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Abstract and Figures

Problématique L'architecture bioclimatique est l'architecture la plus ancienne : utilisation de matériaux locaux, volonté de se protéger des contraintes climatiques, recours à des systèmes ingénieux pour améliorer le confort, habitations troglodytes ou verna­ cu laires, etc. La standardisation actuelle tend à éloigner l'archi tecture de son environnement, mais le retour de tels concepts apparaît inévitable dans des pays confrontés à un manque de moyens et à un problème d'accès à l'énergie ne leur permettant pas de disposer autrement de logements confortables. Ainsi, l'architecture bioclimatique répond en partie à cette problématique par l'intégra tion de concepts passifs permettant de minimiser le recours à la consommation énergétique (notamment pour la climatisation dans les pays chauds) et l'impact sur l'environ nement sans négliger le bien­ être de l'occupant. L'enjeu est de proposer des habitations confortables et éco­ nomes énergétiquement en utilisant au maximum les res­ sources disponibles à proximité (ressources matérielles, main­ d'oeuvre, valeurs culturelles également). Principes de base L'architecture bioclimatique en quelques mots L'architecture bioclimatique utilise le potentiel local (climats, matériaux, main­d'oeuvre…) pour recréer un climat intérieur respectant le confort de chacun en s'adaptant aux variations climatologiques du lieu. Elle rétablit l'architecture dans son rapport à l'homme et au climat. C'est pourquoi on ne peut définir une unique typologie de l'architecture bioclimatique : il y en a autant que de climats. Ceci est d'autant plus vrai que le confort de chacun se déplace avec les conditions climatologiques. L'architecture bioclimatique passe donc inévitablement par une excellente connaissance de son environnement.
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Problématique
L’architecture bioclimatique est l’architecture la plus ancienne :
utilisation de matériaux locaux, volonté de se protéger des
contraintes climatiques, recours à des systèmes ingénieux
pour améliorer le confort, habitations troglodytes ou verna-
cu laires, etc. La standardisation actuelle tend à éloigner
l’archi tecture de son environnement, mais le retour de tels
concepts apparaît inévitable dans des pays confrontés à un
manque de moyens et à un problème d’accès à l’énergie ne
leur permettant pas de disposer autrement de logements
confortables. Ainsi, l’architecture bioclimatique répond en
partie à cette problématique par l’intégra tion de concepts
passifs permettant de minimiser le recours à la consommation
énergétique (notamment pour la climatisation dans les pays
chauds) et l’impact sur l’environ nement sans négliger le bien-
être de l’occupant.
L’enjeu est de proposer des habitations confortables et éco-
nomes énergétiquement en utilisant au maximum les res-
sources disponibles à proximité (ressources matérielles, main-
d’œuvre, valeurs culturelles également).
Principes de base
L’architecture bioclimatique
en quelques mots
L’architecture bioclimatique utilise le potentiel local (climats,
matériaux, main-d'œuvre…) pour recréer un climat intérieur
respectant le confort de chacun en s’adaptant aux variations
climatologiques du lieu. Elle rétablit l’architecture dans son
rapport à l’homme et au climat. C’est pourquoi on ne peut
définir une unique typologie de l’architecture bioclimatique : il
y en a autant que de climats. Ceci est d’autant plus vrai que le
confort de chacun se déplace avec les conditions climatologiques.
L’architecture bioclimatique passe donc inévitablement par une
excellente connaissance de son environnement.
Les climats chauds
Les climats chauds sont caractérisés par des températures
moyennes annuelles comprises entre 20 et 35 °C et se
répartissent en deux catégories principales en fonction de
L’architecture
bioclimatique
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
0-1
kWh/m2.J
1-2
2-3
3-4
4-5
5-6
≥ 6
Équatorial
Tropical de mousson
Tropical humide
Tropical sec
Désertique
Chaud d’altitude
Méditerranéen
Belem
Bamako
Kinshasa Nairobi
Tunis Bagdad
Bombay
Tropique du Cancer
Tropique du Capricorne
Équateur
Figure 1 : Rayonnement solaire
Figure 2 : Les zones climatiques chaudes
l’humidité, qui a un effet conséquent sur la proportion de
radiations solaires directes ou diffuses (figures 1 et 2) :
sec, pour une humidité relative inférieure à 55 % (climats
tropical sec, désertique, chaud d’altitude)
humide, pour une humidité relative supérieure à 55 %
(climats équatorial, tropical de mousson, tropical humide,
méditerranéen)
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
2
L’architecture bioclimatique
Les principes
À partir de là, il est tout à fait possible de définir une stratégie
de conception architecturale au cas par cas et proposer une
habitation permettant de se protéger des fortes chaleurs et
des fortes radiations solaires, utilisant une ventilation naturelle
et offrant un abri confortable en toute saison. Il est alors
envisageable d’estimer grossièrement les besoins énergétiques
car même si l’accès à l’électricité (éclairage principalement) et
à l’eau chaude est indispensable, la production de chaleur et/
ou de froid peut être évitée ou largement limitée.
L’intégration du bâtiment dans son environnement est
le premier principe de l’architecture bioclimatique : il est
indispensable d’avoir une parfaite connaissance des vents
dominants, de la radiation solaire incidente et des masques
solaires voisins, des risques d’inondations, de la végétation
environnante et des objectifs de confort… Faut-il se protéger
du vent dominant ? Peut-on en tirer parti ? A-t-on besoin de
gains solaires ? Si oui, comment trouver un juste milieu entre
ces derniers et la limitation des risques de surchauffe ? Une
construction sur pilotis est-elle nécessaire contre les risques
d’inondation ? La réponse à ces questions permettra d’optimiser
la forme géométrique du bâtiment, son implantation, la position
et le type d’ouvertures ou encore l’aménagement intérieur.
L’implantation du bâtiment doit aussi tenir compte de son
impact futur sur l’environnement immédiat.
L’architecture bioclimatique impose également des bases de
conception :
Utiliser des matériaux de construction locaux : le coût sera
plus faible, la main-d’œuvre plus adaptée tant au niveau de
la construction que de l’entretien.
Les revêtements de façade influent sur le rayonnement
thermique.
Faut-il valoriser l’inertie thermique ?
Faut-il isoler le bâtiment ?
Comment gérer les radiations solaires ?
Comment exploiter la ventilation naturelle ?
La valorisation de l’énergie solaire et/ou éolienne et/ou
biomasse pour la production d’énergie (électrique ou
thermique) fait aussi partie du concept de bioclimatisme.
Elle tire parti de la nature et limite les problèmes d’accès
à l’énergie ainsi que l’impact global sur l’environnement.
Tous ces principes de conception sont à adapter suivant les
contraintes climatiques, socio-économiques et architecturales.
Malgré tout, une excellente conception du bâtiment peut
devenir dérisoire si l’usage qui en est fait est en contradiction
avec la réflexion globale du projet. C’est là que le rôle de
l’occupant intervient. Si tout est mis en œuvre pour limiter les
risques de surchauffe, l’occupant se doit de limiter la dissipation
de chaleur interne. De ce fait, les appareils de cuisson ou
autres équipements producteurs de chaleur (compresseur
des réfrigérateurs ou d’appareils de climatisation) doivent être
impérativement disposés à l’extérieur des zones de vie. Un
comportement responsable influera sur le choix de luminaires
(influence de l’éclairage naturel, basse consommation si
possible) et de tout appareil électrique : une stratégie de
développement durable est à adopter à tous les niveaux. Le
bon fonctionnement du bâtiment quant à lui nécessite une
sensibilisation : utilisation des protections solaires et de la
ventilation naturelle si celles-ci ne sont pas automatisées,
entretien du bâtiment et des équipements…
Deux stratégies sont à adopter suivant les besoins :
La stratégie du chaud consiste à capter l’énergie solaire
et la stocker dans la masse pour un déphasage et un
écrêtage des pics de température. La redistribution de cette
chaleur se fait lorsque les températures extérieures sont
plus faibles que les températures intérieures désirées.
La
stratégie du froid
consiste à se protéger des apports
solaires, adopter des solutions passives de refroidissement
par humidification ou ventilation naturelle et limiter les
charges internes.
Problèmes observés et
solutions techniques
Cette partie donnera des éléments de réponses afin de
résoudre des problèmes techniques liés à la conception
bioclimatique. Mais il est bien évident que ces réponses se
font au cas par cas.
Comment implanter au mieux
un bâtiment ?
Une parfaite connaissance du lieu est indispensable. Ainsi,
connaître à tout moment l’énergie solaire effectivement reçue
sur l’enveloppe permettra de concevoir correctement cette
dernière mais aussi d’anticiper l’orientation optimale ainsi
que le type de protections solaires envisageable. Des logiciels
informatiques de simulation de l’ensoleillement constituent
des outils d’aide à la conception.
De même, afin d’éviter tout risque de turbulence et de
favoriser une possible exploitation du gisement éolien, une
étude doit être menée en amont du projet pour optimiser
l’implantation du bâtiment. L’urbanisme, la topographie
(figure 3) et la végétation (figure 4) sont autant de facteurs à
prendre en compte.
Maisons connaissant un eet favorable dû à la topographie
Maisons connaissant un eet défavorable dû à la topographie
Écoulement laminaire
Pente
« au vent »Pente
« sous le vent »
Falaise
Vallée
perpendiculaire
au vent
Zone
irriguée Zone
déventéeZone
irriguée Zone
déventéeZone
très
déventée
Zone
de
décollement
Zone
irriguée Zone
déventée
VENT
Figure 3 : Effet de la topographie
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
3
L’architecture bioclimatique
Quelle forme du bâtiment est
à suggérer ?
La compacité est généralement une règle en architecture
bioclimatique car elle permet de limiter les surfaces déperditives
ou soumises à un éclairement solaire important. On passera
outre cette règle en climat désertique où une cour intérieure
(totalement ouverte) est souhaitable, l’objectif étant de créer
le plus d’ombre possible. Cette disposition est d’autant plus
efficace dans le cas de logements groupés (elle peut alors être
complétée par la mise en place de nombreuses ruelles).
La forme géométrique à proprement parler peut être pensée
urbanistiquement pour permettre la ventilation naturelle d’un
ensemble de bâtiment soumis au vent.
Quels matériaux de construction
choisir ?
Le choix des matériaux se fait en fonction de ceux qui sont
disponibles à proximité. Ils sont particulièrement adaptés au
climat et le coût de construction sera limité.
Les constructions en pierre locale sont ainsi adaptées au
climat à forte variation de température journalière.
– Les constructions en bois permettront une rapide
montée en température du bâtiment particulièrement
adaptée aux climats dont l’hiver est très rigoureux (climat
de montagne).
Les constructions en terre crue ou sable permettent
d’accumuler les fortes radiations solaires et montées en
température et ainsi limiter les risques de surchauffe.
En ce qui concerne le choix des isolants, on optera pour
des isolant végétaux (laine de chanvre, laine de bois…), voire
animaux (laine de mouton). On peut imaginer que si aucun
végétal ne pousse dans le milieu d’implantation, c’est qu’il
n’est pas indispensable d’isoler le bâtiment (climat chaud et
sec)… Rappelons finalement que les produits industrialisés
ne valorisent pas la situation socio-économique du lieu de
construction, impliquant des importations massives, une
réduction de la valeur ajoutée locale et une déqualification
des métiers traditionnels.
Comment limiter les variations
de température journalière ?
L’inertie thermique d’un bâtiment a pour principale qualité
d’amortir les fortes variations thermiques journalières en
créant un déphasage. Lors de journées chaudes, l’enveloppe
lourde (construction en pierre, mur en terre crue épais)
accumule la chaleur, limitant ainsi les risques de surchauffe.
Durant la nuit, lorsque la température extérieure diminue,
toute la chaleur accumulée durant la journée est transmise à
l’intérieur du bâtiment évitant ainsi le recours à un éventuel
appoint de chauffage.
La figure 6 illustre la transmission de chaleur de l’extérieur
à l’intérieur avec un certain déphasage et amortissement,
fonction de l’épaisseur et de la conductivité thermique des
Ventilation
compromise
Ventilation
possible Ventilation
favorable
VENT
h
0 à 4 h 4 à 12 h > 12 h
Figure 4 : Effet d'un obstacle sur le potentiel
de ventilation
Lorsque c’est un projet de bâtiments collectifs qui est en cours,
l’impact de chacun d’entre eux sur les autres est à considérer : il
permettra d’évaluer une distance à respecter entre ces derniers
et d’optimiser la forme géométrique de chacun.
Comment valoriser les éléments
naturels ?
L’orientation d’un bâtiment dépend principalement de l’axe
dans lequel souffle le vent et surtout de la nécessité ou
non de profiter des apports solaires (c’est-à-dire s’il y a une
saison froide). Ainsi, en climats chauds on privilégiera un axe
longitudinal Est/Ouest de façon à réduire l’exposition au soleil
bas des façades dont il est difficile de se protéger. Malgré tout,
on aura tendance à s’écarter de cet axe en climat désertique ou
méditerranéen où les apports solaires peuvent être valorisés
durant la saison froide, en direct par les vitrages, ou la nuit, en
déphasage par l'inertie.
L’orientation est également choisie pour permettre aux vents
dominants de pénétrer dans le bâtiment. En effet, la ventilation
naturelle est toujours due à une différence de pression, causée
par le vent ou par un écart de température : dans ce type de
climat, la ventilation est essentielle pour évacuer des locaux la
chaleur interne ou les apports solaires (figure 5).
Figure 5 : Ventilation naturelle
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
4
L’architecture bioclimatique
matériaux. Accumulation et déphasage constituent l’inertie
thermique. Ces données sont représentées physiquement par
la diffusivité et l’effusivité thermique qui expriment la capacité
d’un matériau respectivement à transmettre une variation de
température et à absorber (ou restituer) un flux thermique
instantané. Pour les climats présentant une forte variation
de température journalière, on privilégiera des matériaux
présentant une faible diffusivité et une forte effusivité. La
figure 7 indique la qualité de l’inertie de quelques matériaux
pour des épaisseurs usuelles d’utilisation.
mécanique pour apporter la juste quantité d’air neuf mais
aussi d’éviter le plus souvent le recours à la climatisation.
Avant toute chose, il faudra évaluer le potentiel de ventilation,
éloigner le bâti des obstacles à l’écoulement, protéger l’abord
et l’enveloppe du bâtiment des rayonnements solaires et
anticiper l’aménagement intérieur afin de limiter les pertes
de charges du courant d’air.
Une conception optimale de la forme et de l’emplacement
du bâtiment, d’une part, et du positionnement et de la taille
des ouvertures, d’autre part, permettra de créer la différence
de pression entre les façades du bâtiment nécessaire à la
création du courant d’air. Cette différence de pression est
créée soit par l’admission et l’extraction du vent sur deux
façades judicieusement orientées, soit par une différence de
température entre deux façades (avec ouvertures) soit par
une différence de hauteur (effet cheminée).
Il existe différents types d’ouverture qui permettront de
renforcer la ventilation par prise et extraction d’air. Les
écopes, les percées, les sheds ou tout simplement les fenêtres
lorsqu’elles sont bien orientées et dimensionnées (surface
aéraulique) permettent de brasser la totalité de l’air intérieur
(figure 8).
W/m2
292
219
146
t0t1
Déphasage
a
b
t2Temps
Surchaufe
S2 chaleur restituée
avec peu d’inertie
S3 chaleur restituée
avec inertie
Apports instantanés S1
Pic de surchaufe
Eau
Bois lourd
Bois léger
Brique
Terre
Béton lourd
Béton cellulaire
Granit
Polystyrène extrudé
Plâtre
Verre
Acier
0
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
5
2,9
20,9
0,5
70
13,9
42
30,6
44,5
84
70
102,6
27,8
140,1
154
210,2
140,1
116,8
233,5
1,5
15,3
10 15 20 25 30 35 40 45
Épaisseur (cm)
Temps de déphasage (heures)
50
Figure 6 : Réaction d'un local aux apports
solaires
Figure 7 : Temps de déphasage de différents
matériaux de construction
Moitié
sous le vent
Moitié
sous le vent
Moitié
au vent
Moitié
au vent
Zone
sous-ventilée
Zone
sous-ventilée
CET = 1,4 Co
CET = 1,15 Co
Figure 8 : Influence de l’implantation
de l’écope en toiture
L’inertie thermique est complétée par l’isolation extérieure
de la toiture, responsable des 2/3 de transfert de chaleur vers
l’intérieur.
Comment bien ventiler l’espace
intérieur ?
En climat chaud, particulièrement, la ventilation naturelle
est le cœur de la conception bioclimatique. Elle permet non
seulement de limiter l’utilisation d’un système de ventilation
La surventilation nocturne couplée à une forte inertie du
bâtiment peut s’avérer très efficace lorsque les températures
extérieures sont importantes (même la nuit). Cette surventilation
peut se faire transversalement ou par effet cheminée (figure 9).
Les murs lourds ayant accumulé leur chaleur durant la journée
verront leur température diminuer plus vite. Toutes sortes de
dispositifs sont envisageables et il serait difficile d’en effectuer
un inventaire. Les références bibliographiques permettent d’aller
plus loin dans cette démarche.
La porosité à l’air des parois est une alternative lorsque la
surface disponible pour disposer des ouvertures est limitée.
Ainsi en Égypte, l’utilisation de Moucharabiehs est fréquente
(figure 10). Ce dispositif a l’avantage de créer une protection
contre les radiations solaires, les intrusions et les insectes tout
en permettant la circulation d’air.
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
5
L’architecture bioclimatique
La ventilation naturelle en climat sec peut être couplée à une
humidification de l’air qui créera une sensation de fraîcheur.
Cette dernière peut se faire par la mise en œuvre de
fontaines, de jarres humides ou de végétation sur le parcours
de l’air. Les tours à vent ou Malqaf (figure 11) utilisées en
climat désertique, permettent lorsqu’elles sont bien conçues
(forme d’entonnoir, orientées face aux vents dominants) une
climatisation naturelle par humidification.
Figure 9 :
Surventilation
Figure 10 : Maoucha ra-
biehs d’une maison du
Caire (Égypte)
Ces protections jouent un rôle multiple : elles permettent
une meilleure ventilation naturelle et une protection contre
la vue, le bruit, l’effraction, les rongeurs, les moustiques et bien
entendu le soleil.
Comment organiser les espaces
intérieurs ?
La hiérarchisation des espaces assure la transition entre
l’extérieur et l’intérieur. Ceci est d’autant plus vrai qu’en
climat chaud, un certain nombre d’activités s’effectuent en
extérieur (la cuisson, par exemple). Les pièces produisant l’air
humide et chaud sont placées au niveau de la façade sous le
vent afin que leur volume d’air soit directement rejeté vers
l’extérieur sans interagir avec les pièces propres (situées du
côté de la façade au vent). Le positionnement du mobilier, le
cloisonnement de l’espace et la disposition des pièces devront
faciliter l’écoulement de l’air dans la direction souhaitée.
La véranda (terrasse couverte) est un espace inévitable en archi-
tecture bioclimatique pour climat chaud, constituant des espaces
fortement ventilés, protégés de la pluie et du rayonnement
Figure 11 : Tours à vent dans le Sud Tunisien et
principe de fonctionnement
CRATerre
Comment limiter les apports solaires ?
Une multitude de protections solaires existe : stores extérieurs
verticaux (efficaces quelle que soit l’orientation des radiations),
pare-soleil horizontaux (casquette – efficaces pour les façades
orientées au midi), réflecteurs (compromis entre protections
solaires et éclairage naturel), protections solaires amovibles,
double-peau (crée une ventilation par convection le long
du mur – figure 13 – par exemple, cour d’appel de Niamey
au Niger, Architectes C. et L. Mester de Parajd), végétation,
couleur de paroi claire et faible coefficient d’absorption des
matériaux.
Leur choix dépendra de l’orientation de la façade à protéger
mais aussi de l’intégration avec l’environnement extérieur, les
coutumes locales et les usages de l’espace intérieur.
Volets en bois
Ext. Int. Ext. Int. Ext. Int. Ext. Int. Ext. Int.
9 à 10 %7 à 19 % 34 à 59 % 11 à 13 % 45 à 65 %
Stores en toileStores vénitiens
Figure 12 : Facteurs solaires de différentes
protections solaires (vitrage simple)
Figure 13 : Typologies de pare-soleil verticaux
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
L’architecture bioclimatique
solaire. Par ailleurs, dans les climats secs, certains espaces offrent
une multidisciplinarité : on parle alors de nomadisme à l’intérieur
des bâtiments.
Comment se protéger de la pluie ?
Les longs débords de toiture ainsi que les constructions sur
pilotis sont largement utilisés en climat humide, soumis à de
fortes pluies, voire à des inondations. La construction sur pilotis
permet en outre d’augmenter l’état dépressionnaire de la façade
sous le vent et donc le potentiel de ventilation naturelle.
Résultats attendus et
stratégies de mise en œuvre
L’objectif d’une conception bioclimatique est triple :
Améliorer les conditions de vie ;
Limiter l’impact sur l’environnement de la construction, de
sa mise en œuvre à sa fin de vie en réduisant un maximum
le recours à l’énergie ;
Valoriser les matériaux et savoir-faire locaux et relancer
ainsi l’économie locale.
Les résultats attendus sont difficilement quantifiables écono-
miquement ou énergétiquement car ce n’est qu’au cas par cas
que l’on peut les évaluer.
Une architecture bioclimatique permet de se passer ou de
limiter toute consommation d’énergie annexe, notamment
le recours à la climatisation, à la ventilation mécanique,
à l’éclairage artificiel, ceci avec un très faible surcoût à la
construction. L’exploitation de l’énergie solaire permet
également de chauffer l’eau (systèmes thermiques) ou produire
de l’électricité (systèmes photovoltaïques) par exemple pour
le pompage d’eau, l’éclairage ou la production de froid pour le
stockage de nourriture.
Outre des phénomènes objectifs, c’est toute une série de
phénomènes subjectifs que le bioclimatisme apporte. Si c’est
une consommation énergétique que l’on économise, c’est une
ambiance intérieure, une qualité architecturale, un confort
visuel, thermique ou acoustique que l’on valorise.
Cette conception passe par une démarche bien spécifique
qui tend à hiérarchiser les recommandations. Carl Mahoney
(professeur en architecture et à la base d’un plan d’action de
l’architecture bioclimatique dans les pays en développement
http://cma.alphalink.com.au/) a mis au point un ensemble
de tables destinées à récapituler et à analyser les données
climatiques, pour formuler et hiérarchiser des recommandations
précises liées à un climat. La figure 14 représente la table de
Mahoney pour le climat équatorial, à savoir celui de la ville de
Belém au Brésil. Ces principales recommandations visent à se
protéger efficacement du rayonnement solaire, améliorer la
ventilation et abaisser l’humidité relative de l’air.
Conclusion
L’architecture bioclimatique permet de retrouver les principes
de construction d’antan et de les adapter aux progrès effectués
en la matière. L’efficacité de tous ces concepts est reconnue
et prouvée et permet de proposer des bâtiments exemplaires
en termes d’architecture, de confort, d’efficacité énergétique
et environnementale. Elle valorise en outre les cultures et
traditions locales en dégageant une architecture spécifique
à chaque région du monde. Plus que de l’architecture, c’est
tout un paysage qui est travaillé car l’intégration optimale
des bâtiments par le choix des matériaux ou l’implantation
d’un quartier respecte le lieu. Finalement, elle s’inscrit dans un
cadre global de développement durable.
Références
Les images sont issues du Traité d’architecture et d’urbanisme
bioclimatique : concevoir, édifier et aménager.
Traité d’architecture et d’urbanisme bioclimatique :
concevoir, édifier et aménager. André de Herde et Alain
Liebard. Éditions Le Moniteur. 2005.
http://www.editionsdumoniteur.com/pages/recsimp/fichliv.
asp?PRO_ID=630
Maîtrise de l’énergie dans les établissements de santé
des pays en développement : guide technique. Réalisé
par la région PACA, le conseil régional des Bouches du
Rhône, l’Institut de l’énergie et de l’environnement de la
Francophonie IEPF, l’Agence intergouvernementale de la
francophonie, l’ADEME et le GERES. 2003.
http://www.iepf.org/docs/prisme/Energ_sante.pdf
6
L’architecture bioclimatique
Figure 14 : Table de Mahoney pour la ville de
Belém (Brésil)
Indicateur
H1 H2 H3 H4 H5 H6 Recommandations
Plan masse
1. Orientation suivant un axe longitudinal E-O
2. Plan compact avec cour intérieure
Espacements
3. Grands espacements entre les bâtiments
4. Idem avec protection contre le vent
5. Plan compact
Circulation d’air
6. Circulation d’air permanente
7. Circulation d’air intermittente
8. Circulation d’air inutile
Ouvertures
9. Grandes ouvertures des facades N et S
10. Très petites ouvertures (10 à 20%)
11. Ouvertures moyennes (20 à 40 %)
Murs
12. Murs légers
13. Murs massifs
Toitures
14. Toitures légères et isolantes
15. Toitures lourdes
Sommeil en plein air
16. Sommeil en plein air
Protection contre la pluie
17. Protection contre la pluie
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
7
L’architecture bioclimatiqueL’architecture bioclimatique
Étude de cas
Centre de santé de Barkoundouba au Burkina Faso
Raisons du projet
La construction de centres de santé dans les pays en
développement constitue un enjeu de taille en raison de
conditions sanitaires souvent précaires dues notamment à
un manque de moyens et à des conditions climatiques peu
propices. Au Burkina Faso, la population est principalement
rurale et le manque d’infrastructures sanitaires ne permet
pas le soin de l’ensemble de la population : il s’avère qu’un
seul centre de soins est disponible pour 100 000 per sonnes.
L’architecture bioclimatique se présente alors comme une
solution face à ce problème en permettant la construction
de centres de santé ou dispensaires offrant des conditions
intérieures saines et confortables. En outre, l’utilisation de
matériaux, main-d’œuvre et techniques de construction
locaux permet de limiter les coûts de conception et
d’exploitation.
L’objectif du projet de développement national burkinabé
est d’amorcer un plan de développement de centres de
santé ruraux pour proposer à la population locale un accès
aux soins. Il apparaît que l’architecture bioclimatique est la
réponse à ce défi.
Description
Le projet de construction du centre de santé et de
promotion sociale à Barkoundouba a pour but l’accès aux
soins pour un millier de personnes sur un rayon de 5 km.
Quatre bâtiments sont prévus regroupant un dispensaire,
une maternité et deux logements destinés au personnel.
L’objectif du projet est de trouver le meilleur compromis
entre confort et coût (de construction et d’exploitation) :
compromis qui sera trouvé par simulations dynamiques et
étude économique. Les meilleures conditions de confort
sont atteintes en adoptant au maximum des concepts de
bioclimatisme.
La démarche vise tout d’abord à limiter l’utilisation de
matériaux importés et favorise ainsi une construction en
bloc de terre compressée de 30 cm d’épaisseur. Cette
solution a de multiples impacts :
Excellente résistance mécanique ;
Bonne régulation de l’humidité de l’air ;
Très bonne inertie ;
– Terre disponible et pressée manuellement sur
chantier ;
– Limite l’importation de matériaux et le coût de
construction.
Un excellent compromis entre confort thermique et
visuel est indispensable et souvent difficile à trouver dans
ce genre de climat. Une attention toute particulière est
portée non seulement sur l’orientation suivant un axe
Est/Ouest mais aussi sur la protection des fenêtres : le
rayonnement solaire direct est ainsi masqué par des
débords de toiture au-dessus des murs Sud et Nord, par
un auvent sur la façade Est et un mur claustra en façade
Ouest. Les murs ajourés permettent la circulation d’air et
offrent une protection solaire.
La toiture est l’élément constructif le plus soumis à
l’énergie solaire : sa conception permet de limiter les
risques de surchauffe en évacuant la chaleur emmagasinée
la journée. Ainsi, un large espace est prévu entre la toiture
et le plafond épais qui isole l’intérieur du bâtiment. Cet
espace permet une aération naturelle en continu et la
toiture permet d’ombrer complètement le plafond.
Le site n’ayant pas accès au réseau d’électricité, les
différents bâtiments ne peuvent avoir recours à un système
de climatisation traditionnel. L’architecture bioclimatique
permet de s’en passer par les différents principes énoncés
ci-dessus (protections solaires, conception de la toiture,
inertie thermique), mais il est indispensable de sensibiliser
le personnel sur le fonctionnement des bâtiments : durant
la journée, toutes les fenêtres sont fermées et protégées,
durant la nuit, les dispositifs de ventilation naturelle sont
adoptés : évacuation de la chaleur emmagasinée par l’inertie
par circulation d’air entre les différents ouvrants.
Stratégie de mise en œuvre
et financement
Aux vues du constat de la situation sanitaire du pays, le
projet a été initié en 1998 et financé intégralement par
l’association Barkoundouba dans la Drôme en France.
La conception bioclimatique s’est avérée la solution
constructive la plus adaptée là où l’accès à l’énergie est
difficile et les contraintes climatiques peu favorables
au maintien de conditions intérieures confortables.
L’association Barkoundouba a donc confié la conception
bioclimatique à l’ONG française GERES avec un objectif
de surcoût limité à 15 %.
Le programme de Promotion de l’Artisanat au Burkina
(PAB) a assuré la coordination de tous les acteurs et
le bon déroulement de la mise en œuvre du projet. Le
cahier des charges a été établi par du personnel médical
Thématique : La planification énergétique sectorielle
Fiche technique PRISME nº4
8
L’architecture bioclimatiqueL’architecture bioclimatique
Étude de cas (suite)
du Burkina Faso, le fonctionnement étant assuré par du
personnel burkinabé.
Le programme PAB a favorisé l’engagement de petites
entreprises locales permettant de valoriser l’économie et
les savoirs-faire du pays.
Résultats techniques
et financiers
Les résultats techniques de ce projet sont difficilement
chiffrables car il n’y a aucune consommation d’énergie. Et
c’est là tout l’enjeu : la conception bioclimatique permet
d’atteindre des conditions intérieures confortables sans
système de ventilation mécanique ou de climatisation.
Les résultats financiers laissent apparaître un coût de 150 e/m
2
pour un total de 64 200 f qui a été optimisé par une excellente
organisation des bâtiments. Le surcoût lié au bioclimatisme est
évalué à 15 %. Les résultats semblent tout à fait satisfaisants
car le même type de projet a été reproduit à Douma, toujours
au Burkina Faso.
Conclusion
Ce projet est une solution pertinente à l’amélioration du
cadre de vie d’une population n’ayant pas accès aux mêmes
services de santé des pays développés. Il s’avère qu’il est
tout à fait possible d’éviter le recours à l’énergie pour
satisfaire le confort des occupants.
Malgré tout, on pourrait penser que l’accès à l’électricité
et/ou à l’eau chaude sanitaire est une nécessité dans ce
type d’établissement. Éviter le recours à des combustibles
importés ou à un raccordement au réseau électrique se
fait par valorisation de l’énergie solaire, photovoltaïque ou
thermique.
Le projet a permis aux acteurs burkinabés d’acquérir
une certaine expérience non seulement en architecture
bioclimatique mais aussi dans le déroulement de tel projet.
De fait, ces derniers possèdent en main toutes les clés
nécessaires à la reproduction d’une telle expérience dans
la mesure où les financements sont disponibles.
Références
Maîtrise de l’énergie dans les établissements de santé
des pays en développement : guide technique réalisé
par la région PACA, le conseil régional des Bouches du
Rhône, l’Institut de l’énergie et de l’environnement de
la Francophonie IEPF, l’agence intergouvernementale de
la francophonie, l’ADEME et le GERES.
http://www.iepf.org/docs/prisme/Energ_sante.pdf
Dispensaires – « Soigner et se soigner dans le confort
d’une architecture bioclimatique ». BARKOUNDOUBA
ET DOUMA, 2003.
http://162.23.39.120/dezaweb/ressources/resource_
fr_23960.pdf
Les fiches techniques PRISME
(Programme International de Soutien à la
Maîtrise de l’Énergie) sont publiées par l’IEPF.
Directeur de la publication :
Fatimata DIA Touré, directrice, IEPF
Comité éditorial :
Sibi Bonfils, directeur adjoint, IEPF
Jean-Pierre Ndoutoum, responsable de programme, IEPF
Supervision scientifique et technique :
Maryse Labriet, Environnement Énergie Consultants
Rédaction :
Frédéry Lavoye en collaboration avec André De Herde,
Cellule de recherche « Architecture et Climat »,
Université Catholique de Louvain, Belgique
fredery.lavoye@gmail.com
Édition et réalisation graphique :
Communications Science-Impact
L’Institut de l’énergie et de l’environnement
de la Francophonie (IEPF) est un organe
subsidiaire de l’Organisation internationale
de la Francophonie (OIF). Il est en
1988 de la volonté des chefs d’État et de
gouvernement des pays francophones de
conduire une action concertée visant le
développement du secteur de l’énergie dans
les pays membres. En 1996, cette action a
été élargie à l’Environnement. Basé à Québec
(Canada), l’Institut a aujourd’hui pour
mission de contribuer au renforcement des
capacités nationales et au développement
de partenariats dans les domaines de
l’énergie et de l’environnement.
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Imprimé avec des encres végétales sur du
papier dépourvu d’acide et de chlore et
contenant 50 % de matières recyclées dont
15 % de matières post-consommation.
Imprimé en janvier 2008
50 %
... 3). . The " scripts " (basic texts of the lectures), that have as references " basic mile stones " of the related literature2345, have been created as hypertext, with representative images (useful for memorizing), links to external web-pages, attached files for studying in depth subjects and tests (fig. 4-5). ...
Article
Full-text available
In the last years, the terms "ecological, sustainable, green" have been used and abused, also in buildings and settlements design. On the other hand, usually, "ecological" aspects are not yet well integrated in the design laboratories of architecture and technological faculties and schools. Finally, with the new economy, also the didactic approach and the available educational tools are evolving. This paper introduces the advanced educational experience of a project regarding a blended eLearning course, that integrates Swiss Universities, laboratories and Superior Technical School with expertise in architecture, energy, ecology, technology, pedagogy, design and communication. The Ecology in Architecture Design (EAD) course covers the basic concept and knowledge about integration of ecology into the architectural design.
Article
Full-text available
This paper introduces the advanced educational experience of a project regarding a blended learning course, involving Swiss universities, laboratories and universities of applied science with expertise in architecture, energy, ecology, technology, pedagogy, design and communication. The Ecology in Architecture Design (EAD) course covers the basic concept and knowledge about integration of ecology into the architectural design. The article describes the pedagogical, graphical and technological choices made by the project team in order to enable students not only to analyze the ecological implications of buildings construction, but also to give to the next generation of architects the skills to include these components in their professional activity. Finally, the article focuses on the results of the testing of the prototype module within the course of Technology – Building Physics at the Academy of Architecture of Mendrisio in the academic year 2004/2005. Results of the questionnaire filled in by students to evaluate the overall experience are provided.
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