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Relief et patrimoine géomorphologique du Pays de Guérande

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LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 39
Relief et patrimoine géomorphologique du Pays de Guérande
Figure 1 : localisation du Pays de Guérande
Introduction
La baie de La Baule illustre, à elle seule, la diversité
des reliefs du Pays de Guérande, en même temps
que l’emboîtement des formes, selon leurs dimen-
sions, dans l’analyse géomorphologique. Le site
évoque d’abord une plage de sable de près de huit
kilomètres de longueur, exposée vers le Sud et domi-
née par des dunes, entre la pointe du Bec, à Porni-
chet, et la pointe de Penchâteau, au Pouliguen. La
plage de La Baule paraît uniforme depuis la mer.
Elle comprend néanmoins deux sections : l’une
s’adosse à une paléofalaise, à Pornichet, l’autre
forme une flèche, de La Baule-les-Pins à l’étier du
Pouliguen. La paléofalaise s’aligne sur le coteau de
Guérande, qui borde le plateau de Guérande. La
flèche tend à rejoindre le plateau du Croisic, com-
posé des anciennes îles du Croisic, de Batz et du
Pouliguen. Elle contribue, avec la flèche de Pen-
Bron, à encadrer le marais du Croisic et ses salines.
Plus au Sud-Ouest, la côte rocheuse du Croisic-
Batz-sur-Mer, ou Grande Côte, borde le plateau du
Croisic vers l’océan et se prolonge par un aligne-
ment d’îlots en baie de La Baule.
Par son histoire, le Pays guérandais correspond à
l’aire du rayonnement de la ville de Guérande, qui
admet plusieurs limites en fonction d’activités agri-
coles, halieutiques, salicoles, commerciales ou tou-
ristiques actuelles ou passées. Par sa géomorpholo-
gie, il s’étend de la Grande Côte aux marais du Mès
et à la Grande Brière, de l’estuaire de la Vilaine à
celui de la Loire (figure 1). Il se situe ainsi entre
deux des embouchures majeures de la façade atlan-
tique de l’Europe et comporte deux sections littora-
les différentes : l’une tournée vers le Mor Braz et la
presqu’île de Quiberon, entre Le Croisic et l’embou-
chure du Mès, l’autre tournée vers l’entrée de la
Loire et l’île de Noirmoutier, entre la pointe du Croi-
sic et Saint-Nazaire. Le Pays guérandais forme ainsi
une unité de relief clairement circonscrite. Il se
trouve cerné d’eaux marines ou continentales, à la
seule exception du seuil, étroit et actuellement
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
40
Figure 2 : schéma géomorphologique du Pays de Guérande
insubmersible, de Saint-Lyphard (8 m). Il constitue
ainsi une presqu’île authentique (figure 2).
Les reliefs, continentaux, littoraux et sous-marins
du Pays guérandais sont caractéristiques d’un mas-
sif ancien de moyennes latitudes partiellement
immergé. Les reliefs, en général, sont l’objet de la
géomorphologie. Ils résultent des influences anta-
gonistes de la structure et de l’érosion. La structure
dépend de la nature des roches (lithologie) et de
leurs déformations (tectonique). L’érosion résulte
de processus mécaniques (fragmentation) ou chimi-
ques (altération), principalement liés à l’air et à l’eau,
donc au climat. Les reliefs enregistrent également
les effets des variations du niveau de la mer (eusta-
tisme), surtout près des côtes.
Les reliefs du Pays guérandais procèdent de cette
triple influence dans des proportions qui leur sont
propres. Ils présentent un dispositif général relative-
ment simple. Leur armature se compose de deux
blocs de socle granitique et métamorphique. Ces
blocs constituent deux plateaux de même forme (rec-
tangulaire), de même orientation (nord ouest-sud est)
et de même inclinaison (vers le Nord-Est), mais de
dimensions inégales. Le plateau de Guérande est le
plus vaste et le plus élevé (61 m). Celui du Croisic
(23 m) est étroit et proche des côtes actuelles. Ces
deux plateaux sont dissymétriques. Ils sont bordés au
Sud-Ouest par des escarpements de failles subparal-
lèles (coteau de Guérande et Grande Côte). Ils sont
basculés vers le Nord-Est et forment ainsi des revers
qui disparaissent sous les sédiments accumulés en
Brière et dans les marais du Mès pour le premier,
dans les marais du Croisic pour le second. Ils entou-
rent les marais du Croisic, avec les flèches sableuses
de La Baule et de Pen-Bron (figure 3).
Ce dispositif géomorphologique est facilement
observable sur le terrain. Le sommet du coteau de
Guérande offre, ainsi, une vue d’ensemble sur la
presqu’île guérandaise au Sud-Ouest, depuis Clis ou
Saint-Armel, vers la flèche de Pen-Bron, la plage de
La Baule, le plateau et le marais du Croisic. Il offre
une autre vue vers la Brière et le Sillon de Bretagne,
depuis les abords de la ville de Guérande. Le sommet
de la Grande Côte procure une vue équivalente sur le
plateau du Croisic vers le marais du Croisic et vers le
coteau de Guérande, à partir de la Vigie de la Romaine.
Ce dispositif, bien connu, a fait l’objet de publica-
tions dispersées, sous forme de présentations généra-
les ou d’analyses partielles (Barrois, 1896 ; Rivière,
1936 ; George, 1943 ; Guilcher, 1948, 1954 ; Musset,
1958 ; Pinot, 1971, 1978, 1998 ; Barbaroux, 1972 ;
Chassé, 1972 ; Hassenforder et al., 1973 ; Vanney,
1977 ; Prigent, 1978 ; Gras, 1980 ; Verger, 1983 ; Sel-
lier, 1985). Cet article s’inscrit, pour sa part, dans une
perspective de vulgarisation. Il vise à présenter le
relief comme un élément fondamental du patrimoine
naturel. Il part de l’analyse de faits identifiables par
chacun dans le paysage et sur les cartes topographi-
ques ou géologiques. Il a pour objectif d’exposer
quelques principes de lecture du relief du Pays de
Guérande, sachant que ce dernier résulte de quatre
étapes morphogéniques majeures et se compose de
quatre séries d’éléments morphologiques principaux.
1. Les étapes fondamentales de l’élabo-
ration du relief du Pays de Guérande
Le relief du Pays de Guérande est différencié, en
dépit de ses altitudes, presque partout inférieures à
60 m. Ses propriétés géomorphologiques résultent
de chacune des phases caractéristiques de l’élabora-
tion d’un massif ancien.
– La première, accomplie au Précambrien et à l’ère
primaire, a créé la structure générale du pays. Elle a
vu la mise en place de matériaux briovériens ou assi-
milés qui constituent le socle fondamental (socle
précambrien). Elle s’est poursuivie par le plisse-
ment de ces matériaux, assorti d’intrusions graniti-
ques et de phases de métamorphisme (orogenèse
hercynienne). Elle s’est achevée par l’aplanissement
de la chaîne plissée hercynienne (surface d’érosion
post-hercynienne). Cette première phase correspond
aux trois stades d’un cycle orogénique complet, en
l’occurrence le cycle hercynien.
– La deuxième s’est principalement déroulée entre
la fin de l’ère secondaire et celle de l’ère tertiaire.
Elle s’est caractérisée par la fracturation du socle
hercynien et par la dislocation de la surface post-
hercynienne en blocs rehaussés et basculés par des
failles. Elle résulte donc d’une tectonique post-oro-
génique, consécutive à l’ouverture de l’océan Atlan-
tique et du golfe de Gascogne. Cette deuxième
phase a déterminé les principaux volumes topogra-
phiques du Pays guérandais.
– Les autres se sont produites au Tertiaire et au Qua-
ternaire. Elles ont procédé des fluctuations du climat
qui ont entraîné les actions de systèmes d’érosion
variés. Elles ont fonctionné par séquences, d’abord
chaudes et humides ou chaudes et sèches au Ter-
tiaire, puis alternativement froides et tempérées au
Quaternaire. Ces séquences paléoclimatiques suc-
cessives sont responsables des caractères actuels des
reliefs continentaux et littoraux du Pays guérandais.
Elles ont déterminé la mise en place des réseaux
hydrographiques et l’encaissement des vallées.
Elles ont également provoqué la mobilité du niveau
marin, donc le déplacement du littoral et, finale-
ment, la variété des types de côtes.
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 41
1-1. Une structure de socle héritée
du cycle orogénique hercynien
Le Pays guérandais comprend trois types d’affleure-
ments principaux.
Des schistes et micaschistes, appelés micaschistes
du groupe de la Vilaine, occupent principalement le
bassin versant du Mès, entre l’embouchure de la
Vilaine (Pénestin), la pointe du Castelli (Piriac) et la
Brière (Saint-Lyphard). Des gneiss migmatitiques,
qualifiés de gneiss de Saint-Nazaire, affleurent à
l’Est du plateau de Guérande et du plateau du Croi-
sic. Des granites feuilletés à deux micas, ou granites
de Guérande, affleurent à l’Ouest de ces deux pla-
teaux, sous la forme d’un massif intrusif, ou batho-
lite (Cogné, 1960 ; Hassenforder et al., 1973 ; Audren
et al., 1975 ; Marchand, 1980).
La structure du Pays guérandais a été d’abord déter-
minée par la formation de la chaîne de montagne her-
cynienne.
L’orogenèse hercynienne déforme le socle armori-
cain au cours de la seconde moitié de l’ère primaire
(Cogné, 1960 ; Le Corre et al., 1991). Elle ne consti-
tue cependant que le paroxysme d’un cycle orogéni-
que qui comprend, comme toujours, la formation du
substrat rocheux initial, la crise orogénique stricto
sensu, caractérisée par de puissantes déformations
de ce substrat, l’aplanissement de la chaîne plissée
ainsi créée, sous les effets d’une érosion progressive
et durable.
a. La formation du substrat initial dérive en partie du
cycle briovérien, lui-même associé à une orogenèse
cadomienne. Les traces de cette orogenèse précam-
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Figure 3 : la place du Pays de Guérande parmi les blocs basculés du Nord-Ouest de la Loire-Atlantique
brienne, donc antérieure à l’orogenèse hercynienne,
perdurent dans la structuration actuelle du socle à
travers des linéaments de direction angevine (N100-
110°), qui ont influencé les déformations et graniti-
sations ultérieures, lors de l’orogenèse hercynienne
(Klein, 1975). Les micaschistes du groupe de La
Vilaine se rapportent au Précambrien supérieur et à
un Primaire inférieur affecté par un métamorphisme
éohercynien « de très bas grade ou de bas degré » ;
les gneiss migmatitiques de Saint-Nazaire sont
significatifs d’un métamorphisme siluro-dévonien
de haute température (Primaire inférieur et moyen),
accompli dans le domaine de la fusion partielle (Le
Corre et al., 1991).
b. L’orogenèse hercynienne, réalisée aux dépens de
matériaux précambriens et primaires, se manifeste
par des plissements et des fracturations polyphasés
de grande envergure, dont le paroxysme se produit
au Carbonifère (Primaire supérieur). Elle s’accom-
pagne d’intrusions granitiques et de phases de méta-
morphismes. Elle se manifeste, au Sud du Massif
armoricain, par la mise en place de chaînes de mon-
tagnes (chaîne de subduction, puis chaîne de colli-
sion), de direction armoricaine (N125-130°). Le
métamorphisme éohercynien précité (micaschistes
de la Vilaine, gneiss migmatitiques de Saint-Nazaire)
constitue le marqueur d’une phase tectono-métamor-
phique précoce, antérieure au paroxysme orogénique
hercynien (Carbonifère). Les granites du batholite de
Guérande appartiennent, pour leur part, aux intru-
sions granitiques dévono-carbonifères associées à
l’orogenèse hercynienne. La région de Guérande
appartient ainsi structuralement au domaine de l’An-
ticlinal de Cornouaille, traditionnellement intégré au
domaine Sud-armoricain (Cogné, 1960 ; Hassenfor-
der, 1970 ; Marchand, 1980 ; Le Corre et al., 1991).
c. La cessation des déformations hercyniennes, à
partir de la fin du Carbonifère, a laissé le champ
libre aux actions persistantes d’une érosion des
montagnes hercyniennes, qui ont conduit à leur
aplanissement en fonction d’un niveau de base
déterminé par celui des mers. Cette tendance, bien
engagée dès la fin du Primaire et entretenue par la
suite, a conduit au façonnement d’une surface d’éro-
sion fondamentale, qui se rapporte à la « surface
post-hercynienne », ou « pénéplaine de l’Ouest de
la France », propre à l’ensemble du Massif armori-
cain (Klein, 1975).
Cette surface d’érosion (ou surface d’aplanisse-
ment) recoupe les racines des plis et les grandes
lignes de failles hercyniennes de la région. Elle jux-
tapose à l’affleurement le socle antérieur aux défor-
mations hercyniennes (micaschistes et gneiss) et les
intrusions granitiques contemporaines de ces défor-
mations (granite de Guérande), comme l’illustrent
les cartes géologiques. Elle détermine, dans le pay-
sage actuel, les bas plateaux qui s’étendent de la
côte du Croisic à la Grande Brière. Elle constitue
donc l’élément fondamental du relief. Tous les élé-
ments du Pays de Guérande procèdent en effet de sa
fracturation (coteaux de Guérande et côte du Croisic),
de son rehaussement et de son basculement (bloc de
Guérande et bloc du Croisic), de son enfouissement
partiel sous des sédiments continentaux ou marins
(Brière et marais du Croisic), de son ravinement
(réseaux de vallées) et de son attaque par l’érosion
littorale (falaises et platiers rocheux).
1-2. Des volumes topographiques engendrés
par une tectonique de blocs basculés tertiaires
Les déformations majeures (figure 4a)
La fragmentation de la surface post-hercynienne,
notamment par les rejeux de failles de direction
armoricaine, se produit pour l’essentiel à l’ère ter-
tiaire. Elle est démontrée par l’existence d’une série
de grands versants rectilignes, de même regard (vers
le Sud-Ouest), qui correspondent à des escarpe-
ments de failles (Grande Côte, coteau de Guérande,
Sillon de Bretagne). Ces versants forment en effet
des escarpements « singuliers », sans symétrique, ce
qui les différencie des versants de vallées. Ils recou-
pent des affleurements de roches variées, sans dis-
tinction dans le paysage, ce qui les différencie aussi
de simples versants d’érosion différentielle.
Cette fragmentation de la surface post-hercy-
nienne a engendré une série de blocs basculés vers
le Nord-Est à partir des escarpements de failles pré-
cités. Ces blocs s’inscrivent dans un même ensem-
ble morphostructural, entre la vallée de l’Isac et le
Pays de Retz. Ils forment effectivement l’armature
du relief du Pays guérandais.
– La côte rocheuse et rectiligne Le Croisic-Batz est
l’escarpement le plus court (11 km) et le plus bas
(23 m). Elle borde un premier bloc basculé (plateau
du Croisic), qui n’émerge qu’à l’emplacement des
anciennes îles du Croisic, de Batz et du Pouliguen,
et qui s’incline sous les marais du Croisic. Elle suit
effectivement des lignes de failles, comme le prouve
le tracé des falaises et celui des couloirs qui les com-
partimentent.
– Le coteau de Guérande, plus long (25 km) et plus
élevé (61 m), borde un deuxième bloc basculé (pla-
teau de Guérande), dont le revers disparaît sous les
marais du Mès et sous la Brière, vers le Nord.
– Au-delà du Pays guérandais, le coteau du Sillon de
Bretagne, encore plus long (70 km) et plus élevé
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L
L
Ile Dumet
L?
L?
L?
25
11
33
23
47
33
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21 23
22
25
19
11
16
61
47
Failles bordières majeures
Failles subalternes
Failles supposées
Escarpement de faille
Sens de basculement majeur
Sens de basculement subalterne
Bassins losangiques
Ligne de partage des eaux
L
a. Les déformations majeures b. Les déformations subalternes
c. La géométrie des failles D. SELLIER, 2006
Point coté61 N 40-50° (failles "orthogonales")
N 90-110° (failles "angevines")
N 115-130° (failles "armoricaines")
N 150-170° (failles "diagonales")
N
Figure 4 : schéma morpho-tectonique du Pays de Guérande
a. les déformations majeures – b. les déformations subalternes – c. la géométrie des failles
(91 m), borde le plateau du Temple, qui s’incline lui
aussi vers le Nord, en direction du bassin de Camp-
bon et de la vallée de l’Isac.
Le relief et l’environnement du Pays guérandais
témoignent ainsi d’une remarquable homothétie des
formes. Les escarpements sont de longueur et de
commandement croissants de la Grande Côte au Sil-
lon de Bretagne. Les blocs basculés sont de superfi-
cie croissante dans la même direction. Les dépres-
sions sont de profondeur croissante : la première
(marais du Croisic), recouverte de sédiments marins,
demeure soumise aux marées ; la seconde (Brière),
principalement colmatée par des sédiments conti-
nentaux quaternaires, est inondée par les eaux du
Brivet ; la troisième (bassin de Campbon), conserve
des sédiments tertiaires et demeure inondable en rai-
son de ses altitudes (3 m). Ce dispositif principal, dont
les premières formulations reviennent à P. George
(1943) et à A. Guilcher (1948, 1954), a été maintes
fois mentionné (Vince, 1958 ; Gauthier, 1963 ; Pri-
gent et al., 1975 ; Vanney, 1977 ; Gras, 1977, 1980 ;
Pinot, 1978 ; Sellier, 1985 ; Vinet, 1988). Il implique
une perception transversale du relief, en recoupant
escarpements, blocs et dépressions, de l’océan à la
Brière, vers le Nord-Est.
Les déformations subalternes (figure 4b)
Elles proviennent de failles transversales décro-
chantes, de plusieurs orientations, qui cisaillent les
failles de direction armoricaine et qui décalent les
escarpements associés à ces dernières, notamment
la Grande Côte et le coteau de Guérande.
Elles s’expriment également par l’inclinaison
des blocs (plateau du Croisic et plateau de Gué-
rande), certes d’abord basculés vers le Nord-Est, mais
secondairement affaissés vers le Sud-Est. Ainsi, le
plateau du Croisic, qui culmine à 23 m, disparaît
sous le niveau de la mer devant la baie de La Baule,
où il se réduit à une série d’îlots inférieurs à 9 m, ali-
gnés sur la pointe de Penchâteau (les Evens, Bague-
naud,…). Le plateau de Guérande, qui culmine à
61 m, à l’Est de Guérande, ne se trouve plus qu’à
47 m à l’Étoile du Matin, près de Saint-Nazaire,
avant de disparaître devant l’embouchure de la
Loire ; son revers culmine encore à 23 m au Sud de
Mesquer, mais ne se trouve plus qu’à 11 m au Nord
de Sandun, avant de plonger sous la Brière. La même
tendance s’observe au Nord du Mès, où le plateau
d’Assérac-Herbignac, bordé par le coteau d’Assérac,
reproduit le coteau de Guérande, culmine à 48 m au
Nord d’Assérac, mais s’affaisse à l’Est (22 m au Sud
d’Herbignac), avant de disparaître également sous la
Brière (Chatellier, 2001).
Ce dispositif subsidiaire impose une nouvelle
grille de lecture du relief, en considérant cette fois
les volumes topographiques dans le sens longitudi-
nal, du Nord-Ouest vers le Sud-Est. Le Pays de Gué-
rande peut alors se subdiviser en deux parties, sépa-
rées par une ligne allant du Pouliguen à Saint-Lyphard,
selon un tracé proche de la ligne de partage des eaux
entre le bassin-versant du Mès et celui du Brivet. À
l’Ouest, se succèdent effectivement trois blocs incli-
nés vers le Nord-Est : le plateau du Croisic, celui de
Guérande et celui d’Assérac-Herbignac, limités par
trois escarpements regardant vers le Sud-Ouest
(Grande Côte, coteau du Croisic, coteau d’Assérac)
et séparés par deux marais maritimes : ceux du Croi-
sic et du Mès. À l’Est, ne dépasse, actuellement, des
eaux marines ou continentales, qu’un seul bloc : le
plateau de Guérande, entouré par l’embouchure de
la Loire, la Brière et le coteau de Guérande, lequel
continue de fonctionner comme une falaise entre la
baie de La Baule et la pointe de Chemoulin.
La géométrie des failles (figure 4c)
Le relief actuel du Pays de Guérande résulte donc
d’une tectonique de blocs, déterminée par des défor-
mations cassantes du socle granitique et métamor-
phique local. Ces déformations, nécessairement
postérieures à l’élaboration de la surface post-hercy-
nienne, proviennent principalement du rejeu de
réseaux de failles de tracé très antérieur : hercynien,
ou plus ancien. De ce fait, se posent les problèmes
propres à l’identification des failles majeures à l’in-
térieur des socles, en l’occurrence d’un ancien mas-
sif montagneux, soumis à des contraintes considéra-
bles et à des fracturations multiples au cours de
l’orogenèse hercynienne, mais aplani par la suite,
jusqu’aux éléments les plus indurés de son soubas-
sement. Ces éléments, granitoïdes et roches méta-
morphiques, par nature très durs, donc mécanique-
ment très fragiles, répondent aux contraintes
ultérieures par le rejeu des failles anciennes ou par
de nouvelles fractures. Le repérage de ces failles
repose sur l’observation des décalages des affleure-
ments rocheux sur le terrain et le long des coupes,
sinon sur les estrans rocheux et le long des falaises.
Par défaut, il peut s’appuyer sur l’analyse du relief,
à partir des isohypses et des talwegs. Cette méthode
n’aboutit qu’à la mise en évidence des failles dotées
d’une expression morphologique. Elle se justifie
néanmoins par l’existence de versants rectilignes
sur de longues distances, significatifs des actions
directes de rejeux tectoniques (tectodynamique),
ainsi que par celle de vallons en baïonnettes, de tal-
wegs ou de confluences alignés, appartenant à des
bassins-versants différents et procédant d’une ex-
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 45
ploitation de zones de broyage par l’érosion diffé-
rentielle (tectostatique).
Quatre réseaux de failles principaux, majoritaire-
ment tracés dès le Primaire, se manifestent ainsi, à
partir de critères structuraux et morphologiques,
dans le Pays de Guérande.
– Des failles de direction angevine, donc d’origine
précambrienne, et de tracé général ouest-est (N90-
N110°), continuent de transparaître à travers des ali-
gnements de vallons et de confluences, principale-
ment à deux endroits : au Sud-Est du plateau de
Guérande, entre Pornichet et Saint-Nazaire, en rela-
tion avec des filons d’amphibolites, et au Nord du
plateau de Guérande, entre Mesquer et Breca, en
relation avec le bord du batholite de Guérande.
– Les failles de direction armoricaine (N115-N130°),
d’origine hercynienne, mais réactivées au Tertiaire
exercent une influence géomorphologique primor-
diale. Leurs rejeux déterminent l’essentiel du relief
du Pays guérandais, comme dans toute la partie
méridionale du Massif armoricain, tant sur le conti-
nent que sur le précontinent (Guilcher, 1948 ; Pinot,
1974 ; Vanney, 1977). La coïncidence d’escarpe-
ments de failles, fonctionnant aujourd’hui en falai-
ses (comme la Grande Côte du Croisic) avec des
filons de roches synorogéniques parallèles, à ces failles
(comme les microgranites du rocher de l’Ours au
Croisic), prouve que ces escarpements proviennent
du rejeu de vieilles failles hercyniennes. Elle impli-
que la mise en relief des plateaux comme celui du
Croisic, donc comme celui de Guérande, par des
rejeux post-orogéniques. Ces failles de direction
armoricaine déterminent la Grande Côte, le coteau
de Guérande et leurs prolongements, qui tendent à
converger vers l’embouchure de la Loire. Le coteau
d’Assérac (N120°), de même regard, domine la rive
nord des marais du Mès, en assurant ainsi le relais
entre les blocs basculés du Pays guérandais et le Sil-
lon de Bretagne. Ces failles majeures s’intègrent à
un réseau de fractures parallèles à la côte qui se pro-
longent aussi vers l’Ouest, au-delà de l’île Dumet,
notamment le long des côtes actuelles du Morbihan
(Saint-Gildas-de-Rhuys, Carnac).
– Des failles « orthogonales » recoupent les précé-
dentes selon des directions N40° à N50°. Elles
déterminent des alignements de vallons et de vallées
encaissés à partir du plateau de Guérande. Elles
tronçonnent le coteau de Guérande et décalent son
tracé par des décrochements. Elles déterminent sur-
tout celui des côtes situées aux extrémités du bloc de
Guérande. Elles se traduisent, ainsi, par une côte à
falaises remarquablement rectiligne de la pointe du
Castelli (Piriac) à la baie de Pont-Mahé (au Nord de
Pen-Bé), près de l’estuaire de la Vilaine, et par une
série de sections rocheuses en échelons entre l’em-
bouchure du Brivet (Méan) et la pointe de Chemou-
lin (Saint-Nazaire), près de l’estuaire de la Loire.
– Des failles « diagonales », de direction générale
N150° à N170°, recoupent l’ensemble du Pays gué-
randais. Les failles de ce genre, présentes dans tout
le Massif armoricain, sont également rangées parmi
les accidents d’origine hercynienne (Vigneresse,
1988 ; Wyns, 1991). Elles déterminent, aussi, des ali-
gnements de talwegs et de confluences sur les pla-
teaux. Elles s’expriment surtout par des décroche-
ments, qui décalent, en échelons, les failles de
direction armoricaine, notamment à l’emplacement
du coteau de Guérande et de la Grande Côte.
La dynamique des déformations
Les tectoniques post-orogéniques se sont majoritai-
rement exprimées à travers les réseaux de failles
préexistants, en raison de l’intensité de la fractura-
tion initiale du socle. Elles procèdent, en revanche,
de dynamiques propres, qui ont concerné l’ensem-
ble de la marge sud-armoricaine et qui ont suscité
plusieurs explications. La principale se rapporte à
l’ouverture du golfe de Gascogne au Crétacé moyen
et supérieur, associée à l’élargissement de l’océan
Atlantique aux mêmes latitudes. Le Sud du Massif
armoricain se rapporte ainsi à une marge passive où
s’expriment, en priorité, des formes de distension,
réalisées dans le cadre d’un relief de plates-formes.
Ces formes de distension s’expriment de trois façons
principales dans le Pays guérandais.
– La majorité des failles, notamment de celles qui s’ob-
servent le long des côtes rocheuses de Piriac à Saint-
Nazaire se rapportent à des failles normales, en dépit
de la présence de failles inverses de réajustement.
– Les vallons et vallées guidés par des failles ortho-
gonales ou diagonales comportent des élargisse-
ments locaux de forme géométrique, sans rapport
avec l’érosion fluviale. Ils se situent souvent à l’in-
tersection de failles de direction armoricaine et évo-
quent des fossés losangiques, en pull-apart, caracté-
ristiques de dynamiques distensives. Les plus
remarquables s’observent aux abords des marais du
Mès et de la Brière, où leurs formes sont soulignées
par des nappes alluviales.
– Les grands escarpements singuliers (Grande
Côte, coteau de Guérande, coteau d’Assérac et, au
loin, Sillon de Bretagne), procèdent de rejeux de
failles parallèles, associés au basculement de blocs
(plateaux du Croisic, de Guérande, d’Assérac-Her-
bignac), en même temps qu’à la subsidence des
dépressions qui les prolongent (Traict du Croisic,
marais du Mès, Brière). L’attribution du relief du
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
46
Pays guérandais et d’une partie de celui de la
Loire-Atlantique à des blocs basculés est un fait
déjà ancien. Néanmoins, le terme a pris une signi-
fication dynamique particulière dans le cadre de la
tectonique des plaques et des marges passives de
divergence. Il implique des contraintes distensives
à partir de grandes failles synthétiques qui jouent
en extension et qui entraînent le basculement de
blocs crustaux vers l’intérieur. Son application au
dispositif géomorphologique du Pays Guérandais
ne peut cependant se concevoir qu’en fonction du
relief continental et précontinental sud-armoricain
dans son ensemble. Elle impose de considérer les
multiples rangs de compartiments basculés, paral-
lèlement à la côte, entre la faille de Nort-sur-Erdre
et le rebord de la pente continentale, ainsi que les
dynamiques distensives propres à ce dernier (Guil-
cher, 1948 ; Pinot, 1974 ; Vanney, 1977 ; Boillot et
Coulon, 1998).
La chronologie des déformations responsables
des blocs basculés du Pays guérandais est vraisem-
blablement associée à celle de l’ouverture du golfe
de Gascogne, inaugurée à la fin du Secondaire ou au
début du Tertiaire, mais reste à préciser. Elle peut
s’appuyer sur l’âge et la répartition des sédiments
corrélatifs de la subsidence des dépressions qui ont
accompagné le basculement des blocs et le rejeu des
escarpements. Le marais du Croisic, qui prolonge le
plateau du Croisic, ne comprend pas de remplissage
pré-quaternaire connu. Le fond de la Brière, qui pro-
longe le plateau de Guérande, comporte, en revan-
che des dépôts éocènes (Lutétien), notamment à
l’Ouest de la Butte-aux-Pierres et au Bas-Bergon,
où ils atteindraient une quarantaine de mètres
d’épaisseur (Durand, 1960 ; Audren et al., 1975). La
disposition de ces dépôts est à mettre en relation
avec celle des sables de Savenay et des calcaires de
Campbon, également rapportés à la base de l’Eo-
cène, respectivement situés à la base du Sillon de
Bretagne et dans le bassin de Campbon, qui pro-
longe, pour sa part, le plateau du Temple. Quoi qu’il
en soit, la tectogenèse post-orogénique fut polypha-
sée, comme partout en Loire-Atlantique. Les rejeux
de failles, basculement de blocs et subsidence de
dépressions se sont accomplis par pulsations suc-
cessives pendant le Tertiaire. Ils se sont vraisembla-
blement prolongés pendant le Quaternaire, au moins
au Pléistocène ancien, comme le suggèrent les
déformations de niveaux d’aplanissement emboîtés
(Sellier, 1985 ; Vinet, 1988). L’édification du relief
du Pays guérandais s’est effectuée par séquences
tectoniques répétées, alternant avec des séquences
plus stables, pendant lesquelles l’érosion, continen-
tale, ou littorale, reprenait ses droits.
1-3. Un relief façonné par les processus d’érosion
continentale
Tout relief représente un bilan momentané entre deux
forces opposées : la tectogenèse, qui procède par
déformations du socle, en l’occurrence par disloca-
tion, rehaussement, basculement ou affaissement, et
la morphogenèse, qui résulte des processus de l’éro-
sion, passée ou actuelle. Le relief du pays de Gué-
rande témoigne, à l’évidence, d’une prépondérance
de la tectogenèse, ce qui fournit un premier argument
en faveur d’une relative jeunesse des rejeux tectoni-
ques responsables des volumes topographiques
actuels. Les effets de l’érosion n’y sont, cependant,
pas moins présents. L’érosion continentale tend à
l’approfondissement des vallées en fonction d’un
niveau de base qui est le plus souvent celui de la mer,
en l’occurrence très proche. Elle tend simultanément
au recul des versants, y compris des escarpements de
failles, et à l’atténuation de leur profil. Elle conduit,
finalement, à l’abaissement des interfluves, lorsque
prévalent des systèmes morphogéniques principale-
ment fondés sur l’écoulement concentré des eaux.
Tout dépend des climats et des processus d’érosion,
mécaniques ou chimiques, qu’ils déterminent.
Le ravinement du relief par l’encaissement des
réseaux hydrographiques
Les processus d’érosion les plus remarquables par
leurs effets actuels ou hérités tiennent à l’encaisse-
ment des réseaux hydrographiques à partir des pla-
teaux et des escarpements. Ces réseaux demeurent
adaptés aux reliefs engendrés par la tectonique de
blocs précitée, comme en témoignent trois de leurs
propriétés. Les lignes de partage des eaux côtoient
le sommet des grands escarpements (coteau de Gué-
rande, Grande Côte). Les bassins versants du Mès et
des marais du Croisic sont corrélativement dissymé-
triques (entre le coteau d’Assérac et celui de Gué-
rande, entre le coteau de Guérande et la Grande
Côte). Les cours d’eau du Pays guérandais ne pré-
sentent jamais de tracé épigénique (c’est-à-dire
recoupant des escarpements singuliers), contraire-
ment à celui du Brivet, qui franchit le Sillon de Bre-
tagne à Pontchâteau. L’encaissement des cours
d’eau répond aux rehaussements successifs des
blocs basculés par la tectogenèse. Il s’exprime par
des vallons, qui incisent le plateau de Guérande, ou
qui tronçonnent le coteau de Guérande, avant de se
perdre dans le marais du Croisic. Les premiers sont
rectilignes et peu ramifiés. Les seconds sont courts
et redressés. Tous demeurent finalement peu encais-
sés, en dépit de la proximité de la mer. Les proprié-
tés du ravinement du relief confirment, ainsi, la jeu-
nesse relative du rehaussement des blocs.
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 47
Les héritages des séquences d’altération du socle
Ils se traduisent par l’importance des altérites à l’af-
fleurement et sur les coupes. Ces formations meubles
résultent d’une transformation in situ des minéraux
constitutifs des roches par des processus, principale-
ment chimiques, déterminés par les agents atmosphé-
riques et par la circulation souterraine des eaux. Elles
présentent des épaisseurs et des degrés d’évolution
variables selon les sites et selon les roches. Les altéri-
tes du Pays guérandais, visibles le long de la plupart
des coupes en déblais, sont généralement épaisses de
plusieurs mètres. Elles sont en général argileuses sur
les micaschistes, sableuses sur les gneiss et sur les
granites (arènes). Les plus épaisses et les plus accom-
plies s’observent à la surface des plateaux. Elles pré-
sentent des propriétés communes à celles qui jalon-
nent les restes des surfaces d’aplanissement du
Massif armoricain (Estéoule-Choux, 1970). Elles
sont principalement héritées des séquences altérantes
du Tertiaire, sinon antérieures, mais ont été entrete-
nues au Quaternaire, en particulier lors des périodes
interglaciaires. Elles constituent des stocks de maté-
riaux meubles qui ont été remaniés par les processus
périglaciaires quaternaires.
Les héritages des séquences périglaciaires
Ils résultent, quant à eux, des phases froides quater-
naires qui ont provoqué l’englacement périodique
de la majeure partie de l’Europe du Nord et qui ont
ainsi placé le Massif armoricain dans des conditions
climatiques authentiquement périglaciaires. Les
processus périglaciaires, principalement mécani-
ques, résultent des actions du gel sur les formations
meubles et sur les roches les plus gélives, ainsi que
d’actions subordonnées de la neige ou du vent. Les
effets de la gélifraction sont difficiles à identifier sur
les granites, sur les gneiss et sur les micaschistes. La
géliturbation a connu des circonstances climatiques
appropriées dans la région, comme l’attestent, plus
au Nord, les grandes cryoinjections formées dans les
sédiments tertiaires de la Mine d’Or à Pénestin.
Néanmoins, elle s’exprime mal dans les altérites du
Pays guérandais, faute de contrastes de gélivité. La
gélifluxion demeure, en conséquence, l’héritage
périglaciaire le plus remarquable. Elle a contribué
au déplacement des matériaux meubles, en particu-
lier des altérites, le long des versants par mouve-
ments de masse. Elle s’est accompagnée du déca-
page de la partie supérieure de ces versants, où des
traces de fauchage témoignent de son action. Elle a
entraîné le dépôt corrélatif de matériaux hétéromé-
triques et mal triés, épais de quelques décimètres à
plusieurs mètres, dans leur section inférieure. Elle
se manifeste essentiellement à la base du coteau de
Guérande et contribue au colmatage des vallons,
sans présenter, toutefois, la même ampleur qu’au
Nord du Massif armoricain.
Les périodes froides quaternaires ont rendu les
actions du vent d’autant plus efficaces qu’elles se
trouvaient facilitées par l’indigence de la végétation.
La déflation des altérites à l’affleurement sur les
plateaux et au sommet de coteaux les plus exposés
s’est accompagnée de l’accumulation de limons
éoliens, minces et dispersés, dans les secteurs plus
abrités. La corrasion éolienne a provoqué, au pas-
sage, le façonnement de ventifacts, ou « cailloux
éolisés », par projection des limons. Ces cailloux, à
facettes et à surface lisse caractéristiques, sont géné-
ralement formés de quartz et se trouvent aujourd’hui
disséminés dans les champs, notamment le long du
coteau de Guérande et à ses abords (Vinet, 1988).
Localement remaniés par les coulées de gélifluxion,
ils témoignent des effets cumulés de séquences froi-
des et relativement sèches du Quaternaire, sans
signification chronologique plus précise.
L’atténuation progressive du relief
Les héritages conjugués des processus d’érosion
continentaux ont conduit à l’atténuation générale
des reliefs créés par la tectogenèse. Cette atténua-
tion s’exprime par des vallées et des vallons évasés,
par des versants convexo-concaves à grand rayon de
courbure, par des escarpements répondant aux défi-
nitions d’escarpements de failles atténués (par abais-
sement de leur inclinaison) ou d’escarpements de
failles hérités (par recul à partir des lignes de failles
initiales). Corrélativement, elle se traduit par le dépôt
de sédiments, principalement alluviaux, qui partici-
pent au remblaiement des dépressions (Brière, marais
du Mès et du Croisic). Il s’agit des « formations
superficielles » figurant sur les cartes géologiques.
De cette longue évolution, contraire à la tendance
au rehaussement pourtant entretenue par des rejeux
tectoniques périodiques, résulte un relief sans vigueur.
Le coteau de Guérande, qui barre l’horizon depuis la
presqu’île du Croisic, se distingue lui-même par sa
continuité et par sa rectitude plus que par son élévation
et par son profil, puisqu’il n’atteint qu’une soixantaine
de mètres d’altitude et une dizaine de degrés d’incli-
naison. Dans ces conditions, les reliefs ruiniformes
caractéristiques des granites sont les formes continen-
tales qui présentent le plus de contraste. Il s’agit de
rochers de granite enracinés et superposés, connus
sous le terme générique de tors, qui dépassent, ici, des
affleurements environnants de 3 à 10 m. Les plus
remarquables se rencontrent sur les lignes de partage
des eaux (tors de sommets) et sur le rebord des escar-
pements (tors de versants). C’est le cas le long de la
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
48
Grande Côte, entre Batz (Dilane) et la pointe du Croi-
sic (Vigie de la Romaine), mais aussi le long du coteau
de Guérande, en particulier à Saint-Armel, à Clis et à
Colveux. Au-delà, des coupoles, des rochers isolés, ou
de simples affleurements, strictement associés aux
granites, pointent dans les champs, sur le revers du
plateau du Croisic comme sur celui de Guérande,
jusqu’au Nord de Sandun (Le Crupien, Le Rohain).
Ces reliefs résultent de deux séries de processus. La
première, tertiaire ou interglaciaire, en tout cas sous
l’emprise de climats chauds ou tempérés et humides,
provoque l’arénisation des granites par altération chi-
mique souterraine ; cette altération se propage à partir
de la surface en suivant les diaclases qui parcourent la
roche et en isolant des volumes rocheux demeurés
sains. La seconde, déterminée par des climats froids
ou tempérés, provoque l’évacuation des arènes et le
dégagement correspondant de ces volumes rocheux
par une érosion mécanique superficielle (ruisselle-
ment des précipitations, gélifluxion ou déflation
éolienne). Les tors et les reliefs rocheux qui leur sont
associés représentent ainsi, à eux seuls, une synthèse
des séquences évolutives décrites antérieurement. Ils
supportent, à leur surface, des formes d’érosion
mineures, vasques ou cannelures, également caracté-
ristiques des granites, qui constituent l’une des mani-
festations de l’érosion actuelle.
La morphogenèse actuelle
Elle est lente, ce qui est caractéristique des systèmes
d’érosion des milieux tempérés océanisés. Elle n’est
cependant pas inopérante, comme en témoigne, en
fin de compte, la charge des cours d’eau et la péren-
nité du colmatage des marais. Elle s’exprime par la
météorisation, qui résulte des actions conjointes de
multiples processus mécaniques et chimiques, liés
aux précipitations et aux variations de températures,
ainsi qu’au ruissellement sur les sols et sur les for-
mations meubles. La première entraîne des phéno-
mènes de désagrégation et de décollement observa-
bles sur les affleurements rocheux, sur les tors, mais
aussi sur les monuments mégalithiques, voire sur
des monuments pluriséculaires (Sellier, 1998 ; Paris,
1998 ; Magré, 1999). Le second se traduit surtout
par des phénomènes de colluvionnement actifs,
caractérisés par des dépôts de limons en bas de ver-
sants. L’érosion continentale actuelle entretient
ainsi l’atténuation générale du relief. L’érosion litto-
rale s’emploie, au contraire, à le rajeunir, en fonc-
tion des variations eustatiques.
1-4. Des littoraux configurés par l’eustatisme quaternaire
Les variations considérables du niveau de la mer au
cours de l’ère quaternaire, en fonction des fluctuations
du climat, expliquent, finalement, les contours du
Pays de Guérande, ainsi qu’une partie des caractères
de son relief. Quelques sites côtiers présentent ainsi
des héritages eustatiques. Il s’agit en l’occurrence des
paléoreliefs littoraux perchés : platiers (Manéric, à
l’Est de Batz), grottes marines (pointe de Pierre Plate,
au Pouliguen) et encoches marines (rocher de l’Ours,
au Croisic), corrélatifs de niveaux marins supérieurs à
l’actuel. Il s’agit aussi de dépôts marins perchés, qui se
multiplient à l’approche du Mor Braz. Ainsi, des
niveaux de bri perchés, au moins éémiens, parce que
géliturbés, subsistent dans les Traicts de Pen-Bé, de
Merquel et de Rostu. Des vestiges de dépôts de plage
supérieurs au niveau marin actuel sont également
connus à l’île Dumet (Baudouin et al., 1988).
En périodes de régression, donc de bas niveau
marin, relatives à des séquences de refroidissement,
la mer se retire temporairement vers le large. Elle
découvre une large part de la plate-forme continen-
tale, jusqu’à des profondeurs proches de l’isobathe
100 m actuelle, voire inférieures, comme au cours du
Weichselien et des périodes glaciaires antérieures
(Pinot, 1974). Le Sillon de Bretagne, le coteau de
Guérande et la Grande Côte deviennent alors de sim-
ples escarpements continentaux. La Brière et les
marais du Croisic et du Mès sont exondés. Les cours
d’eau s’encaissent dans les plateaux et incisent la
plate-forme continentale actuelle. Les sols sont éven-
tuellement colonisés par une végétation de climat
froid. Les formations superficielles et les roches peu-
vent geler en permanence (pergélisol), à l’exception
de leur partie supérieure, qui dégèle en été (couche
active) et qui devient ainsi le siège des processus péri-
glaciaires. Ces processus s’exercent sur toutes les ter-
res exondées selon les modalités précitées (gélifrac-
tion des affleurements de roches dures, gélifluxion
des altérites sur les versants, géliturbation des forma-
tions superficielles sur les surfaces). La tendance est
donc partout à l’atténuation du relief continental.
En périodes de transgression, corrélatives de
séquences de réchauffement, comme pendant l’Holo-
cène, qui recouvre la dernière dizaine de milliers
d’années, ou comme pendant l’Eémien et les périodes
interglaciaires antérieures, la mer rejoint la base des
coteaux précités jusqu’à des niveaux proches du trait
de côte actuel, sinon un peu supérieurs. Elle recouvre
la majeure partie du plateau du Croisic et cerne épiso-
diquement son rebord méridional, comme à l’empla-
cement des anciennes îles du Croisic, de Batz et du
Poulignen au cours l’Holocène, ou des îles des Evens,
de Baguenaud et de Pierre-Percée actuellement. Les
processus d’érosion littorale entraînent l’attaque des
côtes rocheuses les plus exposées aux houles domi-
nantes et l’accumulation de sédiments sableux ou
vaseux aux endroits abrités. Les coteaux, comme la
Grande Côte et le coteau de Guérande, redeviennent
temporairement des falaises et se trouvent ainsi
redressés par les processus d’érosion littorale. Les
surfaces continentales les plus basses fonctionnent
comme des plates-formes d’abrasion littorales et cer-
tains volumes rocheux du genre tors deviennent ou
redeviennent des récifs. Les dépressions, comme la
Brière et a fortiori le marais du Croisic, sont tempo-
rairement immergées et connaissent des phases de
sédimentation d’origine marine qui remanient les
apports terrigènes antérieurs. Des stocks de sédi-
ments sableux remontent au gré des transgressions et
construisent des cordons littoraux et des flèches.
Les reliefs les plus proches du niveau de la mer
actuel, notamment la Grande Côte et le coteau de
Guérande, enregistrent ainsi les effets alternés des
agents d’érosion continentaux et marins (figure 5).
– Ainsi, lors de la dernière des remontées du niveau
de la mer (ou transgression flandrienne, principale-
ment accomplie au cours de l’Holocène), le coteau
de Guérande a pu fonctionner comme une falaise,
sinon comme une côte rocheuse, sur toute sa lon-
gueur, tandis qu’au large, les sites du Croisic, de
Batz et du Pouliguen formaient un alignement d’îles
rocheuses, protégeant une baie à double ouverture.
– Par la suite, ces trois îles ont connu un processus
de raccordement à partir de la base du coteau de
Guérande, par des isthmes sableux, ou tombolos,
qui correspondent à la plage de La Baule à l’Est et à
la flèche de Pen-Bron à l’Ouest. Ces isthmes, en fait
inachevés, déterminent ainsi une presqu’île à dou-
ble tombolo, à l’image de la presqu’île de Giens
(Allain, 1966 ; Chassé, 1972).
– L’espace compris à l’intérieur de la presqu’île
guérandaise (marais du Croisic) a été colmaté par
des sédiments marins et par des alluvions ; il demeure
soumis à la marée (Grand Traict et Petit Traict) et
forme ainsi un marais maritime (Pinot, 1978, 1998).
– Dans le même temps, les secteurs littoraux les plus
exposés ont fonctionné comme des côtes rocheuses.
Les processus d’érosion littorale consécutifs à la
transgression flandrienne ont raidi les escarpements
de failles en les faisant reculer. Ils ont rajeuni les
versants atténués par l’érosion continentale, en tron-
quant leurs profils convexo-concaves initiaux. Ils
ont ainsi retaillé l’ensemble en falaises, à partir de la
base, mais à des degrés divers, en accentuant la
diversité morphologique des reliefs littoraux, mais
en réactivant aussi, par endroits, des falaises et des
estrans rocheux hérités de transgressions antérieures.
En conséquence, le Pays de Guérande présente une
série complète de types de côtes sur un linéaire rela-
tivement restreint (une soixantaine de kilomètres
entre la pointe de Merquel, près de Mesquer, et Ville-
es-Martin, près de Saint-Nazaire) : côtes d’érosion,
en mode battu (côtes rocheuses convexes et côtes à
falaises, accores ou à estran rocheux et récifs), côtes
d’accumulation, en mode abrité (plages sableuses à
cordons dunaires, marais maritimes à slikkes et à
schorres), estuaires (embouchures du Mès et de la
Loire). Ces côtes sont soumises aux processus d’abla-
tion, de transport et de dépôt propres à l’érosion lit-
torale, en fonction de leur exposition aux houles et
aux courants, de la configuration du relief conti-
nental et sous-marin, mais aussi des propriétés des
roches présentes sur le trait de côte. Les reliefs les
plus proches du niveau de la mer sont ceux qui
subissent les actions morphogéniques les plus éner-
giques au sein du système d’érosion en vigueur dans
le Pays guérandais. Ils sont directement soumis aux
Figure 5 : stades de
l’évolution des marais
du Croisic et du Pays
de Guérande au cours
de l’Holocène (d’après
Allain, 1966 ; Chassé,
1972 ; Pinot, 1978)
actions dynamiques des marées et des vagues. Ils
connaissent également une action renforcée de la
météorisation et du ruissellement d’origine conti-
nentale, mais aussi les effets supplémentaires de la
déflation éolienne, de l’haloclastie et d’une érosion
anthropique qui compte, par endroits, parmi les
principaux facteurs de la transformation des pay-
sages. Il reste à noter que la côte du Pays guérandais
demeure moins découpée que celle de certains sec-
teurs du Massif armoricain, notamment dans le
Finistère et les Côtes-d’Armor, parce que l’armature
tectonique, en l’occurrence les lignes de failles et les
blocs basculés, demeure ici particulièrement déter-
minante. Elle appartient ainsi aux côtes à structure
longitudinale qui caractérisent le Sud du Massif
armoricain entre Quiberon et Noirmoutier (Guil-
cher, 1954).
2. Les éléments majeurs
du relief du Pays de Guérande
Deux d’entre eux sont structuraux et dépendent de la
tectonique de blocs qui a créé les principaux volu-
mes topographiques : coteau et plateau de Gué-
rande, Grande côte et plateau du Croisic. Les deux
autres sont littoraux et se rapportent à des formes
d’accumulation : isthmes de Pen-Bron et de La
Baule, marais du Croisic (figure 2).
2-1. Le coteau de Guérande et le plateau de Guérande
Le coteau de Guérande
Il constitue l’élément dominant du Pays guérandais
(61 m à l’Est de Guérande) en même temps que l’un
des principaux reliefs de la Loire-Atlantique, qui,
par ailleurs, dépasse rarement 100 m d’altitude. Il
correspond à un escarpement singulier de tracé rec-
tiligne et de regard sud-ouest. Cet escarpement
s’étend sur 26 km entre deux caps remarquables,
dotés chacun d’un sémaphore : la pointe de Che-
moulin, près de Saint-Nazaire, et celle du Castelli, à
Piriac. Il se poursuit, au-delà, en direction de l’île
Dumet, suivant une direction armoricaine (Dresch,
1964 ; Baudouin et al., 1988). Il est principalement
constitué de granites, entre Piriac et Escoublac (gra-
nites de Guérande), et de gneiss associés à des gra-
nites, entre Escoublac et Saint-Nazaire (gneiss
migmatitiques de Saint-Nazaire), sans contraste
morphologique remarquable. Les influences tecto-
niques s’avèrent, au contraire, largement prépondé-
rantes. Elles s’expriment par le tracé général de l’es-
carpement, qui provient, manifestement, des rejeux
répétés d’une faille hercynienne. Elles s’expriment,
ensuite, par les décalages successifs de cet escarpe-
ment sous l’effet des décrochements de directions
orthogonale ou diagonale, dont les principaux passent
par La Turballe, Escoublac et Pornichet (figure 4b).
Le coteau de Guérande est la réplique du Sillon
de Bretagne, en plus réduit. Il correspond à un escar-
pement de faille atténué par ablation à son sommet,
comme en témoigne le déchaussement des reliefs
rocheux granitiques qui le jalonnent, et atténué par
comblement à sa base, sous les effets de dépôts ter-
rigènes et marins. Il comprend néanmoins trois sec-
tions dans son état actuel.
La plus proche de l’embouchure de la Loire cor-
respond à une côte rocheuse fonctionnelle, rectili-
gne sur plus de quatre kilomètres entre la pointe de
Chemoulin et celle du Bec (Pornichet). Elle se com-
pose de gneiss de Saint-Nazaire, recoupés par des
pegmatites et des amphibolites. Elle conserve, néan-
moins, un tracé régulier. Elle présente une succes-
sion de plages adossées à des falaises de gneiss, pré-
cédées de platiers rocheux, qui se redressent vers
l’Est et qui dépassent localement 25 m d’élévation
(Sainte-Marguerite). Elle conserve des dunes en
partie perchées, jusqu’à 36 m d’altitude (La Torpille
au Nord de la pointe de Chemoulin). Elle répond à
la définition d’une faille-falaise.
La section située à l’opposé, entre la pointe du
Castelli et La Turballe, correspond, elle aussi, à une
côte rocheuse fonctionnelle et à une faille-falaise,
plus basse et plus disséquée. Elle comprend des
micaschistes et des quartzites entre la pointe du Cas-
telli et celle du Bichet à Piriac. Elle comprend sur-
tout des granites, qui forment des falaises basses et
des platiers rocheux. Les falaises sont entrecoupées
d’anses à plages sableuses (Lérat, Belmont) et sont
recouvertes, par endroits, de dunes perchées. Les
platiers rocheux sont surmontés de reliefs résiduels,
comme le tombeau d’Almanzor à Piriac, qui ont pu
alternativement fonctionner comme des tors et
comme des récifs, au gré des fluctuations climati-
ques et eustatiques.
La section qui occupe le centre de l’escarpement
correspond au coteau de Guérande sensu stricto et
domine actuellement les marais du Croisic. Cette
section est la plus régulière par son tracé, par son
élévation et par son profil. Elle peut être rapportée à
une paléofalaise, dont la base a été atteinte par la
mer au cours des transgressions interglaciaires,
éventuellement au cours du Flandrien, mais le long
de laquelle les marques de l’érosion marine ne se
reconnaissent plus. Le coteau de Guérande présente
actuellement des profils à longue convexité sommi-
tale, associée au décapage des arènes et à la mise en
relief de grands rochers granitiques ruiniformes. Il
se poursuit, à sa base, par une concavité basale
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 51
allongée, qui provient des dépôts corrélatifs de la
solifluxion ou du colluvionnement et qui passe à des
glacis d’accumulation (Congor, Saillé, Careil). Il est
segmenté par des vallons courts et encaissés, qui
prennent naissance aux abords du sommet du coteau
et qui débouchent sur les marais du Croisic. Ces val-
lons, rectilignes et parallèles, proviennent vraisem-
blablement de l’exploitation de lignes de failles
orthogonales et de zones de broyage par l’érosion
différentielle. Ils sont actuellement asséchés, ou par-
courus de ruisseaux à écoulement temporaire et sont
donc hérités de séquences plus humides. Ils présen-
tent des profils transversaux arrondis et des fonds
colmatés par des dépôts de gélifluxion ; ils ont donc
été partiellement élaborés par des processus périgla-
ciaires au cours de périodes froides quaternaires.
Cette partie du coteau de Guérande représente donc
un ancien escarpement de faille, alternativement
transformé en falaise par l’érosion littorale et en
grand versant atténué par l’érosion continentale. Il
délimite le plateau de Guérande, incliné vers le Mès
et la Brière.
Le plateau de Guérande et les dépressions adjacentes
Le plateau de Guérande doit ses contours rectangu-
laires au tracé de failles rectilignes de direction
armoricaine (N125°) au Sud-Ouest (coteau de Gué-
rande), ou de direction orthogonale (N45°) au Nord-
Ouest (côte rocheuse de Piriac au Traict de Pen-Bé)
et au Sud-Est (embouchure de la Loire). Il doit sa
forme de revers au basculement du bloc délimité par
ces failles. Son inclinaison vers le Nord-Est, percep-
tible dans le paysage en suivant la route de Pompas
à Guérande, est voisine de 1 %. Elle explique le déport
des lignes de partage des eaux des affluents du Mès
et de la Brière, qui ne s’écartent jamais de plus de
3 km du sommet du coteau de Guérande.
Le plateau, peu disséqué dans son ensemble, se
subdivise en deux parties séparées par la ligne Le
Pouliguen-Saint-Lyphard. La partie occidentale est la
plus large (10 km). Elle culmine près du coteau et dis-
paraît, au Nord, sous les sédiments des marais du
Mès. Son profil est accidenté par deux niveaux d’éro-
sion étagés, l’un vers 50-60 m d’altitude, l’autre vers
20-30 m, façonnés en réaction à des rehaussements
successifs (Vinet, 1988). Sa surface est parcourue de
cours d’eau de tracé sud ouest-nord est, évidemment
guidés par des failles orthogonales. La partie orien-
tale est plus étroite (moins de 5 km). Elle culmine
vers 50 m et s’abaisse rapidement sous la Brière. Son
profil est irrégulier en raison d’un quadrillage par des
failles de directions armoricaine et orthogonale. Sa
surface est ravinée par des vallons ramifiés. La dua-
lité morphologique du plateau se reproduit à travers
celle des dépressions qui le prolongent et des côtes
qui le bordent. Le coteau et le plateau de Guérande
sont en effet indissociables du bassin du Mès et de la
Brière par leur relief et leur genèse.
La partie occidentale du revers de Guérande dis-
paraît sous les marais du Mès. Ces marais s’étirent
sur une douzaine de kilomètres entre la pointe de
Pen-Bé et le seuil de Saint-Lyphard. Ils compren-
nent trois parties principales. En amont, entre
Arbourg et Pont d’Arm, ils sont occupés par des pré-
marais et par des roselières, qui demeurent en partie
inondables par des eaux saumâtres et qui se poursui-
vent à travers les affluents du bassin du Mès (marais
de Pompas). Au centre, entre Pont d’Arm et Mes-
quer, ils sont aménagés en salines, qui ont gagné les
golfes formés à l’aval des affluents de rive gauche.
L’embouchure, large de plus de 2 km, est occupée
par des vasières soumises aux marées (Traicts de
Pen-Bé, de Rostu, de Merquel) ; elle est ourlée de
cordons littoraux perchés, éémiens ou antérieurs,
localement retaillés en microfalaises par le niveau
de la mer actuel, notamment à l’île de Rostu
(Audren et al., 1975).
Les marais du Mès présentent ainsi trois sortes de
paysages qui tiennent successivement de ceux de la
Brière, des marais salants du Croisic et du Traict du
Croisic. La dépression qu’ils occupent correspond en
premier lieu à un angle de faille entre le revers de
Guérande et le coteau d’Assérac. Elle a aussi fonc-
tionné comme une vallée fluviale, dont le lit rocheux
se trouve à une douzaine de mètres de profondeur à
Pont d’Arm (au centre) et vers -23 m sous le niveau
moyen des mers (0 NGF) dans la saline de la Torte (en
aval), d’après les sondages enregistrés par le Service
géologique Régional (BRGM, Nantes). Sa configura-
tion ne dénote aucune communication récente avec
le bassin briéron, en dépit de l’étroitesse (1 km) et de
la faible altitude (8 m) du seuil de Saint-Lyphard.
Elle a également fonctionné comme une ria, à cha-
que transgression, notamment au cours du Flandrien.
Elle présente actuellement des caractères estuariens
(Maillard, 1975). Cette dépression illustre, à son
tour, les effets successifs de séquences de tectonique
active (subsidence), de morphogenèse continentale
(incision fluviale) et de morphogenèse littorale (sub-
mersion et colmatage). Elle évolue sous le double
effet des marées à partir de l’aval et de la sédimenta-
tion continentale à partir de l’amont. Elle représente,
ainsi, un ensemble de marais complémentaires qui
tient à une communication directe avec la mer, sans
système de vannage, à la différence de tous les
marais de la côte atlantique situés entre la Vilaine et
la Gironde, comme l’a souligné Y. Maillard.
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
52
La partie orientale du revers de Guérande disparaît
pour sa part sous les marais briérons, qui constituent
une entité géographique différente du pays de Gué-
rande et une zone humide plus étendue que les marais
du Mès, mais qui s’inscrivent dans un environnement
et une évolution analogues. La Brière est une dépres-
sion tectonique, dont la subsidence a été solidaire du
basculement du plateau de Guérande et du rejeu du
coteau de Guérande à partir du début du Tertiaire,
comme l’indiquent les sédiments éocènes qu’elle
conserve (Barbaroux, 1972 ; Audren et al., 1975).
Son fond s’incline vers le Nord-Est, à en juger
par le plongement du revers de Guérande et par la
localisation des dépôts éocènes les plus épais. Il est
fracturé dans le détail par des failles diagonales,
ainsi que le suggèrent l’affleurement de socle de la
Butte-aux-Pierres et l’alignement des îles de Mayun
à Montoir. Il a été raviné, en période de régressions
marines, par un réseau de vallées ramifiées, encais-
sées de 23 m au centre à plus de 30 m en aval (Ott-
mann et al., 1968 ; Barbaroux, 1972). Il a été immergé,
lors des transgressions, qui ont alors transformé les
paléovallées en rias composées et les interfluves en
îles, sur le modèle du golfe du Morbihan actuel.
Ainsi, au cours de la transgression flandrienne,
accomplie depuis environ 10 000 ans, la Brière a
d’abord subi une invasion par des eaux marines,
assortie du comblement des paléovallées par des
argiles. A la suite d’une régression momentanée,
elle a connu une inondation par des eaux douces
associée à des dépôts de tourbe, puis une dernière
incursion d’eaux saumâtres (Visset, 1990). La Brière
ressemblerait actuellement aux marais du Mès sans
les vannages établis au XIXesiècle pour contrôler
l’inondation par les eaux douces du Brivet et la péné-
tration des eaux salées par l’estuaire de la Loire.
Les paysages briérons ont donc évolué au cours
du Flandrien en fonction de fluctuations eustatiques,
reconstituées par la palynologie, mais aussi en rela-
tion avec l’édification temporaire de cordons litto-
raux entre la dépression briéronne et l’estuaire de la
Loire (Barbaroux, 1972 ; Visset, 1990). Le tracé de
la rive nord de la Loire en aval de Donges, sa suré-
lévation (4 m), par rapport au marais briéron (1 m),
et ses propriétés sédimentologiques, révélées par
sondages, indiquent l’existence d’un cordon entre
Montoir et Méan, en fait entre l’extrémité du plateau
de Guérande et les buttes rocheuses qui le prolon-
gent au Nord de l’estuaire (Penhoët, Trignac, Gron)
(figure 5). La configuration des côtes et des dépôts
littoraux, actuels ou anciens, suggère la formation
temporaire d’un second cordon au cours de la trans-
gression flandrienne de l’autre côté du plateau de
Guérande, entre Quimiac et la pointe du Bile. Dans
cette hypothèse, le bloc de Guérande se serait trouvé
momentanément relié aux blocs plus septentrionaux
(Assérac, Donges) par deux cordons littoraux symé-
triques (Méan, Pont Mahé ?), comparables à ceux
qui unissent actuellement le bloc du Croisic au bloc
de Guérande (La Baule, Pen-Bron).
La côte située à l’Ouest du plateau de Guérande, ali-
gnée sur des failles orthogonales d’une rectitude par-
faite de Piriac à Pen-Bé, comprend des falaises de
micaschistes, dont les altitudes, d’une quinzaine de
mètres au maximum, décroissent vers le Nord-Est,
en même temps que les platiers rocheux qui les pré-
cèdent se rétrécissent et que les plages qui les échan-
crent se multiplient. Elle s’interrompt à l’embouchure
du Mès (pointe de Merquel). La côte située à l’Est du
plateau de Guérande, caractérisée par des failles
orthogonales en relais de Chemoulin à Saint-Nazaire,
comprend des falaises entrecoupées de criques, dont
les altitudes, parfois supérieures à 25 m, décroissent
du Sud-Ouest vers le Nord-Est. Cette côte participe à
l’encadrement de l’embouchure de la Loire, où le lit
rocheux se trouve vers -52 m (entre Saint-Nazaire et
Mindin), où les nappes alluviales alimentent un delta
sous-marin et où la dynamique estuarienne entretient
des chenaux de flot et de jusant (Ottmann et al.,
1968 ; Pinot, 1998).
2-2. La Grande Côte et le plateau du Croisic
Ils reproduisent les reliefs précédents à des dimen-
sions inférieures. La Grande Côte s’aligne sur un
escarpement de faille rectiligne, parallèle au coteau
de Guérande, entre la pointe du Croisic et celle de
Penchâteau. A l’image du coteau de Guérande, elle
est constituée de granite de Guérande à l’Ouest
(ancienne île du Croisic) et de gneiss migmatitiques
à l’Est (anciennes îles de Batz et du Pouliguen). Il
s’agit d’une côte rocheuse, exposée aux houles domi-
nantes d’Ouest et de Sud-Ouest. La Grande Côte est
un nouvel exemple de faille-falaise, dont la morpho-
logie intègre trois éléments fondamentaux, corréla-
tifs de trois types de séquences d’élaboration répéti-
tives.
– La Grande Côte provient avant tout d’un escarpe-
ment de faille aligné sur un faisceau de failles her-
cyniennes qui a rejoué à plusieurs reprises depuis le
début du Tertiaire, mais qui a enregistré les effets
alternatifs de processus d’érosion continentaux et
littoraux. Ainsi, l’escarpement qui détermine les
falaises actuelles peut être « hérité » (c’est-à-dire en
retrait par rapport à des lignes de failles parallèles au
présent trait de côte, mais plus au large). À moindre
échelle, les décrochements diagonaux s’expriment
par les décalages de la côte, notamment entre les
anciennes îles du Croisic, de Batz et du Pouliguen
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 53
(baies de la Barrière et de la Govelle), par le décou-
page des reliefs littoraux (caps et criques), ou par la
fracturation des affleurements rocheux (Pierre-
Plate, au Pouliguen).
– D’un autre point de vue, la Grande Côte s’inscrit,
dans son ensemble, à l’intérieur d’un grand versant
de profil convexe. Cette enveloppe convexe procède
de séquences d’évolution morphogénique continen-
tale, accomplies en périodes de régressions quater-
naires (glaciaires) et éventuellement préquaternai-
res, pendant lesquelles ont prévalu les actions de
processus d’érosion mécaniques (ruissellement,
mouvements de masse, exhumation des tors), ou
chimiques (altération superficielle, crypto-altération
différentielle du granite). Ces processus ont conduit
à l’usure du versant, à la convexité de son profil et
au dégagement d’affleurements, rochers ruinifor-
mes et tors sommitaux, caractéristiques des grani-
tes, comme à la Vigie de la Romaine (Le Croisic).
Le profil de ce versant convexe reproduit, en plus
réduit, celui du coteau de Guérande (escarpement de
faille atténué par ablation). Ses formations corréla-
tives (arènes, paléosols, coulées de gélifluxion),
s’observent en divers endroits, notamment à la Vigie
de la Romaine. Ce profil convexe, d’origine conti-
nentale, est diversement conservé dans le paysage
littoral actuel. Il peut être préservé en totalité,
jusqu’au niveau de la mer, sous forme de côtes
rocheuses convexes accores, sans marque d’érosion
littorale majeure, comme c’est le cas à Batz-sur-Mer
et au Pouliguen, notamment à Pierre-Plate. Il est
plus souvent recoupé par une falaise à partir de sa
base et ne subsiste plus, en l’occurrence, que sous la
forme d’une convexité sommitale résiduelle, éven-
tuellement surmontée de tors, comme au rocher de
l’Ours, au Croisic.
– La Grande Côte demeure, en effet, principalement
caractérisée par ses falaises qui correspondent, pour
leur part, à des versants verticaux associés à des pla-
tiers rocheux (ou plates-formes d’abrasion marine).
Ces falaises et ces platiers procèdent de séquences
d’évolution morphogéniques littorales, accomplies
en périodes de transgressions quaternaires (intergla-
ciaires), qui autorisent l’action directe des processus
marins (choc des vagues, projection de fragments)
et de processus subordonnés (érosion biologique,
haloclastie, déflation et corrasion éoliennes). Ces
falaises, rectilignes dans leur ensemble, sont en fait
de formes variées, en coupe comme en plan. Elles
culminent à une vingtaine de mètres en plusieurs
points. Elles sont fonctionnelles et, dans ce cas, atta-
quées à la base par des encoches, ou stables, et alors
précédées de cordons de gros galets, qui ne sont
mobilisés que lors des tempêtes. Elles portent, dans
tous les cas, les effets des actions mécaniques du sel
(alvéoles, taffonis), d’une météorisation d’origine
continentale et d’un ravinement par les précipita-
tions ou par la nappe phréatique à partir du sommet.
Les platiers, de forme générale plane, sont acciden-
tés de multiples microreliefs : vasques, marmites de
géants et couloirs, souvent guidés par des diaclases
et par des lignes de failles, mais aussi récifs et
rochers résiduels, qui témoignent du recul de la
falaise. Ils sont masqués par des plages à l’amont,
dans les secteurs abrités.
Le relief de la Grande Côte enregistre ainsi les résul-
tats des trois types de séquences précitées caracté-
risées par autant de tendances antagonistes (figure 6) :
tectogéniques (qui ont épisodiquement rehaussé le
rebord du plateau du Croisic sous forme d’un escar-
pement de faille), morphogéniques continentales
(qui ont atténué cet escarpement de faille initial en
le transformant en versant convexe), morphogéni-
ques littorales (qui ont périodiquement réentaillé ce
versant convexe, en façonnant des falaises et des
platiers rocheux). Par son profil et par son tracé,
chaque secteur de la Grande Côte représente donc
un bilan local de ces antagonismes. Il enregistre
aussi les influences de la structure, qui a réglé la
portée des séquences et des tendances précitées. De
ce fait, la Grande Côte peut être partagée en deux
ensembles principaux.
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
54
Figure 6 : stades de l'évolution des grands versants du Pays de Guérande
– Au Sud du Croisic, les granites de Guérande for-
ment un substratum dur et homogène, par consé-
quent cassant, spécialement propice à l’influence de
la tectostatique, notamment à l’exploitation de
grands plans de failles verticaux par l’érosion diffé-
rentielle. Ils produisent donc des falaises escarpées,
à pinacles (comme au rocher de l’Ours), entrecou-
pées de criques à couloirs et à grottes. Ces falaises
sont parfois précédées de platiers rocheux à écueils,
alignés sur des caps, qui peuvent dériver, là aussi,
d’anciens tors, au gré des alternances de séquences
d’érosion continentale et d’érosion marine.
– Au Sud de Batz et du Pouliguen, les gneiss migma-
titiques sont par nature hétérogènes, ce qui privilégie
la lithodépendance, c’est-à-dire l’exploitation des
contrastes de résistance des roches par l’érosion diffé-
rentielle. Elles produisent des côtes rocheuses de tracé
et de profils irréguliers, à criques et à grottes multiples,
de dimensions inégales, dont certaines comportent de
remarquables évents, ou trous de souffleur (comme à
Pierre-Plate). Elles entravent la formation des platiers
et garantissent, en contrepartie, la préservation des
profils convexes de certains secteurs littoraux.
En divers points, le relief littoral enregistre des
modifications d’origine anthropique irréversibles.
Des carrières littorales ont été ouvertes sur les pla-
tiers rocheux ou sur les sommets de falaises, comme
à Dilane, à l’Est de Batz, ou à Fort Hikéric à la
pointe du Croisic. Le surpiétinement touristique a
aggravé le ravinement dans les secteurs arénisés.
En avant de la faille-falaise qui détermine la Grande
Côte, existent vraisemblablement d’autres failles de
direction armoricaine, décalées par des failles dia-
gonales décrochantes, comme le suggèrent les cartes
marines et les images satellitaires. Une série de
bancs et de basses, parallèles ou alignés, évoquent
effectivement l’existence d’un ou de plusieurs blocs
basculés et actuellement immergés en avant du pla-
teau du Croisic. C’est, notamment le cas de l’axe
basse Hikéric, basse Lovre, basse Noire, situé à un
kilomètre au large de la Grande Côte et éventuelle-
ment prolongé par les îlots de Pierre-Percée et du
Grand Charpentier. Au-delà, par des fonds de 10 à
20 m, s’étend le chenal du Nord, toujours parallèle à
la côte, puis le banc de Guérande, à une dizaine de
kilomètres au large. Ce dernier correspond à une
couverture monoclinale de calcaires éocènes (Luté-
tien), à pendage vers le Sud-Ouest, discordant sur le
socle cristallin environnant. Il forme ainsi une
cuesta à regard nord-est, précédée de buttes-témoins
(plateaux sous-marins du Four et de La Banche), qui
découvrent, pour leur part, à marée basse (Pinot,
1974 ; Vanney, 1977).
En arrière de la Grande Côte, le plateau du Croisic
s’étend sur une dizaine de kilomètres de la pointe du
Croisic à celle de Penchâteau. Sa surface, remarqua-
blement plane, recoupe indistinctement les granites
du Croisic et les gneiss de Saint-Nazaire. Elle repré-
sente un élément fracturé de la pénéplaine de
l’Ouest de la France, comme celle du plateau de
Guérande. Elle enregistre les effets des tectogenèses
cassantes tertiaires à plusieurs niveaux d’échelle.
Le plateau du Croisic témoigne d’abord d’une
dissymétrie transversale fondamentale, entre la
Grande Côte où il culmine à plus de 22 m, mais où
il domine des fonds sous-marins immédiatement
inférieurs à 10 m, et les marais du Croisic, sous lequel
il disparaît progressivement. Il s’incline donc, en
premier lieu vers le Nord-Est, à partir d’une ligne de
partage des eaux fortement déportée vers le Sud et
d’altitudes régulières (21 m au Sud du Croisic,
23 m à Batz, 23 m au Sud-Ouest du Pouliguen).
Cette inclinaison entraîne un drainage dissymétri-
que, comme sur le plateau de Guérande. Elle s’ob-
serve en suivant la route côtière depuis la Vigie de la
Romaine (où se dressent des falaises d’une ving-
taine de mètres), vers Port-aux-Rocs (où ne subsis-
tent que des falaises inférieures à 10 m), puis vers la
baie de Saint-Goustan, à l’Ouest du Croisic (où ne
demeure plus qu’un platier rocheux de largeur crois-
sante vers le Nord, qui recoupe finalement la péné-
plaine de l’Ouest de la France) (Pinot, 1998). Dans
son état actuel, le plateau du Croisic ne représente
donc plus que la partie émergée du bloc du Croisic,
dont la surface est basculée vers le Nord-Est et
déformée, dans le détail, par des gauchissements et
par des failles, longitudinales ou orthogonales.
Le plateau du Croisic témoigne ensuite d’un
plongement longitudinal d’origine tectonique vers
la baie de La Baule, comme celui du plateau de Gué-
rande vers l’estuaire de la Loire. Il se réduit alors à
une ride rocheuse sous-marine et n’émerge plus que
par points sous la forme d’un alignement de basses,
récifs et îlots rocheux (la basse Martineau, les Gué-
randaises, les Evens, les Troves, Baguenaud, Pierre-
Percée, le Petit Charpentier, le Grand Charpentier),
parfois assortis de constructions sableuses, comme
la queue de comète des Evens.
Le plateau du Croisic témoigne enfin de décro-
chements diagonaux dextres, qui le subdivisent en
trois éléments principaux, réduits à l’état d’îles en
périodes de transgressions (Le Croisic, Batz, Le
Pouliguen), actuellement reliés entre eux par des
isthmes (baies de la Barrière et de la Govelle). Ces
isthmes sont constitués de cordons sableux flan-
driens, qui ont d’abord barré des marais littoraux, au
fond desquels se sont formés des dépôts tourbeux
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 55
qu’ils dépassent actuellement (Chassé, 1972 ; Has-
senforder et al., 1973). Ces isthmes sableux, à estran
étroit, s’accompagnent de dunes littorales, qui sur-
montent le socle jusqu’au marais du Croisic et qui
s’étirent vers le Nord-Est sous l’effet des vents
dominants (champs de dunes de Valentin et de La
Govelle). Vers le Nord, au contact avec le marais du
Croisic, le plateau dessine des festons qui témoi-
gnent de l’irrégularité transversale de son revers
(Kervalet, Trégaté, Roffiat), avant de se réduire à des
îlots granitiques isolés (platins), tels que ceux
d’Enez Veur, de Lesvanal et de Lesvren, et de dispa-
raître sous les sédiments du marais maritime (Buron,
1987). Selon ce dispositif, le marais du Croisic et la
baie de La Baule, qui le prolonge, correspondent
au modèle des « baies tectoniques » définies par
J.-R. Vanney (2002).
2-3. Les isthmes de Pen-Bron et de La Baule
Ils sont de forme arquée et de longueur comparable
(6,5 km pour celui de Pen-Bron, 8 km pour celui de
La Baule), mais de directions convergentes (nord-
sud pour le premier, est-ouest pour le second). Ils
sont distants d’une dizaine de kilomètres à leur
racine, le long du coteau de Guérande, mais de moins
de 7 km à leur extrémité (goulet du Croisic, étier du
Pouliguen). Ils composent, ainsi, un exemple de
tombolo double inachevé, construit à l’arrière d’un
ensemble insulaire parallèle à la côte (anciennes îles
du Croisic-Batz-Le Pouliguen).
Les isthmes de Pen-Bron et de La Baule, évi-
demment formés au cours de l’Holocène, mais d’âge
imprécis, résultent de l’accumulation de sables de
différentes origines, issus de la plate-forme conti-
nentale, de l’estuaire de la Loire et de la baie de la
Vilaine (Pinot, 1971). Ceux qui se trouvaient sur le
précontinent pendant la dernière glaciation ont pro-
gressivement remonté, par déflation éolienne, en
construisant des cordons et des dépôts sableux qui
ont précédé le trait de côte pendant la transgression
flandrienne. Ainsi, des sables ont initialement formé
deux cordons littoraux à l’abri des îles du Croisic-
Batz-Le Pouliguen, sous l’effet des houles prove-
nant de l’Ouest (cordon de Pen-Bron) et du Sud-Est
(cordon de La Baule).
– Ces cordons ont ensuite constitué des flèches litto-
rales, par dérive littorale. Ces flèches sont ancrées au
pied de l’ancienne falaise de Guérande, à La Turballe
(flèche de Pen-Bron) et à Pornichet (flèche de La
Baule). Elles ont d’abord constitué des flèches à
pointes libres, comme dans la plupart des cas de tom-
bolos doubles de mers à marée (Pinot, 1971). Elles
ont ainsi préservé des entrées maritimes naturelles
vers les marais (goulet du Croisic, étier du Pouli-
guen). Elles comprennent, par ailleurs, de longues
plages de sable, dont le remaniement par le vent a
produit des cordons de dunes vers l’intérieur ; celui
de Pen-Bron est improprement appelé Grande Falaise,
alors que celui de La Baule tirerait son nom des accu-
mulations sableuses qui le constituent (Guériff,
1969). Les massifs dunaires ainsi élaborés sont les
plus étendus de Loire-Atlantique (Moign, 1969).
– Ces anciennes flèches évoluent comme des cor-
dons littoraux sableux, accrochés à chacune de leurs
extrémités, depuis la création artificielle des môles
rocheux conçus pour entretenir des passes naviga-
bles et des accès d’eaux salées au Croisic et au Pou-
liguen (Pinot, 1998).
Les isthmes de Pen-Bron et de La Baule présentent
cependant des différences morphologiques qui tien-
nent à leur environnement et à leur exposition, donc
à des dynamiques propres.
– La flèche de Pen-Bron, à long rayon de courbure,
devance de plus d’un kilomètre l’ancienne flèche de
Lancly, actuellement entourée par les marais salants,
à l’emplacement d’un trait de côte plus ancien (Pinot,
1998). La plage de Pen-Bron, exposée aux vents
dominants d’Ouest, demeure étroite. Partiellement
protégée des vents de Sud-Ouest, mais directement
soumise à ceux de Nord-Ouest, elle se caractérise
par un élargissement de l’estran et par une diminu-
tion granulométrique des dépôts sableux vers le
Sud, en fonction d’une dérive littorale dans cette
direction. Elle se termine par un épi qui résulte de la
rencontre de cette dérive littorale avec le courant de
jusant provenant du Traict du Croisic. Les dunes,
initialement construites par déflation du haut de
plage, mais actuellement stabilisées et soumises à
un recul basal, continuent de former un cordon
continu. Les dépôts éoliens ne s’élargissent qu’au
centre, à l’Ouest de Lancly (La Grande Falaise), où
ils atteignent 12 m d’altitude.
– La flèche de La Baule est protégée des vents
d’Ouest par la pointe de Penchâteau. Cette situation
d’abri explique l’existence d’une plage plus large
qu’à Pen-Bron. La baie de la Baule est cependant
soumise à des courants de marée, qui s’écoulent
d’Est en Ouest, au flot ainsi qu’au jusant (Chassé,
1972). Cette dynamique explique une tendance au
démaigrissement du côté de Pornichet (où la largeur
de l’estran est d’environ 200 m) et à l’engraissement
de côté de la plage Benoît (où cette largeur dépasse
1 500 m et où la granulométrie des sables se réduit
conjointement). Les dunes s’étendent surtout à l’Est
de la baie de La Baule, dans sa partie la plus expo-
sée aux vents dominants (secteur ouest), où elles
forment l’un des massifs dunaires les plus élevés du
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
56
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 57
Massif armoricain. Elles recouvrent en effet le
coteau de Guérande et la paléofalaise qui s’y trouve
associée jusqu’à 56 m d’altitude. Elles ont enseveli
les premiers sites d’Escoublac et ont imposé le
retrait du bourg jusqu’à son emplacement actuel au
XVIIIesiècle (Guériff, 1969).
2-4. Les marais du Croisic-Batz
D’une superficie d’environ 3 000 ha, les marais du
Croisic présentent un plan trapézoïdal, en raison de
l’obliquité des flèches de Pen-Bron et de La Baule.
Ils offrent une grande variété de paysages, qui tient
à leur qualité de marais maritimes et à leur anthropi-
sation précoce. Cette variété s’exprime d’abord par
la juxtaposition d’une partie demeurée libre et d’une
autre partie aménagée en marais salants. À l’Ouest,
la partie libre forme un golfe de 700 ha, qui commu-
nique avec l’océan par le goulet du Croisic et qui
demeure soumis aux influences des marées. Elle est
elle-même subdivisée en deux sections : le Petit
Traict, au Nord de Sissable, et le Grand Traict, deux
fois plus vaste. Au centre et à l’Est, les marais du
Croisic sont occupés par des salines, dont l’installa-
tion est vraisemblablement antérieure au IXesiècle
(Buron, 1999). Ces marais salants sont séparés du
Traict par des levées maçonnées, qui assurent le
contrôle des niveaux d’eau, en même temps qu’une
protection contre les vagues et les vents d’Ouest. Ils
s’étendent jusqu’à la flèche de La Baule, à l’Est, et
ne communiquent avec les eaux libres que par l’étier
du Pouliguen.
Un marais est d’abord une retenue d’eau, qui exige un
barrage, d’origine tectonique (rehaussement du socle)
ou sédimentaire (accumulation de sédiments), sans
lequel n’existe qu’une vallée ou une ria. La disposition
des blocs basculés du Croisic et de Guérande, ainsi
que la construction des isthmes de Pen-Bron et de La
Baule, ont réuni toutes les conditions propices à la for-
mation d’un vaste marais littoral. Un marais nécessite
également un colmatage, sans lequel n’existe qu’un
simple lac. La nature et l’origine des sédiments res-
ponsables du colmatage local n’ont fait l’objet d’au-
cune recherche systématique. En attendant, force est
de recourir à l’analyse des affleurements rocheux et
platins reconnus, ainsi qu’aux sondages archivés par
le Service Géologique Régional.
Les sondages exploitables, c’est-à-dire ceux qui
ont été réalisés à des emplacements significatifs et
qui ont donné lieu à une description suffisamment
précise, au total peu nombreux, confirment que la
profondeur du fond rocheux des marais augmente
vers la base du coteau de Guérande, dans le prolon-
gement du revers du plateau du Croisic (figure 7).
De quelques mètres aux abords de ce dernier, elle
parvient à -22 m sous le niveau moyen des mers au
Sud de Lancly. Elle passe de -13,5 m près de l’étier
du Pouliguen, à -23,5 m dans le quartier du casino
de La Baule. Ce dispositif indique que le bascule-
ment du bloc du Croisic vers le Nord-Est est de plus
de 45 m sur une distance de 3 000 à 4 000 m, entre
les failles-falaises de la Grande Côte (+23 m à Batz)
et l’escarpement de faille de Guérande, ce qui
témoigne d’une inclinaison un peu supérieure à 1 %
vers le Nord-Est, finalement du même ordre que
celle du plateau de Guérande.
Ces sondages, confrontés à la répartition des affleu-
rements situés à l’intérieur des marais (Toullan,
Lancly, Saillé, Lénifun, Trégaté), suggèrent égale-
ment que le fond du marais est disloqué par des
failles secondaires, comme le plateau du Croisic,
sinon raviné, comme le plateau de Guérande et le
fond de la Brière ; l’une de ces failles, de direction
armoricaine, pourrait passer au Sud de Lancly et de
Saillé ; un faisceau de failles, de même direction,
pourrait former un escalier de failles à la base du
coteau de Guérande.
Le colmatage du marais du Croisic provient de
sédiments essentiellement argileux, qualifiés par les
sondeurs d’argiles beiges ou d’argiles noires, par-
fois d’argiles sableuses. Les sondages pratiqués à
l’emplacement des flèches de Pen-Bron et de La
Baule révèlent, à la base, des argiles similaires, quali-
fiées de grises ou de vertes, parfois aussi de sableuses,
en tout cas recouvertes de plusieurs mètres de sables,
dits parfois argileux ou coquilliers. Il n’existe ni ana-
lyse palynologique, ni datation connue de ces dépôts.
Les analogies sédimentaires, stratigraphique et en-
vironnementales permettent toutefois d’envisager
des corrélations chronologiques avec les dépôts for-
més en Brière et dans l’estuaire de la Loire au cours
de la transgression flandrienne (Visset, 1990 ;
L’Helgouac’h et al., 2001). Des mégalithes, comme
le menhir de Kervalet, en partie enfoui, fourniraient
sans doute des précisions sur les séquences les plus
récentes de ces remplissages (Prigent, 1978).
Les sédiments argileux proviennent en partie du
plateau du Croisic, ainsi que du coteau de Guérande
et des glacis élaborés à sa base. Ils résultent surtout de
matériaux marins, déposés en position d’abri au cours
de l’Holocène, lorsque le revers du Croisic subissait
une immersion croissante et lorsque le site du marais
actuel formait une « baie à double ouverture » sou-
mise à l’affrontement des courants de flots (Verger,
1983). Les sables qui surmontent les argiles à l’em-
placement des flèches de Pen-Bron et de La Baule
signalent, pour leur part, l’élaboration, plus récente,
des cordons littoraux responsables de la transforma-
tion du marais du Croisic en « baie fermée », ne com-
muniquant désormais avec la mer que par d’étroits
passages. La description des sédiments les plus
superficiels implique celle des paysages actuels.
Le Traict comprend trois éléments principaux, tous
situés dans la zone intertidale. Des bancs de sables
et des plages étroites se situent surtout aux abords de
son entrée ou en arrière des dunes de la Grande
Falaise. Des vasières occupent la majeure partie de
son étendue. Un réseau d’étiers se concentre vers le
chenal de Pen-Bron, qui draine le Petit Traict, et vers
le chenal des Vaux, qui draine le Grand Traict. L’en-
semble aboutit à un goulet d’une largeur inférieure à
500 m et subit un assèchement presque total à
chaque marée, ce qui justifie de puissants courants
de vidange et de remplissage.
Le Traict comporte, par conséquent, un double
delta de marée à son entrée (Chassé, 1972). Le delta
de flot se situe à l’intérieur du marais, en face du port
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE
58
Figure 7 : profondeur du socle rocheux sous les marais du Croisic (sources : Service Géologique régional, Nantes, carte BRGM, n° 479 et G. Buron,
Musée intercommunal des Marais salants, Batz-sur-Mer)
du Croisic ; il s’étend sur une superficie d’environ
1km
2, entre le chenal de Pen-Bron et le chenal des
Vaux ; il forme un vaste triangle de sable grossier, de
tendance granulométrique décroissante vers l’inté-
rieur, assorti de grands ripple-marks ; il présente une
faible inclinaison vers le goulet et un rebord à forte
inclinaison vers l’intérieur. Le delta de jusant se situe
à la sortie du goulet du Croisic, entre la pointe de Pen-
Bron et le chenal d’accès au port du Croisic ; il forme
des bancs de sable étirés, de granulométrie générale-
ment décroissante vers l’extérieur, qui se signalent
aussi par de grands ripple-marks à marée basse.
Les marées entretiennent des vasières d’estran
(slikkes) et des prés-salés (schorres). Les slikkes sont
des vasières dépourvues de végétation, qui occupent
la partie inférieure de la zone interditale, au-dessous
du niveau de mi-marée (Verger, 1983, 2005 ; Pinot,
1998). Elles se composent de sédiments fins, en l’oc-
currence des vases grises et des sables argileux,
exempts d’évolution pédologique et luisants à marée
basse. Elles sont largement prépondérantes à l’inté-
rieur du Petit Traict et du Grand Traict ; elles sont
occupées par des établissements conchylicoles autour
de Sissable. Les schorres, encore appelés marais mari-
times, herbus, ou prés-salés, sont formés de vase,
souvent plus consolidée, de vase sableuse à débris
coquilliers (de type tangue), ou même de sable. Ils
occupent la partie supérieure de la zone intertidale et
sont colonisés par des plantes à fleurs (salicornes,
obiones, spartine,...), appartenant à une flore halo-
phile dense, voire fermée (Godeau, 1975). Ils s’éten-
dent essentiellement aux environs des baules de Sis-
sable et des buttes du Pô (Bonnot-Courtois et al.,
2005). L’ensemble est drainé par des réseaux de che-
naux de marée ramifiés. Les slikkes enregistrent les
effets locaux d’un ravinement ou d’un engraissement
vaseux, selon les endroits. Les schorres portent à la
fois des marques de reculs actuels et de dépôts nou-
veaux ; ils connaîtraient, ainsi, un bilan sédimentaire
proche de l’équilibre selon F. Verger (1983).
Séparés du Traict par des digues, les marais salants du
Croisic s’étendent sur environ 1 600 ha. Ils forment
ainsi l’ensemble salicole le plus étendu de la façade
atlantique française (Poisbeau-Hémery, 1980 ; Buron,
1999, 2000). Au-delà d’une connaissance empirique
d’un milieu naturel et de ses rythmes, ces marais salants
sont la démonstration d’une subtile intelligence des
relations entre cadres géomorphologiques, microtopo-
graphie et formations sédimentaires, marées et eau de
mer, cycles saisonniers et temps météorologique. Ils
constituent l’un des plus anciens témoignages d’une
anthropisation dense du paysage qui, en dehors des
défrichements ordinaires, s’exprime par l’urbanisation
(étendue à l’ensemble de la flèche de La Baule), par des
aménagements portuaires ex nihilo (comme à La Tur-
balle ou à Pornichet), par des défenses côtières (comme
à Pen-Bron), par des chenaux redressés (comme celui
de Bonne-Anse) et par des zones humides entièrement
vannées (comme le marais briéron).
Conclusion
Le relief du Pays de Guérande est l’un des plus
variés de Loire-Atlantique, en dépit de ses dimen-
sions. Sa variété morphologique s’exprime à travers
les surfaces : surfaces d’aplanissement qui recou-
pent le socle (plateaux de Guérande et du Croisic),
ou surfaces d’accumulation qui recouvrent ce socle
(marais du Croisic et Brière). Elle s’exprime à tra-
vers les versants : versants structuraux (escarpement
de faille de Guérande), versants d’érosion (versants
des vallons encaissés dans le plateau de Guérande)
et versants d’accumulation (versants des dunes de
La Baule). Elle s’exprime aussi par les types de
côtes. Cette propriété provient de l’instabilité des
facteurs du relief, en dépit de la persistance de vieil-
les structures, comme le socle hercynien, et de vieux
héritages, comme les aplanissements. Cette instabi-
lité résulte de la tectonique (basculement répété de
blocs à partir de failles réactivées par l’ouverture du
golfe de Gascogne depuis la fin du Secondaire) et de
l’eustatisme (modifications des côtes sous l’effet
des régressions et des transgressions déterminées
par les fluctuations climatiques depuis le début du
Quaternaire). Ces particularités tectoniques et eus-
tatiques tiennent à leur tour aux interactions océan-
continent propres aux marges passives, liées à l’ou-
verture d’un océan, et propres aux littoraux,
directement exposés aux variations du niveau marin.
Dans ces conditions, les éléments du relief actuel
illustrent les stades d’une évolution dont aucun état
n’est jamais définitivement acquis : escarpement de
faille transformé en versant continental convexe,
puis en falaise (Grande Côte), escarpement de faille
transformé en falaise, puis en versant continental
convexe (coteau de Guérande), revers subsident de
blocs basculés (Guérande, Le Croisic), transformés
en baie (La Baule), puis en marais littoral (Traict du
Croisic) et en marais continental (Brière). A une
autre échelle, l’agencement du relief dans son
ensemble témoigne des effets momentanés de ten-
dances tectoniques, morphogéniques et eustatiques
variées. Une transgression mineure transformerait à
nouveau les marais du Croisic et la Brière en baies
maritimes, donc, implicitement, le coteau de Gué-
rande et le Sillon de Bretagne en falaises. Inverse-
ment, une régression transformerait la Grande Côte
LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 59
en versant continental et le chenal du Nord rede-
viendrait un golfe semblable au Traict du Croisic
actuel, ainsi que l’avait déjà envisagé J. Gras (1980).
Le succès touristique du Pays de Guérande tient
à de multiples causes, naturelles ou culturelles,
parmi lesquelles s’inscrit à l’évidence une qualité
des paysages qui provient elle-même en partie des
propriétés morphologiques et dynamiques des
reliefs. Les reliefs s’intègrent ainsi pleinement au
patrimoine naturel. Ils relèvent, en l’occurrence,
d’un patrimoine géomorphologique qui se justifie
par des besoins de préservation et qui justifie des
actions de vulgarisation.
Dominique SELLIER
Professeur à l’Institut
de Géographie et d’Aménagement
Régional de l’Université de Nantes (IGARUN)
Laboratoire de Géographie physique,
Laboratoire Géolittomer (UMR-CNRS 6554)
Remerciements : l’auteur remercie Andrée Dubois (car-
tographe à l’Institut de Géographie et d’Aménagement
Régional de l’Université de Nantes), Céline Chadenas
(docteur en géographie à l’Institut de Géographie et
d’Aménagement Régional de l’Université de Nantes),
Pierre Conil (directeur du Service Géologique Régional,
BRGM, Nantes) et Gildas Buron (conservateur du Musée
intercommunal des marais salants de Guérande).
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LES CAHIERS DU PAYS DE GUÉRANDE 61
... Ils correspondent à un complexe lagunaire à l'arrière de la flèche sableuse de Pen Bron / la Turballe, ellemême partie prenante du tombolo double de la presqu'île guérandaise avec la flèche sableuse portant l'agglomération de La Baule au sud-est. Ces deux flèches ont au cours des 1500 dernières années progressé vers les îles granitiques du Croisic et de Batz sur Mer (Sellier, 2007 ;Menanteau, 2018) en enserrant un vaste marais maritime progressivement construit par colmatage. Une grande partie de ce marais a été en parallèle transformée en marais salants à partir du XII e siècle. ...
Article
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Dans le cadre des travaux menés par l'OR2C sur l'histoire des risques en Pays-de-la-Loire, le laboratoire LETG mène des analyses sédimentologiques pour détecter les tempêtes passées. L'une d'entre elles, datée du 16 Novembre 1940, a laissé une marque importante dans les Traicts du Croisic où des prélèvements de terrain ont été effectués. La concomitance entre paramètres météorologiques et océanologiques intenses a provoqué des submersions marines dans les zones basses côtières, expliquant les dépôts marins détectés dans la lagune. Les impacts socio-économiques révèlent que cet évènement a également marqué les populations littorales de l'époque.
... La sélection de géomorphosites, conçue dans la perspective d'une vulgarisation du patrimoine géomorphologique du parc, peut fournir l'occasion d'utiliser une méthode déjà appliquée à des reliefs plus amples, notamment en Charente et en Bretagne (Sellier, 2007(Sellier, , 2010(Sellier, , 2011. Cette méthode repose sur une analyse dite intégrée du relief, c'est-à-dire menée à plusieurs niveaux d'échelle complémentaires, puis sur une sélection déductive de géomorphosites, issue de cette analyse. ...
... Ce type de profil est fréquent le long des vallées, comme, par exemple, celles du Doubs et de la Moselle, ou le long des gorges, comme celles du Tarn, de la Jonte, ou de la Vis, dans le secteur de Navacelle, où s'impose l'image des corniches verticales, mais où les vires dérivées de versants réglés occupent la majeure partie des profils (Ambert, 2003). A une autre échelle spatiotemporelle, des rejeux tectoniques peuvent également rompre les versants réglés par des escarpements de failles, en domaines instables, comme en régions méditerranéennes, mais aussi sur les côtes armoricaines du golfe de Gascogne, donc sur une marge passive, où des blocs basculés bordés de failles synthétiques ont rejoué jusqu'au Quaternaire (Guilcher, 1948 ;Sellier, 2007). Dans cet ensemble, le redressement par la mer résulte des attaques de la base des versants réglés par l'érosion littorale en période de transgression. ...
... Après avoir effectué un bref retour sur l'évolution des perceptions de la nature abiotique en ville depuis les débuts de l'histoire urbaine, cet article a pour objectif de proposer une typologie détaillée des reliefs qu'elle concerne, construite sur la base de critères géomorphologiques et génétiques. Parce qu'elle s'applique essentiellement à la ville de Nantes, cette étude s'inscrit dans la continuité de nombreux travaux de géographes qui portent sur le site de la ville (Gras, 1982(Gras, , 1990, sur son environnement proche (Sellier, 1985), et sur le patrimoine géomorphologique du pays nantais (Sellier, 2007Portal, 2008Portal, , 2009Portal, , 2010Portal, , 2013aComentale, 2011Comentale, , 2012Comentale et Gabory, 2013 ;Sellier et Portal, 2013). Elle s'appuie également sur une approche historique (Bois, 1977 ;Pétré-Grenouilleau, 2003) et s'inspire de la littérature gracquienne qui décrit cette « cité, enfoncée dans les terres qui l'épaulent fortement de part et d'autre au fond de son estuaire étranglé » (Gracq, 1985). ...
Article
Full-text available
les reliefs en milieu urbain sont réinterprétés selon de nouvelles perceptions suite à la reconnaissance progressive des géopatrimoines dans les années 1990. Cet article retrace l’évolution des perceptions de la nature abiotique en ville depuis les débuts de l’histoire urbaine et propose une typologie détaillée des reliefs concernés, illustrée par quelques exemples choisis dans l’agglomération nantaise.
Research
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Pour tenter de mieux comprendre l’évolution de la Brière au cours des derniers millénaires, une synthèse géomorphologique a été engagée. Cette synthèse a pour objectif d’étudier la plupart des travaux géomorphologiques réalisés durant les dernières décennies. L’objectif est d’appréhender l’évolution de la géomorphologie briéronne et la succession des paysages ayant façonné ce marais. L’étude repose dans un premier temps sur l’analyse de la topographie des principaux éléments du relief briéron. L’étude globale de la topographie permet de comprendre certains grands traits de l’évolution géomorphologique du marais, tandis que l’étude des microreliefs offre des clés de compréhension sur le façonnement de son hydrographie au cours des derniers millénaires. Nous présentons ensuite une synthèse de l’évolution de la sédimentologie de cet espace, vaste zone de dépôts d’alluvions principalement quaternaires. Les données primaires utilisées pour la réalisation de cette synthèse sont en amont critiquées. Enfin, le couplage de ces deux approches offre la possibilité intéressante de produire plusieurs coupes géologiques dans les espaces les moins étudiés. Nous avons testé cette nouvelle approche au travers de quatre transects préalablement sélectionnés dans le marais. De nouvelles perspectives de recherche sont ensuite proposées pour les futurs travaux engagés sur l’étude géomorphologique briéronne.
Article
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This paper reviews the climatological influences on major past storm events in the North-east Atlantic. Analyses are based on a millenary record of sedimentological and historical impacts affecting coastal societies. The effects of 20 past storms have been found from sedimentary deposits from the last 1,000 years. Historical archives confirmed these events. This paper highlights five major storms that have markedly impacted coastal populations. They date back to 1351–1352, 1469, 1645, 1711 and 1751 AD. The 1351–1352 AD event is defined as a millennium storm that was “likely apocalyptical”, provoking serious damage and long lasting floods on much of the European coast. Major storm impacts have mostly been recorded during positive North Atlantic Oscillation phases. Four decreasing temperature phases are concomitant with 1300–1355, 1420–1470, 1560–1590 and 1690–1715 AD periods, during which much of the northern Atlantic coast of France underwent severe storm damages.
Thesis
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L’objectif de cette recherche est de développer des approches méthodologiques afin de reconstituer les évènements extrêmes du passé aux échelles temporelles holocène, millénaire et anthropocène. La méthodologie repose sur une approche pluridisciplinaire employant la sédimentologie, la dendrochronologie, la climatologie et l’histoire du climat. Ces approches ont été appliquées dans trois terrains d’étude : l’Île d’Yeu, les Traicts du Croisic et la Petite mer de Gâvres. Plusieurs évènements extrêmes anciens ont été identifiés et corrélés entre eux par les différentes approches. À l’échelle holocène, les périodes de forts impacts tempétueux semblent être liées aux phases de refroidissement climatique de l’atlantique nord : 600-300, 1700-1100, 2900-2500, 3500-3300, 5500-5100 et 7700-7100 cal y BP. Cependant, à l’échelle millénaire, les liens avec le changement climatique du Petit Âge Glaciaire et l’Oscillation Nord Atlantique sont plus complexes à appréhender. Le couplage des données sédimentologiques avec les archives historiques caractérise seize évènements extrêmes à forts impacts environnementaux et sociétaux. L’un d’entre eux, survenu durant l’hiver 1351 – 1352 (n.st) AD, est qualifié d’« évènement millénaire ». À l’échelle de l’anthropocène, quatre dates principales ressortent de l’analyse sédimentologique : 1990, 1972, 1940 et 1896 AD. La dendrochronologie permet de détecter dix-neuf hivers tempétueux depuis 1955 AD, ce qui a été confirmé par les archives météorologiques et les données de réanalyse. Ces différentes approches permettent d’accroître avec plus de précision la connaissance des aléas côtiers.
Article
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L'étude morphostructurale régionale basée sur la modélisation de la surface continentale paléogène a permis d'obtenir deux types d'information: - des valeurs de la composante verticale locale de la déformation finie, correspondant à des mouvements relatifs entre blocs voisins; - des valeurs de la composante verticale régionale dela déformation finie. De ces deux composantes, seule la composante locale a pu être régionalisée et a permis de restituer des cartes d'amplitude et de vitesses de dénivellation apparentes de bloc à bloc. En concentrant toute la déformation après 20 Ma (Miocène inférieur), on obtient des vitesses apparentes d'affaissement de 1.10-3 à 8.10-3 mm/an, avec des valeurs extrêmes de 2.10-2 mm/an pour les grabens les plus profonds (Saffré). Si toute la déformation était concentrée après 2 Ma (période Quaternaire), cas improbable compte tenu de l'âge du remplissage des bassins et grabens, les valeurs ci-dessus ne seraient augmentées que d'un ordre de grandeur : affaissements de 1.10 -2 à 8.10-2 mm/an, valeurs extrêmes de 2.10-1 mm/an pour les grabens les plus profonds. La confrontation de la géométrie des paléosurfaces et de la répartition des faciès continentaux et marins associés avec les altitudes des paléoniveaux marins depuis le Crétacé inférieur jusqu'à l'Actuel nous conduit à proposer l'hypothèse d'Un bombement régional de 120 à 150 m vers la limite Crétacé-Tertiaire. Ce bombement n'était que partiellement résorbé au Miocène moyen, mais il l'est sans doute complètement depuis le Pléistocène. Un tel bombement pourrait être mis en relation avec des ondulations lithosphériques à grand rayon de courbure initiées dans l'avant-pays de la plaque Eurasie, lors du rapprochement Eurasie/Ibérie vers la limite Crétacé- Tertiaire.
Thesis
Le relief du Pays Nantais, compris entre la Basse-Loire, la Brière et le Bas­sin d'Ancenis, se compose de plateaux bordes de talus et de dépressions. Les problèmes qu'il pose sont caractéristiques des massifs anciens : définition des formes d'aplanisse­ment, détermination du rôle de l'érosion différentielle et de la tectonique dans I:elabora­tion des paysages, interprétation des héritages paléogéographiques. Leur approche se trouve handicapée par la faiblesse des altitudes locales et la rareté des formations superficielles. D'où le recours aux versants, classes en trois types fondamentaux, comme moyen d'analyse privilégié. Les pentes a replats permettent de dissocier une surface fon­damentale, marquée d'horizons d'altération profonds et un niveau d'érosion périphérique, ponctue d'épandages caillouteux post-pliocènes, significatif d'une importante phase rhexis­tasique. Les talus singuliers, formes simples et sans symétriques, témoignent d'une fractura­tion intense du socle, d'une dislocation du niveau d'érosion précité et d'une influence pré­pondérante de la néotectonique. Les versants de vallées révèlent une dissection récente du relief, une altération pléistocène prolongée, une morphogenèse périglaciaire moins effica­ce qu'au Nord de la Bretagne, les marques de processus nivéo-éoliens. Chacun de ces types de versants contribue a mettre en évidence !'interven­tion d'un épisode morphogénique et tectogénique majeur a la fin du Pliocène et au Pléis­tocène ancien, !'influence déterminante des systèmes d'érosion quaternaires dans l'élabo­ration des paysages, donc la relative jeunesse du relief local.
-Recherches préliminaires à l'étude de la faune entomologique estivale des marais salants de la presqu'île guérandaise, Diplôme d'études supérieures
  • Allain G
ALLAIN G., 1966 -Recherches préliminaires à l'étude de la faune entomologique estivale des marais salants de la presqu'île guérandaise, Diplôme d'études supérieures, Faculté des Sciences, Nantes, 134 p.
1896 -Légende de la feuille de Saint-Nazaire (n°104, carte géologique de la France au 1/80 000)
  • C Barrois
BARROIS C., 1896 -Légende de la feuille de Saint-Nazaire (n°104, carte géologique de la France au 1/80 000), Annales de la Société géologique du Nord, XXIV, p. 137-160.
-Cartographie bio-morphosédimentaire des estrans dans le cadre du réseau benthique, Photo-Interprétation, 2, 41
  • Bonnot-Courtois C
BONNOT-COURTOIS C. et al., 2005 -Cartographie bio-morphosédimentaire des estrans dans le cadre du réseau benthique, Photo-Interprétation, 2, 41, p. 13-24.
Notes pour servir à l'Histoire des marais salants de Guérande, n°4
  • Buron G
BURON G., 1987 -De "La Guillemette" ou "Enez Veur", Notes pour servir à l'Histoire des marais salants de Guérande, n°4, 11 p.
-Économie sédimentaire et biologique (production) des estrans meubles des côtes de Bretagne, thèse d'État
  • C Chassé
CHASSÉ C., 1972 -Économie sédimentaire et biologique (production) des estrans meubles des côtes de Bretagne, thèse d'État, Sciences, Paris VI.