Content uploaded by Christian de Visscher
Author content
All content in this area was uploaded by Christian de Visscher on Feb 26, 2016
Content may be subject to copyright.
Politiques et management
public
Le coup dans l'eau de Copernic : réforme de la haute fonction
publique, nouvelle gestion publique et particratie en Belgique
Christian de Visscher
Résumé
La réforme Copemic en Belgique semble démontrer une de fois de plus que les réformes du secteur public, provenant
d'idées maturées ailleurs, ne donnent souvent pas les résultats escomptés au départ lorsqu'elles se heurtent aux «
tendances lourdes » au système politico-administratif du pays. Dans le cas belge, les partis politiques sont, dans les
politiques de réformes comme dans la conduite de l'action publique en général, les acteurs incontournables dans le
processus décisionnel. Leur puissance s'appuie sur les cabinets ministériels. En dépit des critiques adressées aux
dirigeants politiques sur les dysfonctionnements dans la relation politico-administrative, et de circonstances favorables au
lancement d'une telle réforme, Copemic n'a pas réussi à imposer le modèle contractuel tant vanté par le courant de la
NGP. La résistance des partis contre l'abolition des cabinets et la méthode « brutale » adoptée par le ministre pour
imposer sa réforme de la haute fonction publique ont débouché sur un « coup dans l'eau ».
Citer ce document / Cite this document :
de Visscher Christian. Le coup dans l'eau de Copernic : réforme de la haute fonction publique, nouvelle gestion publique
et particratie en Belgique. In: Politiques et management public, vol. 23, n° 4, 2005. Le management public à l'épreuve de
la politique. Actes du quatorzième Colloque international - Bordeaux, jeudi 17 mars et vendredi 18 mars 2005 organisé
en collaboration avec Sciences-Po Bordeaux - Tome 2. pp. 33-51.
doi : 10.3406/pomap.2005.2299
http://www.persee.fr/doc/pomap_0758-1726_2005_num_23_4_2299
Document généré le 17/10/2015
LE
COUP
DANS
L'EAU
DE
COPERNIC
:
RÉFORME
DE
LA
HAUTE
FONCTION
PUBLIQUE,
NOUVELLE
GESTION PUBLIQUE
ET
PARTICRATIE
EN
BELGIQUE
Christian
de
VISSCHER*
Résumé
La
réforme
Copemic
en
Belgique
semble
démontrer
une
de
fois
de
plus
que
les
réformes
du
secteur
public,
provenant
d'idées
maturées
ailleurs,
ne
donnent
souvent
pas
les
résultats
escomptés
au
départ
lorsqu'elles
se
heurtent
aux
«
tendances
lourdes
»
au
système
politico-administratif
du
pays.
Dans
le
cas
belge,
les
partis
politiques
sont,
dans
les
politiques
de
réformes
comme
dans
la
conduite
de
l'action
publique
en
général,
les
acteurs
incontournables
dans
le
processus
décisionnel.
Leur
puissance
s'appuie
sur
les
cabinets
ministériels.
En
dépit
des
critiques
adressées
aux
dirigeants
politiques
sur
les
dysfonctionnements
dans
la
relation
politico-administrative,
et
de
circonstances
favorables
au
lancement
d'une
telle
réforme,
Copemic
n'a
pas
réussi
à
imposer
le
modèle
contractuel
tant
vanté
par
le
courant
de
la
NGP.
La
résistance
des
partis
contre
l'abolition
des
cabinets
et
la
méthode
«
brutale
»
adoptée
par
le
ministre
pour
imposer
sa
réforme
de
la
haute
fonction
publique
ont
débouché
sur
un
«
coup
dans
l'eau
».
*
Université
catholique
de
Louvain,
Département
des
Sciences
politiques
et
sociales.
Revue
POLITIQUES
et
management
public,
Volume
23,
n°
4,
décembre
2005.
©
Institut
de
Management
Public
-
2005.
34
Christian
de
VISSCHER
L'analyse
comparative
des
réformes
inspirées
de
la
Nouvelle
Gestion
Publique
(Pollitt
&
Bouckaert,
2004
;
Timsit,
2004
;
de
Visscher
&
Varone,
2004)
met
en
évidence
l'importance
des
variables
contextuelles
et
du
rôle
des
acteurs
dans
l'interprétation
et
la
mise
en
œuvre
des
changements.
Comme
l'exemple
de
la
réforme
Copernic
en
Belgique
semble
le
démontrer
une
de
fois
de
plus,
les
réformes
du
secteur
public,
provenant
d'idées
maturées
ailleurs,
ne
donnent
souvent
pas
les
résultats
escomptés
au
départ
lorsqu'elles
se
heurtent
aux
«
tendances
lourdes
»
ou
aux
«
trajectoires
»
propres
au
système
politico-administratif
du
pays
(Hood,
1999).
Ces
systèmes,
en
règle
générale,
reposent
sur
des
arrangements
institutionnels
solides
et
bénéficient
de
coalitions
de
soutien
auprès
des
acteurs
politiques
et
administratifs
face
auxquels
les
projets
de
modernisation
trop
ambitieux
ne
résistent
guère.
Politics
et
policies
sont
ainsi
intimement
liés.
Comme
son
nom
l'indique,
Copernic
se
voulait
une
réforme
grandiose
et
radicale,
fondée
sur
les
principes
de
la
Nouvelle
Gestion
Publique
(NGP)
;
elle
a
finalement
accouché
d'une
souris
torpillée
par
ceux-là
mêmes
qui
l'avaient
soutenue
au
départ,
à
savoir
les
partis
politiques
!
Sans
vouloir
rejouer
ici
ce
«
grand
classique
»
de
la
dramaturgie
managériale,
nous
pensons
qu'il
n'est
pas
sans
intérêt
de
mettre
en
valeur
le
cas
belge,
tant
le
rôle
des
partis
dans
les
politiques
de
réformes,
et
plus
généralement
dans
la
conduite
de
l'action
publique,
y
est
particulier.
L'étude
a
trait
ici
à
la
réforme
Copernic
lancée
en
1999
par
un
gouvernement
«
arc-en-ciel
»
(libéral,
socialiste
et
écolo)
à
la
suite
de
plusieurs
scandales
-
l'Affaire
Dutroux
en
1996,
la
«crise
de
la
dioxine»
en
1999
-
révélateurs
de
graves
dysfonctionnements
dans
les
appareils
administratifs
et
judiciaires.
Nous
y
abordons
successivement
:
-
quelques
éléments
explicatifs
sur
l'importance
des
partis
dans
le
système
de
la
décision
politique
et
sur
le
rôle
des
cabinets
ministériels
en
Belgique
;
-
le
projet
de
réforme
Copernic
examiné
ici
uniquement
dans
ses
aspects
touchant
à
la
relation
entre
les
autorités
politiques
et
la
haute
administration
;
-
une
interprétation
des
causes
d'échec
de
cette
réforme
à
partir
de
la
théorie
des
«
marchés
bureaucratiques
»
de
Christopher
Hood.
Les
cabinets
En
Belgique,
la
légitimité
des
pouvoirs
publics
est
assez
faible.
Le
ministériels,
corporatisme
et
l'égalitarisme
y
ont
favorisé
un
État
«modeste»,
jouant
tout
au
un
maillon
plus
un
rôle
d'arbitre
entre
les
revendications
émanant
des
représentants
des
essentiel
dans
différents
clivages
(linguistiques,
philosophiques
et
sociaux)
ou
«
piliers
»1
de
le
contrôle
de
la
société
civile,
et
déléguant
de
multiples
tâches
à
un
secteur
associatif
très
l'action
étendu
et
diversifié,
dont
les
activités
de
services
à
la
société
-
en
matière
de
publique
et
des
soins
de
santé,
d'enseignement,
d'assurances
sociales,
...-
ont
souvent
services
précédé
la
mise
en
place
d'une
intervention
directe
ou
d'un
encadrement
administratifs
général
par
les
pouvoirs
publics.
Les
décisions
politiques
se
prennent
de
manière
très
collective,
suivant
des
procédures
institutionnalisées,
qui
permettent
non
seulement
aux
groupes
d'intérêts
de
faire
entendre
leur
point
Traduit
du
néerlandais
:
zuil.
Le
coup
dans
l'eau
de
Copernic
:
réforme
de
la
haute
fonction
publique,
35
nouvelle
gestion
publique
et
particratie
en
Belgique
de
vue,
mais
surtout
aux
partis
politiques
de
se
placer
au
centre
de
l'échiquier
en
maîtrisant
l'agenda
politique,
en
jouant
les
courtiers
ou
les
«
entremetteurs
»
entre
les
parties
en
cause
-
par
exemple
lors
de
tensions
sociales
ou
de
conflits
entre
communautés
linguistiques
-
et
de
dénouer
les
situations
de
crise.
Depuis
les
années
1960,
on
a
ainsi
pris
l'habitude
de
qualifier
le
système
belge
de
«
particratique
»1,
et
les
présidents
de
parti
de
véritables
«
belles-mères
»
du
gouvernement
!
Rien
ne
peut
se
faire
sans
leur
consentement.
Pour
assurer
leur
emprise
sur
le
système
politico-administratif,
les
partis
politiques
s'appuient
sur
les
cabinets
ministériels2.
Les
membres
des
cabinets
sont
nommés
au
grand
choix
par
les
directions
de
ces
partis.
Suivant
les
textes
réglementaires,
le
cabinet
doit
assurer
le
suivi
politique
pour
le
compte
du
ministre
des
dossiers
traités
par
l'administration;
en
d'autres
termes,
il
contrôle
l'opportunité
politique
des
propositions
émanant
de
l'administration
et
veille
au
respect
par
cette
dernière
des
directives
venant
du
ministre.
Mais
la
pratique
a
montré
que
les
conseillers
du
ministre
ne
se
limitaient
pas
seulement
aux
aspects
politiques
des
dossiers,
mais
étendaient
également
leur
intervention
aux
aspects
techniques
de
ceux-ci.
Outre
le
fait
que
la
distinction
entre
aspects
techniques
et
politiques
n'est
pas
toujours
très
aisée
à
opérer,
le
rôle
des
cabinets
s'est
encore
amplifié
en
raison
de
la
relation
de
méfiance
vis-à-vis
des
fonctionnaires
dirigeants,
dont
la
nomination
a
depuis
longtemps
été
fondée,
en
partie
du
moins,
sur
des
critères
d'ordre
politique
de
manière
à
assurer
une
représentation
équilibrée
des
grandes
familles
politiques
(socialiste,
libérale,
sociale-chrétienne)
au
sein
de
la
haute
administration.
Plus
récemment,
le
système
des
gouvernements
de
coalition
à
quatre
ou
à
cinq
partis
a
encore
renforcé
l'emprise
-
et
les
effectifs
-
des
cabinets
du
premier
et
des
vice-premiers
ministres,
dont
le
rôle
de
chef
de
file
pour
leur
parti
impose
une
surveillance
continue
des
projets
politiques
des
ministres
appartenant
aux
autres
partis
de
la
coalition
!
Et
à
rencontre
de
ce
qu'on
peut
observer
dans
les
pays
voisins
-
par
exemple,
en
France,
au
Royaume-Uni
ou
aux
Pays-Bas
-
où
ce
sont
les
hauts
fonctionnaires
qui
jouent
les
courtiers,
les
médiateurs
ou
les
animateurs
dans
la
coordination
interministérielle
des
politiques,
en
Belgique,
ce
rôle
est
rempli
par
les
réunions
«
intercabinets
»
auxquelles
les
fonctionnaires
en
règle
générale
ne
participent
pas.
Dans
ce
1
Par
analogie
avec
la
«
partitocrazia
»
italienne,
c'est-à-dire
une
«
variante
de
la
démocratie
parlementaire
classique
(...)
dans
laquelle
la
décision
politique
revient
aux
partis
plutôt
qu'aux
autres
sous-structures
du
système
politique
(telles
que
le
parlement,
le
gouvernement
et
son
administration,
le
pouvoir
judiciaire
et
la
presse.
»
(De
Winter(1981))
;
voir
aussi
Dewachter
(1981
et
1995).
A
noter
que
depuis
la
fin
des
années
soixante-dix,
il
n'y
a
plus
de
partis
nationaux
en
Belgique.
Les
grands
partis
(socialiste,
libéral,
social-chrétien)
se
sont
divisés
en
«
ailes
»
linguistiques,
devenus
au
fil
du
temps
des
partis
totalement
autonomes.
En
raison
du
système
électoral
à
la
proportionnelle,
la
formation
d'un
gouvernement
disposant
d'une
majorité
absolue
à
la
Chambre
des
représentants
exige
de
réunir
au
moins
quatre
partis
autour
de
la
table
de
négociation.
L'apparition
des
partis
verts
et
des
partis
d'extrême
droite
au
début
des
années
'90
a
renforcé
l'éparpillement
des
voix
et
donc
les
difficultés
pour
former
une
majorité
stable
au
Parlement.
2
Sur
le
rôle
et
le
pouvoir
des
cabinets
en
Belgique,
voir
:
Destexhe,
Eraly
&
Gillet
(
2003),
Eraly
(2002),
Stenmans(1999),
Wilwerth
(2001).
36
Christian
de
VISSCHER
pays,
la
position
centrale
des
hauts
fonctionnaires
dans
le
dispositif
servant
à
l'élaboration
et
la
coordination
de
l'action
publique
est
occupée
par
les
membres
des
cabinets
ministériels
(de
Visscher,
le
Bussy
&
Eymeri,
2004).
L'extension
des
cabinets
ministériels
résulte
par
ailleurs
aussi
de
carences,
vraies
ou
supposées,
de
l'administration.
On
lui
a
reproché
fréquemment
sa
lenteur
ou
son
manque
de
réactivité
face
à
l'urgence
invoquée
par
le
pouvoir
politique.
Plutôt
que
d'attendre
un
conseil
ou
une
étude
qui
tarde
à
lui
parvenir,
le
ministre
préfère
alors
confier
le
travail
à
un
proche
collaborateur.
Les
cabinets
ont
également
servi
à
pallier
l'absence
réelle,
à
certains
moments
de
notre
histoire
administrative,
de
compétences
techniques
au
sein
de
l'administration.
Ainsi
en
a-t-il
été
lorsque
les
premiers
gouvernements
régionaux
se
sont
mis
en
place
sans
le
moindre
appareil
administratif
provisoire.
Comme
les
ministres
avaient
pris
l'habitude
de
s'appuyer
uniquement
sur
des
collaborateurs
personnels,
on
a
dans
bien
des
cas
fait
traîner
les
choses
pour
mettre
en
place
les
nouvelles
administrations
régionales
et
communautaires
et
profité,
au
passage,
pour
les
truffer
de
conseillers
de
cabinet
démissionnaires
en
fin
de
législature,
dans
le
but
de
les
récompenser
pour
les
services
accomplis
au
profit
de
leur
ministre
(Norrenberg,
2001).
La
pratique
belge
des
cabinets
ministériels
présente
l'inconvénient
majeur
de
mettre
en
péril
la
continuité
dans
la
gestion
des
politiques
publiques
(Poullet,
1999).
La
rotation
importante
du
personnel
politique
couplée
à
la
mise
à
l'écart
de
la
haute
administration
entraîne
des
changements
fréquents
ou
des
abandons
de
politiques
en
cours
d'exécution.
Il
s'en
dégage
également
une
faible
attention
pour
le
fonctionnement
de
la
machinerie
administrative
et
par
corollaire
sur
l'exécution
concrète
des
politiques
adoptées,
voire
sur
le
service
rendu
au
citoyen.
Lors
des
discussions
préliminaires
à
Copernic,
d'aucuns
ont
dénoncé
le
risque
de
voir
le
système
s'engluer
ainsi
dans
un
cercle
vicieux
(Mine,
2002)
:
l'extension
des
cabinets
tend
à
déresponsabiliser
et
à
démotiver
les
fonctionnaires
dirigeants
et,
sur
le
long
terme,
à
mettre
à
mal
leur
expertise
et
leurs
compétences
techniques
en
raison
du
fait
qu'ils
sont
dépossédés
des
dossiers
ou
projets
politiquement
importants.
Cette
situation
contribue
à
son
tour
à
justifier
le
maintien
de
cabinets
importants,
à
inciter
les
fonctionnaires
à
prendre
une
carte
de
parti
et
à
exercer
des
responsabilités
dans
un
cabinet
pour
satisfaire
leurs
ambitions
personnelles
en
termes
de
carrière
et,
en
conséquence,
à
amener
les
hommes
politiques
et
les
partis
à
promouvoir
au
sein
des
administrations
les
fonctionnaires
qui
ont
été
"formés"
par
eux
dans
les
cabinets.
Il
n'est
pas
sans
intérêt
aussi
de
souligner
que
la
fonction
publique
dirigeante
en
Belgique
est
en
règle
générale
assez
fragmentée
et
peu
élitiste.
Jusqu'à
la
réforme
Copernic,
il
n'y
avait
pas
de
statut
commun
aux
hauts
fonctionnaires,
et
il
n'y
a
toujours
pas
de
formation
menant
aux
plus
hautes
responsabilités
administratives,
favorisant
ainsi
une
culture
ou
une
socialisation
commune.
La
mobilité
dans
les
fonctions
dirigeantes
est
inexistante.
De
plus,
les
hauts
fonctionnaires
ont
peu
le
réflexe
de
défense
de
leurs
intérêts,
ce
qui
contraste
par
exemple
avec
les
réseaux
formés
par
les
grands
corps
en
France.
Le
coup
dans
l'eau
de
Copernic
:
réforme
de
la
haute
fonction
publique,
nouvelle
gestion
publique
et
particratie
en
Belgique
37
L'autonomie
de
gestion
des
fonctionnaires
dirigeants
est
bridée
par
l'intervention
des
services
et
organes
de
contrôle
(Budget,
Fonction
publique).
Ceux-ci
ne
se
sont
jamais
montrés
fort
favorables
à
des
réformes
visant
à
responsabiliser
l'administration
en
lui
accordant
plus
de
flexibilité
dans
l'utilisation
de
ses
ressources
(de
Visscher,
1996).
Ils
ont
toujours
été
réticents
à
relâcher
les
contrôles
axés
sur
la
régularité
et
l'opportunité
des
dépenses;
au-delà
des
divergences
sur
le
changement
de
méthodes,
leur
résistance
est
motivée
également
par
le
souci
de
maintenir
leur
emprise
sur
les
ministères
«dépensiers».
On
remarque
ainsi,
dans
le
cas
de
la
Belgique,
que
la
nature
particratique
du
système
politique
tend
à
maintenir,
voire
à
renforcer,
un
rapport
de
force
défavorable
aux
fonctionnaires
dirigeants
dans
leur
relation
avec
le
personnel
politique,
lequel
engendre
une
large
insatisfaction
auprès
de
ceux-ci,
et
peut
en
outre
être
source
de
dysfonctionnements
dans
la
conduite
de
l'action
des
pouvoirs
publics.
Copernic
:
une
Cette
réforme
n'aurait
sans
doute
jamais
vu
le
jour
si
le
pays
n'avait
pas
révolution
au
connu
la
fameuse
«
crise
de
la
dioxine
»
deux
mois
avant
les
élections
nom
d'un
législatives
de
juin
1999.
Ces
tristes
événements
mettaient
une
fois
de
plus
mieux-être
en
lumière
de
graves
dysfonctionnements
dans
l'administration
fédérale
:
pour
le
client
!
négligences
dans
le
contrôle
de
la
chaîne
alimentaire
dues
en
grande
partie
au
manque
de
coordination
entre
les
ministères
concernés
(Santé
publique
et
Agriculture),
suivies
de
nombreux
cafouillages
dans
la
gestion
de
la
crise
et
de
ses
conséquences,
etc..
Les
partis
sociaux-chrétiens
(CVP
et
PSC),
au
pouvoir
depuis
plus
de
quarante
ans
(
!)1
,
paient
la
note
et
sont
renvoyés
dans
l'opposition
après
les
élections
législatives.
Une
nouvelle
coalition
atypique
se
met
alors
en
place
réunissant
libéraux,
socialistes
et
écolos
sous
la
houlette
de
G.
Verhofstadt.
Luc
Van
Den
Bossche
(socialiste
flamand),
qui
a
déjà
été
en
charge
de
la
réforme
de
l'administration
dans
le
Gouvernement
flamand,
est
nommé
ministre
de
la
Fonction
publique
et
des
Réformes
administratives.
L'homme
est
connu
pour
son
franc-parler
et
sa
ténacité
dans
sa
façon
de
conduire
sa
politique.
Originaire
de
Gand
comme
le
Premier
ministre,
il
bénéficie
de
l'estime
et
de
l'appui
total
de
ce
dernier.
Le
ton
est
donné
dès
juillet
19992.
Le
Gouvernement
entend
prendre
le
taureau
par
les
cornes
en
inscrivant
la
modernisation
de
l'administration
en
premier
lieu
dans
l'Accord
de
Gouvernement.
Luc
Van
Den
Bossche,
en
bon
socialiste
pragmatique,
trouve
sa
source
d'inspiration
dans
le
courant
dominant
de
cette
fin
de
siècle
qu'est
la
Nouvelle
Gestion
Publique.
Les
priorités
reprises
dans
l'Accord
en
témoignent
:
-
Une
meilleure
prise
en
compte
du
citoyen
en
tant
que
«
client
»
du
service
public
:
"La
priorité
du
citoyen
sur
l'administration
constituera
un
autre
critère
déterminant
(...)
les
citoyens
sont
les
premiers
concernés
par
ces
réformes.
1
En
formant
une
coalition
en
alternance
avec
les
partis
socialistes
et
libéraux.
2
Gouvernement
fédéral,
La
voie
vers
le
XXIe
siècle.
Déclaration
gouvernementale
et
accord
de
Gouvernement,
Bruxelles,
Services
du
Premier
ministre,
1999.
38
Christian
de
VISSCHER
Le
Gouvernement
ne
peut
assurer
correctement
les
missions
de
l'Etat
sans
leur
adhésion
(...).
-
L'application
du
principe
de
subsidiarité
dans
la
gestion
des
affaires
publiques:
"Le
Gouvernement
étudiera
dans
plusieurs
domaines
de
compétences
comment
il
peut
remplir
ses
missions
au
mieux
tout
en
garantissant
l'égalité
d'accès
pour
tous:
soit
en
renforçant
l'action
publique,
en
déléguant
des
missions
et
des
services,
en
favorisant
la
collaboration
entre
les
secteurs
public
et
privé
ou
en
se
dégageant
de
certaines
tâches
vers
le
secteur
privé"{...).
-
Le
souci
de
l'efficience
et
de
la
simplification:
"Le
Gouvernement
fédéral
diminuera
de
10
%,
au
cours
des
deux
années
à
venir,
la
charge
administrative
des
citoyens
et
des
entreprises
pour
réduire
d'un
quart
l'ensemble
des
formalités
et
obligations
d'ici
à
la
fin
de
la
législature.
Pour
pouvoir
contrôler
ces
objectifs
quantitatifs,
le
Gouvernement
mettra
en
place
des
instruments
de
mesure
(...)".
-
Et
enfin
la
clarification
des
rôles
entre
le
politique
et
l'administration:
"(...)
il
y
a
lieu
de
limiter
le
nombre
des
membres
du
cabinet
et
d'optimaliser
le
dialogue
entre
le
cabinet
et
l'administration.
De
même,
les
fonctionnaires
devront
exécuter
loyalement
la
politique
qui
aura
été
légitimée
par
une
majorité
pariementaire
(...)".
La
réforme
Copernic1
se
déroule
ensuite
selon
un
processus
que
l'on
peut
décomposer
rétrospectivement
en
trois
phases
:
-
une
phase
d'étude
et
de
réflexion,
relativement
courte,
dont
sortent
successivement
la
"note
de
Bouillon"(septembre
1999),
le
rapport
des
groupes
de
travail
(février
2000)2
ainsi
que
la
note
"Fondements
de
la
modernisation
de
l'administration
fédérale"
approuvée
par
le
Conseil
des
ministres
le
28
avril
2000
;
-
une
phase
décisionnelle
au
cours
de
laquelle
le
Gouvernement
adopte
le
cadre
juridique
de
la
nouvelle
structure
des
ministères,
appelés
désormais
services
publics
fédéraux,
d'une
part
et
de
la
nouvelle
gestion
des
ressources
humaines
d'autre
part3
;
1
Pour
une
présentation
critique
du
plan
Copernic,
voir
par
exemple
:
de
Visscher
(2002),
Jacob
(2000),
Piraux
(2004).
2
Luc
Van
Den
Bossche,
Le
contexte
des
pouvoirs
publics
dans
une
société
en
mutation,
Bruxelles,
Ministère
de
la
Fonction
publique,
1999
("Note
de
Bouillon");
Gouvernement
fédéral,
Vers
une
modernisation
des
administrations
publiques.
Rapport
des
groupes
de
travail
Structure
de
l'organisation
et
Gestion
du
Personnel,
Bruxelles,
Ministère
de
la
Fonction
publique,
16
février
2000.
3
Parmi
les
textes
adoptés
au
cours
de
cette
période,
qui
s'est
clôturée
à
la
fin
2001,
il
y
a
lieu
de
retenir
tout
particulièrement,
l'arrêté
royal
préparant
la
mise
en
place
de
cellules
des
ressources
humaines
dans
les
ministères
fédéraux,
l'arrêté
royal
du
7
novembre
2000
portant
création
et
composition
des
organes
communs
à
chaque
service
public
fédéral,
l'arrêté
du
22
décembre
2000
fixant
les
principes
généraux
du
statut
administratif