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Ashdin Publishing
Clinics in Mother and Child Health
Vol. 9 (2012), Article ID C120201, 3pages
doi:10.4303/cmch/C120201
Article original
Aspects epidémiologiques des accidents domestiques de l’enfant à
Libreville (Gabon)
S. Ategbo,1,2 S. Minto’o1,3,J.Koko
1,3, et S. Mengue Mba-Meyo1,2
1Département de pédiatrie, Faculté de médecine, Université des sciences de la santé, BP 4009, Libreville, Gabon
2Service de pédiatrie, Centre hospitalier de Libreville, BP 2228, Libreville, Gabon
3Service de pédiatrie, Hôpital pédiatrique d’Owendo, BP 1208, Libreville, Gabon
Adresser correspondances à S. Ategbo, sategbo@yahoo.fr
Reçu le 20 janvier 2012; accepté le 14 février 2012
Résumé Ce travail avait pour but de déterminer le type,
la fréquence, et établir les facteurs étiologiques, des diffé-
rents accidents domestiques à Libreville. Etude prospective
transversale menée de septembre 2005 à janvier 2006 dans
les services d’urgences pédiatriques du Centre hospitalier
de Libreville et de l’Hôpital pédiatrique d’Owendo. Etaient
inclus des enfants de moins de 15 ans, victimes d’accidents
ou traumatismes non intentionnels survenus à domicile ou
dans ses abords immédiats. Ont été analysés l’âge, le sexe,
l’environnement, les circonstances de survenue et le type
d’accident. Les 56 enfants inclus se répartissaient en 31 gar-
çons et 25 filles. Les enfants de moins de 6 ans (62,5%)
étaient fréquemment touchés. La chute était le principal ac-
cident domestique (46%) suivi des intoxications (16%). La
cour était le principal lieu des accidents (47%) suivie de
la chambre (13%) et la cuisine (12%). L’environnement de
l’enfant, le niveau professionnel des parents étaient liés à la
fréquence des accidents (p<0,01).
Mots Clés accidents domestiques ; chute; enfant ; intoxica-
tion ; Libreville
1 Introduction
Les accidents domestiques se définissent comme des
traumatismes non intentionnels de la vie courante, survenant
dans la maison ou ses abords immédiats [15]. Appelés par
certains « l’épidémie oubliée », car plusieurs rapports et
études tendent à démontrer le caractère sous-évalué de leurs
impacts sur la morbidité et la mortalité de l’enfant [13].
Environ 830000 enfants meurent chaque année à la suite
d’accidents non intentionnels [11]. En effet, les accidents
de la vie courante tuent plus que ceux de la route [13,15]
avec parfois des séquelles et des répercussions financières
sur la société. Dans notre contexte africain dominé par la
pathologie infectieuse et les carences nutritionnelles, la
pathologie accidentelle est également un réel problème,
cependant mal documentée [1,13]. A Libreville, l’absence
de données fiables sur cette problématique, nous a conduit
à réaliser ce travail dans le but de décrire les aspects
épidémiologiques des accidents domestiques de l’enfant.
2 Méthodologie
Une étude prospective d’observation des accidents
domestiques chez les enfants a été menée à Libreville de
septembre 2005 à janvier 2006. Elle a eu lieu dans les
services d’urgences pédiatriques du Centre hospitalier
de Libreville et de l’Hôpital pédiatrique d’Owendo.
Ces 2 services sont les principaux centres d’accueil des
urgences à Libreville et reçoivent respectivement 4800
et 3500 enfants/an. Ont été inclus les enfants âgés de
moins de 15 ans, admis pour accident involontaire et non
intentionnel avec des conséquences physiques, survenu
au domicile ou ses abords immédiats. Ont été exclus, les
accidents de la voie publique, les victimes de sévices, les
tentatives de suicide, les intoxications médicamenteuses,
les enfants présentant une tare organique pouvant favoriser
la survenue de traumatisme, tels que les épileptiques.
Après consentement verbal des parents les données ont été
recueillies à partir d’une fiche standardisée. Les paramètres
analysées étaient : l’âge de l’enfant, le rang dans la fratrie,
la taille de la fratrie, l’âge des parents, les conditions socio-
économiques de la famille, la nature de l’accident, le lieu et
les circonstances de survenue, l’évolution. L’analyse a été
effectuée grâce aux logiciels EPI INFO 3.2.2 et MS Excel
2000, le test Khi-carré a permis de comparer les différentes
proportions, le seuil de significativité retenu était de 0,05.
3 Résultats
Durant la période d’étude, 2506 cas d’urgence étaient
enregistrés dont 56 cas d’accident domestique inclus soit
une prévalence de 2,2%. Ils se répartissaienten 31 garçons
(55%) et 25 filles (45%). L’âge moyen était de 5,5±4,4 ans.
Dans 71% des cas (n=40) l’enfant avait un rang inférieur
ou égal à 3. Le nombre d’enfants vivant à domicile était
en moyenne de 5 ±2,9avecdesextrêmesallantde1à15
2Clinics in Mother and Child Health
Tableau 1: Types d’accidents domestiques retrouvés.
Type d’accident Nombre Pourcentage
Chute 26 46,4
Intoxication au pétrole 9 16,1
Brûlure 5 8,9
Coupure 5 8,9
Corps étranger 4 7,1
Collusion avec un objet contondant 4 7,1
Morsure 2 3,7
Suffocation 1 1,8
Total 56 100
FIGURE 1: Répartition des lieux des accidents domestiques.
enfants. On notait que 61% (n=34) des accidents avaient
lieu dans des familles dont le nombre d’enfants à domicile
était inférieur ou égal à la moyenne. L’âge moyen des mères
était de 32 ans (n=52), celui des pères était 41 ans (n=
43). Cinquante cinq pour cent des mères (n=29) étaient
sans activité professionnelle, tandis 63% (n=27) des pères
exerçaient un emploi dans une catégorie non-cadre.
Le tableau 1illustre la nature et la proportion des acci-
dents domestiques retrouvés au cours de la période d’étude.
En fonction du jour de la semaine, l’accident était survenu
dans 28,5% le dimanche (n=16).
La répartition des différents lieux de la maison où se sont
déroulés ces accidents est résumée dans la figure 1.
L’accident avait lieu le plus souvent au cours du jeu
(57% ; n=32), d’une activité domestique (13% ; n=7)
ou d’une autre circonstance aux abords de la maison
(30% ; n=17) p<0,001. Donc par rapport aux autres
circonstances de survenue de l’accident, ce dernier est
surtout favorisé par le jeu.
La mère était présente au domicile au moment de l’acci-
dent dans 62% des cas (n=32). Elle déclarait être affairée
à une tâche domestique dans 50% (n=26) ou se reposait
dans 9,6% (n=5). Nous notons par ailleurs que dans 6 cas,
il s’agissait d’un deuxième accident. Aucun décès n’a été
noté dans l’évolution des sujets ayant participé à cette étude.
4 Discussion
Le but de ce travail était de déterminer les aspects épidé-
miologiques concernant les accidents domestiques de l’en-
fant en vue de mettre en place des stratégies de prévention
adaptées à notre contexte.
La faiblesse de l’échantillon et la courte période de
notre étude constituent des biais qui sont imputables à la
restructuration des services de pédiatrie de Libreville durant
la période de recueil des données. Par ailleurs l’inclusion
des cas n’était pas exhaustive. Certains dossiers incomplets
avaient été rejetés. Ceci a ainsi empêché de réaliser une
estimation plus exacte de la fréquence des accidents
domestiques comme motif de consultation en pédiatrie
ainsi que leur répartition dans l’année. La prévalence de ces
accidents domestiques est certainement sous-estimée du fait
des biais d’échantillonnage d’une part et d’autre part, parce
que reflétant la réalité des cas ayant suscité un recours à
une structure hospitalière. Cependant les résultats retrouvés
dans notre étude permettent d’effectuer une comparaison
préliminaire avec ceux de la littérature.
Nos résultats ont permisde souligner une prédominance
masculine comme l’ont retrouvé d’autres auteurs [9,13],
ainsi qu’une fréquence plus importante chez les jeunes
enfants âgés de moins de 5 ans. Cette tendance était la
même dans l’étude de Huber et coll. [6], menée à Port-
Gentil (2e ville du Gabon) sur les intoxications aigües
par le pétrole, où 60% (n=22) des cas était de sexe
masculin et 92% (n=33) étaient des nourrissons. La
prédominance masculine avait été démontré par Mutto et
coll. [9] en Ouganda, Zidouni [16] en Algérie et Lavaud and
Chouakri [7] en France, avec respectivement 60,3%, 62,9%
et 60%. Cecipourrait être relié à un comportement plus
agressif des garçons, volontiers plus oppositionnel quant
aux interdits. Le jeune âge des enfants était retrouvé comme
facteur favorisant chez Zidouni [16] avec 58,3% d’enfants
âgés de moins de 4ans. Pour Agbere et coll. [2], dans une
étude en milieu semi-rural à Kara au Togo, une fréquence
plus grande chez les enfants âgés de plus de 5 ans (51,5%) a
été retrouvée ; cependant cette étude avait la particularité de
ne pas inclure comme accident domestique les chutes, qui
surviennent généralement chez les nourrissons et les jeunes
enfants. Ce biais pourrait avoir influencé à la hausse la
moyenne d’âge de l’étude. Ces données peuvent s’expliquer
par le fait qu’après 2 ans et avant 6 ans, on observe chez
l’enfant une certaine autonomie dans les déplacements
associée à une incoordination motrice, une volonté de
découverte du monde avec une dépendance quasi complète
de l’entourage pour apprécier le danger.
La majorité des familles des enfants ayant présenté
des accidents domestiques sont de conditions socio-
économiques modestes. Il existe un lien entre le statut socio-
économique et certains risques d’exposition aux accidents
domestiques tels que les conditions d’habitation [8,
Clinics in Mother and Child Health 3
16], et une absence d’information pour l’acquisition de
connaissances utiles dans la prévention des accidents
domestiques [12].
L’analyse des circonstances de survenue révélait que les
accidents étaient plus fréquents le jour du repos hebdoma-
daire au Gabon (dimanche), au cours des jeux, le plus sou-
vent en présence des parents. Ceci pourrait s’expliquer par la
présence au domicile le dimanche des enfants qui sont gar-
dés en semaine à l’école ou au jardin d’enfants, mais aussi
par une relâche de la vigilance parentale le jour de repos. Ce
constat était retrouvé par d’autres auteurs qui montraient que
les accidents de la vie courante survenaient surtout en fin
d’après-midi [2,15]. Notre étude vient confirmer la nécessité
de la présence d’un tiers responsable et exerçant une
vigilance autour de l’enfant. Ruiz-Casares and Heymann
[14] rapportent au cours d’une étude multicentrique que
souvent ou occasionnellement les enfants sont laissées seuls
à domicile ou à la garde d’autres enfants. Le lieu de survenue
le plus fréquent dans notre série était la cour (46,4%), suivie
de la chambre (14,2%) et la cuisine (12,5%). Zidouni [16]
avaient fait un constat différent avec une prédominance
d’accidents dans la chambre (29,8%), puis la cour (20,4%).
La chute (46,4%) était le principal type d’accident
domestique retrouvé, suivie des intoxications (16,1%),
les brûlures (8,9%) et les coupures (8,9%). Cela pourrait
s’expliquer par le fait que le jeu est la principale activité
des enfants à domicile, et que ceux ci sont constitués de
courses et sauts pouvant occasionner ces chutes. D’autres
auteurs placent également les chutes comme principal
accident domestique tels que Alix et coll. [3]etGhribiet
coll. [5], avec une fréquence de 38%, Zidouni [16] 66,2%,
Thélot [15] 53%. Agbere et coll. [2] n’avaient pas retenu
les chutes comme accident domestique et retrouvaient
comme principal cause les intoxications à 38%, suivies des
morsures (23,5%). Forjuoh et coll. [4] au Ghana, relèvent
que 92% des brulures surviennent à domicile en particulier
dans la cuisine (51%) et dans la cour (36%). Ces différences
dans le type d’accident domestique peuvent s’expliquer par
le niveau de vie, le milieu géographique et donc les dangers
potentiels dans la maison.
Dans notre étude nous n’avons observé aucun cas de dé-
cès à l’admission ou dans les suites immédiates. Le constat
était le même chez Zidouni [16] qui ne retrouvaient aucun
décès dans leur enquête portant sur 847 cas. Cependant une
revue des accidents de l’enfant en Afrique sub-saharienne
estime à 5% la mortalité due aux accidents de l’enfant [10],
témoignant de leur gravité potentielle.
5 Conclusion
Les accidents domestiques sont relativement peu
fréquents dans notre étude. Différentes études de veille
sanitaire ont montré leur impact sur la morbidité, la
mortalité et le coût de leur prise en charge par la société.
Cette étude rappelle l’existence de risques pour l’enfant
gabonais dans son environnement domestique. Elle se
veut le prélude d’une étude d’envergure plus importante
qui permettrait d’obtenir des données précises, et donc
pertinentes, pour des recommandations plus pratiques de la
sûreté des domiciles dans notre contexte.
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