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Consommation alimentaire en Afrique de l'Ouest et Centrale : les productions locales tirées par la demande urbaine, mais les villes restent dépendantes des importations de riz et de blé.

Authors:
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 125
CONSOMMATION ALIMENTAIRE
EN AFRIQUE DE L’OUEST ET CENTRALE :
les productions locales
tirées par la demande urbaine,
mais les villes restent dépendantes
des importations de riz et de blé
par Monsieur Nicolas Bricas, socio-économiste
Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD)
Monsieur Claude Tchamda, statisticien-économiste
Observatoire économique et statistique d’Afrique subsaharienne (Afristat)
et Madame Marie-Cécile Thirion, agro-économiste
Agence française de développement (AFD)
126 Le Déméter 2014
Sommaire
IntroductIon
1. MéthodologIe
2. résultats
2.1. la consoMMatIon et le Marché alIMentaIre natIonal
2.2. les nIveaux de consoMMatIon des alIMents selon le MIlIeu de résIdence
2.3. caractérIsatIon des consoMMatIons alIMentaIres urbaInes
conclusIon
bIblIographIe
La consommation alimentaire des pays d’Afrique de l’Ouest, du Cameroun et du Tchad 127
Liste des illustrations
tableau 1
caractérIstIques des enquêtes natIonales sur la consoMMatIon des Ménages utIlIsées
tableau 2
ratIos des consoMMatIons urbaInes sur les consoMMatIons rurales dans la zone géographIque
étudIée
graphIque 1
part du Marché alIMentaIre dans le Marché total
graphIque 2
part des dépenses dans la consoMMatIon alIMentaIre
graphIque 3
Marchés alIMentaIres natIonaux et Marchés de produIts alIMentaIres et agrIcoles à lexporta-
tIon
graphIque 4
IMportance des dépenses dans la consoMMatIon alIMentaIre selon les MIlIeux de résIdence
graphIque 5
répartItIon du Marché natIonal par MIlIeux
graphIque 6
perspectIves dévolutIon à 2050
de la populatIon dafrIque de louest, du caMeroun et du tchad
graphIque 7
structure de la consoMMatIon alIMentaIre en 2008
dans huIt Métropoles des pays de lunIon éconoMIque et MonétaIre ouest-afrIcaIne (ueMoa)
graphIque 8
évolutIon depuIs 1961
des calorIes IMportées dans les dIsponIbIlItés alIMentaIres dafrIque de louest
graphIque 9
évolutIon depuIs 1961 de la part des calorIes IMportées
dans les dIsponIbIlItés alIMentaIres dafrIque de louest
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 129
Introduction
La hausse des prix alimentaires sur les marchés interna-
tionaux depuis 2007 a provoqué une série d’émeutes
urbaines, notamment en Afrique de l’Ouest. Celles-ci ont
mis en évidence la dépendance des citadins vis-à-vis de
ces marchés pour se nourrir. Pourtant, selon les statis-
tiques nationales, la production alimentaire régionale a
nettement augmenté depuis les années quatre-vingt et
elle n’est plus réservée à l’alimentation des seuls ruraux :
elle aurait trouvé un débouché commercial sur le marché.
En réalité, les informations sur la consommation et les
marchés alimentaires de ces pays sont rares. La plupart
des données disponibles sont celles de la production et
des échanges. Le plus souvent, l’alimentation continue
d’être estimée via les disponibilités alimentaires, c’est-à-
dire grâce à des calculs réalisés à partir des chiffres d’offre
et d’échanges (importations et exportations).
Tous les pays de la région réalisent pourtant des enquêtes
auprès des ménages afin de calculer des indicateurs éco-
nomiques : en particulier, les coefficients budgétaires leur
permettant de déterminer les pondérations pour l’indice
des prix à la consommation des ménages et l’inflation ou
le seuil de pauvreté. De plus et malgré leur complexité,
ces enquêtes sont désormais relativement régulières, très
détaillées et bien maîtrisées par les instituts nationaux de
statistique. Elles constituent donc une mine d’informations
utiles pour tous ceux qui s’intéressent au secteur agricole
et alimentaire. Mais elles ont, jusqu’ici, été peu exploitées
en ce sens. Le Centre de coopération internationale en
recherche agronomique pour le développement (CIRAD),
l’Observatoire économique et statistique d’Afrique subsa-
harienne (Afristat) 1 et l’Agence française de développe-
ment (AFD) ont donc initié une démarche pour y remédier.
Cet article rend compte de résultats importants issus de
l’analyse inédite de ces enquêtes pour caractériser l’ali-
mentation des pays d’Afrique de l’Ouest.
1. Méthodologie
L’intérêt de l’étude dont sont issus les résultats présentés
ici est de s’appuyer, non pas sur les bilans de disponibilité
alimentaire généralement utilisés pour évaluer les ten-
dances de consommation – tels ceux fournis par l’Orga-
nisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agricul-
ture (FAO) – mais sur les enquêtes auprès des ménages
réalisées sur d’importants échantillons et mesurant véri-
1 - LObservatoire économique et statistique d’Afrique subsaharienne (Afristat)
est une organisation internationale créée par traité en 1993. Elle regroupe
aujourd’hui dix-neuf États membres (Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun,
Cap-Vert, République centrafricaine, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon,
Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal,
Tchad et Togo). L’Observatoire a pour mission de contribuer au développement
des statistiques économiques, sociales et de l’environnement dans ses États
membres. Il s’inscrit ainsi dans la préoccupation africaine d’intégration écono-
mique régionale (http://www.afristat.org/).
tablement la consommation alimentaire. Ces enquêtes
fournissent des valeurs économiques de la consommation
entendue comme la somme de l’auto-production, des
acquisitions non-marchandes (dons, trocs) et des achats.
Mais, les bases de données sur les prix couplées à ces
enquêtes n’étant pas disponibles, il est impossible de cal-
culer les quantités consommées.
Les enquêtes sur les dépenses des ménages constituent
des opérations complexes et comportent de nombreux
risques de biais, tant en termes de formulation des ques-
tions que de recueil de l’information, de mémoire des
personnes interrogées, de saisie des réponses et d’analyse
de celles-ci. Les données obtenues peuvent être sujettes
à caution. Néanmoins, il est possible de considérer que,
si biais de mesure il y a eu, ceux-ci sont homogènes et
s’appliquent à tous les produits, sans remettre en cause les
grandes structures de consommation.
L’intérêt de l’étude que nous présentons ici est de s’ap-
puyer sur les résultats de vingt-cinq enquêtes similaires.
Compte tenu des risques de biais ou d’erreurs, les résultats
de chacune d’entre elles doivent certes être considérés
avec prudence. Mais les tendances qui se dégagent, grâce
à une analyse comparative des vingt-cinq enquêtes four-
nissent, elles, des informations intéressantes concernant la
région étudiée : à savoir le Tchad, le Cameroun et les pays
d’Afrique de l’Ouest. Et la récurrence de certains résultats
dans un grand nombre de pays fournit des signaux fiables
sur les caractéristiques de la consommation.
Deux types d’enquêtes sur les dépenses des ménages
ont été mobilisés pour l’étude :
- Huit enquêtes limitées aux métropoles des pays de
l’Union économique et monétaire ouest-africaine
(UEMOA) : Abidjan, Bamako, Bissau, Cotonou, Dakar,
Lomé, Niamey et Ouagadougou, à raison d’un échan-
tillon de 1 000 personnes par ville. Ces enquêtes étant
destinées à calculer les coefficients budgétaires de
l’Indice harmonisé des prix à la consommation (IHPC),
nous désignerons leurs données dans l’article par l’ex-
pression « données IHPC ». Concernant l’alimenta-
tion, les consommations de 234 produits ont été rele-
vées. Enfin, il est possible de réaliser des agrégations et
des comparaisons puisque les enquêtes ont toutes été
réalisées en 2008, selon la même méthodologie et que
les dépenses sont exprimées dans la même monnaie :
le franc CFA (FCFA).
- Des enquêtes nationales – les plus récentes disponibles
– réalisées depuis une dizaine d’années pour mesu-
rer de façon plus ou moins détaillée la consomma-
tion des ménages dans quinze pays : Burkina, Bénin,
Cameroun, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée,
Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone,
Tchad et Togo. Le dépouillement des réponses s’avé-
rant complexe, il faut généralement des mois pour
que les résultats soient disponibles. Ces enquêtes
sont donc assez anciennes et ne rendent pas compte
des changements survenus depuis la hausse des prix
130 Le Déméter 2014
Tableau 1
Caractéristiques des enquêtes nationales sur la consommation des ménages utilisées
Nom
de l’enquête
Échantillon
total de ménages
Nombre initial
de produits
alimentaires
Définition
du milieu urbain
BÉNIN − Période de l’enquête : 2003
Questionnaire
des indicateurs de base
du bien-être
5 350 23
Chef-lieu de commune de + de 10 000
habitants avec au moins une infrastructure ou
arrondissement de + de 10 000 habitants avec
quatre infrastructures
BURKINA FASO − Période de l’enquête : mai à juillet 2003
Enquête burkinabé sur les conditions
de vie des ménages 8 494 40 Les 45 chefs-lieux de province
+ 4 autres communes
CAMEROUN − Période de l’enquête : septembre à décembre 2007
Enquête camerounaise
auprès des ménages III 11 391 282 Agglomérations de + de 5 000 habitants avec
infrastructures
CÔTE D'IVOIRE − Période de l’enquête : mai à juillet 2002
Enquête Niveau
de vie des ménages 10 800 100
Agglomérations de + de 10 000 habitants ou
communes entre 4 000 et 10 000 habitants
avec au moins 50 %
des chefs de ménages non agricoles
GAMBIE − Période de l’enquête : février à avril 2004
Integrated household survey 2 238 152 Non disponible
GHANA − Période de l’enquête : septembre 2005 à septembre 2006
Ghana living standards survey 8 687 115 Agglomérations de + de 5 000 habitants
GUINÉE − Période de l’enquête : août à novembre 2007
Enquête intégrée de base
pour l'évaluation de la pauvreté 7 095 109 Agglomérations de + de 5 000 habitants
+ quatre villes de 2 500 à 5 000 habitants
LIBERIA − Période de l’enquête : août à septembre 2007
Core welfare indicators questionnaire 3 595 178 Non disponible
MALI − Période de l’enquête : juin à décembre 2006
Enquête légère intégrée
auprès des ménages 4 494 94 Agglomérations de + de 5 000 habitants
ou centres de districts
MAURITANIE − Période de l’enquête : août à novembre 2004
Enquête permanente sur les conditions
de vie des ménages 9 385 91 Agglomérations
de + de 5 000 habitants
NIGER − Période de l’enquête : avril 2007 à avril 2008
Enquête nationale sur le budget
et la consommation des ménages 4 000 237 Chef-lieu d’une unité administrative disposant
d’un certain nombre d’infrastructures
NIGERIA − Période de l’enquête : septembre 2003 à août 2004
Nigeria living standards survey 19 158 134 Agglomérations de + de 20 000 habitants
SÉNÉGAL − Période de l’enquête : avril 2001 à avril 2002
Enquête sénégalaise auprès des ménages 6 594 309 Agglomérations de + de 10 000 habitants
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 131
don ou par troc. Le « marché » correspondra au total
des achats, c’est-à-dire des dépenses monétaires, et
il constituera donc une partie de la consommation.
Pour mesurer le total de la consommation alimen-
taire, nous prendrons en compte les consommations
pour l’usage à domicile des aliments, les consomma-
tions alimentaires et de boissons dans la restauration
marchande et les dépenses de mouture des grains.
Afin d’estimer l’importance des débouchés du sec-
teur agro-alimentaire, les boissons alcoolisées prises à
domicile ont été ajoutées afin de disposer d’un total
élargi (l’information est alors précisée dans le tableau).
Les enquêtes auprès des ménages ne permettent de
relever les consommations détaillées par produit que
pour les seules acquisitions destinées à la cuisine ou à la
consommation à domicile. Les dépenses de restauration
ne sont pas détaillées par produits. Elles sont compta-
bilisées globalement. Si l’on fait l’hypothèse que ces
dépenses se répartissent à peu près de la même façon
que les consommations à domicile, la répartition par
grands groupes de produits ne change pas fondamen-
talement.
Chaque pays de la région définit sa propre classi-
fication des milieux urbain et rural (Tableau 1). Pour
certains, le milieu urbain correspond à des agglomé-
rations administrativement reconnues centrales dans
une zone donnée. Pour d’autres, il correspond à un
seuil de population, parfois combiné à un seuil d’acti-
vités non-agricoles. Ce seuil varie d’un pays à l’autre :
il est de 20 000 personnes au Nigeria, mais de 10 000
habitants au Bénin, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal et de
5 000 habitants au Cameroun, au Ghana, en Guinée,
au Mali, en Mauritanie et au Tchad. La définition régio-
nale du milieu rural et du milieu urbain n’est donc pas
de 2008 sur les marchés internationaux et, dans une
moindre mesure, sur les marchés locaux. Néanmoins,
elles fournissent des informations concernant les
années deux mille qui, nous le verrons, remettent en
cause un certain nombre d’idées reçues ou datées.
Comme le montre le Tableau 1, les échantillons varient
de 2 200 ménages pour de petits pays comme la
Gambie à 19 000 pour le plus grand, le Nigeria. En théo-
rie, les enquêtes ne sont pas comparables puisqu’elles
n’ont pas été menées la même année, selon la même
méthodologie et la même nomenclature de produits.
Au total, elles ont porté sur environ 133 000 ménages
et la liste détaillée des produits atteint 1 826 items,
ramenés à 745 après harmonisation, puis regroupés
selon les catégories de la Classification des fonctions
de consommation des ménages utilisée par les Nations
unies 2. Les résultats publiés fournissent les consom-
mations par produit alimentaire selon trois milieux :
ville principale, villes secondaires et milieu rural. Ils
distinguent les achats (dépenses), les dons et l’auto-
consommation. Toutes les consommations sont indi-
quées en valeur monétaire du pays concerné. Dans
notre article, nous désignerons ces données sous le
sigle ENCM pour signifier qu’il s’agit des enquêtes
nationales sur la consommation des ménages. Elles
seront utilisées pour toutes les analyses concernant
la consommation et le marché national puisque les
enquêtes IHPC ne portent que sur les métropoles.
Dans notre article, nous désignerons par « consomma-
tion » la valeur économique des produits et des ser-
vices liés à la consommation d’aliments et de boissons,
que ceux-ci soient auto-produits, achetés ou reçus par
2 - Classification of individual consumption by purpose (COICOP).
SÉNÉGAL − Période de l’enquête : décembre 2005 à avril 2006
Enquête de suivi de la pauvreté 13 568 30 Agglomérations de + de 10 000 habitants
SIERRA LEONE − Période de l’enquête : novembre 2002 à octobre 2003
Sierra Leone integrated household survey 3 719 103 Non disponible
TCHAD − Période de l’enquête : février 2003 à avril 2004
Enquête sur la consommation
et le secteur informel 6 697 122 Agglomérations de + de 5 000 habitants
TOGO − Période de l’enquête : juillet et août 2006
Questionnaire des indicateurs
de base du bien-être 7 500 135 Lomé et autres communes
PAYS DE L’UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE OUEST-AFRICAINE (UEMOA) − Période de l’enquête : 2008
Enquêtes pour le calcul de l’Indice
harmonisé des prix à la consommation 1 000 par pays 234 Seules les capitales ont été enquêtées
132 Le Déméter 2014
72 %
88 %
79 %
73 %
0
85 %
67 %
72 %
93 %
60 %
77 %
97 %
75 %
63 %
84 %
Bénin - 2003
Burkina Faso - 2003
Cameroun - 2007
Côte d’Ivoire - 2002
Gambie
Ghana - 2006
Guinée - 2007
Mali - 2006
Mauritanie - 2004
Niger - 2007
Nigeria - 2003
Sénégal - 2005
Sierra Leone - 2003
Tchad - 2003
Togo - 2006
52 %
57 %
38 %
40 %
59 %
48 %
54 %
47 %
56 %
45 % 46 %
58 %
47 %
61 %
51 %
Bénin - 2003
Burkina Faso - 2003
Cameroun - 2007
Côte d’Ivoire - 2002
Gambie
Ghana - 2006
Guinée - 2007
Mali - 2006
Mauritanie - 2004
Niger - 2007
Nigeria - 2003
Sénégal - 2005
Sierra Leone - 2003
Tchad - 2003
Togo - 2006
Graphique 2
Part des dépenses dans la consommation alimentaire
(En pourcentage − Source : ENCM)
Graphique 1
Part du marché alimentaire dans le marché total
(En pourcentage − Source : ENCM)
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 133
Le rapport entre les dépenses alimentaires et les dépenses
totales, alimentaires et non-alimentaires, varie de 40 % à
60 % selon les pays. Il représente donc, en moyenne pour
chaque pays, environ la moitié du marché total. Ce ratio
est considéré comme un indicateur du niveau de richesse
économique 3. Lorsque les ménages consacrent environ
la moitié de leur budget économique à l’alimentation,
celle-ci constitue un secteur particulièrement sensible car
les variations de prix des aliments vont largement affecter
leur pouvoir d’achat.
En convertissant les valeurs du marché alimentaire en dol-
lars selon le taux de change moyen annuel de l’année de
l’enquête, il est possible de calculer un ordre de gran-
deur de ce marché pour la région étudiée 4. Pour les pays
pour lesquels nous disposons de données, il représente en
moyenne 115 millions de dollars par million d’habitant :
soit un marché annuel de plus de 35 milliards de dollars,
lorsque nous multiplions ce montant par les 312 millions
d’habitants vivant dans la région en 2010.
Comme le montre le Graphique 3, la valeur des marchés
alimentaires nationaux est désormais nettement plus éle-
3 - En Europe, il varie de 5 à 25 % selon les pays.
4 - Ce calcul n’est pas très orthodoxe dans la mesure où nous additionnons des
valeurs économiques correspondant à des années différentes, mais il donne
néanmoins un ordre de grandeur du rapport entre marchés d’exportations et
marché intérieur pour le secteur agricole.
homogène. Les villes principales choisies par les pays
dans les échantillonnages des enquêtes sont soit les
capitales économiques, soit les capitales politiques, soit
parfois les deux. Elles sont appelées métropoles dans
notre article. Les villes secondaires sont les aggloméra-
tions considérées comme urbaines selon une définition
propre à chaque pays, sauf la ou les villes principales.
2. Résultats
2.1. La consommation et le marché
alimentaire national
Les enquêtes nationales sur la consommation des ménages
(ENCM) permettent de mesurer la valeur économique du
marché alimentaire, c’est-à-dire la valeur des achats d’ali-
ments et de services liés à l’alimentation (mouture à façon
et restauration) par les ménages. Ces valeurs du marché
alimentaire peuvent être mises en relation avec, d’une
part, la valeur économique du marché total, alimentaire
et non-alimentaire (Graphique 1) et, d’autre part, avec la
valeur économique de la consommation alimentaire, c’est-
à-dire le cumul des achats, de l’auto-consommation et des
dons (Graphique 2).
638
1 110
2 200
1 490
1 207
2 473
678
2 810
790
4 591
1 071
635
10 819
367
271
3 303
609
154
498
205
1 165
421
2 341
92
203
500
Bénin - 2003
Burkina Faso - 2003
Côte d’Ivoire - 2002
Mali - 2006
Niger - 2007
Sénégal - 2005
Togo - 2006
Cameroun - 2007
Tchad - 2003
Ghana - 2006
Guinée - 2007
Mauritanie - 2004
Nigeria - 2003
Marché alimentaire national Exportations agricoles et alimentaires
Graphique 3
Marchés alimentaires nationaux et marchés de produits alimentaires et agricoles à l’exportation
(En millions de dollars)
Sources : Base de données Cnuced pour les valeurs des exportations.
Données ENCM pour les marchés alimentaires.
Les valeurs des marchés ont été converties en US dollars au taux de change moyen de l’année de l’enquête.
134 Le Déméter 2014
vée que celle des exportations de produits agricoles et
alimentaires dans douze des treize pays de la région étu-
diée. Additionner la valeur (convertie en dollars) des mar-
chés alimentaires de ces pays permet même de constater
que celle-ci représente environ trois fois la valeur de leurs
exportations agricoles et alimentaires. Autrement dit, les
débouchés commerciaux offerts aux agriculteurs par les
marchés intérieurs sont nettement supérieurs aux marchés
d’exportation. Ces derniers génèrent certes des devises
indispensables pour acheter les biens non produits dans le
pays (énergie, produits manufacturés, etc.). Mais le mar-
ché intérieur n’en constitue pas moins un véritable moteur
de la production agricole, désormais plus important que le
marché international.
Selon les pays, la part du marché représente entre les deux
tiers et plus de 90 % de la consommation alimentaire
nationale. L’époque où l’alimentation était essentielle-
ment assurée par l’auto-consommation est loin. Le sys-
tème alimentaire est désormais largement monétarisé.
Cela signifie que les ménages ne dépendent plus seule-
ment des niveaux de production pour s’approvisionner :
ils sont devenus très largement dépendants des prix. La
part du marché dans la consommation est évidemment
plus importante en ville qu’en milieu rural, où une partie
de la production est auto-consommée. Mais, même là, les
achats représentent au moins la moitié de la valeur écono-
mique de la consommation (Graphique 4).
Désormais, le marché rural est tout sauf négligeable
puisqu’il représente près de la moitié du marché alimen-
taire national (Graphique 5). Il faut donc s’affranchir d’une
autre idée reçue : celle considérant que le marché alimen-
taire est essentiellement urbain. Le marché rural pèse lourd
dans le marché national et les ruraux accèdent de plus en
plus à l’alimentation par le biais du marché. Ce résultat
surprenant s’explique en partie par la définition même
du milieu rural. Il ne faut plus seulement l’assimiler à de
petits villages d’agriculteurs, mais considérer qu’il intègre
nombre de petits bourgs qui abritent quelques milliers
d’habitants, sans être pour autant systématiquement clas-
sés en « milieu urbain ». Les recherches démographiques
récentes révèlent bien cette « urbanisation par le bas » de
la région, c’est-à-dire la prolifération de nouvelles petites
agglomérations qui franchissent chaque année le seuil de
l’urbain 5. Ces bourgs ruraux sont équipés de marchés
5 - Denis & Moriconi-Ebrard, 2009.
Capitale : 88 %
Capitale : 93 %
Capitale : 93 %
Capitale : 92 %
Capitale : 100 %
Capitale : 95 %
Capitale : 97 %
Capitale : 100 %
Capitale : 99 %
Capitale : 82 %
Capitale : 100 %
Capitale : 99 %
Capitale : 98 %
Capitale : 100 %
Villes secondaires : 76 %
Villes secondaires : 87 %
Villes secondaires : 86 %
Villes secondaires : 96 %
Villes secondaires : 93 %
Villes secondaires : 84 %
Villes secondaires : 89 %
Villes secondaires : 98 %
Villes secondaires : 90 %
Villes secondaires : 93 %
Villes secondaires : 99 %
Villes secondaires : 84 %
Villes secondaires : 74 %
Villes secondaires : 91 %
Milieu rural : 66 %
Milieu rural : 51 %
Milieu rural : 58 %
Milieu rural : 51 %
Milieu rural : 74 %
Milieu rural : 49 %
Milieu rural : 56 %
Milieu rural : 88 %
Milieu rural : 50 %
Milieu rural : 64 %
Milieu rural : 87 %
Milieu rural : 58 %
Milieu rural : 58 %
Milieu rural : 72 %
Bénin - 2003
Burkina Faso - 2003
Cameroun - 2007
Côte d’Ivoire - 2002
Ghana - 2006
Guinée - 2007
Mali - 2006
Mauritanie - 2004
Niger - 2007
Nigeria - 2003
Sénégal - 2005
Sierra Leone - 2003
Tchad - 2003
Togo - 2006
Graphique 4
Importance des dépenses dans la consommation alimentaire selon les milieux de résidence
(En pourcentage − Source : ENCM)
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 135
20 % 20 %
40 %
5 %
40 %
21 %
41 %
23 %
31 %
16 %
3 %
36 % 34 %
17 %
41 %
28 %
18 %
37 %
58 %
9 %
34 %
18 %
33 % 22 %
19 %
52 %
21 % 26 %
16 %
15 %
52 %
62 %
23 %
37 %
51 %
45 % 42 % 44 % 47 %
65 %
44 % 44 % 41 %
67 %
45 %
Bénin - 2003
Burkina Faso - 2003
Cameroun - 2007
Côte d’Ivoire - 2002
Gambie - 2003
Ghana - 2006
Guinée - 2007
Mali - 2006
Mauritanie - 2004
Niger - 2007
Nigeria - 2003
Sénégal - 2005
Sierra Leone - 2003
Tchad - 2003
Togo - 2006
Capitale Villes secondaires Milieu rural
réguliers et d’épiceries. Les cultivateurs y produisent encore
une partie importante de leurs aliments de base comme les
céréales, les racines et les tubercules, mais ils en achètent
aussi, notamment du riz dont la consommation progresse.
Ils achètent aussi de la viande et du poisson sec, de l’huile,
des oignons, des produits laitiers, des condiments et du
sucre. Ce marché rural reste mal connu, mais il ne peut
plus être négligé. Il constitue désormais un débouché tout
à fait significatif pour la production agricole, voire même,
dans certains pays, pour les importations alimentaires.
Selon les nations unies, la population urbaine de la région
étudiée représenterait 47,1% de la population total en
2013 et la proportion devrait atteindre les deux tiers en
2045. La marchandisation de l’alimentation devrait donc
se généraliser et renforcer le rôle du marché intérieur dans
l’économie agricole des pays d’Afrique de l’Ouest, du
Cameroun et du Tchad.
2.2. Les niveaux de consommation des
aliments selon le milieu de résidence
Les analyses que nous venons de présenter concernaient
l’ensemble des produits alimentaires. Nous allons mainte-
nant analyser les consommations par aliment. Comment
se répartissent-elles selon les milieux ? Les produits locaux
sont-ils plus ou moins consommés en ville qu’en milieu
rural ? Pour répondre à ces questions, les moyennes (non
pondérées par la population) de trois ratios ont été cal-
culées sur les treize pays pour lesquels nous disposons de
données cohérentes :
Consommation par tête dans la métropole / en zone
rurale.
Consommation par tête dans les villes secondaires / en
zone rurale.
Consommation par tête dans la métropole / dans les
villes secondaires.
Ces ratios, présentés dans le Tableau 2, nous donnent le
rapport de consommation en valeur économique, mais
pas en quantité. Les prix des aliments étant plus élevés
en ville qu’en milieu rural, des ratios similaires exprimés
en rapports de quantités consommées seraient inférieurs,
mais les données pour les calculer ne sont pas disponibles.
Le mil et le sorgho sont très nettement moins consom-
més en ville qu’en milieu rural : à quelques exceptions
près, ces céréales « traditionnelles » apparaissent en nette
marginalisation dans l’alimentation de base des citadins.
Graphique 5
Répartition du marché national par milieux
(En pourcentage - Source : ENCM)
136 Le Déméter 2014
1961 : 88,67
1967 : 96,98
1973 : 107,12
1979 : 119,37
1985 : 133,58
1991 : 148,90
1997 : 165,05
2003 : 181,16
2009 : 197,72
2015 : 214,31
2021 : 230,00
2027 : 243,50
2033 : 254,45
2039 : 262,35
2045 : 266,65
2050 : 267,23
1961 : 15,89
1985 : 57,85
1997 : 97,84
2003 : 124,97
2009 : 159,01
2015 : 200,84
2021 : 250,93
2027 : 309,02
2033 : 375,66
2039 : 450,89
2045 : 533,92
2050 : 608,07
1961
1965
1969
1973
1977
1981
1985
1989
1993
1997
2001
2005
2009
2013
2017
2021
2025
2029
2033
2037
2041
2045
2049
Population urbaine
Population rurale
Graphique 6
Perspectives d’évolution à 2050 de la population des pays d’Afrique de l’Ouest, du Cameroun et du Tchad
(En millions d’habitants − Source : Nations unies)
Métropole /
Milieu rural
Villes secondaires /
Milieu rural
Métropole /
Villes secondaires
Mil & Sorgho 0,26 0,49 0,48
Maïs 1,00 1,14 0,82
Riz 2,49 1,87 1,26
Blé 7,92 3,24 2,45
Manioc 1,34 1,31 1,08
Igname 2,15 1,49 1,18
Racines & Tubercules 2,87 1,70 1,50
Légumineuses 1,24 1,12 1,07
Viande 2,89 1,91 1,50
Poissons 3,35 1,70 1,93
Produits laitiers 6,63 2,53 2,36
Légumes 3,37 2,19 1,49
Fruits 3,47 1,55 2,08
Huiles végétales 1,97 1,55 1,28
* Moyennes non pondérées par la population des treize pays suivants : Bénin, Burkina Faso, Cameroun,
Côte d’Ivoire, Ghana, Guinée, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Sierra Leone, Tchad et Togo.
Tableau 2
Ratios des consommations urbaines sur les consommations rurales dans la zone géographique étudiée *
Source : ENCM
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 137
Céréales : 35,43 %
Viandes : 12,38 %
Poissons : 12,26 %
Légumes : 8,18 %
Huiles : 7,97 %
Autres : 6,63 %
Produits laitiers et œufs : 5,98 %
Racines et tubercules : 4,79 %
Sucres : 3,03 %
Fruits : 1,84 %
Légumineuses : 1,51 %
Par groupes de produits
Riz importé : 46,9 %
Blé : 21,9 %
Maïs : 14,4 %
Riz local : 11,1 %
Mil et sorgho : 4,3 %
Autres céréales : 1,3 %
Céréales
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40% 45% 50%
Dans presque tous les cas, la consommation dans les villes
secondaires se situe à un stade intermédiaire entre celles
des villes principales et du milieu rural. Mais les échan-
tillons de ménages enquêtés sont insuffisants pour per-
mettre une analyse plus fine des différences selon la taille
des villes. Il est ainsi impossible de déterminer s’il existe
une évolution linéaire en termes de changements alimen-
taires au fur et à mesure de l’accroissement de la taille des
villes, en particulier du fait du développement des classes
moyennes plus aisées. De même, on ignore s’il existe des
seuils de rupture dans l’évolution des régimes alimentaires
au-delà d’un certain degré de marchandisation du système
alimentaire des urbains.
Quoi qu’il en soit, ces calculs révèlent clairement que les
villes principales consomment davantage de tous les pro-
duits – y compris ceux consommés en milieu rural – et
ce, même si les ratios tendent sans doute à surestimer la
consommation urbaine compte tenu des prix plus élevés
pratiqués en ville. Seuls le mil et le sorgho semblent être
remplacés par d’autres produits amylacés en partie impor-
tés (céréales, racines et tubercules). Cela ne signifie pas
pour autant que les styles alimentaires urbains africains
s’occidentalisent. Certes, la part des glucides dans l’ap-
port calorique baisse progressivement, alors que celle des
lipides augmente et la part des produits transformés dans
Le maïs est en moyenne autant consommé en ville qu’en
milieu rural, voire un peu moins en tenant compte des
différentiels de prix : les villes constituent donc un débou-
ché important pour lui. Les dépenses par personne pour
acheter du riz sont deux fois et demie plus importantes
dans les villes principales qu’en milieu rural et celles de blé,
près de huit fois plus importantes. Ces deux céréales ont
bien acquis une place prépondérante dans l’alimentation
de base des citadins.
Les racines et tubercules – y compris le manioc et surtout
l’igname, produits traditionnels du milieu rural – sont net-
tement plus consommés en ville qu’en zone rurale. La
consommation urbaine de pommes de terre explique pro-
bablement le ratio ville principale / milieu rural plus élevé
pour le groupe tout entier que pour ses deux principaux
composants.
Compte tenu du pouvoir d’achat des urbains supérieur à
celui des ruraux, les produits animaux (viandes, poissons
et surtout produits laitiers) sont davantage consommés
en ville. Le lait et ses produits dérivés sont devenus des
produits courants chez les citadins, alors qu’ils sont plutôt
réservés aux éleveurs en milieu rural. Enfin, les légumes et
les fruits sont au moins trois fois plus souvent consommés
en ville qu’à la campagne, et les huiles végétales environ
deux fois plus.
Graphique 7
Structure de la consommation alimentaire en 2008 dans huit métropoles des pays de l’UEMOA
(Abidjan, Bamako, Bissau, Cotonou, Dakar, Lomé, Niamey et Ouagadougou
Sources : IHPC)
138 Le Déméter 2014
la consommation urbaine augmente. Mais les cuisines,
les pratiques de consommation et les représentations ne
sont pas pour autant marquées par un mimétisme vis-à-vis
des modèles occidentaux 6. Les styles alimentaires urbains
mélangent des références d’origines locales ou plus loin-
taines et d’innovations propres à la ville. Certaines cuisines
urbaines africaines se diffusent désormais sur l’ensemble
du continent comme le riz au gras d’origine dakaroise,
l’attiéké qui est une sorte de couscous de manioc fermenté
originaire d’Abidjan, le gari, une semoule de manioc grillée
originaire des villes béninoises et nigérianes ou l’amala, la
farine d’igname venue des villes yorouba du Nigeria.
2.3. Caractérisation des consommations
alimentaires urbaines
De nombreux observateurs de la situation alimentaire afri-
caine insistent sur la forte dépendance du continent vis-à-
vis des produits alimentaires importés, en particulier le riz
et le blé. Selon certains, les villes africaines seraient même
essentiellement nourries d’importations et ceci explique-
rait les émeutes urbaines survenues dans de nombreux
pays lors de l’envolée des prix sur les marchés internatio-
naux en 2007 / 2008. Qu’en est-il exactement ?
Comme l’illustre le Graphique 7 en s’appuyant sur les
résultats des enquêtes menées dans huit métropoles des
pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine
(UEMOA) 7, le blé et le riz importé ou local représentent
80 % des céréales consommées et le riz et le blé importés,
plus des deux tiers (68,8 %). Seule Bamako, la capitale du
Mali, fait exception à la règle car ses habitants consom-
ment majoritairement des céréales locales (mil et surtout
riz). Les céréales sèches traditionnelles (mil et sorgho)
sont désormais très peu consommées, sauf à Bamako et
N’Djamena où elles représentent encore entre 15 et 20 %
des dépenses en céréales. Le maïs tient une place plus
importante dans certaines villes comme Cotonou, Lomé,
Ouagadougou et Niamey.
Cette dépendance des villes vis-à-vis des céréales impor-
tées prouve leur vulnérabilité face aux risques de flambées
des prix sur les marchés internationaux. Mais le constat
doit être relativisé en examinant la place des céréales dans
la consommation, tous produits confondus (Graphique 7).
Le marché alimentaire des métropoles peut être réparti en
trois grands groupes de produits :
Les bases amylacées des plats : les céréales (mil, sor-
gho, fonio, maïs, riz, blé), les racines (manioc), les tuber-
cules (igname, patate douce et pomme de terre, etc.)
et les bananes plantain représentent un gros tiers des
dépenses alimentaires des ménages pour leur consom-
mation à domicile (37,5 % en moyenne pour les huit
métropoles de l’UEMOA).
6 - Requiers-Desjardins, 1989 ; Bricas, 1993.
7 - Il s’agit d’Abidjan, Bamako, Bissau, Cotonou, Dakar, Lomé, Niamey et
Ouagadougou (cf. la première partie de l’article sur la méthodologie).
Les produits animaux (viandes, poissons et produits
aquatiques, produits laitiers et œufs) représentent un
peu moins d’un tiers (29,7 %).
Les autres produits condimentaires, les huiles, le sucre,
les légumes et les légumineuses, les épices, les fruits
et les boissons représentent également un tiers des
dépenses (32,8 %).
Alors que les débats sur la sécurité alimentaire se foca-
lisent généralement sur les céréales, ces chiffres tendent
à relativiser leur importance dans la consommation des
citadins. Certes, elles occupent une place importante en
termes d’apport calorique. Mais, en valeur économique,
elles représentent moins du tiers de la consommation ali-
mentaire moyenne. Cette structure du budget alimentaire
urbain permet de comprendre la relativement faible élasti-
cité – prix de la consommation des céréales. Lorsque leur
prix augmente, les consommateurs ajustent d’abord la
composition de la sauce en produits animaux, en légumes
et en huiles avant de réduire leur consommation.
Dans les pays du golfe de Guinée, la consommation de pro-
duits de base amylacés dépend un peu moins des céréales
que dans les pays sahéliens. Les racines (manioc), les tuber-
cules (igname, taro et macabo, pomme de terre et patate
douce) et les bananes plantain y occupent une place non
négligeable puisque leur consommation représente entre
20 et 25 % de celle des produits de base amylacés.
Pour déterminer l’ampleur des importations en apports
nutritionnels, il faut mesurer – par pays – leur importance
dans les disponibilités alimentaires par grands groupes de
produits, puis croiser les pourcentages obtenus avec le
poids de chaque groupe dans les disponibilités caloriques
totales moyennes. Les Graphiques 8 et 9 présentent le
résultat de ces calculs pour l’Afrique de l’Ouest, donc hors
Tchad et Cameroun.
Sur l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, l’évolution depuis
près de cinquante ans est à l’augmentation de la dépen-
dance alimentaire, avec des périodes contrastées. Après
une forte hausse à la fin des années soixante-dix, le recours
aux importations s’est réduit dans les années quatre-vingt
pour augmenter à nouveau dans les années quatre-vingt-
dix et retomber depuis 2008. Les importations de céréales
ont représenté moins de 10 % de l’apport calorique total
en moyenne 2008 – 2009, alors qu’elles avaient dépassé
les 18 % en 2007. Les situations sont cependant contras-
tées entre les pays fortement importateurs (environ 40 %
en 2008 – 2009 au Sénégal, en Mauritanie et au Liberia)
et ceux qui le sont moins (en dessous de 8 % au Nigeria,
au Mali, au Burkina et au Niger). Globalement, la dépen-
dance céréalière régionale apparaît donc relativement
limitée, malgré le discours insistant sur son importance
pour l’Afrique. Mais d’autres groupes de produits méritent
une attention particulière car leur apport nutritionnel est
loin d’être négligeable, alors que les approvisionnements
de certains pays dépendent significativement du marché
international : il s’agit des huiles végétales, des produits
laitiers et du sucre.
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 139
0
200
400
600
800
1 000
1 200
1 400
1 600
1 800
2 000
2 200
2 400
2 600
1961
1963
1965
1967
1969
1971
1973
1975
1977
1979
1981
1983
1985
1987
1989
1991
1993
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Autres produits importés
Huiles végétales importées
Céréales importées
Total disponible
Céréales importées
Huiles végétales
importées
Autres produits importés
0%
2%
4%
6%
8%
10%
12%
14%
16%
18%
20%
22%
24%
26%
28%
1961
1963
1965
1967
1969
1971
1973
1975
1977
1981
1983
1985
1987
1989
1991
1993
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Graphique 8
Évolution depuis 1961 des calories importées dans les disponibilités alimentaires d’Afrique de l’Ouest
En Kcal / personne / jour
Source : calculs des auteurs sur la base des données Faostat
Graphique 9
Évolution depuis 1961 de la part des calories importées dans les disponibilités alimentaires d’Afrique de l’Ouest
(En pourcentage − Source : calculs des auteurs sur la base des données Faostat)
140 Le Déméter 2014
Conclusion
Il faut retenir que les villes sont très dépendantes des
importations de riz et de blé pour assurer leur sécurité
alimentaire en produits amylacés de base. Mais, en valeur
économique, les citadins consomment majoritairement
des produits d’origine nationale ou régionale. Les céréales
représentent moins du tiers de leurs dépenses alimen-
taires. Et les marchés urbains constituent des débouchés
nettement plus importants pour les producteurs agricoles
locaux que pour les importateurs internationaux.
Les villes dépendent certes des importations pour les
produits de base. Mais leur marché exerce aussi un effet
d’entraînement sur la production agricole et la transfor-
mation agro-alimentaire locales. Mis à part le blé qu’il est
impossible de produire à des prix compétitifs par rapport
au blé importé, tous les aliments consommés en Afrique
de l’Ouest peuvent être cultivés dans la région. Les pro-
ductions régionales de riz, d’huiles végétales, de produits
laitiers et de sucre se développent, même si ces produits
continuent de faire l’objet d’importations significatives
– quoique d’importance variable selon les pays – pour
compléter les productions locales.
Tous les autres produits consommés en ville – maïs, mil
et sorgho, bananes plantain, viandes et poissons, légu-
mineuses, huiles de palme, fruits et légumes, condiments
– sont, au moins en partie, des produits commerciaux.
Les cultures autrefois considérées comme vivrières, c’est-
à-dire destinées à l’auto-consommation des ruraux, par
opposition aux cultures de rente destinées aux marchés
métropolitains ou internationaux, sont devenues des
cultures commerciales. Elles font l’objet de plus en plus
de transformations artisanales rurales et urbaines et sur-
tout d’un intense commerce entre les campagnes et les
villes. Ce secteur d’intermédiation constitue aujourd’hui le
principal effet d’entraînement sur l’agriculture et permet
d’expliquer en grande partie le fort accroissement de la
production alimentaire par tête constaté en Afrique de
l’Ouest depuis les années quatre-vingt.
Consommation alimentaire en Afrique de l’Ouest et centrale 141
Bibliographie
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Requier-Desjardins D., 1989. L’alimentation en Afrique : manger ce qu’on peut produire. Paris : Khartala et PUSAF.
169 p.
... As a result, specific shocks will affect these two groups very differently. To capture these differences in consumption patterns, the initial consumption baskets for each household group come from ELIM 2010 (République du Mali, 2011) and Bricas et al. (2013). In aggregate, the baseline food consumption quantities respect the per capita calorie availability of 2833 kcal/person/day as well as the commodity composition of those calories as outlined in the Mali food balance sheet for 2010. ...
... Household consumption and expenditure baseline. Sources: République du Mali (2011), FAOSTAT (2016), Observatoire du Marché Agricole(2015)andBricas et al. (2013). ...
Article
Low-income households in Sahelian West Africa face multiple shocks that risk compressing their already-low food consumption levels. This paper develops a multi-market simulation model to evaluate the impact of common production and world-price shocks on food consumption of vulnerable groups in Sahelian West Africa. Empirical analysis confirms that poor households bear the brunt of ensuing consumption risks, particularly in closed markets, where trade barriers restrict imports, and the poor find themselves in a bidding war with richer consumers for limited food supplies. In the absence of trade, a drought that reduces domestic rainfed cereal production by 20% would compress already low calorie consumption of the rural poor by as much as 15%, four times as much as other household groups. Conversely, a 50% spike in world rice prices hits the urban poor hardest, compressing calorie consumption by up to 8%. Policy responses need to focus on two basic mechanisms that can help to moderate this pressure – consumer substitution among staple foods and trade. Immediately south of the Sahel, coastal West African countries enjoy higher rainfall, dual rainy seasons, more stable staple food production based on root crops (cassava and yams) as well as frequent double cropping of maize. Our simulation results suggest that regional trade in maize, yams and cassava-based prepared foods like gari and attieké could fill over one-third of the consumption shortfall resulting from a major drought in the Sahel. Increasing substitutability across starchy staples, for example through expansion of maize, cassava and sorghum-based convenience foods, would further moderate consumption pressure by expanding the array of food alternatives and hence supply responses available during periods of stress.
... In SADC countries as in other Sub-Saharan African countries, food expenditures still represent the majority of households' spending. According to recent publications based on national consumption surveys in several regions in Africa (Bricas et al., 2013;Tschirley et al., 2015), the ratio of food to total expenditures varies between 40 % and 60 % according to the country (in Europe, it varies between 5 % and 25%). Even in rural areas, if auto-consumption has traditionally not been marginal and is part of a risk management strategy (Losch et al., 2012), spending on food accounts for 50 % of household budgets. ...
... Even in rural areas, if auto-consumption has traditionally not been marginal and is part of a risk management strategy (Losch et al., 2012), spending on food accounts for 50 % of household budgets. In cities, recent studies have demonstrated an increase in demand for rice, wheat and more original processed products, and a slight decrease in the demand for fresh products (Bricas et al., 2013;Kaneene et al., 2015;Tschirley et al., 2015). According to Tschirley et al. (2015), processed food (low and high value added together) holds a 39 % share of all food expenditure (including consumed own production) and a 68 % proportion of purchased food expenditure. ...
... Analysis of data from food balance sheets over a 30-year period (1980-2009) as well as information from budget consumption studies carried out in the 1990s and 2000s document this diversification as well as a striking increase in overall food availability as incomes have grown and the population has become more urbanised (Bricas et al., 2013;OECD/ SWAC, 2013). Among the most apparent trends are the following: ...
Article
Full-text available
Fueled by a burgeoning population, urbanisation and income growth, West African food demand is rapidly transforming, with striking increases in total quantities demanded, growing preference for convenience, diversification of diets towards more perishable products, and an increased concern for product quality. These changes provide great opportunities for the West African food system to increase production, value added, job creation and food security. Yet a number of structural and policy constraints continue to threaten the ability of West Africa to seize these opportunities. This paper analyses the key drivers of change and their implications on the various demands facing the food system. It then looks at how different elements of the food system respond to evolving demands, discusses the constraints to more effective responses, and finally considers some policy implications and key recommendations, particularly in the context of the ECOWAS-led efforts to develop and implement more effective regional agricultural policies.
... The OECD/Sahel and West Africa Club was particularly active in sponsoring studies examining the possible impacts of urbanization on the structure of West African agriculture and its likely capacity to compete with imports (e.g., OECD, 2014). While some recent studies (OECD, 2014;Bricas et al., 2013;Hollinger and Staatz, 2015) have drawn insights from budgetconsumption studies to discuss changing patterns of rural and urban food consumption, none have used income-elasticity estimates from such studies to make quantitative projections of future demand for different food products in West Africa or assess their implications for agricultural policies. ...
Article
This paper (a) summarizes recent evidence of changes in dietary patterns in the 15 ECOWAS countries of West Africa over the past 30 years and the forces driving those changes (In this paper, the term "West Africa" refers to the 15 countries that are members of the Economic Community of West African States (ECOWAS): Benin, Burkina Faso, Cape Verde, Côte d'Ivoire, The Gambia, Ghana, Guinea, Guinea-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Senegal, Sierra Leone, and Togo); (b) uses expenditure-elasticity estimates derived from budget-consumption studies in 8 of these countries (Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Ghana, Mali, Niger, Nigeria, Senegal, and Togo) and hypotheses about alternative income growth trajectories to develop scenarios about the evolution of demand for various foods over the period 2010-2040; (c) compares the projected demand growth with projection of production growth in key commodities to identify potential or increasing demand-supply gaps; and (d) derives implications for needed investments and policies regarding different commodities and components of the West African agrifood system, including identifying gaps in the current African Union-led Comprehensive Africa Agriculture Development (CAADP) programs. The analysis shows that in absolute terms, production shortfalls relative to demand for starchy staples (particularly rice and wheat) will continue to pose a major challenge for ECOWAS countries. In relative terms, however, imbalances between domestic production and demand will increase more quickly for foods with high income-elasticities of demand, such as meat, dairy products, seafood, fruits and vegetables and vegetable oils. Urban demand will grow two to four times faster than rural demand, depending on the commodity, putting increased pressure on already stressed urban food marketing systems. Substantial variations in supply-demand gaps across countries suggest that more fluid regional trade could help individual countries cope with these challenges. The findings also suggest that the focus of food policies in West Africa, historically on starchy staples (particularly cereals) needs to broaden to include a range of higher-value products for which demand is likely to increase very rapidly in the near future.
Chapter
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This study was conducted to first determine the nutritional potential and the antioxidant activity of black plum fruit pulp and peel. For these characterizations, classic methods were used. The results indicated high fibre and ash contents of black plum from all localities studied, ranging, respectively, from 34.79 ± 0.07–39.83 ± 1.85% and 4.91 ± 0.45–5.91 ± 0.41% for pulp, and 46.38 ± 0.09–50.21 ± 1.07% and 4.16 ± 0.81–4.28 ± 0.20% for peel. The mineral analysis revealed that Black plum pulp and peel are high in potassium (1863.00 ± 1.4–2584.55 ± 3.54 mg/100 g dry weight [DW]) and calcium (355.30 ± 2.52–389.52 ± 3.54 mg/100 g DW). Both the peel and pulp are characterised by a good essential amino acids profile of the protein. The total polyphenol, flavonoid and anthocyanin contents of pulp and peel ranged from 202.51 ± 4.19 to 463.45 ± 6.85 mg gallic acid equivalent (GAE)/100 g of Dry Weight (DW), 75.71 ± 1.03 to 145.55 ± 1.03 mg quercetin equivalent (QE)/100 g DW, and from 1.91 ± 0.08 to 8.28 ± 0.83 mg cyanidin 3-O-β-D-glucoside equivalent (C3GE)/100 g DW respectively. Thus, these fruits constitute a good source of important nutrients for health.
Thesis
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Depuis la colonisation, les corridors de transport ouest-africains ont créé pour les pays sans littoral une dépendance économique pénalisante vis-à-vis de l'extérieur. Les importations massives de produits manufacturés ne sont pas compensées par l'export de matières premières. Le marché africain n'est pas encore le marché des Africains et cela freine le développement des territoires. Dans le corridor de transport reliant Ouagadougou à Accra, en Afrique de l’Ouest, les défis de l'intégration régionale et de la sécurité alimentaire se cristallisent dans les circuits vivriers marchands. Les échanges qui s’y déroulent cadencent la mobilité des denrées entre les bassins de production excédentaires et les bassins de consommation déficitaires. Dans l’espace constitué par le Burkina Faso et le Ghana, caractérisé par un gradient écologique entre le Sahel et la côte qui différencie fortement les potentialités agricoles, la thèse met en perspective ces défis avec le développement des territoires. Elle analyse le potentiel inclusif des circuits vivriers marchands à travers l’exemple de l’igname, du maïs et du niébé dans le corridor qui relie Ouagadougou à Accra. Après une analyse des pratiques transactionnelles de ces circuits basés sur des enquêtes réalisées auprès des commerçants et transporteurs sur le terrain, nous simulons les échanges potentiels à l’aide d’un modèle gravitaire. Nous nous appuyons pour cela sur des données relatives à la production, au commerce, et à la consommation et nous estimons l’accessibilité spatiale à l’aide de données routières localisées. Entre le disponible alimentaire et la demande des ménages, localiser ces échanges et leurs parcours questionne l’articulation des échelles du commerce vivrier, ainsi que la complémentarité des lieux et des activités au regard des liens entre agriculture, commerce et transport identifiés comme porteurs d’un développement spatialement inclusif. Dans un contexte de villes secondaires, de marges et de frontières, notre approche explore les interactions spatiales induites par le commerce de produits vivriers alimentaires ; le but étant de proposer des recommandations techniques à portée opérationnelle et politique et de contribuer à la réflexion sur l’intégration régionale et la sécurité alimentaire.
Article
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Que savons-nous sur l'urbanisation de l'Afrique ? La variabilité de la définition de l'urbain dans chaque pays rend difficile toute comparaison internationale des indicateurs d'urbanisation et toute analyse historique de la croissance de ce phénomène. Certes l'urbanisation croît, mais de quelle manière et où précisément ? Plutôt par les grandes métropoles ou par les petites villes ? Combien d'agglomérations urbaines y a-t-il dans chaque pays ? La première tranche du programme Africapolis apporte de nouveaux éléments à ce sujet concernant l'Afrique de l'Ouest. Commandé par l'Agence Française de Développement (AFD), Africapolis donne une mesure de l'urbanisation et de ses formes depuis les années 1950, et projette ses résultats jusqu'à 2020, de manière plus précise que les travaux précédents sur l'urbanisation en Afrique de l'Ouest. Ce projet s'inscrit dans un programme de recherche mondial, e-Geopolis, soutenu depuis 2008 par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR). e-Geopolis a pour objectif la mise en ligne d'une base de données internationale sur l'évolution de l'urbanisation, en partant d'une définition harmonisée de l'urbain appliquée à tous les pays.