractiv.com/fr/elections-ue/parlements-nationaux-ue/article-174742
61 http://www.cosac.eu/en/documents/basic/rules/french/
62 http://www.europarl.europa.eu/webnp/cms/lang/fr/pid/10;jsessionid=859A8CBDBE94196A5A3B91631CA2E1B9
63 Art. 22 du règlement d’ordre intérieur de la Chambre des Députés.
les parlementaires nationaux
n’exerçaient plus à la fois
un mandat européen et un
mandat national60. La COSAC
est autorisée à soumettre aux
institutions européennes toutes
les contributions qu’elle juge
nécessaires. En revanche, elle
est informée régulièrement sur
tous les projets de directives en
cours d’élaboration. Chaque pays
membre envoi 6 parlementaires
aux réunions biannuelles de
la COSAC. Les pays désireux
d’adhérer à l’UE peuvent envoyer
3 observateurs aux réunions. Une
réunion de la COSAC a aussi eu
lieu à Luxembourg du 17 au 18
mai 2005 pendant la Présidence
européenne. Un des principes
fondamentaux de la COSAC
a été souligné dans le Code
de conduite de Copenhague
pour les parlements, adopté
en 2002 qui stipule que « le
parlement national reçoit des
informations pertinentes sur les
initiatives de la Communauté,
tant du gouvernement que des
institutions de la Communauté,
sufsamment à temps pour qu’il
puisse les étudier avant que
les décisions soient prises ».
La COSAC a salué également
dans le cadre d’une prise de
position qu’elle a adoptée lors
de sa réunion à Luxembourg du
17 au 18 mai 2005 la nouvelle
approche de la Commission
européenne à l’égard du suivi
du processus moyennant des
rapports réguliers de suivi de
la stratégie de Lisbonne61.
L’implication parlementaire dans
les dossiers européens se reète
par l’existence d’un instrument
de consultation a priori en
matière de documentation et de
législation européennes.
- En outre, une délégation
de la Chambre prend part
chaque année à une rencontre
parlementaire62 sur la stratégie de
Lisbonne organisée au Parlement
européen à Bruxelles. La
première rencontre parlementaire
présidée par le Président du
Parlement européen a eu lieu,
en étroite coopération avec la
Présidence luxembourgeoise,
en mars 2005 juste avant le
Conseil européen de printemps.
Au cours de cette première
rencontre parlementaire, plus de
200 participants provenant de 25
Etats membres ont manifesté leur
désir de renforcer la coopération
interparlementaire et d’identier
les futures priorités de l’UE. La
dernière rencontre parlementaire
a eu lieu du 11 au 12 février
2008. Chaque délégation
parlementaire peut participer par
une contribution orale.
- Le Parlement européen de son
côté a créé en 2005 le Groupe
des 33 (ou G33) qui comprend
33 députés européens et un
secrétariat. Autre exemple
d’instrument volontaire issu de
la gouvernance douce appliqué
dans le cadre de la MOC, le
G33 a comme principale mission
de surveiller l’évolution de la
stratégie et de formuler une
contribution (approuvée en
séance plénière du Parlement
européen) pour le Conseil de
printemps (Borrás, 2009 : 107).
- A l’échelle administrative, une
adaptation interne semble être
devenue indispensable pour
répondre à cette implication
communautaire accrue : les
commissions parlementaires,
chargées de l’examen de projets
de loi et des règlements grand-
ducaux rentrant dans le champ
de leurs attributions, ainsi que
de l’organisation de débats
ou d’auditions publiques/non-
publiques63, assurent dans le
cadre de la procédure législative
luxembourgeoise, la transposition
en droit national des directives
européennes qu’elles se voient
attribuer quotidiennement
par la Conférence des
Dans le cadre des ses activités
européennes, la Chambre des
Députés a marqué son intention
de s’impliquer davantage dans les
dossiers européens, notamment
en 2006, avec l’élaboration d’une
stratégie européenne57 qui a l’objectif
d’« informer les députés au moment
le plus précoce et de la manière la
plus efcace (...) sur les dossiers
européens » et de rechercher « le
dialogue à travers des auditions
au Parlement »58. Une évaluation
de cette stratégie et du degré
d’européanisation parlementaire
dépasserait cependant le cadre de
cette publication. Toutefois, il faut
constater que le rôle de la Chambre
dans le processus de Lisbonne ne
peut pas être dissocié de ses autres
engagements européens et d’un
processus d’adaptation engagé,
notamment en raison de son rôle
de plus en plus signicatif déni
dans le Protocole sur le rôle des
parlements nationaux dans l’Union
européenne, annexé au Traité
d’Amsterdam en 1997. Au-delà
des travaux parlementaires de la
Commission des affaires étrangères
à laquelle incombe entre autres
l’analyse de projets de loi à portée
européenne et internationale, de
communications de la part de
la Commission européenne ou
d’autres dossiers européens,
citons d’autres exemples illustrant
l’engagement de la Chambre à
l’échelle communautaire :
- Un organe clé de la Chambre
assumant la coopération entre
les parlements nationaux de l’UE
et le Parlement européen est la
COSAC59, créée à Madrid en
1989 et formellement reconnue
par le protocole annexé au Traité
d’Amsterdam (1997). La création
de la COSAC était notamment le
résultat d’une perte de contact
avec les décideurs européens,
étant donné qu’après 1979,
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Présidents64. Leur ordre du jour
a été progressivement complété
par l’examen régulier des
communications ou propositions
de décisions (ou COM) de
la Commission européenne,
envoyées aux Etats membres.
L’examen de ces communications
permet de rester au courant
de l’actualité communautaire
an de pouvoir réagir et, si
nécessaire, intervenir à un
stade précoce de la confection
d’un texte législatif. Sur le plan
administratif et dans un souci
d’affronter professionnellement
les nouveaux dés que posent
les dossiers européens, une
panoplie de sources d’information
ont été mises à la disposition des
députés et de l’administration.
Parmi les outils disponibles
gurent le site Internet IPEX65
permettant un échange
électronique de documents et les
bases de données PreLex66 et
EUR-Lex67.
- De plus, la Chambre s’est
fait représenter au Parlement
européen par un représentant
permanent qui est aussi en
charge de la rédaction d’un
bulletin d’information sur
les discussions au sein des
commissions parlementaires au
Parlement européen qui est mis
à la disposition des députés et de
l’administration. Selon la stratégie
européenne de la Chambre,
le représentant « suit (…) les
réunions des commissions
parlementaires du Parlement
64 Organe de la Chambre des Députés ayant comme principale mission la décision sur les questions relatives à l’organisation des travaux parlementaires,
la proposition de l’ordre du jour et l’émission d’avis sur les projets de règlement grand-ducaux pour lesquels son assentiment est requis.
65 http://www.ipex.eu/ipex/cms/pid/
66 http://ec.europa.eu/prelex/apcnet.cfm
67 http://eur-lex.europa.eu/fr/index.htm
68 Ibidem (p.2).
69 http://www.chd.lu/fr/web_TV/default.jsp
70 « Publicness of parliamentary accountability »
européen, maintient le contact
avec les députés européens,
avec les fonctionnaires du
Parlement européen, avec le
secrétariat de la COSAC »68.
- La Chambre a assuré que les
auditions publiques organisées
par la Commission parlementaire
de l’économie, de l’énergie,
des postes et des sports ont
été retransmises par la chaîne
télévisée de la Chambre, la
CHAMBER-TV an de favoriser
la diffusion auprès d’un public
aussi large que possible69.
Ces quelques exemples nous font
conclure que la Chambre s’est
plus systématiquement et plus
professionnellement tournée vers
la dimension européenne. Elle a
été soucieuse de contribuer le plus
tôt possible au contenu de certains
dossiers européens en s’appropriant
des outils relevant du domaine des
« modes douces de gouvernance »
(Borrás, Conzelmann, 2007). Sa
présence accrue des dernières
années sur le plan européen
a toutefois poursuivi un autre
objectif : accroître la visibilité du
pouvoir législatif auprès du public
et renforcer « le caractère public de
la responsabilité parlementaire »70
(Tsakatika, 2007 : 556). Il reste
à voir si la présence à l’échelle
communautaire s’accentuera de
nouveau si la procédure envisagée
par le Traité de Lisbonne entre en
vigueur.
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Gouvernance & Emploi 8-2009
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CEPS/INSTEAD
B.P. 48
L-4501 Differdange
Tél. : 58 58 55-801
e-mail : isabelle.bouvy@ceps.lu
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