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Une modélisation des savoirs d'expérience des orthopédagogues intervenant en mathématiques.

Authors:
SEPTIÈME CHAPITRE
Une modélisation des savoirs d’expérience
des orthopédagogues intervenant
en mathématiques
Lucie DeBlois
Hassan Squalli
Université Laval
Introduction
Depuis 1960 (rapport Parent), le Québec s’est doté d’un système d’éduca-
tion spécialisée dans les écoles. Un premier groupe d’enseignants spécialistes
en adaptation scolaire est apparu, suivi d’un deuxième, les orthopédagogues.
En 1978, le ministère de l’Éducation a développé une politique d’intégration des
élèves en difficulté d’apprentissage en classes ordinaires, position reprise en 1992:
Le recours à la classe spéciale et à l’école spéciale ne devrait être envisagé que
pour des élèves ayant des besoins de services qu’il n’est pas possible, ou souhaitable
pour l’élève, d’organiser dans les conditions de la classe ou de l’école ordinaire.
De plus, chaque fois que cela est possible, de telles mesures devraient être considérées
comme temporaires ou transitoires, et viser un retour éventuel à la classe ordinaire
(Ministère de l’Éducation, 1992, p. 5).
Malgré les politiques mises en œuvre et la formation offerte, l’étude réali-
sée par Duval, Tardif, Gauthier (1995) met en lumière le fait que la proportion
des élèves en difficulté d’apprentissage semble en croissance régulière depuis
20 ans tant au primaire qu’au secondaire. Ce phénomène pourrait s’observer
dans la plupart des pays où, à la suite de la démocratisation soutenue de l’édu-
cation, les systèmes d’éducation sont rendus accessibles à tous les enfants. Il
nous semble toutefois qu’à ce constat s’ajoute la sollicitation faite auprès des
enseignants pour identifier les élèves en difficulté dans le but d’allouer les
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crédits nécessaires à la mise en place de services adaptés et de développer chez
des intervenants scolaires les compétences à reconnaître les caractéristiques
d’un élève qui présente des difficultés particulières. Ces constats nous condui-
sent à nous questionner sur les savoirs développés par les orthopédagogues au
contact des nécessités de la pratique scolaire, le tout dans le but d’enrichir la forma-
tion initiale offerte aux futurs orthopédagogues.
Problématique
Les modalités d’intervention en adaptation scolaire
Divers facteurs influencent les pratiques qui se développent dans les écoles,
dont les différents courants de recherche, les politiques en cours, les préoccu-
pations des intervenants de l’école et, enfin, les contraintes institutionnelles. Poplin
(1988) brosse d’ailleurs un tableau des motivations qui ont mené vers une trans-
formation des cadres de référence en adaptation scolaire aux États-Unis.
À titre d’exemple, sous l’influence d’une perspective empirique, Miller et
Mercer (1993) proposent aux enseignants ou enseignantes de faire un choix de
moyens mnémoniques et de veiller à ce que ces moyens soient accessibles à
l’élève. Une perspective piagétienne influence le modèle d’intervention étudié
par Calvert (1993), modèle à partir duquel la construction de diverses conserva-
tions (nombre, longueur, poids ou volume) est suscitée. Les études de Jones,
Wilson et Bhojwani (1997) les conduisent à suggérer une intervention qui privi-
légie une sélection d’exemples pertinents, un modèle d’enseignement plus
explicite, une attention particulière portée au temps et au choix du matériel
de même que l’utilisation de certaines techniques d’enseignement. Larcombe
(1985) propose d’adopter une vision plus large de l’intervention. Il explore les
interrelations entre l’apprenant qui éprouve des difficultés d’apprentissage,
l’enseignant, les mathématiques et l’éducation. Le rôle de l’enseignant est alors
de replacer l’élève en difficulté dans une situation où s’allient affectivité et cogni-
tion. Influencés par une perspective plus systémique, Bos et Vaughn (1988), ainsi
que Goldman et Hasselbring (1997) proposent un modèle d’enseignement mathé-
matique appelé «enseignement ancré». Ce type d’enseignement pourrait faire
référence à la résolution des problèmes mathématiques à l’intérieur de plusieurs
contextes de la vie courante: la planification d’un voyage, les statistiques ou les
affaires. En utilisant de nouvelles technologies, les problèmes sont présentés sur
vidéo, ce qui permet aux élèves de revoir, au besoin, ce qu’ils auraient oublié
ou ce qu’ils n’auraient pas compris. En 1982, Keogh recensait déjà plus de
1400 tests et techniques d’intervention différentes aux États-Unis. Quelle for-
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mation devrions-nous privilégier au moment d’offrir une formation initiale aux
futurs orthopédagogues?
Sur le plan politique, en 1994, les pays membres de l’Organisation de coopé-
ration et de développement économiques publiaient un rapport qui présentait
les composantes d’une formation destinée aux enseignants et enseignantes qui
œuvrent auprès d’une population d’élèves ayant des difficultés d’adaptation et
d’apprentissage. D’après ce rapport, il convient de connaître les handicaps des
élèves et leurs conséquences, de même que la pratique des spécialistes et les
techniques particulières utilisées. En outre, les caractéristiques et les besoins
des élèves doivent être pris en compte pour utiliser les pratiques et les techni-
ques d’enseignement supportées (ou confirmées) par la recherche. Dans la plu-
part des pays membres, la formation se réalise sous forme de stages plus ou moins
prolongés. Toutefois, l’introduction d’une préparation à l’intégration des élèves
dans la classe ordinaire semble être une nécessité dans plusieurs pays, et ce,
dès la formation initiale. Seulement 4 pays sur 24 auraient pris des mesures
en ce sens. Au Québec, une formation initiale particulière est offerte aux futurs
orthopédagogues. Cette formation prévoit, selon les universités, l’obtention d’un
diplôme universitaire de premier cycle en orthopédagogie ou en adaptation
scolaire. La tâche des orthopédagogues n’est pas d’enseigner au sens habituel,
mais d’intervenir de manière à favoriser l’intégration, en classe ordinaire, des
élèves qui éprouvent une difficulté persistante dans l’étude d’une ou de plusieurs
disciplines. Compte tenu de la pertinence de prendre en compte les pratiques
en cours, il nous semble important de connaître les préoccupations et les con-
traintes institutionnelles vécues par ce type de professionnels.
Les préoccupations des futurs maîtres varient déjà au moment de s’inscrire
dans un programme d’études. Bednarz, Baribeau, Blouin, Gattuso, Lebrun, Lebuis
(1999) relèvent que les futurs enseignants de la concentration mathématiques
au secondaire choisissent cette option essentiellement pour l’amour de la matière.
«Les élèves sont au départ peu présents et la visée sociale de cette profession
n’est nullement perçue» (p. 99). Les futurs maîtres inscrits à un programme
destiné à des élèves du préscolaire ou du primaire s’intéressent d’abord à des
stratégies d’animation d’activités pédagogiques, mais ceux et celles inscrits au
programme en adaptation scolaire ou en orthopédagogie seraient préoccupés par
le dépistage et la compréhension des difficultés d’apprentissage (Giroux, 1999).
Ces préoccupations influencent la formation souhaitée par ces futurs maîtres.
Sur le plan des contraintes institutionnelles, Laliberté (1995) reconnaît les
difficultés liées à la profession d’orthopédagogue. Les mandats confiés seraient
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multiples, sans considérer les expertises et les expériences de formation allant
même jusqu’à considérer ces professionnels comme polyvalents au point de
pouvoir résoudre tous les problèmes. Elle conclut en écrivant que le savoir ortho-
pédagogique reste encore mal défini. McDuff (1992) reconnaît d’ailleurs que
les orthopédagogues qualifient leur rôle d’imprécis, trop fluctuant, trop peu
reconnu et à la merci de beaucoup de contextes. Il est donc impératif de mieux
cerner les savoirs d’expérience de ce type d’intervenants. Nous avons choisi
d’étudier leur façon d’analyser des productions d’élèves et de proposer des
interventions en mathématiques.
Formation des intervenants et des intervenantes
en adaptation scolaire
Le rôle attribué à l’erreur a une influence déterminante sur l’orientation de
l’analyse et de l’intervention orthopédagogique. Selon les conceptions de l’ensei-
gnement et de l’apprentissage les plus répandues, il existe un bon élève et, par
conséquent, un mauvais, un bon enseignant et, par conséquent, un mauvais. Le
bon élève est celui qui fait le moins d’erreurs possibles. L’erreur constitue une
déviation qu’il faut rectifier par rapport à une norme. Elle montre que l’élève
n’a pas bien utilisé une portion du savoir enseigné en classe. L’erreur persistante
est perçue comme l’indice d’un apprentissage raté par l’élève ou encore comme
l’indice d’un enseignement raté. Ainsi, le bon enseignant est celui dont l’ensei-
gnement produit le moins d’erreurs chez les élèves.
Au moment de leur formation initiale, les futurs orthopédagogues sont
régulièrement invités à analyser la production d’erreurs chez les élèves. Giroux
(1999) remarque que les discussions s’orientent d’abord de manière à identi-
fier des conduites sans cohérence chez les élèves, puis à réaliser une analyse
qui aboutit à reprendre l’enseignement là où il avait échoué, en éliminant ce
sur quoi bute l’élève. Par ailleurs, au cours d’une étude exploratoire, nous avons
constaté comment l’erreur d’un élève fait écran à la réalisation d’une analyse
conceptuelle chez les futurs maîtres du primaire (DeBlois et Squalli, 1997). En
effet, l’erreur d’un élève capte tout de suite l’attention. Elle rend manifeste une
déviance que le futur maître s’empresse de vouloir rectifier.
Notre conception de l’apprentissage nous convie à interpréter la difficulté
d’apprentissage comme une structuration partielle des connaissances d’un élève
pour un concept mathématique donné. Remédier à cette difficulté revient alors
à permettre à l’élève de poursuivre l’élaboration de cette compréhension. L’erreur
devient le reflet d’une compréhension de la part d’un élève et non la marque
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d’un échec. Pour intervenir, il devient nécessaire de comprendre la difficulté de
l’élève et par conséquent d’évaluer la compréhension de l’élève. Ginsburg (1997)
précise d’ailleurs que l’identification de la compréhension des enfants, dont
l’échec en mathématiques est influencé par une difficulté d’apprentissage, néces-
site une recherche développementale complexe. L’examen des conceptions, la
construction des formes diverses de connaissances, les réponses reçues par rap-
port à un enseignement, la motivation des élèves, les interactions entre les modes
de pensée et le contexte éducationnel et, enfin, le développement de la pensée
de l’élève à travers le temps sont autant d’éléments à considérer. Le développe-
ment de ces connaissances permettrait d’être davantage à l’écoute de leurs élèves,
modifiant par conséquent les interventions proposées.
Bednarz (2000) rappelle l’importance du contexte de la pratique lorsque
nous cherchons à susciter la restructuration d’un répertoire d’interventions. La
transformation des pratiques passe par leur compréhension (Bauersfeld, 1994).
C’est pourquoi, avant d’expérimenter un cadre d’interprétation des activités co-
gnitives des élèves, nous étudierons d’abord les savoirs d’expérience que les
orthopédagogues utilisent lorsqu’un élève présente une erreur. Comment l’ortho-
pédagogue qui intervient dans le milieu scolaire conçoit-il l’erreur? Comment
l’erreur est-elle utilisée dans l’identification de la difficulté? Discerner la difficul-
des élèves consisterait-il à évaluer l’état de la compréhension d’un concept
mathématique dont les erreurs en sont des manifestations?
Méthode
Cette étude1vise à identifier et à comprendre la nature des savoirs expérien-
tiels des orthopédagogues au moment de préparer une intervention en mathéma-
tiques et à analyser leur transformation au contact d’un modèle théorique. En raison
de cet objectif, une recherche collaborative (Erickson, 1989; Desgagné, 1997),
où chercheurs universitaires et orthopédagogues collaborent, devient nécessaire.
Comme méthode de recherche, la recherche collaborative implique que nous
accordions aux orthopédagogues du milieu scolaire un rôle primordial. Chacun,
chercheuse et orthopédagogues, ayant construit son répertoire de diagnostics
et de stratégies d’intervention, essaiera d’identifier ces savoirs d’expérience.
Desgagné (1997) dégage trois caractéristiques essentielles à une recherche
collaborative. La première est relative à la coconstruction d’un objet de connais-
1 Cette recherche a été rendue possible grâce à la contribution financière du FCAR. Lucie
DeBlois est membre du CRIFPE-interuniversitaire.
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sance entre un chercheur et des praticiens. Dans cette étude, la coconstruction
d’un modèle cernant les savoirs d’expérience développé par les orthopédagogues
sera suscitée par le modèle théorique proposé par la chercheuse. Les orthopéda-
gogues, quant à elles, utilisent leurs stratégies et leurs connaissances pour recon-
naître la logique des erreurs des élèves. Du côté de la chercheuse universitaire,
cela signifie que:
le rôle du chercheur dans le projet collaboratif va s’articuler essentiellement en
fonction de baliser et d’orienter, partant du cadre d’exploration qu’il va proposer
et qui renvoie au projet théorique lié à l’objet de recherche privilégié, cette compré-
hension en contexte qui se construit au fil de l’exploration (p. 373).
La deuxième caractéristique d’une approche collaborative allie activités de
production de connaissances et de développement professionnel. Durant cette
étude, les orthopédagogues considèrent les rencontres comme autant de journées
de perfectionnement, alors que la chercheuse recueille les données qui permet-
tront d’identifier les éléments émergeant des savoirs d’expérience. La troisième
caractéristique d’une recherche collaborative est relative à l’établissement d’une
médiation entre communauté de recherche et communauté de pratique. Desgagné
(1997) explique que même si le chercheur assume seul le volet recherche, il
doit tenir compte du point de vue de l’acteur praticien en contexte dans tout le
processus de recherche.
Intervenants et intervenantes à l’école
Une rencontre préliminaire avait d’abord permis à la chercheuse de rencon-
trer une douzaine d’orthopédagogues d’une même commission scolaire. La
chercheuse avait proposé de réaliser cinq ou six rencontres de discussion durant
une année scolaire, rencontres qui seraient autant de moments de perfectionne-
ment. Le projet devait être défini à partir des besoins des personnes concernées.
Quatre personnes se sont montrées intéressées.
La première rencontre a permis de cerner les besoins et de définir le pro-
jet. La réflexion a porté sur des erreurs d’élèves. Les orthopégagogues appor-
tent à tour de rôle une erreur d’élève, et la chercheuse fait de même. Celle-ci
propose alors immédiatement un exemple de production d’élève et quatre ques-
tions pour amorcer une discussion. «Un enfant illustre des nombres avec des
jetons, des petites enveloppes et des grandes enveloppes. En montrant une grande
enveloppe qui représente une centaine, il dit: «C’est 100 dizaines». Cette dis-
cussion, qui n’est pas rapportée ici, a servi à la fois d’étude exploratoire à la
chercheuse et d’activité de familiarisation aux orthopédagogues.
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Structure de la démarche d’investigation
Une étude exploratoire menée auprès des futurs maîtres du primaire (DeBlois
et Squalli, 1997) nous avaient déjà conduites à reconnaître l’intérêt de quatre
questions pour susciter une discussion. Ces questions sont:«Cernez la ou les
notions qui interviennent dans cette situation? Où se situe la difficulté de l’élève?
Quel pourrait être le raisonnement qui l’a conduit à faire cette erreur? Proposez
une intervention qui lui permettrait de reconstruire la compréhension de cette
ou de ces notions?» En effet, ces questions avaient permis de mettre en lumière
une confusion entre une composante d’un concept mathématique (par exemple,
la relation d’équivalence entre 10 unités et une dizaine) et le concept mathéma-
tique visé dans la production de l’élève (par exemple, la numération de position),
de cerner les conceptions du rôle de l’élève, d’adopter le point de vue de l’ap-
prenant et d’identifier enfin trois modèles d’intervention: un modèle explicatif,
un modèle par conflit cognitif et un modèle interrogatif. Ainsi, à partir de qua-
tre questions déjà expérimentées, la chercheuse propose de réfléchir sur des
productions d’élèves. Nous avons laissé un moment aux orthopédagogues pour
répondre à chaque question. Par la suite, nous avons entamé la discussion.
À chacune des rencontres, des productions d’élèves étaient proposées par
la chercheuse et par les orthopédagogues.
Première rencontreInspirée par les travaux de Piaget (1981), cette pro-
duction porte sur le concept de multiplication. «Vous êtes dans une classe de
troisième année. Vous construisez un ensemble dans lequel vous avez 6 paquets
de 4 objets. Les élèves doivent réaliser un ensemble contenant le même nom-
bre d’éléments que le vôtre, mais avec des paquets de 2. Pour réaliser cette
activité, ils disposent de réglettes blanches Cuisenaire. La majorité des élèves
rassemble en 12 paquets de 2 et constate l’égalité entre les éléments des deux
ensembles. Un élève vous dit: « Pour qu’il y ait la même chose, je dois avoir
aussi 6 paquets, autrement, il y a plus d’objets parce que j’ai plus de paquets.»
Deuxième rencontreVous regardez les cahiers de vos élèves. L’un d’eux
a écrit 4,7 + 4,7=8,14.
Troisième rencontreTu dois placer 353 autocollants sur le grand carton
pour l’exposition. Tu places 242 autocollants aujourd’hui. Les autres, ce sera
pour demain. Combien d’autocollants placeras-tu demain? Un élève écrit les
deux nombres (353 et 242) et fait une addition.
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Quatrième rencontreUn élève de 12 ans à qui on demande de représen-
ter 2/3 et 5/4 réalise ces illustrations (Charnay, 1996, p. 51).
Cinquième rencontreUn élève de deuxième secondaire compare 1/4 de
gâteau et 1/6 d’un autre gâteau de la même dimension. Il explique: 1/4 est plus
grand que 1/6 parce qu’en mangeant un morceau sur 4, il ne reste que 3 mor-
ceaux, donc il en reste moins. Il ajoute: «Cela fait des plus gros morceaux
parce que seulement séparés en 4 alors que l’autre gâteau, j’aurais un morceau
des petits 6». Il conclut en disant que 1/4 est plus grand que 1/6.
Voici maintenant des productions d’élèves apportées par les orthopédagogues.
Première rencontreLes deux problèmes proposés par les orthopédagogues
portent sur l’algorithme de soustraction. Le premier permet de réaliser une
soustraction avec emprunt: 353 - 16 = 343. Le second fait intervenir les zéros
intercalaires: 31002 – 999.
Deuxième rencontre–Les orthopédagogues ne donnent pas d’erreurs d’élèves.
Troisième rencontre On demande à un élève de trouver la différence entre
47 et 53. Il répond 7 et ne comprend pas pourquoi sa réponse n’est pas acceptée.
Quatrième rencontreComment expliquer que l’année 1997 correspond
au XXesiècle? La confusion entre aire et périmètre est-elle une question de voca-
bulaire? Les élèves se souviennent rarement comment arrondir les nombres.
Cinquième rencontre–Comment faire comprendre aux élèves les puissances
(102). L’enfant fait 10 x 2.
Recueil des données
Chacune des rencontres a été enregistrée sur cassette audio. Les orthopéda-
gogues ont réalisé des procès-verbaux afin de consigner les éléments jugés
importants. Ces rencontres ne devaient pas ajouter à leur charge déjà lourde.
Elles devaient plutôt leur permettre de briser l’isolement trop souvent ressenti
dans une école. L’analyse des discussions est faite à partir de la transcription
des discussions enregistrées sur cassettes audio. Cette analyse s’est effectuée
sans distinguer entre les propos de l’une ou l’autre des orthopédagogues.
2/3 5/4
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Pour chaque rencontre, nous avons identifié des éléments des savoirs dex-
périence utilisés par les orthopédagogues. La comparaison entre les différents
éléments de ces savoirs dexpérience dune rencontre à lautre a permis, dune
part, dapprécier leffet de la formation reçue par les orthopédagogues à travers
ces séances de travail, donc de dégager les savoirs quelles ont construits. Dautre
part, par contraste avec les éléments nouveaux intégrés par les orthopédagogues,
la comparaison a suscité lidentication des éléments fondamentaux de leurs
savoirs dexpérience. Cette méthode est originale dans une recherche collabora-
tive. En effet, pour mettre en évidence des éléments de leurs savoirs dexpérience,
une perturbation contrôlée, soit le cadre théorique de la chercheuse a été pro-
posé. En suivant l’évolution des transformations que subissent les savoirs dexpé-
rience, lesquels sont devenus visibles comme éléments nouveaux intégrés par
les orthopédagogues, il a été possible de distinguer, par contraste, les savoirs
construits des savoirs dexpérience.
Analyse des données
Nous nous intéressons, dans un premier temps, aux réponses écrites par les
orthopédagogues pour les cinq premières rencontres. Ensuite, nous présentons
les discussions qui ont modifié le savoir dexpérience ainsi extrait.
En réponse aux questions proposées durant les cinq rencontres
Lanalyse des écrits fait ressortir que, contrairement aux futurs maîtres, les
orthopédagogues en exercice ont tendance à adopter la perspective de lobjet
dapprentissage, en oscillant entre les composantes du concept mathématique
en jeu ou le concept mathématique qui intervient dans la situation. De plus, les
orthopédagogues en exercice cherchent à situer la difculté de l’élève en distin-
guant le jugement porté sur l’élève de l’évaluation de la production de l’élève.
En outre, elles tentent principalement dexpliquer un raisonnement en se basant
sur des arguments logicomathématiques, sauf lors de la troisième rencontre.
Enn, alors quau moment de la première rencontre, les orthopédagogues utilisent
surtout la même situation en se centrant essentiellement sur la composante qui
pose problème chez l’élève par un style dintervention interrogatif, les autres
rencontres laissent apparaître une autre tendance. Les orthopédagogues tendent
à utiliser une situation différente en visant à ce que l’élève construise un con-
cept ou une des composantes du concept. Au moment de la quatrième rencontre,
il est possible de retrouver, en marge de leur feuille, les mots «raisonnement,
difculté, notions/concepts, intervention».
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Il semble que lidentication du concept en jeu apparaît à la troisième étape.
Les orthopédagogues commencent par identier le raisonnement de l’élève.
Ce choix montrerait leur forte tendance à se centrer, dès le départ, sur l’élève.
Cette centration devient une composante importante de leur cadre expérientiel.
Toutefois, cela les amène à substituer au raisonnement plausible de l’élève une
description de la procédure utilisée en écrivant: «Je divise le rectangle en 3 et
jen colore 2. Je divise le rectangle en 5 et jen colore 4.» Cette centration préala-
ble sur l’élève, plutôt que sur lanalyse conceptuelle de la situation, expliquerait
lapparition dune intervention dans laquelle intervient le diagnostic. Par exem-
ple, lune delles écrit: «Revenir sur la notion de fraction avec du matériel con-
cret. Lui demander auparavant dexpliquer comment il en est arrivé à ces réponses
et ce quil comprend de cette notion.» Lorthopédagogue attend de linterven-
tion un prétexte pour faire le diagnostic; elle attend que l’élève explique son
raisonnement et sa difculté. Le cadre expérientiel des orthopédagogues se cen-
trerait ainsi sur l’élève pour comprendre son raisonnement, ensuite pour situer
sa difculté et, enn, pour intervenir. Lidentication du style dintervention est
parfois difcile à discerner à partir des réponses écrites des orthopédagogues.
Quelques changements apparaissent entre les savoirs mobilisés au début
de chacune de ces rencontres. Ainsi, les orthopédagogues ont dabord tendance
à expliquer un raisonnement en se basant sur des arguments logicomathéma-
tiques, pour ensuite privilégier des arguments non mathématiques. Cela pourrait
être lié au fait que la relation «parties-tout» impliquée dans la situation dappren-
tissage pose problème. Cette difculté les conduit à se centrer sur la composante
qui pose problème chez l’élève. Il est possible de poser lhypothèse suivante:
une difculté à réaliser une analyse conceptuelle conduirait à oublier la place
du concept mathématique au prot dautres facteurs possibles. Ainsi, leur
analyse serait fortement inuencée par le concept mathématique qui intervient
dans la situation et par leur degré de familiarité avec ce dernier.
Première rencontre2– Les erreurs rencontrées
Durant cette rencontre, les orthopédagogues ont énuméré plusieurs erreurs
rencontrées par leurs élèves. Cela a permis de distinguer les sources derreurs
et la modalité dintervention. Nous nous attarderons à chacun de ces thèmes.
2 La chercheuse a proposé la production suivante: «Vous êtes dans une classe de troi-
sième année. Vous construisez un ensemble dans lequel vous avez 6 paquets de 4 objets.
Les élèves doivent réaliser un ensemble contenant le même nombre d’éléments que
le vôtre, mais avec des paquets de 2. Pour réaliser cette activité, ils disposent de réglettes
blanches Cuisenaire. La plupart rassemblent en 12 paquets de 2 et constatent l’égalité
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Les sources d’erreurs
Les orthopédagogues rencontrées tendent dabord à identier un problème
de lecture ou un enseignement dans lequel apparaît une variété de procédures
à mémoriser comme sources des erreurs. Par exemple, lune delles explique:
«Moi je trouve que ces élèves [...] souvent, cest un problème de lecture; ils ne
vont pas chercher les mots clés dans le texte, que ce soit dans nimporte quelle
lecture mathématique.» Une autre ajoute: «Tu leur [les enseignants] montres
2, 3, 4 façons différentes de montrer la division et la multiplication, mais ils ne
le font plus, car ils se rendent compte que ça mêlait les élèves; les élèves ne
sont pas capables de jouer avec ces façons de faire.» Elles expriment enn leur
difculté à cerner la logique des élèves. «Les élèves font un grand nombre der-
reurs pour une même opération (la division), il y a que pour eux ça na tellement
pas de sens de diviser, soustraire; il ny a aucune logique dans leurs réponses;
ils vont additionner quelques fois au lieu de soustraire; ils ne comprennent
pas pourquoi on soustrait…» Elles ne sont donc pas en mesure didentier
un l conducteur entre les erreurs produites.
Une intervention de la chercheuse amène les orthopédagogues à repenser
leur analyse en intégrant les concepts mathématiques qui interviennent dans
une situation dapprentissage. Cest un premier moment important de confron-
tation entre le cadre expérientiel des orthopédagogues et celui de la chercheuse,
moment qui va conduire à l’élaboration dun nouveau cadre expérientiel. Les
orthopédagogues semblent accepter la pertinence de lanalyse conceptuelle.
Elles précisent alors limportance du concept mathématique dans lexplication
de la source de lerreur, puis dans lintervention. Elles avouent que cela change
lorientation de leur intervention, non plus en direction du traitement de la com-
posante qui pose problème chez l’élève, mais dans la direction de reconstruire
la compréhension du concept mathématique.
Lanalyse de la discussion portant sur les erreurs montre que les orthopédago-
gues ne semblent pas disposer dexplications générales ou de théorie explicative
de lerreur, à partir de laquelle elles pourraient intervenir avec une certaine assu-
rance. Elles cherchent à contrôler les sources derreur. «Cest quoi le bon truc?»,
dira lune delles. À ce moment, il semble que les élèves doivent produire le moins
entre les éléments des deux ensembles. Un élève dit: «Pour quil y ait la même chose, je
dois avoir aussi 6 paquets, autrement, il y a plus dobjets parce que jai plus de paquets.»
Rappelons que les orthopédagogues ont proposé deux productions portant sur lalgo-
rithme de soustraction. Le premier permet de réaliser une soustraction avec emprunt:
353 - 16 =343. Le second fait intervenir les zéros intercalaires: 31002 - 999.
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derreurs possibles. L’étude de lerreur portant sur la situation multiplicative
permet de reconnaître que leur analyse conceptuelle porte sur le nombre. Linter-
vention quelles proposent adopte alors essentiellement un style interrogatif, dans
laquelle le dénombrement est important. La discussion, qui suit, laisse émerger
certaines prises de conscience chez les orthopédagogues. Dune part, les échanges
relatifs à la cause de la difculté des élèves les amènent à reconnaître limpor-
tance dune analyse conceptuelle, puis à distinguer les concepts de nombre et
de multiplication pour enn modier le sens de leur intervention. Dautre part,
elles reconnaissent quil ne sagit plus de réparer ponctuellement, mais de faire
un travail en profondeur avec l’élève. Dans ce sens, une orthopédagogue sex-
clame: «Moi je trouve ça super! Cest une belle erreur ! Parce que cest une
belle erreur que les élèves font.»
Une modalité d’intervention : faire refaire la démarche à l’élève
La suite de la discussion porte sur lintervention. Nous constatons que les
orthopédagogues privilégient une intervention dans laquelle elles demandent
à l’élève de refaire sa démarche pour quil prenne conscience de son erreur.
Le montre lextrait d’échange suivant entre la chercheuse et une orthopédagogue:
Orthopédagogue Moi, j’ai rencontré, cette semaine, l’erreur qu’on avait travaillée
il y a deux semaines. Une élève qui compte des bâtonnets, il y en a des centaines, puis
il y en a 145 bâtonnets, il a pris des paquets de 10, et quand tu lui demandes d’écrire
son nombre, il écrit 305. Je lui ai demandé de refaire sa démarche, et j’ai vu que
ça bloquait: ses paquets de 10, il comptait par 10. Au lieu de compter j’ai une dizaine,
2 dizaines, 3 dizaines, il comptait 10, 20, 30, 40, 50,60, 70, 80, 90, 100, 200, 300…
Tous Ahhhhh! Il continue, il compte par 10 les dizaines… et quand…
Orthopédagogue et quand il arrive à 100, il monte toujours la prochaine dizaine
et là il arrive à 200, 300. []Il monte des paquets de dizaines, mais il compte
par cent. Et je lui ai juste fait refaire la démarche, et quand il me l’avait montré
ce qu’il avait fait, il s’est aperçu que c’était []
Chercheuse Est-ce que tu penses que le fait qu’il a pris conscience pendant
qu’il te le dictait, il va être capable de réutiliser cette prise de conscience-là?
Orthopédagogue Moi, je crois que oui. []
Enn, il semble que lorthopédagogue soit appelée, dans une même séance
de travail, à établir le diagnostic et à intervenir pour aider l’élève à surmonter
sa difculté:
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SEPTIÈME CHAPITRE – Une modélisation des savoirs d’expérience... 165
Moi en tout cas, je me suis rendu compte []de ça samedi, pourquoi j’avais tant
de difficulté à rester sur le problème, c’est justement parce qu’on arrive avec un
problème et tout de suite on te demande de faire une intervention. Tout de suite, on
te demande de faire une action en rapport avec le problème qui est posé. Ça fait
que tu ne prends pas le temps de vérifier le problème… il n’y a pas de temps d’arrêt.
Y’a un problème et il faut que tu réagisses.
Cette contrainte institutionnelle pourrait expliquer pourquoi les orthopéda-
gogues semblent ne traiter que les erreurs de leurs élèves plutôt que de chercher
à identier la source de lerreur. Ce type danalyse conceptuelle nécessite beau-
coup de temps.
Au terme de cette première rencontre, un moment devient particulièrement
important: la prise de conscience de la place du concept mathématique dans
la réflexion à poser. Les orthopédagogues ont avoué qu’à lissue du travail en
commun et de lapport théorique de la chercheuse, elles orienteraient différem-
ment leur intervention. Nous posons toutefois la question: «Cet apprentissage
peut-il être intégré dans la pratique des orthopédagogues? En pratique, pourra-
t-il dépasser et résister à la force du savoir dexpérience des orthopédagogues?»
Deuxième rencontre3– L’émergence d’une analyse conceptuelle
Lanalyse de la deuxième entrevue montre l’émergence dune analyse concep-
tuelle; elle permet de conrmer le savoir construit par les orthopédagogues
durant la première. En étant maintenant conscientes du rôle primordial de lana-
lyse conceptuelle, les orthopédagogues ont manifesté le besoin marquédavoir
une compréhension assez profonde des concepts mathématiques fondamentaux
rencontrés dans les situations quelles ont à analyser. Toutefois, nous relevons
ici un autre élément de leurs savoirs dexpérience: les orthopédagogues ont
tendance à questionner l’élève à la fois pour diagnostiquer et intervenir, sans
séparer nettement ces deux moments. Cet extrait conrme ce nouvel élément
de leurs savoirs:
C’est ça qui est difficile avec un problème écrit comme ça, parce que souvent pour
nous autres (je vais parler pour moi), l’interaction avec l’enfant est très importante
et très stimulante aussi. Il y a des fois, quand j’arrive avec l’enfant, que j’ai une
idée des grandes lignes, mais je ne sais pas vers quoi ça va m’orienter. Et selon
3 La chercheuse a donné la production suivante: Vous regardez les cahiers de vos élèves. Lun
deux a écrit 4,7 + 4,7 = 8,14 et que les orthopédagogues nont proposé de production.
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166 Enseignement et difficultés d’apprentissage
le questionnement et les réponses de l’enfant, parfois j’aboutis complètement ailleurs
d’où j’aurais pensé aboutir parce que je me rends compte, en questionnant, que
ce n’est pas ce que je présumais.
Cette deuxième rencontre a donc permis de constater la solidité du savoir
construit durant la première rencontre et de voir apparaître un nouvel élément.
En effet, le questionnement correspondrait au style privilégié par les orthopéda-
gogues. Il permet de diagnostiquer et dintervenir alternativement.
Troisième rencontre4– L’analyse conceptuelle
Les difficultés d’une analyse conceptuelle
Le groupe a exploré et discuté dautres sources de difcultés de nature non
logicomathématique. À cette étape, avons-nous dit, les orthopédagogues discu-
taient de la production de l’élève dans laquelle une addition avait été privilégiée
à la soustraction pour résoudre un problème de complément densembles. Elles
expliquent, par exemple, la difculté, soit en termes de méthode de travail, dim-
pulsivité ou encore de bagage dexpérience.
OrthopédagogueJe trouve que certains élèves ce n’est pas parce qu’ils ont une
difficulté au niveau de la soustraction ou de l’addition, c’est parce qu’ils n’ont pas
une démarche précise.
Orthopédagogue–La démarche de réflexion est liée plus à une méthode de travail
qu’à un concept mathématique
Orthopédagogue–Des enfants qui ont des troubles d’apprentissage leurs
difficultés se situent souvent au niveau de leurs attitudes (impulsivité)
OrthopédagogueDans l’analyse de la difficulté, il y a nécessité de séparer entre
ce qui est d’ordre concepts mathématiques ou logique et ce qui est de l’ordre de la
démarche.
Orthopédagogue Je me demande s’ils n’ont jamais appris à résoudre des problèmes
à la maison, cela ne pourrait pas avoir une influence sur leurs attitudes à l’école?
4 Rappelons que la chercheuse a proposé la production suivante: «Tu dois placer 353 auto-
collants sur le grand carton pour lexposition. Tu places 242 autocollants aujourdhui.
Les autres, ce sera pour demain. Combien dautocollants placeras-tu demain? » Un élève
écrit les deux nombres (353 et 242) et fait une addition.
Les orthopédagogues ont proposé: On demande à un élève de trouver la différence entre
47 et 53. Il répond 7 et ne comprend pas pourquoi sa réponse nest pas acceptée.
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SEPTIÈME CHAPITRE – Une modélisation des savoirs d’expérience... 167
La chercheuse a dû fournir des explications mathématiques concernant le
champ conceptuel des situations ayant une structure additive. Les orthopédago-
gues nont pas eu de mal à identier le concept mathématique en jeu dans la
situation, mais elles manifestent le besoin davoir une compréhension profonde.
Elles ne semblent pas disposer dune vision du champ conceptuel des structures
additives, ce qui agirait sur les éléments qui interviennent dans leur analyse et
leur intervention. Il semble donc que lorsque lanalyse conceptuelle pose un pro-
blème, elles ont tendance à expliquer la difculté de l’élève en se basant sur des
raisonnements non logicomathématiques entraînant ainsi une intervention dans
laquelle elles cherchent à corriger ponctuellement lerreur de l’élève. Cette obser-
vation tendrait à conrmer lhypothèse émise lors de la première rencontre.
L’analyse d’erreurs: une porte sur l’intervention
Dans une deuxième partie de lentrevue, les orthopédagogues ont discuté
le cas de lidentication de l’écart entre deux nombres. Elles nont pas utilisé
les quatre questions proposées comme cadre de leur analyse. Elles se sont très
vite lancées dans des explications de lerreur (l’écart entre deux nombres) et
des moyens pour les traiter. Ainsi, lerreur de l’élève se manifeste de façon très
simple, ce qui laisse croire quelle nest pas le signe dune difculté profonde
de l’élève. Selon un principe d’économie cognitive, la simplicité de lerreur
semble faire écran à une analyse conceptuelle profonde. Lintervention tente,
par conséquent, de traiter ponctuellement lerreur de l’élève.
Quatrième rencontre5– L’analyse d’une production d’élève
Une centration sur l’élève
Lanalyse de la production dun élève, relative à lillustration de fractions,
a permis dutiliser les quatre questions. Toutefois, la discussion a porté sur le
cadre expérientiel des orthopédagogues. En effet, la chercheuse na pas animé
la réunion à partir des quatre questions habituelles. Il lui a semblé, à la suite
des trois premières rencontres, que si les orthopédagogues ne lutilisaient pas,
il pouvait ne pas être adapté à leur pratique. Ainsi, la chercheuse a plutôt choisi
de suivre la démarche initiée par les orthopédagogues.
5 Rappelons que la chercheuse a proposé la production suivante: Un élève de 12 ans à
qui lon demande de représenter 2/3 et 5/4
Les orthopédagogues ont proposé: Comment expliquer que lannée 1997 correspond
au XXesiècle? La confusion entre aire et périmètre est-elle une question de vocabu-
laire? Les élèves se souviennent rarement de quelle manière arrondir les nombres.
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168 Enseignement et difficultés d’apprentissage
Lanalyse de la quatrième rencontre montre que les orthopédagogues ont
tendance, dès le départ, à se centrer sur l’élève an de comprendre son raisonne-
ment. Elles situent sa difculté pour ensuite intervenir. Pourquoi leur cadre de
référence ne tient-il pas compte de limportance didentier le concept en jeu
dans la situation? Pourquoi vont-elles tout de suite à lintervention? Pourquoi
l’étape danalyse conceptuelle semble-t-elle de moindre importance? Elles
préfèrent conduire leur analyse directement avec l’élève en le questionnant et
en lobservant travailler dans des situations avec du matériel concret. Comme
le dit lune delles, «Je serais repartie de ce quil avait dit et je lui aurais demandé
de me lexpliquer, daller plus loin dans son explication.»
Cela pourrait sexpliquer par les contraintes institutionnelles. En effet,
l’élève ne vient pas rencontrer lorthopédagogue avec un diagnostic précis. De
plus, lorthopédagogue na pas toujours le temps d’établir un diagnostic avant
denvisager lintervention. Ces contraintes dans lorganisation de leur travail
les conduiraient à ne pas distinguer clairement le diagnostic de lintervention.
Cela expliquerait pourquoi lorthopédagogue penserait dabord en termes dinter-
vention. Si celle-ci ne donne pas les résultats attendus, elle devient une situa-
tion de diagnostic générant une nouvelle intervention. Il sagit alors dintervenir
selon une logique dessai-erreur. La principale limite de cette façon de procéder
nous semble dû au fait que le problème, pour lequel une solution est recher-
chée, risque de ne pas être stable. Ainsi, dans le cas où lintervention ne donne-
rait pas les résultats attendus, lorthopédagogue diagnostique un problème autre
que le problème initial. Elle prévoit alors une intervention en fonction de ce
nouveau problème, ce qui peut aussi révéler un troisième problème et ainsi de
suite. Il est alors possible que lorthopédagogue nintervienne que sur les mani-
festations dun problème sans être en mesure d’établir les relations entre les
différentes manifestations observées. En outre, cela expliquerait pourquoi les
orthopédagogues interviennent en privilégiant le questionnement. En effet, il
devient «la» source de leur analyse.
Voici comment nous comprenons le cadre expérientiel des orthopédagogues:
Étape 1 Identier lerreur, le raisonnement erroné, la difculté de l’élève (ces
trois notions ne semblent pas être différenciées). Cette réflexion nest pas faite
en termes de concept mathématique, mais en analysant laction et les réponses
de l’élève.
Étape 2Prévoir une intervention pour situer la difculté de l’élève et pour
corriger son erreur, éventuellement.
Étape 3Fin de lintervention ou retour à l’étape 1.
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SEPTIÈME CHAPITRE – Une modélisation des savoirs d’expérience... 169
Cinquième rencontre6– L’importance de questionner l’élève
L’intervention qui introduit du matériel ou une situation de vie de l’élève
Lanalyse de la cinquième rencontre montre à nouveau limportance, pour
les orthopédagogues, de questionner systématiquement l’élève et de le pousser
à refaire sa démarche, mais en utilisant du matériel. Une orthopédagogue com-
mence dabord par situer la difculté de l’élève en disant: «En lisant, javais
de la misère à voir où était sa difculté.» Elle continue: «Je me disais que sil
était devant moi, je lui poserais plein de questions sur la première partie de
son raisonnement pour aller voir plus loin quelle est sa compréhension.» Les
orthopédagogues conservent donc leur tendance à se centrer tout de suite sur
l’élève, an de situer sa difculté selon une interprétation de son raisonnement.
En effet, rappelons que dans cette production, lerreur de l’élève ne porte pas
sur la réponse, mais sur la façon de justier sa réponse.
Elles cherchent à intervenir rapidement en utilisant à nouveau linterven-
tion comme diagnostic et intervention. Elles restent alors proches de la situation
initiale, mais en utilisant du matériel. L’élève reprend son raisonnement et
explique comment il a trouvé sa solution et a pris conscience de son erreur.
À nouveau, ce cadre prévoit une intervention ainsi structurée: elles com-
mencent par cerner lerreur, la difculté, le raisonnement erroné; ces points ne
semblent pas différenciés chez elles. Elles interviennent. Elles peuvent interve-
nir pour préciser leur diagnostic ou pour remédier. Leur intervention vise lutilisa-
tion de matériel concret ou de situations concrètes. Elles peuvent aussi utiliser
un plan dintervention standardisé: pour tel type de problèmes, cest tel concept
qui nest pas compris. Une intervention modèle a étédéveloppée selon la compré-
hension du concept et peut être validé par lexpérience. Rappelons quune des
limites de cette modalité dinterventions nous semble le cycle dinterventions suc-
cessives générées, sans quil soit possible d’établir des relations entre les erreurs
des élèves. Ainsi, il se peut que lorthopédagogue intervienne avec efcacité,
mais au sujet dune difculté différente de celle qui justiait la visite de l’élève.
6 La chercheuse propose: Un élève de 2esecondaire compare 1/4 de gâteau et 1/6 dun
autre gâteau de la même dimension. Il explique: 1/4 est plus grand que 1/6 parce quen
mangeant un morceau sur 4, il ne reste que 3 morceaux, donc il en reste moins. Il ajoute:
«Cela fait des plus gros morceaux parce que seulement séparés en 4 alors que lautre
gâteau, jaurais un morceau des petits 6». Il conclut par 1/4 est plus grand que 1/6.
Les orthopédagogues proposent: Comment faire comprendre aux élèves les puissances
(102). Lenfant fait 10 x 2.
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170 Enseignement et difficultés d’apprentissage
Sixième rencontre – Un retour sur l’expérience vécue
Cette rencontre a été loccasion pour les orthopédagogues de revenir sur
lexpérience vécue et dexpliciter ce quelles ont retenu comme apprentissage.
Elle est donc riche en informations susceptibles daider à préciser les analyses
des réunions précédentes et à cerner les éléments du cadre quelles ont induits.
Trois thèmes sont apparus: comprendre l’élève avant dintervenir, la place de
lerreur et la pertinence du questionnement proposé par la chercheuse.
Comprendre l’élève avant d’intervenir
Une orthopédagogue explique que ces rencontres lui ont permis d’éviter
de juger l’élève, pour tenter dabord de comprendre son raisonnement avant
dintervenir. Cette découverte lui permettrait de concevoir les erreurs de façon
tout à fait différente. Avant, explique-t-elle, «je fournissais tout de suite une
explication de lerreur. Maintenant, je me demande quel raisonnement a poussé
l’élève à me donner une telle réponse.» Elle constate la différence. Une deux-
ième précise quavant cette formation, elle avait besoin de l’élève pour le
questionner puisquelle intervenait immédiatement. Cette formation lui aurait
permis de prendre la peine didentier la nature de la difculté et de lier sa
pratique avec la théorie. Avant, elle intervenait immédiatement en expliquant
à l’élève. Elle constate maintenant que lanalyse conceptuelle lui permet d’être
plus juste lors de lintervention, ce qui la rassure beaucoup. Deux orthopéda-
gogues ajoutent quau début des rencontres, elles ont éprouvé de la difculté
à commencer par analyser conceptuellement la situation. Elles narrivaient pas
à suivre lordre des questions, car elles avaient besoin de lintervention. Linter-
vention leur permettait de revenir sur le raisonnement de l’élève. Elles croient
toutefois que les questions proposées sont indispensables. Ces questions per-
mettraient davoir un cadre de référence rigoureux. Par exemple, lune delles
explique que, dans la pratique, elle nest pas habituée à identier la difculté de
l’élève, alors que lordre des questions loblige à faire cette démarche. Elle croit
toutefois important de conserver une certaine liberté dans lutilisation de ce cadre.
La place de l’erreur
La chercheuse demande enn aux orthopédagogues si elles ont construit
un modèle personnel utilisé dans leur pratique. Une orthopédagogue répond que
lanalyse du raisonnement de l’élève sest ajoutée. Elle ne va plus aussi vite à
lintervention, mais tente dabord de comprendre le raisonnement de l’élève.
Elle tend à poser des questions et à attendre que l’élève donne une réponse. Une
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SEPTIÈME CHAPITRE – Une modélisation des savoirs d’expérience... 171
deuxième afrme que le fait de voir lerreur comme lindice dune compré-
hension, et non comme quelque chose de négatif, permet de travailler autrement.
Elle remarque que les enfants nont plus peur de commettre des erreurs. «Ils
répondent librement et savent quen discutant de leurs erreurs, ils vont arriver
à construire quelque chose.» Elle trouve important le fait que lerreur donne
des indices qui permettent dentrevoir des pistes. Elle ajoute que le questionne-
ment est important parce quil débouche sur une lecture de la réalité de lenfant
plutôt que de lui imposer ce quil doit comprendre. Une troisième avoue que le
modèle lui a enlevé des pressions. Elle ne panique plus si les élèves ne sont
pas arrivés à la réponse désirée dans le temps voulu; mais elle reste conante.
Elle laisse les élèves cheminer dans leur compréhension.
La pertinence du questionnement proposé par la chercheuse
Une orthopédagogue semble croire que le questionnement proposé pour
analyser la production des élèves serait utile surtout quand leur propre démarche
dintervention ne donne pas les résultats escomptés. Elles expliquent ensuite
quil faut dabord résoudre les difcultés en lecture avant de sattaquer aux
difcultés en mathématiques.
Enn, il semble que même les enseignantes et les enseignants de classe
ordinaire ne réfèrent pas souvent aux orthopédagogues les élèves pour des pro-
blèmes liés aux mathématiques. Les orthopédagogues afrment que les ensei-
gnants et les enseignantes des classes ordinaires référeraient bien plus d’élèves
en difcultés mathématiques en recevant la formation quelles ont vécue cette
année. En effet, selon une orthopédagogue, les enseignants ne voient pas com-
ment il est possible de développer la compréhension dun élève. Un élève qui
ne saisit pas na qu’à apprendre par cœur les démarches. «Autant en lecture,
on a la préoccupation de la recherche du sens, autant en mathématiques, cest
la technique. Un élève référé parce quil a des difcultés dans la division, on attend
à ce quon lui apprenne la technique. La compréhension en mathématiques nest
pas perçue comme elle devrait être, il y a beaucoup dautomatismes.»
Nous avions déjà constaté, lors de la première rencontre, que les orthopéda-
gogues croient quun enfant ayant des problèmes en lecture aurait des problèmes
dans dautres disciplines. Selon elles, au moment de leur formation initiale
en adaptation scolaire ou en orthopédagogie, une grande place serait réservée
à la lecture et peu aux mathématiques. Les orthopédagogues ne se sentent pas
bien outillés en mathématiques. La démarche utilisée se limiterait souvent aux
interventions de type essais-erreurs, que nous avons décrites plus tôt.
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172 Enseignement et difficultés d’apprentissage
Discussion
Le but de cette étude était de comprendre les savoirs expérientiels des ortho-
pédagogues au moment de préparer une intervention en mathématiques et dexa-
miner leur transformation au contact dun modèle théorique, et ce, dans le cadre
dune activité de coconstruction. Nous avons donc proposé un cadre de référence
à partir des questions qui accompagnaient les productions d’élèves. Ce cadre
a servi de déclencheur tant pour la réflexion que pour la discussion.
La première rencontre permet de faire émerger, dune part, la tendance à
expliquer les erreurs des élèves en mathématiques par divers facteurs autres que
la compréhension de concepts mathématiques, et, dautre part à intervenir en
faisant refaire la démarche de l’élève an de lamener à prendre conscience de
son erreur. Lutilisation des questions proposées amène ensuite les orthopéda-
gogues à analyser différemment la production de l’élève. Il semble alors que le
savoir dexpérience reconstruit se dote dun nouveau rapport à lerreur. En effet,
le fait de situer lerreur par rapport à un concept mathématique semble leur per-
mettre de disposer dune théorie explicative des erreurs et de pistes pour inter-
venir. Ainsi, cela les incite à voir lerreur non plus comme un mal à prévenir
lors de lenseignement, mais comme loccasion de poursuivre le développement
de la compréhension de concepts mathématiques fondamentaux chez l’élève.
Lanalyse de la deuxième entrevue conrme le changement observé après
le questionnement proposé par la chercheuse. Toutefois, nous notons que, main-
tenant conscientes du rôle crucial de lanalyse conceptuelle, les orthopédago-
gues formulent plusieurs questions an de développer une compréhension assez
profonde des concepts mathématiques de base. La troisième rencontre les amène
à expliquer un raisonnement plausible de l’élève par des arguments non mathé-
matiques, ce qui est nouveau. Elles semblent se buter aux difcultés dune
analyse du champ conceptuel dans lequel sinscrit la soustraction (retrait, com-
plément, comparaison). Ces difcultés les conduisent à adopter une intervention
privilégiant un style interrogatif. Toutefois, lintervention apparaît rapidement; ceci
pourrait nuire au développement dune analyse du concept mathématique.
À partir de la quatrième rencontre, la chercheuse laisse les orthopédagogues
mener la discussion. Même si la réflexion préalable à la discussion fait inter-
venir les quatre questions habituelles, elle laisse la discussion suivre son cours,
sans la diriger par ces quatre questions. La discussion amène les orthopédagogues
à sattarder à la compréhension du raisonnement de l’élève, puis à la planica-
tion de lintervention qui permet à la fois de situer la difculté de l’élève et de
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SEPTIÈME CHAPITRE – Une modélisation des savoirs d’expérience... 173
corriger son erreur. Lanalyse conceptuelle de la situation ne fait plus partie du
cadre de référence des orthopédagogues. De plus, ces dernières ne prévoient pas
d’étape de diagnostic indépendante de lintervention. Les deux se déroulent en
alternance. La cinquième entrevue sert à observer ce même cadre expérientiel.
Lhypothèse avancée par rapport à cette absence danalyse conceptuelle
depuis la troisième entrevue est celle-ci. Devant la difculté de réaliser une
analyse conceptuelle, les contraintes institutionnelles ou encore leur tendance
naturelle, les préoccupations des orthopédagogues les conduisent à se centrer
sur l’élève. Ainsi, elles commencent tout de suite par cerner, sans différencia-
tion, lerreur, la difculté, le raisonnement erroné. Elles interviennent ensuite
pour mieux préciser leur diagnostic. Une caractéristique essentielle de leur in-
tervention à ce moment est lutilisation de matériel ou de situations connues
de l’élève. Elles peuvent reprendre la situation initiale et demander à l’élève
dexpliquer son raisonnement, espérant quil deviendra conscient de son erreur.
Il semble que ce procédé dintervention soit utilisé lorsquil ny a pas dautres
possibilités. Lun des inconvénients de ce type dintervention est quelle génère
chez l’élève un autre type derreur, qui pousse lorthopédagogue à réorienter
son intervention; cette dernière pourrait elle aussi générer chez l’élève un autre
type derreur et ainsi de suite. Un cycle dinterventions successives apparaît.
Enn, il semble que le projet ait permis aux orthopédagogues de modier
leur cadre dintervention préliminaire. Bien quelles naient pas intégré dèle-
ment le cadre de référence de la chercheuse, celui-ci a joué un rôle important
dans ce changement. Il leur a dabord permis de développer une prise de con-
science des éléments de leur cadre de référence préliminaire pour coconstruire
un cadre de référence plus complexe et plus efcace dans leur pratique. Étu-
dions le cadre de référence préliminaire et celui qui a été coconstruit, de même
que l’écart entre le cadre de référence coconstruit et celui de la chercheuse.
Dans le cadre de référence préliminaire, lerreur et lintervention sont pre-
mières, l’élève est second; dans cadre de référence coconstruit, l’élève est au
centre des préoccupations. Sa compréhension est privilégiée et lerreur sert seu-
lement dindice à cette compréhension. Dans le cadre de référence préliminaire,
lorthopédagogue est au centre de lintervention: elle explique ce quelle juge
nécessaire pour remédier à lerreur de l’élève. Dans le cadre de référence cocon-
struit, l’élève se trouve au centre de lintervention. Ses actions et ses réponses
peuvent amener lorthopédagogue à changer lobjet et lorientation de linter-
vention. Toutefois, les orthopédagogues restent au plan descriptif plutôt quau
plan conceptuel; ceci expliquerait l’émergence dune intervention de type essais-
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174 Enseignement et difficultés d’apprentissage
erreurs. Contrairement au cadre dintervention préliminaire, le cadre de référence
coconstruit permet aux orthopédagogues de se mettre à la place de l’élève. Celles-
ci avouent dailleurs, lors de la sixième entrevue, quelles se sentent maintenant
plus outillées et que leurs interventions sont plus efcaces. La compréhension
du raisonnement de l’élève et une vision différente de lerreur seraient donc des
éléments essentiels dun passage vers une intervention satisfaisante pour elles.
L’écart existant entre le cadre de référence coconstruit avec les orthopéda-
gogues et le cadre de référence de la chercheuse existe toujours. Cet écart peut
sexpliquer par les difcultés éprouvées à réaliser une analyse conceptuelle, par
les contraintes institutionnelles ou encore par leur façon de définir leur rôle.
L’étude que nous avons réalisée auprès de futurs maîtres du primaire montre
que cest surtout par une réflexion sur les raisonnements plausibles des élèves
que les futurs maîtres ont semblé substituer la position d’étudiant universitaire
à celle dancien élève, substitution qui semble les conduire à réaliser une analyse
conceptuelle (DeBlois et Squalli, SOUMIS). En effet, en établissant une rela-
tion entre la production de l’élève et lobjet dapprentissage de la situation, lanalyse
du futur maître pourrait permettre de considérer lerreur comme composante
de lapprentissage dun concept mathématique plutôt que comme difcultépour
l’élève. En plaçant l’élève au centre de leur intervention, les orthopédagogues
reprendraient la posture épistémologique de lancien élève, posture qui mène-
rait à des interventions de type essais-erreurs. Compte tenu des retombées dune
centration sur l’élève, il devient essentiel de proposer une formation qui invite
les futurs orthopédagogues à complexier leur expérience danciens élèves.
Conclusion
Le cadre expérientiel développé par les orthopédagogues rencontrées délaisse
lanalyse conceptuelle pour explorer dautres avenues. Elles ne semblent pas
toutefois voir ces voies comme des hypothèses quelles peuvent mettre à l’épreuve.
Une analyse conceptuelle dans laquelle lerreur devient une composante de l’éla-
boration dune compréhension semble indispensable pour la conduite de lin-
tervention orthopédagogique en mathématiques. Cette analyse contribue à cerner
le champ dinvestigation et à cibler les notions ou les composantes dune notion
qui pourrait éventuellement poser problème chez l’élève. Elle permet d’éviter
des glissements qui pourraient être induits par des éléments périphériques de
la production de l’élève comme un problème de langage, de mémorisation, etc.
Au lieu de suggérer des modalités dinterventions spéciques ou heuris-
tiques, nous nous proposons d’étudier les retombées dune formation à linter-
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SEPTIÈME CHAPITRE – Une modélisation des savoirs d’expérience... 175
vention en adaptation scolaire qui amène les intervenants et les intervenantes à
interpréter les productions des élèves au moment où ils sont en activité mathé-
matiques. En effet, en labsence dune dinterprétation qui permet dintégrer les
concepts mathématiques, comme nous lavons vu, les interventions, qui cher-
chent trop exclusivement à comprendre le raisonnement de l’élève, susciteront
l’émergence de difcultés nouvelles nécessitant dautres interventions. Il serait
possible de tenir compte tant des tendances naturelles des orthopédagogues que
des contraintes institutionnelles dans lesquelles elles exercent leur travail.
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... Maybe, the management of their practice is so stable that in order to change it has to be revealed by somebody else, for example, by mutual observation, and explicitly discussed to be questioned (see also Nickerson, this volume). DeBlois and Squalli (2001) leads to the study of how discussions among teachers may help them transform their understanding of their students and develop their practice. ...
... These inconsistencies may thus be seen as situations in which the teachers' priorities are dominated by other motives, maybe not immediately related to school mathematics, for example, developing students ' self-confidence. Vincent (2001) and DeBlois and Squalli (2001) talked about preoccupations about the space and the time of learning. Moreover, Lerman (2001) criticises past research on beliefs and comparison with practice, including his own, because it does not take sufficiently contexts into account: for exa mple, the interview context is different from class context. ...
Chapter
This chapter focuses on the professional growth of practising teachers. In the first part, two examples illustrating major trends of current research allow to launch the discussion. We then present our methodology and the main results from our review of literature. Finally, we conclude on three main issues and perspectives: 1) the change of paradigm proposed in practising teacher education poses new teaching problems, thus it seems important to study teaching in its context; 2) when teachers have to change because of an external constraint, some changes may occur, but they are not always the “wanted” ones; we need better understanding of deep components of practice; perhaps the study of the stabilization of practice during the first years of career may help progress; 3) it seems important to construct concepts or systems capable of taking into consideration the variety of teachers’ work (from planning to classroom interactions).
... En effet, cette interprétation nécessite, d'une part, d'analyser les concepts mathématiques à partir d'un cadre théorique et, d'autre part, de se placer dans la position de l'élève. Les savoirs d'expériences développées ne permettent pas toujours de structurer un cadre de référence à partir duquel il est possible d'intervenir avec une certaine assurance (DeBlois et Squalli (2001)). Le fait d'identifier à la fois le concept en jeu dans la situation et un raisonnement plausible à l'origine de l'erreur, favorise une nouvelle conception de l'erreur et de l'intervention. ...
... C'est pour cette raison que ce modèle est appelé «modèle d'interprétation des activités cognitives des élèves ». En outre, ce modèle se situe à l'intérieur des préoccupations identifiées chez les orthopédagogues (DeBlois et Squalli (2001)). ...
Article
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The goal of this project was to find a model that facilitated the interpretation of students’ cognitive activity in the learning process. The following hypothesis was made : the identification of components that stimulate nowledge reorganization in students will allow the adaptation of orthopedagogical interventions in order to prevent the appearance of persistent difficulties in mathematics. Three special education teachers participated in an experiment, which took place between November and June of the same school year. The analysis of the data reveals the implications of such an experiment, the problems the special education teachers encountered and the steps taken to appropriate the model studied. Finally, this analysis shows the importance of proposing a flexible model that teachers can modify.
... Nous avons aussi constaté que les orthopédagogues disposent de modèles d'intervention personnels, modèles qui s'appuient sur une variété de préoccupations : la formalisation, le vocabulaire de l'élève, sa procédure ou encore ses résultats scolaires (DeBlois et Squalli, 2001). Dans ce contexte, DeBlois, Giroux et Barrera (2018) ont posé l'hypothèse selon laquelle certaines préoccupations à l'égard de la formalisation et des résultats scolaires des élèves pourraient contribuer à privilégier une intervention qui fragmente la tâche alors que d'autres, à l'égard du développement logico-mathématique de leurs élèves par exemple, pourraient les conduire à jouer davantage avec les variables didactiques de la tâche. ...
Chapter
Pour répondre à la question des choix didactiques, j’ai choisi de revoir les résultats des recherches que j’ai menées depuis les 20 dernières années avec les élèves en difficultés d’apprentissage et avec les enseignants qui sont confrontés aux erreurs de leurs élèves plutôt que de présenter les résultats d’une seule recherche. C’est ainsi que cet article est structuré autour de quatre enjeux fondamentaux : la planification comme activité d’anticipation, l’organisation des interactions de la classe et l’évaluation comme activités de régulation, la collaboration entre les partenaires comme activité de concertation et la formation à l’enseignement des mathématiques, comme activité de développement professionnel mais aussi social.
... 4.1, teachers' beliefs about learning mathematics are also of great importance. DeBlois and Squalli (2001) identified five categories of concerns among professionals working with students with mathematical learning difficulties: errors, students' reasoning procedures, mathematical terminology, the student as person, and the formalization of mathematical knowledge. These authors noted that focusing on errors or students' procedures most often resulted in supplying an explanation or delivering an explicit instruction that lent itself poorly to further adaptation in keeping with didactical (i.e., classroom) factors. ...
Chapter
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When looking at teaching and learning processes in mathematics education students with mathematical learning difficulties or disabilities are of great interest. To approach the question of how research can support practice, an important step is to clarify the group or groups of students that we are talking about. The following contribution firstly concentrates on the problem of labelling the group of students having mathematical difficulties as there does not exist a single definition. This problem might be put down to the different roots of mathematics education on the one hand and special education on the other hand. Research results with respect to concepts and models for instruction are multifaceted and related to specific content and mathematical topics as well as underlying views of mathematics. Taking into account inclusive education, a closer orientation to mathematical education can be identified and the potential of selected teaching and learning concepts can be illustrated. Beyond this, the role of the teacher and the corresponding teacher education programs are discussed.
... 4.1, teachers' beliefs about learning mathematics are also of great importance. DeBlois and Squalli (2001) identified five categories of concerns among professionals working with students with mathematical learning difficulties: errors, students' reasoning procedures, mathematical terminology, the student as person, and the formalization of mathematical knowledge. These authors noted that focusing on errors or students' procedures most often resulted in supplying an explanation or delivering an explicit instruction that lent itself poorly to further adaptation in keeping with didactical (i.e., classroom) factors. ...
Article
When looking at teaching and learning processes in mathematics education students with mathematical learning difficulties or disabilities are of great interest. To approach the question of how research can support practice to assist these students one has to clarify the group or groups of students that we are talking about. The following contribution firstly concentrates on the problem of labelling the group of students having mathematical difficulties as there does not exist a single definition. This problem might be put down to the different roots of mathematics education on the one hand and special education on the other hand. Research results with respect to concepts and models for instruction are multifaceted based on the specific content and mathematical topics as well as the underlying view of mathematics. Taking into account inclusive education, a closer orientation to mathematical education can be identified and the potential of selected teaching and learning concepts can be illustrated. Beyond this, the role of the teacher, their attitudes and beliefs and the corresponding teacher education programs are discussed.
... d'aider l'élève à y remédier; mais l'intervention remédiative provoque d'autres erreurs chez l'élève obligeant une nouvelle intervention remédiative (DeBlois et Squalli, 2002). ...
... d'aider l'élève à y remédier; mais l'intervention remédiative provoque d'autres erreurs chez l'élève obligeant une nouvelle intervention remédiative (DeBlois et Squalli, 2002). ...
... Data analysis compared the partners' referents, which revealed the influence of interpretation on the interventions. The first study involved four special-education teachers participating in six seminars over the course of one year (DeBlois & Squalli, 2002). During these seminars, the discussions of special education teachers oscillated between mathematical concepts and the procedural aspects of a mathematical concept (e.g., writing number and number) and between judgment of the pupil and evaluation of the pupil's production. ...
Chapter
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Teacher education and the professional development of practicing teachers need to provide a sound basis of knowledge for teaching, theoretically but also with strong ties to issues of practice. Although this seems like a common-sense statement, it is harder to make a reality than expected. At least three factors could account for this difficulty: the sheer complexity of the knowledge required for teaching, the interconnectedness of knowledge, and the fact that teachers’ knowledge comes from different and in certain cases even contradictory sources.
... Uneétude réalisée avec des orthopédagogues a révélé l'importance de considérer leurs préoccupations au moment d'étudier les erreurs dans les productions de leursélèves (DeBlois et Squalli, 2001). Afin d' analyser les interprétationsénoncées par les enseignants, il semble important d'identifier les préoccupations qui contribuerontà les cerner. ...
Article
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In this Article, we examine primary teachers’interpretation of their pupils’ productions in mathematics. We study the changes in teachers’ interpretation as they were taking place during discussions on pupils’ productions and the influence of the interpretation on the teachers’ choice of intervention in class. Six seminars, betwen one researcher and 21 teachers from the same school, revealed the elements that contributed to the interpretative process. These elements allowed to describe five “milieux” to which teachers are sensitive as they interpret pupils productions. The results bring a better understanding of the origins of teachers’ attribution of causes to pupils mistakes and of their preferred interventions with pupils who experience learning difficulties. The results suggest how changes in interpretation transform interventions and what conditions are necessary to initiate these changes.
Article
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Le but du projet exposé visait à dégager un modèle qui facilite l’interprétation des activités cognitives des élèves durant un processus d’apprentissage. L’hypothèse suivante a été posée : l’identification des composantes, qui suscitent une réorganisation des connaissances chez les élèves, permettra d’adapter les interventions orthopédagogiques de manière à prévenir une fixation de difficultés persistantes en mathématiques. Trois orthopédagogues ont participé à une expérimentation qui s’est déroulée entre les mois de novembre et de juin d’une même année scolaire. L’analyse des données révèle les implications d’une telle expérimentation, les difficultés rencontrées par les orthopédagogues et les pas d’appropriation du modèle à l’étude. Cette analyse révèle enfin l’importance de proposer un modèle souple qui puisse être modifié par les orthopédagogues.
Chapter
Research investigators and clinicians working with children with learning disabilities (LD) have identified a broad range of intriguing and difficult problems. Pursuit of these problems has led to an extensive and ever increasing volume of literature and has spawned a variety of intervention approaches. It might be argued that the most difficult problem facing the researcher of learning disabilities is to decide what should be studied and who should be included in the study sample. That is, what constitutes the field and what constitutes the condition?
Article
In this article we consider issues relevant to the future of mathematics instruction and achievement for students with learning disabilities. The starting point for envisioning the future is the changing standards for mathematics learning and basic mathematical literacy. We argue that the shift from behaviorist learning theories to constructivist and social constructivist theories (see Rivera, this series) provides an opportunity to develop and implement a hybrid model of mathematics instruction. The hybrid model we propose embeds, or situates, important skill learning in meaningful contexts. We discuss some examples of instructional approaches to complex mathematical problem solving that make use of meaningful contexts. Evaluation data on these approaches have yielded positive and encouraging results for students with learning disabilities as well as general education students. Finally, we discuss various ways in which technology is important for realizing hybrid instructional models in mathematics.
Article
Children with moderate learning difficulties (MLD) were pretested for conservation of number, length, weight and volume. Nonconservers of length were identified and assigned to an experimental (E) group or to a control (C) group. Each MLD(E) child was matched for age with a child without learning difficulties (0). During a teaching phase involving length conservation tasks, in which the materials were socially marked, the 0 child challenged the MLD(E) child's nonconserving responses, thus generating sociocognitive conflict. The MLD(C) children worked in isolation at solving the same length conservation problems, but experienced neither social marking nor sociocognitive conflict. Posttests revealed that the MLD(E) children made significantly more progress in their understanding than did the MLD(C) children. After having tutored another child on conservation of length, several of the 0 children mastered the volume conservation tasks. These findings have important educational implications.
Article
This book provides information about general approaches to learning and teaching, offering descriptions of methods and procedures and focusing on classroom and behavior management, consultation, and working with parents and professionals. The 12 chapters include: (1) "The Teaching-Learning Process" (e.g., characteristics of students with learning and behavior problems); (2) "Approaches to Learning and Teaching" (e.g., cognitive strategy instruction); (3) "Oral Language" (e.g., content of language instruction); (4) "Reading: Phonological Awareness, Alphabetic Principle, and Word Recognition" (e.g., reading and reading instruction); (5) "Reading: Fluency and Comprehension"; (6) "Written Expression" (e.g., teaching the writing process); (7) "Content Area Learning and Study Skills" (e.g., making adaptations); (8) "Mathematics" (e.g., factors influencing mathematics ability); (9) "Socialization and Classroom Management" (e.g., intervention strategies); (10) "Transition Planning and Life Skills/Transition Education" (e.g., fundamental issues related to transition); (11) "Coordinating Instruction, Collaborating, and Coteaching" (e.g., challenges to successful inclusion and coteaching); and (12) "Communicating with Parents and Professionals" (e.g., communication skills). An appendix presents educational materials and software publishers. (Contains approximately 1,400 references.) (SM)
Article
This article describes and offers examples of acronym mnemonics in mathematics and gives suggestions for their use with students who have learning disabilities. The approach addresses learning the basic facts and solving word problems. Instructional procedures for teaching mnemonics are noted. (DB)
Article
Several studies have shown that pre-service teachers enter their pre-service training with already formed conceptions pertaining to teaching and learning. Pre-service teachers are considered as epistemologically complex beings with varying postures they adopt according to differing contexts. This article looks at the meanings pre-service teachers attribute to pupil errors and how these meanings evolved over the course of a 15 week course in mathematics education. Pre-service teachers were interviewed at two intervals during their first semester: at mid session and at the end. First, we identified the various kinds of analyses they brought to bear upon pupil errors as well as the interventions they suggested to rectify these errors. Then, we conducted a statistical analysis of the changes in the type of interventions suggested. Four trend indicators were created to help understand these changes. When analysing pupil's errors, pre-service teachers identified specific conceptual elements without situating them within a global context. This led to piecemeal interventions about how pupils ought to correct their errors. In conclusion, pre-service teachers' appear to base their analyses of pupils's errors upon an epistemological positioning ween title ‘former-pupil stance‘. This stance seems to create a resistance to changing their conceptions regarding the teaching and learning of mathematics.
Article
No de commande UMI00354733 de University Microfilms. Thèse (M.A.)--Université Laval, 1992. Comprend des réf. bibliogr.