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Vers une approche collaborative profitable pour tous les joueurs: une application à l'industrie des pâtes et papiers

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Face à une compétition internationale accrue, une technologie en constante évolution et des coûts d'opération constamment à la hausse, même les entreprises des secteurs plus traditionnels comme les pâtes et papiers n'ont d'autres choix que de modifier leur façon de faire pour demeurer compétitives. En travaillant plus étroitement avec leurs fournisseurs et clients, elles pourront gérer plus adéquatement leur réseau et mettre en marché des produits qui répondent aux exigences du consommateur. Cette collaboration peut s'appuyer sur des approches collaboratives reconnues tels le CPFR (Collaborative Planning, Forecasting and Replenishment) ou encore le VMI (Vendor Managed Inventory), mises sur pied pour assurer un échange efficace de biens et d'information entre les entreprises. Toutefois, ces approches collaboratives doivent être bien choisies selon le contexte et permettre de générer un profit maximum pour chaque joueur. Dans cet article, nous étudions différentes approches de collaboration pour le cas d'un fournisseur et de son client du secteur des pâtes et papiers. Pour ce contexte particulier, nous tentons d'identifier les approches collaboratives les plus bénéfiques pour chaque joueur et les incitatifs à mettre en place de telle sorte que l'approche choisie devienne la plus profitable pour tout le réseau.
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___________________________
Vers une approche collaborative
profitable pour tous les joueurs :
une application à l’industrie des
pâtes et papiers
Nadia Lehoux
Sophie D’Amours
André Langevin
Octobre 2007
CIRRELT-2007-39
Vers une approche collaborative profitable pour tous les joueurs :
une application à l’industrie des pâtes et papiers
Nadia Lehoux
1,2*
, Sophie D’Amours
1,3
, André Langevin
1,2
1
Centre interuniversitaire de recherche sur les réseaux d’entreprise, la logistique et le transport
(CIRRELT), Université de Montréal, C.P. 6128, succursale Centre-ville, Montréal, Canada H3C 3J7
2
Département de mathématiques et génie industriel, École Polytechnique de Montréal, C.P. 6079,
succursale Centre-ville, Montréal, Canada H3C 3A7
3
Département de génie mécanique, Université Laval, Pavillon Adrien-Pouliot, Sainte-Foy, Canada
G1K 7P4
Résumé. Face à une compétition internationale accrue, une technologie en constante
évolution et des coûts d’opération constamment à la hausse, même les entreprises des
secteurs plus traditionnels comme les pâtes et papiers n’ont d’autres choix que de
modifier leur façon de faire pour demeurer compétitives. En travaillant plus étroitement
avec leurs fournisseurs et clients, elles pourront gérer plus adéquatement leur réseau et
mettre en marché des produits qui répondent aux exigences du consommateur. Cette
collaboration peut s’appuyer sur des approches collaboratives reconnues tels le CPFR
(Collaborative Planning, Forecasting and Replenishment) ou encore le VMI (Vendor
Managed Inventory), mises sur pied pour assurer un échange efficace de biens et
d’information entre les entreprises. Toutefois, ces approches collaboratives doivent être
bien choisies selon le contexte et permettre de générer un profit maximum pour chaque
joueur. Dans cet article, nous étudions différentes approches de collaboration pour le cas
d’un fournisseur et de son client du secteur des pâtes et papiers. Pour ce contexte
particulier, nous tentons d’identifier les approches collaboratives les plus bénéfiques pour
chaque joueur et les incitatifs à mettre en place de telle sorte que l’approche choisie
devienne la plus profitable pour tout le réseau.
Mots-clés. Modélisation, collaboration interentreprises, relation client-fournisseur, contrat.
Remerciements. Ce travail a bénéficié d'un appui financier du Fonds québécois de la
recherche sur la nature et les technologies (FQRNT) et du Conseil de recherches en
sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG).
Results and views expressed in this publication are the sole responsibility of the authors and do not
necessarily reflect those of CIRRELT.
Les résultats et opinions contenus dans cette publication ne reflètent pas nécessairement la position du
CIRRELT et n'engagent pas sa responsabilité.
_____________________________
* Auteure correspondant: nadia.lehoux@polymtl.ca
Dépôt légal – Bibliothèque nationale du Québec,
Bibliothèque nationale du Canada, 2007
© Copyright Lehoux, D’Amours, Langevin et CIRRELT, 2007
1. INTRODUCTION
Pour faire face à une concurrence internationale de plus en plus importante, une technologie qui ne
cesse d’évoluer et des clients informés qui recherchent des produits d’exception, les entreprises ont dû
prendre un nouveau tournant dans leur façon de faire. Au-delà d’un coût de production minimum ou
d’un délai de livraison rapide, elles ont eu à adhérer à de nouveaux modèles d’affaire dans le but de
créer de la valeur pour le client. Ces nouvelles façons de faire reposent notamment sur la collaboration
et la coordination des activités au sein même des réseaux d’entreprises. Par un échange synchronisé de
biens et d’information, les entreprises sont en mesure de mieux connaître les besoins du client et
d’offrir un produit de qualité dans un délai minimum.
Ainsi, plusieurs secteurs industriels tels l’agroalimentaire, les télécommunications, et même les
domaines plus traditionnels comme l’industrie des produits forestiers, ont opté pour la mise en place
d’approches collaboratives reconnues afin d’augmenter la profitabilité de tout leur réseau d’affaires.
Plus particulièrement, le CPFR ou Collaborative Planning, Forecasting and Replenishment est une
technique aujourd’hui grandement utilisée par les entreprises qui leur permet de mieux planifier les
besoins en marchandise de tous les joueurs, en se basant sur une prévision de demande unique (VICS,
2004). Le VMI ou Vendor Managed Inventory est une autre façon de faire qui, via une gestion des
stocks et du réapprovisionnement prise en charge par le fournisseur, a contribué à grandement diminuer
le niveau de stock dans les réseaux. Toutefois, toute la complexité de telles approches collaboratives
réside dans la façon dont les joueurs vont les mettre en place et les gérer adéquatement. Par exemple, il
est fort possible qu’un des membres du réseau ne bénéficie pas autant que les autres d’une approche
collaborative. Ainsi, voyant son profit diminuer par rapport à celui qu’il aurait obtenu en collaborant
autrement avec ses partenaires, il risque de se retirer du réseau et chercher à s’associer avec d’autres.
C’est pourquoi lorsqu’on veut mettre en place une collaboration interentreprises efficace pour un
réseau à plusieurs joueurs, il est non seulement nécessaire de choisir l’approche collaborative la plus
efficace selon le contexte, mais il est également essentiel de s’assurer que tous les joueurs profiteront
équitablement d’une telle initiative et qu’ils n’auront donc jamais intérêt à changer de façon de faire ou
de partenaire.
Dans notre étude, nous avons d’abord tenté d’identifier différentes approches collaboratives à mettre en
place pour le cas d’un fournisseur et de son client dans le secteur des pâtes et papiers. Le réseau
d’affaires de ce type d’industrie est relativement complexe en raison du processus de fabrication du
papier. Alors que certaines entreprises contrôlent toutes les activités de la forêt jusqu’au consommateur
final, d’autres choisissent de sous-traiter une ou plusieurs opérations. Dans tous les cas, le coût élevé de
fabrication, la compétition internationale et les nouvelles technologies de pointe obligent les entreprises
à gérer efficacement leur réseau. C’est pourquoi nous avons voulu vérifier si la mise en place de l’une
ou l’autre de ces approches, production sur demande (MTO), réapprovisionnement régulier (RR), VMI
ou CPFR, facilitait la planification des opérations et générait en bout de ligne un profit maximum du
système. Nous avons ensuite cherché à voir quelle approche collaborative permettait d’obtenir le profit
maximum pour chacun des joueurs et quels incitatifs pouvaient être mis en place pour faire en sorte
qu’une seule approche devienne la plus profitable pour tous. Cet article est organisé de la façon
suivante : dans un premier temps, une revue de littérature est exposée. Par la suite, le cas d’études et la
modélisation sont détaillés. Nous présentons ensuite l’expérimentation ainsi que l’analyse effectuées.
Une brève conclusion complète l’article.
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1
2. REVUE DE LITTÉRATURE
Pour que la collaboration dans un réseau d’entreprises soit synonyme de réussite, il faut d’abord qu’elle
repose sur un échange régulier d’information. En effet, plus les joueurs possèdent de l’information sur
ce qui est demandé, ce qui est gardé en stock, ce qui a été consommé dans les semaines précédentes,
etc., plus ils sont en mesure de prendre des décisions de planification qui auront un impact global
positif. Prenons par exemple le cas d’un détaillant qui observe les données de consommation
directement au point de vente. Il a ainsi accès à de l’information privilégiée et il peut donc choisir de la
partager ou non avec les autres. S’il choisit de ne pas partager cette information, le manufacturier devra
alors élaborer ses besoins en capacité et ses plans de production en se basant sur les commandes faites
par le détaillant plutôt que sur la demande du consommateur final. Et l’on sait très bien qu’un tel
comportement n’est pas sans conséquence, comme l’ont démontré notamment Lee et al. dans leur étude
sur l’effet coup de fouet (1997). En fait, sans un partage soutenu d’information dans le réseau, les
joueurs s’exposent à de possibles surplus ou pénuries de stock, une mauvaise utilisation de la capacité,
un faible niveau de service, etc. Une revue des nombreuses études portant sur le partage d’information
et son impact sur la coordination du réseau a d’ailleurs été présentée par Chen (2003).
Une fois l’information en main, il s’agit alors de l’exploiter efficacement. Pour ce faire, des approches
collaboratives ont justement été développées pour favoriser la coordination des activités et la
planification globale dans les réseaux. Par exemple, le ECR (Efficient Consumer Response) est une
illustration de stratégie utilisée dans le secteur agroalimentaire grâce à laquelle les partenaires
collaborent étroitement afin de livrer au consommateur final le bon produit, au bon endroit, et au
meilleur prix qui soit. Les principes du ECR sont basés sur trois concepts : la gestion de la demande
(gestion par catégorie), le réapprovisionnement des produits (réapprovisionnement continu) et la
technologie dédiée (EDI) (Martel, 2000). Le VMI est une autre technique développée au milieu des
années 80 dans laquelle le fournisseur est responsable de la gestion des stocks chez le client pour ses
produits, d’après un niveau de service attendu (Baratt et Oliveira, 2001). Une étude de cas réalisée par
De Toni et Zambolo (2005) dans le secteur des appareils électroménagers a d’ailleurs démontré que
l’implantation du VMI contribue à générer davantage de bénéfices que lorsque le mode de
réapprovisionnement traditionnel est employé. La plus récente stratégie mise sur pied, le CPFR, a été
développée pour améliorer l’échange des produits du fournisseur au consommateur final. L’idée repose
sur le partage d’information tels les historiques de ventes et la disponibilité du produit, afin de mieux
coordonner les activités et éliminer le surplus de stock. Cette approche a aussi été développée dans le
but de rapidement identifier toute divergence pouvant exister dans les prévisions ou l’inventaire, de
manière à corriger le problème avant qu’il ait un impact significatif sur les ventes ou les profits (VICS,
2004). Les auteurs Thron et al. (2005) ont d’ailleurs démontré dans leur article que le développement
d’un partenariat basé sur le CPFR peut conduire à des bénéfices substantiels, tout dépendant du
contexte à l’étude. Le CPFR peut même s’avérer plus efficace que le VMI, spécialement lorsque la
demande est variable (Cigolini et Rossi, 2006).
Toutes ces approches collaboratives ne profitent pas nécessairement également à tous les joueurs.
Certains peuvent obtenir des gains importants en termes de coût de transport, pendant que d’autres
verront leur niveau de stock augmenter. Le marché peut également influencer le comportement des
joueurs. Un prix plus bas ou un délai de livraison plus court peut faire en sorte qu’un membre du réseau
décide peu à peu de délaisser la collaboration pour travailler avec quelqu’un d’autre. Pour éviter de
telles situations, il est parfois nécessaire de mettre en place des incitatifs qui vont faire en sorte
qu’aucun joueur n’aura intérêt à cesser la collaboration. Plusieurs auteurs se sont d’ailleurs intéressés à
ces incitatifs appliqués à la gestion des réseaux de création de valeur, dont Cachon (2003) qui en a
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2
présenté une revue détaillée. Un premier type d’incitatif souvent étudié concerne le prix que le
fournisseur propose au détaillant. Il ne permet que très rarement la coordination du système, mais il
peut toutefois s’avérer efficace dans certains contextes (Cachon, 2004). Un autre type d’incitatif repose
sur la politique de retour de marchandise, qui permet au détaillant de retourner une partie ou encore la
totalité des articles non vendus en échange d’un crédit (voir par exemple Bernstein et Federgruen,
2005). L’incitatif de partage du revenu amène quant à lui le détaillant à partager le revenu de la vente
avec son fournisseur, moyennant un prix d’achat plus faible (voir par exemple Giannoccaro et
Pontrandolfo, 2004). Avec un incitatif de type quantité flexible, le détaillant a cette fois la possibilité de
réajuster sa commande suite à une meilleure connaissance de la demande (voir par exemple Tsay,
1999). Un autre incitatif concerne l’utilisation d’escomptes de quantité pour amener le joueur à
commander davantage (voir par exemple Munson et Rosenblatt, 2001). Plusieurs autres incitatifs sont
aussi étudiés, toujours dans le même but, trouver un moyen de coordonner les décisions des joueurs
pour augmenter le profit et assurer la pérennité de la relation.
Le choix du mode de collaboration ou de l’incitatif à mettre en place demeure toutefois complexe. Non
seulement il est nécessaire de tenir compte du contexte d’affaires dans lequel on œuvre (type de
demande, particularités du produit, délais de production et de livraison, etc.), mais il est également
indispensable de mesurer l’impact qu’aura une telle façon de faire sur le système (Schneeweiss et
Zimmer, 2004). Dans la littérature, plusieurs auteurs ont traité la problématique à l’aide de la théorie
des jeux et des équilibres de NASH (voir par exemple Cachon, 2003). Toutefois, cette méthode limite
le nombre de paramètres à l’étude ou encore la longueur de la période de planification considérée.
Pourtant, le choix du modèle de collaboration va affecter directement la façon dont les biens et
l’information sont échangés entre les partenaires, de même que la nature de leurs décisions. Par
exemple, si un fournisseur décide de prendre en charge le réapprovisionnement ou d’offrir un prix
partenaire, il devra considérer sa capacité de production et de distribution, ses coûts d’opération, son
délai de livraison, etc. avant de prendre une décision. Autrement, il risque de ne pas être en mesure de
respecter l’entente (Kremer et al., 2006). Ainsi, de manière à prendre en compte l’ensemble des
paramètres opérationnels concernés par le choix d’une approche collaborative particulière, nous avons
plutôt choisi d’utiliser la méthode suivante. Tout d’abord, nous avons identifié quatre approches
collaboratives possibles pour le cas à l’étude. Ensuite, nous avons modélisé chacune d’entre elles à
l’aide de modèles de programmation linéaires en nombre entiers qui intègrent l’ensemble des décisions
de planification des deux joueurs. Nous avons dès lors procédé à des expérimentations pour identifier
l’approche collaborative la plus profitable selon le contexte. Et c’est en regroupant l’ensemble des
résultats obtenus que nous avons pu rechercher de possibles équilibres de NASH, c’est-à-dire une
situation dans laquelle une seule approche collaborative génère le maximum de profit pour chacun des
joueurs. Les sections qui suivent résument la méthode utilisée.
3. APPROCHES COLLABORATIVES ET MODÉLISATION
Afin d’étudier toute la dynamique de la collaboration entre un fournisseur de pâtes et papiers et son
client et de manière à identifier un modèle d’interaction efficace pour les deux joueurs, quatre
approches ont été sélectionnées : le MTO, le réapprovisionnement régulier, le VMI et le CPFR. Pour
chacune de ces approches, nous avons développé un modèle décisionnel du point de vue du fournisseur
et un modèle décisionnel du point de vue du client, pour un total de sept modèles (la description
détaillée de ces modèles se trouve dans Lehoux et al., 2007). Chaque modèle a été élaboré de manière à
prendre en considération toutes les caractéristiques du cas à l’étude. Plus précisément, le cas qui nous
intéresse concerne un fournisseur de pâtes et papiers qui a choisi d’établir une collaboration plus étroite
avec l’un de ses clients. Le fournisseur doit donc veiller à satisfaire la demande de son partenaire tout
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3
en répondant à la demande de tous ses autres clients. Il est aussi responsable de la fabrication du
produit dont le procédé se résume de la façon suivante : les rouleaux de papiers sont produits à partir
d’arbres ou de billes qui sont d’abord réduits en copeaux. Ces copeaux sont ensuite mélangés à de l’eau
et à des produits chimiques pour obtenir une pâte. La pâte est alors transformée en rouleaux de papier
jumbo, de taille telle qu’ils ne peuvent être stockés. Ils sont donc transformés en de plus petits rouleaux
ou encore coupés en feuille selon les besoins. La production de ces produits intermédiaires (rouleaux
jumbo) sur des machines parallèles crée un goulot d’étranglement, c’est pourquoi la capacité et le
temps de mise en route doivent être pris en compte (Rizk et al., 2005). Pour le reste des étapes de
fabrication, on peut supposer que la capacité de production est suffisante. La capacité de distribution
est toutefois limitée et correspond à un poids maximum toléré par période. De même, des stocks
peuvent être présents dans le système, les demandes pour les divers produits finis étant très diversifiées.
Le partenaire est un marchand, c’est-à-dire qu’il achète de la marchandise, la garde en stock et la
revend sans y apporter aucune modification. Il peut choisir d’acquérir des produits soit du producteur
partenaire, soit d’une seconde source d’approvisionnement, tout dépendant du prix et des délais offerts.
3.1.Notation mathématique
Pour chaque modèle, la notation suivante a été utilisée :
Description des ensembles
T = La longueur de la période de planification
IP = L’ensemble des produits intermédiaires
FP = L’ensemble des produits finis (FPFFPS)
FPF= L’ensemble des produits finis proposés par le fournisseur
FPS = L’ensemble des produits finis proposés par la seconde source d’approvisionnement
M = L’ensemble des machines qui fabriquent les produits intermédiaires
Description des paramètres
t = Une période de planification
i = Un produit intermédiaire ou fini
d
it
= Demande des autres clients du fournisseur pour les produits finis à la période t
d
it
cc
= Demande du consommateur final pour les produits finis à la période t
stc
it
c
= Prévision de consommation de stock pour les produits finis du fournisseur à la période t
de
it
cc
= Demande du consommateur final pour les produits finis et estimée conjointement par les parte-
naires à la période t
c
it
m
= Coût de production d’un produit intermédiaire sur la machine m à la période t
h
it
= Coût de maintien des stocks de produits finis à l’usine à la période t
h
it
c
= Coût de maintien des stocks de produits finis chez le client à la période t
ctru= Coût de transport des produits finis livrés par le fournisseur
cord= Coût de commande du client
p
it
= Prix des produits finis vendus par le fournisseur à la période t
pSS
it
= Prix des produits finis vendus par la seconde source d’approvisionnement à la période t
pc
it
= Prix des produits finis vendus par le client à la période t
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4
Description des variables
Q
it
m
= Quantité de produits intermédiaires fabriqués sur la machine m à la période t
D
it
c
= Demande du client partenaire pour les produits finis à la période t
RC
it
= Quantité de produits finis provenant du fournisseur et reçus par le client à la période t
QSS
it
= Quantité de produits finis achetés de la seconde source d’approvisionnement à la période t
I
it
= Niveau d’inventaire de fin de période à l’usine pour les produits finis à la période t
IF
it
c
= Niveau d’inventaire de fin de période du client pour les produits du fournisseur à la période t
ISS
it
c
= Niveau d’inventaire de fin de période du client pour les produits provenant de la seconde source
d’approvisionnement à la période t
Ntru
t
= Nombre de camions nécessaires à la période t
δ
t
= Variable binaire égale à 1 si le client partenaire commande du fournisseur à la période t, 0 autre-
ment
δSS
t
= Variable binaire égale à 1 si le client partenaire commande de la seconde source
d’approvisionnement à la période t, 0 autrement
3.2.Modèles décisionnels
Chaque approche collaborative possède des caractéristiques distinctes. Le MTO est une méthode plutôt
traditionnelle et donc peu collaborative, mais elle est encore aujourd’hui grandement utilisée dans
l’industrie. Le fournisseur fabrique le produit suite à une demande du client puis l’expédie. N’ayant pas
accès à la demande du consommateur final, il doit donc planifier sa production en se basant sur ce que
commande le client.
D’un point de vue décisionnel, la fonction objectif du client basée sur le MTO (équation 1) permet de
maximiser les revenus générés de la vente faite au consommateur final, tout en minimisant le coût
d’achat, de commande et de stockage.
c
it
Tt FPSi
c
it
c
it
F
TtFPi
c
it
it
Tt FPSi
itit
TtFPi
c
it
Tt
t
Tt
t
TtFPi
it
cc
it
ISShIh
pSSQSSpDSScordcordpcdMax
F
F
∑∑
∑∑
∑∑
∑∑
∑∑
∈∈∈∈
∈∈∈∈∈∈
δδ
De même, la fonction objectif du fournisseur basée sur le MTO (équation 2) assure la maximisation des
revenus générés des ventes faites au partenaire et aux autres clients, tout en minimisant le coût de
production, de stockage et de distribution.
∑∑
+
∑∑
+
∑∑
∈∈ ∈∈∈∈ Tt
t
TtMmFPi
itit
IPi
m
it
m
itit
TtFPi
it
it
TtFPi
c
it
NtructruIhQcpdpDMax
FFF
Le VMI est caractérisé par le fait que c’est maintenant le fournisseur qui est responsable de la gestion
des stocks chez le client pour ses produits, et il doit donc veiller à conserver suffisamment de
marchandise pour que celui-ci puisse satisfaire la demande de ses propres clients.
(1)
(2)
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5
D’un point de vue décisionnel, la fonction objectif du fournisseur basée sur le VMI (équation 3) permet
de maximiser les revenus anticipés de la consommation de stock faite par le client partenaire et les
revenus générés de la vente faite aux autres clients, tout en minimisant le coût de production, de
distribution et de stockage pour les produits conservés à l’usine, ainsi que ceux stockés chez le client.
∑∑
∑∑
+
∑∑
+
∑∑
∈∈∈∈ ∈∈∈∈ Tt
t
c
it
F
TtFPi
c
it
TtMmFPi
itit
IPi
m
it
m
itit
TtFPi
it
it
TtFPi
c
it
NtructruIhIhQcpdpstcMax
FFFF
Pour le client, la fonction objectif basée sur le VMI (équation 4) inclut maintenant les diverses
livraisons effectuées par le partenaire et prend également en considération l’accès à une seconde source
d’approvisionnement si nécessaire (par exemple, si les prévisions du partenaire s’avèrent erronées et
que le client n’a pas suffisamment de produits en main pour satisfaire la demande).
c
it
Tt FPSi
c
itit
Tt FPSi
it
Tt
tit
TtFPi
it
TtFPi
it
cc
it
ISShpSSQSSSScordpRCpcdMax
F
∑∑
∑∑
∑∑
∑∑
∈∈∈∈∈∈∈∈
δ
Le réapprovisionnement régulier permet au fournisseur de connaître à l’avance les besoins du client
exprimés sous la forme d’un plan de commande couvrant plusieurs jours, et cette information doit être
prise en compte lors de la planification. Les modèles décisionnels des joueurs sont donc pratiquement
les mêmes que ceux basés sur le MTO, avec ajout de nouvelles contraintes précisant que la
marchandise doit être reçue à la date spécifiée dans le plan (contrainte 5).
TtFPiDRC F
c
itit
= ;
La méthode CPFR amène les partenaires à estimer ensemble la demande du consommateur final et à
utiliser cette prévision commune dans la planification. Toutes les décisions devront être prises de
manière à maximiser simultanément les profits des deux joueurs. La fonction objectif basée sur le
CPFR (équation 6) est donc le résultat de la combinaison des coûts et des revenus de chaque joueur. Le
coût d’achat est par conséquent éliminé de l’équation, puisqu’il représente un revenu pour l’un et un
coût pour l’autre.
∑∑
+
∑∑
∑∑
+
∑∑
∈∈ ∈∈∈∈∈∈ Tt
t
TtMmFPi
itit
IPi
m
it
m
it
c
it
F
TtFPi
c
it
TtFPi
ititit
TtFPi
cc
it
NtructruIhQcIhpdpcdeMax
FFFF
4. EXPÉRIMENTATION ET ANALYSE
Une fois les sept modèles décisionnels développés, nous avons eu recours au logiciel AMPL Studio
ainsi qu’au solveur Cplex pour procéder à des expérimentations. Chaque test a été réalisé à l'aide d'un
horizon roulant de deux semaines, pour une durée totale de planification d’un an. Le contexte étudié est
caractérisé par une demande variable connue pour les sept premières périodes et estimée pour les
périodes suivantes. À chaque itération, les décisions sont révisées et les données mises à jour, puis
l'expérimentation recommence pour le jour suivant. Tous les paramètres utilisés à l’intérieur des
modèles sont représentatifs d’un cas réel. La demande du consommateur final concerne vingt produits
finis regroupés en quatre familles, chaque famille correspondant à un produit intermédiaire. Le
fournisseur et la seconde source d’approvisionnement offre la même gamme de produits ainsi que les
mêmes délais de livraison. De plus, nous avons supposé un délai de production d’une période chez le fournisseur.
(3)
(4)
(5)
(6)
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6
Plusieurs scénarios ont été étudiés. Nous avons d’abord supposé un prix offert par le fournisseur
inférieur au prix offert par la seconde source d’approvisionnement, puis comparé ce scénario avec un
prix du fournisseur égal à celui offert par la seconde source d’approvisionnement. Nous avons
également étudié différents délais de livraison, d’une durée de une et de deux périodes. Nous avons
finalement fait la comparaison entre différents types de demande, soit une demande variable, une
demande constante et une demande cumulée sur 3 et 6 jours. Pour bien comparer chaque scénario, nous
avons utilisé le profit de chaque joueur ainsi que le profit total du système (profit du fournisseur +
profit du client). Dans le cas du CPFR, nous avons alors dû séparer la fonction objectif de manière à
obtenir le profit individuel de chacun. Les coûts de production, de transport et de stockage à l’usine ont
été imputés au fournisseur, alors que les coûts de stockage en bout de chaîne ont été imputés au client.
Pratiquement tous les scénarios réalisés indiquent que l’approche CPFR est celle qui génère le plus de
profit pour le système (figure 1), avec des coûts de transport jusqu’à 18% inférieurs aux coûts de
transport des autres modèles et des coûts de stockage jusqu’à 44% inférieurs aux coûts des autres
modèles. Le VMI occupe la seconde place, grâce à des économies importantes au niveau du coût de
transport (jusqu’à 17%). Le réapprovisionnement régulier et le MTO arrivent au dernier rang. Seul le
scénario avec demande cumulée sur 6 jours et délai de livraison d’une période fait exception à la règle.
Pour ce scénario, c’est l’approche de production sur demande qui génère le profit maximum du système, avec
des coûts de stockage et de transport très similaires à ceux obtenus avec le CPFR.
Profit total du système
135000000
135200000
135400000
135600000
135800000
136000000
136200000
136400000
136600000
MTO
RR
VMI
CPFR
Figure 1. Profit total du système pour chacune des approches collaboratives
4.1. Recherche d’équilibres de NASH
Suite à ces observations, il devient donc intéressant de se demander si cela demeure vrai quand on
regarde les profits individuels de chaque joueur. Pour ce faire, nous avons donc regroupé tous les
résultats obtenus pour chaque scénario, en tentant d’identifier l’approche la plus profitable à chacun des
joueurs tout dépendant du contexte. Cette première analyse nous a permis de constater que le
réapprovisionnement régulier constitue l’approche la plus profitable pour le client pour tous les
scénarios, alors que dans le cas du fournisseur, c’est la méthode CPFR qui génère le plus de revenu
(tableau 1).
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7
Scénario Profit Maximum
Client Fournisseur
-Délai=1 période
-Demande variable
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande constante
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande cumulée sur 3 j.
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande cumulée sur 6 j.
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Délai=2 périodes
-Demande variable
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande constante
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande cumulée sur 3 j.
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande cumulée sur 6 j.
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
Tableau 1. Tableau comparatif des profits maximums de chaque joueur avec flexibilité totale
Lors de la première série de tests, nous avons supposé que pour l’approche de réapprovisionnement
régulier, le client avait la possibilité de réajuster le plan de commande sans être limité, de façon à bien
illustrer la réalité de notre cas d’études. Nous avons toutefois choisi de refaire l’expérience en limitant
cette fois la possibilité d’ajustement du client. Plus précisément, nous avons autorisé le client à
modifier le plan de commande de plus ou moins 30 % pour les sept derniers jours, sans aucune
possibilité de modification pour les sept premiers jours. Les résultats alors obtenus diffèrent de notre
première série de tests. En effet, en limitant la flexibilité du client pour le réapprovisionnement
régulier, c’est-à-dire en imposant une contrainte sur la possibilité de modification du plan de
commande, c’est maintenant le MTO qui devient l’approche collaborative la plus profitable pour le
client pour tous les scénarios, à l’exception de ceux basés sur une demande constante pour lesquels le
réapprovisionnement régulier demeure le plus rentable. En ce qui concerne le fournisseur, le CPFR
génère encore une fois le profit maximum pour tous les scénarios (tableau 2).
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Scénario Profit Maximum
Client Fournisseur
-Délai=1 période
-Demande variable
-p
it<
pSS
it
MTO CPFR
-p
it=
pSS
it
MTO CPFR
-Demande constante
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande cumulée sur 3 j.
-p
it<
pSS
it
MTO CPFR
-p
it=
pSS
it
MTO CPFR
-Demande cumulée sur 6 j.
-p
it<
pSS
it
MTO CPFR
-p
it=
pSS
it
MTO CPFR
-Délai=2 périodes
-Demande variable
-p
it<
pSS
it
MTO CPFR
-p
it=
pSS
it
MTO CPFR
-Demande constante
-p
it<
pSS
it
RR CPFR
-p
it=
pSS
it
RR CPFR
-Demande cumulée sur 3 j.
-p
it<
pSS
it
MTO CPFR
-p
it=
pSS
it
MTO CPFR
-Demande cumulée sur 6 j.
-p
it<
pSS
it
MTO CPFR
-p
it=
pSS
it
MTO CPFR
Tableau 2. Tableau comparatif des profits maximums de chaque joueur avec flexibilité limitée
Puisque pour l’ensemble des tests réalisés, nous ne sommes jamais en présence d’un équilibre de
NASH, c’est-à-dire une situation dans laquelle une approche collaborative particulière génère le
maximum de profit pour tous les joueurs, nous avons cherché à voir comment amener un des joueurs à
changer de position de manière à créer un équilibre. Plus précisément, nous avons tenté de trouver un
moyen pour inciter le client à opter pour l’approche CPFR plutôt que le MTO ou le
réapprovisionnement régulier. La stratégie étudiée concerne le partage des économies. En effet, le
CPFR est une technique qui permet au fournisseur de faire des économies importantes en termes de
transport et de stockage. Toutefois, si celui-ci n’accepte pas d’en faire également profiter son
partenaire, il est clair que la collaboration ne reposera pas sur des bases gagnant-gagnant puisque le
partenaire n’obtiendra jamais un profit maximal. De manière à rendre la technique CPFR profitable aux
deux joueurs, il est donc nécessaire que le fournisseur offre à son client un incitatif financier suffisant
de telle sorte que celui-ci obtienne davantage de revenus que si la collaboration avait été basée sur
l’une ou l’autre des autres approches.
Nous avons donc cherché à voir si en réallouant les gains de stockage ou encore une partie des gains de
transport obtenus de l’adoption du CPFR, il était alors possible de faire en sorte que le client n’ait plus
intérêt à adopter une autre des techniques et que le fournisseur obtienne tout de même un profit plus
élevé que celui obtenu avec le MTO, le réapprovisionnement régulier ou le VMI. Nous avons alors
constaté qu'il est pratiquement toujours possible d’obtenir des équilibres à l’aide d’un partage des gains
de transport ou de stockage selon le contexte (tableau 3). En fait, seul le scénario caractérisé par une
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demande cumulée sur 6 jours avec délai de livraison de deux périodes et flexibilité totale du client ne
permet pas d’obtenir d’équilibre, c’est-à-dire qu’il n’existe pas de partage de revenu suffisant pour faire
en sorte que les deux joueurs obtiennent le profit maximal en optant pour la méthode CPFR. Toutefois,
lorsque la flexibilité est plutôt limitée, un équilibre est alors possible lorsqu’il y a partage d’une partie
des gains de transport.
Scénario Équilibre de NASH
Sans
incitatif
Partage de 100%
des gains de
stockage
Partage de 50%
des gains de
transport
Délai=1 période
Demande variable
p
it<
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande variable
p
it=
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande constante
p
it<
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande constante
p
it=
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande cumulée 3 j.
p
it<
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande cumulée 3 j.
p
it=
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande cumulée 6 j.
p
it<
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=1 période
Demande cumulée 6 j.
p
it=
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=2 périodes
Demande variable
p
it<
pSS
it
Non Non
Oui
Délai=2 périodes
Demande variable
p
it=
pSS
it
Non Non
Oui
Délai=2 périodes
Demande constante
p
it<
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=2 périodes
Demande constante
p
it=
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=2 périodes
Demande cumulée 3 j.
p
it<
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=2 périodes
Demande cumulée 3 j.
p
it=
pSS
it
Non
Oui Oui
Délai=2 périodes
Demande cumulée 6 j.
p
it<
pSS
it
Non Non Non
Délai=2 périodes
Demande cumulée 6 j.
p
it=
pSS
it
Non Non Non
Tableau 3. Équilibres de Nash avec partage des économies, cas avec flexibilité totale
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Si on fait un parallèle entre le revenu du système et le revenu de chaque joueur, on peut alors constater
qu’à une seule occasion, l’ajout de ce type d’incitatif ne permet jamais d’atteindre le profit maximum
du système. En effet, les tests réalisés avec une demande cumulée sur six jours et un délai de livraison
d’une période montrent que le profit maximum est atteint avec le MTO, alors que les profits individuels
des deux joueurs sont maximisés en adoptant le réapprovisionnement régulier (pour le client) et le
CPFR (pour le fournisseur). Pour un tel cas, de manière à atteindre le profit maximum du système, il
s’agirait alors d’identifier un incitatif qui pousse non seulement le client, mais également le fournisseur
à adopter une autre approche que celle qui leur génère le maximum de profit individuellement.
La grande difficulté dans l’utilisation de ce type d’incitatif réside toutefois dans la façon de calculer le
revenu à partager entre les joueurs. En effet, dans la pratique, il n’est pas nécessairement évident de
trouver un moyen efficace pour répartir équitablement les bénéfices d’un système, puisqu’il faut
s’entendre sur la façon de le calculer, la période à considérer, les bases de comparaison, etc. Lors de
nos prochaines expérimentations, nous tenterons donc d’identifier une méthode qui permette de
calculer équitablement la répartition des revenus de manière à garantir la profitabilité aux deux joueurs.
4.2. Regard sur le cas industriel
Il est intéressant de comparer les différents résultats dégagés de notre étude avec ce qui se passe
réellement dans le cas industriel. En fait, l’entreprise fournisseur a au départ établi une relation de
collaboration avec son client, basée sur le réapprovisionnement régulier. Le fournisseur espérait ainsi
créer un climat de confiance avec son client et établir la base d’une relation plus étroite à plus long
terme. Une fois la confiance bien établie et après plusieurs mois d’interaction, les partenaires se sont
peu à peu orientés vers le CPFR. Ils ont alors échangé de l’information privilégiée et le partenariat est
devenu davantage une collaboration. Cependant, il est intéressant de voir que, d’après nos résultats, le
client ne tirera pas le profit maximum avec cette nouvelle forme de collaboration. En effet, puisque le
client avait au départ une flexibilité totale dans un contexte de demande variable, une relation basée sur
le réapprovisionnement régulier lui permettait d’obtenir un profit maximum, ce qui n’était toutefois pas
le cas du fournisseur. Pour une relation davantage orientée vers le CPFR, le fournisseur aura donc
avantage à en faire profiter son client à plus long terme, via par exemple un partage des économies.
Autrement, comme nous l’avons souligné dans notre étude, le client risque de se tourner peu à peu vers
quelqu’un d’autre afin d’obtenir le maximum de bénéfices.
5. CONCLUSION
Dans cet article, nous avons cherché à étudier différentes approches de collaboration pour le cas d’un
fournisseur et de son client du secteur des pâtes et papiers. Pour ce faire, nous avons d’abord élaboré
sept modèles décisionnels du point de vue du client et du point de vue du fournisseur, basés sur le
MTO, le réapprovisionnement régulier, le VMI et le CPFR. À l’aide d’AMPL Studio et du solveur
Cplex, nous avons ensuite procédé à des expérimentations en étudiant divers scénarios tels un prix du
marché supérieur ou égal au prix du fournisseur, un délai de livraison plus ou moins long et plusieurs
types de demande.
Les premiers tests réalisés ont montré que l’approche CPFR génère le profit maximum du système pour
la plupart des scénarios, avec des économies en termes de coûts de transport et de stockage. Le VMI
occupe la seconde place, encore une fois grâce à des gains importants au niveau du transport. Le
réapprovisionnement régulier et le MTO arrivent au dernier rang. Si on regarde ensuite le profit
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individuel de chaque joueur, on constate alors que c’est l’approche de réapprovisionnement régulier qui
génère le maximum de profit pour le client, alors que le CPFR génère le plus de bénéfices pour le
fournisseur. Dès qu’on limite la flexibilité du client pour la relation basée sur le réapprovisionnement
régulier, c’est-à-dire qu’on le restreint dans la modification du plan de commande, c’est cette fois le
MTO qui devient l’approche la plus profitable. Puisque aucun équilibre du système n’est alors possible,
c’est-à-dire qu’aucune approche ne génère simultanément le profit maximum pour chaque joueur, nous
avons étudié l’impact de l’ajout d’un incitatif financier dans le système. Nous avons ainsi constaté qu’il
est possible de créer un équilibre pour l’approche CPFR si le fournisseur partage une partie des gains
en transport ou encore les gains de stockage avec son client. De cette manière, aucun des deux joueurs
n’a intérêt à adhérer à une autre approche de collaboration puisque le CPFR génère le profit maximum
pour chacun.
Lors de nos prochaines recherches, nous tenterons de déterminer comment développer l’incitatif
financier de manière à assurer une profitabilité pour tous les joueurs et la pérennité de la relation de
collaboration. Nous serons ainsi en mesure de proposer un cadre d’échange entre deux entreprises
bénéfique, même dans un contexte relativement complexe avec demande variable et contraintes
opérationnelles importantes.
6. RÉFÉRENCES
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Vers une approche collaborative profitable pour tous les joueurs : une application à l'industrie des pâtes et papiers
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... This method involves the communication of real-time, accurate and sometimes strategic information in order to realize global decisions for planning, forecasting and replenishment in the whole supply chain ( [6]). ...
... Dans le contexte forestier, Lehoux et al. (2007b) ont mis en évidence l'importance des approches de collaboration, comme le Collaborative Planning, Forecasting and Replenishment (CPFR) et le VMI, pour maximiser le profit de tous les intervenants. L'objectif de cette étude était de déterminer les approches les plus bénéfiques à utiliser entre un fournisseur et son client. ...
Conference Paper
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La gestion de la chaîne de valeur des produits forestiers est à la fois extrêmement importante et complexe, notamment en raison des opérations à réaliser et de l'interaction existant entre ses acteurs. Plusieurs enjeux critiques tels que la satisfaction des exigences des clients et la synchronisation entre l'offre et la demande nécessitent l'adoption de nouvelles approches de pilotage efficaces. Par conséquent, nous proposons dans cet article une méthodologie de mise en place du Vendor Managed Inventory (VMI) pour une chaîne de valeur forestière réelle. Cette méthodologie s'appuie sur l'évaluation de la performance de la nouvelle approche à mettre de l'avant, l'identification des acteurs impliqués, de leur rôle et de l'information qu'ils auront à échanger, de même que le développement d'un progiciel de gestion intégré qui guide la prise de décisions. Un tel outil permet par ailleurs de fournir des plans de récolte, de transport, de production et de stockage pour les entreprises forestières de la chaine à l'étude, tout en valorisant la gestion de la fraicheur de la fibre. Abstract-Supply chain management for forest products is both extremely important and complex, particularly because of operations to be performed and interactions between stakeholders.. Many critical issues such as customer requirement satisfaction and supply-demand synchronization require the implementation of effective planning approaches. In this article, we propose a methodology for the establishment of the VMI approach in regional forest products supply chain. This methodology relies on the performance assessment of the new approach, the design of conceptual models, and the development of a technological tool supporting collaborative planning. Such a tool can also provide harvest plans, transportation, production and storage for logging companies in the chain to the study, while enhancing the management of the freshness of the fiber. Mots clés – Chaîne de valeur forestière, Collaboration interentreprises, VMI, Planification.
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This paper is aimed at developing and testing a methodology to evaluate the most appropriate collaboration level within a given supply chain. In particular, the proposed methodology is conceived for logistic networks belonging to the consumer packaged goods industry, e.g. the grocery industry, and it consists of: (i) identifying an approximation of collaboration, (ii) representing through such approximation the different options among collaborative planning forecasting and replenishment (CPFR), vendor management inventory (VMI) and loosely collaborative approach (LCA); (iii) using a simulation-based decision support system to select the best collaboration level. The proposed methodology has been applied to a real-life supply chain in the food and beverage industry. Results conclude that the methodology proposed here proved useful in facing the problem of collaboration level definition among the nodes of a consumer packaged goods logistic network.
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Purpose – The purpose of this paper is to review the fundamental concept of collaborative supply chain (CSC) and discuss the facts that a road to success in the process of design, implementation and operations of a supply chain is the identification of superior strategies and clear objectives. One of these strategies is known as CSC, that needs to be studied, evaluated and implemented. Design/methodology/approach – Discusses key elements of CSC and the fact that the vision for the CSC can be built upon principles as such as automation, information, trust and commitment, quality leadership, customer focused, collaborative and e-collaborative partnerships, and integrated information system. Findings – The paper finds that to make supply chain management successful, management must be committed to high standard of performance, trust including long-term collaborative relationships that can deliver results independent of industry and sector type. Originality/value – Owing to the fact that a better management of production system is related to the full understanding of the technologies implemented and the system under consideration, the CSC and its related components are discussed.
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With the current economic context, enterprises aim to improve collaboration and enhance information exchange with their suppliers or customers in order to better coordinate their activities and respond promptly to their customer. A demonstration of this trend is the development of formal collaboration models like Vendor Managed Inventory (VMI) or Collaborative Planning, Forecasting and Replenishment (CPFR) which are now used to facilitate product and information exchange between partners. However, the setup of efficient inter-firm collaborations requires time and investment with no guarantee of success or failure of the relationship. Although many of the emerging approaches are promising, the need to identify and apply the best collaboration model for the context considered remains. In this paper, we study different collaboration strategies between a producer and a retailer in the pulp and paper industry. For this industrial context, we define a methodology to analyze and compare the impact of collaboration modes on the network profit. Using a rolling horizon of two weeks and a total planning period of one year, we also proceed with numerical experiments. Our tests reveal that the CPFR method is the more gainful collaboration approach for the case studied providing up to 18% of transportation costs reduction over order-based relation.
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(This article originally appeared in Management Science, April 1997, Volume 43, Number 4, pp. 546--558, published by The Institute of Management Sciences.) Consider a series of companies in a supply chain, each of whom orders from its immediate upstream member. In this setting, inbound orders from a downstream member serve as a valuable informational input to upstream production and inventory decisions. This paper claims that the information transferred in the form of ÜordersÝ tends to be distorted and can misguide upstream members in their inventory and production decisions. In particular, the variance of orders may be larger than that of sales, and distortion tends to increase as one moves upstreamÔa phenomenon termed Übullwhip effect.Ý This paper analyzes four sources of the bullwhip effect: demand signal processing, rationing game, order batching, and price variations. Actions that can be taken to mitigate the detrimental impact of this distortion are also discussed.
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Consider a supply chain consisting of two independent agents, a supplier (e.g., a manufacturer) and its customer (e.g., a retailer), the latter in turn serving an uncertain market demand. To reconcile manufacturing/procurement time lags with a need for timely response to the market, such supply chains often must commit resources to production quantities based on forecasted rather than realized demand. The customer typically provides a planning forecast of its intended purchase, which does not entail commitment. Benefiting from overproduction while not bearing the immediate costs, the customer has incentive to initially overforecast before eventually purchasing a lesser quantity. The supplier must in turn anticipate such behavior in its production quantity decision. This individually rational behavior results in an inefficient supply chain. This paper models the incentives of the two parties, identifying causes of inefficiency and suggesting remedies. Particular attention is given to the Quantity Flexibility (QF) contract, which couples the customer's commitment to purchase no less than a certain percentage below the forecast with the supplier's guarantee to deliver up to a certain percentage above. Under certain conditions, this method can allocate the costs of market demand uncertainty so as to lead the individually motivated supplier and customer to the systemwide optimal outcome. We characterize the implications of QF contracts for the behavior and performance of both parties, and the supply chain as a whole.
Article
This chapter discusses the information pertaining to the downstream part of the supply chain and then reviews the upstream information. The chapter discusses the papers that investigate the consequences of imperfect transmission of information. All the papers adopt the perspective of a central planner whose goal is to optimize the performance of the entire supply chain. The chapter addresses the incentive issues in information sharing. Supply chains are composed of independent firms with private information. Information sharing in supply chains with independent players is tricky. When a player has superior information, two things may happen. He may withhold it to gain strategic advantage or he may reveal it to gain cooperation from others. If the former, the less informed players try to provide incentives for him to reveal his private information, then it is termed “screening.”
Article
Supply chain integration (or synchronisation) is to a large extent still only a promise, despite many considerable efforts by organisations and their customers and suppliers. Lack of visibility of true consumer demand and collaborative relationships based upon joint decision making remain significant barriers to the goal of supply chain integration. Collaborative planning, forecasting and replenishment (CPFR) is a strategy which promises to overcome these barriers, and seeks through joint planning, joint decision making and the development of a clearer understanding of the dynamics of the supply chain replenishment process to deliver some of the promised benefits of actual supply chain integration. Despite the existence of a detailed and comprehensive process model, and promising initial results there has not been widespread adoption of CPFR, justifying the need to revisit the process model and to further explore the inhibitors and enablers. Based upon a review of the existing literature and a comprehensive survey of participants in existing CPFR implementations, this paper identifies the critical inhibitors and makes some proposals as to how these inhibitors may be overcome.