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La psychologie et l’usage du traitement mathématique des données statistiques. Nouvelles perspectives conceptuelles

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Abstract

Cet article se propose d'aborder la question de la variabilité inter individuelle et de sa prise en compte par les mathématiques traitant des données statistiques mais aussi par la psychologie utilisant ces traitements statistiques et les résultats de ces traitements. Cette question sera abordée plus spécialement sous l'angle de l'évaluation des élèves en classe et celui de la mesure, dans le domaine de la psychologie, de leurs capacités cognitives sous différents aspects. La variabilité de l'expression -ici les performances cognitives-entre des personnes d'un groupe, peut être abordée, notamment dans le cadre de la psychologie, sous l'angle de l'écart d'une performance à la moyenne du groupe considéré. Cette moyenne constitue ainsi une norme. Les écarts à cette moyenne des performances peuvent alors être utilisés sous une visée de hiérarchisation des performances de l'ensemble des sujets et/ou pour traiter des distances à la norme pour une part des sujets considérés. Sous l'un ou l'autre aspect, la question ainsi présentée renvoie à l'appréciation de l'efficacité, globale, ou particulière à une dimension donnée, variable entre les élèves, à traiter de contenus, par exemple, dans cet article, ceux des mathématiques. Mais cette notion d'écart peut être aussi utilisée sous l'angle de ce qui fait qu'un sujet particulier se situe loin de la norme, défini par la moyenne du groupe d'appartenance. Il s'agirait alors de comprendre, surtout si l'appréciation se fait sur plusieurs dimensions, ce qui fait la singularité qualitative de la configuration des résultats et ce que cela peu inférer comme analyse renouvelée des réalités rencontrées. Dans ce cas de figure, l'observation pertinente n'est plus la norme statistique collective référent à un groupe, et la distance, le plus souvent vue sous l'angle hiérarchique, de chacun par rapport à cette norme, mais bien la singularité de chaque personne concernée, et en particulier, celle de celui qui peut se situer aux marges des observations. Pour aborder cette question un parallèle sera fait entre : -les questions que peut se poser un professeur de mathématiques au cours de ses enseignements, du point de vue de la variabilité de l'efficacité des élèves à traiter des contenus de sa discipline, -la démarche du psychologue cherchant à comprendre, du point de vue du sujet, ce qui peut permettre ou ne pas permettre des apprentissages efficaces. D'une manière générale, il sera montré que les questions traitées par la psychologie, comme celles abordées par le professeur de mathématique, ne diffèrent pas nécessairement. Elles relèvent, au moins pour partie, de questions faisant référence au 1 Docteur en psychologie, HDR, Université de Caen Basse-Normandie, 7 rue des pins 14470 Courseulles sur Mer. Tel. 02 31 37 63 93 Pellois.christian@wanadoo.fr 2 sens commun, et peuvent donc se présenter telles que chacun peut se les poser dans la vie courante. C'est pourquoi, pour permettre d'introduire la question des mathématiques, de leur place dans les sciences humaines et, ici, de la psychologie en particulier, il a été choisi de passer par des observations relevant de la vie ordinaire, la psychologie « au quotidien », en quelque sorte 2 . Il est donc proposé, ici, de commencer à traiter des rapports entre la psychologie -plus particulièrement la psychologie cognitive-et des mathématiques par l'observation de l'une de ces situations de la vie courante : le professeur de mathématique assurant ses enseignements à l'école, dans sa classe. Il sera abordé, ensuite, à partir des limites à la compréhension des situations d'apprentissage des élèves sur lesquelles peut buter le professeur de mathématique, la position du psychologue, à la fois dans sa différence mais aussi dans une certaine forme de parallélisme avec la position de l'enseignant. Seront traitées enfin les limites des positions courantes des uns et des autres notamment lorsqu'ils situent la variabilité des sujets au regard de l'ensemble, c'est-à-dire référant à une norme statistique collective et aux modèles d'interprétation des données y afférant. Mais, comme cela a déjà été évoqué, la notion d'écart peut renvoyer à une autre position : non pas à la valeur, de la norme collective et de la distance à celle-ci, mais à la valeur, notamment heuristique, de ce qui fait l'écart pour des sujet marginaux. Valeur d'autant plus intéressante que dans certains cas d'observation différentielle, elle traduit des formes originales d'adaptation de sujet particuliers, notamment lorsque les données statistiques portent sur différentes dimensions qui permettent, alors, de passer de l'analyse quantitative, en termes d'écarts à une performance moyenne, à une analyse qualitative en termes de profils ou, mieux, en termes de configurations. Cette conception peut être d'autant plus pertinente qu'elle porte sur des cas singuliers de réussite improbable au regard des modèles explicatifs, de l'efficacité ou du manque d'efficacité cognitive, conçus à partir des normes fixées par rapport à l'ensemble d'une population considérée. Il s'agit donc de traiter d'observations de configurations originales dans leur différences qualitatives, caractéristiques de la « difficulté » cognitive, ou d'une réussite inattendue, au regard des modèles construits sur des bases statistiques collectives. Vu sous cet angle, ces configurations seraient alors susceptibles d'ouvrir des pistes de recherche féconde dans le domaine de psychologie, et éventuellement dans d'autres domaines scientifiques.
1
LA PSYCHOLOGIE ET L’USAGE DU TRAITEMENT
MATHEMATIQUE DES DONNEES STATISTIQUES : DE
NOUVELLES PERSPECTIVES CONCEPTUELLES ?
Christian PELLOIS
1
Cet article se propose d’aborder la question de la variabilité inter individuelle et de sa
prise en compte par les mathématiques traitant des données statistiques mais aussi par la
psychologie utilisant ces traitements statistiques et les résultats de ces traitements. Cette
question sera abore plus spécialement sous l’angle de l’évaluation des élèves en
classe et celui de la mesure, dans le domaine de la psychologie, de leurs capacités
cognitives sous différents aspects.
La variabilité de l’expression -ici les performances cognitives- entre des personnes
d’un groupe, peut être abordée, notamment dans le cadre de la psychologie, sous l’angle
de l’écart d’une performance à la moyenne du groupe considéré. Cette moyenne
constitue ainsi une norme. Les écarts à cette moyenne des performances peuvent alors
être utilisés sous une visée de hiérarchisation des performances de l’ensemble des sujets
et/ou pour traiter des distances à la norme pour une part des sujets considérés. Sous l’un
ou l’autre aspect, la question ainsi présentée renvoie à l’appréciation de l’efficacité,
globale, ou particulière à une dimension donnée, variable entre les élèves, à traiter de
contenus, par exemple, dans cet article, ceux des mathématiques. Mais cette notion
d’écart peut être aussi utilisée sous l’angle de ce qui fait qu’un sujet particulier se situe
loin de la norme, défini par la moyenne du groupe d’appartenance. Il s’agirait alors de
comprendre, surtout si l’appréciation se fait sur plusieurs dimensions, ce qui fait la
singularité qualitative de la configuration des résultats et ce que cela peu inférer comme
analyse renouvelée des réalités rencontrées. Dans ce cas de figure, l’observation
pertinente n’est plus la norme statistique collective référent à un groupe, et la distance,
le plus souvent vue sous l’angle hiérarchique, de chacun par rapport à cette norme, mais
bien la singularité de chaque personne concernée, et en particulier, celle de celui qui
peut se situer aux marges des observations.
Pour aborder cette question un parallèle sera fait entre :
- les questions que peut se poser un professeur de mathématiques au cours de ses
enseignements, du point de vue de la variabilité de l’efficacité des élèves à traiter des
contenus de sa discipline,
- la démarche du psychologue cherchant à comprendre, du point de vue du sujet, ce qui
peut permettre ou ne pas permettre des apprentissages efficaces.
D’une manière générale, il sera montré que les questions traitées par la psychologie,
comme celles abores par le professeur de mathématique, ne difrent pas
nécessairement. Elles relèvent, au moins pour partie, de questions faisant référence au
1
Docteur en psychologie, HDR, Université de Caen Basse-Normandie, 7 rue des pins 14470 Courseulles
sur Mer. Tel. 02 31 37 63 93 Pellois.christian@wanadoo.fr
2
sens commun, et peuvent donc se présenter telles que chacun peut se les poser dans la
vie courante. C’est pourquoi, pour permettre d’introduire la question des
mathématiques, de leur place dans les sciences humaines et, ici, de la psychologie en
particulier, il a été choisi de passer par des observations relevant de la vie ordinaire, la
psychologie « au quotidien », en quelque sorte
2
. Il est donc proposé, ici, de commencer
à traiter des rapports entre la psychologie -plus particulièrement la psychologie
cognitive- et des mathématiques par l’observation de l’une de ces situations de la vie
courante : le professeur de mathématique assurant ses enseignements à l’école, dans sa
classe.
Il sera abordé, ensuite, à partir des limites à la compréhension des situations
d’apprentissage des élèves sur lesquelles peut buter le professeur de mathématique, la
position du psychologue, à la fois dans sa différence mais aussi dans une certaine forme
de parallélisme avec la position de l’enseignant. Seront traitées enfin les limites des
positions courantes des uns et des autres notamment lorsqu’ils situent la variabilité des
sujets au regard de l’ensemble, c'est-à-dire référant à une norme statistique collective et
aux modèles d’interprétation des données y afférant.
Mais, comme cela a déjà été évoqué, la notion d’écart peut renvoyer à une autre
position : non pas à la valeur, de la norme collective et de la distance à celle-ci, mais à
la valeur, notamment heuristique, de ce qui fait l’écart pour des sujet marginaux. Valeur
d’autant plus intéressante que dans certains cas d’observation différentielle, elle traduit
des formes originales d’adaptation de sujet particuliers, notamment lorsque les données
statistiques portent sur différentes dimensions qui permettent, alors, de passer de
l’analyse quantitative, en termes d’écarts à une performance moyenne, à une analyse
qualitative en termes de profils ou, mieux, en termes de configurations. Cette
conception peut être d’autant plus pertinente qu’elle porte sur des cas singuliers de
réussite improbable au regard des modèles explicatifs, de l’efficacité ou du manque
d’efficacité cognitive, conçus à partir des normes fixées par rapport à l’ensemble d’une
population considérée. Il s’agit donc de traiter dobservations de configurations
originales dans leur différences qualitatives, caractéristiques de la « difficulté »
cognitive, ou d’une réussite inattendue, au regard des modèles construits sur des bases
statistiques collectives. Vu sous cet angle, ces configurations seraient alors susceptibles
douvrir des pistes de recherche conde dans le domaine de psychologie, et
éventuellement dans d’autres domaines scientifiques.
1. L’enseignement des mathématiques : quelques observations faites en classe.
Le point qui va suivre va traiter de la situation de l’enseignement des mathématiques
puis d’observations courantes qu’un professeur de mathématiques est susceptible de
faire en classe.
1.1. La situation d’enseignement
1.1.1. Des constats, dans sa discipline, à l’inconnue « élève »
Dans les classes dont il a la charge, le professeur de matmatiques observe très
régulièrement que les élèves réussissent de manière inégale. Certains sont capables de
2
Fraisse, « Il y a trois psychologies ».
3
résoudre la plupart des exercices qu’il propose. D’autres échouent le plus souvent. Mais
il constate également qu’à de ces réussites fréquentes des uns ou de ces échecs
fréquents des autres, d’autres présentent une variabilité plus importante d’échecs et de
réussites en fonction des questions de mathématiques traitées. Il observe également que,
sans raisons apparentes, et parfois, paradoxalement, pour les uns ou pour les autres,
l’échec apparaît pour des exercices plus simples, alors que des exercices plus complexes
sont résolus. Le professeur explique, assez souvent, ce résultat « paradoxal » par un
manque momenta d’attention de l’éve. Cette dernière observation permet
d’introduire, à côté de constats plus globaux, le fait que le professeur peut induire, à
partir de l’expérience de son enseignement, des inférences, émettre quelques hypothèses
plausibles, susceptibles d’expliquer une certaine variabilité de la réussite ou de l’échec.
Dans la même perspective d’observation de la variabilité, des élèves qui réussissent très
souvent l’ensemble des exercices proposés peuvent échouer, parfois. Certains peuvent
échouer assez régulièrement sur des contenus donnés et pas sur d’autres, par exemple, à
des exercices traitant des questions posées en termes géométriques à partir de figures
mais pas à des exercices traitant des questions en termes de calcul arithmétique,
algébrique, ou le contraire. Ils peuvent, aussi, échouer temporairement aux uns et aux
autres sans raison apparente, en tout cas sans raisons directement liées au travail de la
classe dans la discipline donnée.
Au fur et à mesure de son travail en classe, dans l’animation même de ses cours, par
des questions de compréhension, la demande de réponse, la sollicitation active des
élèves dans le fil du déroulement du cours, de rapides exercices d’application sur
chaque point, chaque notion abordée, le professeur va se faire une idée de en sont
les élèves, ce quils ont compris, ce qui fait problème, collectivement, mais aussi
individuellement. Le professeur va corriger, aider l’élève à passer une difficulté
passagère, et pour cela il aura compris ponctuellement ce qui a pu faire « obstacle » à
une bonne assimilation du point de mathématiques considéré. Il s’agit de ce qu’on
appelle techniquement l’évaluation « formative ». Mais pour faire le point régulièrement
de en sont les élèves, ce qu’ils ont acquis, plus globalement leurs compétences en
mathématiques, c'est-à-dire ce qu’ils sont capables de soudre comme probmes de
mathématiques, en fonction de la classe dans laquelle ils sont, des programmes, de
notions abordées, des contenus de connaissances qu’ils doivent acquérir, de situations
disciplinaires qu’ils doivent maîtriser, le professeur va procéder à des évaluations plus
formelles plus instituées dans la classe. Le professeur va donc mesurer des
performances. L’élève va devoir se confronter en un temps donné à des questions, une
série d’exercices de difficultés variables qu’il devra résoudre. Il devra en restituer les
modes de résolution et les solutions trouvées par écrit. Le professeur va rassembler ces
documents écrits et affecter des points aux exercices correctement résolus. Il va donc
affecter les prestations des élèves d’un score, à savoir une note, le plus souvent attribuée
entre 0 et 20
3
. Il s’agit cette fois ci de l’évaluation « sommative ». Cette évaluation
permet, par exemple, aux professeurs de faire le point sur les acquis des élèves à l’issue
d’un trimestre scolaire. Elle permet de faire état des compétences acquises dans la
discipline considérée, à un niveau donné dacquisition dans cette discipline. Le
professeur rendre compte ainsi de l’état des acquis de ses élèves, tout comme la
situation d’examen témoigne socialement des compétences acquises, par les résultats
3
Il ne sera pas abordé, ici, la question très « discutée » de la notation des élèves, ou de la « fragilité » de
l’évaluation en situation scolaire. Une ample littérature a déjà été développée sur cette question (voir à ce
sujet des développements antérieurs. Cf. notamment Pellois, Enseignement et formation : le
développement de la personne…..
4
des performances réalisées, présentées sous forme de scores : les notes, ou plus
récemment sous la forme d’un inventaire de compétences acquises. Un indice
synthétique des résultats pourra même être constitué par la moyenne trimestrielle,
annuelle des notes de l’élève dans la discipline donnée, ou plus récemment sous la
forme d’un livret des compétences acquises.
En reprenant ces scores, accumulés, au bout d’un certain temps, le professeur pourra
repérer, à nouveau, mais de manière plus concrète, au fil de son travail de classe, que
des élèves ont, le plus souvent, des scores élevés et d’autres des scores faibles, enfin que
d’autres se trouvent dans des situations intermédiaires, dans une zone de variabilité
« moyenne » et présentent, ou non, en fonction de questions traitées, ou non, des
fluctuations importantes des scores obtenus d’une évaluation à une autre, voire une
tendance, plus générale, à la progression ou à la baisse. Pour en faire une synthèse
simple il sera peut-être encore tenté de faire la moyenne des notes obtenues par les
élèves, même s’il y a des évolutions
4
en ce domaine depuis de nombreuses années, et
que les textes en vigueur encouragent ces évolutions. Il repèrera des élèves ayant une
moyenne des notes élevée. C'est-à-dire des élèves qui auront réussi au regard de la
plupart des questions du programme et qui seront même capables de résoudre des
exercices plus ou moins à distance de ce programme, de manière originale nécessitant
donc des capacités adaptatives pour faire face aux « imprévus » qu’ils représentent. Il
pourra voir également, un peu plus dans les classes du début de la scolarité, un peu
moins par la suite, lorsque les études sont plus poussées, que ces mêmes élèves tendent
à réussir de la même façon dans d’autres disciplines, les lettres, les langues, les sciences,
voire les disciplines artistiques ou sportives. Que, par ailleurs, cette caractéristique
semble davantage être associée aux élèves les plus jeunes des classes, et ceci à la
différence des élèves plus âgés qui présentent mêmes, assez souvent, davantage de
difficultés cumulées.
Tout se passe, comme si, à côté d’une appréhension précoce des contenus de l’école,
favorisant l’efficacité d’investissement des connaissances scolaires, le fait de réussir
dans un domaine donné était plus ou moins spontanément associé, pour certains, à la
réussite dans les autres domaines. Cette observation « périphérique » peut renvoyer à
une explication de simple bon sens. Maîtriser par le langage les situations que l’on
rencontre nécessite a minima des capacités d’organisation structurée du langage et la
capacité à développer, y compris au plan littéraire, des déductions, donc du
raisonnement. Il suffit simplement, pour s’en convaincre de lire, par exemple, les
histoires extraordinaires d’Edgar Poe. De même, pour réussir en mathématiques il
convient de savoir lire et de comprendre l’énoncé du problème posé, maîtriser le sens
complexe de mots, de notions abstraites définies dans un langage « littéraire », certes
spécifique -l’énoncé des théorèmes- ou dans une symbolique de communication
formelle et abstraite : le langage des signes mathématiques. Le professeur a, dans ce cas,
une conception, une « théorie », plus ou moins consciente, implicite, sur la situation
traitée. Il analyse pas à pas et de manière pragmatique, pris ici au sens courant du terme,
les difficultés de l’élève au regard des difrentes étapes de la procédure (approche
fonctionnaliste) ou des différents éments de l’organisation de la discipline scolaire
mise en œuvre (approche structurale) par le sujet, ou de l’expression des deux en un tout
(approche systémique ?).
4
Comme évoqué précédemment : carnet d’évaluation, bilan scolaire, bilan ou carnet compétences
acquises à l’école, portfolio, etc.
5
L’explication des phénomènes renvoie, alors, à l’analyse « interne » de la discipline
considérée. Elle renvoie à sa compréhension conceptuelle par la recherche et
l’élaboration de son organisation en structures, en systèmes. Mais aussi à l’expression
fonctionnelle des conduites adaptatives du sujet en interaction avec les ingdients
mathématiques acquis
5
afin de lui permettre l’élaboration du raisonnement actualisé
aux conditions du problème posé.
1.1.2. Les constats des difficultés des élèves, les schémas interprétatifs du
professeur : les limites
Mais les explications du phénomène, évoqué ci-dessus, celui de la polyvalence de
l’efficacité dans la mise en œuvre des compétences sont, sans doute
6
, plus complexes
qu’il n’y paraît en première approximation. Le professeur ayant accumulé une
expérience conséquente et variée, et qui a pu initialement tenir cette explication pour
pertinente, peut observer, tôt ou tard dans les cursus scolaires, qu’à côté de quelques
élèves continuant à réussir dans leurs études sur un large éventail de disciplines
scolaires, d’autres élèves semble plus à l’aise dans un groupe de disciplines que dans un
autre. Des élèves réussissent, par exemple, dans les disciplines plus scientifiques,
comme les mathématiques, la physique, la biologie (etc.) et psentent de moindres
performances, voire même des difficultés partielles ou importantes dans les disciplines
littéraires, les langues (etc.). Pour d’autres la situation est inversée. Tout se passe
comme si les capacis adaptatives de ces élèves ne couvraient plus l’ensemble des
disciplines de l’école et/ou se spécialisaient, en quelque sorte, dans quelques unes
d’entre elles et que, jusqu’à un certain point, l’acquisition de compétences plus
« spécialisées » ne pendait pas complètement de la moindre capacité à en acquérir
ailleurs. Des élèves des sections technologiques sont particulièrement concernés par
cette question de l’hétérogénéité des acquis scolaires. Certains profils de « littéraires »
le sont également. De fait, il existe bien une dimension largement différentielle dans
l’expression des « opérations mentales », au sens large, et donc la mise en œuvre des
conduites adaptatives appliquées aux situations scolaires.
Pour autant le professeur peut maintenir la même forme de raisonnement
pragmatique évoqué précédemment, renvoyant les difficultés partielles à des
dysfonctionnements « locaux » susceptibles d’entraver certains aspects de l’expression
complète et large des conduites adaptatives. La logique sous jacente, dans ce cas, est
plutôt celle du « manque »
7
dans la « panoplie » de l’expression cognitive du sujet.
Aussi, face aux difficultés rencontrées par les élèves, le professeur, au regard de
l’explication évoquée ci-dessus, de simple bon sens, sur la « solidarité » entre les
disciplines dans l’élaboration culturelle du sujet, ne sera pas, dans un premier temps tout
au moins, embarrassé dans les explications, donc la désignation des causes des
difficultés rencontrées. Si la « solidarité » joue horizontalement entre les disciplines,
elle joue verticalement pour chaque discipline et, bien sûr, au moins partiellement entre
les disciplines. C’est le cas des mathématiques au regard de la physique ou de la
technologie, par exemple. Un élève aura de mauvais résultats dans une discipline parce
5
Constitutifs des contenus d’enseignements et des « opérations mentales » acquises, au sens large ?
6
Tout comme les opinions assimilant un peu trop simplement précocité de maîtrise des contenus scolaires
et itinéraire brillant de l’adulte.
7
L’absence ou l’évocation incertaine d’un savoir, une faiblesse dans l’expression d’un savoir faire pas, ou
mal consolidé.
6
que les acquis antérieurs ne sont pas suffisants. « Cet élève, il lui manque des bases »
dira le professeur. Peut-on, en effet, mtriser la solution de probmes si l’on ne
maîtrise pas, préalablement et a minima, le sens des opérations, les techniques
permettant de pouvoir les faire, la lecture, à savoir la compréhension du langage écrit, le
sens des mots qu’ils soient strictement du domaine des mathématiques ou non, etc. Ce
constat amènera d’ailleurs le professeur à faire un pronostic de réussite ultérieur, dans la
discipline, plutôt pessimiste si les résultats actuels de l’élève sont faibles. En effet, le
professeur a en tête qu’à côté d’un « construit » qui s’élabore dans chaque discipline
nécessitant des acquisitions dans l’ensemble des domaines, il s’élabore un « construit »
contribuant également à l’efficacité actuelle de l’élève, s’appuyant sur les notions
acquises antérieurement dans le cursus scolaire de ce domaine et des autres.
Les acquis des élèves sont donc susceptibles de présenter des « lacunes ». Mais à
quoi peuvent bien tenir ces lacunes ? Bien des raisons
8
peuvent être évoquées par le
professeur y compris le fait de sinterroger sur des faillances pouvant venir des
enseignements antérieurs eux-mêmes
9
. Mais bien d’autres raisons peuvent tenir, pour le
professeur, au sujet lui-même, l’élève. Dans les conceptions, avancées, les plus
classiques, l’élève est paresseux et donc sa réussite dépend de lui, pour les conceptions
les plus « modernistes » il manquera de motivationA charge pour le professeur, dans
ce dernier cas, de trouver ce qui pourra être susceptible de mobiliser des élèves
désintéressés à un moment donné ou plus durablement. Mais tout ceci ne permettra pas
nécessairement de résoudre le problème de l’efficacité des apprentissages des élèves.
Bien des phénomènes observés dans l’expression de l’efficacité des conduites
adaptatives, ne manqueront pas de surprendre un professeur ne cherchant pas à tout pris
à donner son opinion, voire à évoquer une explication, explication d’autant plus facile à
proposer qu’il serait difficile, même pour un chercheur, d’en faire la preuve... Des
élèves maîtrisant les contenus antérieurs peuvent cependant échouer. D’autres semblant
présenter des lacunes au départ, « peiner » en mathématiques, tout à coup, se mettent à
réussir sans que des explications simples puissent être avancées. Des élèves réussissent
à propos de questions traitées, complexes, et échouent sur d’autres construites sur des
bases de raisonnement paraissant moins complexes, sans pour autant que l’on puisse
évoquer des causes possibles évidentes, telles que l’étourderie, etc. Des sujets semblent
avoir des acquis fragiles sur certaines dimensions mais pour autant réussissent des
exercices supposés nécessiter la bonne maîtrise de ces dimensions. Des acquis ou une
aisance spontanée de l’élève dans l’expression d’un domaine de compétence en
mathématiques paraissent difficilement explicables par la simple expression de
l’intégration et de la maîtrise des enseignements antérieurs selon une conception trop
étroitement rationnelle. L’expression soudaine de compétences ou de difficultés dans le
cursus de mathématiques peut, in fine, ne pas avoir d’explications rationnelles simples
ou évidentes. L’excellence de performances dans un domaine donné peut être associée à
des difficultés importantes dans un autre et le meilleur élève dans une discipline peut
aussi être un élève en difficulté, parfois accentuée, dans une autre
10
.
8
Par exemple, ce même professeur pourra exprimer l’appréciation selon laquelle « l’élève manque de
« bases » parce qu’il n’a pas travaillé ».
9
Cf. la problématique relationnelle difficile entre enseignants de classe de CM2 et enseignants de classe
de 6
ème
10
Peuvent être évoqués, ici, à ce sujet : le cas, de chercheurs de haut niveau en physique atomique, celui
de médecins et de bien d’autres ayant poursuivi brillamment des études, mais désespérément « fâchés »
avec l’orthographe …
7
Enfin, au-delà de catégories de problèmes plus ou moins directement liés aux
connaissances acquises, il existe des problèmes dont la recherche de solution nécessite
une approche utilisant les acquis de manière entièrement originale ou des problèmes
entièrement nouveaux relevant de configurations « inattendues » impvues donc
imprévisibles, originales, et dont la solution ne relève pas des connaissances et des
modes de résolutions plus classiques. La résolution de ces problèmes peut même être
susceptible, dans le cadre de la recherche dans la discipline considérée, de remettre en
cause des bases conceptuelles du domaine d’étude considéré.
Restent donc largement ouvertes les questions suivantes : qu’est ce qui fait qu’un
élève acquiert aisément des connaissances et d’autres pas ? Qu’est ce qui fait que
certains trouvent, à connaissance égale, les solutions des problèmes de mathématiques
posés et d’autres pas ? Etc.
Une chose est de réaliser différents constats dans la classe, d’émettre, de manière
pragmatique, quelques explications et de tenter, à partir de là, de faire évoluer la
situation, une autre est de comprendre précisément quelles sont toutes les ressources
dont dispose la personne, sous toutes leurs formes, qui permettront de « construire »
efficacement ces échafaudages constitutifs des savoirs et plus largement de la culture
humaine. Car à un moment donné du problème posé toutes ces perspectives d’analyse,
associant, de manière variable, les modèles théoriques des acquis scolaires eux-mêmes,
volent en éclat au regard des observations faites « à la surface » de la situation scolaire.
Cette observation de surface, s’abstrayant de modèles reconnus alors comme peu
efficaces pour traiter des observables, va amener le professeur à se poser des questions
ouvertes, au-delà des réponses toutes faites, réponses susceptibles de renouveler, donc
d’approfondir la compréhension des phénomènes observés : comme, par exemple, celle
de l’expression plus ou moins spontanée de l’aisance ou de la difficulté, bien réelle, à
faire acquérir, au plus grand nombre, les connaissances dans le domaine considéré.
Dans ce cas le professeur n’a pas de cadre théorique à sa disposition et se place
dans une perspective totalement « externe », périphérique, empirique, ouverte,
susceptible de produire des observations entre lesquelles sorganiseront des
rapprochements permettant de produire des hypothèses explicatives, des inférences,
afin d’élaborer des conceptions originales, voire entrement nouvelles, susceptibles
d’enrichir ou de compléter les modèles antérieurs ou de renouveler complètement les
bases conceptuelles des modèles antérieurement élaborés.
1.1.3. En résumé
Le professeur ne manque pas doutils, de « théories » de « modèles » à sa
disposition, pertinents jusqu’à un certain point, pour traiter des difficultés que les élèves
rencontrent. Il peut puiser, de plus en plus, maintenant, et dans un avenir proche, dans
les domaines constitutifs de sa professionnalité en développement et donc, pour partie
en devenir. Ces domaines sont : l’épistémologie, l’histoire et la didactique de sa
discipline. Ces dimensions traitent essentiellement, cependant, de cette discipline, là, de
sa genèse, des questions conceptuelles, méthodologiques, formelles qu’elle se pose et
des manières d’enseigner possibles afin que l’élève élabore des connaissances pour
traiter au mieux les utilisations qui en seront faites dans sa vie professionnelle et
personnelle. Ces manières d’enseigner devront traiter également de l’évolution de ces
8
connaissances et des concepts abordés dans le cursus ultérieur de formation et jusqu’à
l’élaboration pour certains, de recherche et donc la construction de nouvelles
connaissances dans la discipline considérée.
Mais les difficultés à intégrer la discipline considérée peuvent être inhérentes au sujet
lui-même et à son contexte de vie. Elle peut relever, cette difficulté, des obstacles aux
acquisitions disciplinaires qui peuvent surgir, pour lui. Il s’agit, là, de pointer
l’expression de la diversité des élèves
11
au regard de la « distance » variable,
personnelle, culturelle, sinstallant entre eux et les connaissances et savoir faire à
acquérir. Le professeur peut alors, à partir des observables, rechercher, élaborer, de
manière empirique, de nouveaux modèles et théories, ceci afin de répondre avec
davantage de pertinence aux questions qu’il se pose.
Il peut aussi se poser les questions autrement : Qu’est ce qui permet, ou pas, au sujet,
l’élève, de mémoriser des connaissances, de comprendre l’énoncé d’un problème,
d’émettre des hypothèses sur le ou les cadres conceptuels méthodologiques utiles pour
aborder les questions traitées, de choisir la perspective qui va permettre de traiter
efficacement du problème considéré, de saisir la manière de le traiter, d’organiser son
travail pour résoudre l’exercice posé, de faire venir à la conscience et d’utiliser les
connaissances utiles, de raisonner à partir de ces connaissances et agir de manière
ordonnée pour aboutir à la solution du problème, de rifier qu’il n’y a pas eu d’erreur
dans le calcul effectué, d’évaluer, de contrôler la pertinence du raisonnement et de la
solution trouvée (etc.) ?
Le professeur recherchera, alors, des réponses dans d’autres contextes, d’autres
domaines de connaissances que le sien, donc d’autres théories, d’autres modèles
élaborés « ailleurs ». C’est que les sciences humaines sont susceptibles d’intervenir,
et plus particulièrement, en ce qui concerne ce propos, la psychologie. Mais, avant cela
il convient de résumer à grands traits les observations que le professeur peut faire de
manière courante.
1.2. Les constats que peut faire le professeur de mathématiques
1.2.1. Variabilité et approche quantitative : la hiérarchisation
Il y a, tout d’abord, le constat des différences qui peut se regarder sous différentes
formes. En premier lieu, les élèves paraissent globalement réussir avec une efficacité,
une aisance, variable en mathématiques. Le professeur peut souhaiter les situer par un
indice synthétique, et, surtout, il peut les hiérarchiser au regard de leur ussite sur
l’ensemble des contenus de la discipline par le biais de scores (les notes scolaires)
portant sur des exercices auxquels sont soumis les élèves et faire la moyenne de ces
scores. Il peut aussi se situer, en termes de différences, en tenant compte du fait que la
réussite en mathématiques peut être associée à la réussite dans d’autres domaines
12
, donc
selon une autre forme de hiérarchisation construite sur la plus ou moins grande étendue
de l’efficacité scolaire. Enfin, les élèves peuvent être différenciés de manière
« hiérarchique », au regard de la variabilité de l’efficacité à réussir à l’école, par un
indicateur quantitatif, cette fois ci plus global, un score correspondant à la moyenne des
moyennes des scores obtenus par matière. Ce score plus global pouvait même être
associé, dans l’enseignement public, au classement général des élèves. Tout ceci, au
11
Mais aussi celle des professeurs entre eux…
12
Le français, les sciences, les langues, etc.
9
regard de faits, bien réels, constatés, marque le caractère hiérarchique du point de vue
choisi pour le traiter, c'est-à-dire celui du schéma mental qui préside à une telle
appréciation. C’est ce qui se passe, lorsque sont utilisés des bulletins scolaires, au moins
certaines formes, dans les évaluations traditionnelles, même si celles-ci sont
actuellement en cours d’évolution.
1.2.2. Du « variable » quantitatif au « variable » qualitatif
Mais pour une même moyenne générale de note, le professeur peut constater que des
élèves présentent des réussites variées dans les différentes matières. Rappelons ici, par
exemple, qu’un élève peut réussir brillamment en mathématiques, moins brillamment en
français et vice versa pour un autre. Ceci est vrai pour l’ensemble des matières. Mais
cela peut être également vrai à l’intérieur de chaque discipline. Comme cela a été
évoqué dans le point précédent, un élève peut mieux réussir sur les aspects
géométriques, un autre sur des questions relevant essentiellement du calcul, des
dimensions plus algébriques ou l’inverse. Les différences ne sont plus, alors, vraiment
quantitatives, globales, synthétiques, ni strictement hiérarchiques, elles sont davantage
qualitatives et prennent, pour les élèves, la forme de profils suggérant des perspectives
plus analytiques.
1.2.3. Le point de vue « implicatif » ?
Cependant, malgré tout, le professeur constatera qu’il existe bien, concrètement, une
propension à « co-réussir » ou à « co-échouer », variable dans sa discipline et dans les
différentes disciplines, pour une part variable d’élèves. Dans l’expérience du professeur
cela peut constituer une observation banale puisque les savoirs et savoir faire sont plus
ou moins intégrés entre des disciplines : à savoir, il faut maîtriser du français pour
réussir en mathématiques, maîtriser des mathématiques pour réussir en science, etc.
Comme cela a été vu dans le point précédent, cette co-variation, peut être renvoyée à
l’implication observée dans l’emboîtement des savoirs. Du type : « si l’élève réussit les
problèmes de mathématiques alors, il maîtrise à minima la lecture, la compréhension
de texte, « faire des opérations » et le sens de celles-ci, etc. »
1.2.4. Et, réussite et précocité…
Il observera enfin que cette propension à la co-variation est associée à la question de
l’avance/retard des élèves. A savoir : un élève qui a une propension à réussir
globalement à l’école sera plutôt (mais, bien sûr, pas systématiquement) un élève
également « à l’heure » ou « en avance » au regard de son cursus scolaire alors que
celui qui a une propension à échouer sera plutôt un élève présentant un certain «
retard » au regard de ce même cursus.
Mais tout ceci, encore une fois, ne dit rien sur : « comment » ces apprentissages se
font, laissent des traces, sassocient ou interfèrent avec d’autres traces, permettent
l’expression de raisonnements nouveaux, de nouvelles perspectives pour la discipline,
bref, interagissent, se structurent pour le sujet.
10
2. Le recours à la psychologie et ce qui s’en déduit
Il y aurait donc, selon cette nouvelle perspective, des interprétations propres au
domaine disciplinaire considéré mais il y aurait aussi des interprétations, susceptibles
d’être pertinentes, relevant d’autres domaines de la connaissance. Cela amène à un
changement de domaine, mais aussi à des changements point de vue, ou, tout au moins,
à des déplacements au regard de l’objet d’investigation.
Il ne s’agit plus de traiter de l’acquisition des connaissances et de sa structuration, de
manière abstraite et détachée du sujet
13
qui acquiert ces connaissances, mais de se
centrer sur lui et la manière dont il les acquiert. L’observateur de ce changement de
registre peut penser que les questions et les problématiques évoquées ci-dessus sont sans
objet parce que le nouveau cadre va totalement les renouveler. D’un certain point de
vue, en particulier au regard de l’histoire de la nouvelle discipline retenue ici, la
psychologie, cela est vrai ; d’un autre point de vue, il n’en est rien. Car si l’objet de
recherche et les contenus sont différents, pour autant les démarches intellectuelles des
professionnels de ce domaine n’ont pas été nécessairement différentes, dans un premier
temps, au regard de l’histoire de cette discipline et de son évolution. Simplement, des
outils mathématiques particuliers viennent au secours du chercheur ceci afin de l’aider à
ordonner ses données selon les schémas mentaux d’analyse qui lui paraissent être les
plus pertinents.
2.1. La situation observée par le psychologue
Tel qu’évoqué au point précédent, le professeur de mathématiques peut se placer,
dans le cadre d’une analyse didactique rigoureuse, à l’interne de la réflexion portant sur
sa discipline, ou dans le cadre, plus pragmatique, plus externe, plus périphérique, de la
« compréhension » empirique de ce qui fait la variabilité de l’efficacité des conduites
adaptives de l’élève dans sa discipline.
Pour le psychologue, l’investigation, peut se faire également de deux manières. Elle
peut se faire, par « l’interne », c'est-à-dire par la compréhension des capacités
cognitives clairement analysables dans la compétence exprimée selon le modèle
théorique choisi. Elle peut se faire, par « l’externe », à la périphérie, c'est-à-dire par
l’expression de performances dont témoigne le sujet sans que le psychologue puisse
présenter, pour autant, un modèle clair et complet d’analyse psychologique de la
situation traitée.
A l’interne, il est considéré, tout au moins dans un cadre scientifique classique, que
le processus psychologique de résolution du problème traité est, sur le plan rationnel,
parfaitement explicité ou explicitable
14
. Le travail du psychologue consiste donc, dans
l’analyse du processus mis en œuvre, à cerner le dysfonctionnement d’un des éléments
du processus qui amène à la difficulté rencontrée par le sujet sur la question traitée.
13
Donc pas seulement par le « quantitatif » mais aussi par l’analyse, du point vue de la structure des
connaissances disciplinaires, et effectuée par un autre sujet, différent de chacun des élèves : le professeur.
14
Ce qui n’est pas assuré au regard des investigations, des recherches et des débats actuels entre les
différents courants de pensée de ce domaine, voire des confrontations de conceptions à l’interne du
domaine entre des conceptions référent, par exemple, à la psychologie expérimentale (dont la
neuropsychologie), la psychologie cognitive et la psychologie clinique ( les courants de pensée de la
psychologie dite « dynamique »), ou au regard des conceptions d’autres domaines des sciences humaines
(anthropologie, sociologie, etc.).
11
Seront rapportées, ici, brièvement, des conceptions relativement « récentes », c’est à
dire celles partant globalement du milieu du 20
e
siècle jusqu’à aujourd’hui.
Seront évoquées dans ce cadre, des conceptions relevant du structuralisme, comme
les conceptions opératoires, inscrites dans la logique, du développement de
l’intelligence
15
, du cognitivisme, en particulier du courant fonctionnaliste,
16
des
conceptions relevant du traitement de l’information
17
, des aspects relevant de l’approche
des neurosciences
18
, enfin des approches de ces questions relevant de la génétique dans
des conceptions déjà anciennes ou plus récentes
19
.
Les conceptions relevant d’une approche externe, partant de la périphérie du
fonctionnement cognitif renvoient, elles, à des courants de pensée allant des conceptions
psychométriques de la fin du 19
e
début du 20
e
siècle, à l’approche par la mesure de
l’expression des compétences sous forme de performances du sujet et aux conceptions
factorialistes de l’intelligence
20
.
Mais la situation observée par le psychologue, si elle peut ressembler à celle du
professeur de mathématiques, par certains aspects, en diffère par dautres et
principalement au regard des contenus traités. A l’externe du sujet, par exemple, le
psychologue considère l’ensemble des conduites, que ces conduites réfèrent à l’école ou
non. Celles-ci peuvent relever, pour le sujet, de la sphère cognitive, de l’efficacité
adaptative ou non. Il peut être question de sa personnalité, de ses intérêts, de ses valeurs,
etc. Le domaine du chercheur, en psychologie, est donc très vaste. Il embrasse
l’ensemble des conduites, rationnelles, non rationnelles, relevant de normes ou non,
développées individuellement ou en interaction avec d’autres, dans des groupes, des
institutions, et, plus largement, dans une société donnée ou dans différentes sociétés aux
conceptions culturelles variées. Cela peut modifier, à chaque fois, et pour chacun des
plans considérés, la vision globale que le psychologue a sur son objet de travail : les
conduites du sujet. Les observables s’inscrivent, donc, de fait, moins facilement que
pour le professeur de mathématiques dans un ensemble cohérent, notamment un
ensemble intégde connaissances dont certaines seraient nécessaires à d’autres pour
apparaître. Mais alors, pour le psychologue, comment cela « s’organise » t’il ?
Lorsque l’approche se fait par l’interne, l’analyse des conduites porte plus sur les
fonctions mises en œuvre que sur les contenus traités. Les contenus pris en compte le
sont en vue d’évaluer les fonctions mises en œuvre, telles que, par exemple, la mémoire,
l’attention, les représentations mentales, le raisonnement, le contrôle de l’activité
développée par le sujet, etc. Le psychologue peut avoir un modèle au regard duquel les
fonctions s’organisent entre elles afin de permettre l’expression efficace des conduites
adaptatives. Il peut avancer
21
un raisonnement du type : « si l’élève réussit dans tel ou
tel raisonnement alors, il maîtrise à minima tel ou tel opérateur logique, donc une
15
Piaget, « Essais de logique opératoire », voir, notamment le document 4 b.
16
Richard, Les activités mentales, comprendre, raisonner, trouver des solutions.
17
L’ensemble des tâches cognitives seraient ramenées à du traitement de l’information par le cerveau en
faisant, ou pas, l’analogie avec ce que peut faire un ordinateur conçu avec des logiciels relevant du
domaine de « l’intelligence artificielle ». Lautrey & Chartier, « Images mentales de transformations et
opérations cognitives ».
18
Houdé et al., Cerveau et psychologie.
19
Roubertoux, Existe-t-il des gènes du comportement ?.
20
Facteurs communs à plusieurs épreuves de performances cognitives et plus ou moins indépendants
d’autres facteurs correspondant à d’autres performances cognitives. Longeot, Psychologie différentielle et
théorie opératoire de l'intelligence, et Les stades opératoires de Piaget et les facteurs de l'intelligence ;
Martin, La mesure de l’esprit…. ; Huteau &Lautrey, Evaluer l’intelligence….
21
Comme le professeur peut le faire par rapport aux contenus de ses enseignements.
12
certaine maîtrise du langage, des ressources attentionnelles, des capacités de contrôle
de l’activité développée, etc. »
Mais, comme pour le professeur de mathématiques, le psychologue n’a pas de lecture
directe des processus réellement mis en œuvre de manière « ingrée » à savoir les
compétences et sous compétences qui les constituent. Que ce soit avec ou sans modèle
préétabli, il devra, pour établir la présence de ces compétences, faire que s’expriment
des performances sous forme de scores obtenus à des épreuves proposées.
2.2. Les constats que peut faire le psychologue
Dans le domaine particulier de la psychologie cognitive, celui retenu plus
spécialement ici, le psychologue est amené à faire des constatations similaires au
professeur de mathématiques. A savoir que lorsque sont présentées des activités
extrêmement diverses concernant l’expression cognitive sous des formes et des
contenus multiples et variés, plus larges que ceux relevant de l’activité scolaire, il peut
être établi, pour un groupe de sujets, des scores par dimension considérée et, sur
chacune d’elle, il peut être établi un classement hiérarchique des sujets du groupe en
fonction du score réalisé par chacun des sujets sur cette dimension. Comme il peut être
établi une distance de chacun des sujets du groupe à la moyenne des performances
obtenues par l’ensemble des sujets du groupe considéré. Il peut également être établi un
score global correspondant à la moyenne des scores obtenus sur les différentes
dimensions considérées par chaque sujet. Ce score global peut être traide la même
façon que lorsqu’il s’agit d’une seule dimension (voir ci-dessus), c'est-à-dire en terme
hiérarchique ou de distance à la moyenne du groupe. Ceci permet d’avoir un indicateur
global et synthétique de performances d’efficacité cognitive que l’on peut
éventuellement référencer également à l’âge du sujet (QI). Ce rapport à l’âge peut être,
lui aussi, intégré à un classement hiérarchique des sujets ou à l’estimation d’une
distance à la moyenne du groupe de référence.
Mais l’amalgame des scores considérés met en avant un assemblage hétéroclite
22
qui
ne peut avoir d’autre sens que celui de restituer un indice quantitatif unique intégrant,
ici, qui plus est, la notion d’avance et de retard. Cependant, comme pour les contenus
scolaires une autre approche différentielle peut être faite, plus qualitative. Les
différences de performances sur chaque dimension sont variées et variables d’un sujet à
un autre et le même score global peut renvoyer à un éventail des scores différents pour
chaque sujet. L’absence de difrenciation hiérarchique se traduira alors par des
différences en termes de profils de performances.
Mais le psychologue, pour justifier de la pertinence de son approche et prétendre à la
possibilité d’aider le professeur de mathématiques, voudra faire état, au-delà des
considérations de mesure pour elles-mêmes, de sa capacité de diagnostic au regard de la
validité des dimensions qu’il met en œuvre. Dans cette perspective, les scores établis
doivent pouvoir être mis en relation avec des performances cognitives larges et
notamment l’efficacité scolaire. A partir de là, il restera, ensuite, au psychologue à
tenter de faire la preuve de sa capacité pronostique. Mais, pour permettre cela, a
minima, des conditions méthodologiques doivent être remplie. Il lui faudra présenter des
22
Reconstruire une image abstraite à partir de cubes tous identiques, donner la définition de mots,
assembler des images pour reconstituer une histoire, etc.
13
scores qui, en l’absence d’apprentissage ou d’entraînement en vue de l’amélioration des
performances, sont peu susceptible de fluctuer d’une mesure à l’autre, d’une passation
de l’épreuve à une autre passation. Dans ce cas, ce qui est visé, c’est la fidélité de la
mesure. Car, de la fiabilité
23
de la mesure dépendra aussi la validité de son rapport à la
réussite, et ici, plus particulièrement, à la réussite scolaire. Enfin les mesures effectuées
doivent pouvoir permettre, par l’analyse à laquelle elles sont associées, une meilleure
compréhension des raisons qui font que s’exprime, ou pas, une certaine efficacité des
conduites adaptatives. Dans ce cas, l’analyse des données permet de développer, mais, a
posteriori, un modèle interprétatif susceptible d’être pertinent et dont la conception, au
regard des performances réalisées est susceptible d’être mis en rapport avec l’efficacité
scolaire.
Dans cette perspective, le psychologue observe bien, alors, la propension à retrouver
une mesure similaire
24
après la répétition de cette mesure puisque cette propension est
recherchée. Le psychologue va retrouver également, à côté de l’aspect différentiel
qualitatif évoqué au sujet de la question des profils, une propension à la co-variation
25
.
Et cette co-variation s’étend, y compris par construction au regard de la question de la
validité, aux dimensions de l’efficacité scolaire. Il va également observer que des
performances ou des maîtrises de capacités du sujet en précèdent d’autres. Peut-il pour
autant mettre en évidence une relation implicative entre les dimensions considérées ?
Pas nécessairement.
Mais, et ceci est un point très important, comme évoqué dans le paragraphe ci-
dessus, les observations sont « composites ». On observe donc la tendance différentielle
entre : indépendance des performances réalisées par certains sujets et tendance à la co-
variation de ces mes performances pour dautres sujets, tel que, par exemple,
présenté dans les documents ci-dessous
26
.
1
2
3
4
5
6
7
QIV
QINV
LE
EM
D/I
Cofr
Coma
LO
MO
SOP
Epreuves proposées
Document 1-a : profil hétérogène de performances
23
Fidélité mais aussi pertinence au regard de l’objectif du diagnostic/pronostic : la plus ou moins grande
efficacité exprimée par l’élève dans ses résultats scolaires - voir précédemment dans le texte -.
24
Au regard d’un groupe de référence, par exemple.
25
Est-ce uniquement par modalités de construction plus ou moins comparables des épreuves, donc aussi
par construction ?
26
Pellois, « Contrainte et liberté du sujet … », p. 207.
14
Document 1-b : profil homogène de performances (co-variation)
Document 1. Variations interindividuelles différentielles des profils de performances
Les méthodes d’analyse statistique dites « factorielles » ont été veloppées afin de
rendre compte des différentes options de traitement choisies par les psychologues de ces
deux faits associés. Les uns sont partisans d’une intelligence générale d’autres de
l’aspect différentiel de l’intelligence voire de l’expression des intelligences. Ils en
recherchent tous l’expression au travers de la communauté et des variations traitées au
plan statistique. Suivant la méthode statistique choisie, soit le facteur général, soit des
facteurs plus spécifiques sont mis en avant (voir les documents
27
ci-dessous). Aucune
des différentes écoles ne peut, à ce jour, trancher clairement à propos de cette réali
mixte.
27
Huteau & Lautrey, Evaluer l’intelligence…., p. 289.
6
6
6
5
5
5
6
6
5
5
7
1
2
3
4
5
6
7
QI
V
QIN
V
S
P
L
E
E
M
D/I
Cof
r
Coma
L
O
M
O
SO
P
Epreuves proposées
15
Document 2-a
Tableau 11 a Tableau 11 b Tableau 11 c
Facteurs principaux Rotation orthogonale Rotation oblique
FI F2 F'1 F'2 F"1 F" 2
VI .87 .50 VI .26 .96 VI -.08 .82
V2 .94 .34 V2 .42 .91 V2 .08 .70
PI .94 -.34 PI .91 .42 PI .70 .08
P2 .87 -.50 P2 .96 .26 P2 .82 -.08
Tableau 11. - Tableaux des saturations des quatre tests V1,V2, P1, et P2
par les deux facteurs, pour chacune des trois solutions factorielles
Document 2-b
Document 2. L’analyse factorielle en fonction du choix du modèle.
Huteau & Lautrey, Evaluer l’intelligence, psychométrie cognitive, p. 289.
La synthèse la plus élaborée des différentes positions défendues est présentée sous la
forme d’un modèle dit « modèle hiérarchique », constitué de quatre étages. Il existerait
16
bien, tel que présenté dans le document
28
ci-dessous, un facteur général, des facteurs de
groupe large, des facteurs de groupe plus restreints, et enfin une part de variance
relevant d’un facteur spécifique à chaque épreuve de mesure d’une performance
considérée.
Document 3. Modèle hiérarchique issu de la synthèse des études factorielles des capacités cognitives.
En ce qui concerne la « précédence », son interprétation en termes implicatifs pose
question en fonction de la grande hétérogénéité des dimensions retenues et de l’absence
de modèle a priori, comme en ce qui concerne l’analyse factorielle. Quand un modèle
existe
29
, induisant la dimension implicative, celle-ci est discutable du fait du caractère
très formel, voire l’expression, dans les faits, du caractère « implicatif » peu
vraisemblable derrière la situation de « pdence », ou, s’il est vraisemblable car
s’appuyant sur la logique, potentiellement réducteur donc partiel au regard des
28
Par exemple, sur contenus verbo-scolaire
28
ou référent à l’intelligence cristallisée, ou bien spatio-
représentatif
28
ou référent au domaine visio spatial (Cf. Longeot, Psychologie différentielle et théorie
opératoire de l'intelligence, p. 167, ou tel que présenté dans le document 3 ci-dessus, Huteau & Lautrey,
Evaluer l’intelligence…, p. 146).
29
Par exemple, les conceptions opératoires piagétiennes ou des modèles récents de l’organisation
générale des processus mnésiques.
17
observations psychologiques effectivement réalisées. Les deux perspectives sont
illustrées par les exemples présentés dans le document ci-dessous
30
.
Un développement «jalon» : A précède B
Montrer
nez, œil,
bouche
Copie
du
carré
Distinguer
matin,
après-midi,
soir
Copie du
losange
Donner
la date
du jour
etc. jalonsx xx x x
5 ans3 ans 6 ans 7 ans4 ans0 temps
(Cf. F. Longeot, 1978)
Document (a) : précédence sans nécessairement implication
GROUPEMENTS DE CLASSES
Emboîtements de classes
Vicariance
Multiplication co -univoque de cl.
Multiplication biunivoque de cl.
Généralisation des opérations de cl.
GROUPEMENTS DE RELATIONS
Addition de relations symétriques
Addition de relations asymétriques
Multiplication co -univoque de rel.
Multiplication biunivoque de rel.
Généralisation des opérations de rel.
Combinaisons Permutations
Capacités à développer une
combinatoire élargie
Combinaison des 16 propositions de
la logique propositionnelle binaire
Logique propositionnelle binaire
Groupes de quaternalité (inter -
structurations partielles)
Groupe INRC
Raisonnement hypothético -déductif
Pensée formelle (mobilité complète,
double réversibilité, etc.)
(Schéma simplifié du développement opératoire selon J. L. Laroche, 1966)
Collections figurales (?)
Comparaisons partielles (?)
2 à 2 (grandeurs, grosseurs, etc.)
Document 4-b : précédence associée à une construction implicative rationnelle de la structuration
des capacités cognitives selon le modèle opératoire du développement proposé par J. Piaget
Document 4. Situations de précédence et caractère implicatif
30
Longeot, Psychologie différentielle et théorie opératoire de l'intelligence, p. 62 ; Pellois, « Complexité
et développement : reconnaître l’émergence ... », p. 53, d’après J. L. Laroche, 1966.
18
Il n’y a pas, ici, comme dans le domaine des apprentissages disciplinaires, dans
l’exemple évoqué des mathématiques, l’architecture des connaissances qui se pose, en
termes d’explication, de signification, de la relation implicative comme une évidence
liée à la structure même des contenus, univoque par nécessité conceptuelle. Le rapport
entre les contenus hétérogènes traités plus largement par les psychologues
31
ne permet
pas souvent d’inférer de manière évidente comme pour les mathématiques, une
quelconque « nécessité » d’une maîtrise préalable d’un contenu pour traiter du contenu
suivant
32
. Et même lorsque le modèle rationnel d’interprétation des conduites paraît très
organisé
33
et rejoint cette impression d’évidence que donne au moins dans une vision
large des apparences, l’analyse structurée de l’acquisition des savoirs en mathématiques,
le résultat des analyses expérimentales laissent place à l’interrogation, tel qu’évoqué par
les documents ci-dessous
34
.
Document 5. Schéma rationnel hypothétique sensé décrire le traitement d’une tâche cognitive
31
Savoir copier une figure géométrique, dire l’heure, connaître les différentes saisons de l’année, marcher
en équilibre sur une poutre, nommer en regardant l’image du visage d’une personne le sentiment qu’elle
ressent, etc.
32
Comme, par exemple, en mathématiques : maîtriser la compréhension du langage écrit, savoir faire des
opérations et maîtriser le sens des opérations sont nécessaires pour résoudre un problème de
mathématiques.
33
Psychologie cognitive fonctionnelle, courant dit du « traitement de l’information » (paradigme TI).
34
Cf. par exemple, les documents ci-dessous, Huteau & Lautrey, Evaluer l’intelligence…., p. 220 et 216.
19
Document 6.
Observation de la répartition du temps de traitement en fonction des différentes composantes décrites
dans le document 5. Interrogation quant à la durée importante et à la nature des tâches réalisées par le
sujet dans la partie du temps « constante ».
3. Des contraintes aux parts de liberté : problèmes posés par les cadres conceptuels
de la psychologie et les molisations de traitement de dones qu’elle utilise ;
ouvertures possibles.
Il s’agit maintenant, dans cette partie, prenant appui sur les deux précédentes, de
traiter progressivement des cadres conceptuels et de l’ouverture possible au regard de la
complexité que l’on peut tenter d’aborder dans le cadre des sciences humaines et de
leurs évolutions.
3.1. Les modèles déterminent des formes potentiellement « réductrices » de
contraintes « ajoutées » et donc artificielles dans le traitement des données et leur
analyse
Ne seront évoqués ici brièvement, à titre d’illustration, que quelques uns des cadres
« modélisateurs » susceptibles de réduire le regard sur le réel effectivement étudié.
Nous avons vu à propos de l’analyse factorielle, que suivant ses convictions, le
psychologue utilisera certaines formes de traitement mathématiques de données, un
20
certain positionnement des axes d’assimilation des données privilégiant une position
plutôt qu’une autre. Un autre psychologue, aux convictions différentes, utilisera un autre
positionnement des axes (Cf. Documents -2- a, b inséré précédemment dans le texte).
Le psychologue différentialiste utilise un outil habituel de présentation des
différences de performances entre les sujets
35
la courbe de Gauss (Cf. Document -7- ci
dessous). Pour favoriser cette forme lui permettant d’appliquer certains traitements
mathématiques, il recherchera même dans la construction de ses épreuves, à éliminer
certains items, à en proposer d’autres. Cette courbe en vient ainsi à définir une norme de
distribution des données
36
auquel le psychologue va se référer le plus habituellement.
Cette position renvoie, notamment, à l’histoire de cette psychologie et le point de vue
évolutionniste
37
. La distribution des données peut prendre, cependant, de toutes autres
formes et caractériser de façon différente
38
les situations observées. Pour autant, ces
observations de distributions différentes ne sont pas toujours prises en compte par le
psychologue.
Document 7. Exemple d’utilisation de la courbe de Gauss, ceci afin de faire état
de la distribution des performances pour un groupe de sujets différents et de la distribution d’un
groupe de performances potentielles estimées, ou réalisées à partir de mesures effectives, pour un même
sujet (performances assimilées à la « variance d’erreur »)
Par le choix fait de cette assimilation prépondérante à une courbe donnée, la position
du psychologue a pu, ainsi, dans le passé, peut encore actuellement, être considérée
comme ductrice de la réalité, ici psychologique, observée. Plus largement, les
conceptions trop strictement « développementales » ou « progressistes » utilisées en
psychologie peuvent relever d’approches évolutionnistes étroites, potentiellement
35
Donc interindividuelle, ou pour un même sujet, intra individuelle.
36
Présentant quelques sujets caractérisés par leurs performances aux extrêmes et de nombreux sujets en
position centrale de scores « moyens ».
37
Une certaine forme de darwinisme appliqué à la psychologie.
38
Courbe en I courbe en J, bimodale, linéaire sans pente, avec pente, avec effet palier, ou seuil, complexe,
sans forme aisément assimilable à une modélisation mathématique, etc.
21
réductrices qui font problème y compris au regard des conceptions actuelles portant sur
cette question de l’évolution
39
.
La psychologie scientifique, et tout spécialement la psychologie appliquée qui en
découle, peut être prise dans une logique de recherche « utilitaire ». Cela peut apparaître
sous la forme, par exemple, d’un pronostic à partir de mesures qu’elle établit. Sont alors
recherchées des parts de variance expliquées au regard d’une situation future, mais pour
que cela puisse se faire, comme cela a déjà été dit, la mesure doit être valide et donc, en
premier lieu, fidèle. C'est-à-dire quune certaine cohérence interne et externe, une
certaine homogénéité doit exister et une reproduction à l’identique de la mesure doit
pouvoir se faire. Des coefficients statistiques sont calculés. Mais pour que la mesure
puisse être valide ou fidèle, certaines manipulations, par exemple, sont faites sur l’outil
de mesure (homogénéisation) et le traitement de la mesure (étalonnages, etc.),
permettant ainsi de réduire les fluctuations de la mesure donc, potentiellement, une part
du réel observé. De même, cette vision « utilitariste », dans l’approche rationnelle
fonctionnaliste peut renvoyer les temps d’activité non expliqués par le modèle du
fonctionnement cognitif choisi à une part de l’expression concomitante du sujet
« gratuite » et sans rapport avec le fonctionnement cognitif « expliq», voire à une
expression « parasite ». Ce point de vue peut d’ailleurs renvoyer à des positions
comparablesférant aux travaux et à l’histoire de la génétique moderne
40
. Une
approche plus prudente de cette question serait à envisager en psychologie, ceci en
référence aux conceptions de la biologie et des neurosciences qui ont longtemps
minimisé, à tort semble-il, dans l’approche fonctionnelle du cerveau le rôle de cellules
autres que les cellules nerveuses, comme les cellules gliales. De la même façon, le
ciblage de certaines conduites (pensée convergente) jugées comme pertinentes et
essentielles au regard d’autres dans le contexte adaptatif du sujet amène à réduire le
champ d’investigation de la variabilité et donc à majorer le poids des dimensions prises
en compte, dans les modèles de décomposition de la variance expliquée, au regard des
outils réducteurs utilisés dans la prise d’information.
Il s’agit d’une logique circulaire redoutable, au regard des phénomènes observés. En
psychologie générale sont recherchées les grandes tendances susceptibles de rendre
compte d’un phénomène. Sont alors calculés des coefficients
41
. Pour valider le modèle
proposé, la tendance est souvent de renvoyer les parts de mesure non concordantes à
« l’erreur de mesure ». Et donc d’une certaine manière, se trouvent être éliminé
purement et simplement tout évènement n’entrant pas dans le cadre du modèle général
vérifié par la tendance « majoritaire » observée.
Par ailleurs, et c’est cela va être aussi évoqué ci-dessous, les constatations et les
conceptions courantes tant ordinaires que plus techniques ne sont pas sans poser
également question sous plusieurs aspects.
3.2. Des observations qui posent question à la modélisation notamment sur ses
aspects quantitatifs et globaux
39
Reuchlin, Totalités, éléments, structures en psychologie, par exemple, p. 278 ; Langaney, La
philosophie biologique, par exemple p. 96 et suivantes ; Gould, La structure de la théorie de l’évolution,
par exemple, p.524.
40
Par exemple, le rôle fonctionnel longtemps passé sous silence ou négligé de l’ADN mitochondrial au
regard de l’ADN cellulaire.
41
Corrélation, régression, implication, etc.
22
L’expression des différences sur le plan des profils de performance, et non pas par
une échelle hiérarchique univoque du constat dune performance globale variable,
relève davantage de la dimension qualitative. Cette présentation différentielle, sous
forme d’un profil de performances variées, oriente alors l’interprétation vers des
modèles qui référent à des configurations donc renvoient à une forme d’organisation
globale du sujet au regard des conduites adaptatives à mobiliser. Elle donne du sens à la
singularité différentielle, par rapport au général, à luniversel. Elle fait passer la
recherche de la position référant au « plus ou moins efficace » à la question « sous
quelle forme cette efficacité s’exprime ? ». Ce qui peut permettre d’aborder
ultérieurement dans une approche plus fonctionnelle le « comment ? ».
Le caractère systématiquement partiel des résultats (des parts de variance résiduelles
apparaissent le plus souvent), au regard des variables considérées
42
, renvoie à la
complexité des situations, des contextes, à la multiplicité des facteurs possibles dans un
jeu d’interactions fonctionnelles qui va, actuellement, bien au-delà des capacités
d’analyse et de modélisation formelle en vue de rendre compte des données, donc des
outils mathématiques à disposition. La complexité, non seulement de l’intrication
interactive des variables, mais très vraisemblablement de la dimension conceptuelle non
réductrice du « réel » de ces interactions, ou des configurations auxquelles elles
aboutissent
43
, se traduit, en l’état des recherches, sous cette forme conjointe, déjà
évoquée, paradoxale, à la fois de la dépendance et de l’indépendance des variables entre
elles. Ceci traduit bien le caractère partiel de l’une et de l’autre de ces deux dimensions.
Les parts « non expliquées
44
» de variance renvoient à une partie de ce même
phénomène d’une variabilité que l’on néglige en l’assimilant à des marges d’erreur de la
mesure dans les modèles a posteriori, ou, dans les modèles a priori, à des temps sans
justification en terme d’efficacité cognitive au sens strict
45
, et donc des temps
susceptibles d’être assimilés à des fonctionnements indépendants, voire « parasite », du
problème traité.
Dans le même ordre d’idée, il se présente souvent, dans la distribution des données, à
côté d’une possible co-variation, ou une certaine « précédence » entre les variables,
précédence susceptibles de traduire une possible implication, des cas « aux marges » ne
s’inscrivant pas dans les grandes tendances majoritaires, voire s’inscrivant dans une
tendance opposée ou nettement « originale » du point de vue des modèles soumis à des
études confirmatoires.
Ceci permet de dégager des parts de liberté, des conceptions différentielles, la
vicariance
46
:
- des formes d’expression dans une typologie « sur profil » associée à une
modélisation en termes de structure, de configuration, plus ou moins fonctionnelles,
- et/ou des parcours d’évolution et de développement organisationnel de ces
modélisations fonctionnelles.
42
Par exemple, ceux donnés par les calculs de régression, d’analyse de variance, de corrélation, etc.
43
La question posée par la « qualité » ou les « états ».
44
Part de variance résiduelle dans les analyses statistiques (ACP, LISREL, etc.).
45
Cas de la rationalité développée dans des modèles fonctionnels classiques (séquentiels successifs), ou
plus récents (parallèles, simultanés).
46
A savoir, une certaine possibilité : de suppléance d’un système (d’une structure) par un autre système
(une autre structure), donc de fonctionnement alternatif.
23
Enfin, malgré les efforts de construction de systèmes de mesure fidèles, les données
recueillies présentent, le plus souvent, des marges de fluctuations des performances des
sujets et/ou une variabilité qui référent, pour partie, à de « l’inattendu »
47
, nous
renvoyant alors à un déjà vieux concept scientifique, celui de sérendipité
48
. Ce
phénomène de « fluctuation » ne peut, par son ampleur, être assimilé à la simple erreur
de mesure. Il s’en déduit des incertitudes sur cette question de la mesure, donc sur la
prévision. Ceci s’oppose alors au réductionnisme, en référence aux modèles retenus, des
interprétations possibles ramenées à la simple observation des parts de reproduction des
mesures antérieures.
3.3. De nouvelles ouvertures déjà existantes ou à venir
Des parts de liberté existeraient donc, majoritairement non retenues ou négligées
dans les études et susceptibles d’apporter d’autres pertinences aux recherches par la
prise en compte d’observations plus rares et potentiellement marginales.
Ce constat peut amener à un changement de regard sur les approches conceptuelles
potentielles de la psychologie faisant passer les conceptions de modèles d’une logique
d’observation des contraintes à la recherche de l’expression des parts de liberté
possibles, de ce qui peut les favoriser, à partir de l’incertitude dynamique potentielle du
sujet. Cette perspective est déjà exploitée, par exemple, en termes de déterminisme
chaotique, en référence aux modélisations mathématiques correspondantes
49
. La logique
de l’émergence d’un phénomène en fonction de la sensibilité aux conditions initiales
pourrait renvoyer, notamment, au souhait, à la volonté, à la tentation d’introduire des
modifications de contexte susceptibles d’élargir les marges d’expression du sujet par le
jeu de contraintes différentes inscrites au départ. Les conceptions réfèreraient, ici, plus
qu’à l’analyse des différences que conditionnent des contraintes, à la recherche de
processus de « différenciation »
50
donc d’ouverture dynamique sur de nouvelles
perspectives relevant des capacités d’expression des parts de liberté potentiellement
novatrices pour les sujets.
L’accent n’est plus mis, alors, sur les tendances générales et majoritaires, leur
permanence dans le temps
51
susceptibles de rendre compte, y compris de manière
réductrice, des situations rencontrées ou observées, mais plutôt sur le singulier,
l’inexplicable, « l’étrange » au regard, non seulement du sens courant, comme
s’autorise largement les sciences physiques, par exemple
52
, mais du sens et de la
conception des modèles eux-mêmes. Il serait mis, également sur les fluctuations donc la
« mobilité » possible, potentielle, sur les parts de liberté possibles que suggèrent ces
fluctuations, l’inattendu des observations. Ceci rejoindrait une conception
47
Cf., par exemple : Juhel J., « L’accroissement associé à l’âge de la variabilité individuelle…. » ; Pry et
al., « Stabilité et changement du retard mental chez le jeune autiste ».
48
Concept, notamment, introduit par le physiologiste W. B. Cannon en 1945 (Cf. Piéron, H., 1968, p.
396).
49
Juhel, « Les systèmes dynamiques non linéaires dans l’étude de la variabilité cognitive ».
50
Thème déjà évoqué mais un peu différemment, par Lautrey, « La psychologie différentielle à l’épreuve
de la variabilité intra- individuelle », p. 25.
51
Capacités plus ou moins « constitutives » du sujet, comme l’intelligence, les types ou les styles
cognitifs, les traits de personnalité, etc.
52
Pellois, « Contrainte et liberté du sujet… », p. 194 et suivantes.
24
méthodologique fondamentale déjà bien connue en termes d’épistémologie des
sciences
53
, à savoir une position constante d’ouverture vis à vis des modèles.
Cette position peut mieux rendre, par exemple, le chercheur, le praticien, sensible, à
côté de l’expression majoritaire de la conjonction des performances, à des positions
d’inpendance, de disjonction, plus marginales, variables, entre des performances,
positions potentiellement heuristiques
54
.
4. Perspectives nouvelles au regard des mathématiques appliquées à la psychologie
et aux sciences humaines en général ?
Quelques perspectives seront évoquées ici avant de conclure tout à fait
provisoirement…
4.1. Les perspectives
A la lecture de ce développement, il semblerait que la focalisation de l’attention
devrait porter davantage sur la question du « hasard » rapporté à l’aléatoire dont
l’approche essentielle relève des probabilités. Mais peut-on ramener la « puissance » de
l’expression dynamique de la diversité, opposée aux contraintes de contexte,
simplement au jeu de la combinatoire, telle qu’elle apparaît dans sa conception logico-
mathématique ?
La variabilité dynamique, les effets de la modification des états initiaux, l’expression
en termes d’incertitude féconde, l’importance de l’étude des observations aux marges,
l’expression de la singularimême « étrange » questionnant l’universel, seraient, sans
doute des aspects à regarder avec plus d’attention. Il devrait en être de même de la
recherche de différenciation en soit, et non de la simple observation des différences. Il
faudrait approfondir la question des « états » à la fois le caractère des propriétés qui leur
sont propres
55
leurs pertinences mais aussi le fait que ces propriétés peuvent faire
« obstacles ». Il conviendrait, également, de se pencher sur le statut épistémologique, et
les conceptions y afférant, relevant de l’inattendu, ce qui aurait alors à voir encore avec
l’incertitude, et aussi sur le fait qu’au-delà du quantitatif, s’exprime le « qualitatif
56
»,
etc. Tout ceci ne renverrait-il pas à quelques nouvelles conceptions à défendre ? Mais
alors, lesquelles ? Ces ouvertures peuvent poser aux mathématiciens des fis
d’actualité, des perspectives à investir, des « objets » potentiellement nouveaux à
élaborer, là il n’y aurait, dans l’état actuel de la recherche, conceptuellement rien, ou
pas grand chose.
Que dire, en effet, du concept de la « qualité » ? Dans cet « aller » mais aussi ce
« retour » « du hasard à la nécessité », ne conviendrait-il pas de retravailler cette
question de l’aléatoire (une simple distribution au hasard ?) au regard des contraintes et
de la « puissance » d’adaptation du vivant, du sujet, aux contraintes ? Si, comme il est
dit parfois, « le tout est plus que la somme des parties », alors, quelle conception
avancer pour traiter des états par delà les interactions qui les « composent » ? Quels
53
Notamment Bachelard, Le nouvel esprit scientifique.
54
Comme c’est le cas de l’étude des difficultés scolaires au regard de performances différentielles intra
individuelles référencées à l’interindividuel.
55
Cf. à ce sujet, D. Durand et les conceptions systémiques.
56
Par exemple, la question des « qualias » développée dans certains courants de la psychologie et de la
neuropsychologie (Cf. Pacherie, « Les consciences ».
25
paradigmes fondamentaux seraient à revoir pour tenir compte de cette question du
« singulier », non réductible à d’autres singuliers, et donc de l’impossibilité de présenter
deux états semblables
57
au regard des conceptions mathématiques et des objets formels
qui les composent ? D’une manière plus globale, dans quel cadre contextuel
potentiellement plus « large » interpréter tout cela ?
4.2. Conclusion provisoire …
Pour le psychologue, l’être humain présente, dans une expression apparemment assez
spontanée, certes sous des formes plus ou moins sophistiquées, des capacités
intentionnelles, des capacités d’orientation de son action, des capacités d’anticipation,
de conception hors du réel « tout venant » perçu mais susceptible de rendre compte,
cependant, de ce réel, d’imagination dépassant les situations d’existence dans les strictes
contraintes du réel de la condition humaine
58
, des capacités de prise de conscience, de
réflexivité, de contrôle et de jugement, d’appréciation et d’évaluation. Mais de quel réel
ceci fait-il partie
59
? Une des questions centrales qui se pose alors ne serait-elle pas celle
de l’évènement qui surgit dans le réel, de son émergence et de ses conditions
d’émergence ? Les deux bornes classiques en sont l’explication au sens scientifique qui
rend compte des modalités de l’adaptation du vivant à des contraintes du contexte, et
l’aléatoire pour rendre compte de l’apparition fortuite d’un évènement. Dans le premier
cas l’évènement est « explicable » il existe une rationalité qui réfère au « comment »
peut apparaître tel ou tel évènement
60
. Dans le second cas, en l’absence d’explication
rationnelle peu ou très sophistiquée, il est renvoyé au « fortuit », à l’aléatoire et d’une
certaine manière il est susceptible, au sens psychologique, d’être « banalisé ». Il y a
réponse à tout et le monde ainsi conçu est dans une logique psychologique de fermeture.
Cette « science » se place à l’opposé d’une science qui relèverait de la singularité d’un
évènement, s’intéresserait au caractère extraordinaire de l’inattendu, de la convergence
étonnamment exceptionnelle d’évènements
61
, voire au « merveilleux »
62
et à l’expérience
psychique y afférant, surtout lorsque sont considérées les contraintes du contexte et
l’extrême fragilité de l’apparition, par exemple, de la vie humaine dans l’univers. Cette
science renverrait alors à un autre pôle du fonctionnement psychologique : celui de
l’exaltation du fantastique peut être même de la fantaisie donc du fantasme, non relégué
à un sous produit du fonctionnement humain mais renvoyé au sujet reconnu dans toute
sa subjectivité, un sujet bien réel, certes impliqué dans des réalités, mais investi de ses
capacités d’expression comme cela est le cas dans l’art et la création.
Mais quel sens peut avoir un modèle non réduit, en l’absence d’explications
plausibles de l’adaptation aux contraintes, au « hasard », à l’aléatoire ? Il s’agirait d’un
monde douverture, interrogeant la nature même de « l’expression ». Un monde
d’heuristiques, susceptible d’imaginer d’autres possibles. En ce sens, si l’imaginaire,
l’anticipation, la planification, la conception hors du « réel »
63
, l’intention relèvent de
57
Aucun 1 ne serait égal à un autre 1, par exemple…
58
Récits, contes, histoires, grands mythes, hypothèses scientifiques à distance du sens commun, etc.
59
En prise avec l’ « imaginaire », l’ « irrationnel » ?
60
La pluie pour le météorologue, l’éclair pour le physicien, des capacités adaptatives pour le psychologue
( ?), etc.
61
Tel que cet avion récemment en difficulté et se posant sur l’Hudson en plein New York sans que l’on
déplore de victimes ?
62
Ceci dans une perspective non banalisée du vivant.
63
Celui ordinairement perçu par la personne.
26
réalis non duites c'est-dire ramenées à d’autres conceptions plus simples, mais
sont considérées en tant qu’états dont les propriétés peuvent être propres aux états et
donc originales, nouvelles, alors dans quel « réel » concevoir cela ?
Comment prendre cela en compte au plan scientifique ? Comment en rendre
compte ? Quelle modélisation, par exemple mathématique, serait susceptible de s’y
appliquer ? Quel cadre plus large englobant celui qui le conçoit peut-on proposer ? Cela
est-il, même, possible
64
?
Si cela était envisageable, il s’agirait d’une approche plus directe plus sensible,
approche que le développement de la pensée scientifique telle qu’elle existe
actuellement rendrait plus difficile par une sorte d’effet « écran » constitué, notamment,
par un façonnage des attitudes, véritable éducation de distanciation faisant obstacle à ce
rapport « intuitif »
65
, donc spontané, non rationnel
66
, au « réel » pris dans un sens plus
large. Il s’agirait d’un « modèle » qui donnerait une place aux valeurs, à l’émotion, à
l’affectivité, à l’intention ouverte, reconnue globalement en tant qu’objet conceptuel à
part entière, c'est-à-dire non ramenée à des lois de composition
67
, et s’exprimant dans
des espaces possibles de liberté non réductibles aux raisons qui la contraignent. Dans ce
cas, sommes-nous à la limite d’une mathématisation des modèles, et même de la place
et du rôle des mathématiques en sciences et, ici, plus particulièrement, « en sciences
humaines », ou bien sommes-nous sur d’autres perspectives radicalement différentes
pour les mathématiques elles-mêmes ?
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PUF, Coll. « Premier cycle », 2002.
64
Par exemple, cf. le théorème d’incomplétude de K. Gödel, 1931, in From Frege to Gödel. Harvard
University Press, 1971.
65
Holistique, donc global.
66
Ou, plutôt, « a rationnel ».
67
Limite de l’approche analytique.
27
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... Dans une compréhension constructiviste du développement cognitif, en particulier du développement logique 19 , aboutissant au raisonnement, dit scientifique, hypothéticodéductif, la logique interprétative voudrait que l'on considère, dans la recherche de possibles « causes-à-effets » en cascade, comme pressenti dans le modèle précédemment présenté, la maîtrise de certaines capacités comme nécessaire à l'expression de la pensée opératoire mobilisée dans le raisonnement. Ces capacités de raisonnement impliqueraient, alors, au sens strict, des capacités initialement développées (acquises), et/ou disponibles (plus ou moins innées), ceci, certes, dans un emboîtement rigoureux mais « psychologiquement discutable » (Pellois, 2013). Or, le sens de l'« implication » observée peut recouvrir d'autres interprétations (Cf., par exemple, Pellois, 2007). ...
... Dans une compréhension constructiviste du développement cognitif, en particulier du développement logique 19 , aboutissant au raisonnement, dit scientifique, hypothéticodéductif, la logique interprétative voudrait que l'on considère, dans la recherche de possibles « causes-à-effets » en cascade, comme pressenti dans le modèle précédemment présenté, la maîtrise de certaines capacités comme nécessaire à l'expression de la pensée opératoire mobilisée dans le raisonnement. Ces capacités de raisonnement impliqueraient, alors, au sens strict, des capacités initialement développées (acquises), et/ou disponibles (plus ou moins innées), ceci, certes, dans un emboîtement rigoureux mais « psychologiquement discutable » (Pellois, 2013). Or, le sens de l'« implication » observée peut recouvrir d'autres interprétations (Cf., par exemple, Pellois, 2007). ...
... Ce modèle, aujourd'hui relativisé pour sa rigidité, sinon contesté, conçoit le développement cognitif de l'enfant selon une organisation élaborée passant par une succession de stades emboîtés successifs. Le passage d'un stade à un autre selon une conception établie sur un mode implicatif strict n'est pas sans poser problème (Pellois C., 2002(Pellois C., , 2010(Pellois C., et 2013 car il se fait, notamment, mais pas seulement, par le bais de ce que Piaget appelle l'abstraction réfléchissante « Elle est réfléchissante aux deux sens suivants : elle transpose sur un plan supérieur de conceptualisation ce qu´elle emprunte à un palier précédent » écrit Sylvie Lucas dans Le Tome 52 du Bulletin de Psychologie, juillet-août 1999. Ecartant provisoirement toute référence à cette théorie, l'objectif central de ce texte réside dans l'étude de l'adéquation métaphorique de la représentation de règles de règles avec une démarche conceptualisante. ...
... Dans le prolongement de réflexions antérieures (Pellois, 2007(Pellois, , 2012(Pellois, , 2013a(Pellois, , 2013b, les développements qui précèdent et les questions associées conduisent à s'intéresser au logiciel CHIC et à ses applications d'une certaine manière qui peut être présentée sous la forme des développements suivants. ...
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L'analyse statistique implicative (ASI) est, initialement, une méthode d'analyse de données non symétrique, conçue par Régis Gras, il y a près de quarante ans. A travers thèses, articles de revues, livres et colloques, elle présente maintenant un véritable cadre paradigmatique de traitement statistique de la causalité et de la complexité. Ce cadre est développé encore par son premier auteur, mais aussi par des doctorants et avec la collaboration d'équipes de recherche universitaires françaises et étrangères. Puisant ses origines épistémologiques en didactique des mathématiques, son point de départ est l’évaluation scolaire et, en particulier, une interrogation sur la complexité ressentie au cours de l’apprentissage des mathématiques. À visée prédictive, le support de l’ASI est un modèle mathématique conduisant à une mesure de qualité des relations implicatives entre deux observations comportementales a et b, du type « si on observe a alors on a aussi tendance à observer b, de manière statistiquement significative ». Son extension progressive, toujours en réponse à des attentes applicatives, a permis d’extraire, à partir des données croisant ensemble de variables et ensemble de sujets, deux structures dynamiques des relations entre les variables en jeu sous forme de graphe et de hiérarchie. La nature des variables, initialement binaires, est maintenant élargie à différents types de variables observables, discrètes ou continues (numérique, intervalle, flou, vectoriel, rang,…). Une structure originale duale entre les ensembles variables-sujets, qu’ils soient eux-aussi discrets ou continus, est établie. Cet ouvrage représente le 5ème mémorandum d’études portant sur le concept d’Analyse Statistique Implicative. Il élargit, en les enrichissant, les éditions précédentes, avec pour objectif de dresser un panorama récent des concepts, modèles, méthodes et applications de l’ASI. Afin de faciliter l’accès à son contenu, les 40 chapitres qui le composent sont regroupés, ponctuées par des interludes souvent métaphoriques - pas de côté moins académiques - en 4 parties principales dont la dynamique est la suivante : • Une introduction en 5 temps offre autant de points de vue sur la nature profonde et les motivations originelles de l’ASI ; • La Partie 1 constitue une sorte de cours, comme un manuel, qui établit, en les régénérant, les élargissant, l’ensemble des concepts qui forment le cœur de l’ASI ; • La Partie 2 aborde des compléments et des extensions théoriques de ces concepts en en montrant le caractère stimulant et fécond, tout en s’appuyant sur des exemples ; • La Partie 3 présente une sélection d’applications qui illustrent les apports de la démarche développée par l’ASI dans des domaines variés, à la recherche de pistes causales, par exemple en psychologie du développement ou en art. Cette nouvelle édition, à laquelle ont contribué plus de 30 auteurs de disciplines diverses, ouvre à d’originales perspectives sur l’art, la psychologie de l’apprentissage, les lois de l’évolution, mais aussi sur les fractals, la logique paracohérente, etc. Elle est préfacée par le Professeur Djamel Zighed.
... Ce modèle, aujourd'hui relativisé pour sa rigidité, sinon contesté, conçoit le développement cognitif de l'enfant selon une organisation passant par une succession de stades emboîtés successifs. Cependant, le passage d'un stade à un autre selon une conception établie sur un mode implicatif strict n'est pas sans poser problème [5] . En effet, elle fait actuellement une place, non seulement à la psychologie différentielle , dérivée du modèle piagétien, mais aussi à la théorie des champs conceptuels où le développement cognitif serait fortement lié au contenu conceptuel des domaines dans lesquels il s'opère plus, peut-être, qu'à des structures logico-mathématiques de la pensée. ...
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Résumé. Cette communication est centrée sur le modèle des hiérarchies implicatives qui ont été initialement introduites dans le contexte de l’Analyse Statistique Implicative pour découvrir des relations d’implications non symétriques de type R1 ! R2 où l’une au moins des composantes est une règle d’association et l’autre une règle ou un attribut. Nous présentons ici l’intérêt de cette approche dans le cadre applicatif d’un traitement d’enquête en didactique des mathématiques et discutons de son positionnement épistémologique en psychologie différentielle.
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Les behavioristes voulaient se débarrasser du concept de représentation. Non seulement ils ont échoué, mais la représentation est aujourd'hui le concept le plus central de la psychologie. Concernant le développement des connaissances mathématiques chez l'enfant, la représentation n'est pas faite seulement de nombres, de figures, de dessins, de diagrammes, de tableaux, de graphes ou d'algèbres, mais aussi de formes intériorisées d'activité en situation. L'activité est davantage que la conduite : la conduite n'est que la partie visible de l'activité. Dans ces conditions, pour analyser les conduites mathématiques, il faut s'interroger sur l'activité de représentation sous-jacente. Le concept de schème est alors essentiel pour conduire cette interrogation. La plus grande part de nos connaissances consiste en compétences, et elles ne peuvent pas être mises en mots aisément. Ceci est vrai dans tous les domaines de connaissance, y compris les mathématiques ; et c'est encore plus vrai pour les enfants, qui ne sont guère capables d'exprimer les connaissances qu'ils utilisent dans l'action. Confrontés à des situations, les enfants peuvent saisir progressivement des entités relationnelles entre quantités et grandeurs, entre positions, figures et mouvements... Les relations partie-partie-tout, ou état transformation-état, les propriétés d'isomorphisme dans les problèmes de proportion ne peuvent être réduites à des structures numériques ; ni être considérées seulement comme des entités linguistiques ou symboliques. Ce sont des concepts et des théorèmes en acte. Le caractère implicite d'une grande partie de nos connaissances, ne signifie pas que les connaissances explicites ne sont pas opératoires. Mais on ne peut se satisfaire d'une théorie qui considérerait les mathématiques seulement comme un corps de connaissances explicites. Même si on est intéressé par la fonction du langage et des symboles dans le développement de la pensée, il est nécessaire d'identifier avec sûreté quelles propriétés du signifiant représentent quelles propriétés du signifié. Nous savons bien aujourd'hui que les mots signifient des choses différentes pour des individus différents, en particulier pour le professeur et les élèves pris individuellement. Vygotski a expliqué il y 70 ans que le « sens » donné aux mots est différent de leur « signification » conventionnelle. Ce problème ne peut être résolu que si on accepte l'idée que les schèmes contiennent des invariants opératoires : concepts et théorèmes en acte. C'est notre tâche que de les identifier, en même temps que les autres composantes des schèmes et de la représentation. Plusieurs exemples illustrent cette vision peu habituelle. Recherches en Education -n° 4 octobre 2007 -Géra rd Vergnaud 2 Peu de concepts sont utilisés avec autant de significations différentes, même dans le seul domaine de la psychologie. En outre c'est de la représentation que traitent de nombreux auteurs lorsqu'ils parlent de mémoire, de jugement, de langage ou de raisonnement. Je n'ai pas le loisir, dans cet article, de passer en revue ces différentes significations. Il y faudrait un ouvrage. Je me contenterai de définir trois d'entre elles, assez fréquemment adoptées, et que je trouve utiles à l'analyse ; puis j'en introduirai une quatrième, qui modifie sensiblement la compréhension des trois premières : Sens 1 -Le flux de la conscience. Sens 2 -Les signes et symboles, langagiers ou non, avec lesquels nous communiquons. Sens 3 -Les systèmes de concepts, explicites ou non, avec lesquels un sujet pense le réel, c'està-dire identifie les objets du monde, leurs propriétés, leurs relations et transformations. Sens 4 -La représentation comme ensemble de schèmes.
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Mental imagery of transformations and cognitive operations : a critical review of developmental studies. Developmental features of imaginal representations of kinetics and transformations are examined within the framework of piagetian theory and Information Processing. A critical overview of the basic assumptions, methodology and results of studies deriving from these two approaches suggests that their experimental paradigms may in fact elicit two distinct processing modes for transformational representation : an analogical mode, and a mode compatible with both propositional and piagetian models of representation. Discussion centers around the possible implications of this hypothesis for future research, in particular studies testing for interactions between these two processing modes over the course of development. Key words : mental imagery, cognitive development, analogical representation.
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Stability and change of mental retardation by young children with autistic disorders Mental retardation is defined now by attitudes based on a mental deficiency associated with a social unskill. In the current classification (DSM IV-TR, 2003) it is located in Axis II, the axis dealing with permanent ‘personality disorders’. The autistic syndrome is located in Axis I, the axis that tackles mental disorders occurring at childhood. It is therefore a developmental syndrome whose symptoms may undergo a considerable change during the ontogenesis. The association of the mental retardation with the autistic syndrome is worth studying. The cognitive and adaptive system of 210 children with autism was assessed. The assessment first focused on children at 5 (median age) then on children at 8 (median age). The cluster analysis show that the children may be divided into four groups – between these two periods the psychological evolutions of the four groups are completely different. The association of mental retardation with autism changes a lot in the four groups (the mental retardation was defined in terms of intensity). The results are commented on from the viewpoint of developmental psychology and they raise the issue of « a transitional mental retardation ».
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A critical survey is made of recent literature pertaining to the possibility of measuring important dimensions of human cognitive ability through various types of simple cognitive tasks. The survey focuses on individual differences (IDs) found in cognitive tasks that have received extensive study in experimental cognitive psychology--for example, simple and choice reaction time, lexical decision, stimulus matching, probed search of short-term memory, memory span, free and serial recall, simple sentence comprehension, and analogical reasoning. Questions of paramount interest were: What kinds of individual differences are observed in these tasks? Do they exhibit sufficient variance and reliability to measure stable individual characteristics that may be of relevance in personnel selection and other operational context? What are the dimensions of these IDs from a factor-analytic standpoint? How are they related to those observed through more conventional psychometric tests? To what extent are they subject to the effects of practice and specific training, or related to demographic variables in such a way as to reduce their utility for operational use? Can the study of individual difference in simple cognitive tasks be valuable in the development of psychological theory? A considerable portion of the monograph is devoted to the definition and specification of 'elementary cognitive tasks' (ECTs) and to how ETCs can be administered, in experimental settings, so as optimally to reveal IDs in cognitive processes. A scheme for classifying ECTs according to basic paradigms is presented, and suggestions are made concerning procedures, including computer simulation, for conceptualizing and analyzing underlying processes.
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299 p., fig., ref. bib. : 20 p.1/4 "C'est une vision très riche que l'inventeur du concept de "théorie des systèmes" livre ici au lecteur : plus que tout autre, cet ouvrage de "culture générale" pourra inspirer tous ceux qui, par vocation ou par fonction, étudient, créent et dirigent des systèmes complexes et en tout premier lieu les informaticiens". "On aborde avec respect le livre d'un physiologiste qui a su, il y a déjà près de 50 ans, extraire des travaux de ses maîtres et des siens propres la notion de "systèmes" qui, ensuite, en a éprouvé patiemment la consistance et l'universalité et qui maintenant s'en fait éloquemment le propagateur et l'avocat. Manifestement, cet ouvrage concrétise l'œuvre de toute une vie. Elle nous fournit l'occasion d'admirer tour à tour l'enthousiasme du pionnier, le savoir dire du professeur, l'érudition du savant, l'universalisme du philosophe et la culture de l'honnête homme". "L'analyse des systèmes est une méthode de travail qui est actuellement très employée en écologie. La théorie des systèmes a été fondée par L. von Bertalanffy qui expose ici, avec une grande clarté, les bases fondamentales de la théorie. Il montre aussi les divers domaines où l'on peut l'appliquer. Le cas de l'écologie n'est pas oublié (écosystèmes, dynamique des populations, etc.) et l'auteur y fait souvent référence. Un livre qui est à recommander à tous les écologistes qui veulent trouver une première approche à une théorie relativement nouvelle, avant d'aborder des ouvrages d'un niveau plus élevé".
« Que sais-je ? », 9 ème édition
  • Daniel Durand
  • La
  • Paris
  • Puf
Durand, Daniel. La systémique, Paris, PUF, Coll. « Que sais-je ? », 9 ème édition, 2004.
accroissement associé à l'âge de la variabilité individuelle : une manifestation homéodynamique ? », In (éd) Psychologie différentielle, recherches et réflexions, Vom Hofe
  • Jacques Juhel
Juhel, Jacques, « L'accroissement associé à l'âge de la variabilité individuelle : une manifestation homéodynamique ? », In (éd) Psychologie différentielle, recherches et réflexions, Vom Hofe, Alain, Charvin, Heidi, Bernaud, Jean-Luc, Guédon, Dominique, Actes des 15èmes journées de psychologie différentielle : « l'étude des différences individuelles », Rennes, PUR, 2003, pp. 295-299.
  • Pry
  • René
  • Juhel
  • Jacques
  • Bodet
  • Joffrey
  • Amaria Baghdadli
Pry, René, Juhel, Jacques, Bodet, Joffrey, Baghdadli, Amaria, « Stabilité et changement du retard mental chez le jeune autiste », Enfance, 3, 2005, pp. 270-277.