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GLOTTOPOL
Revue de sociolinguistique en ligne
n° 15 – juillet 2010
Oralité et écrit en traduction
SOMMAIRE
Yves Gambier & Olli Philippe Lautenbacher : Avant-propos
Yves Gambier & Olli Philippe Lautenbacher : Oralité et écrit en traduction
Marta Biagini : Les sous-titres en interaction : le cas des marqueurs discursifs dans des
dialogues filmiques sous-titrés
Jean-Guy Mboudjeke : La pidginisation de l’anglais comme solution de traduction dans le
sous-titrage de Quartier Mozart de J.-P. Bekolo
Franck Barbin : Le concept de traducteur-conteur
Odile Schneider-Mizony : Traduire ou simuler l’oralité ?
Myriam Suchet : The voice et ses traductions : entendre des voix ou lire un ethos ?
Lorella Sini, Silvia Bruti & Elena Carpi : Représenter et traduire l’oralité – l’exemple de
Entre les murs (F. Bégaudeau)
Karen Bruneaud-Wheal : (M)oralité et traduction : les voix de Huck
Cindy Lefebvre-Scodeller : La traduction des marques d’oralité dans deux romans d’Irvine
Welsh : Trainspotting (1993) et Porno (2002)
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ORALITE ET ECRIT EN TRADUCTION
Yves Gambier & Olli Philippe Lautenbacher
Université de Turku & Université d’Helsinki, Finlande
Mise en perspective
La dichotomie supposée entre l’oral et l’écrit a fait l’objet de divers travaux en
sociolinguistique, en pragmatique, en analyse de discours – que ce soit sur les variations
diatopiques, diastratiques et diachroniques et les registres de langue, sur la langue des jeunes,
sur les productions orales, sur le changement linguistique, sur les rapports entre langage et
travail dans divers contextes (en milieu hospitalier, par exemple), sur la communication
médiée par ordinateur (avec les analyses de chats, courriels, SMS et blogs), sur les
interactions homme-machine (avec le recours ou non à la reconnaissance et à la synthèse de la
parole). Sans oublier les réflexions en didactique – que ce soit pour l’enseignement de la
langue natale ou pour le français-langue seconde/étrangère, avec par exemple des études sur
les rapports entre phonétique et orthographe, sur la prise de notes en classe, sur les
commentaires à haute voix d’un texte, sur la rédaction collaborative, etc.
La plupart des situations sociales – de l’entreprise fonctionnant aujourd’hui par écrans
interposés à la classe – sont des situations mixtes où l’oral s’articule à des conduites de lecture
et/ou d’écriture, où oral et écrit s’articulent aussi à d’autres actions s’appuyant sur des modes
sémiotiques différents, et où l’écrit peut être oralisé, cité, paraphrasé. Ni l’écrit ni l’oral ne
sont des pratiques homogènes et l’oral ne se réduit pas au langage familier, voire argotique.
Notre projet a cherché à faire se rencontrer linguistes (au sens large) et traductologues. Il
existe en effet bien des cas où les frontières présumées entre l’oral et l’écrit se brouillent dans
la pratique quotidienne des traducteurs et des interprètes – ainsi quand on fait de la traduction
à vue, quand on interprète auprès des tribunaux (du document judiciaire à l’interrogatoire),
quand on traduit des pièces de théâtre, des bandes dessinées, des chansons rap, des romans où
dialogues et discours rapportés se combinent avec la trame narrative, quand on traduit la
littérature dite pour enfants, les littératures à tradition orale, les littératures désignées comme
postcoloniales où se croisent langues et dialectes, quand on localise des jeux vidéo et sous-
titre des films, des programmes de télévision (sous-titrage interlinguistique, en direct,
intralinguistique), etc.
La traduction et l’interprétation mettent donc à mal l’opposition binaire souvent perçue
comme dichotomique entre oral et écrit, puisqu’elles ont à traiter non seulement des textes
écrits (directement encodés par le scripteur), des discours oraux mais aussi (et surtout ?) des
productions oralisées (discours énoncés à partir de notes, par exemple) et des productions
écrites hybrides (mêlant des réalisations différentes de la même langue).
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Notre objectif a été d’apporter aux réflexions linguistiques/discursives sur ces réalisations
différentes (réflexions par exemple du groupe GARS ; de Tannen ; Halliday ; Barbéris), aux
réflexions cognitives et anthropologiques sur les impacts de l’oral et de l’écrit sur nos
capacités cognitives, nos modes de penser et l’économie de nos discours (réflexions par
exemple de Vygotski, Goody, Ong) une perspective nouvelle lorsque les rapports complexes
(de continuum) entre oral et écrit se font dans le cadre du contact des langues et des cultures, à
un moment où les technologies de l’information et de la communication (TIC), le réseautage
et les émotions (cf. Plantin et al., 2000) transforment toujours plus nos interactions.
Parmi les thématiques de départ, nous avions proposé les questions suivantes :
− Comment se jouent les rapports écrit-oral dans les traductions et interprétations, en
reconnaissant que ces codes et leurs rapports ne sont pas considérés et valorisés de façon
identique partout et que la distance entre écrit et oral varie selon les langues ? Ainsi le
grec et le finnois ne connaissent pas le même écart que par exemple le français et
l’anglais.
− Quelles représentations des langues et de leurs variations favorise-t-on dans la traduction
au cinéma, dans les BD, au théâtre, etc. ?
− Quelles stratégies met-on en œuvre quand il y a transfert ? Sont-elles corrélées à des
genres ?
− Quelle contrainte représente le public visé (lecteurs, téléspectateurs, cinéphiles, etc.) ?
− Les universaux (explicitation, simplification, etc.) et les lois de traduction (notamment
celle dite de neutralisation, cf. Toury, 1995) éclairent-ils ces stratégies ?
− Quelles normes linguistiques suit-on lorsqu’il s’agit de traduction pour les écrans, pour
des sites web ?
− Les retraductions sont-elles, entre autres, un nouveau questionnement sur l’état des
langues en présence ?
− Quels sont les rôles et responsabilités du traducteur, son éthique, face au métissage entre
écrit et oral ?
Ces questions sur les enjeux et conséquences de l’oralisation dans l’écrit lors de
communications multilingues acquièrent d’autant plus de pertinence que toute traduction ou
interprétation est toujours contextualisation (et en aucun cas problème de correspondance mot
à mot, comme le perpétue une certaine opinion) et qu’elles sont de plus en plus omniprésentes
– du paquet de corn-flakes aux nouvelles du soir, du document spécialisé aux programmes
télévisés importés. Le poids des communications interlinguistiques et interculturelles dans la
mondialisation en cours, avec le développement d’une lingua franca, ne peut qu’augmenter. Il
y a là un défi pour tous les chercheurs centrés sur les usages et pratiques des langues.
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De l’hybridité comme pratique courante
Littératures
L’oralité dans la littérature romanesque, dans les livres d’enfants, dans les contes, en poésie,
dans les pièces de théâtre, a donné lieu à nombre de publications, portant tantôt sur le style
particulier d’un écrivain (de Maupassant ou Zola à Céline ou Pinget, de Rabelais à Henri
Michaux ou A. Ernaux), tantôt sur tel ou tel phénomène linguistique (phonétique – comme
par exemple le e caduc –, graphique – comme par exemple les représentations de l’oral
familier avec ses élisions – ou paralinguistique – comme par exemple le rôle de la ponctuation
dans les dialogues pour en manifester les auto- ou hétéro-interruptions, les inachèvements, les
faux départs, les chevauchements de parole, les hésitations, le rythme ou encore pour signaler
un défaut d’articulation, un rire, un souvenir, un rêve, etc.).
L’oralité et ses registres dans les interactions en face à face, au téléphone, dans un groupe
sont différents de leur représentation écrite – depuis les traces d’oralité dans les écrits
médiévaux jusqu’aux dialogues dans les récits contemporains. Ces représentations véhiculent
aussi souvent, implicitement et indirectement, une idée de la norme. C’est dire que le
« sentiment de la norme » accompagne nécessairement les manières de produire et de
reproduire l’oral dans l’ordre scriptural, avec une certaine stigmatisation sociale liée à des
formes linguistiques qui peut inhiber certains usages, comme par exemple celui des mots
d’argot, des jurons, des formes dites grossières ou même considérées comme trop familières
ou trop populaires. L’important à noter n’est pas tant les conceptions hétéroclites que les
locuteurs ont de chaque registre (soutenu, littéraire, familier, populaire, etc.) que le décalage
fréquent entre nos pratiques langagières et la vision idéologique qu’on en a : il y a un écart
entre ce qu’on dit, ce qu’on croit qu’on dit, et ce qu’on croit qu’il faut ou faudrait dire. Les
écrivains, dans leurs choix formels avec effets d’oralité et parfois de parlure populaire ou
dialectale, construisent aussi une certaine conception de la langue orale, de la langue
populaire, etc. En jouant avec des tabous, ils reflètent leur idée de tel ou tel sociolecte, associé
à d’autres éléments (lieu d’habitation, profession, sexe, fréquentations des personnages) tandis
que les lecteurs associent tous ces éléments (linguistiques et autres) à leurs propres
conventions et représentations. En lisant, nous faisons tous correspondre des phénomènes
linguistiques à des stéréotypes sociaux, comme quoi toute marque ou variation linguistique
peut être valorisée ou pas, selon les contextes et les époques. Il en est de même avec le
langage de l’enfant dans les récits homodiégétiques, à la première personne, de plus en plus
nombreux : l’oral enfantin simulé cherche à faire coïncider avec une idée préconçue de
l’enfant le parler supposé de « cet » enfant (phénomènes de dislocation, syntagme rhématique,
négations tronquées, lexique particulier, déicticité, etc.). Quel que soit le genre (roman, récit
de jeunesse, pièce de théâtre), l’oralité apparaît comme doublement fictionnelle : à la fois
imaginaire social de la langue (oral imaginaire et imaginaire de l’oral) et élément d’un univers
narratif et émotionnel. Cette parole peut être tantôt quotidienne, tantôt tragique si on pense par
exemple aux représentations théâtrales de la Shoah et de l’univers concentrationnaire au
théâtre, des années 1950 à la fin des années 1990.
L’orature ou littérature de tradition orale (créole ou pas) n’a pas à l’origine d’ouvrages
imprimés avec des auteurs reconnus ; elle s’est inventée avec ses propres rites et conventions,
prioritairement dans le local, c’est-à-dire rattachée à une aire linguistique-culturelle qui n’était
pas forcément homologique d’un territoire national (orature normande, des Aborigènes
australiens, du Sénégal en pays Mandé ou Fouladou, etc.). Elle fait place aujourd’hui de plus
en plus à la médiation écrite (théâtre, forum, poésie urbaine, roman radiodiffusé, cinéma). Ce
n’est pas le lieu de décrire les logiques de distribution et de transformation de ces littératures
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orales. Il suffit de rappeler combien elles ont mis l’accent sur la performance (moyen de
communication et d’expression), à savoir à la fois sur le contexte de production, de
déclamation et sur les capacités d’assimilation, de mémorisation des récepteurs. D’où
l’importance du rythme, de la répétition… Ainsi un texte peut être émis en anglais au rythme
du bongo. Ce mélange des langues et des formes est incorporé, passe par le corps, ses
émotions, ses gestes plus ou moins contrôlés : l’orature représente par les corps comme les
littératures écrites représentent par la page imprimée – dans les deux cas, il s’agit toujours de
construction médiée par la langue, où la parole libère (de) l’écrit et l’écrit libère (de) la parole.
L’oralité à l’écrit n’est donc pas simple simulacre ou simulation, ce qui reviendrait à les
subordonner au modèle de l’écrit.
Autres domaines hybrides
Une autre source où oralité et scripturalité se mêlent concerne l’ensemble des
communications médiées, depuis l’interactivité dans l’écrit du Minitel jusqu’au texte de chat,
de SMS ou texto, depuis les échanges par courriel jusqu’aux énoncés sur forums, blogs ou
encore dans les jeux en réseau. Certains réduisent ces communications à des problèmes
d’orthographe, de choix lexicaux, de processus de phonétisation, et accessoirement à des
transformations morphosyntaxiques. D’autres les rapprochent de la créolisation et des créoles,
comme si « Ici on parl 1 langag ke lé um1 pev komprend » pouvait être assimilé à « La
Gwadloup sé tan vou, sé pa to yo » (La Guadeloupe c’est à nous, c’est pas à eux, slogan de
février 2009 lors de manifestations sur l’ile). Les arguments pour et contre l’utilisation d’un
tel langage abrégé sont multiples. Au-delà des controverses sur l’ortograf altêrnativ, les
procédés d’abréviation, les rébus typographiques, il faut souligner que dans ces échanges, la
langue semble de plus en plus réduite à sa fonction de communication : ce n’est plus un texte
que l’on écrit mais une parole que l’on envoie. Si l’imprimé a figé l’orthographe,
l’informatique la libère. En fait, avec ces processus de simplification, de spécialisation,
d’expressivité, il y a construction identitaire puisque les spécificités de cet écrit-parlé en font
quasiment un code dans lequel se reconnait une certaine génération. Un tel langage commun
répond à des soucis pragmatiques, rationnels, sans perdre sa dimension ludique. Bref, il fait
bouger les lignes entre écrit et oral, il fait évoluer la langue avec des moyens et supports très
contemporains. Peu importe dans ces conditions qu’on lui prédise une vie brève ou une
extension dans la littérature, en commençant par les romans policiers.
D’autres sources ou types d’intervention langagière méritent d’être mentionnés à propos du
métissage des formes orales et écrites :
− la publicité, depuis le slogan « Y’a bon Banania » supposé refléter une manière de parler
d’un Noir francophone. De tels stéréotypes se retrouvent dans d’autres formes de la
culture que d’aucuns appellent populaire, par exemple le « français tirailleur » dans la
chanson d’E. Piaf Voyage du pauvre nègre (1939), dans l’album de Tintin au Congo
(1946) ;
− les procès judiciaires où les paroles (plaintes, témoignages, défense, etc.) sont soumises au
carcan du rituel et des conventions établies (entre procédures rigoureuses, phrases toutes
faites et déposition écrite, etc.), ce qui rend ambigu le rôle de l’interprète auprès des
tribunaux quand plusieurs langues se mêlent devant la Cour ;
− certaines interventions publiques qui confinent à l’écrit oralisé, par exemple le
conférencier s’appuyant sur des notes ou des diapositives de diaporama, le journaliste
émettant son discours en lisant sur le téléprompteur ;
− les interviews. Deux remarques ici : les propos spontanés sont rapportés, réécrits puis
parfois relus et amendés par les interviewés, sous divers prétextes (affirmation trop
franche, point de vue déformé, accusation trop explicite) – le passage de l’oral à l’écrit
pouvant aboutir à un énoncé en langue de bois, bien éloigné de l’échange initial. Par
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ailleurs, les interviews génèrent des comportements différents selon les cultures : si
certaines personnalités américaines ou allemandes se font payer, d’autres (françaises par
exemple) sont plus réticentes au jeu des questions-réponses, préférant une publication.
Ainsi Derrida abusait de la stratégie d’évitement aux questions posées, Lacan pouvait lire
des réponses écrites. Certes des changements sont en cours, avec des séminaires
enregistrés puis édités, des entretiens filmés. Ce qui amène à souligner les différences
culturelles à la fois dans la structuration des discours (écrits/oraux), dans l’usage des
présupposés, de l’implicite, dans l’appel au récepteur, dans la part réservée à l’affect et à
l’évaluation. Il n’y a pas de langue catégoriquement « orale » ou « lettrée », ce qui
n’exclut pas une corrélation entre l’oralité et ce qu’on fait avec les textes dans une langue
donnée ou entre langues. Ce qui amène à la problématique de la traduction.
Oral / écrit en traduction
Une opinion perdure qui veut opposer la traduction (= écrit) à l’interprétation (= oral). La
première reformulerait un texte de départ dans une langue dite d’arrivée tandis que la seconde
serait réexpression d’un discours rédigé d’avance ou partiellement improvisé à partir de notes.
Cette opposition fait fi des langues comme le russe qui n’ont qu’un mot pour les deux ; elle
est simpliste en reprenant une dichotomie qui ignore les formes mixtes comme la traduction à
vue, l’audiodescription, le sous-titrage en direct1 et reproduit une certaine conceptualisation
de la traduction comme transfert linéaire d’une source à une cible, remise en cause par
nombre de travaux en traductologie et par l’appréhension de divers concepts de traduction
selon les sociétés où la traduction est perçue, définie plutôt comme version, imitation,
explication, change, métamorphose, etc.
Exemples de pratiques mixtes
On peut suggérer différents contextes où la langue parlée se mêle à l’écrit pour les
traducteurs. Outre les formes mixtes déjà citées, on a :
− les situations d’interprétation de l’écrit parlé à l’oral, par l’intermédiaire d’une prise de
notes (interprétation consécutive) ou pas, dans le cas de l’interprétation simultanée (en
cabine), celle-ci mettant en œuvre des stratégies et des tactiques variées selon que le
discours est lu à plus ou moins grande vitesse, planifié jusqu’à un certain point ou
totalement spontané, développé à partir d’un bagage cognitif plus ou moins partagé, émis
avec des moyens lexicaux, terminologiques pointus ou ordinaires, énoncé dans des
structures plus ou moins sophistiquées, faisant appel à des connaissances antérieures plus
ou moins spécialisées, prononcé avec conviction et engagement ou sur un ton détaché, etc.
C’est dire ici que les critères sont multiples pour définir le degré d’oralité du discours à
interpréter.
− La traduction orale de dialogues filmiques grâce au doublage ou voice over2
− La traduction écrite de formes orales, par le sous-titrage inter- ou intra-linguistique
1 La traduction à vue consiste à traduire oralement, au fur et à mesure qu’on le lit, un document écrit, par
exemple une recommandation en fin de conférence, un traducteur n’opérant pas de la même façon ni à la même
vitesse qu’un interprète professionnel. L’audiodescription consiste à traduire en mots des images pour permettre
à des aveugles ou malvoyants d’accéder à un film, à une exposition de peinture, etc. Dans le sous-titrage en
direct ou en temps réel, on interprète en phrases courtes un reportage, un débat – phrases qu’un logiciel de
reconnaissance vocale va transformer en sous-titres à l’écran.
2 Faute de place et surtout d’expérience, on n’abordera pas dans cet article la problématique des accents
géographiques et sociaux dans le doublage, comme le vernaculaire noir américain remplacé par le dialecte
sicilien dans plusieurs films en Italie ou le doublage de Bienvenue chez le Ch’tis (Danny Boon, 2008), et le débat
sur la langue propre aux doublages.
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− La traduction écrite de dialogues (écrits) qui vont être oralisés ou chantés : c’est le cas du
surtitrage d’opéra et de la traduction de pièces de théâtre
− La traduction de traits d’oralité dans un roman, par exemple Zazie dans le métro
(Queneau), les argots et patois dans les Misérables (V. Hugo), les voix paysannes chez
Aragon, les différents accents anglais dans Pygmalion (B. Shaw) ou My fair lady, le parler
noir chez Mark Twain, les variations sociolectales dans les ouvrages de Faulkner, les
formes d’oralité chez Cervantès, Doistoïevki, Hegel, Joyce, récemment retraduits pour
enfin reconnaitre qu’ils n’ont pas écrit selon le canon de l’écrit littéraire français.
− La traduction en finnois des variations linguistiques d’une même langue, par exemple la
littérature acadienne avec ses particularités en chiac, les littératures dites postcoloniales
rédigées dans un certain anglais, français, portugais, espagnol…
Rappelons que la traduction de la Bible dans les sociétés à tradition orale (qui ne connaissent
pas l’écriture) a posé et pose d’intéressantes questions sur les types d’oralité, la notion de
genre, les constructions discursives (avec leur redondance, leurs formules figées, etc.). Depuis
plus d’une centaine d’années, s’est ainsi accumulée une certaine expérience, ce qui n’exclut
pas les controverses de nature anthropologique (sur les cultures dites prélogiques ou logiques,
ou les cultures fortement ou faiblement contextualisées), de nature philologique (sur les
caractéristiques orales des textes d’Homère, des Evangiles, etc.) ou de nature traductologique
(sur l’importance du contexte et des destinataires pour déterminer des stratégies de traduction,
sur l’adaptation socioculturelle). Ces controverses indiquent combien il est souvent facile,
mais pas nécessairement délibéré, de projeter ses propres catégories mentales et linguistiques
sur les manifestations verbales de l’Autre, en particulier quand sa culture est à dominance
orale. Les trois religions monothéistes partagent un même paradoxe : prétendument basées sur
un Livre (Bible, Coran), elles ne sont pas fondées sur l’écrit tel qu’on le pratique et reconnaît
aujourd’hui.
Dans le prolongement de ce qui précède, on peut référer aussi aux problématiques des
littératures postcoloniales, employant la langue de l’ex-colonisateur pour dire les réalités du
colonisé, en la métissant avec les langues locales jusqu’à produire des textes hybrides, à
l’hétéroglossie complexe : il y a alors double mouvement – d’une tradition plutôt orale à une
culture écrite et d’une langue subordonnée, périphérique à une langue dominante. Cette
littérarisation de pratiques orales (récits oraux indiens, contes en arabe, etc.) ou transmutation
de formes narratives populaires en écrit implique pour le traducteur de mettre en œuvre des
stratégies subtiles et d’expliciter son engagement éthique, sinon politique, vis-à-vis de ce qu’il
traduit, dans la mesure où la traduction révèle ici des rapports de pouvoir entre langue/culture
hégémonique et langue/culture dominée. L’hybridité, en outre, soulève des questions sur les
notions même de texte de départ, d’original et de rapport entre le texte étranger et le texte
traduit, ainsi que sur l’alternance codique, sur la traduction comme forme de résistance et sur
les formes d’orature mêlées au récit (proverbes, aphorismes, contes mais aussi discours
rapportés, modes d’adresse, références, allusions, etc.). Nombre de publications abordent la
traduction de ces littératures postcoloniales, que ce soit celles du Québec, de l’Ecosse, de la
Martinique, de la Jamaïque, de l’Inde, ou de différentes régions de l’Afrique du Maroc au
Nigéria par exemple. On pourrait aussi signaler ici la traduction de certaines performances
poétiques contemporaines – depuis celles du mouvement ethnopoétique, né dans les années
1950 sous l’impulsion de Jerome Rothenberg et Dennis Tedblock, aux soirées slam, des
chansons rap aux textes disponibles en CD audio.
A noter que « translation hybrid » a été aussi parfois utilisé en traductologie pour
dénommer tout transfert interlinguistique impliquant à la fois traduction et interprétation,
comme le sous-titrage en direct mais également la traduction théâtrale – depuis les
monologues de Hamlet (Shakespeare) aux réparties du Malade imaginaire (Molière), depuis
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les pièces de Beckett à la Contrebasse (Süskind). Dans cette optique, les critères de qualité ne
se limitent pas à l’acceptabilité selon les normes et conventions de la langue réceptrice ; ils
intègrent la « mise en bouche » (speakability) et la « mise en acte » (performability ou
actability) du texte traduit, ou comment il est respirable, récitable, jouable sur scène. Dès lors,
le « texte » n’est pas que texte c’est-à-dire suite linéaire de phrases enchainées sur papier,
mais forme écrite destinée à être jouée, déclamée – comme, par exemple, une chanson n’est
pas que suite de phrases plus ou moins rimées, avec refrain : elle doit être « chantable »
(singability). C’est dire que la traduction dépasse le seul aspect langagier pour assimiler
d’autres éléments sémiotiques. Sa qualité dépend finalement d’une approche holistique, bien
éloignée des approches uniquement linguistiques.
En contexte audiovisuel
Sur le va et vient entre écrit et oral, on ne peut s’empêcher bien sûr de revenir sur les
productions audiovisuelles, depuis le scénariste qui conçoit son script en pensant à son
oralisation jusqu’aux acteurs qui rythment ce script avec tous les moyens paralinguistiques
(intonation, débit, accentuation), proxémiques et kinésiques possibles, en passant par le
producteur, le metteur en scène qui lisent ce script, l’« entendent » avant de choisir les acteurs
les plus aptes à l’incorporer, le sous-titreur qui repasse des paroles à l’écrit et certains
téléspectateurs à déficience visuelle ou lents à la lecture pour qui les sous-titres sont oralisés
soit par un proche qui les lit à haute voix, soit par un logiciel text-to-speech. L’ensemble de
ces intervenants ont en tête également la complexité des relations où les dialogues3 font sens –
entre l’acteur et son personnage, entre les acteurs, entre eux et le reste de l’équipe
cinématographique, entre eux (tantôt visibles à l’écran, tantôt voix off seulement) et l’intrigue
du film, entre eux et les spectateurs, selon au moins une double perspective : diégétique
(propre à l’univers filmique créé par le metteur en scène) et vraisemblable (par rapport au réel
sensible, quotidien).
Ce brouillage entre écrit et oral ainsi que le jeu au double sens du terme (d’activité
dramatique et d’ambiguïté sémio-sémantique, de marge interprétative) ne facilitent pas la
traduction audiovisuelle qui ajoute ses propres contraintes de temps et d’espace pour le sous-
titrage et de synchronie pour le doublage : synchronie phonétique ou labiale, synchronie
kinésique (entre ce qui est dit et les mouvements de l’acteur), synchronie acoustique (prosodie
et pauses, qualité de la voix, accent régional) et synchronie sémantique (au niveau du
contenu).
Avant de présenter quelques éléments de la traduction audiovisuelle, rappelons que le
cinéma a été dès ses débuts confronté aux langues, d’abord à leur absence, ensuite à leur
foisonnement. Le cinéma dit muet (de 1895 à la fin des années 1920) n’a jamais été
silencieux : outre l’accompagnement musical (au piano dans la plupart des cas), il a été
sonorisé pendant les projections par des effets sonores et souvent par la présence d’un
narrateur derrière l’écran qui élaborait un récit, traduisait les intertitres éventuels, changeait
parfois l’intrigue, la nationalité ou l’ethnicité des personnages. Ce commentateur ou
bonimenteur (benshi au Japon, spieler aux Etats-Unis – de spiel : baratin) était comme la voix
absente des films, allant déjà contre l’illusion alors tenace du cinéma comme langage
universel. Avec le parlant (vers 1926-27) sont introduits des barrières géo-linguistiques et
commerciales, le cinéma étant très tôt à la fois un art (populaire) et un business. Comment dès
lors exporter ? Plusieurs solutions vont être appliquées successivement ou simultanément. Il
va y avoir d’abord la production en plusieurs langues c’est-à-dire tourner plusieurs fois dans
3 Inutile d’insister sur la diversité des types d’oralité et d’interaction selon les metteurs en scène : les dialogues
de Ken Loach et d’Eric Rohmer ne sont pas similaires, même si les deux directeurs recourent à des acteurs
amateurs ; les dialogues de Scorsese ne sont pas de même allure que ceux de W. Allen, etc.
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les mêmes décors avec des équipes de langues différentes ; à ces versions multiples ou plutôt
monolingues similaires, qui occultent la diversité linguistique et la traduction, on va bientôt
préférer le tournage délocalisé, la postsynchronisation puis le doublage (au sens actuel du
terme). Parallèlement, se développeront les remakes, les coproductions, enfin les films
multilingues. En un mot, l’histoire du cinéma se confond avec la multiplicité des langues, ce
qu’une certaine histoire a tenté de refouler en réduisant les cinématographies à une
problématique nationale et ce que le cinéma lui-même pourtant n’a jamais caché, mettant en
scène très tôt les langues, les traducteurs et les interprètes.
Une question (mal posée) est souvent récurrente à propos des dialogues filmiques : parle-t-
on la même langue au cinéma que dans la rue ? C’est oublier, comme on l’a déjà dit, que
l’univers d’un film, créé en 90 minutes, n’est pas le reflet mécanique de l’univers du
quotidien, que la communication entre acteurs et spectateurs n’est pas interactive : elle
s’élabore entre acteurs présents ou tiers absents de l’écran, tout en s’adressant au public qui ne
peut pas intervenir. Dans cet espace-temps construit, le scénariste, les acteurs représentent un
certain état de la langue. On retrouve ainsi la problématique de la représentation de la langue
comme en littérature. Que ce soit Hôtel du Nord (M. Carné, 1938), la Règle du jeu (J. Renoir,
1939) ou les Visiteurs (J.M. Poiré, 1993), Taxi (G. Pirès, 1998), le Placard (F. Veber, 2001),
Etre ou avoir (N. Philibert, 2002), Tais-toi (F. Veber, 2003), les intervenants recourent à des
traits linguistiques qu’ils considèrent comme caractéristiques de tel ou tel groupe social, de
telle ou telle profession à un moment donné : l’enjeu n’est pas de coller à une réalité
sociolinguistique objective mais de permettre aux spectateurs d’identifier tel ou tel
personnage et de co-construire ainsi l’univers filmique. Jusqu’où alors et comment peut-on
rendre par les sous-titres cette oralité représentée (illusoire si on s’obstine à la comparer à
l’oral de nos conversations) – par ces deux lignes d’une quarantaine de frappes qui durent de
quatre à six secondes ? On se gardera ici de détailler les stratégies et tactiques possibles ainsi
que de souligner les particularités posées par l’ironie, le sarcasme, les différentes formes
d’humour, les accents, les allusions, etc. Il suffit de dire que le sous-titrage, un des modes de
la traduction audiovisuelle, trop souvent réduit à une « perte », est un travail de condensation
qui présuppose une maitrise créatrice de sa langue4 et est une solution aux problèmes de
circulation et de distribution des films, des DVD et des programmes de télévision, quel que
soit l’écran (de cinéma, de télévision, d’ordinateur). On dit souvent que les traductions sont
plus longues que les originaux ; ce n’est pas le cas avec le sous-titrage. Avec cette forme de
traduction, une certaine notion d’équivalence prend l’eau : à la fois parce que la multimodalité
appelle d’autres critères que ceux exclusivement linguistiques, comme pour le théâtre, la
chanson (voir plus haut), et parce que le passage de l’oral des réparties5 à l’écrit des sous-
titres (deux canaux bien distincts) exige de dépasser les correspondances formelles qui
aboutissent souvent à une traduction mot à mot, d’où la fréquence supposée de la « perte »
(omission, simplification, juxtaposition), issue d’une approche comptable. Les sous-titres sont
une réussite tant qu’ils donnent accès à l’univers fictif ; dès qu’ils transgressent exagérément
le rapport à cet univers et empêchent le spectateur d’y croire, ils ne remplissent plus une de
leurs fonctions cardinales : permettre le passage dans un autre monde6. Le sous-titrage est
d’autant plus prêt à rompre la magie qu’il est détaché du reste audiovisuel (horizontalement
en bas ou verticalement sur le côté de l’écran, selon les langues) et qu’il demande une certaine
4 De nouveau se pose ici la question de la responsabilité sociolinguistique du traducteur, notamment quand par
exemple il sous-titre un même film pour une chaine publique (à mission éducative) et une chaine privée (à
fonction commerciale), plus prompte à reproduire les variations langagières actuelles que la première.
5 Réparties dont l’oralité n’est pas interrogée alors qu’elles sont d’abord écrites par le scénariste avant d’être
articulées par les acteurs.
6 Certaines pratiques aujourd’hui, comme le fansubbing ou sous-titrage vite réalisé par des « amateurs » sur le
Net, modifient cet objectif.
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attention ou participation du spectateur (effort cognitif pour comprendre l’implicite, le sous-
entendu ; effort linguistique pour compléter le non écrit, par exemple les lignes données sont
la réponse à une question non traduite). Les indices d’oralité, dans l’ensemble projeté et
regardé, sont alors plus importants que toutes les marques d’oral (faux départs, répétitions,
élisions, reprises, chevauchements, redondances lexicales, anaphorisations, paires adjacentes
complètes des séquences conversationnelles, dislocations, interpellations phatiques, etc.) : ils
suffisent à conditionner la perception des sous-titres comme de la langue parlée. Production et
lecture des sous-titres (unités sémantiquement et syntaxiquement assez autonomes, au
caractère heurté, condensé, ponctué, transitoire, séquentiel… qui rappelle l’oral) sont
corrélées : leur oralité ne se mesure pas à la présence de traits de la langue parlée, comme le
pensent certains qui ne veulent pas prendre en compte leurs conditions de production et de
réception, mais résulte d’une expérience cognitive liée à la multimodalité des codes
incorporés dans un acte de communication (multisémiotique) intégré.
Rythme et traduction
On peut dire que le sous-titrage remplit sa mission quand il respecte trois rythmes : celui
visuel, avec découpage en plans et séquences ; celui de l’intrigue, avec sa structure
dramatique bien connue depuis Aristote, ponctuée par les dialogues ; et celui de la lecture
c’est-à-dire les manières de retenir l’attention du spectateur de sorte que celui-ci intériorise
peu à peu les deux rythmes précédents. Au continuum entre l’écrit et l’oral ou à leur
distinction irrémédiable puisqu’ils impliquent deux canaux différents (visuel ; vocal-auditif),
nous préférons déplacer la perspective : on reconnaît l’oral dans l’écrit et l’écrit dans l’oral
non pas tant ou exclusivement comme types de texte ou de structures que comme catégories
d’expérience. Un nombre d’indices (par exemple pour l’oralité à l’écrit : propositions courtes,
ponctuation soulignant un certain contour intonatif, vocabulaire plutôt informel et émotif,
structures dialogiques, modaux marqués, déictiques de première et seconde personnes, temps
présent et futur, diversité typographique, etc.) suffisent à l’identification – tous ces indices
convergent en un rythme donné.
Pour Meschonnic, dans plusieurs de ses publications, l’oralité ne se confond pas avec le
parlé, opposé à l’écrit : elle est le primat du rythme dans le mode de signifier, la spécificité, la
subjectivité, l’historicité d’un discours, dans le parlé comme dans l’écrit, y compris littéraire.
Marcel Jousse (1886-1961) a aussi plaidé, à partir également de ses réflexions sur le substrat
oral des textes bibliques, pour une anthropologie du geste et du rythme afin de mieux rendre
compte de toutes les formes de communication – en milieu d’orature ou lettré. Pour lui,
l’anthropos est d’abord quelqu’un qui interagit de par son corps, ses mouvements – qu’ils
soient gestuels ou sonores (les sons étant des mouvements produits par les cordes vocales).
D’où sa conception du langage comme plus qu’un système logique, plus qu’un véhicule de
pensée, lié au seul cerveau. L’homme pense et communique avec tout son corps, plutôt qu’à
travers des mots, invention de l’écriture. Pour Jousse, le geste est toujours rythmique, mimant
le flux d’énergie du cosmos. Par son approche holistique de la communication humaine, il
annonce les travaux sur la dimension multimodale, éloignée des conceptions binaires du
signe. Dans cette perspective, la littéracie perd sa place prédominante pour se tourner vers les
modes hybrides d’oralité et de scripturalité, dans des contextes longtemps délaissés ou perçus
comme mineurs.
On comprend alors pourquoi Ong réfère à Jousse, pourquoi cette ouverture à la
multimodalité peut enrichir notre compréhension des communications interculturelles, et
pourquoi cette anthropologie peut aider non seulement à appréhender certaines sociétés sans
tradition orale mais aussi à saisir les impacts des TIC qui réinventent l’oralité ou plutôt nous
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aident à redécouvrir l’hybridité. Une telle orientation ne peut pas être sans conséquences par
exemple sur la formation des traducteurs/interprètes7 encore davantage centrée aujourd’hui
sur la vision et la main (écriture) que sur l’ouïe et la voix (oralité) – la vision sépare, divise en
observant l’intérieur des choses (l’image distingue) tandis que l’ouïe unifie, harmonise (le son
est évanescent, dynamique). Les cultures orales tendent à penser plus globalement que celles à
tradition écrite ; elles rassemblent, connectent, présupposent une audience alors que l’écrit
isole. Il resterait donc à davantage creuser les manières dont les cultures orales/écrites et les
manières de penser, de communiquer interférent pour former de nouveaux modes d’interagir.
Le brouillage entre écrit et oral, traduction et interprétation est un des symptômes des
changements en cours, sous l’impulsion des TIC – changement manifeste de façon
emblématique par le passage du clavier des ordinateurs, hérité des machines à écrire, à la
reconnaissance vocale pour « écrire » ses textes. Depuis toujours, mais peut-être encore plus
avec la technologisation actuelle des communications, la « position traductive » du traducteur
(Berman, 1995 : 74-75) est liée à la fois à sa « position langagière » (comment il perçoit les
langues, quel rapport il établit avec elles) et à sa « position scripturaire » (son rapport à
l’écriture, entre autres littéraire).
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7 Outre un autre cadre conceptuel pour penser les divers modes d’interaction, les réflexions de Jousse soulignent
la pertinence des contextes, l’importance de la multimodalité de toute communication et reconnaissent les
diverses manières de conceptualiser le réel, autres que seulement à travers le prisme de l’écrit.
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Revue de sociolinguistique en ligne
Comité de rédaction : Michaël Abecassis, Salih Akin, Sophie Babault, Claude Caitucoli,
Véronique Castellotti, Régine Delamotte-Legrand, Robert Fournier, Emmanuelle Huver,
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Conseiller scientifique : Jean-Baptiste Marcellesi.
Rédacteur en chef : Clara Mortamet.
Comité scientifique : Claudine Bavoux, Michel Beniamino, Jacqueline Billiez, Philippe
Blanchet, Pierre Bouchard, Ahmed Boukous, Louise Dabène, Pierre Dumont, Jean-Michel
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Jean-Marie Klinkenberg, Jean Le Du, Marinette Matthey, Jacques Maurais, Marie-Louise
Moreau, Robert Nicolaï, Lambert Félix Prudent, Ambroise Queffelec, Didier de Robillard,
Paul Siblot, Claude Truchot, Daniel Véronique.
Comité de lecture pour ce numéro : Francoise GADET (Paris-Nanterre), Yves
GAMBIER (Turku), Olli Philippe LAUTENBACHER (Helsinki), Jean-Marie MERLE (Aix-
en-Provence), Nicolas FROELINGER (Paris 7 Diderot), Daniel VÉRONIQUE (Aix-en-
Provence).
Laboratoire LiDiFra – Université de Rouen
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ISSN : 1769-7425