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Utilisation d'une Table Interactive avec objets Tangibles pour apprendre à l'école : études empiriques en milieu écologique

Authors:
  • ENIB / Lab-STICC UMR 6285
  • University Bourgogne-Franche-Comté

Abstract and Figures

Nous décrivons dans cet article, les résultats de trois années d’études sur l’utilisation d’une Table Interactive avec objets Tangibles (TIT) pour le développement des capacités de raisonnement spatial d’élèves de Cours Préparatoire (CP). Pour cela nous avons, avec l’aide d’enseignants et d’une conseillère pédagogique, conçu et développé le Jeu des Tours pour la table interactive TangiSense 2. Nous avons ensuite mené des expérimentations en milieu écologique avec 68 élèves. Dans le cadre d’une première étude, nous avons comparé les résultats d’apprentissage de deux groupes d’élèves (Gr. Traditionnel vs. Gr. TIT). Les résultats de cette étude nous ont encouragé à en réaliser une seconde. Dans cette dernière, nous avons analysé la participation des élèves (physique et verbale) et la manière dont ils construisaient leurs connaissances en groupe lorsqu’ils jouaient au Jeu des Tours sur la TIT. Les résultats ont montré que les élèves amélioraient leurs performances en jouant sur la TIT et, collaboraient à travers l’externalisation et la recherche d’un consensus orienté par le conflit.
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Utilisation d’une Table Interactive avec objets Tangibles
pour apprendre à l’école : études empiriques en milieu
écologique
Sébastien Kubicki
ENIB, Lab-STICC
UMR 6285,
F-29200 Brest
kubicki@enib.fr
Denis Pasco
UEB Brest,
CRÉAD EA 3875,
F-29200 Brest
denis.pasco@univ-
brest.fr
Charlotte Hoareau
UBO, Lab-STICC
UMR 6285,
F-29200 Brest
charlotte.hoareau@univ
-brest.fr
Ingrid Arnaud
Education Nationale,
Circo. Brest-Nord,
F-29200 Brest
ingrid.arnaud@ac-
rennes.fr
RÉSUME
Nous décrivons dans cet article, les résultats de trois
années d’études sur l’utilisation d’une Table Interactive
avec objets Tangibles (TIT) pour le développement des
capacités de raisonnement spatial d’élèves de Cours
Préparatoire (CP). Pour cela nous avons, avec l’aide
d’enseignants et d’une conseillère pédagogique, conçu et
développé le Jeu des Tours pour la table interactive
TangiSense 2. Nous avons ensuite mené des
expérimentations en milieu écologique avec 68 élèves.
Dans le cadre d’une première étude, nous avons comparé
les résultats d’apprentissage de deux groupes d’élèves
(Gr. Traditionnel vs. Gr. TIT). Les résultats de cette étude
nous ont encouragé à en réaliser une seconde. Dans cette
dernière, nous avons analysé la participation des élèves
(physique et verbale) et la manière dont ils construisaient
leurs connaissances en groupe lorsqu’ils jouaient au Jeu
des Tours sur la TIT. Les résultats ont montré que les
élèves amélioraient leurs performances en jouant sur la
TIT et, collaboraient à travers l’externalisation et la
recherche d’un consensus orienté par le conflit.
Mots Clés
Enfants ; Education ; Etude empirique ; Table
interactive ; Interaction tangible ; Apprentissage ; Ecole.
ABSTRACT
We describe in this article the results of three-years study
of using a Tangible Tabletop Interface (TTI) for the
development of student learning in spatial reasoning
abilities. In partnership with the French Department of
Education and teachers, we have designed and built a
serious game in mathematics, called The Game of Towers
for the TangiSense 2 interactive tabletop. Then, we
conducted « in the wild » experiments with 68 students.
As part of a first study, we compared the learning
outcomes of two groups of students (Gr. Traditional vs.
Gr. TTI). The results of this study have encouraged us to
make a second experiment. In the latter, we analyzed
child participation (physical and verbal) and the social
modes of knowledge co-construction when they played
the game on the TTI. The results showed that students
improved their performance by playing the game on the
TTI and collaborated through externalization and
conflict-oriented consensus.
Author Keywords
Children; Education; Empirical Study; Tangible
Interactive Tabletop; Tangible Interaction; Learning.
ACM Classification Keywords
H.5.2. Information interfaces and presentation:
Evaluation / methodology.
INTRODUCTION
L’enseignement et l'apprentissage bénéficient aujourd’hui
des avancées technologiques. Dans les écoles, il est
maintenant possible de rencontrer des plates-formes
d'interaction comme les tableaux blancs interactifs ou les
tablettes [13, 20, 31]. Ces technologies permettent aux
professeurs de développer de nouvelles façons
d’enseigner et aux élèves de nouvelles façons
d’apprendre. Par ailleurs, des recherches en Interaction
Homme-Machine (IHM) se focalisent sur de nouvelles
plates-formes pouvant servir comme un outil
pédagogique : les tables interactives (voir Figure 1).
Figure 1. Trois élèves de CP utilisant une table interactive
avec objets tangibles en classe
Les tables interactives sont très différentes des
technologies utilisées actuellement dans les écoles. En
effet, une table interactive renvoie à un espace de travail
collaboratif et co-localisé permettant de faire intervenir
plusieurs utilisateurs en même temps. Actuellement, il
existe plusieurs types de table interactive. Par exemple les
tables tactiles (ou multitouch), pour lesquelles la surface
tactile permet de détecter la position des doigts et ainsi
agir au minimum comme un pointeur de souris avec
l’ensemble des actions offertes par celle-ci (ex. le clic, le
maintien de clic, le double clic, etc.). Ou encore les
Tables Interactives avec objets Tangibles (TIT), pour
lesquelles les interactions sont rendues possibles en
utilisant uniquement un (ou des) objet(s) tangible(s)
posé(s) sur la table. Les actions étant alors liées à la
position de ceux-ci. Notons que certaines tables
interactives permettent de coupler ces deux types
d’interactions (tactiles et tangibles) offrant ainsi plus de
possibilités aux utilisateurs.
Les tables interactives permettent donc d'afficher des
objets virtuels manipulables par interactions tactiles ou de
détecter la présence d'objets tangibles sur leur surface
afin de coupler l’environnement numérique aux objets du
monde réel. De par les caractéristiques techniques et les
interactions que les tables interactives proposent, des
chercheurs ont suggéré qu’elles pouvaient favoriser le
processus d’enseignement et d’apprentissage à l’école [5,
21, 22, 30].
Cependant, ces recherches ont principalement été menées
sur des tables interactives tactiles. Peu de recherches ont
été conduites sur TIT. De plus, les auteurs s'accordent à
dire que ce domaine de recherche reste jeune et que nous
manquons de preuves empiriques pour conclure sur
l'efficacité des tables interactives à promouvoir
l'apprentissage en classe [3, 15].
Afin de répondre à ce manque d’études empiriques, nous
avons centré nos recherches sur l'évaluation de
l’utilisation d’une TIT dans le milieu écologique de la
classe en émettant l'hypothèse que cette technologie
pourrait favoriser l'apprentissage.
Après une revue de la littérature présentant les interfaces
et interactions tangibles, puis un recentrage sur les tables
interactives avec objets tangibles pour l’apprentissage,
nous présentons le contexte dans lequel se sont inscrites
deux expérimentations menées en classes. Nous
poursuivons cet article par la présentation de ces deux
études, puis de leurs résultats. Nous terminons par une
discussion et une présentation des limites de nos études.
ETAT DE L’ART
Interagir avec une interface tangible (TUI, Tangible User
Interface en anglais) est très différent de l'interaction avec
une interface graphique (GUI, Graphical User Interface
en anglais) [43]. De nombreuses études ont démontré les
bénéfices des TUI, comme par exemple vivre une
expérience plus naturelle, intuitive et/ou conviviale [9,
17]. Les TUI offrent également (1) une opportunité de
manipulation directe qui peut être qualifiée d’optimale
avec l'interface [37] et, (2) une opportunité de manipuler
des d'objets, une caractéristique d'une importance
particulière pour l'apprentissage chez les jeunes enfants
[1]. En effet, les valeurs éducatives de la manipulation
d’objets ont été promues par Maria Montessori : « les
enfants construisent leur image mentale du monde à
travers des actions et des réponses sensorimotrices et,
grâce à la manipulation physique, ils deviennent
conscients de la réalité [4] ».
Dans cette section, nous introduisons premièrement et de
manière générale les interfaces tangibles (TUI). Dans un
deuxième temps, nous présentons le potentiel des TIT.
Enfin nous exposons les recherches utilisant les TIT pour
l'apprentissage.
Interagir avec des objets tangibles
Les chercheurs en IHM ont défini les TUI comme étant
un type d'interface qui exploite la représentation physique
pour connecter le monde réel au monde numérique. Selon
Ishii et Ullmer [17], les TUI « augmentent le monde
physique réel en couplant des informations numériques
aux objets physiques et aux environnements de tous les
jours ». Ainsi, l'interaction ne s'effectue plus uniquement
à travers l’utilisation, par exemple, d’une souris sur des
objets virtuels affichés sur un écran, mais directement
avec des objets réels via l'interface (tangible). De plus,
« l'information numérique devient palpable et directement
perceptible à travers nos sens périphériques » [18],
provoquant la sensation d’être connecté au monde réel.
Les TUI peuvent être considérées comme un nouveau
paradigme sans artefact de communication pouvant
interrompre les processus sensorimoteurs de l'utilisateur.
Dans une TUI les objets peuvent avoir un statut
ambivalent. Ils peuvent faire partie de l'application mais
peuvent également eux-mêmes devenir un dispositif
d'interaction (un interacteur) agissant sur l’interface [26].
Une TUI s’inscrit dans un espace réel ce qui nécessite
plus d'attention de l'utilisateur (vs. GUI). Par exemple, les
interfaces tangibles peuvent nécessiter différentes
postures du corps et de la motricité fine [2]. Enfin,
l’avantage de l’affordance naturelle des objets tangibles
et/ou de l’interaction avec les deux mains a également été
mis en avant [10, 11]. La capacité d'interagir librement
avec des objets en les touchant ou en les déplaçant
constitue donc le cœur de cette forme d'interaction.
Interagir sur des tables interactives… avec des objets
tangibles
Les tables interactives offrent de nombreux avantages.
Tout d’abord, elles proposent un large espace de travail
permettant à l’utilisateur à la fois d’agir, de parler et/ou
d’observer ce que les autres utilisateurs sont en train de
faire [27]. Ensuite, les utilisateurs peuvent être
positionnés autour de la table, ce rapprochement spatial
offre l’opportunité d’améliorer significativement la
communication [35], ainsi que la collaboration entre les
utilisateurs [11]. De plus, l’interaction avec les deux
des objets tangibles sur une table interactive s'effectue en
trois dimensions sur une surface horizontale. Les objets
tangibles peuvent être utilisés par tout le monde, y
compris les enfants, les personnes âgées ou les personnes
présentant des handicaps (ex. quand le toucher est
l'unique moyen d'interagir avec le monde) [8]. En
conséquence, ce type d’interface et d’interaction présente
un grand potentiel à être utilisé en école pour promouvoir
l’apprentissage.
Les tables interactives avec objets tangibles pour
l’apprentissage
Comme présenté dans les sections précédentes, le
potentiel des TUI pour encourager l’apprentissage est
principalement lié à la manipulation physique des objets.
Par ailleurs, la littérature scientifique en informatique,
psychologie et sciences de l'éducation confirme cette
vision. Il a été démontré que les diverses formes
d'interactions physiques pouvaient améliorer la mémoire,
la performance et l'apprentissage [6, 16]. Il y a donc
clairement des avantages théoriques quant à l’utilisation
des TIT pour l’apprentissage. Des recherches actuelles
visent à démontrer les avantages pratiques de l’utilisation
de ces tables.
Par exemple, l'application « read-it » développée par
Sluis et al. [38] montre que le couple table interactive et
objets tangibles peut être une manière enrichissante
d’enseigner la lecture aux enfants de 7 à 9 ans, en
proposant sur la table un espace dédié pour chaque enfant
et un espace commun au centre. Marco, Cerezo and
Baldassarri [28] ont utilisé leur prototype de table
NIKVision avec objets tangibles pour créer un jeu
d'élevage d’animaux pour les enfants de 3 à 6 ans. Les
auteurs ont conclu que la combinaison d'une TIT et
d'animations 3D sur un écran déporté semblait pertinente
pour une utilisation avec de jeunes enfants. Do-Lenh et
ses collègues [7] ont présenté les résultats d’une étude
empirique en classe explorant l’usage d’une TIT sur
l’apprentissage et la performance d’élèves dans le cadre
d’une tâche collaborative. Les premiers résultats ont
montré que la table interactive améliorait la performance
mais qu’elle n’avait pas d’incidence sur l’apprentissage.
Plus récemment, Shaer et al. [34, 35], ont développé
l’application « G-Nome Surfer » pour une table
interactive multitouch et tangible. Cette application ayant
pour objectif d’aider des étudiants à comprendre la
génomique où une grande partie d’informations abstraites
doit être présentée. Leur étude a montré les bénéfices des
tables interactives avec objets tangibles dans le processus
d'apprentissage, comparées à une GUI traditionnelle. Au
même titre, Xie, Antle et Motamedi [42] ont montré que
des enfants âgés de 7 à 9 ans déclarent avoir plus de
plaisir à travailler avec une TIT comparé à une GUI
traditionnelle. Plus tard, Shaer et al. [36] ont proposé un
processus de conception participatif pour améliorer
l'enseignement des sciences au collège. Pour cela, ils ont
proposé « SynFlo », une application interactive illustrant
les concepts de base de la biologie synthétique pour des
non-scientifiques, sur une table interactive Microsoft
PixelSense avec des objets tangibles. Cuendet et al. [5]
ont repris les travaux de Do-Lenh et al. [7] et ont proposé
trois environnements d'apprentissage basés sur l’usage de
tables interactives avec objets tangibles en situation réelle
en classe. Ces environnements d'apprentissage ont été co-
conçus avec des enseignants. Les auteurs présentent dans
leur article les caractéristiques qui ont émergé des cycles
de co-conception et fournissent un ensemble de
recommandations pour la conception de tels
environnements d’apprentissage. Plus récemment,
Anastasiou, Maquil, and Ras [2] ont utilisé une TIT dans
des contextes de résolution de problèmes collaboratifs.
Les participants devaient découvrir en quoi des
paramètres externes (représentés par des objets tangibles
sur une table interactive) pouvaient affecter la production
d'électricité d'une éolienne. Les résultats ont indiqué que
78,5% des gestes des participants étaient en relation avec
leur discours et 85,4% étaient en relation avec la table
interactive (c’est-à-dire des manipulations d’objets
impliquant le placement, le traçage, la rotation et le
déplacement d’objets). Ces gestes ont créé une
compréhension commune et partagée (travail collaboratif)
de la simulation d’un environnement complexe.
L'ensemble de ces recherches renforce l'idée que les
tables interactives avec objets tangibles pourraient être un
outil favorable pour l'apprentissage. Cependant, si les
bénéfices de l’utilisation des tables interactives avec
objets tangibles pour l'apprentissage sont théoriquement
bien établis dans la littérature scientifique [6, 33, 39, 44],
nous manquons encore de preuves empiriques [3, 15, 29].
Nos études menées en classe visent à contribuer à ce
manque de preuves empiriques. Leur objectif commun est
d’évaluer l'impact d'une TIT sur l'apprentissage des
capacités de raisonnement spatial d’élèves en milieu
écologique.
CONTEXTE DE NOS ETUDES
Ces recherches, en partenariat avec l'Education Nationale,
l’Inspection Académique du Finistère et plus
particulièrement la circonscription de Brest-Nord, ont
débuté en 2013. Ils poursuivent les travaux menés
précédemment par Kubicki et al. [23, 25]. Ces travaux
reposent sur un jeu de mathématiques appelé le « Jeu des
Tours » utilisé dans les salles de classe sous forme
traditionnelle (papier) par les enseignants des écoles
élémentaires. En partenariat avec des enseignants et d’une
conseillère pédagogique, nous avons conçu et développé
une version du jeu adapté à la table interactive
TangiSense 2 [25].
La table interactive TangiSense
La table TangiSense (conçue et développée par la société
RFIdées) est une table interactive ayant la particularité de
proposer uniquement des interactions tangibles. Dans sa
nouvelle version, TangiSense 2 (lire [24] pour les
caractéristiques de la TangiSense 1) est composée de 24
« dalles » contenant chacune 16 antennes RFID (4 x 4) de
3,75 cm de côté sur une surface de 90cm x 60cm. Les
dalles sont associées entre elles par une interface de
contrôle reliée à l’ordinateur hôte par un bus Ethernet.
Présentation générale du Jeu des Tours
Le Jeu des Tours a été créé par Dominique Valentin [40],
un professeur de mathématiques de l'actuelle école
supérieure du professorat et de l'éducation. Ce jeu est une
activité traditionnellement utilisée par des professeurs des
écoles afin d’appréhender le raisonnement spatial dès le
plus jeune âge. Pour cela, les enfants jouent au jeu en
plaçant des tours de différentes hauteurs sur une grille
entourée de chiffres. Nous proposons de présenter plus en
détails le jeu et ses règles plus loin dans cette section.
Figure 2. Le Jeu des Tours développé pour TangiSense
Objectifs pédagogiques du Jeu des Tours
Plusieurs objectifs pédagogiques sont visés par cette
activité. Premièrement, faire apprendre aux enfants que
lorsque deux objets possèdent la même forme mais des
hauteurs différentes, l’un peut masquer l’autre.
Deuxièmement, utiliser des informations numériques
dans un cadre spatial pour résoudre un problème
mathématique. Ainsi, selon le nombre d’objets (ex. trois
objets de même forme mais de tailles différentes ; tailles
1, 2, 3), les enfants doivent comprendre que le plus grand
des objets (taille 3) peut cacher les deux autres, mais
également que l’objet intermédiaire (taille 2) peut cacher
l’objet le plus petit (taille 1) mais pas le plus grand (taille
3), etc. Troisièmement, faire prendre en compte plusieurs
contraintes par les enfants afin de remplir correctement
une grille (cf. règles du jeu). Ces objectifs pédagogiques
visent le développement des capacités de raisonnement
spatial des élèves mais aussi la résolution de problèmes
(voir Figure 2).
Règles du jeu
Nous détaillerons dans cette section les règles pour le
format de jeu utilisé par les enfants lors de nos
expérimentations (lire [23] pour les règles complètes du
jeu).
Dans ce jeu, les enfants doivent positionner des tours sur
une grille. Une tour peut avoir une hauteur comprise entre
1 et 3 (prenons l’unité cube pour définir la hauteur). Dans
cette version du jeu, les enfants manipuleront neuf tours :
trois tours de couleur bleue d’une hauteur de 1 cube, trois
de couleur jaune d’une hauteur de 2 cubes et trois de
couleur rouge d’une hauteur de 3 cubes. Le plateau de jeu
est une grille de 3 x 3 cases ; chaque côté du plateau de
jeu peut être associé à un point cardinal : Nord, Sud, Est
et Ouest. Les contraintes indiquant la façon dont les tours
doivent être positionnées sont exprimées par des chiffres
indiqués au début et à la fin de chaque ligne et de chaque
colonne tout autour de la grille. Les chiffres pourront être
1, 2 ou 3. Chaque chiffre correspond au nombre de tours
qu’il faut apercevoir sur chaque colonne (ou ligne) d’un
côté de la grille. Les enfants doivent donc placer
l’ensemble des tours (qu’ils choisissent parmi les neuf
tours disponibles) de manière à respecter les contraintes
numériques indiquées aux extrémités des lignes et des
colonnes. La Figure 3 montre un exemple de plateau de
jeu.
Figure 3. Exemple de plateau de jeu
Une solution pour la colonne de gauche de la Figure 3
serait de placer les tours de hauteur 3, puis 2, puis 1 en
partant du Nord vers le Sud. Ainsi selon un point de vue
Nord, un enfant verra seulement la tour la plus haute
(taille 3), mais un autre enfant positionné selon un point
de vue Sud verra les trois tours (de la plus petite à la plus
haute). De cette manière, les contraintes de chaque
extrémité de la colonne sont satisfaites. Pour compléter la
grille, les enfants doivent satisfaire l'ensemble des
contraintes de chaque ligne et de chaque colonne de la
grille. Les neuf tours devront donc être placées sur la
grille.
Le jeu possède deux règles concernant le positionnement
de deux tours de hauteur identique. La première règle
autorise les élèves à positionner deux tours de la même
hauteur sur la même ligne ou la même colonne (plus
facile), la seconde interdit le positionnement de deux
tours de la même hauteur sur la même ligne ou sur la
même colonne (plus difficile). Une grille peut ainsi avoir
plusieurs solutions.
C'est l'enseignant qui décidera de la règle en fonction de
ses objectifs et du travail qu'il envisage avec les élèves.
Pour nos études, les deuxgles étant implémentées sur
notre jeu pour la TIT, les enseignants ont choisi la règle
numéro 2 (exercice plus difficile). Enfin, rappelons que
nous avons présenté ici uniquement la situation de jeu
que nous avons expérimenté avec des élèves. De plus
amples développements ont été effectués. Ainsi le jeu est
progressif et adaptatif selon l’âge des enfants. Par
exemple une grille 2x2 ou 4x4 peut-être automatiquement
générée par un algorithme vérifiant leur faisabilité. Le
principe du jeu reste le même pour une grille de 4x4,
mais la difficulté augmente considérablement.
Les objets tangibles
Deux types d'objets tangibles ont été développés pour le
jeu (assemblés en briques LEGO®) : (1) des tours d'une
hauteur de 1 à 3 et (2) différents objets « interacteurs »
[26] qui communiquent avec la TIT. Il y a trois types
d'objets « interacteurs » : (1) un objet « vérificateur » qui
va vérifier la position des tours sur la grille et attirer
l'attention des enfants sur leurs erreurs (voir objet
« vérificateur » sur la Figure 2), (2) un objet « valideur »
qui va vérifier la grille entière lorsque les neuf tours sont
placées et qui va annoncer aux enfants si les tours sont
correctement ou incorrectement placées (voir objet
« valideur » sur la Figure 2) et, (3) un objet « aide » qui
va suggérer une ligne ou une colonne sur laquelle l'enfant
doit se focaliser car une erreur a été détectée (voir objet
« aide » sur la Figure 2).
EXPERIMENTATIONS
Afin de contribuer au manque de données empiriques
concernant l'utilisation de tables interactives avec objets
tangibles pour l'apprentissage, nous avons mené deux
études avec des élèves de cours préparatoire (CP) après
accord de l’Inspection Académique. Pour cela, nous
avons déployé notre plate-forme en classe afin de
déterminer, d'évaluer et d'analyser les avantages d'une
TIT sur l'apprentissage des capacités de raisonnement
spatial d’élèves dans un contexte écologique.
Nous présentons ici le détail de ces études qui abordent
chacune une question différente. En effet, notre première
étude vise à répondre à la question : « Une TIT permet-
elle l’apprentissage du raisonnement spatial avec des
élèves de CP ? ». L’objectif de cette première étude est de
comparer les résultats d'apprentissage des élèves lors
d'une tâche de raisonnement spatial exécutée sur papier
ou sur TIT. Notre seconde étude vise ensuite à répondre à
la question : « Sur TIT, comment cet apprentissage
s’opère t’il ? ».
Pour chacune de nos études, nous débutons en présentant
les participants et le protocole expérimental. Nous
poursuivons en décrivant le matériel utilisé. Nous
terminons en présentant les données collectées et la
manière dont nous les avons analysées.
Etude 1
Participants et protocole expérimental
Trois classes de CP ont participé à cette étude
représentant un total de 68 élèves (M = 6.68 ; E-T = 0.42
; 40% de filles ; 60% de garçons). Les élèves et les
enseignants ont été informés des objectifs de l’étude et
une autorisation de participation a été obtenue des parents
ou représentants légaux pour tous les élèves. Aucun élève
ne participait à un programme d’éducation pour enfant à
besoins spécifiques. Les élèves ont été séparés en deux
groupes. Un premier groupe a pratiqué le Jeu des Tours
dans son format traditionnel (Groupe Traditionnel ;
N=26). Dans ce groupe, lorsque les élèves pensaient avoir
trouvé une solution correcte au jeu, ils appelaient les
enseignants afin d’obtenir une vérification de la position
des tours sur la grille. Un deuxième groupe a pratiqué le
Jeu des Tours sur la TIT (Groupe TIT ; N=42). Dans ce
groupe, lorsque les élèves pensaient avoir trouvé une
solution correcte au jeu, ils utilisaient l’objet
« vérificateur » pour vérifier la position des tours sur la
grille. Notons que les objets tangibles « valideur » et
« aide » n’ont pas été utilisés par le groupe TIT dans la
mesure où les enseignants n’ont pas apporté d’aide, ni
d’informations sur la validation complète de la grille pour
le groupe Traditionnel. Dans chaque groupe, les élèves
ont été aléatoirement répartis en sous-groupes de trois
élèves (exceptionnellement deux).
Cette première étude s’est déroulée en trois phases pour
les deux groupes. Durant la première phase (dite de
familiarisation), nous avons collecté les informations
démographiques de chaque élève et les règles du jeu leur
ont été présentées. Ensuite, les élèves ont complété une
grille de jeu. Enfin, les élèves ont passé un test
d’évaluation individuel de leurs capacités de
raisonnement spatial (pré-test). Durant la deuxième phase
(dite d’apprentissage), les élèves ont résolu
successivement trois grilles. Durant la dernière phase
(dite d’évaluation), les élèves ont passé le test
d’évaluation (post-test). Notons, que toutes les données
ont été collectées dans le milieu écologique de la classe et
qu’aucune limite de temps n’a été imposée aux élèves
pour compléter les tests.
Matériel
Dans la mesure où les élèves de CP apprennent à lire et à
écrire, nous avons conçu un test d’évaluation sous forme
de six photographies. Chaque photographie représente les
neuf tours placées sur une grille de 3x3. Chaque élève
doit indiquer si les tours sont bien ou mal placées pour
deux côtés visibles de la grille en entourant un oui ou un
non placés sous chaque photographie. Pour le groupe
Traditionnel, les photographies ont été réalisées avec le
matériel de classe (cubes empilables formant les tours et
grilles imprimées sur feuille A4). Pour le groupe TIT, les
photographies ont été réalisées avec les objets tangibles
décrits précédemment et les grilles générées par la TIT.
Données collectées
Pour cette première étude, nous avons recueilli les
résultats des élèves en matière de raisonnement spatial,
dans les deux groupes (Traditionnel et TIT). Ces données
ont été documentées en utilisant les pré et post-tests.
Analyse des données
Les tests ont été évalués sur une échelle de 6 points (1
point pour chaque réponse correcte). Des analyses de
variance ont été réalisées pour comparer les scores de
chaque groupe (Traditionnel et TIT) entre le pré-test et le
post-test. Ensuite, des tests de Student (test t) pour
Résultats
Le Tableau 1 présente les résultats (moyennes et écart-
types) des élèves aux pré-tests et aux post-tests pour les
deux groupes.
Groupe Traditionnel
(N=26)
M
(E-T)
Groupe TIT
(N=42)
M
(E-T)
Pré-test
3.92
(0.84)
4.36
(1.32)
Post-test
4.38
(1.30)
5.26
(1.21)
Tableau 1. Résultats des groupes aux pré-tests et post-tests.
Les analyses de variance indiquent une différence
significative entre les résultats des élèves au pré-test et au
post-test pour le groupe TIT (Wilks’ Lambda = 0.676,
F(1,41) = 19.682, p = .000). Ces différences ne sont pas
significatives pour le groupe Traditionnel (Wilks’
Lambda = 0.90, F(1,25) = 2.744, p = .11).
Le test t de comparaison entre les deux groupes est
significatif pour le post-test (t(66) = 2.824, p = .006). En
revanche il n’est pas significatif pour le pré-test (t(66) =
1.494, p = .14).
Les résultats des élèves dans les deux groupes
progressent entre le pré-test et le post-test. Cependant, ce
progrès n’est significatif que pour le groupe TIT. De plus,
les résultats de ce groupe sont significativement
supérieurs aux résultats du groupe ayant pratiqué le jeu
dans son format traditionnel. Cette première étude montre
que les TIT permettent l'apprentissage du raisonnement
spatial, au même titre qu’une situation traditionnelle
(papier). Toutefois, les performances des élèves du
groupe TIT, bien que légèrement supérieures à celles du
groupe traditionnel, ne permettent pas de conclure que
« l’on apprend mieux sur TIT ». Ces résultats nous ont
invité à prolonger cette première étude par une seconde
visant à étudier la participation (physique et verbale)
d’élèves et la manière dont ils construisent leurs
connaissances en groupe lorsqu’ils jouent au Jeu des
Tours sur la TIT. Les opportunités de participation et de
collaboration sont en effet les deux dimensions avancées
dans la littérature pour présenter le bénéfice des TIT pour
l’apprentissage [29, 43].
Etude n°2
Participants et protocole expérimental
Les élèves ayant pratiqué le jeu sur TIT lors de la
première étude (Groupe TIT) ont participé à cette seconde
expérimentation. Ils représentent un total de 42 élèves (M
= 6.63 ; E-T = 0.58 ; 40% de filles). Ces élèves ont été
séparés en groupe de trois (exceptionnellement deux)
pour participer à une session sur la TIT consistant à
résoudre à la suite trois grilles du Jeu des Tours. Durant
cette session, chaque élève était équipé d’un microphone
permettant d’enregistrer ses verbalisations. Les élèves
étaient aussi filmés de manière à documenter leur
participation physique durant les jeux et leur performance
de groupe dans la résolution des grilles. Notons qu’en
raison des contraintes liées aux expérimentations en
milieu naturel, les études 1 et 2 se sont déroulées de
manière concomitante pour le groupe TIT. Ainsi, le
recueil des données de cette seconde étude s’est fait lors
de la première étude avec les équipements audio et vidéo
mobilisés.
Matériel
Pour cette seconde étude, nous avons collecté les données
grâce à un équipement qui nous a permis d’enregistrer à
la fois l’audio et la vidéo. Afin d’enregistrer les
verbalisations des enfants, nous avons utilisé quatre
micros-cravates Shure PG185 et quatre émetteurs
ceinture Shure BLX1. Les micros étaient connectés à deux
récepteurs sans fil Shure BLX88 disposant chacun de
deux canaux. Un canal a été attribué à chaque enfant en
liant les récepteurs sans fil à une carte son externe (M-
Audio, M-Track Quad). La carte son a été branchée sur un
ordinateur (Apple, MacBook Pro) et nous avons utilisé le
logiciel recommandé par le fabricant (Avid technology,
Pro Tool Express) pour la capture audio. Avec ce
matériel spécifique, les élèves étaient libres de leurs
mouvements et n’avaient pas à porter de matériel intrusif
(voir Figure 1). Pour les vidéos et les photographies, nous
avons utilisé deux petites caméras (Sony HDR- PJ260VE)
placées sur des trépieds en deux points stratégiques de la
salle de classe afin de capturer et d'enregistrer toute la
scène (voir Figure 4), à savoir les élèves et leurs
manipulations sur la TIT. Le logiciel iMovie d'Apple a été
choisi pour traiter les vidéos.
Figure 4. Capture de l’audio et de la vidéo en classe
Données collectées
De manière identique à Harris et al. [14] et Shaer et al.
[34], nous avons recueilli la participation physique et
verbale des élèves. La participation physique a été
calculée en se basant sur le temps passé à manipuler les
tours tandis que la participation verbale a été mesurée en
nombre d’énonciations par minute. La performance de
groupe a été mesurée par le temps passé à résoudre
chaque grille. Enfin, pour évaluer la manière dont les
élèves construisent en groupe des connaissances
argumentatives en matière de raisonnement spatial, nous
avons mobilisé le cadre théorique de Weinberger et
Fischer [41]. Ces auteurs ont formalisé un cadre théorique
pour analyser la construction de connaissances
argumentatives dans le cadre d’apprentissages
collaboratifs en environnements numériques. Ils ont
identifié cinq modes sociaux de co-construction de
connaissances se référant à la manière dont des individus
collaborent sur une tâche et formulent des arguments :
l’externalisation (EXT), l’élicitation (ELICIT), le
consensus rapide (RAP), le consensus orienté par
l’intégration (INTEGR) et le consensus orienté par le
conflit (CONFLIT). Chacun de ces modes est présenté,
défini et illustré à l’aide de données dans le Tableau 2.
Catégories
Définition
Exemples
provenant des
transcriptions
Externalisation
(EXT)
Une verbalisation
adressée à un groupe
sans aucune
référence explicite
ou implicite à une
verbalisation
précédente.
“Celle-là va là.”
“Je place celui-ci
ici.”
“La jaune va là.”
Elicitation
(ELICIT)
Les apprenants
demandent
activement des
informations à leurs
partenaires
d’apprentissage.
“Est-ce que je place
la rouge ici ?”
“Est-ce que c’est
bon ?”
“Est-ce que je dois
placer une bleue
ici ?”
Consensus
rapide
(RAP)
L’acceptation de la
verbalisation d’un
pair sans aucune
modification ou
indication que cette
perspective a été
reprise par
l’apprenant.
“Je suis d’accord.”
“C’est bon.”
“Bien.”
Consensus
orienté par
l’intégration
(INTEGR)
Les apprenants
reprennent les
perspectives de leurs
partenaires
d’apprentissage.
“Oui, celle-là va là
parce qu’elle cache
les autres tours.”
“Je suis d’accord, la
jaune va là parce
qu’on doit voir trois
tours sur cette
ligne.”
Consensus
orienté par le
conflit
(CONFLIT)
Les apprenants
n’acceptent pas les
contributions de
leurs partenaires
d’apprentissage.
“Non, celle-ci ne va
pas là.”
“Non, pas ici.”
“Non, je ne suis pas
d’accord.”
Tableau 2. Catégories des modes sociaux de co-construction
de connaissances proposés par Weinberger et Fischer [41]
Analyse des données
Deux chercheurs ont examiné séparément les vidéos de
manière à déterminer la participation physique des élèves
et leurs performances sur les trois résolutions de grilles.
Les verbalisations des élèves ont été retranscrites de
manière chronologique. Les deux chercheurs ont
séparément codé les mêmes données en utilisant les cinq
catégories de modes sociaux de co-construction de
connaissances. Ils ont comparé leur codage et chaque
désaccord a été résolu en se référant à la définition des
catégories (cf. Tableau 2). Chaque chercheur a enfin
examiné les verbalisations retranscrites pour déterminer
la participation verbale des élèves dans chaque jeu. Des
analyses répétées de variance ont été effectuées pour
déterminer des différences significatives dans la
performance des groupes, les modes sociaux de co-
construction de connaissances et la participation verbale
des élèves entre le premier et le troisième jeu en utilisant
le logiciel SPSS® (v.21).
Résultats
Participation
Le Tableau 3 présente les résultats de la participation
physique (exprimée en pourcentage de temps passé à
manipuler les tours) et verbale (exprimée en nombre
d’énonciations par minute) pour l’ensemble des groupes.
Jeu 1
(N=42)
M
(E-T)
Jeu 2
(N=42)
M
(E-T)
Jeu 3
(N=42)
M
(E-T)
Participation
physique
% de temps
23
(14)
25
(12)
24
(12)
Participation
verbale
énonciations/min
12.12
(5.09)
14.88
(6.55)
17.62
(8.53)
Tableau 3. Participation des élèves (physique et verbale)
Les élèves passent 23% de leur temps à placer ou
déplacer les tours sur la TIT pour trouver une solution à
la première grille du jeu, 25% pour la seconde et 24%
pour la troisième. Il n’y pas de différence significative
concernant ce pourcentage de temps à travers les jeux.
Les résultats pour la participation verbale des élèves
indiquent plus de 12 énonciations par minute pour le
premier jeu, plus de 14 pour le second et plus de 17 pour
le dernier. Même si le nombre d’énonciations par minute
augmente du premier au dernier jeu, les différences ne
sont statistiquement pas significatives.
Performance de groupe
Le Tableau 4 présente le temps passé pour chaque groupe
de trois élèves (exceptionnellement deux) à résoudre
chaque jeu.
Numéro de
groupe
Jeu 1
(min)
Jeu 2
(min)
Jeu 3
(min)
1
14:19
04:37
04:09
2
13:00
03:20
02:27
3
13:12
01:46
07:44
4
05:24
03:27
02:35
5
18:13
04:41
04:02
6
14:48
11:15
02:54
7
15:27
04:11
04:11
8
06:40
04:10
02:05
9
07:10
05:43
04:35
10
06:47
02:38
01:48
11
04:38
03:42
02:44
12
08:01
03:39
01:33
13
11:40
07:30
06:56
14
10:05
06:00
03:54
15
13:30
09:13
04:17
M (E-T)
10:05 (4.35)
5.49 (3.15)
3:54 (1.46)
Tableau 4. Performance de groupe (temps passé à résoudre
une grille) pour chaque jeu
Figure 5. Nombre d’énonciations (total par groupe) dans les différentes catégories proposées par Weinberger et Fischer [41]
Le temps passé pour chaque groupe à résoudre le
problème décroît du premier au troisième jeu. Les
groupes passent en moyenne 10.05 minutes à résoudre le
premier jeu, 5.49 minutes pour résoudre le second et 3.54
minutes pour résoudre le dernier. La Figure 6 représente
cette diminution du premier au troisième jeu.
Figure 6. Evolution de la moyenne de performance des
groupes (temps passé à résoudre une grille) pour les trois
jeux
Le temps passé à résoudre une grille décroît
significativement du premier au troisième jeu (Wilks’
Lambda = 0.30, F (2,13) = 15.04, p = 0.000). Les
comparaisons par paires indiquent une différence
significative entre le premier et le deuxième jeu (p =
0.03), entre le premier et le troisième jeu (p = 0.000)
mais pas entre le deuxième et le troisième jeu (p = 0.23).
Autrement dit, la performance des groupes ne s’améliore
pas de manière significative après le second jeu.
Modes sociaux de co-construction de connaissances
La Figure 5 présente le nombre d’énonciations de chaque
groupe d’élèves reliées aux différentes catégories de
modes sociaux de co-construction de connaissances.
Les élèves résolvent majoritairement le problème posé
par chaque grille à travers l’externalisation et le
consensus orienté par le conflit. Les groupes 5, 6 et 7
collaborent majoritairement à travers l’externalisation
tandis que les autres groupes collaborent principalement à
travers un consensus orienté par le conflit.
Les résultats indiquent une différence significative entre
le nombre d’énonciations dans les différentes catégories
(Wilks’ Lambda = 0.147, F (4,11) = 15.95, p = 0.000).
Les comparaisons par paires révèlent une différence
significative entre la catégorie « consensus orienté par le
conflit » et les autres catégories (p = .000 avec
l’élicitation et consensus rapide et, p = .001 avec le
consensus orienté par l’intégration). En résumé, les élèves
mobilisent l’externalisation (i.e., verbalisation adressée à
un groupe sans aucune référence explicite ou implicite à
une verbalisation précédente) et le consensus orienté par
le conflit (i.e. ne pas accepter les contributions de ses
partenaires d’apprentissage) pour résoudre les grilles du
jeu.
La Figure 7 présente le nombre total d’énonciations pour
chaque catégorie de modes sociaux de co-construction de
connaissances dans les trois différents jeux.
Figure 7. Nombre d’énonciations (total des groupes) par
catégorie de modes sociaux de co-construction de
connaissances pour les trois jeux
Les résultats n’indiquent pas de différence significative
dans les modes sociaux de co-construction de
connaissances mobilisés par les élèves pour résoudre les
différents jeux. Du jeu 1 au jeu 3, l’externalisation et le
consensus orienté par le conflit restent les deux modes
mobilisés par les élèves pour collaborer de manière à
résoudre les grilles des jeux.
La Figure 8 présente le pourcentage des verbalisations
des élèves dans chaque catégorie des modes sociaux de
co-construction de connaissances. Les résultats indiquent
que 41.93% des verbalisations des élèves sont reliées à la
construction d’un consensus par le conflit, 30.21% à
l’externalisation, 15.53% à la construction d’un
consensus par l’intégration, 8.77% à un consensus rapide
et 3.56% à l’élicitation.
Figure 8. Pourcentage de verbalisations d’élèves dans
chaque mode de co-construction de connaissances
DISCUSSION ET CONCLUSION
L’objectif de nos études était d’évaluer l'impact d'une TIT
sur l'apprentissage des capacités de raisonnement spatial
d’élèves en milieu écologique. Dans une première étude,
nous avons comparé les résultats d’apprentissage de deux
groupes d’élèves (Gr. Traditionnel vs. Gr. TIT). Les
résultats du groupe TIT sont significativement supérieurs
aux résultats du groupe ayant pratiqué le jeu dans son
format traditionnel. Dans une seconde étude, nous avons
analysé la participation des élèves (physique et verbale),
leurs performances et la manière dont ils construisent
leurs connaissances en groupe lorsqu’ils jouent au Jeu
des Tours sur la TIT. Les résultats montrent (1) que les
élèves passent approximativement un quart de leur temps
à placer ou déplacer les tours sur la TIT pour trouver une
solution à une grille du jeu, (2) que leur participation
verbale représente 14.87 énonciations par minute en
moyenne, (3) que leurs performances s’améliorent de
manière significative entre le premier et le deuxième jeu
mais pas après le second et, (4) qu’ils collaborent
verbalement à travers l’externalisation et la recherche
d’un consensus orienté par le conflit. Ces résultats sont
discutés au regard du potentiel d’une TIT à favoriser
l’apprentissage en classe.
Dans notre première étude, les résultats d’apprentissage
du groupe d’élèves (6 à 7 ans) jouant sur la TIT sont
significativement supérieurs aux résultats du groupe
ayant pratiqué le jeu dans son format traditionnel
(papier). Ces résultats attestent que les Tables Interactives
avec objets Tangibles permettent l’apprentissages d’une
tâche de raisonnement spatial, sans pour autant
généraliser quant à la supériorité des performances des
élèves sur TIT par rapport à celles obtenues sur papier.
Do-Lenh et al. [7] n’ont pas trouvé de différence
significative entre les résultats d’apprentissage d’un
groupe d’étudiants (17 à 20 ans) apprenant de manière
traditionnelle (papier), et d’un autre apprenant à l’aide
d’une interface tangible. Comme le souligne Horn et al.
[16], les bénéfices des TUI seraient plus avérés avec des
enfants, ce qui pourrait expliquer les résultats de notre
étude. De plus, la théorie Piagétienne du développement
met en avant l’importance des manipulations concrètes
d’objets tangibles dans le développement de la pensée en
particulier chez les enfants [12]. Notre étude apporte ainsi
des évidences empiriques aux bénéfices théoriques des
interfaces tangibles présentés dans la littérature [29, 43].
Dans notre seconde étude, les élèves de CP passent un
quart de leur temps sur la TIT à manipuler des objets
tangibles dans le but de résoudre le problème posé par le
jeu. Le développement de leurs capacités de raisonnement
spatial pourrait être favorisé par ce niveau de
participation physique et cognitive dans la résolution du
problème. Cette étude révèle aussi que la participation
verbale moyenne des élèves sur notre TIT à travers les
trois jeux est de 14.87 énonciations par minute. Shaer et
al. [34] ont comparé la participation verbale de huit
étudiants dans trois conditions d’interaction différentes.
L’interaction avec une GUI génère une moyenne de 6.63
énonciations par minute, l’interaction avec une GUI
collaborative multi-souris 6.25 et, l’interaction avec une
table interactive conduit à 7.25 énonciations par minute.
Notre étude confirme et accentue cette tendance des TUI
à favoriser la participation verbale des utilisateurs. Sur
notre TIT, la participation verbale des élèves s’exprime
majoritairement à travers des énonciations de type
externalisation (plus de 30%) et des énonciations de type
consensus orienté par le conflit (42%). Autrement dit, les
élèves apprennent en collaborant par externalisation (i.e.,
verbalisation adressée à un groupe sans aucune référence
explicite ou implicite à une verbalisation précédente) et
par consensus orienté par le conflit (i.e., ne pas accepter
les contributions de ses partenaires d’apprentissage).
Johnson et Johnson [19] ont mis en avant le rôle du
conflit dans l’apprentissage : « Le conflit est à
l’apprentissage de l’élève ce que la combustion interne
d’un moteur est à la voiture. (…) Tout comme l’essence
et l’air sont inertes sans une étincelle, les idées dans la
classe sont inertes sans l’étincelle du conflit intellectuel ».
Les élèves de CP restent organisés autour de
l’externalisation et du conflit pour soudre un problème
en groupe. L’enseignant s’avère ici indispensable pour
permettre aux élèves de passer de ce mode initial de co-
construction de connaissances à la recherche d’un
consensus orienté par l’intégration (i.e., les apprenants
reprennent les perspectives de leurs partenaires
d’apprentissage). Enfin, nos résultats indiquent que la
performance des élèves sur la TIT s’améliore de manière
significative entre le premier et le deuxième jeu mais pas
après le second. Ce résultat suggère que la résolution du
problème sur des grilles de 3x3 apparaît rapidement trop
facile pour les élèves. Ces élèves de CP pourraient ainsi
être capables de résoudre des grilles de 4x4 sur la TIT, un
format de grille habituellement réservé aux élèves de
cours moyens [40]. L’amélioration de leurs performances
pourrait aussi être liée au fait que certains élèves
développent leurs capacités de raisonnement spatial dès le
premier jeu. Ils les partagent ensuite avec les autres dans
les jeux suivants, passant ainsi d’une position d’élève au
premier jeu à une position d’enseignant dans les jeux
elle constitue une première approche de l’évaluation des
élèves dans cette situation, elle pourrait être associée à
des dispositifs complémentaires (ex. entretiens).
Cependant, l’évaluation des apprentissages pour des
élèves de 6 à 7 ans dans le milieu écologique de la classe
constitue un challenge. En effet, l’âge et le niveau de
développement des enfants limitent l’éventail des moyens
d’évaluation. De plus, les contraintes du milieu
écologique rendent difficiles le contrôle des conditions de
l’évaluation et son exhaustivité.
Si la comparaison de la participation physique et verbale
des élèves, la performance des groupes et les catégories
de modes sociaux de co-construction de connaissances
sont des pistes de recherche prometteuses, elles
nécessitent de collecter et de traiter une base de données
relativement conséquente que notre équipe n’était pas en
mesure de réaliser en détails pour les deux groupes (Gr.
Traditionnel et Gr. TIT). De plus, la nature écologique de
nos études complexifie encore cette problématique de
recueil de données auprès d’un grand nombre d’élèves.
C’est pourquoi, nous avons privilégié uniquement
l’analyse du groupe TIT dans l’étude 2. Une analyse
complète (Gr. Traditionnel et Gr. TIT) fait partie de nos
perspectives de recherche.
Par ailleurs, le déploiement en classe d’une TIT sur une
courte durée, et pour la première fois, pourrait avoir
impacté la motivation des élèves à pratiquer. Pour évaluer
cet effet, nous envisageons à l’instar de Kharrufa et al.
[21] de déployer la table TangiSense 2 en classe sur une
plus longue durée afin de mener des expérimentations
complémentaires.
REMERCIEMENTS
Ce travail de recherche a été partiellement financé par le
Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche, le Conseil Général du
Finistère, Brest Métropole et la ville de Brest. Nous
voudrions remercier les étudiants de l’Ecole Nationale
d’Ingénieurs de Brest qui ont participé au développement
du jeu sur la table interactive. Nous remercions aussi la
circonscription Brest-Nord de l’Inspection Académique
du Finistère. Enfin, nous tenons à remercier les écoles
Paul Langevin et Paul Dukas de Brest mais aussi l’école
Sainte Thérèse de Plouzané (directeurs, enseignants et
personnels administratif) ainsi que les parents et les
enfants qui ont accepté de participer à cette étude.
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... manipulable [2], incarnante [10], métaphorique [28], collaborative [21], ou encore avec actuation [4] Forts de ces constats, la constitution d'une base de données recensant la diversité des interfaces existantes et pouvant être mise au service des recherches axées sur la conception de nouvelles générations de TUIs serait un formidable outil. Dans cette perspective, cet article expose les fondements méthodologiques qui font l'originalité de l'approche choisie, ainsi que les premiers éléments de la conception, actuellement en cours, de la solution retenue. ...
Conference Paper
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Tangible user interfaces take various forms : their design is often unique. As the number of systems is increasing, as understanding the whole becomes difficult. Yet, open innovation approaches require identifying and being inspired by previous solutions. By taking into account the line of descent of technological systems, we use a classification method from biology in HCI : the cladistic classification. The aim is to develop an original approach to characterize the variety of tangible interfaces. This paper presents our approach to develop a list of criteria and to develop a web application for the purpose of a collaborative inventory.
... manipulable [2], incarnante [10], métaphorique [28], collaborative [21], ou encore avec actuation [4] Forts de ces constats, la constitution d'une base de données recensant la diversité des interfaces existantes et pouvant être mise au service des recherches axées sur la conception de nouvelles générations de TUIs serait un formidable outil. Dans cette perspective, cet article expose les fondements méthodologiques qui font l'originalité de l'approche choisie, ainsi que les premiers éléments de la conception, actuellement en cours, de la solution retenue. ...
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Les interfaces utilisateur tangibles sont de formes variées et leur conception est souvent dédiée et unique. Les spécimens se multiplient et cerner le contour des possibles est aujourd'hui difficile. Or, les approches d'innovation dite ouverte demandent d'identifier et d'être inspiré par des solutions antérieures. En considérant la filiation entre les systèmes technologiques, nous reprenons une méthode de classification systématique issue de la biologie pour l'appliquer en IHM : la classification cladistique. Le but est de proposer une approche originale pour caractériser la diversité des interfaces tangibles. Cet article présente notre démarche pour établir une liste de critères et le développement d'une application web pour un inventaire collaboratif. Abstract Tangible user interfaces take various forms : their design is often unique. As the number of systems is increasing, as understanding the whole becomes difficult. Yet, open innovation approaches require identifying and being inspired by previous solutions. By taking into account the line of descent of technological systems, we use a classification method from biology in HCI : the cladistic classification. The aim is to develop an original approach to characterize the variety of tangible interfaces. This paper presents our approach to develop a list of criteria and to develop a web application for the purpose of a collaborative inventory.
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As part of the integration of teachers as end-users from the early stages of the design of interfaces dedicated to school context, this study presents a method of collecting data about professional culture in education by probes. This work contributes to current works of development and evaluation of exploration methods, unusually used in this field. The first results of this ongoing study allow from a previously unseen way to successfully access to the constituent elements of the teaching culture.
Article
L’Internet des Objets se traduit par une multitude d’objets connectés dotés de fonctions avancées pour l’automatisation et l’assistance aux personnes, soulevant des défis techniques, politiques, sociaux et économiques. L’apprentissage est lié à ces défis en plusieurs sens : si l’apprentissage machine contribue au fonctionnement des objets connectés, ces derniers stimulent en retour l’apprentissage humain en diversifiant les pratiques et les outils. Les méthodes d’apprentissage peuvent s’appuyer sur les récents travaux en neurosciences identifiant les ressorts cognitifs de l’apprentissage : l’attention, l’engagement, le retour d’informations et la consolidation. En outre, l’apprentissage s’est vu modifié par l’évolution technologique : après l’imprimerie, l’informatique et les télécommunications, l’Internet des Objets est un nouveau support d’information pour la transmission des savoirs. À partir de trois dimensions d’analyse (données, interfaces et pervasivité), nous proposons une classification des articulations possibles de l’Internet des Objets pour soutenir l’apprentissage. L’étude de cette relation montre que l’Internet des Objets favorise l’exploration et l’expérimentation, la mise en place de situations authentiques et la contextualisation de l’apprentissage.
Article
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Interactive surfaces are increasingly common in museums and other informal learning environments where they are seen as a medium for promoting social engagement. However, despite their increasing prevalence, we know very little about factors that contribute to collaboration and learning around interactive surfaces. In this paper we present analyses of visitor engagement around several multi-touch tabletop science exhibits. Observations of 629 visitors were collected through two widely used techniques: video study and shadowing. We make four contributions: 1) we present an algorithm for identifying groups within a dynamic flow of visitors through an exhibit hall; 2) we present measures of group-level engagement along with methods for statistically analyzing these measures; 3) we assess the effect of observational techniques on visitors’ engagement, demonstrating that consented video studies do not necessarily reflect visitor behavior in more naturalistic circumstances; and 4) we present an analysis showing that groups of two, groups with both children and adults, and groups that take turns spend longer at the exhibits and engage more with scientific concepts.
Article
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This paper describes a case study that took place at the Public Research Centre Henri Tudor, Luxembourg in November 2012. A tangible user interface (TUI) was used in the context of collaborative problem solving. The task of participants was to explore the relation of external parameters on the production of electricity of a windmill presented on a tangible tabletop; these parameters were represented through physical objects. The goal of the study was to observe, analyze, and understand the interactions of multiple participants with the table while collaboratively solving a task. In this paper we focus on the gestures that the users performed during the experiment and the reaction of the other users to those gestures. Gestures were categorized into deictic/pointing, iconic, emblems, adaptors, and TUI-related. TUI-related/manipulative gestures, such as tracing and rotating, represented the biggest part, followed by the pointing gestures. In addition, we evaluated how active was the participation of the participants and whether gesture was accompanied by speech during the user study. Our case study can be described as a collaborative, problem solving, and cognitive activity, which showed that gesturing facilitates group focus, enhances collaboration among the participants, and encourages the use of epistemic actions.
Article
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Dans cette étude, nous évaluons la capacité d’une table interactive avec objets tangibles à favoriser l’activité d’élèves engagés dans un jeu sérieux. Onze élèves de CP ont participé à cette étude. Chaque groupe a pratiqué en classe la forme traditionnelle du jeu puis, le même jeu sur table interactive. Le temps sur la tâche de chaque élève a été mesuré dans les deux conditions de pratique du jeu. Les résultats indiquent que le temps que les élèves passent sur la tâche lorsqu’ils pratiquent le jeu sur table interactive est significativement supérieur au temps qu’ils passent sur la tâche dans le jeu en classe. Ils révèlent cependant des différences inter-individuelles significatives. Ils montrent enfin que les activités des élèves sont plutôt de type synchrone dans la pratique du jeu sur table interactive et plutôt de type asynchrone dans la pratique du jeu en classe.
Conference Paper
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Students often need prompt feedback to make the best from the learning activities. Within classrooms, being aware of students’ achievements and weaknesses can help teachers decide how to time feedback. However, they usually cannot easily assess student’s progress. We present an approach to generate automated notifications that can enhance teacher’s awareness in runtime. This paper formulates the theoretical framing and describes the technological infrastructure of a system that can help teachers orchestrate learning activities and monitor small groups in a multi-tabletop classroom. We define the design guidelines underpinning our system, which include: i) generating notifications from teacher-designed or AI-based sources; ii) enhancing teacher’s awareness in the orchestration loop; iii) presenting both positive and negative notifications; iv) allowing teachers to tune the system; and v) providing a private teacher’s user interface. Our approach aims to guide research on ways to generate notifications that can help teachers drive their attention and provide relevant feedback for small group learning activities in the classroom.
Article
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Reality-based interfaces (RBIs) such as tabletop and tangible user interfaces draw upon ideas from embodied cognition to offer a more natural, intuitive, and accessible form of interaction that reduces the mental effort required to learn and operate computational systems. However, to date, little research has been devoted to investigating the strengths and limitations of applying reality-based interaction for promoting learning of complex scientific concepts at the college level. We propose that RBIs offer unique opportunities for enhancing college-level science education. This paper presents three main contributions: (1) design considerations and participatory design process for enhancing college-level science education through reality-based interaction, (2) reflections on the design, implementation, and validation of two case studies-RBIs for learning synthetic biology, and (3) discussion of opportunities and challenges for advancing learning of college-level sciences through next-generation interfaces.
Conference Paper
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While a number of guidelines exist for the design of learning applications that target a single group working around an interactive tabletop, the same cannot be said for the design of applications intended for use in multi-tabletops deployments in the classroom. Accordingly, a number of these guidelines for single-tabletop settings need to be extended to take account of both the distinctive qualities of the classroom and the particular challenges of having various groups using the same application on multiple tables simultaneously. This paper presents a synthesis of conclusions drawn from an empirical analysis of the effectiveness of designs for small-group multi-tabletop collaborative learning activities in the wild. We use distributed cognition as a framework to analyze the small number of authentic multi-tabletop deployments and help characterize the technological and educational ecology of these classroom settings. Based on previous research on single-tabletop collaboration, the concept of orchestration, and both first-hand experience and second-hand accounts of the few existing multiple-tabletop deployments to date, we develop a three-dimensional framework of design recommendations for multi-tabletop learning settings.
Conference Paper
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This paper presents the results and experiences of a six-week deployment of multiple digital tabletops in a school. Dillenbourg's orchestration framework was used both to guide the design and analysis of the study. Four themes, which directly relate to the design of the technology for the classroom, out of the 15 orchestration factors are considered. For each theme, we present our design choices, the relevant observations, feedback from teachers and students, and we conclude with a number of lessons learned in the form of design recommendations. The distinguishing factors of our study are its scale (in terms of duration, number of classes, subjects, and teachers), and its 'in-the-wild' character, with the entire study being conducted in a school, led by the teachers, and using teacher-prepared, curriculum-based tasks. Our primary contributions are the analysis of our observations and design recommendations for future multi-tabletop applications designed for and deployed within the classroom. Our analyses and recommendations meaningfully extend HCI's current design understandings of such settings.
Article
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Although intellectual conflict may be an important instructional tool (because of its potential constructive outcomes), conflict is rarely structured in instructional situations (because of its potential destructive outcomes). Many educators may be apprehensive about instigating intellectual conflict among students because of the lack of operational procedures to guide them. Ideally, operational procedures should be based on social science theory that is validated by research. Constructive controversy is an instructional procedure that is designed to create intellectual conflict among students and that meets these criteria. The authors of this article summarize the theory underlying constructive controversy and review the results of their meta-analysis of the validating research. The positive outcomes indicate that intellectual conflict can have important and positive effects on student learning and well-being.
Article
We present a structure editor that aims to facilitate the presentation and manipulation of handwritten mathematical expressions. The editor is oriented to the calculational mathematics involved in algorithmic problem solving and it provides features that allow reliable structure manipulation of mathematical formulae, as well as flexible and interactive presentations. We describe some of its most important features, including the use of gestures to manipulate algebraic formulae, the structured selection of expressions, definition and redefinition of operators in runtime, gesture's editor, and handwritten templates. The editor is made available in the form of a C# class library which can be easily used to extend existing tools. For example, we have extended Classroom Presenter, a tool for ink-based teaching presentations and classroom interaction. We have tested and evaluated the editor with target users. The results obtained seem to indicate that the software is usable, suitable for its purpose and a valuable contribution to teaching and learning algorithmic problem solving.
Article
Augmented reality (AR) has recently received a lot of attention in education. Multiple AR systems for learning have been developed and tested through empirical studies often conducted in lab settings. While lab studies can be insightful, they leave out the complexity of a classroom environment. We developed three AR learning environments that have been used in genuine classroom contexts, some of them being now part of classroom regular practices. These systems and the learning activities they provide have been co-designed with teachers, for their own classrooms, through multiple cycles of prototyping and testing. We present here the features that emerged from these co-design cycles and abstract them into design principles.