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L'immersion dans les musées de science : médiation ou séduction ?

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Abstract

Museos de ciencias intentan cambiar su oferta museologica proponiendo exposiciones espectaculares, que favorecen emociones fuertes y experiencias memorables. Asi se utilizan cada vez mas tecnologias de inmersion para hacer que los visitantes « vivan directamente » lo que es tratado por la exposicion. Pero lo que puede suscitar concretamente el senti- miento de la inmersion, y las razones por las cuales los visitantes se pueden sentir sumergidos en una experiencia fuerte, quedan dificiles de analizar. Algunos ejemplos de museografias pueden illustrar la diversidad de la tecnicas utilizadas para favorecer la inmersion. Sin embargo, son investigaciones acerca de la recepcion que nos permitieron modelizar esta nueva forma de mediacion. Nuestra metodologia basada en entrevistas profundizadas, permitio proponer configuraciones de visita, que muestran una tension entre un efecto de inmersion y un efecto de distanciamiento. Un analisis de la extension de este tipo de museografia en museos de ciencias muestra un cambio de paradigma : pasamos de la « cultura cientifica » al « entretenimiento cientifico ».
Culture & Musées
L'immersion dans les musées de science : médiation ou séduction ?
Florence Belaën
Citer ce document / Cite this document :
Belaën Florence. L'immersion dans les musées de science : médiation ou séduction ?. In: Culture & Musées, n°5, 2005. Du
musee au parc d'attractions : ambivalence des formes de l'exposition (sous la direction de Serge Chaumier) pp. 91-110;
doi : 10.3406/pumus.2005.1215
http://www.persee.fr/doc/pumus_1766-2923_2005_num_5_1_1215
Document généré le 09/06/2016
Résumé
Les musées des sciences tentent de renouveler leur offre muséologique en proposant des expositions
spectaculaires basées sur le principe d'émotions fortes et d'expériences mémorables. Ainsi ont-ils de
plus en plus recours aux techniques d'immersion parce qu'elles activent fortement le potentiel
émotionnel du visiteur. Le fonctionnement d'une médiation de type immersif est de « faire éprouver
directement le propos ». Mais les raisons d'un déclenchement d'un sentiment d'immersion
apparaissent multiples et difficiles à cerner. Quelques exemples de procédés expographiques illustrent
ici la variété des techniques qui produisent une dimension immersive. C'est par l'étude des modes de
réception que l'auteur cherche ici à formaliser ce nouveau mode de médiation. La description de
configurations de visite obtenues à partir d'entretiens approfondis rend compte d'une tension entre un
effet d'immersion et un effet de distanciation. L'analyse de l'extension de cette muséographie dans les
musées des sciences témoigne d'un changement de paradigme : d'une « mise en culture » de la
science au loisir scientifique.
Abstract
In an attempt to revitalise the museum experience, science museums are presenting spectacular style
exhibitions based on a principle of generating strong emotions and memorable events. To this end,
museums are increasingly employing techniques of immersion in order to stimulate an emotional
response in the visitor. These immersive techniques operate by creating a direct or interactive
experience of the subject matter. The triggers of this immersive sensation however, appear to be
multiple and difficult to define. By studying the modes of reception the author seeks to theorise this new
mode of mediation. Some examples of exhibition procedure are examined to illustrate the varieties of
techniques that may produce an immersive engagement. Extensive interviews provide descriptions of
the various exhibition configurations and reveal a tension between the effects of immersion and
distancing.
An analysis of the expansion ofthis practice in science museums reveals a change of paradigm: from a
signifîcant cultural development of science to a scientific entertainment.
Resumen
Museos de ciencias intentan cambiar su oferta museológica proponiendo exposiciones
espectaculares, que favorecen emociones fuertes y experiencias memorables. Asi se utilizan cada vez
mas tecnologias de inmersión para hacer que los visitantes « vivan directamente » lo que es tratado
por la exposición. Pero lo que puede suscitar concretamente el senti- miento de la inmersión, y las
razones por las cuales los visitantes se pueden sentir sumergidos en una experiencia fuerte, quedan
dificiles de analizar. Algunos ejemplos de museografîas pueden illustrar la diversidad de la técnicas
utilizadas para favorecer la inmersiôn. Sin embargo, son investigaciones acerca de la recepción que
nos permitieron modelizar esta nueva forma de mediación. Nuestra metodologia basada en entrevistas
profundizadas, permitió proponer configuraciones de visita, que muestran una tension entre un efecto
de inmersión y un efecto de distanciamiento.
Un anàlisis de la extension de este tipo de museografïa en museos de ciencias muestra un cambio de
paradigma : pasamos de la « cultura cientifîca » al « entretenimiento cientifico ».
Florence
Belaën
L'IMMERSION
DANS
LES
MUSEES
DE
SCIENCE
MÉDIATION
OU
SÉDUCTION
?
L
thème
de
l'émotion
est
devenu,
depuis
quelques
années,
un
élément
essentiel
dans
les
campagnes
de
communication
des
musées
de
science.
Pour
attirer
le
«
visiteur
émotionnel
»,
ces
institutions
ont
quelque
peu
tourné
le
dos
à
la
didactique.
Les
promesses
de
sensations
fortes
et
d'expériences
mémorables
ont
remplacé
celles
d'une
acculturation
au
monde
des
sciences
et
des
techniques.
D'après
les
rapports
sur
l'état
de
la
culture
scientifique
et
technique,
l'ensemble
des
musées qui
ont
émergé
dans
ce
champ
au
cours
des
années
1980
est
à
la
recherche
d'un
nouveau
souffle
(Jantzen,
2001).
Des
propositions
fondées
sur
le
principe
de
l'émotion
immédiate
et
de
l'évasion
sont
apparues
comme
une
solution
à ce
flottement.
Conséquence
:
les
nouvelles
expositions
scientifiques
rencontrent
de
plus
en
plus
une
logique
de
loisir
culturel,
sur
des
sujets
qui
pourtant représentent
de
véritables
enjeux
de
société.
Selon
notre
hypothèse,
la
réponse
de
ces
institutions
face
à
la
recherche
de
nouvelles
ambitions
est
de
reprendre
à
leur
compte
l'offre
des
établissements
«
voisins
»,
à
savoir
les
parcs
à
thème
d'une
part
et
les
musées
d'art
d'autre
part,
au
risque
parfois
d'en
perdre
leur
spécificité.
Dans
ce
contexte
les
expositions
d'immersion
ont
fait
leur
apparition
dans
les
musées
des
sciences
et
des
techniques
d'envergure
nationale.
Leur
particularité est
de
«
faire
éprouver,
de
faire
vivre
le
propos
de
l'exposition
»
(Montpetit,
1995).
Le
recours
à
cette
forme
de
présentation
correspond
à
une
nouvelle
stratégie
vis-
à-vis
du
visiteur.
Ce
genre
de
réalisations
semble
récent.
Toutefois,
en
intégrant
le
visiteur
dans
la
représentation,
il
prolonge
la
logique
de
la
muséographie
des
dioramas
ou
des
environnements
écologiques.
Si
le
mode
«
immersif
»
est
davantage
reconnu
dans
le
91
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
champ
de
l'art,
notamment
l'art
contemporain
(De
Oliviera
étal.,
2003
;
Leclercq,
2003),
son
application
pour
la
vulgarisation
des
sciences
reste
encore
peu
formalisée. Pourtant
son
extension
au
musée
des
sciences
témoigne
d'une logique
d'investissement
sur
la
forme
au
détriment
du
discours,
ce
qui
donne
lieu
à
des
scénographies
de
plus
en
plus
visibles
qui
absorbent
une
grande
partie
du
budget
de
conception.
Le
qualificatif
«
immersif
»
est
associé
à
un
effet
d'absorption.
Mais
qu'est-ce
qui
est
l'origine
de
ce
sentiment
d'absorption,
de
capture
?
Est-ce
le
dispositif
qui, par
quelques
astuces
expogra-
phiques,
parvient
à
saisir
le
visiteur
?
ou
le
sujet
qui
réveille
l'imaginaire
collectif
?
ou
encore
l'adhésion
du
visiteur
à
«
jouer
le
jeu
»
?
Objet
hybride,
au
confluent
des
arts
numériques
et
des
pratiques
de
reconstitution,
son
analyse
reste
complexe.
La
présentation
d'expositions
récentes
illustre
ici
quelques
techniques
qui
jouent
de
l'effet
immersif.
Mais
la
classification
reste
difficile
à
produire,
tant
les
réalisations
sont
disparates
et
le
décalage
entre
les
intentions
et
les
effets
produits
parfois
conséquent.
Afin
de
dépasser
ces
difficultés
liées
à
une
trop
grande
hétérogénéité,
les
expositions
d'immersion
sont
ici
observées
du
côté
de
leur
réception
selon une
démarche
sociopragmatique.
Cet
axe
permet
de
faire
émerger
différents
effets
produits
dans
cette
quête
de
dépaysement
total
:
des
configurations
de
visite,
globales
et
complexes
qui
rendent
compte
d'une
tension
entre
un
effet
d'immersion
et
un
effet
de
distanciation.
Un
des
intérêts
de
ce
dernier
est
de
voir
comment le
visiteur
«
joue
»
avec
le
dispositif.
Car
la
visite
est
moins
vécue
comme
une
expérience
d'apprentissage
que
du
point
de
vue
du
jeu
et
de
la
recherche
d'illusion.
L'IMMERSION
:
UN
CONCEPT
QUI
S'APPLIQUE
?
c
lomme
l'indique
Grau
dans
une
mise
en
perspective de
l'apparition
des
dispositifs
d'immersion
(Grau,
2003),
le
concept
d'immersion
reste
difficile
à
circonscrire.
Du
fait
de
son
appartenance
pluridisciplinaire
comme
la
phénoménologie,
l'esthétique
et
les
neurosciences,
son
analyse
reste
encore
confuse,
notamment
au
niveau
de
sa
mise
en
application
dans
les
musées
des sciences.
La
dénomination de
la
catégorie
«
muséographie
d'immersion
»
est
relativement
récente,
même
si,
les
premières
réalisations
qui
peuvent
être
qualifiées
«
d'immersives
»
datent
de
l'Antiquité
(Grau,
2003).
En
effet,
au
moyen
d'un
système
de
fresques
qui
englobait physiquement
le
visiteur
en
jouant
par un
travail
de
perspective
avec son
regard,
les
salles
de
la
Villa
dei
Misteri
de Pompéi
répondaient
déjà
à
une
logique
de
«
captiver
»
celui
qui
les
pénétrait.
92
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
5
Une
absence
de
caractérisation
des
styles
en muséologie, une
pratique sans
fondement
théorique
et
un
vide
au
niveau
de
la
critique
d'exposition
au
sujet
scientifique
ou
technique
ont
aujourd'hui
pour
conséquence
un
usage
flottant
du
terme.
La
multitude
de
sens
que
revêt
cette
catégorie
s'avère
d'autant
plus
courante
que
le
qualificatif
«
immersif
»>
renvoie
à
un
terme
de
sens
commun
que
chaque
praticien
essaie
d'investir,
parfois
selon
un
effet
de
mode
ou
en
quête d'une
nouvelle
désignation
attractive
après
le terme d'interactivité
(Belaën,
2003).
Les environnements
immersifs
cherchent
à
procurer
chez
le
visiteur
un
sentiment
global,
prolongeant
ainsi
la
quête
d'un
art
total
(De
Oliviera
et
al,
2003).
L'immersion
renvoie
à
une
expérience
envoûtante,
de
«
forte
»
intensité,
qui
se
caractérise
par
une
augmentation
de
l'émotion
et
une
diminution
de
la
distance
critique
(Grau,
2003).
Elle
se
traduit
par
une
absorption
mentale
du
sujet
qui
le conduit
d'un
état
à
un
autre,
avec
le
sentiment
d'être
dans
«
un
temps
et
un
lieu
particuliers
»
(Bitgood,
1990).
L'expérience
d'immersion
est
intimement
liée
à
un
phénomène
de
capture,
à
un
effet
de
suspension
qui
peut
aller
jusqu'à
une
perte
momentanée
de
soi-même.
Ces
«
symptômes
»
rejoignent
ceux
repérés
dans l'expérience
esthétique
qui
provoquent
également
chez
le
sujet
une
expérience
de
«
flux
»,
de
ravissement
(Michaud,
1999). L'observation
de
ces
effets
nous
amène,
de
manière
logique,
à
essayer
de
saisir
l'origine
d'un
tel
sentiment,
les
raisons
de
son
déclenchement.
Bitgood
distingue
quatre
formes
d'immersion
(Bitgood,
1990)
:
interactive,
médiatique,
esthétique,
dramatique.
D'après
ses
conclusions,
la
simple contemplation
d'un
tableau
ou
la
lecture
d'un
roman
peut
provoquer
le
sentiment
d'être
absorbé
ou
profondément
impliqué dans
le
dispositif.
Ainsi
le
sentiment
d'immersion
peut
avoir
lieu
au
cours
de
la
découverte
d'un
monde diégétique
provenant
d'un
support
qui,
au-delà
d'une
spécificité
formelle,
parviendrait
à
happer
le
récepteur.
L'inconvénient
de
cette
analyse
est
qu'elle
exclut
ainsi
la
particularité
d'un
dispositif
de
type
immersif.
L'étude
de
la
muséographie
d'immersion par
une
analyse
des
effets
produits
selon
une
approche
qui
relèverait
de
la
psychologie
sociale
rappelle
les
difficultés
heuristiques
connues
en
esthétique,
à
savoir
celles
d'une
dialectique
sur
les
origines
d'une
expérience
esthétique,
sur
les
raisons
pour
lesquelles
une
œuvre
ou
un
objet
(là
est
la
question)
plus
qu'un
autre
parvient
à
ravir
un
visiteur
(Demeulenaere,
2002
;
Schaeffer,
2001).
Parce
que
le
sentiment
d'immersion relève
d'une
expérience
personnelle
et
subjective, l'immersion
physiologique
et
l'immersion
psychologique
ne
se
recouvrent
pas
complètement.
Une
manière
d'échapper à
cette
dialectique
et
de
ne
pas
perdre
notre
objet,
témoin
d'un
nouveau
paradigme,
est
de
tenter
de
le
caractériser
par
le
mode
de
médiation
spécifique qu'il
instaure
avec
le
visiteur.
En
effet
le
principe
de
médiatisation
de
type
immersif
93
L'immersion
dans
les
musées
de
science.
.
.
culture
&
musées
5
a
la
particularité
de
ne
plus
placer
le
visiteur
à
distance
de
la
représentation
mais
de
le
plonger
au
cœur
même
de
celle-ci
afin
qu'il
en
éprouve
directement
le
propos,
jusqu'à
parfois
constituer
l'expérience
elle-même
comme
propos
(Montpetit,
1995
;
Belaën,
2003).
Elle
fonctionne
sur
le
principe
de
la
simulation
afin
de
créer
l'illusion
d'une
situation,
en jouant
de
l'artifice
de
type
«
comme
si
vous
y
étiez
»,
technique
de
persuasion
déjà
éprouvée
par
ailleurs
(Eco,
1985).
Cette
forme
muséologique
ne
se
centre
ni
sur
les
objets
ni
sur
le
savoir,
mais
sur
le
visiteur
(Davallon,
2000).
La
particularité
des
dispositifs
d'immersion
est
qu'ils
proposent
des
espaces
fortement
scénographies
l'ensemble
des
éléments
expographiques,
dans
un
espace
clos
et
totalement
mis
en
scène,
sont
signifiants
et
«
portent
»
le
message
global
de
l'exposition.
L'agencement
opère
comme
un
langage
que
le
visiteur
est
invité
à
décoder,
il
déambule
«
à
l'intérieur
de
la
matérialisation
d'une
enveloppe
imaginaire
qui
sert
d'enveloppe
à ce
qu'il
rencontre
»
(Davallon,
Grandmont,
Schiele, 1992).
Le
monde
synthétique
est
construit
de
manière
à
rendre
compte
matériellement
du
monde
de
référence
«
un
peu
comme
si
le
signe
s'ingéniait
à
subsumer
le
réfèrent
»
(Schiele,
1996)
et
guide
ainsi
le
visiteur
dans
la
constitution
du
monde
utopique
imaginé
par
le
concepteur.
À
travers
quelques
exemples
de
réalisations
qui
jouent
de
l'artifice
«
immersion
»,
essayons
de
saisir
la
mise
en
œuvre
de
cette
forme
de
médiation.
L'IMMERSION
CÔTÉ
CONCEPTION
A
partir
d'appréciations
de
visiteurs
(Bitgood,
1990),
Stephen
Bitgood
conclut
que
les
dispositifs
d'immersion
produisent
l'effet
d'être
dans
«
un
temps
et
un
lieu
particuliers
».
L'expérience
est
celle
d'un
espace-temps
en
rapport
avec
la
thématique
exposée.
Du
point
de
vue
de
la
réalisation,
les
expositions
d'immersion
proposent
la
(reconstruction
d'un
univers
de
référence
dans
laquelle
le
visiteur est
intégré.
De
cette
définition
émergent
deux
principes.
Dans
un
premier
temps, le
sujet
de
l'exposition
est
appréhendé
en
termes
d'univers,
de
territoire1,
dans
l'objectif
de
rendre
visible
le
savoir
de
référence,
de
donner une
matérialité
au
propos
global.
Cette
territorialisation
du
savoir
à exposer
rappelle
la
démarche
théâtrale
qui
prend
corps
selon
la
recherche
d'une
unité
de
temps
et
de
lieu.
Cette
analogie avec
un
champ
culturel
«
voisin
»
rappelle
que
la
reconstitution
de
ces
univers
repose
sur
une
dramatisation
du
message.
La
théâtralisation
du
propos
induit
une
vision
spécifique
du
savoir
de
référence
:
celle
d'un
auteur,
d'un
courant,
d'une
époque,
d'un
point
de
vue.
Un
second
94
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
principe
au
cœur
de
la
réalisation
d'un
environnement
immersif
est
de
faire
vivre,
dans
un
espace
circonscrit,
cette
spatialisation
du propos selon
la
promesse
qu'un
discours
scientifique
peut
être
transmis
de
manière
sensible
et
sensorielle.
Ces
expositions
cherchent
à
réveiller
les perceptions
primaires
procurées
lors
de
la
découverte d'un
univers.
Pour
y
parvenir,
elles
exacerbent
la
dimension
de
spatialisation
de
l'expérience
de
visite
en
réactivant
notre
rapport
sensible
à ce
monde.
Ainsi,
à
la
différence
du
théâtre
classique
le
spectateur
est
exclu
de
l'espace
scénique,
les
expositions
d'immersion
intègrent
le
visiteur
comme
élément
constitutif
de
la
représentation.
Comme
dans
la
muséographie
analogique
appliquée
à
des
sujets
sur
l'environnement,
le
visiteur
se
trouve
au
cœur
du
dispositif
dans
lequel
un
espace
et
un
rôle
lui
sont
assignés
(Davallon,
Grandmont,
Schiele,
1992).
En
d'autres
termes,
la
muséographie
d'immersion
«
place
physiquement
les
visiteurs
dans
des
conditions
qui
reproduisent
certaines
caractéristiques
du
sujet
traité
et
permettent
d'éprouver,
de
vivre
le
propos
»
(Montpetit,
1995).
Le
dispositif
englobe
le
visiteur
et
l'invite
à
contribuer,
parfois
à ses
dépens,
à
la
représentation
d'un
monde de
référence.
Analysons
quelques-unes
de
ces
astuces
expographiques
mises en
œuvre dans
les
musées de
science.
Une
des
premières
façons
de
revivre
pleinement un
environnement
est
bien
sûr
la
visite
in situ,
comme
la
visite
dans
un
laboratoire
à
l'occasion de
l'opération
Fête
de
la
science
ou
encore
la
découverte
du
bureau d'un
scientifique
connu comme
le
propose
le
musée
Marie-Curie
à
Paris.
Le
savoir
présenté
réside
dans
le
lieu
lui-même
avec
toute
la
charge
symbolique
qu'il
comporte.
Dans
certains
cas,
à
défaut
de
pouvoir
pénétrer
ces
«
espaces-
temps
»
dans
leur
contexte
d'origine,
ils
peuvent
être
transposés
dans
les
institutions
ou
reconstruits
selon
le
principe
de
la
muséographie
analogique
telle
que
l'articulation
des
objets
exposés,
originaux
ou
reproduits
pour
que
le
«
tout
forme
une
image,
c'est-à-dire
fasse
référence,
par
ressemblance,
à
un
certain
lieu
et
état
du
réel
hors
musée
»
(Montpetit,
1996).
Les
environnements
écologiques
du
musée
des
Arts
et
Traditions
populaires,
ou
encore
les
reconstitutions
de
mine
au
musée
de
Saint-Étienne
ou
encore
au
Deutsche
Muséum
expriment
cette
tendance2.
Cependant
pour
créer
l'illusion
de
l'authenticité,
la
rigueur
scientifique
n'est
pas
toujours
appliquée,
il
suffit
que
«
l'irréalité
absolue
s'offre
comme présence
réelle
»
(Eco,
1985).
S'éloignant
d'une
logique
de
mimêsis,
des
expositions-
spectacles
proposent
des
reproductions
qui
rappellent
le
savoir-
faire
des
parcs
à
thème3.
Dans
ce
cadre l'exposition
itinérante
Trésors
du
Titanic4
présentée
simultanément
à
la
Cité
des
sciences
et
de
l'industrie
de
Paris
et
au
Science
Muséum
de
Londres
est
à
plusieurs
titres
intéressante
pour
notre
problématique. Au
moyen
de
décors
qui
«
rendent
vie
»
aux
objets
retrouvés
dans
l'épave,
95
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
5
Trésors
du
Titanic
propose
aux
visiteurs
de
revivre
l'histoire
tragique
du
transatlantique.
L'ensemble
de
l'exposition5
est
scénographie
selon
un
mode
de
représentation
global
et
cohérent,
plus
ou
moins
fidèle
au
monde
de
référence,
c'est-à-dire
au
paquebot
lui-même.
La
particularité
de
ce
genre
d'exposition
réside
dans
la
construction
d'un
environnement
selon
un
continuum qui
rappelle
non seulement
le
contexte
d'usage
des
objets,
mais
accorde
également
une
«
place
»
aux
visiteurs
dans
la
représentation.
Successivement,
ils
se
trouvent
face
à
des
reconstitutions
comme
les
cabines
de
troisième
et
de
première
classe,
déambulent
sur
un
pont-promenade
ou
encore
découvrent
des
salles
à
la
stylistique
évocatrice
comme
la
salle
relatant
le
naufrage.
Les
visiteurs ont
l'impression
d'être
des
acteurs
qui
participent
à
une
pièce
de
théâtre
dont
le
scénario
est
connu
de
tous.
Pour
faciliter
un
effet
de
suspension
de
crédibilité,
plusieurs
procédés
de
sollicitations
physiques
du
visiteur
peuvent
agrémenter
ces
environnements.
Par
exemple,
la
sollicitation
sensorielle
:
le
visiteur
est
invité
à
toucher
une
plaque de
glace qui
lui
permet
de
sentir
«
physiologi-
quement
»
la
température
de
la mer
au
moment
de
la
catastrophe.
Ou
encore
l'activation
du
canal
auditif
:
une musique en
fond
qui
donne
une
couleur à
chaque
salle
-
celle
de
l'embarquement,
autour
du
grand
escalier,
etc.
-
et
qui
tente
de
reproduire
l'ambiance
(que
l'on imagine)
du
navire
de
croisière.
Ces
éléments
environnementaux
participent
au
conditionnement
psychologique
du
visiteur.
En
effet
des
études
réalisées
dans
des
centres
commerciaux
ont
prouvé
que
l'usage d'une
bande-son
influe
sur
le
comportement
des
clients
(Rieuner,
2002).
C'est
pour
cette
raison
que
la
musique
est
un
élément
constitutif
des
parcs
à
thème,
et
contribue
activement
à
créer
une
ambiance
identifica-
trice
(Auge,
1992).
Si
ces expositions-spectacles
sont
régulièrement
programmées
dans
les
grandes
institutions
muséales qui
en
ont
les
moyens,
un
autre
genre,
plus
expérimental,
a
vu
le
jour
récemment
:
celui
d'exposition-intallation.
Cette
nouvelle
forme
culturelle
se
caractérise
par un
travail
scénographique
qui
ne
se
réduit
pas à
celui
de
décor,
mais
qui se
positionne
comme
véritable
langage
formel
exprimant
le
propos global
de
l'exposition.
Ce
genre
d'exposition
témoigne
non
seulement
d'une
recherche
pour
étendre
le
principe
de
l'interactivité
de
quelques
éléments
disparates
à
l'ensemble
du
dispositif
expographique,
mais
aussi
au
souhait
de
parvenir,
au
moyen
de
réalisations
de
type
«
œuvres
totales
»,
à
une
fusion
entre
la
recherche
scientifique
et
la
recherche
artistique
(De
Oliviera
étal,
2003).
La
Cité
des
sciences
et
de
l'industrie6
a
expérimenté
cette
nouvelle
formule
dans
ses
dernières
productions
comme L'Homme
transformé
ou
encore
Le Cerveau
intime.
L'exposition
L'Homme
transformé
présente
les
développements
récents
des
sciences
et
des
technologies
qui
influent
sur
la
vision
que
l'homme
a
de
son
96
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
n
°
5
corps
et
de
sa
relation
à
autrui.
L'agencement
global
de
l'exposition
représente
métaphoriquement
une
cellule
constituée
de
noyau
et
d'alvéoles.
Le
visiteur
est
invité
à
interagir
avec
le
dispositif
central
et
à
ressentir
une
sorte
de
«
contact
biologique
»,
simulé
par un
bruit
de
respiration
et
un
rythme
de
flux
sanguin.
Le
registre
n'est
plus
celui
de
«
l'imitation
qui
représente
ou
signifie
»
comme dans
les expositions-spectacles,
mais
celui
de
«
la
suggestion
qui
exerce
sur
l'esprit
pour
lui
faire
éprouver
ou
penser
quelque
chose
»
(Souriau,
1990).
Dans
l'exposition
Le
Cerveau
intime,
le
visiteur est
amené
à
vivre
directement
la
théorie
des
affects.
Un
jeu
de
lumières
et
de
sons
le
plonge
successivement
dans
deux
ambiances
totalement
différentes
:
lumière
blanche
éblouissante
et
sons
apaisants
durant
la
phase
traduisant
le
plaisir,
lumière
réduite
et
sons
agressifs
pour
la
phase
déplaisir.
Par cet
effet,
la
scénographie
cherche
à
illustrer
le
fait
que
la
recherche
du
plaisir
et
l'évitement
du
déplaisir
sont
les
deux pôles
de
la
régulation
du
comportement
affectif.
Expérience
plastique
et
expérience
esthétique
sont
présentées
comme
un
premier
niveau
de
lecture.
Ce
type
d'exposition
manifeste
une
prise
en compte
originale
du
savoir
de
référence
qui
s'applique
particulièrement
lorsque
celui-ci
renvoie
à
un
univers
difficilement
matérialisable.
Autant
l'histoire
du
Titanic
ou
de
la
découverte
de
la
radioactivité
s'associent
de
manière immédiate
à
des
espaces-temps, parce
que
ceux-ci
ont
réellement
existé, autant
d'autres
thèmes
comme
le
cerveau,
l'homme
de
demain
ou
les
conséquences
du
réchauffement
climatique
nécessitent
une
plus
grande
créativité
dans
la
recherche
des
formes
pour
faire
vivre
au
visiteur
le
propos
par
immersion.
Lorsque
le
sujet
à exposer
présente
des obstacles
épistémologiques
pour
donner
un
rendu
palpable
et
concret,
ce
n'est
plus
une
logique
de
reproduction
d'un
univers
de
référence
qui
est
mise
en
œuvre
mais
une
logique
endogène
«
la
disposition
des
choses
est
montrée
et
générée
selon
les
besoins
identifiés
par
la
mise
en
exposition elle-même
»
(Montpetit,
1996).
Cette
difficulté
est
abordée
comme
un
exercice
de
style
proposé
aux
maîtrises
d'oeuvre
qui,
selon
une
démarche
de
création,
propose
une
installation
selon
un
procédé
métaphorique
qui
s'inspire
du
thème.
Par
ce
genre
de
réalisation
l'institution
ne
cherche
pas à
se
positionner
dans
les débats
relatifs
au
développement
des
sciences
;
elle
se
présente
comme
producteur
de
nouvelles
formes
culturelles.
Influencé par
les
avancées
des
arts
numériques,
ce
genre
d'installation
use
abondamment
de
l'effet
immersif
produit par
des
écrans
géants,
la
proposition
pouvant
être
réduite
à
plonger
le
visiteur
dans
une
salle
cubique de
réalité
virtuelle.
Dans
ce
type
d'offre,
«
"voir"
devient
synonyme
"d'éprouver"
jusqu'à
la
moelle
»
(Norman,
1996) comme dans
l'exposition
Climax
le
propos
principal
-
le
réchauffement
climatique
et
ses
conséquences
-
est
contenu
dans
un
film
d'images
de
synthèse
projeté
sur
360°.
97
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
L'immensité,
l'aspect
englobant
des
images
ainsi
que
des
effets
de
perspectives
et
des
jeux
de
cadre
comme les
travellings
participent
à
un
sentiment
d'intégration
du
visiteur
dans
la
représentation.
Par un
effet
d'échelle,
ce
dernier
a
l'impression
de
«
rentrer
dans
l'image
»
(Jullier,
1997).
Ce
type
de
présentation
rappelle
évidemment
les
systèmes
Omnimax,
Imax,
ou
encore
les
planétariums
qui
complètent
l'offre
des
musées
de
science.
D'une
forme
classique
de
mise
en
scène
théâtrale
à
des
dispositifs
relevant
des
réalités
virtuelles7,
les
possibilités
pour
tenter
d'atteindre
le
visiteur
par
immersion
augmentent
avec
le
développement
des
technologies.
Toutefois
l'accès
au
monde diégétique
voulu
par
les
concepteurs
ne
repose
pas
seulement
sur
l'agencement
matériel
du
dispositif
expographique.
Comme
le
suggérait
plus
haut
l'analyse
littérale,
le
système
narratif
porté
par
le
scénario
de
l'exposition
participe
également
à
l'effet
d'immersion
recherché.
En
effet,
l'illusion
est
d'autant
plus
forte
que
le
visiteur
a
l'impression
d'être
impliqué
dans
le
déroulement
du
scénario
proposé.
La
dramatisation
d'un
propos
accentue
un
effet
de
projection
qui
participe
à
la
capture
du
récepteur
dans
une
fiction,
sentiment
que
procure
parfois
la
lecture
d'un
livre.
Plusieurs
techniques
d'implication
du
visiteur
dans
la
mise
en
récit
existent.
La
prestation
de
comédiens qui
déambulent
dans
l'exposition
peut,
selon
le
principe du
jeu
de
rôle,
inviter
le
visiteur
à
s'investir
de
sa
personne8.
Aussi
un
style
d'écriture
peut
laisser
entendre
une
personnification
de
la
visite,
comme
par
exemple
des
écrits
sur
les
panneaux
à
la
première
personne
du
pluriel
:
«
Imaginons
que
vous
vous
dirigez
vers
le
spectacle qu'est
le
dîner
des
premières
classes
le soir
du
14
avril.
»
Un
dispositif
explicite
d'identification
à
un
personnage
produit
également un
effet
de
catalyseur
dans
la
recherche
d'un
effet
d'immersion.
A
l'entrée
de
l'exposition
Trésors
du
Titanic,
le
visiteur
se
voit
remettre
un
fac-similé
de
la
carte
d'embarquement
sur
lequel
figurent
le
nom
et
l'histoire
d'un
réel
passager
du
Titanic.
Dans
la
dernière salle,
la
galerie
commémorative,
il
est
invité
à
rechercher
le
nom
du
passager
figurant
sur
la
carte
afin
de
connaître
le
destin
du
personnage
à
la
fois
fictif,
mais
en
même
temps
réel,
qui
l'a
accompagné
au
cours
de
sa
visite.
Le système
de
narration
est
alors
plus
efficace
quand
il
est
associé
à
un
système d'identification
;
en
d'autres
termes,
les
visiteurs
s'imprègnent
d'autant
plus
de
l'histoire
racontée
que
leur
sort
(même
fictif)
en
dépend.
Cette
présentation
des
différentes
techniques qui
produisent
des
effets
immersifs
n'est
pas
exhaustive,
d'autant plus
que
certaines
peuvent
être
superposées
dans
une
même
exposition.
98
L'IMMERSION
DANS
LES
MUSÉES
DE
SCIENCE...
CULTURE
&
MUSÉES
N
°
5
L'IMMERSION
CÔTÉ
RÉCEPTION
L
ée
pari
d'une
médiation
de
type
immersion
est,
comme
nous
l'avons
indiqué,
de
provoquer
une
émotion
tellement
forte
que
l'état
psychologique
du
visiteur
s'en
trouve
affecté,
allant
d'un
sentiment
de
dépaysement
total
à
un
engagement
citoyen?.
Des
études
de
public
permettent
de
voir
les
effets
réels
de
ces
promesses
et
de
souligner
quelques
paradoxes.
À un
autre
niveau,
l'observation
des
modes
de
réception
que
ces
expositions
induisent
apparaît,
dans
une
quête
de
formalisation
de
ces
propositions,
comme
un
moyen
de
contourner
l'hétérogénéité
des
réalisations.
Une
étude
au
moyen
d'entretiens
approfondis
a
permis
d'élaborer
un
système
de
réception propre
à
la
muséographie
d'immersion.
L'ÉMOTION,
UN
SENTIMENT
PUR
?
Les
principales
études
de
public
menées
par
l'équipe
de
Bitgood
et
réalisées
sur
des
dispositifs
d'immersion
qui
rencontrent
une
logique
exogène
c'est-à-dire
une
logique
«
la
disposition
des
choses
montrées
repose
sur
un
ordre
préalable
qui
est
maintenu
et
doit
être
connu
et
reconnu
par
les
visiteurs
»
(Montpetit,
1996)
notent
une
attirance
certaine
de
la
part
du
public
pour
ce
genre
de
présentation.
Selon
l'analyse
de
différenciateur
sémantique,
les
visiteurs
ont
qualifié
ces
dispositifs
de
«
mémorables
»,
«
excitants
»,
qui
«
rendent
le
sujet
vivant
»
ou
qui
«
donnent
envie
d'en
savoir
plus
».
L'efficacité
et
la
facilité
de
lecture
des
présentations
contextuelles
avaient
déjà
été
démontrées
à
partir
des
dioramas
(Wonders, 1993
;
Van
Praët,
1996).
L'étude
menée
par
l'Observatoire
des
publics
de
la
Cité
sur
l'exposition
Trésors
du
Titanic
(Cohen
et
Habib,
2003)
rapporte
une
appréciation supérieure
des
visiteurs
interrogés
à
l'appréciation
des
autres
offres
de
cette
institution.
Leurs
propos
mettent
l'accent
sur
l'efficacité
de
la
combinaison
de
plusieurs
techniques
d'immersion,
celle
de
l'identification
à
un
personnage
mi-réel,
mi-fictif,
l'histoire
du
Titanic mise
en
scène
par
le
parcours,
et
enfin
la
possibilité
de
revoir
les
lieux,
de
déambuler
comme
sur
une scène.
Mais
au-delà
des
qualités
du
dispositif
qui
participent
à
l'illusion,
le
sujet
et
la
structure
du
scénario
facilitent
également
l'entrée
du
visiteur
dans
l'histoire
racontée.
En
effet
l'enchantement
provient
aussi
du
fait
que
le
sujet,
mais
aussi
sa
mise
en
exposition
reposent
sur
une
culture
partagée,
celle
de
la
tragédie
du
paquebot
(et
surtout sur
le
succès
du
film10).
L'histoire
tragique
de
ce
paquebot
habite
l'imaginaire
collectif,
ce
qui
facilite
l'imprégnation par
le visiteur.
L'appropriation
est
d'autant
plus
facile
que
l'histoire
est
déjà
connue
de
tous.
99
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
5
Les
installations
immersives
suscitent
à
l'inverse
une
appréciation
plus
partagée
(Belaën,
2002
;
Pivard,
2003).
Par
exemple
dans
l'exposition
L'Homme
transformé11,
une
partie
des
visiteurs
manifeste
son
incompréhension
de
la
mise
en
scène
et
sa
non-
adhésion
au
parti
pris formel.
En
effet
certains
visiteurs,
gênés
par
l'ambiance
sonore
et
lumineuse,
se
sont
plaints
d'un
manque
de
confort
de
visite
nécessaire
à
la
découverte du
propos
et
d'une
absence
de
médiation
pour
saisir
le
sens
caché
de
la
scénographie.
Le
recours
à
une
présentation
métaphorique,
propre
aux
installations
artistiques,
fait
naître
des
réactions
connues
dans
le
monde
de
l'art
contemporain,
comme
celle
de
l'argument
fonctionnel
(Heinich,
1997)
ou
encore du
contrat
avec
l'institution
On
se
moque de
nous
!
>»).
La
logique
de
représentation
basée
sur
l'analogie
offre
l'avantage
d'être facilement lisible
pour
le
visiteur,
d'être
suffisamment
explicite.
Il
éprouve
moins
de
difficultés
pour
interpréter
ce
qu'il
voit
(Montpetit,
1996). Comme
l'indique
Marc
Auge
suite
à
sa
visite
à
EuroDisney,
ce
sont
«
les
plaisirs
de
la
vérification,
les
joies
de
la
reconnaissance
»
qui
participent
au succès
des
parcs
à
thème
(Auge,
1992).
À
l'inverse,
une
représentation
axée
sur
un
principe
métaphorique
fait
naître
un
sentiment
d'exclusion chez
un
public
qui
ne
détiendrait
pas
les
clefs
de
lecture
permettant
de
décrypter
ce
langage
formel.
La réception
des
installations
immersives,
quel
que
soit
le
sujet
exposé,
à
caractère
scientifique
ou
pas,
rejoint
les réactions
des
visiteurs
pour
l'appréciation
de
l'art.
Comme
pour
une
œuvre
d'art,
une
installation immersive
ne
revêt
de
sens
que
pour
celui
qui
en
possède
les
codes
(Bourdieu,
1979).
Les
présentations
métaphoriques
font
naître
le
besoin
de
proposer en
complément
des
formes
de
médiation
intermédiaires
qui
aideraient
à
décrypter
la
perception
de
«
premier
»
degré
en
déplaçant
l'intérêt
du
contenu
vers
la
forme.
La
connaissance
des
codes
mis
en
jeu dans
l'exposition
participe
ainsi
à
la
dimension
émotionnelle
de
la
visite.
Dans
une
expérience
d'immersion,
comme
pour
l'expérience
esthétique,
«
la
notion
de
plaisir
est
liée
à
l'appréhension
cognitive
d'un
objet
à
travers
sa
forme
»
(Demeulenaere,
2002).
L'émotion
promise
ne
serait
pas
un
sentiment
pur
(Schaeffer,
2001),
la
dimension
esthésique
de
l'expérience
de
visite
se
retrouve
fortement
associée
à
la
dimension
cognitive.
Ces
études
remettent
en
question
le
caractère
immédiat
et
universel
de
la
compréhension
d'un
propos
par
le
recours
à
un
langage
formel
et
sensible.
Des
configurations
de
visite
:
entre
l'immersion
et
la
distanciation
Un
travail
de
recherche
portant
sur
la
réception par
les
visiteurs
d'expositions
d'immersion
a
permis
de
mettre
en
lumière
comment
plusieurs
dimensions
de
la
visite
-
cognitive,
esthésique,
100
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
kinesthésique
et
sociale
-
se
combinent
et
participent
à
la
construction
de
configurations
de
visite
spécifiques
(Belaën,
2002).
Il
a
mis
en
relief
une
typologie
constituée
de
cinq
familles
-
la
résonance,
la
submersion,
la
distanciation
critique,
la
banalisation,
et
le
rejet.
La
présentation
de
cette
classification
suit,
à
un
premier
niveau,
la
logique
d'une
recherche
d'un
modèle
de
la
réception
propre
aux
expositions
d'immersion
;
en
effet
elle
fonctionne
selon
la
tension
immersion/distanciation,
tension
suggérée
par
ces
expositions12.
À un
niveau
plus
large
de
la
muséologie,
cette
analyse
prolonge
également
la
recherche
d'un
modèle
de
l'expérience
de
visite
comme
expérience
globale,
comme
l'ont
initié
Falk
et
Dierking
(1992)13.
Les
familles
de
visite
qui
suivent
ont
été
observées
dans
des
expositions
d'immersion
à
logique
endogène14.
Elles
sont
construites
selon
une démarche
qualitative,
à
partir
des
verbalisations
des
visiteurs
à propos
de
leur
expérience
de
visite,
et
illustrent
quelques
réactions
types
que
peuvent
engendrer
des
dispositifs
de
type
immersifs.
La
résonance
:
Les
visiteurs
de
ce
premier
groupe
se
sentent
en
résonance
avec
l'exposition,
que
ce
soit
au
niveau
du
dispositif
muséographique
ou
au
niveau
de
la
nature
des
propos.
Un
facteur
déterminant
est
que
ces
visiteurs
ne
sont
pas
prisonniers
en
termes
d'objectifs
à
l'issue
de
la
visite,
ils
sont
venus
pour
vivre
une
expérience
et ils
acceptent
de
se
laisser
porter
par
la
proposition
qui
leur
est
faite.
Ils
adhèrent
à
cette
présentation
proche
d'une
forme
artistique
pour
exposer
des
connaissances
scientifiques
ou
techniques.
Ils
apprécient
l'effet
de
mise
en
scène
qui, par
une
dramatisation
du
propos,
contribue
à
rendre
le
sujet
vivant.
Leur
visite
se
caractérise par
une
forte
activité
onirique,
activité
régulièrement
relancée
par
l'expérience
sensorielle
et
plastique
à
laquelle
ils
sont
conviés.
La
submersion
:
Cette
configuration
est
une
configuration
de
l'extrême
les
visiteurs
se
jettent
dans
le
dispositif
qui
leur
est
offert
sans
aucune
distanciation par
rapport
à ce
qu'ils
voient
et
aux
informations
qui
leur sont
données.
Cette
configuration
de
visite
est
dominée
par
une
émotion
grandissante
au
fil
de
l'exposition.
Submergée
par
le
propos
et
noyée
dans
les
émotions,
la
visite
peut
s'arrêter,
motivée par un
blocage
physiologique
et
un
sentiment
d'angoisse^.
La
distanciation
critique
:
Les
visiteurs
de
cette
configuration,
amateurs
d'exposition,
ont
compris
les
objectifs
de
l'exposition,
en
ont
saisi
le
propos.
Ils
se
prêtent
au
jeu
mais pour
mieux
en
mesurer
les
effets.
La participation
reste
contrôlée
mais
surtout
s'accompagne
d'un
effet
de
mise
en
interrogation
:
«
Qu'est-ce
que
je
préfère
au
final
?
Des
expositions plus
didactiques
ou
des
expositions plus spectaculaires
?
Qu'ont-ils
voulu
me
dire
?
Pourquoi
ce
dispositif
?
»
Ainsi
tout
au
long
de
la
visite,
une
distance
accompagne
l'effet
d'immersion
dans
le
dispositif,
distance
marquée
101
L'immersion
dans
les
musées
de
science.
. .
culture
&
musées
n
°
5
par
une
recherche
de
clefs
de
lecture
et
des
pièges
de
l'exposition.
La
banalisation
:
Les
attentes
de
ces
visiteurs
sont
au
préalable
très
fortes,
ainsi
canalisent-elles
la
rencontre
avec
le
dispositif.
Ils
ont
compris
les
intentions
muséologiques
mais
cherchent avant
tout
la
réponse
à
leur
question.
Ces
visiteurs
restent
volontairement
distants
du
dispositif,
irrités
par
le
parti
pris
muséogra-
phique
:
ils
estiment
que
la
mise
en
espace
est
disproportionnée
par
rapport
au
contenu
exposé,
que
la
forme est
surévaluée
par
rapport
au
fond.
Ils
dénoncent
un
aspect
«
tape-à-1'œil
»
et
un
message
largement
trop
vulgarisé.
Le
rejet
:
Les
personnes
qui
constituent
ce
dernier
groupe
sont
les
visiteurs
qui,
aux
sens
propre
et
figuré,
n'entrent
pas
dans
le
dispositif
faute
d'en
saisir l'intention
et
le
fonctionnement.
Cette
distance
repose
non
seulement,
comme
pour
le
groupe
précédent,
sur
un
décalage
entre
les
attentes
du
visiteur
et
la
proposition
de
l'exposition,
mais
surtout
sur
le
fait
que
ces
visiteurs
ne
parviennent
pas à
saisir
le
sens
de
la
mise
en
espace.
Ils
restent
étrangers
au
propos
et
au
dispositif.
Ils
ressentent
pour
certains
d'entre
eux
une
barrière
physiologique
qui
les
empêche
de
rentrer
dans
le
dispositif
(ils
sont
par
exemple
très
sensibles
à
l'environnement
sonore,
ou
encore
aux
images
qui
défilent
trop
vite).
Ils
se
retrouvent
déstabilisés
par
l'offre
qui
leur
est
proposée.
L'expérience
de
visite
:
le
jeu
avec
les
codes
Longtemps
appréhendée
comme
une
activité
acculturante,
la
visite
d'une
exposition
au
sujet scientifique
et
technique
prend,
comme
la
description
des
configurations
le
suggère,
parfois
les
apparences
d'une expérience
basée
sur
le
jeu.
Nous
allons
en
souligner
ici
quelques
traits.
Le
sentiment
d'immersion,
comme
l'illustre
la
configuration
de
la
résonance,
produit
chez
le
visiteur
un
effet
de
ravissement,
de
capture.
Il
se
manifeste
notamment
par
une
impression
de
suspension
du
temps
comme
l'exprime
cette
visiteuse16
:
«
Je
ne
peux
pas
vous
dire
combien
de
temps
je
suis
restée,
j'ai
le
sentiment
d'avoir
fait
un
long
voyage.
»
Le
jeu
est
connu
pour
produire
ce
même
effet,
cette activité étant
«
capable
d'absorber
profondément
celui
qui
s'y
livre
»
(Picard,
2002
:
l6l).
Un
autre
point
de
ressemblance
entre
ces
deux
activités
est
dans
la
suspension
de
crédulité
que
suggère
ce
genre
d'exposition.
En
effet,
la
sollicitation
active
du
visiteur
comme
son
implication
physique
ou
le
système
d'identification
mettent
en
avant
son
adhésion à
«
jouer
le
jeu
»,
et
à
accepter
les
règles.
La
motivation
à
«
faire
comme
si
»
témoigne
de
la
recherche
d'une
activité
qui
s'apparente
au jeu
dans
le
sens
elle
est
«
libre,
incertaine,
hors
de
la
vie
courante,
dans
un
temps
et
un
espace
expressément
circonscrits
»
(Picard,
2002).
102
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
Lorsque
les
visiteurs
se
sont
laissé
«
prendre
»,
leurs
propos
convergent
:
ils
donnent l'impression
d'avoir
été,
au
cours
de
leur
visite,
«
dans
un
temps
et
un
lieu
particuliers
».
La
visite
prend
pour
certains
les
allures
d'un voyage
dans
le
temps.
Les
grandes
expositions-spectacles
entrent
dans
la
logique
des
parcs
à
thème
ou
des
parcs
historiques
l'objectif est
de
«
jouer
»
avec
le
temps
et
les
lieux.
Selon
Colin
Serenson,
cette
expérience
de
visite
s'apparenterait
à
un
processus
d'une
«
thérapie
de
la
réminiscence
»
(Sorensen,
1989).
Cet
effet
d'absorption
dans
un
autre
espace-temps
permettrait
d'oublier
quelques
instants
le
monde
quotidien,
il
répondrait
au
mythe
de
l'ubiquité,
au
désir
de
l'im-
médiateté
et
de
la proximité
(Virilio,
2001).
Ce
jeu avec
le
temps
et
l'espace
est
d'autant
plus
apprécié
qu'il
repose
sur
un
mythe,
une
histoire
lointaine
et
dans
laquelle
tous
les
ingrédients
prennent
un
aspect
surréaliste.
Ainsi
une
exposition
comme
Trésors
du
Titanic
semble
d'autant plus
captiver
les
visiteurs
qu'elle
repose
sur
une
histoire
connue
de
tous.
Selon
le
même
principe
qu'à
Disney,
«
c'est
le
spectacle
lui-même
qui
est
mis
en
spectacle
:
le
décor
reproduit
ce
qui
était
déjà
décor
et
fiction
»
(Auge,
1992).
Au-delà
des
formidables
machines
à
remonter
le
temps
que
sont
ces
expositions
spectaculaires,
cette
dernière
exposition
met
l'accent
sur
la
puissance
des
effets
de
la narration
et
de
la
fiction.
Ainsi
l'analyse
de
la
réception
des expositions
d'immersion
met
en
exergue
le
balancement
permanent
entre
le
dispositif
de
l'exposition
et
le
monde
intérieur
du
sujet.
Les
expositions
d'immersion
jouent
sur
un
système
d'ambivalence
:
entre
la
réalité
et
le
faux,
entre
l'authentique
et
la
copie,
la
raison
et
l'émotion,
les
sens
et
le
sens. La
configuration
de
la
résonance
comme
nous
l'indiquions
plus
haut
se
caractérise par
une
forte
activité
onirique
régulièrement
relancée
par
l'exposition
qui
invite
au
rêve.
Ces
va-
et-vient
repérés
par
une approche
des
modes
de
visite
selon
la
tension
distanciation/immersion
rappellent
l'aire transitionnelle
décrite
par
Winnicott,
qu'il
résume
selon
la
dichotomie
Fort/Da
et
qui
matérialise
l'intermédiaire
entre
le
bébé
et
sa
mère.
Le
jeu
active
le
subjectif
et
ce
qui
est
objectivement
perçu,
ainsi
permet-
il
à
l'enfant
de
distinguer
le
moi
et
le
non-moi
(Winnicott,
1971).
Le
visiteur
se
retrouve
entre
fantasme
et
réel.
Comme
la
lecture,
le
déchiffrage
d'une
œuvre
d'art,
la
visite
dans
une
exposition
au
sujet
scientifique
et
technique
peut
relever
d'une
activité
ludique
(Picard,
2002).
CONCLUSION
L
évolution
des
formes
d'exposition
à
caractère
scientifique
ou
technique
avec
l'apparition
de
la
muséographie
d'immersion
témoigne
d'une
recherche
de
nouvelles
formes
de
partage
de
la
culture
scientifique
et
technique.
Le
média
exposition
103
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
n
°
5
est
devenu
un
lieu
de
rencontre
émotionnelle,
d'activité
ludique,
de
sensibilisation
à
un
sujet.
Sans
remettre
en
question
leur
mission,
leurs
enjeux
d'acculturation
sont
renvoyés
aux
espaces
comme
la
médiathèque,
les
lieux
dédiés
aux
conférences,
les
sites
internet,
etc.
Ce
changement
se
manifeste
par un renouvellement
de
la
muséographie.
Ces
dispositifs
d'immersion
interrogent
les
musées
des
sciences
sur
la
pertinence
de
choisir
ces
techniques
de
séduction
comme
moyen
d'accomplir
la
mission
qui
leur
a
été
confiée
d'une
part
et
comme
réponse
à
la
concurrence
d'autre
part.
Une
des
conséquences
est
que
la rencontre
avec
la
vulgarisation
des
sciences
du
public
qui
y
vient
occasionnellement
est
réduite
à
une
expérience
de
sensibilisation
et
de
spectacularisation
de
la
science.
De
plus,
il
est
légitime
de
se
demander
si
une
présentation
de
type
immersion
est
en
mesure
d'expliciter
les
recherches
scientifiques.
La
matérialisation
d'un
savoir
repose
comme
nous
l'avons
vu
sur
une
vision,
elle
rend
compte
des
connaissances
selon une approche.
Or
la
complexité
liée
à
la
construction du
savoir
scientifique,
faite
de
controverses
et
d'erreurs
d'une
part,
constituée
de
plusieurs
courants d'autre
part,
paraît
difficilement
traduisible
par
une
représentation
qui
fige
les
connaissances
en
un
seul
modèle.
La
rencontre
dans
un
même
lieu
de
deux
visions
sur
les
objectifs
d'une
exposition
aux
sujets
scientifiques
et
techniques,
la
première,
celle
de
la
maîtrise
d'ceuvre
qui
privilégie
en
général
l'aspect
créatif
intrinsèque
à
une
réalisation
expographique,
puis
la
seconde
avant
tout
axée
sur la
découverte
du
propos
scientifique
sur
le
sujet17,
apparaît
riche
mais
périlleuse.
La
fusion
espérée
entre
la
recherche
scientifique
et
la
recherche
artistique
rappelle
étrangement
l'utopie
de
l'œuvre
totale.
Par
ailleurs,
l'analyse
du
mode
de
médiation
de
type
immersion
interroge
sur
les
effets
produits
chez
les
visiteurs.
Le
recours
systématique
à
une
spectacularisation
des
sciences
et
des
techniques peut
laisser
croire
que
leur
développement
peut
être
digéré
au
moyen
d'une
émotion
programmée,
et
occulte
ainsi
tous
les
enjeux
qu'il
comporte.
Une
présentation
de
type
immersif,
basée
sur
l'investissement
émotionnel,
ne
risque-t-elle
pas
de
réaffirmer
de
fausses croyances
et
de
banaliser
un
aspect
fétichiste
de
la
recherche
scientifique
?
On
peut
aussi
s'interroger
sur la
spécificité
de
cette
offre
dans
le
champ
culturel
si
elle
vient
à
offrir
aux
visiteurs
ce
que
l'on
peut
trouver
dans
d'autres établissements,
et
l'intérêt
à
venir
dans
un
musée
si
ses
propositions
rejoignent
celles
que
l'on
trouve
dans
n'importe
quel
lieu
de
divertissement.
F.
B.
éns-lsh,
Lyon
104
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
n
°
5
NOTES
1.
Les
premiers
dispositifs
d'immersion
provenant
des
recherches
en
art
numérique
proposaient
également
la
découverte
d'univers,
d'où
l'importance
de
la
carte
dans
les
premières
réalisations
immer-
sives
(Leclercq,
2003).
2.
Parfois
ces
territoires
peuvent
également
être
directement
transférés
sur
les lieux
de
visite
comme
par
exemple
un sous-marin
(l'Argonaute
à
la
Cité
des
sciences), ou
encore
des
prototypes
d'engin
d'exploration
(la
fusée
Ariane
5
à
la
Cité
de
l'espace
ou
le
Concorde
au musée
de
l'Air).
3.
Les
expositions
Mémoires
d'Egypte
(1990,
Bibliothèque
nationale),
Les
Rayons
de
la
vie
(1998,
Muséum
d'histoire
naturelle),
Les
Savants
et
la
Révolution
(1989-1990,
csi)
appartiennent
à
cette
catégorie
d'expositions-spectacles.
4.
Cette
exposition
est
une
production
Clear
Channel
Entertainment.
Elle
a
été
accueillie
par
la
Cité
des
sciences
et
de
l'industrie,
au
cours
de
l'année
2003,
dans
l'objectif
de
créer
un
événement
selon
une
logique
de
blockbuster.
5.
Même
le
magasin
qui
prenait
place
à
la
sortie
de
l'exposition
a
fait
également
l'objet
d'un
traitement
scénographique
global
:
mobiliers
dans
la
lignée
de
ceux
exposés
dans
les
reconstitutions,
agrémentés
de
citations
provenant
soit
de
témoignages
de
rescapés
soit
de
propos
imaginés
des
passagers
au
moment
du
naufrage.
Ce
lieu
qui
met
en
scène
les
produits
dérivés
participe
à
l'offre
Titanic
proposée
aux
visiteurs.
6.
L'Homme
transformé
(2002),
Le
Cerveau
intime
(2003),
Poussières
d'étoiles
(2003),
Climax
(2004).
Concernant
les
autres
musées
des
sciences
ou des
techniques,
même
s'ils
n'ont
pas
encore
exploré
cette
voie
de manière
aussi
radicale,
la
recherche
d'effets
scéno-
graphiques
dans
les
expositions
temporaires
illustre
également
cette
tentative
d'exprimer
de
manière
sensible
un
discours.
(Exemples
:
voltca),
de
l'étincelle
à
la
pile
au
musée
des
Arts
et
Métiers,
2001,
^4
table
!
au
Palais
de
la
découverte,
2003,
etc.)
7.
Il
existe
de
nombreux
systèmes
sophistiqués
de
réalités
virtuelles
basés
sur
le
principe
de
l'immersion
que
nous
ne
traitons
pas
dans
cet
article,
notre
propos
étant
axé
sur
l'analyse
des
expositions
et
moins
de
dispositifs
autonomes.
8.
Comme
ce
fut
le
cas
dans
l'exposition
Les
Savants
et
la
Révolution
présentée
en
1989
à
la
csi.
9.
On
a
pu
noter
ce
genre
d'intentions
pour
des
expositions
qui
traitaient
de
sujets
liés
à
l'environnement,
comme
le
Biodôme
à
Montréal
ou
encore
l'exposition
Climax.
Les
concepteurs
espèrent
que
la
visite
dans
ces
lieux
produise
un
choc,
ce
qui
provoquerait
chez
le
visiteur
l'envie
d'un
engagement
citoyen.
10.
À
un
premier
niveau
le
scénario
de
cette
exposition
s'appuie
sur
une
logique
efficace
qui
reprend
la
chronologie
historique de
la
tragédie,
de
la
construction
du
navire
jusqu'au
naufrage.
À
un
second
niveau,
la
dramatisation
du
propos
est
fortement
calquée
sur
le
scénario
du
film
Titanic
réalisé
par
James
Cameron en
1997.
Ce
film
a
connu
un
vif
succès
lors
de
sa
sortie
dans
les
salles.
On
peut
d'ailleurs
supposer
que
cette
source
d'inspiration
a
donné
lieu
à
une
«
gestion
»
de
la
charge
affective
du
visiteur
au
cours
de
son
parcours
:
d'après
le
synopsis
de
l'exposition,
l'émotion
est
censée
être
la
plus
forte
au
moment
de
la
découverte
du
grand
escalier,
salle
qui,
par
le
luxe
du
dispositif
et
la
présentation
d'un
pendentif
-
objet
central
dans
la
proposition
cinématographique
-,
peut
être
directement
associée
à
l'héroïne
du
film.
La
territorialisa-
tion
du
monde
de
référence
est
105
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
5
ainsi
construite
selon une
fiction
narrative
qui
repose
sur
un
mythe
qui,
récemment,
a
été
revisité
et
ainsi
«
revivifié
».
L'exposition
fonctionne
selon
l'unité
de
temps
et
de lieu de
la
proposition
filmique,
à
tel
point
que,
sous
certains
aspects,
elle
peut
être
perçue comme
un
produit
dérivé
du
film.
11.
On
a
pu
observer
les mêmes
premières
réactions
pour les
expositions
Le
Cerveau
intime,
Climax
et
l'opéra
cosmique
Poussières
d'étoiles.
Suite
à
des
réclamations
de
la
part
de
quelques
visiteurs,
des
formes
de
médiation
intermédiaires
ont
été
mises
en
place
pour
expliciter
les
intentions
scénographi-
ques.
Ces
dernières
informent
non
pas
sur
le
contenu
sous-jacent
à
une
exposition
scientifique
ou
technique,
mais
sur
les
effets
formels
recherchés
par
l'équipe
de
conception.
12.
En
plus
du
style
muséographi-
que,
plusieurs
paramètres
conditionnent
ces
configurations
de
visite,
comme
la
nature
du
visiteur
(catégorie
socioprofessionnelle,
âge...),
son
capital
de
familiarité
avec
les
musées,
sa
connaissance
du
sujet
exposé,
ses
attentes
préalables
vis-à-vis
de
l'exposition,
etc.
Nous
ne
présentons
ici
qu'un
aperçu
de
ces
configurations.
Voir
Belaën,
2002.
Ce
travail
de
modélisation de
l'expérience
de
visite
doit
être
appliqué
à
d'autres
études
d'exposition
pour
être
ainsi
enrichi.
À
ce
stade
il
offre
l'avantage
de
décrire
certains
mécanismes
inhérents
à
la
découverte
d'une
exposition,
mécanismes
parfois
cachés
dans
l'analyse
d'exposition
dont
la
muséographie
est
plus
neutre.
13.
La
recherche
de
ces
modes
de
réception
répond
également
à
un
niveau
plus
large
d'études
en
muséologie,
à
savoir
l'analyse
de
l'expérience
de
visite.
Comme
nous
l'indiquions
plus
haut,
le
principe
des
expositions
d'immersion
est
de
proposer
des expériences
fortes,
globales.
Ainsi
leur
étude
du
point
de
vue
des
visiteurs
offre
l'intérêt
d'aborder l'expérience
de
visite
comme
un
phénomène
global
qui,
selon
la
théorie
de
la
Gestalt,
agit
sur
le
visiteur.
L'analyse
de
l'expérience
d'immersion,
à
cause
d'un
parti
pris
fort
qui
privilégie
le
langage
formel,
permet
de
mettre
l'accent
sur
des
dimensions
expé-
rientielles,
actives
au
cours
de
toute
visite
mais
qui
sont
particulièrement
mobilisées
lors
de
la
découverte
de
ces
formes
expo-
graphiques.
L'intérêt
est
de
voir,
à
partir
entre
autres
des
expositions
analysées
dans
cet
article,
comment
ces
dimensions
se
combinent
entre
elles,
comment
elles
opèrent
ensemble.
14.
Les
expositions
en
question
sont
:
L'Homme
transformé,
exposition
d'immersion
présentée
à
la
Cité
des
sciences
en
2002-2003,
Mutations,
exposition
présentée
en
2000-2001
au
capc
de
Bordeaux,
et
Le
papier,
c'est
la
vie
présentée
en
1999
au
Palais
de
la
découverte.
15.
Précisons
néanmoins
que
l'apparition
de
cette
configuration
repose,
au-delà
de
sa
mise
en
exposition,
sur
la
nature
et
la
gravité
du
sujet
exposé.
16.
Visiteuse de
l'exposition
Mutations
présentée
au
capc
de
Bordeaux
en
2001.
17.
L'analyse
des
négociations
entre
les
différents
acteurs
qui
participent
à
l'ouverture
de
l'exposition
est
à
ce
titre
intéressante.
106
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
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dans
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L'exemple de
107
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
5
la
Cité
des
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et
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l'industrie
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les
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dess
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Conception
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108
L'immersion
dans
les
musées
de
science,
culture
&
musées
5
RÉSUMÉS
JL^es
musées
des
sciences
tentent
de
renouveler
leur
offre
muséologique
en
proposant
des
expositions
spectaculaires
basées
sur
le
principe
d'émotions
fortes
et
d'expériences
mémorables.
Ainsi
ont-ils
de
plus
en
plus
recours
aux
techniques
d'immersion
parce
qu'elles
activent
fortement
le
potentiel
émotionnel
du
visiteur.
Le
fonctionnement
d'une
médiation
de
type
immersif
est
de
«
faire
éprouver
directement
le
propos
».
Mais
les
raisons
d'un
déclenchement
d'un
sentiment
d'immersion
apparaissent
multiples
et
difficiles
à
cerner.
Quelques
exemples
de
procédés
expographiques
illustrent
ici
la
variété
des
techniques
qui
produisent
une
dimension
immersive.
C'est
par
l'étude
des
modes
de
réception
que
l'auteur
cherche
ici
à
formaliser
ce
nouveau
mode
de
médiation.
La
description
de
configurations
de
visite
obtenues
à
partir
d'entretiens
approfondis
rend
compte
d'une
tension
entre
un
effet
d'immersion
et
un
effet
de
distanciation.
L'analyse
de
l'extension
de
cette
muséographie
dans
les
musées
des
sciences
témoigne d'un
changement
de
paradigme
:
d'une
«
mise
en
culture
»
de
la
science
au
loisir
scientifique.
L
.
n
an
attempt
to
revitalise
the
muséum
expérience,
science
muséums
are
presenting
spectacular
style
exhibitions
based
on
a
principle
of
generating
strong
émotions
and
mémorable
events.
To
this
end,
muséums
are
increasingly
em-
ploying
techniques
of
immersion
in
order
to
stimulate
an
emotio-
nal
response
in
the
visitor.
Thèse
immersive
techniques
operate
by
creating
a
direct
or
interactive
expérience
ofthe
subject
matter.
The
triggers
ofthis
immersive
sensation
however,
appear
to
be
multiple
and
difficult
to
define.
By
studying
the
modes of
réception
the
author
seeks
to
théorise
this
new
mode
of
médiation.
Some
examples
of
exhibition
procédure are
examined
to
illustrate
the
varieties
of techniques
that
may
produce
an
immersive
engagement.
Exten-
sive
interviews
provide
descriptions
ofthe
various
exhibition
configurations
and
reveal
a
tension between
the
effects
of
immersion
and
distancing.
An analysis
ofthe
expansion
ofthis
practice
in
science
muséums
reveals
a
change
ofparadigm:
from
a
signifîcant
cultural
develop-
ment
of
science
to
a
scientific
entertainment.
M
.useos
de
ciencias
intentan
cambiar
su
oferta
museolôgica
proponiendo
exposiciones
espectaculares,
que
favorecen
emociones
fuertes
y
experiencias
mémorables.
Asï
se
utilizan
cada
vez
mas tecnologîas
de
inmersiôn
para
hacer
que
los
visitantes
«
vivan
directamente
»
lo
que
es
tratado
por
la
109
L'immersion
dans
les
musées
de
science...
culture
&
musées
5
exposiciôn.
Pero
lo
que
puede
suscitar
concretamente
el
senti-
miento
de
la
inmersiôn,
y
las
razones
por
las
cuales
los
visitantes
se
pueden
sentir
sumergidos
en
una
experiencia
fuerte,
quedan
dificiles
de
analizar.
Algunos
ejemplos
de
museografîas
pueden
illustrar
la
diversidad
de
la
técnicas utilizadas
para
favorecer
la
inmersiôn.
Sin
embargo,
son
investigaciones
acerca
de
la
recepciôn
que
nos
permitieron
modelizar
esta
nueva
forma
de
mediaciôn.
Nuestra
metodologïa
basada
en
entrevistas
profundizadas,
permi-
tiô
proponer
configuraciones
de
visita,
que
muestran
una
tension
entre
un
efecto
de
inmersiôn
y
un
efecto
de
distanciamiento.
Un
anâlisis
de
la
extension
de
este
tipo
de
museografïa
en
museos
de
ciencias
muestra
un
cambio
de
paradigma
:
pasamos
de
la
«
cultura
cientïfîca
»
al
«
entretenimiento
cientîfico
».
110
L'immersion
dans
les
musées
de
science.
. .
culture
&
musées
5
... This kind of reaction-supposedly not reacting at all on purpose-which I would like to call persistence against the popular, seems to be an even stronger form of resistance than openly writing against something. Looking for research on multi-sensorial immersive exhibitions, I only found material on the immersive, interactive, and technological elements in science or art museums (Belaën 2005;Carú et al. 2020), on experience-oriented museum exhibitions (Eickelmann 2016), and on immersive (non-reproductional) art installations. Admittedly, as a relatively new phenomenon arising only in the last two to three years, it is not surprising that these installations have not made it into academic research yet and have been covered only journalistically. ...
Article
Full-text available
This article analyzes the phenomenon of multi-sensorial, digital, and immersive art exhibitions of popular artists, which has been widely neglected in academic research, from a historical perspective. Reflecting the significance of lived experience in art consumption, this 21st-century phenomenon can be confronted productively with early-20th-century art reproductions. The article focuses on the characteristics of both popular phenomena and on their advertisement, as well as on the discourse around them, documenting reactions from resistance to persistence and accommodation. The analysis shows noticeable similarities between the two types of popularization of high art, positioning the new immersive exhibitions in a traditional line of technical innovative art popularization. Whereas photomechanical art reproduction had an immense influence on the popular art canon, being also dependent on ‘photogenic’ conditions of artworks and thus focusing predominantly on painting, the contemporary canon is predisposed by the immersible characteristics of artists’ oeuvres.
... La théorie de l'immersion, en l'occurrence, se propose d'appréhender ce moment de communion qui peut désigner l'aboutissement du processus de réception par exemple dans un contexte de comportement de consommation culturelle ou, plus spécifiquement, d'expérience vécue avec un objet culturel. La littérature traitant de l'expérience de consommation dans le champ culturel (théâtre, opéra, concert de musique classique ou de musiques actuelles …) regroupe un certain nombre de travaux ayant approché les particularités de cet état affectif, d'absorption et d'appropriation de l'objet de l'expérience, dans lequel se trouve le public et qui se traduit par un état d'immersion spécifique (Belaën, 2003(Belaën, , 2005Ermi et Mäyrä, 2007 ;Jennett et al., 2008). L'approche expérientielle d'analyse du comportement de consommation culturelle (Bourgeon-Renault, 2014) permet de répondre à plusieurs questions : -Comment favoriser l'appropriation et la co-production artistique en transformant le public en un spect-acteur ? ...
Presentation
Our work concentrates on the significations of the wine tasting organized in the Romanian orthodox monasteries in Northern Moldavia, as a new tourism practice. Our research is developed in the frame of the Communication and Information Sciences, with a sociological and historical perspective; thus the wine tasting open to public is envisaged as a form of cultural mediation, as a place of visibility of cultural practices, considering that ‘participating in a culture includes the participants in the « stories » of that culture, a general understanding of the significations background’ (Richardson, 1990, Silverman, 2004). What are the coordinates of this new practice in the Romanian monasteries context and what is the manner it finds its place in the religious life logic of Romanian orthodox monasteries.? How is the discourse of wine tasting built in connection with the status of object and their symbolic and sensitive dimension? How is the meeting with the public designed? What are the communication and discursive strategies in this case? Our hypothesis is that the wine tasting, as a ritual of savoir-vivre, represents a form of symbolic mediation of the Romanian orthodox monastic culture and civilization. In terms of methodology, our terrain is constituted (at this time) by the monasteries in Northern Moldavia, more exactly we found this practice in two monasteries: the monastery of Cetățuia and the Bucium monastery, situated in Iași county (North-East part of Romania). Both monasteries belong to the Orthodox rite and have a long attested tradition of wine culture and production and they both organize wine tastings for the public. In order to build our corpus, we have considered two methods: participative observation and semi-directional interviews, as a qualitative method of communication analysis, in an interpretative purpose. Approaching the wine tasting as a story (récit) that puts in connection the places with the reference world (Davallon, 1999, Gellereau, 2011) takes us to the hypothesis that we are facing a meeting of new emerging or re-discovered values in the Romanian society : conviviality, pleasure of the sensation (Boutaud, 2005). and the values of the monastery religious universe (wine and its religious aspects, etc.), while the time and space of this ritual are the prefiguration of a poly-sensorial experience, the public being involved in an experience that can be considered as “immersive” (Bellaen, 2005). Keywords: monastery, orthodox, wine theme, wine representations, mediation, wine tasting
Article
L’offre muséale subit actuellement de profondes transformations. Au-delà des structures traditionnelles, qui n’hésitent plus à recourir à des muséographies innovantes et à glisser dans la sphère des loisirs, semble se développer un nouveau secteur, à mi-chemin entre musées et parcs d’attraction. L’objectif de cet article est d’analyser un exemple de cette offre hybride de type muséo-parc, la Cité des Arts et des Sciences de Valencia (Espagne), s’inscrivant dans une logique ludo-éducative, afin d’en comprendre les éléments structurants. Après avoir présenté les fondements conceptuels sous-tendant la redéfinition expérientielle des musées, nous exposerons notre étude de cas, en définissant d’abord la méthodologie utilisée puis en présentant l’ensemble des dimensions structurant cette offre d’expérience, avant d’énoncer les implications managériales de cette réflexion.
Article
Les concepteurs et managers de parcs à thème cherchent avant tout à favoriser l’immersion du visiteur au cœur d’une expérience extraordinaire. Pourtant, l’accès à ce type d’expérience n’est pas systématique et l’immersion du visiteur ne semble pas permanente. L’objectif de cet article est d’approfondir la compréhension de l’expérience vécue dans ces parcs. L’analyse de 41 journaux de bord de visiteurs de parcs à thème permet de mettre à jour des états d’immersion mais également d’autres états ressentis (submersion, émersion, rejet). Sur le plan managérial, cette démarche offre des clés de compréhension aux managers de ces parcs et plus globalement de sites touristiques proposant des offres d’expériences extraordinaires.
Article
Full-text available
Today we tend to emphasise the technological dimension of immersive devices, insisting on the notions of interactivity, virtual reality or augmented perception— all of which promise to intensify museum experience or the film experience. But it must be recognised that the principle of immersion is older than the more or less recent definitions of immersive devices or museography. Certain primordial forms of scenarisation, of staging and of dramatisation were able to play an immersive role very early on, foreshadowing the installation of the subject of perception in an attitude of adhesion, which can go as far as subjugation. Scripting, staging, psychic projection: if an archaeology of immersion is required, it must include an account of the role of cinema in the formation of the immersive condition. Our hypothesis is that an archaeology of immersion must pass through cinema: not only through its device, but primarily through its fictions, narratives, and figurations. In this perspective, we propose to examine the historical contribution of cinema to the formation of the immersive condition, through an analysis of Chris Marker’s La Jetée (1962). If this unique film has often been studied, its capacity to stage different fundamental aspects of an immersive experience, involving at the same time the interplay of memory, aesthetic relation, and the psyche, has not been considered yet.
Thesis
Cette thèse de doctorat étudie les fonctions de l’éclairage muséographique pour les musées d’art, dans les disciplines de recherche de la muséologie et des sciences de l’information et de la communication. Elle part du constat que la littérature scientifique considère l’éclairage principalement pour ses fonctions techniques de conservation préventive et de visibilité. Pourtant, depuis plus d’un siècle, d’autres domaines comme l’architecture, le théâtre et le cinéma ont montré l’influence de la lumière dans l’espace, la perception et l’expérience. Cette recherche se penche alors sur la pratique, le concept, la réception et l’application de l’éclairage muséographique pour les collections, à partir d’un corpus de musée en Europe. En s’appuyant sur une approche compréhensive de la conception et de l’expérience, l’auteure s’attache particulièrement à trois fonctions de l’éclairage muséographique : la fonction ostensive (monstration de l’espace et de l’œuvre), la fonction cognitive (influence dans la construction de sens et le raisonnement) et la fonction esthétique (stimulation d’états sensibles et contemplatifs). Pour ce faire, elle adopte une posture historique et contemporaine, en analysant les résultats de plusieurs études de cas, d’entretiens auprès de concepteurs lumière et de responsables de musées, d’enquêtes sur la cognition incarnée des visiteurs, ainsi que d’observations participantes. Ces résultats mettent en évidence les apports de l’éclairage muséographique dans l’affirmation du musée et de son identité, dans l’agencement du parcours de visite, dans la création d’une ambiance, dans la réception des œuvres d’art, et en conséquence dans la construction de sens du visiteur. L’auteure soulève ainsi la possibilité d’un champ théorique sur l’éclairage muséal, qui porterait sur les enjeux de son développement, de son processus de création, de sa réception et de ses effets sur l’expérience de visite et l’apprentissage. Plus particulièrement, elle propose une discussion sur deux nouveaux concepts : le « design lumière » et la « médiation sensorielle lumineuse ». --- This Ph. D dissertation studies museum lighting functions for art museums, in the disciplines of museology, and information and communication sciences. It starts from the observation that the scientific literature considers lighting mainly for its technical functions of preventive conservation and visibility. However, for more than a century, other fields such as architecture, theater and cinema have shown the influence of light in space, perception and experience. Thus, this research examines the practice, concept, reception and application of museum lighting for collections, by relying on a corpus of European museums. Based on comprehensive approach to design and experience, the author focuses on three functions of museum lighting: ostensive function (showing the space and the works of art), cognitive function (influence in the construction of meaning and reasoning) and aesthetic function (stimulation of sensitive and contemplative states). For this purpose, she adopts a historical and contemporary posture, analyzing the results of several case studies, interviews with lighting designers and museum managers, surveys on the embodied cognition of visitors, as well as participant observations. These results highlight the contributions of museum lighting in the affirmation of the museum and its identity, in the arrangement of the tour, in the creation of an atmosphere, in the reception of works of art, and consequently in the construction of meaning. Thus, the author raises the possibility of a theoretical field on museum lighting, which would study the issues of museum lighting development, the creative process, reception, and the effects on the visiting experience and learning. More specifically, it proposes a discussion of two new concepts: “light design” and “light sensory mediation.”
Article
Le présent article s’intéresse au musée du bonbon Haribo, installé à Uzès depuis 1996. Celui-ci semble entièrement conçu pour faire du visiteur un consommateur, et ainsi s’adresser davantage au touriste gourmand qu’à l’amateur éclairé du patrimoine industriel. Fort de ses 272 000 visites annuelles, il semble aménagé pour donner envie au visiteur de goûter aux bonbons phares de la marque et par là même refournir son stock de bonbons préférés à la boutique. Cette stratégie incite les publics à revenir en jouant sur l’image de marque si familière de l’entreprise, répétée à outrance, sur une muséographie divertissante, festive et participative qui met en scène le bonbon dans tous ses états. L’enjeu du parcours serait de « faire saliver » le visiteur, pour que la boutique devienne l’aboutissement logique de sa visite, et ainsi, parvenir à le séduire. Cette logique de séduction à l’œuvre permet de comprendre le succès du musée.