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16 Cartographie de l’aire de répartition de l’arganier (Argania spinosa L. Skeels)
dans la région orientale du Maroc par le G.P.S. combiné au S.I.G.
Revue « Nature & Technologie ». C-Science de l'Environnement, n° 12/Janvier 2015. Pages 16 à 24
Cartographie de l’aire de répartition de l’arganier (Argania spinosa
L. Skeels) dans la région orientale du Maroc par le G.P.S. combiné
au S.I.G.
Khalil Faouzi a, Yahia Rharrabti a,c, Azzouz Boukroute a, Hamid Mahyou b, Abdelbasset
Berrichi a
a Laboratoire de Biologie des Plantes et des Microorganismes, Département de Biologie. Faculté des Sciences, Université Mohamed I, Oujda (Maroc).
b Centre Régional de la Recherche Agronomique d’Oujda (Maroc)
c Laboratoire des Ressources Naturelles et Environnement, Faculté Polydisciplinaire de Taza (Maroc)
Abstract
The argan tree is a singular curiosity of Morocco either at biogeographical, ecological or forest levels. Due to its exceptional qualities, this
tree is of great interest on behalf of scientists, foresters, and tourists. For the local populations, it is synonymous of life. Moreover, the
international scope taken by the argan tree and its registration in the UNESCO world heritage as well as the spectacular commercial
success of argan oil, made this ecosystem a subject of very particular attention at both national and international scale. The present work
aims to develop an argan tree distribution map in the eastern region of Morocco by means of G.P.S. (Global Positioning System) combined
to G.I.S. (Geographic Information System). The study focused on two sites, the piedmonts of western Beni-Snassen and the plain of Bou-
Areg. Distribution of argan tree in the piedmonts of western Beni-Snassen is presented as a matorral degraded by zone. Thus, we identified
four zones at this site according to the density of trees. Companion species to the argan tree in these zones were also identified. On the
other hand, argans of the plain of Bou-Areg are very strongly degraded and they are represented by only two trees: the first at Kariat
Arekmane and the second in Bled Arimane. Our study showed that argan tree occupies only a small area in the eastern region of Morocco
and its irrational exploitation may lead to its complete disappearance in the future.
Keywords: Argan tree, north-eastern region of Morocco, G.P.S., S.I.G., Beni-Snassen, Bou-Areg.
Nature & Technology
Soumis le : 19 Mai 2014
Forme révisée acceptée le :02 Juillet 2014
Email de l'auteur correspondant :
khalil_faouzi@yahoo.fr
Cartographie de l’aire de répartition de l’arganier (Argania spinosa L. Skeels) 17
dans la région orientale du Maroc par le G.P.S. combiné au S.I.G.
Revue « Nature & Technologie ». C-Science de l'Environnement, n° 12/Janvier 2015. Pages 16 à 24
1. Introduction
Le Maroc est l’un des rares pays d’Afrique du Nord à
disposer d’un ensemble d’écosystèmes endémiques d’une
biodiversité remarquable [1]. L’arganier Argania spinosa
(L). Skeels, est un endémique spécifiquement marocain
[2], c’est une espèce rustique, xéro-thermophile, qui
appartient à la famille tropicale des Sapotacées, dont elle
est la seule représentante septentrionale dans la région
méditerranéenne (Algérie et Maroc) d'où son endémisme
marqué à cette région [3,4]. C’est un arbre forestier à
multi usage, (forestier-fruitier-fourrager) de haute
importance pour le pays tant sur les plan biologique,
biodiversité phytogénétique et écologique que sur le plan
économique et social [5,6]. Il présente de grands intérêts
médicinaux [7] et thérapeutiques [8], ceci grâce à l’huile
extraite de ses fruits. En outre, celle-ci est très recherchée
en cosmétiques comme agent revitalisant la peau et les
cheveux. Cet écosystème repose sur un équilibre entre
ressources et exploitation humaine, et joue également un
rôle important dans la lutte contre la désertification et
l’érosion [9]. Malgré les différents rôles de cette espèce,
actuellement, la menace de dégradation de l’arganeraie est
une préoccupation majeure aussi bien pour la population
que pour les scientifiques [9]. On assiste en effet à une
diminution du couvert arboré, à la fois en surface occupée
et en densité d’arbres. Et cette régression est
essentiellement due à un déséquilibre écologique
d’origine anthropique [10] et elle est surtout conséquente
au déracinement des arbres sans possibilité de les
remplacer [11]. Bien que les recherches
phytosociologiques et phytoécologiques soient
suffisamment développées dans tout le Maroc pour les
principales formations forestières, le peuplement
d’arganier dans la région orientale du Maroc reste peu
étudié. L’existence de l’arganier est signalée dans cette
région dès 1924 par Emberger [12,13]. Il a été aussi cité
par Maire [14] et Tregubov [15]. Cependant, son étude
écologique n’est entreprise que tardivement
[16,17,18,19,20]. Du point de vue phytosociologique,
l’arganier individualise plusieurs associations dont les
singularités écologiques et surtout floristiques et
physionomiques confèrent au paysage du secteur une
originalité exceptionnelle [21,22,23,24] et [25], l’arganier
des piémonts des Béni-Snassen occidentaux appartient à
l’association Periploco-Tetraclinetum sous association
Arganiotesum [26]. D’après Haloui [16], l’étude
phytoécologique de l’arganier des Béni-Snassen,
distingue deux types de groupements : l’arganier à
Periploca laevigata et Kremeriella cordylocarpus et
l’arganier à Calycotome intermedia et Asparagus albus ;
d’après une étude de Ziri et Gmira [20], 60 espèces ont
été recensées à l’intérieur de ces peuplements réparties sur
32 familles et 52 genres. En l’absence de cartographie
précise de l’arganeraie dans la région orientale du Maroc
et d’évaluation des changements survenus dans la période
récente, nous proposons de tester l’utilisation de données
de télédétection à haute résolution spatiale pour la
cartographie du couvert arboré. Le GPS (Global
Positioning System) et les SIG (Système d’Information
Géographique) sont deux outils géomatiques qui, utilisés
conjointement, permettent de cartographier les domaines
forestiers [27]. La cartographie constitue un outil de
travail pratique et synthétique. Elle est perçue comme un
outil d’aide à la décision en aménagement. En même
temps, un moyen privilégié d’aide à la définition des
objectifs et des opérations de gestion de l’espace
constituant un canevas d’intervention pour le gestionnaire.
Celle-ci est assurée à travers des mesures et observations
effectuées, suivies de sorties de terrains régulières [3].
Plusieurs études ont utilisées le S.I.G pour la cartographie
des espèces arborés tel l’arganier [28,29,30].
18 Cartographie de l’aire de répartition de l’arganier (Argania spinosa L. Skeels)
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L’objectif du présent travail est de cartographier et de
déterminer l’aire de répartition de l’arganier dans la
région orientale du Maroc par l’utilisation de la
télédétection spatiale, à l’aide de G.P.S. combiné au S.I.G.
afin de découvrir l’état actuel et de définir un état de
référence sous forme de base de données S.I.G.,
permettant de développer une méthode d’analyse spatio-
temporelle des peuplements d’arganier.
2. Matériels et Méthodes
2.1. Caractérisation climatique et géologique des sites
d’études
L’aire de répartition de l’arganier a été délimitée. Celle-ci
s’étend depuis le littoral méditerranéen du domaine rifain
oriental jusqu’aux Béni-Snassen occidentaux sur la frange
méditerranéenne. L’étude a porté sur deux sites
appartenant à la région orientale du Maroc (Fig. 1) : Les
piémonts des Béni-Snassen occidentaux et la plaine de
Bou-Areg.
Fig. 1. Localisation géographique des sites d’étude. Site
1 : Piémonts des Béni-Snassen occidentaux. Site 2 :
Plaine de Bou-Areg.
Du point de vue climatique, les stations de Bou-Areg, et
des piémonts des Béni-Snassen occidentaux reçoivent une
moyenne annuelle des précipitations qui varie entre 250 et
350 mm. Les températures moyennes minimales sont
enregistrées au mois de janvier (3 à 5°C) et les
températures moyennes maximales au mois de juillet–
août (29 à 33°C). La région d’étude appartient au
bioclimat méditerranéen aride supérieur à semi-aride
inférieur. La chaîne occidentale des Béni-Snassen
présente une stratigraphie et une lithologie variées. Les
formations d’âge jurassique supérieur sont constituées de
carbonates et de grès à ciment calcaire. Ils sont recouverts
par des grès et des calcaires d’âge miocène. Les
formations géologiques des Béni-Snassen sont constituées
de bas en haut par des calcaires, des marnes et des grès;
des calcaires dolomitiques ; des conglomérats et des
calcaires gréseux, et des alluvions graveleuses, des limons
et des éboulis quaternaires. La plaine de Bou-Areg, est
une plaine basse formée de dépôts essentiellement
limoneux d’âge quaternaire épais de plus de 120 m [31].
La succession lithologique comporte un limon argileux
rouge sans graviers, un limon argileux rouge à graviers et
galets, et un limon argileux rouge à graviers.
2.2. Démarche méthodologique
La méthode utilisée pour établir une carte relative à l’aire
de répartition de l’arganier dans la région orientale du
Maroc se présente comme suit :
- La base de cette démarche consiste à la division de la
région en carrés ou en des zones différenciées par certains
indicateurs pour faciliter la gestion de la zone d’étude. Le
choix des indicateurs a été fait en tenant compte du
nombre de pieds, de leurs altitudes, de la superficie
occupée par l’arganier, et des espèces accompagnatrices
de cette espèce, ainsi que la nature du sol. Ce sont des
indicateurs de nature physique phytoécologiques qui
constituent des outils de différenciation des zones.
L’inventaire des espèces végétales accompagnatrices de
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l’arganier a été réalisé dans la zone d’étude, ainsi les
espèces ont été ramassées sur terrain, et déterminer en
utilisant les clés de détermination suivant la flore du
Maroc [25].
- La collecte des données est réalisée à partir d’images
satellitaires en utilisant comme support les cartes
topographiques de la région orientale du Maroc au
1/50.000, et des mesures sur terrain en utilisant le GPS
(Global Positioning Systèm) système de positionnement à
l’aide de satellites « GARMIN » GPS 12 XL. (Les
coordonnées géographiques des pieds de l’arganier et
leurs altitudes ont été déterminées à l’aide du G.P.S.).
- Le traitement des données, a été réalisé au moyen d’un
logiciel appelé ARCGIS (9.3), qui est un outil de type
« Système d’Information Géographique » qui sert à créer,
traiter et cartographier l’information géographique. (La
superficie de l’aire de répartition de l’arganier a été
déterminée au moyen de ce logiciel).
3. Résultats
Le travail de terrain est réalisé dans la région orientale du
Maroc, où nous avons pu délimiter l’aire naturelle de
l’arganier, que ce soit sous forme de peuplement ou
dispersé par individu.
3.1. L’arganier des Béni-Snassen
Le résultat du travail bureautique associé à celui fait sur
terrain est représenté sous forme d’une carte (Fig. 2) qui
montre l’aire de répartition de l’arganier des piémonts des
Béni-Snassen occidentaux et qui se présente comme suit :
Fig. 2. Carte de l’aire de répartition de l’arganier (Argania
spinosa) (L). Skeels dans le site 1 (piémonts des Béni-
Snassen occidentaux).
- A Jbel Takermine et Teniet Albagra (Zone 1), l’arganier
est représenté par 1500 pieds sur une superficie de 2,5
km², soit une densité de 600 pieds/km². Il forme le
matorral le plus dense de la région à une altitude allant de
140 à 280 mètres, sur un substrat calcaire très rocailleux.
Il s’agit d’un peuplement constitué par des sujets de
hauteur qui varie entre 1,5 et 4 mètres (Fig. 3A). Ce sont
des arbres épineux, avec de petites feuilles obovales. Il est
à noter que le nombre de pieds d’arganier varie entre le
versant Nord et Sud ; ce dernier comporte un nombre
assez élevé, car l’arganier est une espèce thermophile. Il
se développe dans les variantes tempérées des bioclimats
semi-arides inférieurs. Les espèces accompagnatrices de
l’arganier dans cette zone sont : Periploca laevigata,
Caralluma europaea, Rhamnus oleoides, Asparagus
altissimus, Asparagus albus, Rhus pentaphylla, Genista
tricuspidata, Chamaerops humilis, Arisarum vulgare,
Lavandula multifida et Ceratonia siliqua.
- An niveau de la zone 2 correspondant à Jbel Mahjouba
et Jbel Bouchene, l’arganier couvre une superficie de 1,5
km², la densité de cette population étant de 100 pieds/km².
Il forme un matorral dégradé avec une densité faible
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située sur le versant Sud-Ouest à une altitude de 295 à 363
mètres. Le substrat est calcaire et très rocailleux. La
hauteur des sujets ne dépasse pas les 2,5 mètres (Fig. 3B).
Ils sont épineux, avec de petites feuilles obovales. C’est
un groupement mixte, qui marque la limite supérieure de
l’arganier et assure la transition entre le domaine à
Argania spinosa et celui à Tetraclinis articulata. Les
espèces accompagnatrices de l’arganier dans cette zone
sont : Phillyrea media, Ceratonia siliqua, Lavandula
dentata, Ampelodesma mauritanica, Genista tricuspidata,
Daphne gnidium, Ononis natrix, Lotus maroccana,
Centaurium umbellatum, Androxa maritima et Eryngium
campestre.
Fig. 3. Photos des pieds d’arganier prises dans le site 1.
A : à Jbel Takermine (Zone1) ; B : à Jbel Bouchene (Zone
2) ; C : à Jbel al Gandoul (Zone 3) ; D : à Jbel Aklim
Alkbir (Zone 4).
- A Jbel AL-Gandoul et Seffah (Zone 3), l’arganier est
représenté par 120 pieds sur une superficie de 1,5 km² soit
une densité de 80 pieds/km² (Fig. 3C). Il forme un
matorral dégradé à une altitude comprise entre 176 et 261
m. Les arbres sont épineux, avec de petites feuilles
obovales. Le substrat est calcaire et très rocailleux. Les
pieds d’arganier existent dans le versant Sud-Ouest mais
sont absents dans le versant Nord-Est ; Ceci confirme que
c’est une espèce thermophile. Ainsi les espèces
accompagnatrices de l’arganier dans cette zone sont :
Calycotome infesta, Genista Erioclada, Asparagus albus,
Thymus munbyanus, Fumana thymifolia, Stipa
tenacissima et Eryngium ilicifolium.
- La zone 4 (Jbel Aklim Alkabir), correspond à
l’arganeraie la moins peuplée, en fait l’arganier est
représenté par 100 pieds occupant sur une superficie de
1,7 km², avec une très faible densité soit de 58 pieds/km²
(Fig. 4C). Les arbres sont épineux, avec de petites feuilles
obovales. Ils forment un matorral fortement dégradé à une
altitude entre 250 et 300 m, sur un substrat calcaire, très
rocailleux, identique à ceux des zones 1,2 et 3. Les
espèces accompagnatrices : Calycotome infesta, Genista
erioclada, Asparagus stipularis, Thymus munbyanus
thymifolia, Stipa tenacessima et Eryngium salicifolium.
3.2. L’arganier de la plaine de Bou-Areg
La figure 4 montre les deux pieds qui existent encore dans
la plaine de Bou-Areg : le premier pied se situe à Kariat
Arekmane à une altitude de 40 m (Fig. 5A), dont les
coordonnées géographiques sont de (35°05'28''N,
2°48'17''O) ; le deuxième se situe à Bled Arimane à une
altitude de 220 m (Fig. 5B) et dont les coordonnées
géographiques sont de (35°02'24''N, 2°45'01''O). La taille
de ces deux arbres est de 5,5 m. Ces arbres sont inermes, à
grandes feuilles spatulées et à fruits assez longs. Le
substrat est rouge, et constitué d’alluvions du quaternaire.
Dans ce site et à cause de la forte dégradation
l’écosystème à arganier (deux pieds recensés), nous
n’avons pu identifier aucune espèce accompagnatrice.
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Fig. 4. Localisation des deux pieds témoins (Argania
spinosa) dans le site 2 (plaine de Bou-Areg).
Fig. 5. Photos des pieds d’arganier prises dans le site 2.
A : à Kariat Arekmane ; B : à Bled Arimane.
4. Discussion
Notre étude est en accord avec des études menées dans la
région sur l’arganier [16,19,20] concernant l’existence de
l’arganier dans la région orientale du Maroc. Ainsi, La
présence de l’arganier dans les piémonts des Béni-
Snassen occidentaux est favorisée par le climat. D’après
Haloui [16], l’existence de l’arganier dans les piémonts
des Béni-Snassen occidentaux est due aux conditions
écologiques optimales réunies dans cette région. En effet,
la région reçoit les influences méditerranéennes, et elle est
soumise à des températures clémentes à élevées. Cet
auteur classe l’arganier parmi les condenseurs
énergiques ; cette faculté intervient pour une part
importante dans son adaptation au climat aride. Les
stations isolées de l’arganier dans les piémonts des Béni-
Snassen occidentaux et dans la haute vallée de l’Oued
Grou (région de Rabat) sont les témoins d’une possible
extension ancienne de l’espèce [22].
Pour l’arganier au niveau de la plaine de Bou-Areg, notre
étude est en accord aussi avec celle de Réda Tazi et al.,
[19] qui ont découvert pour la première fois, la présence
de ces deux pieds dans la plaine de Bou-Areg, et qui sont
de physionomie et d’aspects différents par rapport aux
arbres des piémonts de Béni-Snassen occidentaux à cause
du substrat et de la proximité de la mer. En effet, une
étude menée sur l’arganeraie de trois zones du sud-ouest
du Maroc a montré que 79% des feuilles sont obovales et
seulement 13% sont de forme spatulée [32]. Les deux
pieds de la plaine de Bou-Areg sont témoins de
l’existence de peuplements plus importants avant
l’assèchement du climat et le défrichement de la terre. En
effet, d’après les habitants de Kariat Arekmane, et selon
leurs ancêtres, la région était occupée il y a environ un
siècle par des arbres d’arganier nommés dans la région «
Aryana ». Ces derniers ont été abattus pour offrir cette
terre au chef spirituel qui s’appelait "Lamkadem" pour en
faire des cultures nécessaires à ses besoins. Les seuls
pieds témoins étaient un lieu de repos ombragé pour les
ouvriers agricoles. La découverte des pieds témoins de
l’arganier au niveau de la plaine de Bou-Areg à Kariat
Arekmane et à Bled Arimane justifie la grande superficie
qu’occupait l’arganier [19].
Concernant le sol des zones occupées par l’arganier, ils
sont de nature calcaire rocailleux dans les piémonts des
Béni-Snassen occidentaux et rouge constitué d’alluvions
du quaternaire au niveau de la plaine de Bou-Areg. En fait
d’après Rieuf [33], lorsque les conditions climatiques sont
remplies, l’arganier est à peu près indifférent à la nature
du sol. Sur le plan altitude, on remarque la présence de
l’arganier à une altitude qui varie de 40 m au niveau de la
plaine de Bou-Areg et allant jusqu’au 363 m dans les
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piémonts Béni-Snassen occidentaux. Notre étude est en
accord avec celles de Gentil [34,35] qui a cité que
l’arganier occupe une tranche d’altitude allant du niveau
de la mer jusqu’à 1600 m. La superficie occupée par
l’arganier dans la région orientale du Maroc est de 7,2
km², qui est très faible comparée par rapport au Sud du
Maroc où elle représente une superficie de 8300 km² [36],
soit 0,09 %.
Concernant la richesse végétale accompagnatrices de
l’arganier, on compte un nombre important d’espèces.
L’inventaire des espèces qui se rencontre dans les
peuplements d’arganier dans la région orientale du Maroc
réalisé à partir de 24 relevés de la végétation montre
l’existence de 83 espèces rangées sur 72 genres et 35
familles. Ces résultats confirment ceux de Ziri et Gmira
[20], qui ont recensées 60 espèces à l’intérieur de ces
peuplements réparties sur 32 familles et 52 genres. En
effet, Naggare et M’hirit [37] ont mentionné que les
écosystèmes à arganier se caractérisent par l’imbrication
et l’interpénétration de diverses formations et espèces
végétales. Ils représentent une richesse floristique et
faunistique importantes où s’individualise un endémisme
d’espèces végétales et animales [38].
Ainsi on a déterminé trois types de groupements
d’arganiers : l’arganier à Periploca laevigata à Jbel
Takermine et Teniet Albagra (Zone 1), l’arganier à
Tetraclinis articulata à Jbel Mahjouba et Jbel Bouchene
(Zone 2), l’arganier à Calycotome infesta à A Jbel AL-
Gandoul et Seffah (Zone 3) et à Jbel Aklim Alkabir (Zone
4). Nos résultats confirment ceux de Haloui [16] qui a
mentionné que l’étude phytoécologique de l’arganier des
Béni-Snassen occidentaux, distingue deux types de
groupements : l’arganier à Periploca laevigata et
Kremeriella cordylocarpus et l’arganier à Calycotome
intermedia et Asparagus albus. Alors que d’après
Benabid [26] l’arganier des piémonts des Béni-Snassen
occidentaux appartient à l’association Periploco-
Tetraclinetum sous association Arganiotesum.
Notre étude et nos observations sur le terrain ont révélé
que l’arganeraie de plaine (plaine de Bou-Areg), la plus
accessible et la plus convoité par les agriculteurs est très
fortement dégradée. En revanche, la dégradation de
l’arganier des piémonts des Béni-Snassen occidentaux se
fait à un rythme moins important vu l’attachement des
populations rurales et des coopératives à cet écosystème,
mais son vieillissement inquiète. Au fait, en montagne,
nous avons remarqué que l’arganier est souvent victime
d'un surpâturage qui empêche sa régénération naturelle
par graine. Plusieurs études ont mentionnés également la
régression de l’arganeraie à cause de son usage irrationnel
[2,35,39,40,41 ,10,42,43,44]. De même, l’étude de
Monnier [45] a montré que l’exploitation abusive et le
défrichement sont les deux principaux dangers qui mènent
à la disparition de l’arganier.
L’arganier de la région orientale du Maroc est une relique
de cette espèce apparus au Maroc depuis le crétacé
supérieur, époque à laquelle il se serait répondu sur une
grande partie du pays. Après, lors du quaternaire, il aurait
été refoulé au Sud-Ouest marocain par la dernière
invasion glaciale. Les populations existantes à Oued Grou
et dans les Béni-Snassen s’expliquent par la conservation
des conditions climatiques.
Remerciements
Nous tenons à remercier Pr. Noureddine Kouddane de la
faculté des Sciences d’Oujda pour avoir consacré son
temps pour la révision du manuscrit.
Cartographie de l’aire de répartition de l’arganier (Argania spinosa L. Skeels) 23
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